• Mckay 100 ans après
    https://www.mckay100ans.com

    100 ans après son séjour en France (1923-1928), l’œuvre et la pensée de Claude McKay reviennent en force :

    Artistes, éditeurs, producteurs, réalisateurs et universitaires s’allient pour faire ressurgir cette voix centenaire d’une éclatante modernité.

    Précurseur de la Harlem Renaissance et du mouvement de la Négritude, c’est à Marseille que le poète jamaïcain trouva son inspiration romanesque et devint l’un des pères de l’éveil de la conscience Noire. Editions inédites, film, spectacle, actions culturelles innovantes, lectures musicales, conférences et colloques… Le mouvement s’attèle à la valorisation de l’œuvre de l’auteur et à la production de créations qui font résonner sa pensée aujourd’hui.

    Biographie et liens
    https://en.m.wikipedia.org/wiki/Claude_McKay

    https://www.marxists.org/archive/mckay/index.htm

    Banjo, a story without a plot
    https://archive.org/details/banjostorywitho00mcka/page/n3/mode/1up

    Le roman Romance in Marseille n’a pas encore été publié en ligne. Il y a une version Kindle payante alors que le texte original est libre de droits.

    #Claude_McKay #Marseille #littérature #bordel

  • Invitation au voyage - Claude McKay à Marseille / Jamaïque / Valladolid
    https://www.arte.tv/fr/videos/115571-052-A/invitation-au-voyage

    Marseille, bordel merveilleux de Claude McKay
    Claude McKay, écrivain précurseur du siècle dernier, a fait à Marseille une déclaration d’amour comme un uppercut. Quand il débarque dans la ville en 1924, le Jamaïcain est déjà un poète reconnu aux États-Unis. Considéré comme l’un des inspirateurs de la Négritude, Claude McKay est aussi un libre-penseur. Le poète vagabond échoue à Marseille, malade et en quête de repos. Il se laisse bien vite embarquer dans l’atmosphère bouillonnante de ce port et en tire deux romans : Romance in Marseille, sorti de l’oubli et publié en 2020, et Banjo, un roman social et jazzy à la modernité détonante.

    #Claude_McKay #Marseille #littérature #bordel

  • Lecture d’un extrait du livre « À quoi songent-ils, ceux que le sommeil fuit ? » de Gaëlle Josse, paru aux Éditions Noir sur blanc, collection Notabilia, 2024.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/a-quoi-songent-ils-ceux-que-le-sommeil-fuit-de-gaelle-josse

    Dans la nuit, des silhouettes évasives. Des femmes, des hommes, des enfants, se croisent, s’évitent, se perdent. Ils espèrent, ils attendent dans la nuit, la fin de la nuit. Ils s’aiment, se séparent, se retrouvent. Sous les draps d’un lit, dans une chambre d’hôtel, dans une salle de concert, un hôpital, un aéroport, ou au hasard des rues. Derrière les vitres de la fenêtre de leur appartement, ils observent la ville, le regard distrait. Points de départ, rendez-vous ratés, enlacements et séparations. « La nuit des abandons, la nuit des corps qui jouissent et des corps qui désirent. »

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Sensation, #Art, #Littérature, #Édition, #Récit, #Nuit, #Notabilia (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_a_quoi_songent-ils_gae_lle_josse.mp4

    https://www.leseditionsnoirsurblanc.fr/catalogue/a-quoi-songent-ils-ceux-que-le-sommeil-fuit

  • Ordonnances littéraires
    https://laviedesidees.fr/Feuillebois-Mangeon-Fictions-pansantes

    La lecture de certaines œuvres peut-elle nous aider à faire face aux difficultés de la vie ? La bibliothérapie, savoir ancien remis à l’honneur par l’essor des pratiques de développement personnel, nous invite à mettre en question le rôle que nos sociétés attribuent la #littérature. À propos de : V. Feuillebois et A. Mangeon, dir., Fictions pansantes. Bibliothérapies d’hier, d’aujourd’hui et d’ailleurs, Hermann

    #Arts #Double_Une
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240307_bibliotherapie_mm.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240307_bibliotherapie_mm.pdf

  • La littérature pour penser le monde
    https://laviedesidees.fr/Messling-universel-apres-universalisme

    La #littérature offre une perspective singulière afin d’envisager l’universel à l’époque contemporaine : elle en restitue la complexité par le prisme d’expériences personnelles et sensibles qui éclairent les enjeux collectifs et futurs de l’universel au cœur d’un monde en pleine mutation. À propos de : Markus Messling, L’universel après l’universalisme : des littératures francophones du contemporain, Puf

    #Arts #universalisme #francophonie
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240307_universel.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240307_universel.pdf

