• Athéisme et sécularisme sont positivement corrélés avec des indicateurs sociaux de bien-être.
    https://www.pitzer.edu/academics/faculty/zuckerman/Zuckerman_on_Atheism.pdf
    ( Normand Baillargeon​ sur Twitter : https://twitter.com/nb58 )

    la conclusion indique :

    This essay began with a well-known Biblical quote stating that atheists are simply no good. Do the findings of contemporary social science support this Biblical assertion? The clear answer is no. Atheism and secularity have many positive correlates, such as higher levels of education and verbal ability, lower levels of prejudice, ethnocentrism, racism, and homophobia, greater support for women’s equality, child-rearing that promotes independent thinking and an absence of corporal punishment, etc. And at the societal level, with the important exception of suicide, states and nations with a higher proportion of secular people fare markedly better than those with a higher proportion of religious people.

    • La détresse religieuse est, pour une part, l’expression de la détresse réelle et, pour une autre, la protestation contre la détresse réelle.

      La religion est le soupir de la créature opprimée, l’âme d’un monde sans coeur, comme elle est l’esprit de conditions sociales d’où l’esprit est exclu.

      Elle est l’opium du peuple. L’abolition de la religion en tant que bonheur illusoire du peuple est l’exigence que formule son bonheur réel. Exiger qu’il renonce aux illusions sur sa situation c’est exiger qu’il renonce à une situation qui a besoin d’illusions.

      La critique de la religion est donc en germe la critique de cette vallée de larmes dont la religion est l’auréole.

      Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel , #Marx, 1843
      http://marx.engels.free.fr/marx/txt/1843critiqueh.htm

      #opium_du_peuple #livre_en_ligne #critique_de_la_religion (et pas « défense de la laïcité » républicaine ou télévisuelle)

    • D’une manière générale je soutiens l’idée qu’il faille évidemment critiquer la religion. Cependant cette critique rapide de Marx est un peu courte aujourd’hui car il existe dans certaines religions des aspects qui sont favorable a des révoltes, y compris sociale.

    • @bug_in, indéniablement. Cela n’a d’ailleurs pas échappé à des critiques de la religion (La guerre des paysans allemands F. Engels, https://www.marxists.org/francais/marx/works/1850/00/fe1850f.htm). Tout comme cela n’avait pas échappé à Foucault à propos de la Révolution en Iran, avant l’arrivée au pouvoir des mollahs (...). L’une des questions est de savoir quel espace laisse l’islam aujourd’hui à une révolte.
      La naissance du christianise, l’émergence du protestantisme, par exemple, ne sont pas uniment celle d’un opium du peuple.

      Cet extrait d’un texte de Marx ne relève pas selon moi d’une « critique rapide ».

    • Il manque aussi une mise en perspective avec une moitié de l’humanité, celle que les religions traitent comme du bétail dans les meilleur des cas, les femmes.
      https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2015/02/10/linfluence-de-la-religion-sur-le-statut-des-fe

      La place occupée par la religion dans le champ politique n’a cessé de s’affirmer ces dernières décennies. Certes, les pratiques religieuses ont régressé dans plus d’un pays (notamment en Europe occidentale), mais elles ont tendu à s’amplifier à l’échelle mondiale, en lien direct avec la victoire du modèle néolibéral. En effet, si la sortie de la guerre froide a suscité davantage d’attention vis-à-vis de la démocratie, des droits humains et des droits des femmes en particulier, on a assisté dans le même temps à un accroissement des inégalités économiques et sociales, qu’il s’agisse des écarts de revenus ou des taux de pauvreté.

    • Ben, c’est ambigu, le texte dit : « greater support for women’s equality »... ce qui ne veux pas dire que c’est assez, que c’est suffisant etc.
      Par ailleurs, de ce que je comprend de l’extrait que tu indiques, il dit que précisément le droit des femmes se serait amélioré globalement et que ce qui aurait grandi, par contre, c’est l’accroissement des inégalité économiques et sociales, et les écarts de revenus et taux de pauvreté.
      Sur ce sujet, de manière un peu plus actuelles, les conséquences de la crise en particulier pour les personnes associée au genre femme, je te propose cet article :
      http://www.c-g-a.org/content/les-attaques-patriarcales-liees-la-crise

    • Le bien-être (qui n’équivaut pas la conso et la domination) peut faire reculer la religion, voire en supprimer toute nécessité. À sa façon, et à condition de mettre à bas la société capitaliste, Marx ne disait pas autre chose. Cela peut paraître « simple » mais l’article cité, aussi « moderne » soit-il reste en deçà de cette proposition.

      Un souci avec Marx et « le marxisme » c’est que tous les dominants de la terre en utilisent des morceaux, pour glorifier l’"universalisme" de la laïcité républicaine, ou la « valeur travail » (c’est à dire l’exploitation). Massif et impérieux détournement d’un héritage dépourvu de testament, comme l’on sait. La chanson le dit fort bien : tout ce qu’ils ont, ils nous le volent.

      #vallée_de_larmes #eaux_glacées_du_calcul_égoïste

    • Quelques petites nuances je pense. Aujourd’hui un nouvel athéisme se forme justement pour répondre a une adhésion persistante a la religion qui ne se dissous pas entièrement dans une amélioration du bien être. Par exemple ils proposent de prendre en charge la question de la mort qui est trop laissé a des rites religieux et essaye de former une communauté athée forte.

  • Normalement, avec #Zoé_Konstantopoulou élue haut la main à la présidence du parlement grec, ce genre de choses ne devrait pas se reproduire

    ▶ Virvidakis - Konstantopoulou - Greek Parliament Voting - Βιρβιδάκης Κωνσταντοπούλου - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=-AgwDfzZp6E&feature=youtu.be

    Voting at the Justice Committee of the Greek Parliament, on 12.9.2013, without the required number of participating MPs, where the chairman Mr. Virvidakis simply ignores all the objections by MP Zoe Konstantopoulou and reports that every article was “voted by the majority” without anyone having voted! Mr Virvidakis also made sure that every sentence from Zoe were all deleted from the minutes, but he obviously did not take into account that everything was being recorded and was going to leak out to the internet.

  • Biopolitique et racisme d’État :
    « Il faut défendre la société », Michel Foucault - #Livre_en_ligne
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=7551

    Pour mener l’analyse concrète des rapports de pouvoir, il faut abandonner le modèle juridique de la souveraineté. Celui-ci, en effet, présuppose l’individu comme sujet de droits naturels ou de pouvoirs primitifs ; il se donne pour objectif de rendre compte de la genèse idéale de l’État ; enfin, il fait de la loi la manifestation fondamentale du pouvoir. Il faudrait essayer d’étudier le pouvoir non pas à partir des termes primitifs de la relation, mais à partir de la relation elle-même en tant que c’est elle qui détermine les éléments sur lesquels elle porte : plutôt que de demander à des sujets idéaux ce qu’ils ont pu céder d’eux-mêmes ou de leurs pouvoirs pour se laisser assujettir, il faut chercher comment les relations d’assujettissement peuvent fabriquer des sujets. De même, plutôt que de rechercher la forme unique, le point central d’où toutes les formes de pouvoir dériveraient par voie de conséquence ou de développement, il faut d’abord les laisser valoir dans leur multiplicité, leurs différences, leur spécificité, leur réversibilité : les étudier donc comme des rapports de force qui s’entrecroisent, renvoient les uns aux autres, convergent ou au contraire s’opposent et tendent à s’annuler. Enfin, plutôt que d’accorder un privilège à la loi comme manifestation de pouvoir, il vaut mieux essayer de repérer les différentes techniques de contrainte qu’il met en œuvre.

    Pour cet après 7/9 janvier 2015 entre #salafisme, #fascisation de fractions des #classes_populaires et #union_nationale ?
    #Bio_pouvoir #État #racisme

    • On aurait aussi tort de dénoncer l’islamophobie de Julliard et de Marianne

      « Inversez les deux voyelles, et dans voile, vous trouverez viol. En dissimulant ostensiblement le sexe au regard, fût-ce sous la forme symbolique de la chevelure, vous le désignez à l’attention ; en enfermant le corps féminin, vous le condamnez à subir l’effraction. (…) Toutes les coquettes le savent bien aussi, qui font de la comédie de la dissimulation la forme la plus raffinée de l’exhibitionnisme. »
      Jacques Julliard,
      Le Nouvel Observateur, 16/09/2003

      « Ce que la France doit à ses hôtes immigrés, ce sont les bienfaits de la culture française. »
      Jacques Julliard,
      Le Nouvel Observateur,16/09/2003

      http://indigenes-republique.fr/anthologie-dislamophobie

      A partir de 10.32"
      http://www.dailymotion.com/video/x2cx31_ripostes-emeutes-en-banlieue-1-3_people&start=635

    • Le communautarisme de l’auto-proclamée élite médiatico-politique me gonfle. Et il ne peut qu’alimenter le sentiment d’être isolés et incompris de tous ceux que cette élite nie : les Roms, les arabes, les migrants, les exclus pour raisons économiques.

      Quand les gens de cette classe au pouvoir manifesteront publiquement contre les massacres d’arabes, on en reparlera ...

    • Puissamment vomitif, l’édito de Marianne. On reconnaît bien le style de Julliard.

      L’arrogance communautariste des dominants est en roue libre.

      Il serait bon que quelques-uns parviennent encore à percevoir ce qu’il y a de proprement stupéfiant pour ne pas dire d’inédit à voir des éditocrates chanter les louanges d’une manifestation qui pour eux relève d’une inespérée communion dominicale.

      La presse et le pouvoir n’ont commencé de se sentir « Charlie » que lorsque la question de la liberté d’expression et des valeurs républicaines a été brandie par celui-ci face non à un seul Islam intégriste mais bien face à tous les musulmans, dans un contexte d’histoire coloniale et d’instrumentation religieuse par le pouvoir qui n’est toujours pas critiquée en France.

      Julliard écrit benoîtement combien il souhaite que cela dure et soit renforcé.

      Liberté d’expression mon luc !

