• « L’adoption de la loi Duplomb constitue un moment de rupture démocratique inédit »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/07/13/l-adoption-de-la-loi-duplomb-constitue-un-moment-de-rupture-democratique-ine

    Sans cheveux ni sourcils, le visage émacié, encore marqué par l’épreuve de la maladie et de son traitement, une femme assistait de l’un des balcons du Palais-Bourbon, mardi 8 juillet, au vote solennel de la proposition de loi du sénateur Laurent Duplomb (Les Républicains, Haute-Loire), « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur ». Fleur Breteau, la quarantaine, fondatrice du collectif Cancer Colère, était invitée par des élus de gauche à assister au vote, aux côtés d’autres membres de la société civile. A l’adoption du texte, par les députés de l’arc bleu-brun et leurs supplétifs du parti présidentiel, sous les applaudissements victorieux, Fleur Breteau a crié : « Vous êtes les alliés du cancer et nous le ferons savoir ! »

    En réponse, ainsi que l’ont rapporté des journalistes présents, des rires ont traversé l’Hémicycle. Voici ce qu’une majorité de la représentation nationale avait à opposer, ce jour-là, au désarroi et à l’indignation de cette jeune femme et, à travers elle, à l’inquiétude de la société civile et de l’ensemble des communautés scientifiques concernées : une hilarité désinvolte, un cynisme méprisant, un virilisme de vestiaire.

    Le cri de Fleur Breteau ne se comprend pas si l’on se contente de dire pour quoi les députés ont voté. Il faut surtout expliquer contre qui ils ont voté. Ils ont, bien sûr, voté contre tout ce que la France compte d’associations de défense de l’environnement, mais ce n’est pas très étonnant. Ils ont surtout voté contre vingt-deux sociétés savantes médicales, contre la Ligue contre le #cancer, contre les administrateurs et les personnels de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, contre le troisième syndicat agricole de France, contre la Fondation pour la recherche médicale, contre vingt mutuelles, groupes mutualistes ainsi que la Fédération des mutuelles de France, représentant plusieurs millions d’assurés, contre le Conseil scientifique du CNRS, contre la Fédération des régies d’#eau potable, contre des centaines de médecins et de chercheurs qui ont signé intuitu personae des tribunes et des lettres ouvertes.

    [...]

    Les faits ont été considérés comme accessoires, la réalité du monde physique soluble dans les intérêts particuliers d’une petite minorité d’exploitants. Aucun débat n’a ainsi été possible, ni à l’extérieur ni à l’intérieur de l’Hémicycle. Au reste, que répondre à Laurent Duplomb lorsqu’il prétend que les haies s’étendent, alors que le rythme de leur disparition (plus de 23 000 kilomètres par an) a doublé depuis 2017 ? Que répondre lorsqu’il assure que le changement climatique est plutôt bénéfique pour sa région ?

    https://archive.ph/boriq

    la privatisation de la politique est d’« intérêt général public majeur »

    #agriculture #FNSEA #écologie #pesticides #megabassines #élevages_hors-sol #loi_Duplomb

  • Nos frères (et sœurs) les musulman·es et nos ami·es de LO
    https://www.revolutionpermanente.fr/Nos-freres-et-soeurs-les-musulman-es-et-nos-ami-es-de-LO

    Pour qui aurait pu encore en douter, un danger imminent guette la France : non pas la crise, les licenciements, ni les guerres, mais l’islam. Et derrière, bien entendu, arrive le voile. Énième faux-débat, nauséabond et criminel. Une occasion, néanmoins, de débattre, à nouveau, de ce que les communistes révolutionnaires devraient faire face à cette nouvelle opération islamophobe.

    « Frères musulmans et islamisme politique en France » : Macron et Rétailleau ont désigné l’ennemi public numéro 1, à grands renfort de « Conseils de défense et de sécurité nationale ». Dans une France où, pour le dire avec Sartre, « l’Algérie est une névrose », l’islam et les musulmans sont une obsession. Et les musulmanes le sont d’autant plus qu’elles sont, semblent ou apparaissent voilées. Cette névrose anime autant la droite que la gauche et représente un véritable révélateur colonial d’un passé qui ne passe pas, d’un racisme islamophobe qui est indissolublement lié au discours et aux pratiques politiques de tous les exécutifs et gouvernements de la Cinquième république. L’islam, ses manifestations mais surtout le voile font donc leur énième retour dans le débat. Un « débat » qui invite, à nouveau, à s’interroger sur la façon dont la gauche révolutionnaire devrait se positionner face aux questions de religion, voile et laïcité dans le contexte qui est le nôtre, marqué notamment par l’agression américano-sioniste contre l’Iran en juin et le génocide à Gaza qui se poursuit.

    Avec Dreyfus comme avec l’Islam

    Que dit d’intéressant ce fameux rapport que l’on ne saurait déjà ? Pas grand-chose, si ce qu’« un sentiment de malaise français, pour dire le moins, prévaut chez les musulmans ». Par conséquent, le rapport recommande à l’Etat de « lutter contre le sentiment de rejet qui irrigue les familles de confession musulmane [par] des signaux forts [1] ». Que « raconte », en revanche, ce rapport à longueur de pages ? Qu’une tendance minoritaire, très marginale et en perte de vitesse au sein de la communauté musulmane, la mouvance rattachée aux « Frères musulmans », représenterait un « danger » pour le pays. Relayé par un gouvernement cul-et-chemise avec le dictateur-roi du Maroc, Mohamed VI, « commandeur des croyants » et oppresseur du peuple Sahraoui, mais aussi avec les émirs qataris qui ont permis au PSG de faire quelques étincelles grâce à quelques milliards mais qui, surtout, financent le terrorisme islamiste de par le monde, ou encore avec le très réactionnaire président-barbu de la « nouvelle Syrie », Ahmad Al-Charaa, cela pourrait faire sourire. Que fait-on dire à ce rapport ? Qu’en dernière instance, à force de « dissimulation » – « taquiyya », en arabe dans le texte et citée à l’envi, car nos politiciens sont devenus experts en théologie islamiste – ce ne sont pas tant les « frères » qui représenteraient un problème que les musulmans en général. Et si on ne le dit ouvertement, du moins le suggère-t-on très fortement du côté du gouvernement.

    L’extrême droite et la droite française disent à qui veut bien l’entendre ne plus être antisémites. Elles se sont d’ailleurs fait le porte-étendard du génocide en Palestine, comme si leur soutien actuel au sionisme pouvait masquer leurs racines, de Boulanger à Pétain, de Barrès à Maurras en passant par Poujade et Le Pen. En revanche, leur islamophobie 2.0, compatible autant avec les réseaux sociaux qu’avec CNews, partage avec la vieille rhétorique anti-juive bien des points communs. Alfred Dreyfus pourrait reconnaître, au mot près, le déchaînement antisémite dont a été le théâtre la France d’il y a 130 ans. S’ils ne sont pas « séparatistes » – ils ne mangent pas comme nous, ne prient pas dans notre langue, leurs lois sont supérieures à celles de la République, leurs femmes ne s’habillent pas comme les autres « Françaises » – les musulmans (ou les juifs) sont « entristes ». Dissimulateurs, ils avancent masqués. Ils sont « partout » et si l’on n’y prend garde, on sera bientôt « submergés ». En tout cas, on n’est plus « chez nous ».

    Dreyfus, pas davantage qu’un imam, n’était socialiste. Officier de l’armée, polytechnicien, plutôt conservateur, il n’avait rien à voir avec la gauche révolutionnaire. A l’époque, certains, par œillères, n’ont pas participé à sa défense – « nous n’avons pas à nous mêler d’une affaire qui fait s’opposer deux secteurs de la bourgeoisie », diraient-ils sans doute aujourd’hui – voire ont rejoint le camp de nos ennemis, par un antisémitisme plus ou moins avoué et maquillé de soi-disant anticapitalisme – ce fameux « socialisme des imbéciles » dénoncé par le socialiste allemand August Bebel. Et pourtant, ce qu’il y avait de meilleur dans le mouvement ouvrier et chez les révolutionnaires du XIXe a défendu Dreyfus et a combattu sans concession une République et son système médiatique qui avaient condamné ce capitaine, accusé à tort « d’intelligence avec l’ennemi », parce que juif. La raison de cette défense, c’est que derrière Dreyfus et cet antisémitisme permanent, c’était tous les rouages d’un système d’oppression et d’exploitation maniant le chauvinisme et les discriminations qu’il fallait dénoncer et combattre.

    La pratique du judaïsme, réelle ou supposée, pas davantage que celle de l’islam, ne fait partie du programme communiste révolutionnaire, qui défend une conception matérialiste et athée du monde. Et pourtant, notamment là où cette religion serait marginalisée ou reléguée par le système en place, ses pratiques stigmatisées par un pouvoir qui n’a de leçons d’émancipation et de liberté à donner à personne, alors les communistes révolutionnaires se doivent d’être à ses côtés et de défendre les droits de celles et ceux qui souhaitent la pratiquer ou s’en réclamer. Ce qui valait pour un capitaine de l’armée française vaut aujourd’hui, également, pour les musulmans et les musulmanes.

    Pour des raisons d’espace et parce que le « débat » – avec son tombereau d’immondices, de vulgarités, de faux-semblants, de raccourcis et de mensonges islamophobes – a littéralement inondé les médias au cours des dernières semaines au point que personne n’a pu, malheureusement, y échapper, nous ne reviendrons pas ici sur les réactions de l’ensemble du champ politique sur ledit « rapport ». On soulignera simplement qu’à la différence des instrumentalisations passées autour de la « question de la place de l’islam en France » au cours desquelles la gauche – les dirigeants du PS, Fabien Roussel, les écologistes et bien d’autres – ont peu ou prou défendu la même ligne et les mêmes propositions de loi que le gouvernement, la ficelle, cette fois, était un peu trop grosse. Du côté de l’extrême gauche, en revanche, une discussion avec les camarades de Lutte ouvrière nous a semblé nécessaire.

    La religion nuit gravement à la santé. Mais le voile plus particulièrement ?

    Par la voix de ses représentants et dans ses éditos, LO a pris position contre le « rapport » et son instrumentalisation, dans la continuité d’un changement de ton des camarades sur la question de l’islamophobie d’État[Jusqu’à il y a peu, en effet, LO rejetait le concept « d’islamophobie », taxé d’ambigu]]. Ses porte-paroles ont ainsi clairement dénoncé la proposition faite par Attal – et relayée par d’autres – d’interdire le port du voile dans l’espace public pour les mineures de moins de quinze ans. Par ailleurs, ses porte-paroles Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier ont pointé sur les plateaux télé l’enchaînement abject qui fait que la parole « libérée » des gouvernants et des politiciens se traduit très concrètement par une hausse des actes à l’encontre des musulmans ou considérés comme tels avec, au final, les deux crimes islamophobes et racistes contre Aboubakar Cissé et Hichem Miraoui [2].

    En revanche, dans une série d’articles et de tweets [3], la droite et l’extrême droite n’ont pu que se réjouir, dans le climat actuel, de la « leçon en laïcité » de LO. On songera à la déclaration sur le plateau du Media de Nathalie Arthaud selon laquelle « le voile, c’est d’abord le symbole d’une oppression », de celle de Jean-Pierre Mercier affirmant sur LCI être « du côté des femmes qui se battent contre le port du voile, que ce soit en France comme à l’étranger »– au risque, assumé, de confondre le combat contre le port du voile là où il s’agit d’une contrainte imposée par un régime dictatorial et religieux, comme en Iran ou en Afghanistan, et son instrumentalisation, dans un pays impérialiste au lourd passif colonial, comme la France –, complétée, le lendemain, par celle de Nathalie Arthaud sur Sud Radio, dénonçant la « proposition de loi » Attal d’interdire le port du voile aux moins de 15 ans tout en proclamant son attachement à la Loi sur l’interdiction des signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires de 2004 [4].

    On ne saurait être dupe de l’opération des médias de droite consistant à extraire et à instrumentaliser quelques bribes de phrases du discours plus général de LO pour, en dernière instance, justifier « sur la gauche », une campagne qui est, elle, clairement raciste et islamophobe. Et, par effet de miroir inversé, alimenter au passage la machine politico-médiatique de stigmatisation de La France insoumise (LFI), taxée de « trahison à l’héritage laïque » et de complaisance à l’endroit de l’islam et du communautarisme. A la différence d’autres courants d’extrême gauche, nous ne sommes pas de ceux qui, dans le sillage du Prophète et le prolétariat de Chris Harman, viendraient à trouver une quelconque vertu ou spécificité intrinsèquement « révolutionnaire » à l’islam politique, quelles que soient les formes qu’il adopterait. En revanche, en tant qu’organisation d’extrême gauche militant dans un pays impérialiste, la France, et appelée à se prononcer sur la question du voile, en France et non dans un pays où l’islam est religion d’État, il nous semble que la position de LO n’est pas conséquente et ne va pas jusqu’au bout d’une dénonciation globale de l’islamophobie d’État et des leviers qui la sous-tendent.

    La première objection que l’on pourrait faire a trait au point de départ bancal qui est posé par les porte-parole de LO dans leurs interventions. « Toutes les religions se valent », nous disent-ils en substance. Nous pourrions dire, en effet, que toutes les religions, du christianisme catholique ou protestant au judaïsme en passant par l’islam – pour ne prendre que les cultes les plus présents, en France – ont pour point commun une relégation plus ou moins assumée de la femme à un rang subalterne qui inscrit dans les Textes une inégalité des rapports sociaux de genre. C’est les prémices dont partent, à raison, Arthaud et Mercier. Mais immédiatement après, sans tenir compte de la manière dont le « débat sur les religions » devient, en France, un « débat sur la place de l’islam », et comment cela se réduit, immédiatement, à un « débat sur le voile », sans tenir compte du fait que le voile est, en France, le seul signe visible de possible appartenance à une communauté religieuse qui pose réellement problème à la « République », les camarades de LO concluent uniquement sur la question du voile. Un voile dont il faudrait aider à se défaire toutes celles qui le porteraient contre leur gré [5].

    Sans réduire l’islam aux quartiers populaires ni l’islam au voile, il ne s’agit même pas de s’interroger – ce qui serait, en soi, une autre discussion – sur les multiples signifiés que représente, dans l’espace public ou à l’école, en France, un voile islamique : imposé contre leur gré à certaines, très probablement , porté de façon non contrainte et en toute conscience par d’autres, ou encore comme une expression culturelle ou religieuse d’appartenance revendiquée à une communauté stigmatisée et reléguée, qui ne connaît la République et ses fausses promesses d’égalité, de liberté et de fraternité que sous son aspect le plus policier, répressif, raciste et discriminatoire dans l’accession à l’emploi, au logement et dans tous les aspects de la vie quotidienne. Le voile islamique peut avoir plusieurs ressorts et significations à moins de considérer toutes celles qui le portent, tout le temps ou occasionnellement, uniquement comme des victimes et non comme des sujets agissants.