  • Mélanger la vie propre des images et le cours des mots

    « Prendre des photographies est une responsabilité ; écrire sur elles tout autant. La pellicule, les pixels capturent un fragment de temps et d’espace, prélevé quelque part dans le monde. De nombreuses théories expliquent à quel point l’image est un signe, sa composition subjective, son contenu sujet à interprétation. Elles sont toutes exactes. Mais elles tendent à oublier que la photographie s’appuie d’abord sur de la vie : les traces de la lumière qui ricoche, ruisselle, frappe ou nimbe des objets, des visages, des vêtements ou des paysages, offrant une forme à ce qu’elle dessine. Que ce qu’elle montre n’est pas seulement une construction intellectuelle, une vue de l’esprit, mais la trace chimique d’une réalité qui fut, qui fut vraiment – et c’est peut-être pour cette raison qu’elle nous fait battre le cœur » Hélène Gestern

    note sur : Laure Samama. La maison sans toit. Hélène Gestern

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/03/melanger-la-vie-propre-des-images-et-le-cours-

    #photo #littérature

  • Lecture d’un extrait du livre « Sous la menace » de Vincent Almendros, paru aux Éditions de Minuit, en 2024.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/sous-la-menace-de-vincent-almendros

    Quentin, un adolescent obsédé par la mort de son père, disparu six ans plus tôt dans un mystérieux accident, accompagne sa mère et sa cousine de 11 ans, Chloé, chez ses grands-parents où il passe un week-end tendu et pesant. Exclu de son collège pour violence, mal dans sa peau, voyant son corps se transformer à cause de la puberté, le jeune garçon a l’impression de « devenir un monstre. » Dans cette réunion de famille qui paraît anodine, entre une mère tout le temps sur son dos, un grand-père amnésique, une grand-mère enfermée dans ses souvenirs et la petite Chloé que l’adolescent malmène, les tensions et les non-dits se révèlent peu à peu. La violence sourde et inquiétante de ce huis clos nous maintient sous la menace des secrets et des failles de cette famille.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Sensation, #Art, #Littérature, #Édition, #Parfums, #odeurs, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_sous_la_menace_vincent_almendros.mp4

    https://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-Sous_la_menace-3422-1-1-0-1.html

  • « De la Vendée à l’écriture »
    http://anarlivres.free.fr/pages/nouveau.html#expoRagon

    A l’occasion du centenaire de la naissance de Michel Ragon (1924-2020), le département de Vendée propose jusqu’au 5 avril une exposition (https://www.calameo.com/read/0021009784bb3fb7bec2) qui lui est consacré à l’hôtel du département, à La Roche-sur-Yon. Si l’aspect vendéen du romancier est privilégié, ses autres facettes ne semblent pas avoir été oubliées : l’écrivain prolétarien, le libertaire, le critique d’art et le spécialiste de l’architecture...

    #Ragon #expo #libertaire #littérature #architecture #art

  • Lecture d’un extrait du livre « L’appel des odeurs, » de Ryōko Sekiguchi, paru aux Éditions P.O.L., en 2024.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/l-appel-des-odeurs-de-ry%C5%8Dko-sekiguchi

    La narratrice a une forme d’addiction pour les odeurs, elle les consigne depuis sa jeunesse dans un carnet, recopiant des extraits d’ouvrages ou des phrases entendues sur ce sujet, notant ses sensations sur les effluves, les émanations et les parfums tout autour d’elle, dans les jardins comme que dans les musées, dans les cuisines et les bibliothèques. Ses notes se transforment peu à peu en récits, au point où de se demander si elle n’invente pas toutes ces histoires. « Lorsqu’on dit sentir une présence, que sent-on en réalité ? » Les odeurs sont les personnages centraux du livre, dotées d’une présence, d’un langage. Elles se développent à travers différents lieux et des époques variées.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Sensation, #Art, #Littérature, #Édition, #Parfums, #odeurs, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_l_appel_des_odeurs_ryoko_sekiguchi.mp4

    https://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-8180-6011-7

  • « #Anatomie_d’une_chute » et la question de l’#interprétation du #récit

    « Vous ne contextualisez pas, vous délirez sur un détail ! »
    « Un roman n’est pas la vie, un auteur n’est pas un personnage ! »
    « Mais un auteur peut exprimer ses idées par ses personnages ! »

    Des bribes d’un cours de licence de lettres ? Des débats lors d’un colloque littéraire ? Non ! Il s’agit de certains échanges entre les personnages du film Anatomie d’une chute de Justine Triet, palme d’or du dernier Festival de Cannes, qui met en scène le procès de l’écrivaine Sandra Voyter, accusée d’avoir tué son mari Samuel.

    On pourrait penser que ces échanges sont irréalistes. Mais la littérature s’invite parfois dans des procès bien réels : dans Histoire de la violence, Edouard Louis relate, de manière autobiographique, un épisode traumatique (une agression physique et un viol). Lors du procès, son avocat a renvoyé, dans sa plaidoirie, au récit de l’écrivain, alors que l’avocate de l’accusé a déclaré qu’Edouard Louis « avait confondu son roman avec la réalité ». La procureure elle, a appelé à trouver une « vérité judiciaire » et non « littéraire ».