      #communautarisme_blanc
      #valets_du_pouvoir
      #en_roue_libre
      #Julliard
      #Marianne
      #émétique

    • Effarant. Ceux qui militent en faveur de droits collectifs accusent ceux qui y sont opposés d’être communautaires. Il faudrait commencer par lire les bons auteurs, tels Charles Taylor pour éviter ce type de confusion et d’inversion.
      ce que d’aucuns juge « vomitif » n’est purement et simplement que de l’humanisme. Mais bien entendu, dans leur juste condamnation du colonialisme, certains n’hésitent pas à jeter le bébé des lumières avec l’eau sale du bain

    • Ce qui est vomitif entre autres choses c’est d’écrire sur le défaite du communautarisme et de mettre en avant deux passage grassement noircis sur L’affirmation d’un communautarisme musulman risque d’entraîner des réflexes racistes et sur Pourquoi les jeunes musulmans des banlieues n’étaient pas là ? .
      C’est d’une hypocrisie rarement atteignable pour le commun des mortels.

    • Pour ceux qui comptent les morts je signale que parmi les personnes décédées il y en avait d’ascendance arabe. C’est monstrueux ça de dire « tant qu’on ne manifestera pas pour des arabes je ne manifesterai pas ». On bascule effectivement là dans une forme de racisme.
      Oui, effectivement. Je pense que la société française a un modèle unitaire qui rejette le communautairisme. Aussi l’affirmation d’un communautarisme musulman, ou tout autre communautairisme provoquerait un rejet de type raciste.

    • Je ne suis absolument pas de culture arabe ou musulmane. Mais la structure de pensée raciste des grands médias et des politiques (PS, UMP, FN), m’agresse en tant que personne qui est intimement persuadée que le pourcentage de salopards est exactement le même dans toute culture-ethnie-religion.

      Combien faut-il de victimes judéo-chrétiennes blanches dans le monde ou en France pour que l’AFP fasse une dépêche ? Combien en faut-il de bronzés ou de noirs pour une dépêche ? Et ça ce n’est pas du communautarisme ou même du racisme ?

      Quand on laisse manifester publiquement les soutiens français d’Israël, qui soutiennent donc Netanyahu et les crimes de masse israéliens, mais qu’on interdit les manifestations contre ces crimes de masse israéliens, c’est pas du communautarisme et même du racisme exacerbé ?

      Pour mettre les faits en perspectives regardons les statistiques sur les pourcentages d’actes terroristes de différentes catégories :

      http://www.thedailybeast.com/articles/2015/01/14/are-all-terrorists-muslims-it-s-not-even-close.html

      Et pour sortir de la définition piégeuse du « terrorisme », qui réfère en droit à la définition bien peu universelle de « ordre publique », regardons simplement les statistiques des homicides. Parce que ça remet le sens des proportions :

      http://www.inhesj.fr/sites/default/files/reperes_25.pdf

    • En fait, je pense qu’un pareil texte ne mérite qu’une chose : c’est d’être cité in extenso.

      En dehors d’un désaccord quant à votre post, je n’ai rien contre vous, Sylvain Manyach. Mais ce qu’ose écrire Julliard est édifiant.

      (les majuscules sont de Marianne)

      Il faut rester « Charlie » !
      Vendredi 16 Janvier 2015 à 5:00
      Jacques Julliard

      Ce dimanche, nous sommes allés de la République à la Nation. Ces noms n’étaient pas seulement des toponymes. Ils redevenaient un programme. Tel est le message qu’il nous faudra garder à l’esprit : le grand vaincu de cette journée historique ne fut pas seulement le terrorisme, ce fut aussi le communautarisme.

      Les Français sont un grand peuple. Nous l’avions oublié. Ils l’avaient oublié. Et puis, tout à coup, l’espace d’un week-end, cette formidable explosion de patriotisme, la Marseillaise et les drapeaux tricolores, depuis longtemps confinés aux terrains de sport, les cris de « vive la France » qui éclatent d’un peu partout. La République et ses valeurs, que d’aucuns avaient décrétées ringardes, revendiquées avec force, avec conviction. Oubliées les fausses pudeurs du cosmopolitisme. Et les signes politiques, tous les signes politiques, gentiment priés d’aller se faire voir ailleurs.

      Gentiment. Dans les manifs politiques, syndicales ou culturelles, il est de bon ton d’afficher une virilité bourrue. Dimanche, c’était autre chose : les gens, imaginez-vous cela, étaient polis. Ils se respectaient. Ils se considéraient. Quand ils se heurtaient malgré eux, ils s’excusaient ; ils faisaient place aux voitures d’enfants, aux vieilles personnes. Un million de personnes ont défilé dans l’ordre, sans slogans imbéciles, sans une bousculade, sans un incident, sans casseurs de fin de parcours. J’ai vu non loin de moi, une vieille dame en astrakan, svelte et droite, défiler auprès d’un « jeune » habillé en rappeur, pantalon bouffant taille basse. C’était le métro à 18 heures. On avait, pour un jour, aboli les classes sociales, sans Marx, sans les sociologues, sans la révolution. A moins qu’il y ait là l’amorce d’une révolution. Ou mieux encore, tenez : le souvenir de la Révolution, qui n’a pas besoin de millésime et qui se contente d’une majuscule.

      Nous allions de la République à la Nation. Ces noms n’étaient pas seulement des toponymes. Ils redevenaient un programme. Ce programme, cet idéal s’appelaient unité. Et même, unité ou barbarie.

      LE GRAND VAINCU DE DIMANCHE FUT AUSSI LE COMMUNAUTARISMELe voilà, le message. Celui que tous les politiques, tous les intellectuels, tous les travailleurs sociaux devront désormais se bien mettre dans la tête, sous peine de rater la signification historique d’une manifestation sans précédent dans l’histoire contemporaine : le grand vaincu de dimanche ne fut pas seulement le terrorisme, ce fut aussi le communautarisme. Le communautarisme est cette doctrine absolument étrangère à l’esprit français, à l’esprit de la Bastille, à l’esprit de la Révolution qui prétend que les individus appartiennent d’abord à des communautés originelles à base ethnique ou religieuse, et que la nation n’est rien d’autre que la fédération de ces communautés. L’exemple type est le Liban où les communautés religieuses, maronites, chiites, sunnites, druzes sont reconnues comme telles par les institutions politiques. Le résultat, on le connaît : dans ce beau, ce cher pays du Cèdre, tout débat politique tourne à la guerre de religion.

      De tout cela, nous ne voulons pas. Le peuple de France a dit dimanche qu’il n’en voulait pas. Il est attaché à une France laïque, qui ne fait pas acception de personnes, qui ne reconnaît que des individus, et non des communautés, conformément au mot célèbre du Comte Stanislas de Clermont-Tonnerre sous la Révolution : « Il faut tout refuser aux juifs comme nation ; il faut tout leur accorder comme individus ; il faut qu’ils soient citoyens ».

      C’est, contre tous ces communautarismes dévoyés, qui ne conçoivent au fond la vie politique que sous la forme de la guerre de tous contre tous, ce que nous appelons intégration. A la différence de l’assimilation, qui prétend réduire le nouvel arrivant à tous les usages de l’ancien habitant, l’intégration concerne tout le monde : elle est un effort pour dégager des manières de vivre ensemble, communes à tous, et acceptables par chacun.

      Il faut que cela soit bien compris par chacun, à commencer par les intellectuels dont j’ai le regret de dire qu’ils ne sont pas actuellement les membres les plus intelligents de la communauté nationale : c’est l’intégration, c’est-à-dire l’acceptation de règles communes, de mœurs communes qui permet aux différences individuelles de s’exprimer sans remettre en cause la seule communauté acceptable, c’est-à-dire la communauté nationale. La laïcité n’est pas seulement la paix ; qu’on se le dise, elle est aussi et peut-être d’abord la liberté. Liberté des consciences, liberté des opinions.

      C’est ici que nous rencontrons l’islam. Pourquoi l’islam ? Parce qu’elle est en France la dernière venue des grandes religions nationales. Le protestantisme et le judaïsme, qui furent discriminés et souvent persécutés sous l’Ancien Régime, ont compris d’emblée que le statut d’indifférenciation que leur offrait la Révolution était pour eux un progrès et même un idéal.

      Avec le catholicisme, le débat fut beaucoup plus rude et tourna même à l’affrontement. Religion privilégiée, véritable religion d’Etat sous l’Ancien Régime, il lui fallut un siècle et demi pour accepter la laïcité. Pas plus que l’islam d’aujourd’hui, l’Eglise d’hier n’acceptait la séparation de l’Eglise et de l’Etat avec toutes ses conséquences. Après un long affrontement, l’Etat finit par faire admettre par les catholiques les règles qui président à la paix dans la cité.

      L’AFFIRMATION D’UN COMMUNAUTARISME MUSULMAN RISQUE D’ENTRAÎNER DES RÉFLEXES RACISTESNous en sommes là. Beaucoup de Français musulmans, dans leur for intérieur, acceptent ces règles du vivre-ensemble que nous appelons la laïcité. La plupart des autorités religieuses de l’islam pensent de même. Il y a pourtant, de la part des plus intégristes et des plus prosélytes, une tentative tenace pour obtenir des statuts particuliers, au chapitre de l’alimentation et du vêtement, ces deux matières dont toutes les religions se servent pour imposer leur particularisme. La bataille est en cours, et si l’on adhère aux considérations développées plus haut, on conclura qu’il ne faut pas céder. Notre vivre-ensemble en dépend. Beaucoup, parmi les intellectuels culturalistes, sont au contraire partisans de la composition. Ils craignent que toute stigmatisation du prosélytisme musulman entraîne des réactions racistes. Cela part d’un bon naturel, mais manque sa cible. C’est au contraire l’affirmation d’un communautarisme musulman qui risque d’entraîner dans le reste de la population des réflexes racistes.