    Ce qui est sûr, en revanche, c’est que le raccourci imposé par en haut consistant à assimiler l’islam a une religion particulièrement réactionnaire – et par conséquent fondamentalement menaçante – et dont le véhicule consiste à couvrir le corps des femmes – par un hidjab, une abaya, un burkini ou autre – sert un propos spécifique. Il s’agit de continuer à alimenter une puissante machine idéologique, malheureusement assez efficace, servant depuis les origines de l’entreprise coloniale française en Afrique du Nord et perpétuée par le présent néocolonial de la politique impérialiste hexagonale : diviser le monde du travail et les classes populaires, opérer une distinction entre ceux qui seraient irrémédiablement perdus à la cause de l’émancipation et ceux qui, à l’inverse, seraient du bon côté, des Lumières et du progrès, entre « eux » et « nous ». Au sein d’une fraction de la « gauche » ce discours réactionnaire, adapté au cadre colonial et impérialiste existe également depuis les origines du mouvement ouvrier. Et peu importe, pour ses directions réformistes, si le mouvement ouvrier français s’est retrouvé ou se retrouve aujourd’hui, dans les faits ou le discours, du côté de sa « propre » bourgeoisie. Pour la bourgeoisie, on l’aura compris, c’est pain béni.

    En ce sens, ce n’est pas seulement l’opération politicienne, qualifiée aujourd’hui d’islamophobe par LO, qui est à dénoncer comme ont pu le faire à juste titre les camarades dans les colonnes de leur presse, dans leurs éditos d’entreprise et par la voix de leurs porte-parole. Pour être conséquente, la gauche révolutionnaire devrait également porter le combat contre l’ensemble des outils, idéologiques et légaux, sur laquelle cette opération est adossée. Sous couvert de défense de la laïcité et de la liberté religieuse, c’est l’ensemble de cet arsenal – et pas uniquement le rapport sur les frères musulmans, le discours de Retailleau et la proposition Attal – qui est profondément islamophobe dans sa stigmatisation des musulmans et musulmanes, qu’ils se revendiquent de cette appartenance religieuse ou qu’ils y soient assignés. Cela vaut autant pour la loi sur le séparatisme de 2021 que pour la loi de 2016 sur la neutralité religieuse au travail, celle de 2010 sur l’interdiction du voile intégral dans l’espace public ou celle de 2004 sur l’interdiction du port de signes religieux ostensibles à l’école.

    A nouveau sur le voile à l’école et la loi de 2004

    C’est d’ailleurs cette loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux ostentatoires dans les collèges et lycées qui sert de matrice à l’ensemble des instruments légaux votés depuis. Et cette loi de 2004 continue à être au cœur de l’argumentaire de LO et, dernièrement encore, défendue par Nathalie Arthaud.

    Au printemps 2003, le monde enseignant a mené un mouvement extrêmement dur contre la réforme Fillon des retraites. Les personnels de l’éducation ont perdu le bras-de-fer, mais le gouvernement Chirac-Raffarin y a laissé des plumes. Au cours des mois qui suivent, à travers une opération politicienne assez magistrale [6], Chirac réussit à recompacter autour de lui les enseignants qui l’avaient pourtant affronté l’année précédente. Pour ce faire, il va confectionner, de toute pièce, une nouvelle « affaire du voile » qui débouche quelques mois plus tard sur la loi de 2004, appuyée par la quasi-totalité de la gauche ainsi que par LO.

    En 2003 comme au cours des quinze années précédentes (1989, 1994 et 1999), des différends surgissent à la rentrée scolaire dans certains établissements entre le corps enseignant, la hiérarchie administrative et des cas très isolés de jeunes femmes refusant d’enlever le voile islamique dans l’enceinte des collèges et des lycées de banlieue. A partir de septembre 2003, dans un contexte international marqué par la guerre contre le terrorisme, l’invasion de l’Afghanistan – à laquelle participe la France – puis de l’Iraq par la coalition Bush-Blair, le débat prend une dimension toute particulière. Deux cas très spécifiques, au lycée Henri Wallon d’Aubervilliers, dans le 93, servent à orchestrer et polariser le faux débat [7]. Dans la foulée de cette affaire particulièrement médiatisée, Chirac met en place la Commission Stasi sur la laïcité à l’école et qui débouche sur une loi qui, de l’aveu même du Premier ministre de l’époque, Jean-Pierre Raffarin, ne défend pas en réalité la « laïcité » mais entend, au nom de la laïcité, « protéger les femmes des pressions du fondamentalisme [8] ». Fondamentalisme islamiste, on l’aura compris [9].

    A l’époque, LO contribue en partie à exacerber cette « nouvelle affaire du voile » puisque ses militants en poste au lycée Henri Wallon sont les partisans les plus intransigeants de l’expulsion des deux élèves au nom de la défense des droits des femmes et de la laïcité [10]. « Dans les banlieues, souligne LO à l’époque, un islam intégriste se développe. Au nom de préjugés barbares et réactionnaires, des hommes – des pères, des grands frères et aussi des petits caïds ignorants et violents – exercent une pression grandissante sur les jeunes filles pour les réduire au seul rôle de reproductrices, les enfermer, les cacher sous le voile. Des jeunes filles sont mariées de force à des hommes, parfois bien plus vieux qu’elles, qu’elles ne connaissent pas et n’ont pas choisis. À l’hôpital les maris qui les accompagnent refusent qu’elles se fassent examiner par des médecins-hommes. Certaines municipalités ont cédé sur le fait de réserver les piscines aux femmes à certaines heures et certains jours. Dans des cités, elles ne peuvent regarder un garçon en face ni porter les vêtements de leurs choix ni se maquiller sans se faire traiter de "putes" » [11]. Indépendamment du style et du ton que certains éditorialistes, aujourd’hui, ne renieraient pas, cette situation relève-t-elle de l’islam ou plus tristement du patriarcat capitaliste qui n’est pas simplement arabo-musulman ? En toute logique, LO finit donc par soutenir – et, malheureusement, continue à soutenir – « un texte sur lequel s’appuyer pour s’opposer au port du voile à l’école. Ce sera aussi et surtout un appui pour toutes les jeunes filles qui veulent résister aux pressions sexistes qu’elles subissent et qui attendent une aide de la société [12] ». En attendant une aide de la société, LO a fini par valider la législation islamophobe mise en place par Chirac et soutenue par la quasi-totalité de l’arc parlementaire [13]. Cette loi de 2004 n’est que l’origine matricielle de celles qui ont suivi. Attal, en voulant interdire le port du voile aux mineures de 15 ans, n’aurait fait qu’élargir à l’espace public ce qui est interdit dans les enceintes scolaires de la République. Pourtant, en dépit d’un changement de ton sur l’islamophobie, LO continue de soutenir cette loi et refuse de faire le bilan de ce qui a été une politique en tout point catastrophique et qui a contribué à offrir une couverture d’extrême gauche à une opération ultraréactionnaire.

    Ne pas se tromper d’ennemis, ni d’alliés, combattre les lois islamophobes

    Indépendamment de ce détour par la loi de 2004 qui continue à être au cœur des logiques mises en avant par LO, l’enjeu est de choisir ses alliés, de ne pas se tromper d’ennemis et ne pas servir de caution à nos adversaires. Faire la distinction entre le débat sur le voile, en France, et la question du voile dans un pays où, légalement ou dans les faits, il relève d’une obligation, ne signifie pas renoncer à défendre une vision marxiste et matérialiste du monde ni cacher son combat contre les institutions, hiérarchies et, en dernière instance, idées religieuses [14]. Ce combat, néanmoins, ne saurait se dissocier d’une opposition préalable, radicale et sans concession, à l’ensemble des instruments et des relais islamophobes sur lesquels la bourgeoisie française peut compter à travers sa république pour stigmatiser, marginaliser et viser ceux d’entre nous qui sont assignés à une « autre » identité ethnique ou religieuse. Ce que la police, les RH des entreprises et les médias se chargent de rappeler, constamment.

    Pas davantage qu’on ne peut soutenir qu’il existe un signe d’égalité entre Netanyahou et le Hamas – discussion qui a fait l’objet de débats, dernièrement, entre nos organisations – au nom des intérêts abstraits du monde du travail qui seraient équivalents en Israël et en Palestine, on ne peut soutenir, en France, qu’il soit symétriquement essentiel de lutter contre deux extrêmes droites, dont l’une serait « raciste [et l’autre] islamiste [pour] défendre une perspective ouvrière ». C’est pourtant encore ce que défendait LO y a quatre ans, dans un son article « Loi séparatisme, islamisme : des politiques qui divisent les travailleurs ». C’est, là encore, faire prévaloir le même principe d’abstraction sur l’analyse concrète des intérêts sociaux et des dynamiques en jeu.

    Sans trop risquer de se tromper on dira, à titre d’exemple, qu’il est aussi peu probable qu’un média du groupe Bolloré porte un jour dans son cœur la cause LGBTQI [15] que ne le ferait un imam salafiste particulièrement rigoriste dans une salle de prière, en France. Mais cela permet-il pour autant d’affirmer, toujours dans ce même texte que « les idéologies rivales des islamistes et de l’extrême droite, tout en apparaissant opposées, se situent toutes les deux sur le terrain de la défense des intérêts de la bourgeoisie [et qu’elles] s’alimentent l’une l’autre et présentent en réalité bien des similitudes » ? Le propriétaire médiatique, Bolloré, et celui l’imam rigoriste, aussi réactionnaire soit-il, constituent deux secteurs totalement distincts, qui ne sauraient permettre de dresser des équivalences, indépendamment de leurs « prêches ». Ou, pour le dire autrement, indépendamment des publics auxquels ils s’adressent et vis-à-vis desquels les révolutionnaires opposeront un discours, une propagande communiste, ils incarnent des milieux radicalement distincts : tandis que Bolloré et ses amis représentent l’entre-soi de la grande bourgeoisie française, impérialiste, et ses mille ramifications dans le pré-carré nécolonial, l’autre, en revanche, évolue dans notre milieu, le monde du travail, les classes populaires, celui au sein desquels nous intervenons et au sein duquel nous défendons nos idées, sur la base d’un combat contre le système capitaliste et les oppressions qu’il charrie ou perpétue.

    C’est en ce sens, aussi, qu’il est impossible de se tromper de combat : contre la religion, nous luttons pour que le monde du travail soit en mesure de prendre pleinement son destin en main. Si la gauche révolutionnaire s’oppose à un État qui veut faire la chasse aux jeunes femmes voilées et qui vomit au quotidien sa haine de l’islam, si elle manifeste aux côtés de celles et ceux qui, quelle que soit leur motivation, sont solidaires de la Palestine et dénoncent la complicité des impérialistes avec le génocide israélien, alors les différentes organisations qui se réclament de la révolution doivent se retrouver, unies, en première ligne d’une mobilisation permanente et concrète contre l’ensemble des lois racistes et islamophobes. Car toutes sécrètent et alimentent ce venin qui nous divise et qui sert tant les intérêts de la bourgeoisie et de ses politiciens de tout bord. C’est un combat de l’ensemble de nos organisations qui doit être mené en direction du monde du travail et de la jeunesse pour montrer comment, pour combattre les discriminations et le racisme antis-musulman, c’est bien du côté du drapeau rouge que notre classe doit chercher les armes du combat.

    Jean-Patrick Clech, chef du Courant Communiste Révolutionnaire à la NPA et du comité de rédaction du magazine Révolution Permanente.

    • Au printemps 2003, le monde enseignant a mené un mouvement extrêmement dur contre la réforme Fillon des retraites. Les personnels de l’éducation ont perdu le bras-de-fer, mais le gouvernement Chirac-Raffarin y a laissé des plumes. Au cours des mois qui suivent, à travers une opération politicienne assez magistrale [6], Chirac réussit à recompacter autour de lui les enseignants qui l’avaient pourtant affronté l’année précédente. Pour ce faire, il va confectionner, de toute pièce, une nouvelle « affaire du voile » qui débouche quelques mois plus tard sur la loi de 2004, appuyée par la quasi-totalité de la #gauche ainsi que par #LO.

      #professeurs #enseignants #école #voile #loi_du_15_mars_2004

    • Le piège de la « lutte contre l’islamophobie »
      https://www.lutte-ouvriere.org/portail/mensuel/2017-01-22-le-piege-de-la-lutte-contre-lislamophobie_75202.html

      Une politique de construction de fronts pour « lutter contre l’islamophobie » est de plus en plus défendue par une partie de l’extrême gauche. Au point de perdre tout repère de classe, et d’user de démagogie vis-à-vis de l’islam politique.

      (...) Communisme et religion

      Pour justifier leur indulgence pour l’islam politique, les divers groupes d’extrême gauche qui gravitent dans ce mouvement cherchent des justifications théoriques.

      La religion musulmane, expliquent-ils d’abord, serait, en France, une religion d’opprimés et, à ce titre, non comparable aux autres religions qui, elles, seraient du côté des oppresseurs.

      Que l’islam soit en France en religion majoritairement pratiquée par des opprimés, c’est-à-dire des prolétaires, c’est une certitude. Mais faire ce constat doit-il mener à se montrer conciliant avec cette religion  ? Bien au contraire  ! Davantage encore, justement parce que ceux qui sont touchés par cette religion sont les nôtres, nous devons la combattre  ! La classe ouvrière, précisément parce qu’elle est la classe opprimée de la société, a moins accès au savoir, à la culture que d’autres couches de la société, ce qui la rend plus perméable à tous les préjugés. Et si ceux-ci prennent la forme de préjugés religieux parmi les travailleurs d’origine maghrébine ou africaine, ils en prennent d’autres, dans d’autres couches du prolétariat. À commencer par le racisme, hélas bien présent dans la classe ouvrière française. Et pourtant, aucun militant n’imagine ne pas le combattre sous prétexte qu’il s’agit de préjugés d’opprimés. Pourquoi en serait-il autrement avec la religion  ?

      Autre argument  : le marxisme n’aurait pas de vraie tradition antireligieuse. C’est par exemple ce que prétend un enseignant de Seine-Saint-Denis, qui défend la liberté de porter le voile à l’école, Pierre Tevanian. Son ouvrage, La haine de la religion, explique, en le falsifiant, que Marx n’était finalement pas si antireligieux que cela. On y lit  : «  C’est aujourd’hui l’athéisme et le combat antireligieux, l’irréligion en somme, qui peut être considérée comme l’opium du peuple de gauche.  »

      Que le marxisme ne se soit jamais donné comme objectif prioritaire de faire de la propagande antireligieuse, certes. Les communistes ne sont pas des laïcards, du nom de ce courant de bourgeois radicaux au tournant des 19e et 20e siècles qui considéraient que la lutte contre la religion était plus importante que la lutte des classes, ou plutôt qui préféraient largement que les ouvriers se battent pour la laïcité plutôt que pour remettre en cause l’ordre social.

      Marx savait que les préjugés religieux étaient les conséquences de l’oppression, et qu’ils ne disparaîtraient pas avant une transformation profonde de la société, en d’autres termes, avant que la société communiste, en supprimant l’exploitation et l’oppression, supprime du même coup les causes de la religion. Et la ligne de démarcation que tracent les communistes, dans la société actuelle, n’est pas entre les laïcs et les religieux, mais entre les prolétaires et les bourgeois.