    La manière dont le film de Justine Triet traite la question du couple, du genre, de l’innocence et de la culpabilité a été abondamment commentée. Mais une autre question irrigue le film : celle de l’interprétation du récit littéraire (les deux protagonistes du couple étant, l’une écrivaine à succès, l’autre aspirant écrivain), notamment lorsque ce récit joue sur certaines marges troubles, entre fiction et non-fiction, représentation artistique et fidélité mimétique au réel et lorsqu’il se confronte à d’autres récits, qui ont leurs propres critères de cohérence, de validité, de recevabilité : le récit juridique, mais aussi le récit journalistique, le récit psychanalytique, le récit médical, le récit d’expert, etc.

    Chaque catégorie peut par ailleurs se décliner en une multitude de récits : les récits des avocats comme ceux des experts peuvent être diamétralement opposés, par exemple. Le passage d’une langue à l’autre dans le film – de l’anglais au français et vice-versa – nous fait d’ailleurs littéralement entendre cette polyphonie.

    L’autofiction, ou l’art de brouiller les limites entre fiction et réalité

    « What do you want to know ? » (« Que voulez-vous savoir ? ») demande, au tout début du film, Sandra à l’étudiante venue l’interroger. Elle veut savoir ce qui relève de la réalité et de la fiction dans les écrits de Sandra Voyter, et si l’écrivaine pense qu’on ne peut inventer, créer, qu’à partir de la réalité. Or la production littéraire de Sandra se situe dans un genre qu’on peut appeler l’autofiction.

    Le terme a été employé pour la première fois en 1977 par l’écrivain et critique Serge Doubrovsky (pour qualifier son récit, Fils). Il mêle ce qu’on pourrait croire a priori opposé : l’autobiographie et la fiction. L’autofiction est en effet un récit inspiré par la vie de l’autrice ou de l’auteur du récit, mais un récit qui se permet de romancer, d’imaginer, qui ne veut pas se plier aux critères de sincérité, d’authenticité, de conformité aux faits qu’on associe souvent à l’autobiographie traditionnelle (et au « pacte autobiographique » tel qu’il a été défini par Philippe Lejeune).

    Le terme autofiction a donné lieu à de multiples définitions et à de multiples critiques, comme l’a montré le chercheur Philippe Gasparini. Il n’est notamment pas aisé de le distinguer du roman autobiographique comme l’a résumé Sylvie Jouanny, on peut distinguer deux tendances : l’une, référentielle, qui repose sur l’homonymie entre narrateur/narratrice, auteur/autrice et personnage et qui considère que « l’autofiction est un roman qui traite de la réalité, fût-ce dans le recours à la fiction », l’autre, fictionnelle, qui défend « la fiction plus que l’autobiographie » et s’intéresse au travail de « fictionnalisation de soi » (cette fictionnalisation pouvant remettre en cause l’homonymie entre narrateur/narratrice, auteur/autrice et personnage).

    Dans Anatomie d’une chute, il est admis que Sandra Voyter écrit de l’autofiction en s’inspirant des éléments de sa vie (notamment l’accident de son fils, mais aussi ses relations avec son père). Lorsque l’étudiante, au début du film, essaie de distinguer ce qui est réel de ce qui est inventé, Sandra esquive et déplace le sujet de la conversation. Mais, tout au long du film, elle va devoir répondre aux questions de la police, de ses avocats, avant et pendant le procès.

    Elle va devoir parler d’elle, de ses livres, et chaque élément de son discours va être disséqué, chacun des mots prononcés (ou échappés, comme lorsque l’étudiante appelle l’accusée par son prénom durant le procès) va être analysé comme on pourrait le faire dans une explication de texte.
    « Alors, on va vraiment entrer dans un débat littéraire ? »

    C’est lorsqu’un des livres de Sandra est brandi au procès, malgré les protestations d’une des avocates de la défense (« On ne juge pas des livres, on juge des faits ») qu’on se retrouve au cœur de questions débattues dans le monde de la recherche et de la critique littéraires.

    Reprenons les échanges entre l’accusation et la défense et la manière dont ces débats incarnent différentes manières de lire l’œuvre littéraire.

    Les questions posées sont fondamentales dès qu’il s’agit d’interpréter une œuvre littéraire : qui parle ? (le personnage ou l’auteur/l’autrice ?) Peut-on comprendre le sens d’un extrait (d’un livre ou d’un enregistrement – celui de la dispute du couple –) sans le mettre en rapport avec un contexte plus large ? Qui décide du sens d’un texte (la personne qui produit le discours ? Celle qui le reçoit ?)

    L’accusation veut lire l’extrait d’un livre de Sandra Voyter, qui raconte les pensées d’un personnage qui éprouve le désir de tuer. L’accusation établit clairement un lien mimétique entre ce passage et la mort de Samuel : Sandra aurait préfiguré dans son roman son désir de tuer.

    Pour la défense, c’est inacceptable : « Vous ne contextualisez pas ! Vous délirez sur un détail » ! L’extrait n’est pas contextualisé, il ne s’agit que d’un personnage secondaire, qui d’ailleurs ne passe pas à l’acte. Même dans le régime du texte littéraire, il ne s’agit que d’un fantasme, pas d’un fait. La défense reproche à l’accusation de surinterpréter en faisant d’un passage secondaire le cœur du livre – ce à quoi l’accusation répond que la défense avait également relevé ce passage, ce qui voudrait dire qu’elle le considérait bien comme significatif.