      Mais il y a plus grave. Il y a désormais le djihadisme et le terrorisme. On a eu raison de marteler depuis une semaine : pas d’amalgame ! Identifier l’ensemble des musulmans au terrorisme serait à la fois une faute et un crime. Il faut saluer le sang-froid et la maturité de ce peuple de France qui est sorti dans les rues pour crier à la fois son horreur du terrorisme et son calme refus de toute forme de culpabilisation collective.

      Pour autant, n’y a-t-il « rien à voir » entre l’islam et le djihadisme ? Oui, à la façon dont il n’y avait jadis « rien à voir » entre le christianisme et les croisades…

      POURQUOI LES JEUNES MUSULMANS DES BANLIEUES N’ÉTAIENT PAS LÀ ? Laissons donc de côté les doctrines. Je me garderai bien de prétendre les juger. Mais, dans la pratique, il y a des interprétations pacifiques et des interprétations belliqueuses du Coran. En France même, ces interprétations se combattent, comme du reste dans le monde entier. Ce conflit des interprétations s’est traduit dimanche par une participation assez modeste des musulmans. De petits groupes courageux se sont manifestés. Ce ne fut pas un grand raz-de-marée pour condamner le terrorisme. Les jeunes musulmans des banlieues, dans leur ensemble, n’étaient pas là. Pourquoi ? Par peur, sans doute. Non de la vindicte des autres manifestants, mais plus probablement des représailles à encourir lors du retour dans les quartiers et les banlieues. Dans les écoles, la minute de silence en l’honneur des journalistes de Charlie Hebdo, ces martyrs de la liberté, s’est heurtée à de nombreuses résistances. La ministre de l’Education nationale nous en fera-t-elle le bilan ? Il faudrait bien se décider un jour à voir les choses en face, au lieu de regarder ailleurs.

      En ce sens, une grande occasion de fraternisation a été manquée. La manifestation monstre de dimanche aurait pu être l’occasion d’un grand tournant historique, comme le fut le 14 juillet 1790 la fête de la Fédération, quand toutes les composantes de la nation française convergèrent au Champ-de-Mars pour proclamer la France une et indivisible.

      C’est dire le travail qui reste à accomplir. La tentation terroriste ne sera vaincue qu’avec la collaboration active des musulmans de France et leur adhésion ouverte et massive aux valeurs de la République. Il n’y a pas d’autre chemin. A ceux qui prétendraient, comme on le fait tous les jours de façon paresseuse, qu’une telle adhésion suppose d’abord l’égalité économique, sociale, mais aussi culturelle avec le reste de la population, je réponds qu’à ce compte, jamais intégration entre deux populations d’origine et de conditions différentes ne se serait réalisée.

      Reste que dimanche, un grand événement a eu lieu. Il me semble que le peuple de France, de Paris et de toutes les régions, a voulu malgré son silence, et plus encore grâce à son silence, dire trois choses.

      >>> D’abord sa solidarité avec nos compatriotes juifs, une nouvelle fois victimes du fanatisme islamique. Que cette manifestation soit un coup d’arrêt à cette double montée de l’antisémitisme, dans le vieux fond réactionnaire de la droite française et dans les banlieues immigrées. L’année dernière, près de 7 000 de nos compatriotes ont choisi de quitter la France. Faisons tout pour arrêter ce mouvement, inspiré par la peur et le découragement. Je le demande, que serait la France sans ses juifs ?

      >>> Ensuite, son attachement indéfectible, inconditionnel à la liberté de pensée et d’écrire. Alors que les événements tragiques que l’on sait se déroulaient, de vrais sycophantes, déguisés en critiques littéraires, ne craignaient pas de dénoncer de façon répétitive quasi hystérique « l’islamophobie » de Michel Houellebecq au risque de le désigner aux balles des tueurs. Comme hier on dénonçait, pour les mêmes raisons, « l’irresponsabilité » de Charlie Hebdo. La liberté est indivisible ; il faut la défendre jusque dans ses excès. Il ne suffit pas « d’être Charlie » un beau jour d’émotion nationale et de manifestation patriotique. C’est tous les jours qu’il faut être Charlie, c’est tous les jours qu’il faut rester Charlie !

      >>> Enfin, la réaffirmation de l’identité populaire. Qu’on me permette ici un mot personnel. J’ai publié récemment, avec Jean-Claude Michéa, un échange de lettres entre lui et moi, à propos des rapports de la gauche et du peuple. Et nombre de nos lecteurs, jugeant nos réponses insuffisantes, nous ont demandé : « Qu’est-ce donc, à la fin, que ce peuple dont vous parlez ? » Question légitime, question nécessaire. Et réponse difficile ! A tous ceux-là, et à tant d’autres qui se posent des questions semblables, je dis : regardez ces manifestations. Regardez ces foules dans les rues ne répondant à aucun autre appel qu’à celui de leur conscience et de leurs convictions. Regardez ces foules de Paris, de Lyon, de Toulouse, de Bordeaux, de la plus petite de nos bourgades. Vous cherchez le peuple de France ? Eh bien ! Le voilà !

    • Stéphane si vous voyez le racisme partout, il n’est nulle part. Votre réaction me fait penser à ceux qui accusait les manifestants solidaires des gazaouis de manifester par antisémitisme. S’ils ne bougeaient pas le petit doigt pour les arabes syriens ou irakiens morts c’est bien qu’ils devaient être racistes et que seule la haine des juifs les motivaient...

    • @sylvain, nulle part, rien n’est moins sûr...

      « Il faut défendre la société », Michel Foucault

      La thématique raciste va, à ce moment-là, non plus apparaître comme instrument de lutte d’un groupe social contre un autre, mais elle va servir à la stratégie globale des conservatismes sociaux. Apparaît à ce moment-là – ce qui est un paradoxe par rapport aux fins mêmes et à la forme première de ce discours dont je vous parlais – un #racisme-d’État : un racisme qu’une société va exercer sur elle-même, sur ses propres éléments, sur ses propres produits ; un racisme interne, celui de la purification permanente, qui sera l’une des dimensions fondamentales de la #normalisation_sociale.

      http://monoskop.org/images/9/99/Foucault_Michel_Il_faut_defendre_la_societe.pdf

      #Biopolitique

      #livre_en_ligne

    • La première des manipulation est de sortir "le politique" des événements de la semaine dernière, l’islamisme est un islam politique. Le fait politique disparu ne reste plus que la question du religieux et effectivement Julliard peut appuyer facilement sur le communautarisme musulman, que pourrait on invoquer d’autre après une telle simplification ?
      Je ne ressors pas les liens qui courent depuis une semaine mais la communauté musulmane n’existe pas, il n’y a pas d’unité musulmane, etc, etc...
      Le texte est émaillé du phantasme néocons, l’arrêt de la guerre des classes sans Marx, sans les sociologues.Le discrédit de la violence révolutionnaire...

      "Le voilà, le message. Celui que tous les politiques, tous les intellectuels, tous les travailleurs sociaux devront désormais se bien mettre dans la tête".
      Je vois assez rapidement les limites à l’unité, sus aux travailleurs sociaux.

      C’est Julliard qui assimile Mélenchon à « la chienlit des dégénérés fascistes ».et avait avait déjà comparé les rassemblements du Front de gauche à des rassemblements nazis. Voilà pour les politiques qui devront se bien mettre dans la tête.

      L’unité nationale de Julliard c’est le patriot act à la française et 4 ans de prison pour apologie du terrorisme.

    • Ne confondons pas tout. Sur Mélenchon, ce ne sont pas cet article ci. On peut être en accord avec un auteur sur tel point, et en désaccord sur tels autres. Il faut se débarrasser de la pensée binaire. Un Patriot Act ce n’est absolument pas ce que prône Julliard ici. On peut lui reprocher ce qu’il écrit, mais certainement pas ce qu’il n’écrit pas

    • @sylvain, excuse mon insistance stp mais Julliard a pas besoin de proner un #Patriot_act à la française, tout simplement car il en existe déjà une version ici. Le PS l’a fait et le met en oeuvre.
      Voir l’avis d’Amnesty international sur la multiplication des poursuites pour « apologie de terrorisme »
      http://seenthis.net/messages/332132
      Ou l’analyse d’Agamben sur l’obsession #sécuritaire
      http://seenthis.net/messages/331555

    • à unagi, je pense que toutes les religions ont une importante dimension politique. Elles édictent toutes des normes sociales. Les religions ont sans doute, si on regarde l’histoire humaine, été les premières structures politiques des groupes humains.

    • @stephane_m J’aurai du etre plus précis.
      WP https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_l%27islamisme

      « Les frères musulmans sont une confrérie politico-religieuse fondée en Égypte en 1929 par El Banna. Ils prônent une nécessaire rupture avec la société contemporaine. S’ils ne réfutent pas le progrès moderne scientifique et technique, les frères musulmans luttent contre l’impérialisme occidental. Ils veulent construire un État éloigné du modèle communiste, et du modèle capitaliste. L’accent est mis sur l’action sociale et politique, le respect de la loi islamique restant sur un second plan. Il réclament une réorganisation totale de la société à partir d’un État vraiment islamique et refusent le strict respect de la charia tant que cet État islamique n’aura pas été mis en place. L’objectif final est la justice sociale, atteinte par une prise en charge par l’État de la collecte de l’impôt islamique et sa redistribution. Initialement, la confrérie est bâtie sur le modèle d’une confrérie religieuse avec un guide et un devoir d’obéissance à ce guide. Dans un deuxième temps, elle se transforme en mouvement politique, qui crée certaines organisations syndicales, de femmes, d’étudiants contrôlés par ce mouvement. L’occident est à la fois le modèle et l’ennemi. Le mouvement est doublé d’une organisation secrète de sabotage, de terrorisme, dans un contexte d’occupation. »
      Voilà le sens que je donne à politique pour l’islamisme.

      Comme tu m’as fais faire des recherches...