      Pour autant, les marxistes ont toujours considéré la propagande antireligieuse comme indispensable. Être communiste, c’est être matérialiste, et être matérialiste, c’est être athée. On peut être athée et se battre, dans une grève, aux côtés d’un travailleur croyant. Mais cela n’empêche pas qu’il est du devoir de n’importe quel révolutionnaire communiste d’essayer d’arracher non seulement les militants qu’il veut gagner à sa cause, mais même ses camarades de travail et de lutte, à l’emprise de la religion. Trotsky l’expliquait, en 1923  : «  Nous adoptons une attitude tout à fait irréconciliable vis-à-vis de tous ceux qui prononcent un seul mot sur la possibilité de combiner le mysticisme et la sentimentalité religieuse avec le communisme. La religion est irréconciliable avec le point de vue marxiste. Celui qui croit à un autre monde ne peut concentrer toute sa passion sur la transformation de celui-ci.  » Et à la fin des années 1930 il écrivait encore, dans Défense du marxisme  : «  Nous, les révolutionnaires, nous n’en avons jamais fini avec les problèmes de la religion, car nos tâches consistent à émanciper non seulement nous-mêmes mais aussi les masses de l’influence de la religion. Celui qui oublie de lutter contre la religion est indigne du nom de révolutionnaire.  »

      Le piège de «  l’islamophobie  »

      Il est donc évidemment possible de lutter à la fois contre les discriminations racistes et contre la religion.

      C’est la raison pour laquelle le terme d’islamophobie nous a paru ambigu, et il l’est toujours par certains aspects, bien que le mot soit devenu d’usage courant. Nous rejetons et combattons les discriminations qui peuvent s’exercer à l’encontre des musulmans, parce que nous sommes pour la liberté de culte. Mais nous sommes athées, opposés à toutes les religions. Et l’équation, imposée par les islamistes et leurs amis, selon laquelle lutter contre la religion musulmane signifierait être raciste, est une escroquerie.

      Une partie de la classe politique française actuelle rejette et discrimine les musulmans, en tout cas les pauvres, ceux des cités et des usines, car elle ne rejette certainement pas les milliardaires des théocraties du Golfe. Et il est compréhensible que nombre de jeunes se sentent victimes d’une oppression spécifique, qui existe bel et bien. Comment admettre que les politiciens de droite, qui hurlent à la laïcité et veulent interdire les menus de substitution dans les cantines, soient les mêmes qui combattent pour permettre l’installation de crèches de Noël dans le hall de leur mairie  ?

      La laïcité des politiciens bourgeois d’aujourd’hui est à géométrie variable, et elle est tournée contre la religion musulmane, comme elle l’a été en d’autres temps contre les Juifs. Et c’est d’autant plus choquant que les mêmes n’ont pas hésité, dans le passé, à se servir de l’islam pour tenter de canaliser la colère et le ressentiment des jeunes des banlieues, comme le fit Sarkozy lorsqu’il créa le Conseil national du culte musulman.

      Défendre le communisme

      Mais nous estimons que c’est notre rôle, en tant que communistes, de dénoncer l’emprise de la religion musulmane sur la jeunesse d’origine immigrée  ; de nous battre, de militer pour essayer d’arracher celle-ci au «  brouillard de la religion  », comme écrivait Marx, pour lui ouvrir les yeux, lui faire comprendre que son émancipation ne se fera pas par la soumission à des principes religieux d’un autre âge, mais dans l’union de classe avec le reste du prolétariat.

      Notre tâche de révolutionnaires n’est pas de conforter les travailleurs dans leurs préjugés religieux, mais de les combattre. D’expliquer que l’islam politique, fût-il radical, n’a jamais combattu l’oppression sociale  ; que c’est un courant profondément anticommuniste  ; que là où il est au pouvoir, il l’est aux côtés de la bourgeoisie, réprime les grèves et assassine les militants ouvriers  ; que l’islam, comme toutes les religions, prône la soumission et la résignation face à l’ordre social, en un mot que les partis politiques islamistes sont des partis bourgeois. De reprendre à l’identique, en ajoutant simplement au mot christianisme ceux de judaïsme et d’islamisme, les paroles de Marx  : «  Les principes sociaux du christianisme prêchent la lâcheté, le mépris de soi, l’avilissement, la servilité, l’humilité, bref toutes les qualités de la canaille  ; le prolétariat, qui ne veut pas se laisser traiter en canaille, a besoin de son courage, du sentiment de sa dignité, de sa fierté et de son esprit d’indépendance beaucoup plus encore que de son pain.  »

      C’est notre rôle d’expliquer aussi que, si les musulmans sont victimes de discriminations, c’est aussi un résultat de la politique des groupes djihadistes eux-mêmes, dont le caractère aveugle des attentats vise précisément et consciemment à provoquer des réactions de rejet contre les musulmans chez les Français non issus de l’immigration. Les travailleurs musulmans, en France, sont les secondes victimes des attentats, après les morts et les blessés. Il s’agit d’une politique consciente des dirigeants de l’islam politique, qui raisonnent de la même façon que les dirigeants impérialistes, et sont tout autant des ennemis des opprimés.

      Pour mener ces luttes et défendre ces idées, les précédents dont on peut s’inspirer ne manquent pas, à commencer par l’exemple du bolchevisme. Car les actuelles attaques islamophobes ne sont rien à côté de ce qu’était l’antisémitisme dans la Russie tsariste, qui prenait la forme de pogromes et de massacres de masse. Les militants bolcheviks, dans ce contexte, n’ont pas choisi la démagogie vis-à-vis du nationalisme juif, et encore moins de la religion, mais ont lutté inlassablement pour arracher les opprimés juifs à cette influence, et les intégrer dans le combat général mené par le prolétariat. Le rôle des militants juifs dans le Parti bolchevik et dans la Révolution russe montre à quel point ils ont réussi.

      ~~~

      Aujourd’hui, 170 ans après le Manifeste communiste, il faut apparemment encore rappeler que le communisme n’est pas compatible avec la religion.

      Il est affligeant de voir des prétendus révolutionnaires se solidariser avec des rebuts d’idées que l’on trouve dans des livres comme ceux de Houria Bouteldja. Ces idées sont la négation même des idées communistes.

      Cette évolution est un symptôme du recul réactionnaire qui touche la société. Le seul remède contre ce délitement, c’est de défendre sans relâche les perspectives communistes, l’idée qu’on ne peut pas combattre l’oppression en défendant une autre forme d’oppression. C’est de garder sa boussole de classe, de se battre inlassablement pour redonner une conscience aux travailleurs plutôt que la diluer encore un peu plus, de militer pour construire un parti communiste ouvrier.

      Dans ce combat, il est indispensable de gagner au communisme des jeunes travailleurs issus de l’immigration, non pas en encourageant leurs préjugés religieux mais en en faisant des révolutionnaires, c’est-à-dire des athées, capables de contrebalancer dans leur propre milieu les idées propagées par les ennemis du mouvement ouvrier.

      15 janvier 2017 Lutte de Classe n° 181

  • Loi dite du « plein emploi » : le gouvernement attaque les travailleur·euses des métiers du care et les minorités - Mouvement des mères isolées
    https://paris-luttes.info/loi-dite-du-plein-emploi-le-19737

    (...) Les étranger-es non européen·nes, qui auraient signé le contrat d’intégration républicaine (#CIR) de leur côté, seront désormais également inscrit·es automatiquement à France Travail sans savoir s’ils cherchent ou non un emploi. De fait, ils seront soumis au contrat d’engagement et aux 15h de mises à disposition hebdomadaire.

    Un dispositif conçu pour contrôler et exploiter les étranger·es non européen·nes

    La perversité de ce dispositif se dévoile encore davantage lorsqu’on observe sa mise en application. Le CIR est déjà contraignant par nature, car le préfet peut résilier le contrat sur proposition de l’#Ofii (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) notamment en cas de non participation à une formation prescrite. Or, un plan d’action a été mis en place à France Travail, qui permet de flécher tous·tes les étranger·es hors-UE vers des postes de métiers en tension : aides-soignant·es, aides à domicile et commis·es de cuisine, quelles que soient leurs qualifications initiales. Ces postes souffrent de conditions de travail précaires et difficiles, d’horaires fractionnés, de conventions collectives délétères qui maintiennent les rémunérations à des niveaux extrêmement bas.

    [...]

    Rappelons-nous des propos sans équivoque de Fabien Roussel : la gauche doit défendre le #travail et le salaire et ne pas être la gauche des allocations, minimas sociaux et revenus de substitution", qui ont sans doute contribué à ce que la direction de la confédération de la CGT ne se saisisse d’aucun levier pour faire abroger cette loi. L’appel à la grève de l’intersyndicale de France Travail en février 2025 aurait-il pu déboucher sur l’abrogation de cette loi, s’il n’avait pas été annulé par l’intersyndicale qui l’avait pourtant convoqué ? Seules les associations de terrain ont mené la bataille contre cette loi abjecte qui transforme radicalement la société.

    La gauche sociale démocrate avait par ailleurs emboîté le pas de la Macronie en signant une tribune qui exigeait « la régularisation (...) des sans-papiers dans les métiers en tension », avec Ruffin en tête des signataires. Les étranger·es y étaient déjà perçu·es comme la variable d’ajustement d’un marché de l’emploi en berne, et servi·es sur un plateau par celles et ceux qui prétendent être des forces de progrès, les mêmes qui jouent aux équilibristes en parlant de l’extrême-droite comme d’un fantôme du futur. (...)

    #loi_Plein_emploi #étranger-es_non_européen·nes #France_Travail #emploi #métiers_en_tension #minimas_sociaux

  • En Seine-Saint-Denis, les expulsions pour dette locative explosent | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/070725/en-seine-saint-denis-les-expulsions-pour-dette-locative-explosent

    Claude Lévêque dans son appartement de La Plaine Saint-Denis, en juin 2025. © Photo Livia Saavedra pour Mediapart

    Deux ans après l’adoption de la loi Kasbarian-Bergé, le nombre d’expulsions pour dette locative explose. Malades cardiaques, mères de nourrisson etc., plus aucun critère de vulnérabilité ne semble suffisant pour empêcher ces mises à la rue brutales.

    Une expulsion pour #dette_locative avec concours de la force publique comme il y en a de plus en plus depuis l’adoption en avril 2023 de la loi Kasbarian-Bergé, dite « loi anti-squat ».

    Retraite de 200 euros

    Au niveau national, les expulsions ont ainsi crû de 29 % par rapport à l’an dernier, avec un record de 24 556 ménages expulsés. En #Seine-Saint-Denis, département le plus pauvre de l’Hexagone, elles ont bondi de 112 % entre 2022 et 2023, avec encore une augmentation de 25 % en 2024.
    Les effets de la #loi_Kasbarian-Bergé, qui, au-delà de la question du squat mise en avant dans les médias, visait surtout à faciliter les expulsions pour impayés de loyer, sont bien là. En réduisant les délais des procédures, et donc les possibilités de recours des locataires, elle a fait exploser le nombre d’#expulsions_locatives.

    En apprenant la tournure dramatique de l’expulsion de Claude Lévêque, qui, ce jour-là, a frôlé la mort, la #préfecture de Seine-Saint-Denis lui a accordé un sursis pour retourner dans son #logement. La moindre des choses puisqu’elle avait tous les éléments sur son état de santé quand elle a décidé l’expulsion, et ce alors que la procédure doit être suspendue dès lors qu’il y a un risque d’« atteinte à la dignité humaine ».

    #locataires #loyers #impayés_de_loyer

    • [...]

      Le livre des invités

      Aime et ne fait pas ce que tu veux (Éd. Le Condottiere, 2025)

      « Un homme ça s’empêche. Voilà ce qu’est un homme, ou sinon... » Albert Camus #Inceste, abus sur mineurs, #violences conjugales… Chaque fois, les pervers usent de l’amour, ou l’invoquent. Dans un monde qui a célébré avec les chrétiens « la civilisation de l’amour », on a tôt fait d’interpréter à contresens et dénaturer le propos de saint Augustin : « Aime et fais ce que tu veux »… Des pans entiers de la littérature, nombre de tragédies antiques et la Bible nous ont pourtant mis en garde : l’amour peut mentir, se mentir et nuire. Freud le disait déjà : l’amoureux tend toujours à confondre Toi et Moi, montrant combien cette confusion favorise la toute- puissance par laquelle naît l’emprise.

      C’est dans une confusion semblable que se construit, au nom de l’amour du bien et du peuple, la domination totalitaire. Remettant en perspective les faits et les textes, Paule Zellitch et Jean-François Bouthors démontent les conduites qui conduisent à idéaliser et pervertir l’ #amour jusqu’à ne plus voir la nécessité de fixer des limites au #désir. Aime et ne fais pas ce que tu veux éclaire ainsi d’un jour nouveau une question centrale pour le devenir de notre civilisation : comment remettre au centre la dynamique vitale de l’ #altérité comme principe de discernement et de conduite ? Selon la tradition juive, l’amour sans la loi devient fou, la loi sans l’amour est injuste.

      Comme le montrent les auteurs, la Loi, au sens biblique est beaucoup plus qu’un code…

      [...]

    • Ah, ces pauvres jeunes gens obligés de travailler sur les terrasses des cafés sans pouvoir s’offrir un véritable « Frühstück ». Pourtant on ne sait jamais si c’est un choix imposé ou l’expression de son libre arbitre. Dans les années 1980 on s’octroya bien des « petit déjeuners français », un espresso et une gauloise sans filtre.
      Pas trè poétique la vie.

      #jeunesse #travail #loisir

  • Un père d’enfants français arrêté avec son bébé devant chez lui et envoyé en CRA | StreetPress
    https://www.streetpress.com/sujet/1747928581-pere-enfants-francais-arrete-bebe-cra-menace-expulsion-paris

    Promulguée le 26 janvier 2024, la nouvelle #loi_immigration permet désormais d’expulser un parent d’enfant français, jusque-là protégé par le droit. Maxime Giroux, coordinateur de l’Assfam au #CRA de Paris-Vincennes, confirme :

    « Il ne suffit donc plus de démontrer le lien de filiation et la participation à l’entretien et à l’éducation, afin d’obtenir l’annulation des mesures d’éloignement. »

    Dans leur rapport annuel de 2024, les associations intervenant en CRA dénonçaient « une utilisation de plus en plus massive et disproportionnée de l’enfermement administratif, de situations individuelles dramatiques et de violations fréquentes des droits fondamentaux des personnes retenues ».

    À la suite de cette #OQTF, Félix et sa femme ont déposé un premier recours. En février 2025, le tribunal administratif de Paris annule l’interdiction de retour sur le territoire français, tout en maintenant l’OQTF. La famille a fait appel dans la foulée et attend une date d’audience. « L’un de nos arguments les plus forts, c’est l’atteinte à la vie privée et familiale qui est garantie par la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et qui s’oppose à ce type de décision administrative », détaille Guillaume Halbique. Des mois avant son arrestation, la famille de Félix vivait déjà dans la peur, repliée sur elle-même. « On n’osait pas en parler autour de nous, il y avait aussi la honte, à cause de cette histoire de violence. » Le père de famille ne prenait plus les transports et ne sortait pas seul, de peur d’être expulsé.