    La défense insiste : il faut distinguer l’autrice du personnage. Le point de vue du personnage n’engage pas l’autrice. Il existe une différence entre le monde de la fiction (du personnage) et celui de la réalité (de l’autrice).

    L’accusation se justifie alors sur ce dernier point : « Les livres de Sandra Voyter font partie du procès, elle y met son existence, notamment son couple ». Les livres de l’accusée appartiennent au récit de soi, d’inspiration autobiographique, on peut donc faire cette adéquation entre personnage et autrice puisqu’il ne s’agit pas de fiction.

    Pour la défense, il ne s’agit pas d’autobiographie, mais d’autofiction, un genre qui se permet de réintroduire de la fiction dans l’écriture de soi. La défense essaie de ridiculiser la lecture de la littérature comme mimétique de la réalité (« Vous allez nous dire que Stephen King est un serial killer ? »), l’accusation la justifie (« La femme de Stephen King n’a pas été retrouvée morte ! »)
    La littérature ou le jeu avec les limites

    Par rapport au trouble suscité par le récit littéraire, l’enregistrement de la dispute entre Sandra et son mari semble pouvoir constituer un récit fiable. Mais en réalité cette dispute se révèle être, comme le dit l’avocat de la défense, un « document ambigu » tout aussi ambigu que le texte de Sandra Voyter, pour deux raisons.

    D’une part, comme le texte cité par l’accusation, l’enregistrement n’est qu’un extrait, qu’un moment de la relation entre deux personnes et ne peut représenter toute leur vie. Sandra Voyter le dit : l’enregistrement n’est pas la réalité, car il n’est qu’une partie de la réalité – tout comme elle dit au psychanalyste, joué par le metteur en scène Wajdi Mouawad, qui rapporte le récit de ses sessions avec Samuel : « Mais ce que vous dites n’est qu’une petite partie de la situation globale ». Il s’agit bien de leurs échanges, de leurs mots, de leurs voix, mais ce n’est pas eux – tous leurs êtres, la somme de leurs échanges, de leurs interactions, de leurs corps : on ne peut jamais saisir l’entièreté d’un être ni d’une relation.

    D’autre part, alors qu’on croit a priori, avec cet enregistrement, être à coup sûr dans le domaine de la réalité, des faits (et non de la fiction et de la représentation) on apprend, via l’avocat de la défense, que Samuel enregistrait des moments de sa vie et les retranscrivait, qu’il cherchait à faire de « l’autofiction » (le mot est prononcé) en s’inspirant de la méthode de son épouse. On pense ici à différentes productions de littérature contemporaine qui donnent une part de plus en plus importante à des documents matériels : Annie Ernaux, qui retranscrit son journal intime (dans Se perdre ou Je ne suis pas sortie de ma nuit), qui introduit des reproductions de photographies dans ses livres (tout comme Édouard Louis), Neige Sinno qui reproduit dans Triste Tigre les articles de presse parlant de son enfance et de l’arrestation de son beau-père pour viol.

    On pense plus généralement aux productions, qui se développent depuis les années 1960, que la chercheuse Marie-Jeanne Zenetti appelle, après l’écrivain Magnus Enzensberger, des factographies. Les factographies cherchent une nouvelle manière de dire le réel en captant des images, des sons, des discours. Elles peuvent se manifester formellement par des compilations de notes, des retranscriptions, des reproductions d’archives. Dans ces récits à l’« écriture enregistreuse », il s’agit de « jouer au document et avec le document » comme le dit Marie-Jeanne Zenetti.

    L’enregistrement fait par Samuel Voyter n’est-il pas aussi un objet littéraire ? La défense se demande ainsi si Samuel n’aurait pas provoqué la dispute pour avoir de la matière pour son livre. L’ordre traditionnel (la littérature qui vient après la vie, retranscrit la vie, représente la vie) est inversé : il y aurait d’abord la littérature (l’envie d’écrire, la mise en scène) et ensuite la vie. On retrouve les propos tenus par Sandra Voyter dans un ancien entretien : « Mon travail, c’est de brouiller les pistes pour que la fiction détruise le réel » et le commentaire des journalistes : « On a l’impression que ça vient de ses livres, qu’elle l’a déjà écrit ».