      Religion et politique – Max Weber et Emile Durkheim
      Hartmann Tyrell :
      http://trivium.revues.org/4430

      « la sociologie (et surtout la sociologie religieuse) d’Emile Durkheim, les rapports entre religion et politique apparaissent sous un jour totalement différent ; les deux sphères se touchent de près et se recouvrent même l’une l’autre, unies sous le concept de société »

      Goguel François. Religion et politique en France. In : Revue française de science politique, 16e année, n°6, 1966. pp. 1174-1180.

      doi : 10.3406/rfsp.1966.392984
      url : /web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1966_num_16_6_392984

    • Loi d’exception : loi qui n’est pas une loi comme les autres, parce qu’elle est d’exception et que l’exception, ben... c’est l’exception. Merci pour la tautologie. Les lois anti-terroristes, je crois qu’il y a des gens qui ont témoigné de leur caractère... exceptionnel. Mais #cépapareil, les « de Tarnac », ils l’avaient bien cherché. Et pi de quoi vous vous plaignez, ils sont dehors maintenant, et libres nan ? Donc CQFD, y-a pas de loi d’exception. Pouet.

    • L’#État_d'urgence, pour en rester à l’exception définie comme telle , a été appliqué durant les émeutes de novembre 2005
      http://fr.wikipedia.org/wiki/État_d'urgence_en_France

      Mais bien des lois sont de fait exceptionnelles « association... » "entreprise terroriste individuelle", etc, sans compter la jurisprudence, dont Deleuze soulignait qu’elle était plus « riche » que « la loi ». Mieux vaut, il me semble, s’intéresser aux #relations_de_pouvoir effectives qu’à la #souveraineté déclarée. Ainsi, pour ce ne citer que cet #exemple, le policier qui a tiré à balles réelles sur des émeutiers en 2007 a-t-il été condamné à du sursis des années après tandis que l’un des blessés avait lui fait 9 mois de préventive
      http://seenthis.net/messages/332006

    • @sylvain. Au moins ton dernier post a le mérite de la clarté, tu es sur une position idéologique. Ce qui n’a rien de répréhensible mais autant que ce soit un postulat de départ sans besoin de le camoufler.
      Aujourd’hui l’expression « loi scélérate » désigne l’ensemble des lois qui présentent l’une des caractéristiques suivantes : recours à des procédures expéditives, répression disproportionnée par rapport aux actes commis, sanctions lourdes uniquement conçues pour dissuader un individu de commettre un acte proscrit. WP
      Comment appeler un acte de fermeture de site, par exemple, sans procédure judiciaire, sans examen contradictoire, sans protection de la liberté d’expression en face ?
      N’est ce pas un no man’s land ?
      http://www.lemonde.fr/pixels/article/2015/01/13/patriot-act-a-la-francaise-il-est-important-de-garder-la-tete-froide_4555146

      Loppsi sur la Quadrature du Net : https://www.laquadrature.net/fr/search/apachesolr_search/loppsi

      La justice court-circuitée (PDF) - Human Rights Watch
      http://www.hrw.org/sites/default/files/reports/france0708fr_1.pdf

      Intervention de William Bourdon - Avocat
      Verbatim colloque Lois antiterroristes 25 ans d’exception - Tarnac, un révélateur du nouvel ordre sécuritaire.
      Lundi 18 Octobre 2010 à l’Assemblée Nationale

      http://fragmentsduvisible.org/site2/demain/articles/afficher.php?article_id=125

      Hicheur : “j’étais le pigeon providentiel” http://owni.fr/2012/07/02/adlene-hicheur-jetais-le-pigeon-providentiel

    • On peut bien entendu critiquer la législation existante dont une partie est d’ailleurs parfaite ment inefficace. Mais nous sommes encore dans un état de droit qui permet de contester les décisions de l’autorité étatique qui nous affecté.
      Ces échanges sont ttes instructifs. On est passé d’un article sur la nécessité de réaffirmer les principes d’unité et de laïcité de la République à la dénonciation du soi-disant communautarisme des élites politiques et médiatiques, au racisme de ces derniers et enfin à l’Etat policier avec ses lois d’exception qui nous rapprochent de Vichy. Comme si ces maux là avaient un quelconque rapport avec les attentats qu’on a vécu. Et à par ça c’est moi qui ai une approche « idéologique »

  • Spectres de Marx / Jacques Derrida « Le silence qui parle
    http://lesilencequiparle.unblog.fr/2015/01/16/spectres-de-marx-jacques-derrida

    Ce sera toujours une faute de ne pas lire et relire et discuter Marx. C’est-à-dire aussi quelques autres – et au-delà de la « lecture » ou de la « discussion » d’école. Ce sera de plus en plus une faute, un manquement à la responsabilité théorique, philosophique, #politique.  Dès lors que la machine à dogmes et les appareils idéologiques « marxistes » (États, partis, cellules, syndicats et autres lieux de production doctrinale) sont en cours de disparition, nous n’avons plus d’excuse, seulement des alibis, pour nous détourner de cette responsabilité. Il n’y aura pas d’avenir sans cela. Pas sans Marx, pas d’avenir sans Marx. Sans la mémoire et sans l’héritage de Marx : en tout cas d’un certain Marx, de son génie, de l’un au moins de ses esprits. Car ce sera notre hypothèse ou plutôt notre parti pris il y en a plus d’un, il doit y en avoir plus d’un.
    Pourtant, parmi toutes les tentations auxquelles je devrai résister aujourd’hui, il y aurait celle de la mémoire : raconter ce qu’a été pour moi, et pour ceux de ma génération qui l’ont partagée toute une vie durant, l’expérience du marxisme, la figure quasiment paternelle de Marx, sa dispute en nous avec d’autres filiations, la lecture des textes et l’interprétation d’un monde dans lequel l’héritage marxiste était – il le reste encore, et donc il le restera – absolument et de part en part déterminant. Il n’est pas nécessaire d’être marxiste ou communiste pour se rendre à cette évidence. Nous habitons tous un monde, certains diraient une culture, qui garde, de façon directement visible ou non, à une profondeur incalculable, la marque de cet héritage.
    #Jacques_Derrida
    Spectres de #Marx / 1993

    #livre_en_ligne

  • Où va le salariat ? Pierre Rolle, 1996
    http://www.page2.ch/page2/images/PDF/Rolle_Ou_va_le_salariat.pdf

    Dans la sociologie empirique, l’observation du donné, c’est-à-dire des résultats des mouvements sociaux d’hier, est souvent l’observation des désagrégations et des dissociations du donné. L’interprétation la plus rigoureuse, en effet, vise ce qui est connu du passé et du présent, et s’y épuise. Il suffit donc que l’histoire continue, et qu’il y ait du futur, pour que l’explication proposée devienne insuffisante. La sociologie ne reconnaît le nouveau qu’explicite et achevé, et donc déjà en crise. C’est pourquoi les sciences sociales sont dominées par les paradigmes de l’agonie, de la rupture et de l’entropie. Leurs études constatent la neutralisation des tensions créatrices, l’affaiblissement des enjeux, le découragement des protagonistes. Les anciens physiciens craignaient que l’univers ne meure de tiédeur, lorsque les sources chaudes et les sources froides se seraient contaminées l’une l’autre. Cette peur s’est transférée aux sociologues, qui ne nous laissent plus espérer que le présent sans fin et l’ennui du consensus.

    Mais ce n’est là, peut-être, qu’une illusion, ou un artefact. A y regarder de plus près, le consensus n’est que la lutte de tous contre tous, laquelle menace derrière la contrainte uniforme de l’Etat. L’économie mixte, présentée comme une harmonisation de l’Etat et du privé, l’articulation des besoins individuels et collectifs, enferme en réalité un ensemble de contradictions qu’il faut toujours régler à nouveau, et op- pose chaque Etat à tous les autres au sein du système mondial. Le salaire social menace le salariat traditionnel tout autant qu’il le complète. Il suscite à l’intérieur de la classe des travailleurs des conflits qui affaiblissent les capacités d’action de cette classe, mais en même temps lui transfèrent la capacité d’effectuer des choix sociaux décisifs. Le droit du travail manifeste l’insoluble antinomie de l’Etat capitaliste tenu, au contraire de sa nature, d’incarner la socialisation de la gestion du travail, quand ce ne serait que pour la contenir. La crise du syndicat signifie d’abord que l’ensemble des revendications salariales ne peuvent plus être canalisées dans les institutions de l’Etat ni soumises à des équilibrages simples.

    Les interprétations qui ont cours de nos jours, et qui font croire que le mouvement d’émancipation des travailleurs est arrêté, ne sont pas en fin de compte les plus probables. Il faut toujours se poser à nouveau la question « où va le salariat ? » pour approcher du dynamisme caché de notre société planétaire, même si, à cette question, on ne peut jamais fournir une réponse assurée.

    #Livre_en_ligne

  • CIP-IDF > Marcel Duchamp et le refus du travail
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=7151

    A une époque où le néo-libéralisme exige de chacun qu’il se fasse « entrepreneur de lui-même » et « capital humain », l’artiste sert de modèle à de nouveaux modes d’asservissement, fondés sur le contrôle, l’auto-exploitation, la course en avant productive, la soumission aux règles du marché. Pour rompre avec cette logique, Maurizio Lazzarato propose de se souvenir de Marcel Duchamp qui prônait le non-mouvement et l’action paresseuse.

    #refus_du_travail

    • Marx avait dit que les révolutions sont la locomotive de l’histoire mondiale. Mais peut-être les choses se présentent-elles tout autrement. Il se peut que les révolutions soient l’acte par lequel l’humanité qui voyage dans ce train tire le frein d’urgence.
      Walter Benjamin

      On ne peut plus se permettre d’être un jeune homme qui ne fait rien. Qui est-ce qui ne travaille pas ? On ne peut pas vivre sans travailler, c’est quelque chose d’affreux. Je me rappelle un livre qui s’appelait Le droit à la paresse ; ce droit n’existe plus.
      Marcel Duchamp

      « Vous préférez la vie au travail d’artiste ? » « Oui » répondit Marcel. Entretien avec Marcel Duchamp

      « John Cage se vante d’avoir introduit le silence dans la musique, moi je me targue d’avoir célébré la paresse dans les arts » dit quelque part Marcel Duchamp. La « grande paresse » de Marcel Duchamp a bouleversée l’art de façon plus radicale et durable que la débauche d’activité et de productivité d’un Picasso avec ses 50.000 œuvres.
      Duchamp pratique un refus obstiné du travail, qu’il s’agisse du travail salarié ou du travail artistique. Il refuse de se soumettre aux fonctions, aux rôles et aux normes de la société capitaliste. Ce refus n’interroge pas seulement l’artiste et l’art car, en se différenciant du « refus du travail des ouvriers » théorisé par l’#opéraïsme italien dans les années soixante, l’attitude de Duchamp peut nous aider à interroger les refus qui s’expriment depuis 2008 sur les places et dans les rues de la planète (Turquie, Brésil, Espagne, États-Unis, etc.).