    #étrangers #racisme_d'État

  • Disparition de près de 400 kilos de cocaïne : les patrons de l’Office antistups de Marseille placés en garde à vue - Le Parisien
    https://www.leparisien.fr/faits-divers/disparition-de-pres-de-400-kilos-de-cocaine-les-patrons-de-loffice-antist

    INFO LE PARISIEN. L’enquête sur les méthodes du service d’élite antidrogue marseillais vise désormais la haute hiérarchie : deux commissaires, chefs de l’Ofast Marseille, ont été placés en garde à vue ce lundi matin dans les locaux de l’IGPN, la police des polices. Au cœur des soupçons, notamment, une livraison surveillée de cocaïne qui a viré au scandale.

    C’était l’opération anti-drogue qui devait faire entrer l’Ofast (Office anti-stupéfiants) de Marseille dans la légende. L’idée : suivre l’entrée en France de près de 400 kilos de cocaïne en provenance de Colombie. Puis espérer faire tomber un grand narcotrafiquant français à la tête d’un quartier phocéen générant jusqu’à 1,3 million d’euros mensuel de vente de stupéfiants.

    Las, l’opération a viré au fiasco. La drogue s’est volatilisée, aucune interpellation n’a été réalisée, et l’affaire a révélé les méthodes douteuses d’enquêteurs, entre arrangements avec le code de procédure pénale et soupçons de corruption. Pire : toute la hiérarchie de ce service d’élite est désormais éclaboussée, faisant craindre un scandale policier de grande ampleur.

    Selon nos informations, les deux patrons de l’antenne de l’Ofast de Marseille ont été placés en garde à vue ce lundi matin dans les locaux de la Division nationale des enquêtes (DNE) à Paris, l’unité de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) chargée des dossiers sensibles.

    Il s’agit d’une commissaire divisionnaire, numéro 1 de l’Ofast Marseille, et de son adjoint, un commissaire principal. Ces hauts gradés sont entendus dans le cadre de l’information judiciaire, pilotée par la Junalco, ouverte notamment pour « importation et trafic de stupéfiants en bande organisée », « faux en écriture publique » et « atteinte à la vie privée ». Dans cette affaire sans précédent, deux indicateurs et trois enquêteurs de l’Ofast Marseille ont déjà été mis en examen, dont deux placés en détention provisoire. Seul le capitaine, le chef de groupe, a été laissé sous contrôle judiciaire contre l’avis du parquet de Paris.

    Le fiasco de l’opération Trident

    À l’origine, une opération prometteuse baptisée « Trident ». L’Ofast Marseille reçoit en 2023 un tuyau de l’un de leurs indicateurs, corroboré par la DEA, l’agence anti-drogue américaine. Deux conteneurs contenant près de 200 kilos de cocaïne dissimulés dans des cargaisons de bananes doivent débarquer au port de Marseille en provenance de Carthagène (Colombie) avant de transiter vers la région parisienne. Avec l’accord des magistrats marseillais, une « livraison surveillée » une technique d’enquête policière visant à laisser entrer de la drogue sur le territoire français pour identifier les trafiquants et démanteler le réseau d’importation, est mise en place.

    Parmi la centaine d’enquêteurs qui composent l’antenne marseillaise de l’Ofast, c’est le groupe 8, l’un de ceux chargés de réprimer le trafic international de drogue et celui qui a été destinataire de l’information, qui est chargé de monter l’opération. Pour les enquêteurs, il est évident qu’une telle quantité de poudre blanche va susciter la convoitise de Mohamed Djeha, dit « Mimo de la Castellane », l’une des cibles prioritaires de l’Ofast, alors en cavale.

    Mais pour des raisons énigmatiques, l’opération tourne à la débâcle. Les informations transmises à la justice sont erronées : le chargement contient 400 kilos, le double de ce qui était annoncé. Ensuite, personne ne vient récupérer la marchandise. La drogue est stockée à l’arrière d’un utilitaire, abandonné de parking en parking à Marseille. « Mimo » ne mord pas à l’hameçon. Comme si l’opération policière avait été éventée et que le baron de la drogue avait senti le piège.

    Malgré cet échec, les enquêteurs vont se fourvoyer en sollicitant leurs indicateurs dans l’espoir d’écouler les 400 kilos auprès d’autres réseaux de narcotrafiquants susceptibles d’être démantelés. Des dealers viennent alors se servir en petites quantités dans la camionnette, mais aucun narcotrafiquant d’ampleur n’est identifié. Et lorsque les enquêteurs se décident - enfin - à perquisitionner l’utilitaire après des mois de surveillances guère assidues, c’est la stupéfaction : il ne reste plus… qu’un pain contenant 1 kilo de cocaïne. Les 399 autres kilos ont purement et simplement disparu.

    De graves dissensions

    Comment expliquer un tel fiasco ? Les fonctionnaires ont-ils perdu le fil en voulant réaliser le coup d’une carrière ? Ou cette opération recèle-t-elle des mobiles moins avouables ? Des soupçons de corruption sont apparus, avec le témoignage d’un serrurier de l’Ofast Marseille. Employé par le service comme homme à tout faire - crochetage de serrures, pose de caméras... -, il a confié ses doutes quant à la probité de certains enquêteurs de l’Ofast Marseille, en particulier du groupe 8. Il a affirmé avoir vu l’un d’eux manipuler un sac d’argent et même avoir réalisé des actions hors cadre de toute procédure judiciaire pour le service. Début 2024, une enquête judiciaire est ouverte, d’abord à Marseille avant d’être dépaysée à la Junalco à Paris.

    Les investigations s’accélèrent et remontent petit à petit la chaîne hiérarchique de l’antenne marseillaise de l’Ofast. Trois enquêteurs du groupe 8 - le capitaine-chef, son adjoint major et un brigadier-chef - sont d’abord mis en examen entre avril et le mois de juin 2025. Et désormais, les policiers de l’IGPN veulent savoir si les commissaires à la tête de l’Ofast Marseille avaient connaissance de la tournure inquiétante de l’opération Trident, voire s’ils ont donné des ordres en faveur de la poursuite de la livraison surveillée. Et plus généralement s’ils avaient connaissance des agissements douteux de leurs enquêteurs.

    Plusieurs policiers du groupe 8 mis en examen ont en tout cas assuré avoir agi avec l’aval de leurs chefs. L’enquête révèle de graves dissensions au sein de l’antenne marseillaise sur la conduite de l’opération Trident mais aussi avec l’échelon central de l’Ofast de Nanterre, où des effectifs ont été dépêchés en renfort avant de rentrer à Paris en constatant le fiasco sur le terrain.

    Signe de l’ambiance exécrable, l’un des commissaires placés en garde à vue ce lundi avait rédigé un rapport faisant état de ses soupçons de corruption au sein de ses propres effectifs. Au point, selon Le Monde, d’avoir demandé au serrurier du service d’installer des caméras clandestines dans son bureau... Les enquêteurs de l’IGPN disposent de 96 heures de garde à vue pour lever le mystère sur les dessous de ce qui ressemble au plus grand scandale policier depuis la création de l’Ofast, pourtant créé en 2020 afin de solder les errements passés de son ancêtre, l’Octris.

  • Maitre Eolas / X – DÉTENTIONS PROVISOIRES
    https://x.com/Maitre_Eolas/status/1937093846409605145

    Pour ceux qui se demandaient si la population carcérale allait baisser, le parlement vient de répondre « LOL non » #LoiNarcotrafic
    NB : ces dispositions s’appliquent A TOUTES LES DÉTENTIONS PROVISOIRES, pas seulement à celles en lien avec le trafic de stups.

  • Les organismes de #foncier solidaires : les limites de la démarchandisation
    https://metropolitiques.eu/Les-organismes-de-foncier-solidaires-les-limites-de-la-demarchandisa

    Les organismes de fonciers solidaires (OFS) permettent-ils de démarchandiser le #logement ? Pierre Le Brun montre les limites de ce dispositif face aux logiques financières de la propriété privée du sol. Créés en France par la loi Alur, les organismes de foncier solidaires (OFS) bénéficient d’une attention soutenue dans le monde du logement (Rey-Lefebvre 2024 ; Union sociale pour l’habitat 2024). Si l’expérience est encore trop neuve pour avoir permis une évaluation complète de ces dispositifs et de #Débats

    / #économie_urbaine, #immobilier, foncier, #habitat, logement

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_lebrun.pdf

  • La profession d’enseignant-chercheur aux prises avec le #nouveau_management_public

    Ce texte se propose d’analyser différents impacts de la #néolibéralisation de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) sur le contenu et les #conditions_de_travail des enseignants-chercheurs (EC). L’analyse s’appuie sur les résultats d’une enquête menée entre 2020 et 2022 sur la nature, les causes et les effets des mutations du #travail des EC. Cette recherche visait dans un premier temps à objectiver les évolutions et à saisir les représentations des acteurs à leur sujet. Le second temps entendait analyser les raisons et les vecteurs de ces évolutions. Outre la mobilisation de sources bibliographiques, trois outils ont servi à recueillir des données. Un questionnaire adressé en ligne aux membres des différentes sections du CNU et aux EC en poste dans cinq établissements (aux tailles, localisations et statuts variés), à l’exception de ceux du domaine de la santé [1] a permis de travailler sur 684 réponses complètes reçues. Des entretiens semi-directifs (de 30 à 90 minutes) ont ensuite été menés avec 108 répondants au questionnaire, avec 5 présidents ou vice-présidents d’université (en poste au moment de l’échange) et avec des représentants de 6 syndicats (SNESup, SNESup école émancipée, CFDT, CGT, FO et Sud) [2]. Des résultats provisoires ont enfin été discutés au cours de 7 séminaires réunissant des EC dans le but d’alimenter la réflexion et l’analyse finale. Le livre Enseignants-chercheurs. Un grand corps malade (Bord de l’eau, 2025) rend compte de façon détaillée des résultats de cette recherche.

    On montrera d’abord comment la mise en œuvre des principes du nouveau management public (#NMP) dans l’ESR a entraîné simultanément un alourdissement et un appauvrissement des tâches d’enseignement, de recherche et d’administration incombant aux EC. On abordera ensuite les effets de #surcharge et de #débordements du travail que produisent ces transformations du travail des EC ainsi que les impacts que cela engendre sur leur #moral, leur #engagement et leur #santé.

    Le travail des EC alourdi et appauvri sous l’effet de la #néo-libéralisation et du NMP

    La #néo-managérialisation de l’ESR a démarré dans les années 1990, sans qu’il s’agisse d’une #rupture absolue avec une #université qui aurait jusque-là échappé aux logiques capitalistes dominantes. Parlons plutôt d’une évolution marquée par l’adoption et l’adaptation des principes du néolibéralisme. Promus par la Société du Mont Pèlerin fondée en 1947, puis mis en œuvre à partir des années 1980 (par Thatcher et Reagan), ces principes prônent une réduction des missions et des coûts des services publics s’appuyant sur une gestion comparable à celle des entreprises privées. Il s’agit de rationaliser leur organisation et de réduire leurs budgets, d’instaurer une mise en concurrence interne (entre établissements, départements, équipes et collègues) et externe (avec des organisations privées fournissant des services de même nature), de viser leur rentabilité et de mesurer leur performance. Cela a conduit à favoriser le fonctionnement en mode projet, la diversification des financements en valorisant les #PPP (partenariats public/privé), l’évaluation sur #indicateurs_quantitatifs, les #regroupements… Les objectifs fixés étant l’#efficacité plutôt que l’#équité, l’#efficience plus que l’#utilité_sociale, la #rentabilité avant la qualité de service.

    Ce programme s’applique donc dans l’ESR français à partir des années 1990. En 1998, le #rapport_Attali « Pour un système européen d’enseignement supérieur » répond à une commande de #Claude_Allègre (ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie de 1997 à 2000) qui entend « instiller l’#esprit_d’entreprise dans le système éducatif » (Les Échos, 3 février 1998), une #orientation qui constitue une injonction à visée performative. Dans les établissements, et notamment les #universités_publiques, cette orientation va être conduite par des équipes comptant de plus en plus de technocrates et de managers formés et rompus à l’exercice du NMP qui entendent faire fonctionner une logique inscrite dans la droite ligne du « processus de production, de diffusion et de légitimation des idées néo-managériales en France depuis les années 1970 [3] »

    Le rapport Attali propose un cadre européen inspiré d’orientations de l’OCDE. Lors de la célébration du 800e anniversaire de la Sorbonne, toujours en 1998, les dirigeants français, allemand, britannique et italien lancent un appel pour « un cadre commun de référence visant à améliorer la lisibilité des diplômes, à faciliter la mobilité des étudiants ainsi que leur employabilité ». Dès 1999, 25 autres pays européens signent cet appel et donnent naissance au « #processus_de_Bologne » destiné à créer un Espace européen de l’enseignement supérieur avant 2010. En mars 2000, l’Union européenne rejoint ce projet, qui débouche sur la #stratégie_de_Lisbonne proposant de créer un « #marché_de_la_recherche ». C’est dans ce contexte qu’intervient la #bureaucratisation_néolibérale de l’ESR français qui va transformer la « #gouvernance » de l’ESR, ainsi que le travail et les conditions de travail de ses salariés, dont celles des EC.

    Parallèlement à la dégradation des #taux_d’encadrement (notamment en licence [4], avec des variations entre disciplines et établissements) et aux baisses d’effectifs et de qualification des personnels d’appui, les EC assument des tâches liées à l’enseignement de plus en plus nombreuses, diverses et complexes. Il s’agit notamment d’un travail d’#ingénierie_pédagogique de plus en plus prenant, d’une coordination de plus en plus fréquente d’équipes pédagogiques comprenant des précaires en nombre croissant (dont ils doivent aussi assurer le recrutement et le suivi), de réponses aux injonctions à la « #professionnalisation » (impliquant de faire évoluer les contenus de formation, en réécrivant les maquettes de diplôme en « compétences » [5], en multipliant le nombre de #stages à encadrer et en travaillant sur les #projets_professionnels des étudiants), d’une #complexification de l’#évaluation des étudiants due à la #semestrialisation, à des délais de correction raccourcis, à la « #concurrence » du web et désormais de l’IA et d’une prise en charge d’activités de #marketing et de #communication destinées à vanter, voire à « vendre », les diplômes, les parcours, l’établissement.

    - « On subit une accumulation de #micro-tâches, qui devient chronophage même si c’est souvent des bonnes idées. Par exemple, l’université nous demande de présenter les masters en faisant venir d’anciens étudiants, ce qu’on fait déjà deux fois pour les étudiants de L3 et aux journées portes ouvertes. Ils nous demandent de faire une présentation de plus pour diffuser plus largement sur des plateformes et toucher un public plus large. […] Autre exemple, on nous demande de refaire un point sur les capacités d’accueil de nos masters, et il faut refaire le travail. […] En fait, toute l’année on nous demande des #petits_trucs comme ça. » (PU en sciences de l’éducation et de la formation, en université).