    Dernier récit et dernier doute du film : lorsque l’enfant du couple, Daniel, fait le récit de son trajet avec son père, pour emmener leur chien chez le vétérinaire. Il rapporte les propos de Samuel, qui aurait filé une métaphore entre l’état du chien et le sien, pour préparer son fils à sa mort prochaine. « Ce récit est extrêmement subjectif » déclare l’accusation. S’agit-il d’une interprétation ? D’une invention ? Ou Daniel se met-il lui aussi à pratiquer l’autofiction ?
    Anatomie d’une chute ou les mises en abyme du récit

    En filmant le public du procès, la réalisatrice met en abyme notre situation de spectatrices et spectateurs : nous regardons le public qui regarde le procès, ce public qui frémit à l’annonce d’un éventuel rebondissement – tout comme nous. Le film nous renvoie à nos attentes et nos projections sur le type de récit que nous avons envie de voir (ou d’entendre, ou de lire…)

    Ainsi, dans une émission de débat télévisé de deuxième partie de soirée représentée dans le film – sur laquelle tombe Sandra Voyter en zappant – la question de sa culpabilité ou de son innocence n’est plus liée aux faits, mais, plus cyniquement (ou d’un point de vue plus littéraire ?) à l’intérêt de l’un ou l’autre récit : « L’idée d’une écrivaine qui assassine son mari est tellement plus intéressante que celle d’un prof qui se suicide ».

    D’un côté, les émois potentiellement romanesques du couple, le lien dangereux entre fiction et non-fiction, de l’autre la mort banale d’un homme qui a échoué en tant qu’écrivain. La conclusion judiciaire du procès a l’air d’entériner le second récit (le suicide), puisque Sandra est acquittée, mais c’est bien le premier récit (la femme coupable) qui est interrogé et mis en scène. Parce que c’est ce que le public (le public du procès, le public du film) voulait voir ?

    « Je crois qu’il y a eu trop de mots dans ce procès et j’ai plus rien à dire », déclare Sandra Voyter aux journalistes à la sortie du tribunal. De fait, on parle beaucoup dans Anatomie d’une chute (nous avons pu commenter le film dans cet article en ne parlant quasiment que de dialogue verbal, sans mentionner les autres manifestations du langage cinématographique !) – jusqu’au silence final de Sandra : la multitude des récits n’aboutit pas à une vérité proclamée, mais à l’indicible, à l’invérifiable, à l’opacité (ce qui est devenu quasiment un topos romanesque). Se refuser à toute conclusion rassurante, est-ce une déconstruction du récit traditionnel… ou une variation sur un type de récit dont nous avons déjà l’habitude, un récit ouvert, un récit réflexif, un récit qui joue sur la mise en abyme de lui-même, bref le récit d’un film littéraire ?

    https://theconversation.com/anatomie-dune-chute-et-la-question-de-linterpretation-du-recit-2158

    #procès #justice #littérature #vérité #fiction #non-fiction #cohérence #validité #recevabilité #récit_juridique #polyphonie #réalité #autofiction #Serge_Doubrovsky #factographies

  • Der hessische Landbote - Le messager de Hesse (1834), Georg Büchner, Éditions Pontcerq, 2011
    http://i2d.toile-libre.org/PDF/2008/i2d_Messager_Hesse.pdf

    Présentation : https://www.pontcerq.fr/livres/le-messager-de-hesse

    Premier message

    Darmstadt, juillet 1834

    Avant-propos

    Cette feuille doit révéler la vérité au land de Hesse, mais qui dit la vérité est gehenkt-pendu, et même celui qui lit la vérité sera peut-être châtié par des juges parjures. C’est pourquoi ceux à qui cette feuille parvient devront observer ce qui suit :

    1. Il leur faut conserver soigneusement la feuille hors de leur maison, à l’abri de la police ;

    2. ils ne doivent la faire connaître qu’aux amis de confiance ;

    3. à ceux en qui ils n’ont pas confiance comme en eux- mêmes, ils ne la doivent déposer qu’en secret ;

    4. si la feuille était cependant trouvée chez un qui l’aurait lue, il faut que celui-ci avoue avoir justement voulu la porter au kreisrat ;

    5. celui qui n’a pas lu la feuille, si on la trouve chez lui, est naturellement hors de faute.

    Paix aux chaumières ! Guerre aux palais !

    En l’an 1834 c’est comme si c’était la Bible qu’on convainquait de mensonges. C’est comme si Gott avait créé les paysans et les artisans le cinquième jour et les princes et les vornehms le sixième, et comme si le Seigneur avait dit à ceux-ci : « Régnez sur tous les bestiaux qui rampent sur terre », et qu’il avait compté les paysans et bürger au nombre de la gewürm-vermine. La vie des vornehms est un long dimanche, ils habitent dans de belles maisons, ils portent de gracieux vêtements, ils ont des visages replets et parlent un langage qui leur est propre ; mais le volk est couché devant eux comme le fumier sur le champ. Le paysan marche derrière la charrue ; le vornehm marche derrière lui et la charrue, et le pousse à la charrue avec les bœufs, il prend le grain et lui laisse l’éteule. La vie du paysan est un long jour de travail ; des étrangers se nourrissent de ses champs devant ses yeux, son corps-leib est un cal, sa sueur est le sel sur la table des vornehms.