      D’une part il élargit son domaine d’action, puisque ce refus concerne non seulement le travail salarié, mais toute fonction ou rôle auquel nous sommes assignés (femme/ homme, consommateur, usager, communicateur, chômeur, etc. ). Comme la grande majorité de ces fonctions, l’artiste n’est pas subordonné à un patron, mais à une panoplie de dispositifs de pouvoir. De la même manière que le « capital humain » dont l’artiste est devenu le modèle dans le néo-libéralisme, il doit se soustraire non seulement à ces pouvoirs « externes », mais aussi à l’emprise de son « égo » (créateur pour l’artiste ou entrepreneur pour le capital humain) qui donne à l’un et à l’autre l’illusion d’être libres.
      D’autre part, il permet de penser et de pratiquer un « refus du travail » en partant d’un principe éthico-politique qui n’est pas le travail. Il nous fait ainsi sortir du cercle enchanté de la production, de la productivité et des producteurs. Le travail a été à la fois la force et la faiblesse de la tradition communiste. Émancipation du travail ou émancipation par le travail ?
      Ambigüité sans issues.

      Le mouvement ouvrier a existé seulement parce que la grève était, en même temps, un refus, un non-mouvement, un désœuvrement radical, une inaction, un arrêt de la production qui suspendait les rôles, les fonctions et les hiérarchies de la division du travail dans l’usine. Le fait de problématiser un seul aspect de la lutte, la dimension du mouvement, a été un grand handicap qui a fait du mouvement ouvrier un accélérateur du productivisme, un accélérateur de l’industrialisation, le chantre du travail. L’autre dimension de la lutte, impliquant le « refus du travail », le non– mouvement ou la démobilisation a été délaissée ou insuffisamment problématisée dans le contexte du néolibéralisme.
      Le refus du travail ouvrier renvoie toujours, dans la perspective communiste, à quelque chose d’autre que lui-même. Il renvoie au politique, selon une double version, le parti ou l’État, tandis que Duchamp suggère de nous arrêter sur le refus, sur le non–mouvement, sur la démobilisation, et de déployer et expérimenter tout ce que l’action paresseuse crée comme possibles pour opérer une reconversion de la subjectivité, en inventant des nouvelles techniques d’existence et des nouvelles manière d’habiter le temps. Les mouvements féministes, après le refus d’exercer la fonction (et le travail de) « femme », semblent avoir suivie cette stratégie, plutôt que l’option politique classique.

      #artiste #capital_humain #livre_en_ligne

  • CIP-IDF > Intermittents et Précaires, Antonella Corsani, Maurizio Lazzarato - #Livre_en_ligne
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=3885

    Depuis 1992, les Coordinations des intermittents du spectacle se sont construites sur d’un constat et d’une revendication : la discontinuité de l’emploi qui caractérise le secteur du spectacle concerne un nombre grandissant de travailleurs et pas uniquement les artistes et les techniciens du cinéma, du théâtre, de la télévision, du cirque, de la danse, etc. [1] Pour #combattre la #précarisation et la paupérisation de couches de plus en plus importantes de la population, le régime de l’intermittence doit être élargi à tous les travailleurs soumis à la flexibilité de l’emploi.

    Les participants au mouvement social qui a débuté en juin 2003, ont, pour la première fois, assumé d’être à la fois « intermittents » et « précaires ». La Coordination des #Intermittents et #Précaires a ainsi porté le conflit à un niveau supérieur en le déplaçant sur un terrain politique.

    En démontrant que le travail déborde l’emploi, que le temps de chômage est aussi un temps d’activité, que ces activités restent invisibles à l’entreprise et aux institutions, les intermittents se battent pour des « nouveaux droits sociaux », pour la continuité des droits et du revenu en situation de discontinuité de l’emploi, plutôt que pour l’emploi à plein temps.

    Ce livre retrace la genèse, les développements et les résultats d’une recherche qui a été le fruit d’une coopération et d’une coproduction entre « savants » et « profanes », entre des chercheurs universitaires et les militants des collectifs et des coordinations.

  • Quel voleur accepte qu’on le vole ? #Capitalisme et #propriété privée
    http://i2d.toile-libre.org/PDF/2011/i2d_capitalisme_propriete.pdf

    un extrait :

    Comment comprendre la quête effrénée d’Achab, sinon comme la tentative déses- pérée de s’attacher ce qui est fondamentalement inattachable, c’est-à-dire ce qui est toujours perdu d’avance ? « Je l’ai marquée, vociférait-il pourtant. M’échappera-t-elle ? » Car Moby Dick, qui avait fauché la jambe du capitaine du Péquod « comme un moissonneur fauche une tige dans un champ », c’est-à-dire comme un glaneur amoureux cueille la première rose qui lui tombe sous la main, portait elle-même les stigmates de toutes les attaches manquées, harpons tordus et tournés dans son corps, hampes brisées de lances sortant de son dos, emmêlements de lignes qu’elle portait comme une charge ficelée sur elle. Et la tête blanche de la baleine, avec son front ridé, n’était-elle pas en quelque sorte le grand livre ouvert de l’histoire, où se rejouait indéfiniment la même ritournelle, celle des hommes qui voulaient harponner tous les météores, vagabondant sur le corps plein de la terre, et les météores qui continuaient leur course sous le vent, d’une allure paisible de voyageur, indifférents à tant d’efforts ?

    Il fallait s’y faire. L’âme humaine évoluait entre l’une et l’autre de ces deux #dispositions contraires, incapable de se poser jamais, se réclamant de la première quand on lui opposait la seconde, et récipro- quement, du moment que le vol était possible, et qu’on ne se fît pas voler en retour. (Le gantier suggérait ici que les #contradictions, bien mieux que d’empêtrer les hommes, étendaient au contraire leur #pouvoir et leur champ d’action.) En d’autres termes, chaque individu s’arrogeait le privilège de l’invention, en le déniant catégoriquement à autrui, afin de pouvoir #jouir de ses trouvailles en solo. Les hommes voulaient voler sans être volés, ils voulaient pouvoir se servir sans que les autres se servissent après eux. En ce sens, saint Augustin avait simplement répété ce que d’autres avaient dit avant lui : l’homme était un être de contradiction, une créature bicéphale, voguant inexorablement entre la souille et l’éther, entre la gloire et l’infamie. Et l’#économie_de_marché, dont le gantier connaissait les multiples ressorts, pour l’avoir vue se déployer dans toute sa splendeur à travers la mécanique à écraser le monde qu’avait inventée Mouret, l’économie de marché avait trouvé dans cette contradiction le principe #dynamique qui allait lui permettre d’assurer son implacable empire.

    En effet, le capitalisme avait fait d’une double disposition psychologique au libre picorement et à l’#accaparement le ressort de toute une politique. Pour Mignot, le capitalisme était un naturalisme, il suivait l’âme sur le chemin de sa chute naturelle, reproduisant à l’échelle molaire les mécanismes de la #subjectivité humaine. Pour faire simple, le capitalisme flattait le petit voleur qui ne veut pas être volé présent en chacun de nous, tout en s’assurant d’empocher le pactole, au bout du compte. Pouvoir voler sans risquer d’être volé en retour, voilà en effet le principe général qui avait présidé au mouvement des « #enclosures » — c’est-à-dire à l’expropriation hors de leurs terres des producteurs ruraux et des masses populaires anglaises —, secret de l’#accumulation_initiale du début du xvie siècle, analysée par Karl Marx à la fin du premier livre du Capital ; mouvement dont Hannah Arendt avait montré par la suite qu’il constituait la #logique_structurelle du capital. Car chaque clôture, chaque haie, chaque bouledogue, chaque vigile, chaque brevet, chaque article du Code civil tendaient à leur manière à résoudre la terrible question augustinienne. À ce titre, le droit, qui était une technique parmi tant d’autres, s’efforçait toutefois de les surcoder toutes, en les réenveloppant dans son écheveau de lois, de décrets et de jurisprudences. Et qu’est-ce que le droit de propriété, demandait Mignot, sinon le droit pour un individu d’interdire à un autre individu de lui voler ce qu’il a lui-même extorqué à un tiers ?

    Pour résumer ce qui venait d’être dit, et marquer les consciences, Mignot annonçait, imperturbable, que le capitalisme était le système politique qui organisait les conditions de monopole du vol légitime ; c’est-à-dire les conditions permettant de conjurer l’#ontologie_des_biens_épaves, au profit d’une petite clique, qui réglait les modalités de la mainmise — décidément, l’étymologie plaidait en faveur des propos du gantier. Car toute propriété consacrée par le droit était un fait d’empiètement, pareil à celui d’un arracheur de bornes, une institution de l’#égoïsme, dont le seul résultat avait été de déposséder la multitude au profit de cette caste, et que le législateur avait tout naturellement consacrée, puisqu’il en faisait partie lui-même ; l’histoire était connue de chacun. Simplement, on avait décidé un beau jour, en haut lieu, qu’un certain vol était légitime et qu’un autre ne l’était pas. On avait pris les dispositions pour encourager le premier et pour punir le second — et c’en fut fait de l’ontologie.