    Une même dynamique opère du côté de la recherche, les activités sont aussi accrues et diversifiées dans un contexte de raréfaction des personnels d’appui, notamment en lien avec la #concurrence aiguisée entre chercheurs, entre labos, entre UFR, entre établissements. Cette évolution c’est aussi la baisse des #budgets_récurrents et la chasse aux #financements, en répondant à des #appels_à_projets émanant de institutions publiques (ANR, ministères, UE) ou d’acteurs privés, la course aux #publications dans les revues classées, en anglais pour certaines disciplines, la multiplication des #évaluations par les établissements, les agences (AÉRES puis #HCÉRES…), les tutelles, le ministère, l’œil rivé sur les classements, notamment celui de Shanghai.

    - « Une partie du temps, on est plus en train de chercher des budgets et de faire du #reporting que de faire la recherche elle-même. Sans compter qu’il faut publier pour être valorisé. Il y a des collègues dont on se demande ce qu’ils publient, parce que leur temps de recherche en fait, c’est du temps d’écriture, mais on ne sait pas sur quoi. » (PU en civilisation américaine en université).
    - « Si on regarde les laboratoires, il y a beaucoup de chercheurs et peu de personnels associés. Nécessairement, les EC doivent faire face à plus de tâches administratives. Et d’autre part, il y a des choses qui ont été formatées, il faut remplir des fichiers, des indicateurs, cela fait beaucoup de tâches administratives à réaliser. » (PU en électronique en IUT).

    À cela s’ajoutent les activités de sélection, de recrutement et de management des étudiants et des doctorants sur des plateformes aux performances discutables (#ParcoursPlus, #Mon_master, Adum), des ATER, des postdocs et des enseignants vacataires et contractuels, ainsi que de titulaires lorsqu’il faut siéger en comité de sélection quand des postes de MCF et PU (Professeur d’Université) sont ouverts. Il faut ici souligner la #surcharge spécifique pesant sur les #femmes, notamment PU, compte tenu des règles de parité (un COS doit compter au moins de 40% de membres de chacun des deux genres) et des inégalités de #genre dans les carrières [ 7].

    Les EC doivent aussi prendre en charge des activités d’information, d’évaluation et de valorisation à destination de divers instances et organismes, dans des délais souvent courts, au moyen d’outils numériques plus ou moins fiables et compatibles. Ces comptes à rendre portent en particulier sur la qualité des cursus, les débouchés professionnels et les taux d’insertion des diplômés, les coûts en heures et en masse salariale des cours, des TD et des TP, les résultats en termes de présence aux examens, de notes, de diplômés, d’abandons en cours de cursus…

    – « Je me sens être très gestionnaire, animatrice, gentille organisatrice une grande partie de mon temps. C’est quelque chose que je n’avais pas du tout anticipé en entrant dans ce métier, parce que je ne pensais pas avoir autant de #charges_administratives. […] Dès la 3è année après mon recrutement, j’étais directrice des études, à faire des emplois du temps, recruter des vacataires, travailler un petit peu le contenu de leurs interventions, mais je devais surtout faire des RH, essayer que ça convienne à chacun, récupérer les papiers qu’on lui demandait pour qu’il soit payé, etc. » (MCF en sociologie en IUT).

    On a ainsi assisté à un double mouvement d’alourdissement er d’appauvrissement du travail des EC sous les effets combinés des injonctions à la professionnalisation (la #loi-LRU de 2007 a ajouté « l’orientation et l’insertion » aux missions de l’ESR) et aux attentes des tutelles en la matière ainsi que des normes budgétaires strictes et des critères « d’#excellence » qui concrétisent l’essor des logiques et des modes de gestion du NMP et la #managérialisation de l’ESR (comparable à ce qu’a connu l’Hôpital,). Il en découle un ressenti fréquent de #perte_de_sens et un #malaise profond.

    – « Il faut se bagarrer pour trouver à garder du #sens au métier. Ça c’est très clair. […] On nous impose les choses, donc effectivement, il y a une perte de sens, enfin je ne sais pas si c’est une perte de sens mais on a une perte de la maîtrise de notre métier. »(MCF HDR en didactique de l’histoire en Inspé).
    - « Quand j’ai démarré au début des années 2000, j’avais l’impression d’être en phase avec mon travail et peut-être plusieurs de mes collègues aussi. J’ai l’impression qu’il y avait une sorte de vision collective partagée. Cette vision collective partagée, je la sens moins parce que je sens des #découragements, je sens des #lassitudes. Le partage de la mission de chercheur, c’est plus compliqué et le partage de la vision de la mission d’enseignement pour moi, elle est galvaudée. » (MCF HDR en chimie en université).

    Le #moral et la santé des EC pâtissent des #surcharges et débordements vécus par les EC.

    La détérioration des situations de travail vécue par les EC produit des effets à la fois sur leur état moral, leur #engagement_professionnel et leur état de santé. Les surcharges combinées au sentiment de ne plus pouvoir faire leur travail correctement sont à l’origine de nombreuses #souffrances. Leur travail a été peu à peu alourdi par une accumulation de tâches dont une partie tient à la #procédurisation qui concrétise « la #bureaucratisation_néolibérale ». Cela nourrit un important « #travail_caché », invisibilisé et non rémunéré, qui conduit à la fois à accroître et à hacher l’activité.

    Il en découle des #surcharges_temporelles (extension de la durée du travail professionnel), des #surcharges_mentales (dues à l’accumulation de sujets et de préoccupations) et des #surcharges_cognitives (liées aux changements récurrents de registres d’activité).

    - « L’université française s’écroulerait si nous ne consentions pas à faire un travail parfois considérable gratuitement ou presque. » (PU en langue et civilisation)

    L’#intensification_du_travail qui passe par un accroissement du travail invisible, ou plus justement invisibilisé, des EC, implique des débordements fréquents de leur vie professionnelle sur leur #vie_personnelle (aussi bien du point de vue du temps que de celui des lieux). Ce phénomène a été aggravé par l’usage d’outils (téléphone mobile, micro-ordinateur, tablette) et de dispositifs techniques (mails, réunions et cours à distance, remontées de datas, recherches sur le web) qui favorise le travail en tout lieu et à tout moment, et donc le brouillage des frontières entre travail et hors-travail.

    - « Je pense que tous les collègues font un peu comme moi, le temps d’écriture des articles est pris surtout sur le samedi et le dimanche, donc sur le temps personnel, en fait. Parfois, les conjoints ont du mal à s’y faire, mais moi non, mon conjoint est un chercheur. Globalement, on travaille tous les jours. Sinon, ça ne passe pas. Ou alors, on ne fait que de l’enseignement et on écrit un article par an. » (PU en histoire du droit en université).

    Le débordement temporel et spatial est un fait massif difficile à mesurer pour les EC car ceux-ci, comme tous les enseignants, ont toujours travaillé à la fois sur leur lieu de travail et à leur domicile ou en vacances (pour préparer des cours, corriger des copies et des mémoires, lire et écrire des travaux scientifiques, tenir des RV et réunions à distance).

    La porosité des frontières entre lieux de travail et de vie, entre temps de travail et hors-travail est ambivalente. D’un côté, elle permet aux EC de choisir où et quand ils travaillent, à l’inverse de la plupart des salariés. Cette souplesse d’organisation procure un sentiment de liberté, et une liberté réelle, qui facilite la conciliation entre obligations professionnelles et activités personnelles, domestiques, familiales. Mais, c’est aussi un piège qui met en péril la vie personnelle et familiale en impliquant une absence de limite aux temps et aux espaces consacrés au travail. Ce risque est d’autant plus grand que ce sont souvent les activités de recherche (à la fois les plus appréciées et les plus empêchées au quotidien) qui trouvent place en dehors des lieux et temps de travail. Beaucoup d’EC en viennent alors à accepter, voire à rechercher, ces débordements du travail pour retrouver le plaisir de faire ce qu’ils aiment dans un contexte plus favorable qu’au bureau (environnement calme et agréable) et à l’abri de sollicitations multiples (passages, appels téléphoniques, mails urgents, etc.). Ne peut-on évoquer ici une forme d’#aliénation, voire de « #servitude_volontaire » ? Cela rappelle ce que différentes enquêtes ont montré chez des cadres du secteur privé qui, en travaillant chez eux, y compris le soir, le week-end ou en congé, retrouvent comme ils le disent une « certaine continuité temporelle » et un « cadre spatial favorable à la #concentration ».

    - « Il faut avoir le #temps de faire sa recherche, on est dans une espèce de course à l’échalote permanente. Moi, j’ai eu beaucoup de chance, je ne veux pas cracher dans la soupe, j’ai pu travailler sur ce que je veux, et après à moi de trouver de l’argent. Mais, c’est un métier où ça peut être très dangereux si on ne trouve pas son équilibre. Moi, ça m’a coûté certaines choses au niveau personnel [un divorce !] parce qu’il est arrivé un moment donné où je ne dormais plus la nuit parce que je voyais tout ce que je n’avais pas eu le temps de faire. J’ai eu besoin de faire un travail sur moi pour me ressaisir et me dire que si je n’avais pas fait ça ou ça, ce n’était pas si grave, personne n’est mort à cause de ça, on se détend. J’ai eu de la chance, j’ai refait ma vie avec quelqu’un qui est professeure des écoles donc avec un rythme peu différent ». (MCF en chimie en université).

    Les inégalités de prise en charge des tâches domestiques, familiales et éducatives entre femmes et hommes, auxquelles n’échappent pas les EC, conduisent à exposer de nombreuses EC à des difficultés spécifiques (contribuant aux inégalités de déroulement de carrière à leur détriment), d’autant que la façon d’exercer le métier, de gérer les relations avec les étudiants et de prendre des responsabilités est aussi marquée par des différences de genre.

    – « Cette intensification du temps de travail s’est encore accrue au moment de mon passage PU, avec certains moments de l’année où pour pouvoir conduire mon activité et honorer mes engagements professionnels, je dois sacrifier tous mes week-ends sur une longue période. […] Il me semble que cette intensification tient aussi à une division sexuée du travail présente dans nos composantes : nombre de mes collègues hommes ayant longtemps refusé de prendre des responsabilités, en tous les cas les responsabilités chronophages et peu qualifiantes dans les CV ». (MCF en communication).
    – « Les femmes sont plus touchées que les hommes car elles assument les responsabilités de care pour les étudiants mais aussi pour leurs proches descendants ou ascendants de manière très déséquilibrée par rapport aux hommes. La charge mentale des femmes EC est très lourde. Concilier maternité et ESR (et donc espérer voir évoluer sa carrière) est mission impossible sauf pour celles qui ont un conjoint ou un réseau personnel sur lesquels s’appuyer. L’explosion des publications émanant d’EC masculins pendant la pandémie en est un bon exemple ». (MCF en anglais).

    Ces débordements s’inscrivant dans un contexte de dégradation de la qualité du travail et des conditions de sa réalisation contribuent à nourrir un sentiment d’#insatisfaction. C’est aussi de la #désillusion et diverses #souffrances_morales mais aussi physiques qui découlent de cette combinaison mortifère entre surcharges, débordements et insatisfaction.

    - « Moi, j’ai beaucoup de désillusions sur mon métier. Beaucoup d’#amertume, en fait. […] Quand on est enseignant-chercheur, on démarre, on est à fond, on en veut, etc. On a plein d’envies, on a plein d’ambition, puis on arrive dans la réalité et on prend un gros coup dans la figure et ça t’arrête net. Parce qu’on te colle tout de suite une responsabilité. […] Et tout ça pour un salaire de m… ! […] Moi je trouve que former des gens comme on les forme pour faire ça, c’est du gâchis franchement. » (Vice-présidente d’une université en poste).

    Ce qui mine et fait mal, comme l’évoquent de nombreux EC quand ils décrivent l’évolution de leur métier, c’est en particulier l’impression de devoir travailler toujours plus avec toujours moins de moyens disponibles, et donc pour un résultat dégradé ; ils ont le sentiment d’un « #travail_empêché » (comme le nomme Yves Clot) parce qu’ils se sentent empêchés de faire un travail de qualité comme ils savent et voudraient le faire ; ils ont des doutes sur la réalité de ce qu’ils font par rapport à ce qu’ils attendent de leur travail et ce qu’ils pensent que doit être le #service_public.

    Beaucoup des EC interrogés durant l’enquête se demandent ce qu’est devenu leur travail, quel sens ils peuvent encore lui donner et quel avenir attend l’université (et plus largement l’ESR). Si la plupart acceptent que le cœur de leur métier dépasse largement les seules activités de base d’enseignement et de recherche, ils doutent de plus en plus de pouvoir faire ce métier, auquel ils sont attachés, dans les règles de l’art telles qu’ils les conçoivent, et en particulier avec l’attention requise et les résultats voulus.

    - « Je pense que le métier d’enseignant-chercheur au-delà des 35 heures, ce n’est pas trop quelque chose de nouveau. Un chercheur, je pense qu’il a toujours beaucoup travaillé le soir. Mais peut-être que maintenant, on n’arrive plus à trouver le temps de tout faire ce qu’on nous demande. Et peut-être que ça, c’est nouveau ». (PU en biologie en IUT).
    – « J’ai vraiment du mal à croire qu’on puisse faire les trois choses ensemble. C’est-à-dire à la fois avoir une activité de recherche de haut niveau, avoir un investissement dans l’enseignement qui permet, enfin selon le critère qui est le mien, de renouveler ses cours extrêmement régulièrement pour ne pas se répéter, et en plus avoir des fonctions administratives ». (MCF en histoire en université).

    Cela fait émerger des questions majeures : à quoi et à qui sert aujourd’hui le travail des EC ? Sont-ils en mesure de réaliser des enseignements et des recherches de qualité ? Que devient le service public de l’ESR ? Ces questionnements rejoignent les trois dimensions majeures du sens du travail énoncées : son utilité vis-à-vis de ses destinataires, le respect de leurs valeurs éthiques et professionnelles, et le développement de leurs capacités.

    – « Il faut se bagarrer pour trouver à garder du sens au métier. Ça c’est très clair. […] On nous impose les choses, donc effectivement, il y a une perte de sens, enfin je ne sais pas si c’est une perte de sens mais on a une perte de la maîtrise de notre métier. » (MCF HDR en didactique de l’histoire en Inspé).

    Les différentes évolutions que nous venons de décrire peuvent s’interpréter comme les signes d’un risque de #déprofessionnalisation, un processus à la fois lent et peu visible prenant la forme d’une remise en cause ce qui fonde leurs « gestes professionnels » et de leur #identité_professionnelle ». Ce dont on parle ici ne concerne pas seulement tel ou tel individu, mais le groupe professionnel des EC à travers trois aspects.

    Le premier élément est une déqualification liée au fait que les EC sont de plus en plus souvent chargés de tâches ne correspondant ni au contenu, ni au niveau de leurs savoirs et de leurs objectifs. La deuxième dimension concerne la perte d’#autonomie à rebours de la #liberté_académique et de l’autonomie affirmées dans les textes. Le troisième aspect est le sentiment massivement exprimé durant l’enquête de l’#inutilité d’une part croissante du travail réalisé par rapport à ce que les EC voudraient apporter à leurs étudiants, et plus largement à la société qui finance leurs salaires, ce qui touche au cœur de l’identité fondant leur profession.