    Dans le grand-duché de Hesse on compte 718 373 habitants, ils donnent au Staat, par an, 6 363 364 florins, en :

    1. impôts directs ..........................................2 128 131 fl.
    2. impôts indirects ......................................2 478 264 fl.
    3. domaines ................................................1 547 394 fl.
    4. droits régaliens ..............................................46 938 fl.
    5. amendes........................................................98 511 fl.
    6. diverses sources ............................................64 198 fl.
    ....................................................................6 363 436 fl. 6

    Cet argent est la dîme de blut, qui est pris sur le corps-leib du volk. Environ 700 000 personnes suent, gémissent et souffrent de faim pour cela. On extorque au nom du Staat, les extorqueurs en appellent au gouvernement et le gouvernement dit que cela est nécessaire pour maintenir l’ordre dans le Staat. Mais quelle chose énorme-gewaltig est-ce donc que cela : le Staat ? Quand un certain nombre de gens habitent dans un pays et qu’il y a des ordonnances ou des lois, auxquelles chacun doit se conformer, on dit qu’ils forment un Staat. Le Staat, c’est donc tous ; les instances qui créent l’ordre dans le Staat sont les lois par lesquelles le bien-être de tous est assuré et qui doivent provenir du bien-être de tous. — Voyez maintenant ce que, dans le grand-duché, on a fait du Staat ; voyez ce que cela veut dire, maintenir l’ordre dans le Staat ! 700 000 personnes paient six millions pour cela, c’est-à-dire qu’on fait d’eux des chevaux de trait, du bétail de charrue, afin qu’ils vivent dans l’ordre. Vivre dans l’ordre, cela veut dire souffrir de faim et être équarri.

    Qui sont-ils donc ceux qui ont fait cet ordre et qui veillent pour que cet ordre se maintienne ? C’est le gouvernement grand-ducal. Le gouvernement est constitué par le grand-duc et par ses plus hauts fonctionnaires. Les autres fonctionnaires sont des hommes qui sont appelés par le gouvernement pour maintenir en vigueur cet ordre. Leur nombre est légion : conseillers de Staat, conseillers gouvernementaux, conseillers du land, conseillers de landkreis, conseillers aux affaires religieuses et conseillers aux affaires scolaires, conseillers financiers et conseillers forestiers, etc., avec toute leur armée de secrétaires, etc. Le volk est leur troupeau, ils sont ses bergers, les auteurs de la traite et de l’équarrissage, ils se vêtissent de la peau des paysans, le butin pris sur les pauvres est dans leur maison, les tränen-larmes des veuves et orphelins sont la graisse étalée sur leurs visages ; ils règnent librement et exhortent le volk à la servitude. À ceux-là, vous donnez six millions de florins en redevances ; pour cette somme ils ont la charge de vous gouverner ; c’est-à-dire de se laisser engraisser par vous et de vous voler vos droits d’hommes et de bürger. Voyez ce qu’est la récolte de votre sueur.

    Merci @klaus de m’avoir fait penser à ce texte que je n’ai connu que tardivement et dont je (re)découvre que la traduction publiée chez Poncerq a fait l’objet d’une publication en ligne. Enjoy ! et, pourquoi pas ? #toctoc

    https://seenthis.net/messages/210230

    #Allemagne #révolution #littérature #Georg_Büchner #Livre_en_ligne

  • La poésie, une arme de combat

    La tradition bousculée pour ouvrir la porte à la modernité et à l’imagination

    Louise Glück : L’iris sauvage, Meadowlands, Averno
    Etel Adnan : Je suis un volcan criblé de météores, Poésies 1947-1997
    Yves Michaud : Etel Adnan. Les anges, le brouillard, le palais de la nuit

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/01/28/la-poesie-une-arme-de-combat

    #littérature #poésie

  • Lecture d’un extrait du livre « Transformation de la condition humaine dans toutes les branches de l’activité » de Frédéric Forte, paru aux Éditions P.O.L., en 2023.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/transformation-de-la-condition-humaine-dans-toutes-les-branches-de-l-activ

    Dans ce livre, Frédéric Forte, membre de l’Oulipo, tente de donner un ordre lisible aux textes écrits dans cette forme de 99 notes préparatoires que l’auteur a inventé et qu’il produit depuis une dizaine d’années, des poèmes-essais explorant avec humour et sagacité, les potentialités d’un sujet par un jeu polyphonique, selon différents registres, à la fois sérieux et décalés. « Ce qui se rapproche le plus, en poésie, de la pensée. » Ces notes aux formes très variées se font écho, développant des motifs récurrents, s’entremêlant et se répondant à distance, produisant ainsi dans leur succession accélérée des effets de sens, poétique, narratif, réflexif.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Enfance, #Art, #Littérature, #Édition, #OULIPO, #jeu, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_transformation_dans_la_condition_humaine_fre_de_ric_forte.mp4

    https://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-8180-5836-7

  • Lecture d’un extrait du livre « Les fleurs sauvages » de Célia Houdart, paru aux Éditions P.O.L., en 2024.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/les-fleurs-sauvages-de-celia-houdart