    Mignot invitait ses auditeurs à faire l’expérience de pensée suivante. Que chacun imaginât un domaine terrien existant, entouré de larges murailles ou de hautes clôtures, et reculât peu à peu dans le temps, en parcourant à l’envers l’enchaînement des héritages et des successions. Et où arrivait-on au bout du compte ? Au vol, pardi ! Au plus loin que l’on remontât, toute propriété terrienne était le fait d’un #vol_originaire, d’une confiscation primitive ; il avait bien fallu, avant qu’elle appartînt à un seul individu à l’exclusion de tous les autres, que celui- là s’en autoproclamât un beau matin le seigneur. Dominium fiat ! Où que l’on regardât autour de soi, champs, jardins, domaines, rien qui n’eût d’abord été spolié, en toute connaissance de cause, à la nature, et donc à la #communauté des hommes. La manœuvre était commode : il n’y avait pas d’autre chemin, pour passer des grands espaces, ouverts aussi loin que portait la vue, aux actes de Monsieur le notaire, que le chemin du pillage ; et certains n’avaient pas hésité, comme condition de cette odieuse usurpation, à expulser ceux qui s’étaient trouvés là, à brandir de fallacieux titres de propriété ou à pointer sur leurs visages les canons de leurs fusils — et à tirer, ô accumulation initiale.

    Et ce qui valait pour les terres, valait pour les choses, pour les gants par exemple, les gants de chevreau, les gants Bonheur, les gants de Suède ou de Saxe. Les États capitalistes, qui transformaient magiquement les biens épaves en corps-morts, refusaient identiquement que les produits du travail fussent mis en jeu, sur le grand tapis de la roulette planétaire. Mieux, ils l’acceptaient une fois, le temps de les prendre (voler), et le refusaient ensuite à tous les hommes (sans être volé). Le gantier avait noté que tous les corpus de lois, depuis les premiers errements du droit romain, jusqu’aux infinis articles du fastidieux Code civil, allouaient les res nullius à l’amiral d’Angleterre, aux seigneurs, aux États et aux Empires, c’est-à-dire, un soupçon de jugeote suffisait pour tirer cette conclusion édifiante, à ceux-là mêmes qui les avaient rédigés ! Le capitalisme organisait la #captation monopolistique des res nullius et des terra nullius . Et Melville rappelait encore le latin des livres de lois de l’Angleterre : De balena vera sufficit, si rex habeat caput et regina caudam . Autrement dit, de toutes les baleines capturées sur les côtes de ce pays, le roi devait recevoir la tête, et la reine la queue. Et le gantier poursuivait sa lecture de Moby Dick : « Pour la baleine, cette division est à peu près comme si on partageait une pomme en deux : entre les deux parts, il ne reste rien. » C’était là la contribution de la mer. La mer payait impôt à l’Angleterre — Flotson , Jetson et Lagon .

    En somme, la classe possédante jonglait astucieusement entre le fait et le droit, entre le statut de poisson attaché et celui de poisson perdu. C’était même très exactement le rôle des États : surcoder toutes les épaves de la terre pour les soumettre au pouvoir d’un maître du surplus ou du stock, qui en réglait l’appropriation monopolistique et la prétendue redistribution. Et non seulement les objets, mais les forêts, les pays, les continents, les étoiles elles-mêmes étaient des poissons perdus, et aussitôt après des poissons attachés. L’accumulation primitive était permanente et ne cessait de se reproduire, pour réaliser le but suprême du capitalisme : introduire le #manque là où il y avait toujours trop, par l’absorption des ressources surabondantes. Et cela valait également pour le travail, et pour la monnaie. Car dès lors qu’une chose possédait le premier statut, celui de poisson perdu, celui de #flux libre ou « décodé », pour parler comme les deleuziens, dif- férents « #appareils_de_capture » (#rente, #profit, #impôt) avaient été montés pour lui donner immédiatement le second. Les États s’arrogeaient en vérité l’appropriation monopolistique de la capture elle-même. Dans ces conditions, ils admettaient l’ontologie des biens épaves pour mieux la #corrompre ; ils se nourrissaient d’elle, ils la parasitaient. Mais pour ce faire, il fallait également procéder à l’opération inverse, c’est-à-dire décoder les flux qui avaient été codés une première fois, par d’autres formations sociales ; autrement dit : rendre leur statut de poissons perdus aux poissons attachés, pour les intégrer sur-le-champ à une #axiomatique de classe ; décoder et reco- der — quel voleur accepte qu’on le vole ?

    Et c’était ça, le capitalisme. Ce décodage généralisé des flux, pour en capter la plus-value, et leur incorporation dans une axiomatique permettant d’en contenir les puissances révolutionnaires , ce qui demandait l’aide d’une gigantesque machine répressive, qui recodait à tour de bras, à coups de dictature mondiale et de #police toute-puissante. Car partout, le capitalisme repoussait et conjurait sa propre réalité, les flux décodés, conscient que le décodage achevé des flux, leur fuite hors de l’axiomatique sociale, c’est-à-dire la #déterritorialisation absolue des objets et des hommes, coulant sur le corps plein sans organes, constituait sa limite externe. Et peut-être que ce retour à une ontologie d’objets trouvés, que Mignot prônait haut et fort, était la « voie #révolutionnaire » dont parlaient Gilles #Deleuze et Félix #Guattari. Non pas se retirer du marché mondial, mais « aller plus loin encore dans le mouvement du marché, du décodage et de la déterritorialisation ». Non pas se retirer du procès, mais accélérer le procès, en prenant la #décision, universellement concertée, de décoder tous les flux, une fois pour toutes, et partant d’abandonner les objets à leur fortune de poissons perdus, flottant librement entre le noyau terrestre et la stratosphère, dans les limbes éthérées de la planète bleue.

    Mignot sortit de sa sacoche un récent best seller, qu’il avait lu quelques mois plus tôt, et qui s’appelait La Soute, ou La Route. L’homme et l’enfant marchaient dans un pays qui avait été ratissé et pillé des années plus tôt, poussant laborieusement leur caddie, dont l’une des roues était près de lâcher. L’homme et l’enfant marchaient dans un monde gris et nu, où tout était recouvert de cendres. Et le gantier avait compris que cette « terre carbonisée », cette « terre de rien », « dépouillée de la moindre miette », longuement décrite par Cormac McCarthy, c’était le monde que le capitalisme abandonnait aux hommes, après qu’il l’avait dévalisé de fond en comble. L’odyssée de l’homme et de l’enfant, c’était simplement la vie en milieu postcapitaliste, ou hypercapitaliste, ça revenait au même ; la vie dans un monde vidé de ses épaves, un #monde où il n’y avait plus rien à #glaner, sinon quelques boîtes de conserves anonymes, qui avaient miraculeusement échappé au désastre. Toujours leurs mains reve- naient vides, et toujours ils les lançaient, au-devant des introuvables reliques de la civilisation, comme des fossoyeurs retournant obstinément les cimetières, pour en exhumer un cœur qui bat. Car c’était tout ce qui les tenait en vie, l’un et l’autre, rester des inventeurs, coûte que coûte, des batteurs de grèves, en quête de l’#abondance d’un monde disparu. La Joute était une dérive indéfinie dans les économats de l’enfer, à travers l’axiomatique capitaliste, et c’était comme ça tout au long du livre : chercher (tout ce qui pourrait servir), trouver (rien, presque rien), prendre (une boîte de pêches en conserve), jeter, chercher encore, etc. Et même, c’était parce qu’il n’y avait plus rien à cueillir que l’homme et l’enfant se méfiaient des autres survivants, des autres fouilleurs de ténèbres, comme eux mis à nu, et prêts à leur soutirer le peu de vivres qui traînait au fond du caddie, prêts à les condamner à mort. Et Mignot jubilait : C’était parce que le capitalisme organisait d’abord les conditions de la #rareté dans le monde, que le vol était non seulement possible, mais surtout nécessaire, pour tous ceux qui cherchaient en vain leur nom sur la liste des invités d’honneur, pour prendre part au grand régal du marché des changes ! Et la question qu’avaient posée Deleuze et Guattari n’était pas de savoir pourquoi les #travailleurs #pauvres, les démunis, les affamés volaient ; non, la question était de savoir pourquoi les travail- leurs pauvres, les démunis, les affamés ne volaient-ils pas toujours ?

    http://pontcerq.toile-libre.org/007%20mignot.htm

    #éditions_Pontcerq #livre_en_ligne

  • Le temps de l’œuvre, le temps de l’acte : Entretien avec #Bernard_Aspe
    http://www.inflexions.org/n5_t_bordeleauhtml.html

    Il me semble en effet que, plus que jamais, le sujet de l’économie capitaliste est soumis à une injonction contradictoire : on attend de lui qu’il vive le temps de sa vie comme étant celui de son accomplissement (le seul qui lui soit donné : « le temps qui lui reste », en ce sens) et qu’en même temps il se soumette à l’accélération généralisée qui caractérise l’état présent du monde du capital (je pense ici au livre important de Hartmut Rosa : Accélération. Une critique sociale du temps, La découverte, 2010), et qui ne cesse de contrarier, en le retardant indéfiniment, cet accomplissement. Une accélération qui obstrue simultanément toutes les dimensions du temps : l’avenir ne doit pas être accueilli en son impensabilité propre, mais géré ; le rapport au passé n’est plus entretenu par un art de la mémoire (qui pourrait par exemple restituer leur présence absente à ceux que Simondon appelait « les vivants du passé »), mais objet d’une commémoration (ou d’un refoulement) ; et le présent, qui semble plus que jamais privilégié (les sociologues parlent même de « présentisme » pour désigner l’incapacité du sujet à se rapporter à un horizon qui excède l’expérience du moment) est en réalité esquivé, contourné, conjuré. Car il n’y a pas de présent sans une résolution (je sais que c’est là un motif heideggérien, mais nous trouvons son origine dans la lignée Schelling–Kierkegaard) qui nous fait être exactement là où nous sommes, et surtout qui nous y fait être sans réserve. Or, le sujet de l’économie ne peut « jouir du présent », comme il ne cesse de le clamer, que s’il sait qu’il lui reste plusieurs possibilités de vie en réserve, et qu’il maintient ainsi plusieurs portes ouvertes — dans la mesure où il sait bien que ce qu’il expérimente pourrait quelque jour ne plus lui convenir. Il a besoin de se rassurer en se disant que la vie qu’il a n’est pas la seule possible, qu’il lui sera toujours possible de « changer ». Ainsi fait–il confiance à ce qu’il lui reste encore à expérimenter, comme d’autres en d’autres temps plaçaient leur foi en un autre monde, dont ils n’avaient pas encore l’expérience. Le monde est devenu intégralement immanent, la fausse transcendance est restée : elle n’est plus guère celle de l’outre–monde, mais bien plutôt celle des expériences de vie qui restent encore à explorer. Etre quelque part — être situé dans le monde — est pour notre contemporain un objet de panique.