    La managérialisation de l’ESR alimente ce risque de déprofessionnalisation en enrôlant les EC dans les évolutions de leur travail et de leurs conditions de travail qui leur déplaisent, en les conduisant à faire - et pour ceux qui ont des responsabilités à faire faire à leurs collègues - ce qui les fait souffrir et que, pour partie, ils désapprouvent. C’est sans doute une des réussites du NMP que d’obtenir cette mobilisation subjective, comme la nomme la sociologue Danièle Linhart.

    La question de la déprofessionnalisation des EC mérite sans aucun doute d’être approfondie en termes de causes, de manifestations et d’effets. En l’état actuel de l’analyse, c’est une hypothèse à creuser dans le cadre d’un questionnement sur les impacts - et l’efficience - des modes de gestion impulsés par le nouveau management public et la bureaucratisation néolibérale.

    Si cette enquête ne suffit évidemment pas à établir un diagnostic global sur la santé des EC, elle permet néanmoins de mettre à jour des réalités peu connues et alarmantes. Ainsi, le terme épuisement est souvent revenu : il est employé spontanément par 45 répondants au questionnaire (dont 31 femmes). Il est évoqué 10 fois en réponse à la question : « Rencontrez-vous ou avez-vous rencontré des difficultés pour concilier vos différents activités professionnelles (enseignement, recherche, tâches administratives) ? Si oui, lesquelles ? ». Le stress, lui, est explicitement abordé dans 35 réponses (29 femmes) sans compter celles qui parlent du stress des étudiants et des Biatss. 17 répondants (dont 13 femmes) parlent de burn-out. Dans 7 de ces 17 cas, les répondants témoignent de burn-out subi par eux-mêmes ou par un membre de leur équipe au cours des dernières années. Les autres évoquent le risque ou la peur d’en arriver là. Les deux verbatims suivants illustrent l’importance de cette question.

    – « Il y a 20 ans, les réunions pouvaient durer 1 heure, 1 heure et demie. Aujourd’hui, il n’y a pas une réunion du CHSCT qui dure moins de 3 ou 4 heures. Parce qu’il y a un nombre incroyable de remontées au niveau des enseignants-chercheurs. […] Dans notre département, il y a eu pas moins de trois burn-out cette année, avec des arrêts maladie, des demandes de collègues de se mettre à mi-temps. » (PU, élu CGT).
    – « Je pense qu’il faut faire très, très attention. On est sur un fil raide. Ça peut basculer d’un côté comme de l’autre. Et je pense qu’on doit arrêter un peu le rythme, les gens sont fatigués, épuisés, donc il faut qu’on trouve un moyen de minimiser un peu les appels à projets. C’est sur ça qu’on se bat. Les garder, mais en faire moins. […] Bien sûr qu’on manque de moyens et bien sûr qu’il faut qu’on fasse comprendre à notre fichu pays que l’enseignement supérieur et la recherche, c’est un investissement. Je crois à ça profondément. » (Présidente d’une université en poste au moment de l’entretien).

    Pour conclure

    La profession des EC ressent assez largement un #malaise mettant en cause leur activité, voire leur carrière. Face à cela, la plupart des réponses sont aujourd’hui individuelles, elles passent pour certains par différentes formes de #surengagement (débouchant parfois sur du #stress, des #dépressions ou du #burn-out), pour d’autres (et parfois les mêmes à d’autres moments de leur carrière) à des variantes de désengagement (vis-à-vis de certaines tâches) pouvant aller jusqu’à diverses voies d’Exit (mises en disponibilité, départs en retraite avant l’âge limite, démissions très difficiles à quantifier). Les solutions collectives ont été assez décrédibilisées, notamment après l’échec du mouvement anti-LRU. De nouvelles pistes restent à imaginer et à construire pour ne pas continuer à subir les méfaits de la néo-libéralisation de l’ESR et trouver des alternatives aux dégradations en cours.

    [1] La situation des MCF-PH et des PU-PH à la fois EC à l’université et praticiens en milieu hospitalier étant très particulière.

    [2] Les verbatims présentés dans cette communication sont extraits des réponses au questionnaire ou des entretiens.

    [3] Bezès P. (2012). « État, experts et savoirs néo-managériaux, les producteurs et diffuseur du New Public Management en France depuis les années 1970 », Actes de la recherche en Sciences Sociales, n° 3, p. 18.

    [4] La massification de l’accès au bac s’est traduite par une très forte hausse du nombre d’élèves et étudiants inscrits dans l’ESR. Sur les 4 dernière décennies, ce nombre a plus que doublé en passant d’un peu moins de 1,2 million (à la rentrée 1980) à près de 2,8 millions (à la rentrée 2020). Le nombre d’EC n’a pas suivi !

    [5] Les diplômes universitaires doivent désormais figurer dans le Répertoire national des certifications professionnelles (le RNCP) conçu dans la logique des compétences.

    [6] Bibliothécaires, ingénieurs, administratifs, techniciens, personnels sociaux et de santé de l’enseignement supérieur.

    [7] En dépit des principes d’égalité professionnelle, les femmes sont infériorisées dans l’ESR. Parmi les MCF, seul le domaine droit, science politique, économie et gestion (DSPEG) est à parité avec 51% de femmes et 49% d’hommes. Les femmes sont sur-représentées (58%) en Lettres, Langues et Sciences humaines (LLSH) et sous-représentées (34%) en Sciences et Techniques (ST). Du côté des PU, les femmes sont 29% (contre 45% parmi les MCF) même si ce pourcentage a augmenté ces dernières années. Les femmes sont minoritaires parmi les PU dans les trois domaines, y compris là où elles sont majoritaires parmi les MCF : elles sont 36% en DSPEG, 45% en LLSH et 21% en ST. Et les écarts de statut ne sont pas les seules inégalités de genre entre EC.

    https://blogs.alternatives-economiques.fr/les-economistes-atterres/2025/06/17/crise-de-l-esr-contribution-2-la-profession-d-enseign
    #ESR #enseignement #recherche #new_public_management

  • Sprung vom Zehn-Meter-Turm : Worin die Gefahr liegt und wie man sicher springt
    https://www.stern.de/gesundheit/sprungturm--was-einen-sprung-vom-zehner-so-gefaehrlich-macht--34977592.html

    Si seulement tout était aussi simple qu’un saut de dix mètres d’hauteur. Voilà comment réussir l’expérience.

    16.6.2025 von Tina Pokern - Der Sprungturm gehört zum Freibad, wie die Achterbahn auf die Kirmes. Aber je größer die Höhe, desto gefährlicher ist der Wassersprung.

    Der Zehn-Meter-Turm im Schwimmbad ist für manche ein absolutes No-Go, für andere ist der Sprung eine Mutprobe oder gar die Möglichkeit, sich zu profilieren. Die Ehrfurcht vor der Höhe kommt nicht von ungefähr, der Sprung vom Zehner ist mit einem Risiko verbunden. Gerade Unerfahrene können sich dabei schwere Verletzungen zuziehen, die im schlimmsten Fall tödlich enden.

    Was macht den Sprung vom Zehn-Meter-Turm so gefährlich? Welche Sprungvariante ist die sicherste? Und wie kann man sich auf einen solchen Sprung vorbereiten? Ein Überblick über die wichtigsten Punkte.

    Was passiert mit dem Körper beim Sprung vom 10-Meter-Turm?

    Ist doch nur Wasser? Von wegen! „Aus dieser Höhe ist das Wasser hart wie Beton“, weiß Joachim Rödig, Chefarzt der Klinik für Orthopädie und Unfallchirurgie am Mönchengladbacher Klinikum Maria Hilf. Im Gespräch mit der „Rheinischen Post“ (RP) warnt er: „Bei einem Sprung von einem Zehn-Meter-Turm entwickelt sich eine extreme Wucht.“ Komme man falsch aufs Wasser auf, könne man sich starke Verletzungen zuziehen – „ähnlich wie bei einem Motorradunfall“. Knochen könnten brechen, die Haut platzen, auch innere Verletzungen und Brustkorbprellungen seien möglich.

    Wie häufig kommt es zu Verletzungen durch Sprünge ins Wasser aus großer Höhe?

    Zahlen dazu gibt es nicht. Eine Statistik der Deutschen Lebens-Rettungs-Gesellschaft (DLRG) zeigt aber, dass es 2023 zu mindestens 378 Badeunfällen mit Ertrinkungstod gekommen ist, noch einmal 23 mehr als im Jahr zuvor. Die meisten Fälle (90 Prozent) ereigneten sich in Binnengewässern – unter anderem in Seen (138) und Flüssen (135). Die DLRG warnt daher davor, in unbewachten Gewässern zu baden. In Schwimmbädern kam es am seltensten zu Todesfällen. 2023 waren es acht.

    Wer sollte nicht vom Zehn-Meter-Turm springen?

    Wer sprungunerfahren ist, sollte nicht direkt vom Zehn-Meter-Turm springen. „Sich selbst zu überschätzen, ist gefährlich“, so Roland Scheidemann von der Deutschen Lebens-Rettungs-Gesellschaft (DLRG) im Gespräch mit der „RP“. Wer unsicher sei, solle vernünftig sein und zurückklettern. Einen Zehn-Meter-Sprung mache jeder Springer auf eigene Verantwortung. Auch wenn Aufsichtspersonen darauf achten könnten, dass das Becken frei sei und immer nur einer auf dem Turm stehe, sei es laut Scheidemann dennoch „lebensgefährlich, wenn jemand einen Kopfsprung versucht, der nicht routiniert ist“.

    Wie bereitet man sich auf einen Sprung vom Zehner am besten vor?

    Matti Büchner ist Abteilungsleiter Wasserspringen beim Berliner TSC und trainiert als Bundesstützpunkttrainer die Profis. Die Dpa hat bei ihm nachgefragt, wie man den ersten Sprung vom Zehn-Meter-Turm am besten angeht. Er empfiehlt ein langsames vortasten – vom Ein-Meter-Brett zum Drei-Meter-Brett und so weiter. Eine Strategie, die auch bei Leistungssportlern angewandt werde und zwar so lange, bis diese genügend Körperspannung für ein gerades Eintauchen hätten. Er erklärt: „Von einem Zehn-Meter-Turm sind es etwa 50 km/h mit dem man ins Wasser einschlägt, da ist eine Wucht.“

    Welche Körperhaltung ist die sicherste beim Sprung?

    Am sichersten ist der Sprung, wenn er gerade und mit Körperspannung ausgeführt wird: Arme fest am Körper, die Beine geschlossen, die Zehen gestreckt. Damit bietet man am wenigsten Widerstand beim Aufprall aufs Wasser. Grundsätzlich aber gilt: ein Sprung, egal in welcher Variante muss sauber ausgeführt werden, um möglichst risikoarm zu sein. Ein Bauch- oder Rückenklatscher tut auch schon vom Ein-Meter-Brett weh.

    Wie gefährlich sind andere Sprungvarianten?

    Wie hart Wasser sein kann, ist schon ab niedrigen Höhen spürbar – vor allem, wenn man statt eines eleganten Kopfsprungs einen Bauchplatscher hinlegt. Eine ungünstige Landung auf der Wasseroberfläche kann schnell schmerzhaft werden. Beim Sprung ins Wasser gilt, je kleiner die Körperfläche desto besser. Aber was ist am ungefährlichsten? Ein US-Forschungsteam der Cornell University hat getestet, welche Kräfte auf den Körper wirken und mit welchen Verletzungen zu rechnen ist, wenn man mit dem Kopf, den Händen oder den Füßen zuerst ins Wasser eintaucht. Für den Versuch wurden Dummys per 3D-Druck angefertigt, die ins Wasser „geschossen“ wurden. Sensoren ermittelten, welche Kräfte beim Aufprall wirkten. Hochgeschwindigkeitskameras dokumentierten das Experiment.

    Die sicherste der drei Sprungvarianten? Keine Überraschung: die „Kerze“, also der gerade Sprung mit den Füßen voran. Erst ab einer Höhe von 15 Metern steigt der Studie zufolge das Risiko für Verletzungen, wenn man diese Sprungvariante wählt. Gefährlich wird es dann vor allem für die Knie. Wer Hautverletzungen vermeiden möchte, sollte die Zehen strecken und nicht mit flachen Fußsohlen auf die Wasseroberfläche „aufschlagen“. Beim klassischen Kopfsprung, bei dem die Handflächen über dem Kopf zusammengelegt werden, steigt das Risiko für Verletzungen ab zwölf Metern. Ab dieser Höhe sind demnach Schlüsselbeinbrüche möglich. Um Schulterverletzungen zu vermeiden, Arme und Schultern beim Eintauchen kräftig anspannen. Am gefährlichsten sind Sprünge mit dem Kopf voran, die Arme dicht am Körper angelegt. Die Ergebnisse der Forschenden legen nahe, dass ein solcher Sprung aus bereits acht Metern Höhe zu beträchtlichen Verletzungen führen kann. Demnach könnten Nacken und Rückenmark gefährlich beeinträchtigt werden. Das zeigen Vergleiche mit Druckkräften, von denen bekannt ist, dass sie Knochen- und Muskelläsionen verursachen.

    Macht es einen Unterschied, ob man von der Turmplattform oder einem Brett springt?

    Ein Turmplattform ist fest, Bretter sind beweglich. Das bedeutet, dass besonders viel Körperspannung in der Körpermitte vonnöten ist. Sowohl die Bauch- als auch die Rückenmuskulatur sollten beim Sprung vom Brett angespannt sein. Ansonsten kann es passieren, dass man „zusammensackt“, was sich wiederum negativ auf die Sprungausführung auswirken kann – der Springer beispielsweise in Seit- oder Vorlage gerät.
    Kann man durchs Anlaufnehmen zu weit fliegen und auf dem Beckenrand landen?

    Ein Zehner-Sprungbecken muss von der Kante des Sprungturms mindestens 13,5 Meter breit sein. Um diese zu überspringen müsste die Anlaufgeschwindigkeit 30 km/h betragen. Dennoch ist die Gefahr aus der Höhe groß, vor allem wenn man die Körperbeherrschung verliert und mit einer ungünstigen Körperlage aufs Wasser aufschlägt. Außerdem sollte man beim Anlaufnehmen immer darauf achten, dass niemand im Wasser ist, auf den man springen könnte. Einmal in der Luft, lässt sich der Sprung nicht rückgängig machen. Am besten lässt man sich von jemandem ein Zeichen geben, wenn das Wasser frei ist. Experte Büchner rät gänzlich davon ab, mit Anlauf von einem Sprungbrett zu springen. „Die haben eine fiese Anti-Rutsch-Beschichtung, da kann man sich ordentlich etwas aufschürfen, wenn man fällt“, erklärt er. Stattdessen solle man sich lieber vorne ans Brett stellen und wie auf dem Trampolin zwei-, dreimal auf der Stelle springen – mit entsprechender Körperspannung versteht sich – bevor man ins Wasser hüpft.
    Warum können manche Menschen aus großen Höhen springen, ohne sich zu verletzen?