    Ce livre croise les destins de plusieurs personnages d’une même famille. Au centre Milva, une adolescente dessine tout ce qui l’entoure. « Dans une ville tracée au cordeau, où toutes les rues se coupent à angle droit, c’est la seule à tracer des arabesques. » Son demi-frère Théo trempe dans des affaires plus ou moins louches. Depuis sa séparation avec Irène, la mère de Milva, Jacques vit seul avec sa fille. Il fréquente Louise, la mère de Sam, le meilleur ami de Milva. L’intrigue progresse d’un personnage à l’autre, comme autant d’esquisses du paysage, de part et d’autre des Alpes, entre Suisse et Provence, tissant entre eux un troublant réseau de correspondances faisant apparaître deux desseins qui s’opposent, entre violence et fragilité, que seul le regard qui révèle la complexité du monde parvient à réconcilier.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Nature, #Enfance, #Dessin, #Art, #Littérature, #Édition, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_les_fleurs_sauvages_ce_lia_houdart.mp4

    https://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-8180-5786-5

  • Dessins de hasard : Anima Sola #30
    Récit poétique à partir d’images créées par procuration.

    https://liminaire.fr/palimpseste/article/dessins-de-hasard

    La nuit est un long chemin qui serpente dans les sous-bois, quelques flaques d’eau forment des miroirs au sol. La brume épaissit à mesure qu’on avance. Le paysage se transforme lentement. Difficile de voir à quelques pas devant soi, parfois une lumière vacille au loin, tremblante à peine, cela ressemble à un signal secret, un repère dans la nuit, on pense s’approcher du but, à destination, mais c’est une illusion passagère, lumière chavire avant de basculer dans le noir. La nuit s’obscurcit toujours un peu plus. Bleu nuit sur fond noir....

    (...) #Écriture, #Langage, #Poésie, #Lecture, #Photographie, #Littérature, #Art, #AI, #IntelligenceArtificielle, #Dalle-e, #Récit, #Nature, #Nuit, #Paysage, #Lumière, (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/anima_sola_30.mp4

  • Exporter Zola
    https://laviedesidees.fr/Exporter-Zola

    Désireux de vivre de sa plume, Zola a vite compris l’importance du marché des traductions. La circulation de ses romans, mais aussi la publicité, le merchandising et les scandales ont permis d’exploiter largement son œuvre. Dans le monde entier, la « machine naturaliste » a tourné à plein régime.

    #Arts #littérature #commerce #histoire_sociale #réalisme #Entretiens_écrits
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/202312_zola.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/202312_zola-2.docx

  • La #censure_littéraire s’accentue aux États-Unis

    Quelque 3362 références de livres ont été interdites et retirées des établissements publics. Du jamais-vu en vingt ans.

    (#paywall, mais quelques titres ici :
    figurent « Tricks », d’Ellen Hopkins, ..., « L’œil le plus bleu », de la Prix Nobel Toni Morrison,..., le roman dystopique « 1984 », de George Orwell, « Les cerfs-volants de Kaboul », de Khaled Hosseini, ou encore « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur », de Harper Lee.
    https://tooting.ch/@Swiss_Pepita/111682913813083498)

    https://www.tdg.ch/phenomene-inquietant-la-censure-litteraire-s-accentue-aux-etats-unis-22109189427

    #censure #livres #USA #Etats-Unis #littérature #interdiction

    • Spineless Shelves. Two years of book banning

      A July 2021 to June 2023 Cumulative Data Summary

      The last two years have shown an undeniable and unprecedented attack on free expression in public education.

      As 2023 comes to a close, the following data summary examines the insidious trend of book banning in public schools over the last two academic years, drawing from data collected in PEN America’s Index of School Book Bans.
      Key Takeaways

      - The past two school years have demonstrated a mounting crisis of book bans. From July 2021 to June 2023, PEN America’s Index of School Book Bans recorded 5,894 instances of book bans across 41 states and 247 public school districts.
      - “Copycat bans” have emerged as a key component of the book ban movement, with a portion of titles removed seemingly because another district removed it elsewhere.
      - Relatedly, some authors have faced a “Scarlet Letter” effect, where several works from an author’s collection were subsequently targeted after at least one of their works was banned.
      - There has been a sustained focus on banning books written for young adults, especially when those books are about “difficult topics” – like violence and racism – or include historically marginalized identities – mainly, people of color and LGBTQ+ individuals.
      - Florida and Texas have continued to lead the country in number of bans, but the crisis has spread to 41 states.
      - A significant increase in the number of books “banned from classrooms and libraries” indicates that not only have there been more bans, but the bans themselves have been more comprehensive and potentially more permanent.


      https://pen.org/spineless-shelves

      via @freakonometrics

  • Lecture d’un extrait du livre « Hêtre pourpre » de Kim de l’Horizon, traduit de l’allemand (Suisse) par Rose Labourie, paru aux Éditions Julliard, en 2023.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/hetre-pourpre-de-kim-de-l-horizon