    Disons que le sujet de l’économie a mal lu Spinoza : il croit qu’il doit se laisser diriger par la question « qu’est–ce que je désire ? » Au besoin, il va chez le psychanalyste pour demander conseil. Mais il n’a pas compris que la question de ce qu’il désire ne pouvait trouver à se résoudre que depuis la compréhension d’une nécessité. C’est lorsque je suis en adéquation avec ce que l’on pourrait appeler une nécessité subjective (car je ne parle pas ici de nécessités qui seraient imposées par « l’ordre des choses ») que je peux enfin m’y retrouver dans ce que j’appelle « mon désir ».

  • Travail sexuel, travail pour tous / Collectif Multitudes « Le silence qui parle
    http://lesilencequiparle.unblog.fr/2014/01/21/travail-sexuel-travail-pour-tous-collectif-multitudes

    Le travail sexuel rémunéré connaît aujourd’hui en France un nouvel épisode dans la longue histoire de sa répression capitaliste et pudibonde. Dès l’ère victorienne on a compris comment transférer vers le travail acharné l’énergie sexuelle cadenassée, comme le montre le film d’Elio Petri La classe ouvrière va au paradis (1971). La répression est aujourd’hui d’autant plus insidieuse qu’elle se présente sous le visage compatissant et protecteur de l’aide aux victimes de la violence sexuelle, en supprimant notamment le délit de racolage public au profit de mesures dissuasives et incitatives pour sortir de la prostitution. Parmi elles, le projet de pénalisation du client suscite une réaction machiste de la part d’autoproclamés « salauds » qui revendiquent leur droit naturel à aller aux putes impunément, volant ainsi leur lutte aux prostituées (« touche pas à ma pute », ont-ils l’impudence de dire). (…)

    Libérer le #travail_sexuel de l’opprobre est certainement la première condition. Mais libérer l’ensemble des activités économiques de la forme subordonnée est aussi essentiel : personne ne devrait être obligé pour vivre de soumettre son corps et son esprit au #commandement d’un #patron ou d’un #client dont la position de patron ou de client est garantie par l’ensemble de la hiérarchie répressive. C’est à cette déhiérarchisation des relations sexuelles et de travail qu’une réforme devrait s’attacher, pas au renforcement de la #répression.

  • Nantes : un #Carrefour fermé après une action d’« anti-capitalistes »
    http://www.lefigaro.fr/societes/2013/12/31/20005-20131231ARTFIG00392-nantes-un-carrefour-ferme-apres-une-action-d-anti

    Après l’arrivée d’un important renfort de #gendarmerie portant l’effectif des forces de l’ordre sur place à plus d’une centaine d’hommes, une opération d’évacuation, un par un, des manifestants qui étaient restés bloqués dans l’hypermarché, a été menée à partir de 20h. A cette occasion, au moins l’un des manifestants a été blessé au visage. Trois militants ont été #interpellés tandis que les manifestants, restés aux abords de l’entrée huaient les gendarmes et imitaient des cris de loups.
    Plusieurs d’entre eux se sont dits « #zadistes », surnom des opposants anticapitalistes à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes situé à une dizaine de km au nord de Nantes mais ils ont souligné que leur action, visant à dénoncer la #société de consommation et à sensibiliser les clients à leur cause, n’était pas liée à l’aéroport. Vers 21h ils avaient tous été évacués du centre commercial mais plusieurs dizaines restaient devant l’entrée, face aux gendarmes.

    #autoréduction

  • Georg Büchner, « révolutionnaire avec plume et scalpel »
    http://www.lesauterhin.eu/?p=3459

    Büchner est-il enfin entré au panthéon de toute l’Allemagne ? Peut-être mais au prix d’une évangélisation, d’une historisation. L’historisation pourrait se décrire ainsi : C’est l’histoire d’un homme, un écrivain, qui s’appelait Büchner, il a rédigé des tracts (on installe une presse) c’est le Messager hessois, il a écrit sur la guillotine (on montre un échafaud ) c’est La mort de Danton et sur les automates (on expose des automates) et c’est Léonce et Lena ; il a disséqué des poissons (ça, ça se filme) et c’est Le système nerveux des barbeaux, il s’est intéressé à un homicide (on a des documents) et c’est Woyzeck. Ah j’oubliais le bon Pasteur Oberlin (voici le plan d’époque du Ban de la Roche) et c’est Lenz. Tout cela ne nous dit pas pourquoi il faut lire Büchner encore deux cent ans après et ce qu’il (...)

  • L’instant d’après. Projectiles pour une politique à l’état naissant, #Bernard_Aspe, 2006
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4705
    (avec un #bibliographie_en_ligne partielle de Bernard Aspe)

    Dans l’ordre démocratique-policier qui est le nôtre, les communautés humaines sont rassemblées sous le commandement de ceux qui ont des titres à commander, titres prouvés par le fait qu’ils commandent. La politique est précisément la rupture de cet ordre-là. L’Instant d’après survient sur les traces immédiates de cette rupture. C’est l’instant décisif où se décide si, une fois de plus, elle va aboutir au désaccord entre le dire et le faire, à l’élargissement de la distance entre le fantasme et le réel, ou si au contraire elle va permettre l’émergence de nouvelles #formes_de_vie.

    Il ne s’agit pas de proposer de nouvelles théories politiques, encore moins des systèmes d’organisation. Il s’agit plutôt de montrer comment sortir des oasis, de ces refuges dans notre fuite, que sont aussi bien la création d’une œuvre, la « réalisation de soi », l’action militante ou la vie d’une collectivité autonome. Car « beaucoup de ceux qui ont regardé les événements de novembre 2005 ont d’abord éprouvé l’absence d’un espace politique à la hauteur de ces événements. Ceux-là avaient déjà l’habitude de ne rien attendre du #militantisme et s’étaient sans doute pour la plupart éloignés de l’étouffement radicaliste... C’est à eux, justement, les êtres les plus quelconques, plus ou moins perdus dans leurs études et leurs métiers, plus ou moins empêtrés dans les restes d’un État-providence qui tournent en hypercontrôle sélectif, c’est à eux qu’il revient de faire en sorte que de l’imprévisible, et donc du réellement menaçant, ait lieu ».

    En donnant un sens nouveau à des notions anciennes - l’éthique, le messianisme, le #jeu - en convoquant là ou elles sont peu attendues de grandes figures philosophiques - #Kierkegaard, Wittgenstein - Bernard Aspe explore le sable du désert autour des #oasis où nous attendons l’instant d’après. « Sur le sable, il y a aussi des marques laissées par d’autres. Ambivalence des empreintes : elles peuvent nous livrer à la #police, mais elles sont aussi la preuve que nous ne sommes pas seuls. »

    Sommaire

    Le sable du #désert
    Jeux(I)
    Élément éthique
    Véridictions
    Jeux(II)
    Empreintes
    Notes

    #livre_en_ligne #communisme

  • Les emprunts #étudiants, malédiction des jeunes Américains
    http://lemonde.fr/economie/article/2013/06/04/les-emprunts-etudiants-malediction-des-jeunes-americains_3423644_3234.html

    Pendant les vingt prochaines années de sa vie, Greg Dubé, fraîchement diplômé de l’Université Northeastern de Boston, va devoir rembourser ses cinq ans d’études. « Je dois commencer à rembourser le #capital de mes prêts six mois après la fin de mes études. Je payais déjà les intérêts pendant mes cinq ans d’études, mais en novembre, je commence à rembourser le capital », raconte le jeune homme de 23 ans

    #dette_infinie

    #Livre_en_ligne : La fabrique de l’homme endetté, essai sur la condition néolibérale
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=6238

  • A propos du livre de #Vincent_Descombes « Les embarras de l’identité »
    http://www.laviedesidees.fr/S-individuer-dans-la-societe.html

    L’individualisme, selon V. Descombes, forme une composante essentielle de notre existence et de notre compréhension de nous-mêmes – étant entendu que ce « nous » a cessé depuis belle lurette de ne renvoyer qu’au seul monde occidental. Aucune vision alternative de l’être humain (hyper-valorisation de la tradition, de la religion, de la nation, de l’identité de genre…) qui prétendrait réactiver des formes de vie passées n’a de chances de rencontrer une attention durable. Sur le plan des principes, il n’y a rien d’ailleurs, moralement à lui opposer. On ne peut lui imputer les désordres innombrables liés à l’égoïsme, à la bêtise ou à la malveillance. Pour qui entend interroger l’individualisme, il y a donc seulement – et c’est là où peut commencer l’enquête philosophique – à observer en toute tranquillité les moments où il rend hommage sans le savoir et sans le vouloir à ses autres, c’est-à-dire aux formes de vie qui précèdent et portent les individus, à ce qu’ils n’ont pu choisir.