    Technik! Ob nun professionelle Turmspringer oder abenteuerlustige Klippenspringer, Körperspannung ist alles. Dadurch ist der Körper kompakter. Auch eine geschulte Eintauchposition ist wichtig. Die größte dokumentierte Höhe, aus der ein Mensch jemals gesprungen ist, liegt bei 58,8 Metern. Der Extremsportler Laso Schaller war es, der von einem Wasserfall im Tessin sprang. Als er ins Wasser eintauchte, hatte er eine Geschwindigkeit von 123 km/h. Schaller landet in schäumendem Wasser, das war weniger hart als eine glatte Oberfläche, er holte sich dabei aber dennoch einen Innenbandanriss.
    Wie gefährlich ist das Eintauchen nach dem Sprung?

    Ein professionelles Sprungbecken ist fünf Meter tief. Ein Becken im Freibad kann flacher sein. Daher empfiehlt Experte Büchner, vor dem Sprung die Tiefe zu checken. Bei einer Beckentiefe von fünf Metern werde der Körper beim Eintauchen in der Regel genug gebremst, bei geringerer Wassertiefe empfiehlt er, nachzuhelfen. Arme und Beine dafür etwas vom Körper abspreizen, um den Widerstand zu vergrößern. Aber Vorsicht: Erst unter Wasser.

    #sport #loisirs

  • Vers une imposition formalisée⠀ ?
    https://blog.merigoux.fr/fr/2019/12/20/impots-formels.html

    (...)

    Le code #M produit et publié chaque année par la #DGFiP à l’issue du vote de la #loi_fiscale va ainsi pouvoir servir de base à tout une série d’implémentations de tout ou partie du code des impôts insérées dans diverses applications. En effet, #Mlang offre la possibilité de générer à partir du code M et vers divers langages de programmation des programmes calculant une liste de variables de sorties en fonction d’une liste de variables d’entrées et de conditions spécifiques. Concrètement, si LexImpact a besoin d’une implémentation Javascript ou WebAssembly de la fonction qui calcule l’impôt de cas types en fonction des valeurs des tranches d’imposition, Mlang pourra la générer ! Dans ce cas précis, le calcul de l’impôt pourra même se faire dans le navigateur Internet et non sur un serveur.

    Une autre application intéressante serait la traduction du code M vers des langages de #simulation #macro-économique comme #TROLL ou #SAS. En effet, ces langages sont utilisés par l’#Insee afin de réaliser des modèles de l’#économie française qui ont besoin de l’expression #mathématique de l’impôt sur le #revenu. Ces #modèles pourraient donc chaque année se mettre à jour en récupérant la nouvelle version du code M compilée vers TROLL ou SAS, au lieu de devoir refléter eux aussi les changements de législation dans leur code.

    Enfin, Mlang va pouvoir améliorer notre prototype de #prouveur automatique du code des #impôts. En effet, avant de le traduire vers un #solveur #SMT, il est nécessaire de réduire la complexité mathématique de la fonction à sa substantifique moelle pour éviter de faire exploser la consommation de ressources du solveur. Le cadre du compilateur Mlang et la sémantique formelle de M nous permettent de réaliser des optimisations fiables qui vont simplifier le programme sans en changer le sens, avec ou sans conditions supplémentaires. Au delà des optimisations classiques telles que l’élimination de code mort, il est aussi prévu d’utiliser l’outil d’interprétation abstraite #MOPSA afin d’effectuer une analyse plus fine du programme. Raphaël Monat et moi espérons que, combinée à des stratégies de division de requêtes en sous-problème, cette optimisation du code M nous permette de faire passer à l’échelle notre prototype de preuve automatique de théorèmes sur le code des impôts.

    Au delà de l’aventure technique, je pense qu’il y a plusieurs leçons à retirer de cette histoire. Premièrement, c’est le libre accès à la recherche et au code qui permet aux synergies et aux initiatives inhabituelles de se développer. La DGFiP est la première administration au monde à publier ainsi son implémentation du calcul de l’impôt, et je pense que ce projet apportera rapidement à cette administration des retombées positives. Tout mon code est également publié sous licence libre, car il est important qu’un outil qui permette l’analyse fine et automatisée de la fiscalité française soit accessible à toutes et tous, et non pas réservé à un acteur privé qui l’utiliserait pour son propre profit. Deuxièmement, je pense que ce projet montre une fois de plus que l’innovation vient souvent d’un travail de recherche fondamentale mené sur le long terme. Les outils utilisés ici (comme le prouveur Z3) ont des fondements théoriques solides établis sur des dizaines d’années, et je me tiens bien sûr sur les épaules de géants. J’espère que cet exemple d’application des méthodes formelles pourra attirer l’attention sur ce domaine peu marketable en ces temps de course à « l’intelligence artificielle ». Troisièmement et pour terminer, ma volonté avec ce projet est aussi de montrer que l’innovation peut aussi profiter directement au secteur public. Je salue ainsi l’existence du programme des entrepreneurs d’intérêt général dont fait partie l’initiative #LexImpact. Un tel programme ne pourrait selon moi que gagner à se rapprocher de la recherche appliquée menée également pour l’intérêt général dans les laboratoires français. Alors que la perspective d’une carrière dans la recherche publique semble si morose pour nombre de jeunes gens très qualifiés, l’idée de pouvoir utiliser ses connaissances pour améliorer l’action de l’État me semblerait être un moteur puissant à utiliser afin d’éviter la fuite des cerveaux vers un secteur privé dont les activités, surtout dans le domaine de la tech, manquent parfois de sens.

  • L’#Italie et le transfert des migrants en #Albanie : le laboratoire et les cobayes

    Les gouvernements italien et albanais ont collaboré pour ouvrir deux centres, à #Shëngjin et à #Gjadër, destinés au #transfert_forcé, à la #détention et au #rapatriement des migrants arrivés en Italie. Ce laboratoire d’#externalisation des frontières, observé avec intérêt par d’autres pays, a un précédent : les #navires_de_quarantaine utilisés pendant la pandémie de Covid-19.

    En novembre 2023, les gouvernements italien et albanais ont signé un #accord selon lequel que les migrants et migrantes secourues par les autorités italiennes en mer Méditerranée ne sont pas conduits vers un port italien, mais en Albanie, où on a ouvert de centres de détention, d’#identification et d’#expulsion et de rapatriement. Dans les récits et les analyses, y compris les plus critiques, de la création de ces centres, on dit souvent qu’il s’agit d’un #laboratoire : avant tout, un laboratoire pour les politiques répressives et autoritaires d’Europe et d’ailleurs. On pourrait se demander laboratoire pour quoi, laboratoire pour qui, et avec le consentement de qui. Ou plutôt, on pourrait partir d’un postulat fondamental : que les laboratoires supposent généralement des cobayes.

    Le cas des centres extraterritoriaux albanais voulus par le gouvernement de Giorgia Meloni est en train de devenir un « #modèle » pour d’autres pays européens. Pourtant, ils ne sortent pas de nulle part. Ils sont eux aussi issus d’autres laboratoires. Plus précisément, d’autres tentatives d’#externalisation des frontières et de la gestion de ses migrants et demandeurs d’asile. Cependant, tout cela ne doit pas faire oublier que, tandis que les laboratoires procèdent habituellement par hypothèses potentielles, pour les personnes concernées, les mécanismes de #rétention, de #concentration et d’#exclusion sont tout sauf hypothétiques : elles les vivent en ce moment même, en cette heure.

    Du laboratoire au modèle

    En 2006, Ismaïl Kadaré avait intitulé l’un de ses derniers essais « L’identité européenne des Albanais ». On peut se demander si ce grand écrivain albanais, qui avait publié la plupart de ses œuvres sous une dictature si répressive, n’aurait jamais pu imaginer que l’Union européenne et l’Albanie seraient aujourd’hui liées par une tentative ambiguë d’externalisation de ces mêmes frontières européennes que Kadaré a vu changer au cours de sa vie.

    En octobre 2024, le gouvernement italien avait déclaré avoir achevé la construction d’un centre de détention pour migrants à Gjadër, en Albanie. Ce centre avait été ouvert en octobre dernier et était initialement destiné à accueillir des demandeurs d’asile secourus en mer et provenant de pays considérés comme « sûrs » par le gouvernement italien et l’Union Européenne. Mais les centres construits par l’Italie en Albanie n’avaient encore jamais fonctionné, car les tribunaux italiens n’ont jamais confirmé la détention des trois groupes de demandeurs d’asile qui y ont été transférés.

    Pourtant, le 11 avril 2025, alors que plusieurs centaines de migrants débarquaient à Lampedusa, une quarantaine de migrants, transférés depuis différents centres de rétention italiens, sont partis de Brindisi, dans les Pouilles, et arrivés dans le port et « #hotspot » albanais de Shëngjin, avant d’être emmenés au centre de Gjadër. Un mois plus tard, le 15 mai dernier, la Chambre des députés italienne a voté la #loi visant à transformer officiellement les centres albanais en « #centres_de_rapatriement ».

    Pour ces personnes migrantes, le passage du statut de « transféré » à celui de « détenu » a été immédiat et injustifié. Tout s’est déroulé dans l’opacité la plus totale. Selon un communiqué d’un réseau d’associations, des sources gouvernementales ont déclaré que les personnes transférées constituaient un « #danger_social » et avaient commis des délits, mais rien de tout cela n’a été prouvé. Le caractère punitif du projet albanais est donc évident. Certaines de ces personnes ont découvert qu’elles allaient être transférées en Albanie au moment même où elles sont arrivées, souvent menottées. Aucune information, aucun avertissement, aucune mesure officielle. Cela nous ramène à la dimension de modèle : comme le souligne l’Association italienne d’études juridiques sur l’immigration dans son rapport, cette affaire marque en effet un tournant dans les politiques migratoires et de gestion des frontières, ouvrant la voie à des scénarios inédits dans le contexte européen.

    Le précédent des #navires-quarantaine

    Pourtant, ce laboratoire italo-albanais n’est pas sorti de nulle part. Les pratiques d’#externalisation_des_frontières sont une caractéristique récurrente du régime actuel de gestion des migrations qualifiées d’« illégales » – et aussi, de plus en plus souvent, de « légales », comme nous le constatons par exemple aux États-Unis ces derniers mois. Un exemple parmi d’autres, ou plutôt des précurseurs : les centres de détention pour demandeurs d’asile ouverts en 2001 par le gouvernement australien sur les îles de Manus et de #Nauru. Dans le même temps, je pense qu’il est important de se pencher en priorité sur un exemple interne, européen, qui concerne à nouveau le gouvernement italien, avant même l’arrivée du gouvernement de #Giorgia_Meloni : il s’agit des navires de quarantaine mis en service pendant l’épidémie de #Covid-19.

    Le 7 avril 2020 le gouvernement italien publie un #décret dans lequel il déclare que les ports italiens ne devaient plus être considérés comme des « #POS#Place_of_safety ». Peu de jours après ce décret, en collaboration encore une fois avec la Croix-Rouge italienne, le système de navires-quarantaine a été mis en place et rapidement rendu actif, à travers de nombreuses #dérogations et #exceptions légitimées par l’#urgence_sanitaire. Le premier navire a levé l’ancre le 7 mai 2020. Immédiatement après, cinq autres grands navires sont affrétés et immédiatement mis en service.

    Exactement comme dans le cas des centres albanais, il n’y a jamais eu de communication officielle aux individus, qui n’ont même pas eu la possibilité d’un contact avec le monde extérieur. En outre, de nombreuses personnes contraintes d’embarquer sur des navires-quarantaine ont été soumises à l’obligation de quitter le territoire italien immédiatement après la fin de leur période d’isolement sur le navire en question, sans la possibilité de demander l’asile ou le regroupement familial. Les navires-quarantaine devenaient alors non seulement des centres d’expulsion externalisés et informels, mais aussi des espaces de droits suspendus : le confinement sur une base sanitaire se transformait immédiatement en un outil de gestion des frontières profondément ambigu. Ce que le gouvernement italien a pu faire sous prétexte de pandémie et de biosécurité, il tente désormais de le faire plus ouvertement à travers les centres albanais.

    Les #cobayes, c’est nous

    Les politiques migratoires sont classiquement un laboratoire d’expérimentation de pratiques et de normes à vocation autoritaire. Le cas des centres italiens en Albanie accélère ce processus. Tout cela repose avant tout sur le principe du chantage exercé sur les personnes classées comme migrants « illégaux » : désormais, tout migrant faisant l’objet d’un ordre de retour arbitraire et extrajudiciaire pourra être envoyé en Albanie et y être détenu.

    Ce qui est préoccupant dans cette dimension d’exemple ou de laboratoire, et de leur triste efficacité réelle, c’est qu’il ne s’agit ni d’une hypothèse, ni d’un projet lointain dans le temps. Pour revenir aux navires-quarantaine, il faut noter comment, pendant la pandémie, l’exemple italien a effectivement été suivi par certains : le navire #Bibby_Stockholm mis en place à l’été 2023 par le gouvernement britannique pour le confinement des demandeurs·euses d’asile, par exemple ; ou la proposition du maire de New York, Eric Adams, d’utiliser des #navires_de_croisière comme « solution créative » pour les supposées « vagues de migrants » arrivées dans la ville au cours des mois précédents. Et c’est déjà le cas pour les centres albanais. Pendant sa visite récente en Albanie, Keir Starmer, premier ministre britannique, vient de déclarer : « Nous négocions actuellement avec plusieurs pays au sujet des centres de rapatriement, que je considère comme une #innovation vraiment importante. » Il appelle ces centres « #return_hubs ».

    Face à la facilité avec laquelle ces types d’exemples répressifs sont aujourd’hui suivis et se propagent, il est nécessaire de rester vigilant et de se rappeler que, dans des situations où ces droits fondamentaux sont bafoués et où des personnes qui n’ont commis aucun crime sont soumises à des traitements inhumains et dégradants, le terme « laboratoire » s’avère alors pertinent : mais les cobayes de cette expérimentation sont nos démocraties, et nous tous et toutes.

    https://blogs.mediapart.fr/carta-academica/blog/060625/l-italie-et-le-transfert-des-migrants-en-albanie-le-laboratoire-et-l

    sur les #navi_quarantena :
    https://seenthis.net/messages/866072

    –-

    ajouté à la métaliste sur l’#accord entre #Italie et #Albanie pour la construction de #centres d’accueil (sic) et identification des migrants/#réfugiés sur le territoire albanais...

    https://seenthis.net/messages/1043873

  • #Infomaniak supports mass surveillance, calling for legal change to end online anonymity + mandatory metadata retention

    Here are some quotes from Infomaniak’s spokesperson, on Swiss national TV and Radio:

    “Today’s Internet is not yesterday’s Internet, and we still have companies offering free services that enable people to be completely anonymous, to encrypt their content and to be completely opaque when it comes to the law. This poses a problem, and it’s only right that the Swiss justice department should do its job.”

    “Anonymity is a no-no, because if there’s a legal problem, we can’t do the job…. We’re not talking about accessing the contents of emails, but tracking exchanges, just to be able to track people down, …it’s necessary.”