    Hêtre pourpre est un roman d’apprentissage qui mélange de manière tourbillonnante des formes et des récits divers, sur la vie sexuelle d’une jeune personne non binaire, une quête identitaire (de genre et de classe), ses souvenirs d’enfance, tout entremêlant l’histoire botanique du hêtre pourpre à celle des sorcières et de leurs combats. Roman qui joue avec les mots, les néologismes, l’inventivité de nappes successives de langues, de l’allemand au suisse-allemand, et leurs dialectes, en passant par l’anglais, en les imbriquant les unes aux autres pour se les approprier et nous les rendre audibles.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Langage, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Famille, #Mémoire, #Biographie, #Enfance, #Transition, #Littérature (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/he_tre_rouge_kim_de_l_horizon.mp4

    https://www.lisez.com/livre-grand-format/hetre-pourpre/9782260055938

  • « C’est la première fois de l’histoire qu’une IA remporte un prix littéraire »
    https://actualitte.com/article/114902/technologie/c-est-la-premiere-fois-de-l-histoire-qu-une-ia-remporte-un-prix-litterai

    En Chine, un professeur de journalisme a reçu le deuxième prix dans un concours d’écriture de science-fiction. Sauf que ce n’est pas sa création propre qu’il y avait présentée, mais celle d’une IA qu’il avait simplement aidé à écrire l’histoire.

    Publié le :

    27/12/2023 à 16:25

    Ugo Loumé

    3h de temps et 66 prompts choisis minutieusement. Voici la recette pour faire écrire à une intelligence artificielle une nouvelle de science-fiction capable de remporter un prix littéraire en Chine.

    Shen Yang, professeur de journalisme et de communication à l’Université Tsinghua de Pékin, est l’auteur de cette recette qui a débouché sur un récit de 6 000 caractères, Le pays des souvenirs.

    Aux confins du métavers, se trouve le « Pays des souvenirs », un royaume interdit où les humains sont bannis. Des illusions solides créées par des robots humanoïdes amnésiques et des IA ayant perdu la mémoire peuplent ce domaine. Tout intrus, qu’il soit humain ou artificiel, verra ses souvenirs effacés et sera à jamais piégé dans son étreinte interdite.

    Ainsi débute la nouvelle. Ensuite, c’est l’histoire de Li Xiao, une ancienne « ingénieure neuronale » qui a accidentellement perdu toute sa mémoire, et qui tente de la retrouver en explorant tranquillement ce fameux et effrayant « pays des souvenirs ».
    Une nouvelle kafkaïenne dans un monde kafkaïen

    Un récit qui se voulait « kafkaïen », référence, peut-être, à l’absurdité d’un tel endroit où les souvenirs s’évanouissent à peine le seuil en est franchi. L’exercice semble avoir convaincu, puisque la nouvelle a gagné le deuxième prix du concours de science fiction organisé par la Jiangsu Science Writers Association. La travail effectué par l’IA, qui a récolté 3 votes sur 6, concourait avec 17 autres histoires.

    Parmi le jury, un seul membre avait été informé du fait que le récit était le produit d’une intelligence artificielle. Un autre juge, qui a étudié en profondeur la création de contenu par IA, a déclaré avoir reconnu la plume d’un cerveau non-humain, et avoir d’emblée écarté ce récit qui n’était pas conforme aux règles du concours et « manquait d’émotion ».

    Shen Yang, de son côté, se réjouit : « C’est la première fois qu’une IA remporte un prix littéraire dans l’histoire de la littérature et de l’intelligence artificielle. » Il a déclaré vouloir partager au plus vite sa manière de faire pour que chacun puisse à son tour écrire de la bonne fiction assisté d’une IA.

    Dans le contexte actuel, il n’en fallait pas beaucoup plus pour créer du débat, alors que Clarkesworld, célèbre magazine de science fiction, interrompait en février dernier la reception de manuscrit, submergé par les textes produits par des entités non-humaines.

    Fu Ruchu, éditrice chinoise, s’interroge sur le futur de l’écriture de science-fiction, un genre qui selon elle s’intéresse de manière globale un peu moins au langage. Même si elle reconnait que le récit présenté par Shen Yang et son IA est bien construit et n’est pas dénué de logique, elle ajoute : « le rapport au langage dans cette nouvelle est très pauvre, il se pourrait qu’il s’appauvrit encore plus avec le temps. »

    #Intelligence_artificielle #Littérature #Science_fiction

  • L’heure du retour : Anima Sola #29
    Récit poétique à partir d’images créées par procuration.

    https://liminaire.fr/palimpseste/article/l-heure-du-retour

    Nous restons un long moment sans rien dire. Le vent dans nos cheveux, l’air de la mer nous enivre. Elle pense parfois qu’il faut s’ouvrir à tout ce qui nous entoure en toutes circonstances afin de faire de notre mémoire le réceptacle de sensations uniques. Elle les énumère à voix basse : Aérer chaque jour sa maison pendant cinq minutes pour renouveler l’air à l’intérieur. Passer la main dans ses cheveux. Lever les yeux en l’air pour regarder les avions traverser le ciel. Remonter son col et rajuster son écharpe dans la fraîcheur de l’hiver...

    (...) #Écriture, #Langage, #Poésie, #Lecture, #Photographie, #Littérature, #Art, #AI, #IntelligenceArtificielle, #Dalle-e, #Récit, #Nature, #Nuit, #Paysage, #Lumière, #Mer (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/anima_sola_29.mp4