    Le propre de la société moderne est de fournir aux individus un répertoire d’expériences typiques à reproduire et de mots à utiliser pour exprimer, par exemple au moment de l’adolescence ou de la prime jeunesse, une crise d’identité. Nous sommes même encouragés à mettre en question nos appartenances sociales. Mais, bien évidemment, nous le sommes à titre d’individus socialisés, ayant dû apprendre un certain jeu de langage, ayant dû intérioriser un certain nombre d’expériences typiques représentées comme importantes. La personne moderne peut se définir comme celle qui est socialement interpellée en vue de faire semblant, ne serait-ce que pour une période particulière, de ne pas vraiment appartenir à la société. Mais la désocialisation n’en reste pas moins seconde. Si profonde qu’ait été notre crise d’identité, nous n’avons cessé à aucun moment de rester des êtres sociaux, c’est-à-dire des individus qui ont dû apprendre et reproduire des jeux de langage et des pratiques. « Le sujet découvre avec surprise qu’il ne peut trouver les raisons pour lesquelles il choisit d’être moderne qu’à la condition d’avoir déjà choisi sans raisons cette identité moderne » (p. 165). Or, une fois acquis ce point crucial, on peut, si l’on suit la démarche de Descombes, commencer à aller très vite, puisque le terrain des pratiques a été reconquis. En généralisant la portée de la conclusion « sociologique » à laquelle nous avons été conduits, on parvient à l’idée que les individus ne se choisissent pas eux-mêmes ; il faut dire, moins dramatiquement, qu’ils ne choisissent que d’endosser telles fins particulières. De telle sorte qu’ils ne commencent rien, absolument parlant ; ils adhèrent à des façons de faire qui sont déjà données. On ne s’individue, on n’acquiert, donc, d’identité propre, que dans la société.

    #Philosophie #Individualisme #Nation #Communauté #identité #Débat #livres

    • Simondon, Individu et collectivité. Pour une philosophie du transindividuel, Muriel Combes
      http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4433

      Simondon est l’un des philosophes contemporains qui a eu la conscience la plus aiguë du nouage de l’#ontologie et de la #politique. Sous le nom de #transindividuel, il identifie le point de réversibilité par où celles-ci ne cessent de passer l’une dans l’autre. Ce qui est en question dans la compréhension d’un tel passage c’est la manière dont la vie, individuelle et collective est engagée dans la pensée.

      Ce livre est paru aux PUF en 1999. Cette maison d’édition a depuis décidé de pilonner les exemplaires dont elle était #propriétaire, conformément aux moeurs de l’antiproduction #capitaliste. Voici ce texte revenu au public :

      L’œuvre publiée de Gilbert Simondon ne comporte à ce jour que trois ouvrages. La majeure partie de cette œuvre est constituée par une thèse de doctorat soutenue en 1958 et publiée en deux tomes séparés par un intervalle de vingt cinq ans : L’individu et sa genèse physico-biologique (1964) et L’individuation psychique et collective (1989). Mais le nom de Simondon est pourtant attaché dans de nombreux esprits à l’ouvrage intitulé Du mode d’existence des objets techniques, porté à la connaissance du public l’année même de la soutenance de la thèse sur l’individuation.

      C’est à cette postérité de « penseur de la technique » que l’auteur d’un projet philosophique ambitieux visant à renouveler en profondeur l’ontologie a dû de se voir davantage cité dans des rapports pédagogiques sur l’enseignement de la technologie qu’invité dans des colloques de philosophie. Il est vrai qu’il voua la plus grande partie de son existence à l’enseignement, notamment dans le laboratoire de psychologie générale et de technologie qu’il fonda à l’université de Paris-V, et que son ouvrage sur la technique reflète souvent un point de vue explicite de pédagogue.

      Pourtant, même ceux qui ont vu dans sa philosophie de l’#individuation une voie de renouvellement de la métaphysique et lui rendent hommage à ce titre, la traitent davantage comme une source d’inspiration souterraine que comme une œuvre de référence. Gilles Deleuze, qui, dès 1969, cite explicitement L’individu et sa genèse physico-biologique dans Logique du sens et dans Différence et répétition, constitue à la fois une exception par rapport au silence qui accueillit l’œuvre de Simondon et le commencement d’une ligne de travaux - pas nécessairement philosophiques - qui trouveront chez Simondon une pensée à prolonger plutôt qu’à commenter. C’est ainsi qu’un ouvrage comme #Mille_Plateaux, de #Deleuze et #Guattari, s’inspire des travaux de Simondon plus largement qu’il ne les cite. Et qu’une philosophe des sciences comme Isabelle Stengers, mais aussi des sociologues ou psychologues du travail comme Marcelle Stroobants, Philippe Zarifian ou Yves Clot mettent en œuvre les hypothèses simondoniennes dans leurs champs de recherche respectifs.

      Nous voudrions ici explorer un aspect de la pensée de Simondon que les rares commentaires qu’elle a suscités ont laissé de côté, à savoir : l’esquisse d’une éthique et d’une politique adéquates à l’hypothèse de l’être #préindividuel. Cette éthique et cette politique se concentrent dans le concept de transindividuel, dont nous avons tenté de faire un point de vue sur la théorie de l’individuation dans son ensemble.

      Détacher Simondon de son identité de « penseur-de-la-technique », c’est là une condition nécessaire pour suivre le courant d’une pensée du #collectif qui va puiser à la source de l’affectivité sa réserve de transformation. C’est aussi ce qui permet de découvrir dans l’ouvrage sur la technique autre chose qu’une pédagogie culturelle. Du préindividuel au transindividuel par la voie d’un renouvellement de la pensée de la #relation, tel est un possible chemin dans la #philosophie de Simondon. C’est celui que nous avons emprunté.

      #individu (critique de la notion d’) #livre_en_ligne #bibliographie_en_ligne (partielle)

  • À Francfort, la solution de la crise européenne pour Soros : « L’Allemagne a le choix entre les euro-bonds et quitter la zone euro »

    La magistrale leçon d’économie de George Soros à Angela Merkel
    http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20130410trib000758603/la-magistrale-lecon-d-economie-de-george-soros-a-angela-merkel.html

    Pour George Soros, les origines de la crise sont à rechercher dans l’Histoire et dans l’incomplétude du Traité de Maastricht. « Les architectes de l’euro reconnaissaient qu’il y avait là une construction incomplète : une union monétaire sans union politique », explique-t-il. S’ajoute à cela la création d’une banque centrale indépendante qui a fait s’endetter les États dans une monnaie qu’ils ne contrôlaient pas, les exposant ainsi au risque de défaut. Car, rappelle George Soros, la maîtrise de la création monétaire par un État est ce qui rend son défaut impossible.

    La solution est donc le renforcement du caractère fédérale de l’Union, en complétant l’union monétaire par une union bancaire et une union politique.

    Il complète son analyse de la méthode allemande par une intéressante considération psycholinguistique 

    L’échec de la méthode allemande reposant sur la « Schuld »
    Selon lui, la principale erreur de l’Allemagne réside dans sa manière d’appréhender cette crise. Comme le Fonds monétaire international (FMI) lors de la crise bancaire internationale de 1982, l’Allemagne identifie des États non vertueux « responsables ». « Les États périphériques se voient reprocher leur manque de discipline budgétaire et d’éthique du travail, mais cela ne suffit pas. Il est certes nécessaire que les États de la périphérie procèdent à des réformes structurelles, comme le fit l’Allemagne après sa réunification. Pour autant, ignorer que l’euro lui-même présente des problèmes structurels qui doivent être corrigés revient à ignorer la cause profonde de la crise de l’euro », explique le milliardaire.

    Ainsi ne faut-il pas y voir un discours contre les réformes structurelles demandées à un pays comme la Grèce. Ce qu’il dénonce est le fait de ne voir la résolution de la crise de la zone euro que par le seul prisme de l’austérité budgétaire. Pour George Soros, le fait que le terme allemand Schuld signifie à la fois dette, responsabilité et culpabilité, n’est pas anodin. "Son utilisation a rendu naturel pour l’opinion publique allemande le fait d’accuser les États lourdement endettés de leur propre infortune. Le fait que la Grèce ait manifestement violé les règles a contribué à cet état d’esprit.

    L’alternative au renforcement de l’Union

    L’alternative au choix d’une Europe fédérale a quant à elle de quoi surprendre les Allemands. Selon George Soros, si elle ne veut pas des euro-bonds, l’Allemagne doit tout bonnement sortir de la zone euro. Ce point de vue, défendu par un certain nombre d’économistes, repose sur l’idée selon laquelle sans l’Allemagne, l’euro se déprécierait de lui même, faisant regagner les économies en difficulté en compétitivité, sans pour autant que leur dette libellée en euros ne devienne insoutenable, comme ce serait le cas si l’Italie ou l’Espagne quittaient l’Union monétaire. « En cas de départ de l’Italie, la charge de la dette du pays libellée en euro deviendrait écrasante, et il serait nécessaire de procéder à une restructuration. Ceci plongerait le reste de l’Europe, ainsi que le reste du monde, dans un effondrement financier, qui pourrait bien dépasser la capacité des autorités monétaires à le contenir », argumente George Soros.

    Le retard dans la décision, probable vues les performances de la gouvernance de l’Eurogroupe et la campagne électorale allemande, aboutirait à une aggravation et extension de la crise avec, entre autres, un impact sur la croissance allemande et une perte d’influence de l’Allemagne sur les décisions.

  • « La dette neutralise le temps, matière première de tout changement politique ou social » - Contrôle social - Basta !
    http://www.bastamag.net/article2561.html

    Emprunt, crédit, créanciers, débiteurs, déficits, remboursement, taux d’endettement, « pacte budgétaire »… La #dette est partout, elle a envahi nos vies. Or la dette n’est pas seulement économique, elle est avant tout une construction politique. Elle n’est pas une conséquence malheureuse de la crise : elle est au cœur du projet néolibéral et permet de renforcer le contrôle des individus et des sociétés. « Le remboursement de la dette, c’est une appropriation du temps. Et le temps, c’est la vie », nous explique le sociologue et philosophe Maurizio Lazzarato (La Fabrique de l’homme endetté). Entretien.

    #politique #banques #capitalisme #néolibéralisme

  • « Petites natures mortes au travail », d’Yves Pagès (CIP-IDF)
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4836

    Entre témoignages vécus et jeux de rôle fictifs, vingt-trois courts récits qui ont pour cadre le monde du travail. Du consultant d’entreprise au télévigile, vingt-trois personnages recrutés à contre emploi ou exposés aux paradoxes de leur statut social. Et à chaque fois, un détail inattendu qui, mettant le quotidien en porte-à-faux, excite, comme par accident, notre imagination. (...) Source : CIP-IDF