    “We speak about metadata, it doesn’t threaten encryption, and what the revision of the law is asking for is simply to make it impossible to create a completely anonymous identity to do unlawful activities that could not be prosecuted. Somehow, in “real life”, we would not accept this: as evidence, when we create a phone number with a SIM card, it is mandatory to provide an ID card and it’s exactly for the same reason.”

    Infomaniak, a company that positions itself as “ethical”, and one who built a brand based on user security and privacy, is now publicly supporting the Swiss government’s move to force VPN and email providers to log user data and collect PII. I think the quotes speak for themselves, but TLDR they are explicitly calling for:

    - Mandatory metadata retention
    - A blanket ban on anonymity online
    - Making free & encrypted services subservient to the Swiss justice department

    This is completely disqualifying, and it’s important to spread the word, because there are posts where Infomaniak is recommended as a good option for activists and privacy sensitive people.

    IMO they should never be recommended because unlike other service providers talked about here (i.e. Proton), they don’t use end-to-end encryption, so they have access to all of your data, and now it seems they are apparently eager to hand it over to the government.

    Just to clarify how insane this is, the legal change they want to see in Switzerland would:

    – Require MANDATORY retention of all metadata & last connection info.
    – Outright ban no-logs VPNs
    - Require ID for all cloud services when registering
    – Require companies to automatically hand over data to the govt. with no chance to appeal, no court order needed.

    You can read more in-depth on this topic itself here (it’s in Swiss German but you can translate): https://www.republik.ch/2025/05/07/die-schweiz-ist-drauf-und-dran-autoritaere-ueberwachungsstaaten-zu-kopieren

    Infomaniak is, in effect, calling for a police state and elimination of all personal privacy rights online. Outrageous.

    As the TG article suggests, Proton & others are on the right side of this and fighting the proposal Infomaniak supports.

    They are resisting, have rejected the proposal, and stated that they will leave Switzerland if this passes: Surveillance: le géant des mails cryptés Proton prêt à quitter Genève | Tribune de Genève

    I think it is clear who can be trusted and who cannot be trusted. Looking forward to your thoughts on this also, especially if anyone here is using the kSuite.

    https://discuss.privacyguides.net/t/psa-infomaniak-supports-mass-surveillance-calling-for-legal-change-to-end-online-anonymity-mandatory-metadata-retention/28065
    #Internet #anonymat #protection_des_données #Suisse #loi #métadonnées #chiffrement #vie_privée #liberté

    signalé aussi par @biggrizzly
    https://seenthis.net/messages/1119352

    • Die Schweiz ist drauf und dran, autoritäre Überwachungs­staaten zu kopieren

      Die Vorlage klingt, als wäre sie vom Kreml verfasst worden: Geht es nach dem Bund, müssen sich Schweizer Internet­nutzer künftig mit Ausweis oder Telefon­nummer identifizieren. Der Zeitpunkt dafür ist denkbar schlecht.

      Selten sorgt eine Verordnung in IT-Kreisen für so viel Aufsehen wie jene zum Bundes­gesetz zur Überwachung des Post- und Fernmelde­verkehrs. Doch die Verordnung, zu der die Vernehmlassung gestern Dienstag endete, ist auch alles andere als gewöhnlich.

      Das zeigt sich nicht nur daran, dass der bei Fachleuten sehr angesehene Blog Techradar.com schon vor fünf Wochen warnte, in der Schweiz seien die sichere Verschlüsselung und die Online-Anonymität gefährdet. Sondern auch an einem Schreiben der Kommission für Verkehr und Fernmelde­wesen des Nationalrats, das diese Anfang letzter Woche an den Bundesrat schickte. Die Kommission habe Bedenken zum Datenschutz, zu Über­regulierung und zur KMU-Belastung, sagt ihr Vizepräsident und SVP-Nationalrat Thomas Hurter auf Anfrage der Republik.

      Damit argumentiert Hurter ähnlich wie die Digitale Gesellschaft, die sogar von einem massiven Frontal­angriff auf die Grund­rechte und die Rechts­staatlichkeit spricht. Genauso drastische Worte wählt der Chief Operating Officer des welschen Technologie-Start-ups Nym: «In der Schweiz wird es keine private, digitale und datenschutz­freundliche Kommunikation mehr geben», so Alexis Roussel. Und für das erfolgreiche Messenger-Unternehmen Threema ist es sogar denkbar, «wenn nötig» eine Volks­initiative gegen die Verordnung zu lancieren, wie es gegenüber der Republik bestätigt.

      Ist ihr Ärger angebracht? Stimmt es, dass eine Überwachung droht, wie man sie aus autoritär regierten Staaten kennt?

      Und: Worum geht es überhaupt?

      Wichtige Trennung soll aufgehoben werden

      Wer sich mit Schweizer Überwachungs­gesetzen auseinander­setzt, muss sich zuerst durch ein Dickicht von sperrigen Begriffen kämpfen. Die wichtigsten zwei im Zusammenhang mit der Verordnung über die Überwachung des Post- und Fernmelde­verkehrs sind die beiden folgenden:

      - Fernmelde­dienst­anbieter: Das sind Unternehmen, die klassische Tele­kommunikations­dienste für die Öffentlichkeit bereitstellen, etwa Betreiber von Mobilfunk- und Festnetzen wie die Swisscom.

      – Anbieter abgeleiteter Kommunikations­dienste: Das sind Dienst­leister, die Kommunikations­dienste erbringen, ohne eine eigene Fernmelde­infrastruktur zu betreiben. Dazu zählen Anbieter von Messaging- und E-Mail-Diensten wie beispielsweise Whatsapp oder Signal, aber auch das Non-Profit-Unternehmen Immerda.ch aus Bern, das unter anderem einen E-Mail-Dienst anbietet.

      Der beim Justiz­departement von SP-Bundesrat Beat Jans angesiedelte Dienst Überwachung Post- und Fernmelde­verkehr legt diese zweite Kategorie in seinem erläuternden Bericht sehr grosszügig aus. So zählt er auch Cloud-Anbieter wie Infomaniak dazu, zudem VPN-Tools und Firmen wie Hostpoint, die Server für das Hosting von Websites zur Verfügung stellen.

      Gemäss aktueller Schweizer Rechtslage müssen die Anbieter abgeleiteter Kommunikations­dienste auf Anfrage der Schweizer Straf­verfolgung bei verdächtigen Personen alles rausrücken, was sie über sie gespeichert haben. Nicht mehr, nicht weniger.

      Diese Trennung zwischen Fernmeldedienst­anbieter und Kommunikations­diensten hatte das Parlament bei der ersten Revision des Bundes­gesetzes zur Überwachung des Post- und Fernmelde­verkehrs vor zehn Jahren bewusst eingeführt, um KMU-Unternehmen im Digital­bereich nicht unnötig zu belasten.

      Der Dienst Überwachung Post- und Fernmelde­verkehr gibt auf Anfrage der Republik zu, dass er nicht viel von der damals beschlossenen Trennung hält. Internet­anbieter wie Swisscom und IT-Unternehmen wie Proton, die E-Mail, VPN und auch Dokumenten­verwaltung anbieten, sollten künftig denselben Überwachungs­pflichten unterworfen sein. Der Überwachungs­dienst verkauft diese Neuerung mit dem Argument der Fairness, wenn er schreibt, dadurch werde auch sicher­gestellt, dass die Anbieter abgeleiteter Kommunikations­dienste «für vergleichbare Dienst­leistungen nicht wesentlich geringere Verpflichtungen haben» als die Fernmelde­dienst­anbieter. Dies verbessere die Gleich­behandlung.

      Den ersten Anlauf für eine Revision der Verordnung startete der Dienst bereits während der Pandemie. So veröffentlichte er im Jahr 2022 einen Entwurf, in dem er die Abschaffung der Verschlüsselungen für viele Kommunikations­dienste forderte. Der Paragraf las sich wie eine Schweizer Version der Chatkontrolle: Man musste davon ausgehen, dass eine technische Hintertür bei Messenger-Apps wie Threema eingebaut werden sollte für einen direkten Zugang für Strafermittler (wie sie seit Jahren in der EU diskutiert wird). Ein Aufschrei in den Medien sorgte dafür, dass der Bund diesen umstrittenen Teil verschob und nur den weniger kontroversen Teil in Kraft treten liess.

      Identifikations­pflicht auch für Marktplätze

      Mit der aktuellen Teilrevision hat der Bund das alte Verschlüsselungs­anliegen erneut aufgenommen. Und legte noch zusätzliche Pflichten obendrauf: Neu müssten viele Schweizer Unternehmen zum Erfüllungs­gehilfen des Überwachungs­staats werden. Das Eidgenössische Justiz­departement präsentierte Ende Januar 2025 eine Vorlage, die klingt, als wäre sie vom Kreml verfasst worden.

      Denn praktisch jede Website mit Nachrichten­funktion wäre von der Vorlage betroffen: Sämtliche digitalen Dienste mit mindestens 5000 Nutzerinnen –egal ob sie E-Mail, Cloud, VPN oder Chat anbieten – müssten diese ausreichend identifizieren und die Daten speichern. Konkret heisst das: Jede Website, über die sich Personen Direkt­nachrichten zuschicken können, fiele unter diese Bestimmung. Also beispielsweise auch die Marktplätze Ricardo, Tutti und der Online­händler Digitec, schliesslich tauschen sich dort Käufer und Verkäuferinnen aus. Aber auch Videospiel-Betreiber, bei denen sich Gamerinnen über Text- und Video­kommunikation austauschen können.

      Für die Identifizierung müsste eine Ausweis- oder Führerschein­kopie vorgelegt oder zumindest eine Telefon­nummer bekannt gegeben werden (die mit der SIM-Karten-Registrierung an eine Ausweis­kopie gekoppelt ist). Im erläuternden Bericht des Bundesrats ist auch von einer möglichen Identifikation via Kreditkarte oder Bordkarte auf Flughäfen die Rede, und es wird betont, dass technische Eckdaten wie IP-Adressen nicht ausreichen.

      Diese Kunden­informationen müssten alle Unternehmen sechs Monate auf Vorrat speichern. Die St. Galler Strafrechts­professorin Monika Simmler bezweifelt, dass diese Vorgaben überhaupt noch dem Bundesgesetz entsprechen. Denn dort ist «von grosser wirtschaftlicher Bedeutung» und «grosser Benutzerschaft» die Rede. «Ich gehe davon aus, dass der Bundesrat seine Kompetenz überschreitet, wenn er bei solch für den Markt unerheblichen Anbietern weiter gehende Pflichten einführt», sagt Simmler.

      Anonymität im Internet wäre vorbei

      Der Überwachungs­dienst behauptet, dass die betroffenen Unternehmen diese Daten ohnehin sammelten. Doch das stimmt nicht: Bisher waren für die Erstellung eines Benutzer­kontos auf den entsprechenden Websites kaum Personalien nötig. Jonathan Messmer, der sich für die IT-Anwalts­kanzlei Ronzani/Schlauri detailliert mit der Vorlage auseinander­gesetzt hat, erklärt: «Wer sagt, die Daten würden ‹sowieso schon gesammelt›, verkennt: Viele Nutzer und Anbieter wollen das gerade nicht – und werden jetzt neu dazu gezwungen.»

      Mit Anonymität im Internet wäre es komplett vorbei. Sprich: Wer eine Schweizer App, Software oder Plattform nutzt, riskiert, gläsern und identifizierbar zu sein. Und: KMU müssten einen enormen Aufwand leisten, um jene neuen Daten­banken auch gebührend gegen kriminelle Cyber­attacken abzusichern, damit sie nicht im Darknet landen. Dass das möglich sein wird, dürfte eine Illusion sein. Denn Studien aus den letzten Jahren zeigen, dass viele kleine und mittlere Unternehmen das Risiko von Cyber­attacken unterschätzen und sich entsprechend zu wenig schützen.

      Es ist unklar, wie weit der Überwachungs­dienst gehen wird, sollte die Verordnung durchkommen. Zwar erwähnt er als Ausnahme explizit Online-Medien­portale mit öffentlicher Kommentar­funktion (weil die Leserinnen sich gegenseitig keine Nachrichten schicken können). Doch die Versprechungen des Bundesrats haben bei diesem Thema eine kurze Halbwerts­zeit, wie die Entwicklungen der letzten acht Jahre zeigen.

      Bereits nach der Revision des Bundes­gesetzes zur Überwachung des Post- und Fernmelde­verkehrs im Jahr 2017 liessen die Strafverfolger des Bundes nichts unversucht, um zwei Kommunikations­dienste in eine komplett sachfremde Kategorie hochzustufen: Threema und Protonmail sollten beide als Fernmeldedienst­anbieterin eingestuft werden, obwohl beide Firmen nichts mit Internet­infrastruktur zu tun haben und weder über Glasfaser­kabel noch Satelliten­netzwerke verfügen.

      Threema und Protonmail hätten als Folge umfassende Überwachungs­pflichten einführen müssen, etwa eine Echtzeit­überwachung. Beide Unternehmen wehrten sich dagegen vor Gericht. Das Bundes­verwaltungs­gericht gab Threema im Mai 2020 recht, das Bundesgericht bestätigte dieses Urteil im April 2021. Protonmail legte ebenfalls beim Bundes­verwaltungs­gericht erfolgreich Beschwerde ein.

      Über den Verordnungsweg die Demokratie aushebeln

      Die Motivation für die Revision der Verordnung liegt damit auf der Hand: Weil die Behörden mit dem Upgrade von Threema und Protonmail juristisch gescheitert sind, gehen die Bundes­angestellten nun über den Verordnungs­weg, obwohl diese Änderungen sowohl dem Bundes­gesetz widersprechen als auch dem Willen des Parlaments, eine Hierarchie von Überwachungs­pflichten zu haben. Das ist ein demokratie­politisch höchst fragwürdiges Vorgehen.

      Mit der neuen Verordnung müssten Unter­nehmen wie Threema und Proton (das mittlerweile mehr Produkte als nur E-Mail anbietet) ihr auf Daten­schutz basierendes Geschäfts­modell aufgeben. Sie wären praktisch den gleichen Pflichten unterworfen wie der Internet­konzern Swisscom, der die Standort- und Telefon-Metadaten seiner Nutzerinnen laufend und für sechs Monate speichert. Denn die neue Verordnung verlangt, dass neu eine Million Nutzerinnen (global, nicht nur in der Schweiz) oder 100 Millionen Franken Konzern­umsatz reichen für das Upgrade und die damit verbundenen «vollen Pflichten».

      Der Überwachungs­dienst verkaufte die Verordnung in einem Gespräch mit Medien­schaffenden als eine Vereinfachung und als KMU-freundliche Revision. Er betonte mehrfach, dass die Revision der Verordnung nicht dazu führe, dass der Überwachungs­apparat ausgebaut werde. Der Sprecher des Diensts spielte die Brisanz massiv herunter: «Die meisten Unternehmen werden nie von uns hören und sammeln sowieso schon diese Daten.»

      Die Revision werde eine Klärung bringen, doppelte der Dienst in einer schriftlichen Antwort an die Republik nach: «Mit der Einführung der neuen ‹reduzierten Pflichten›, welche nur minimale Anforderungen enthalten, wird der Grundsatz der Verhältnis­mässigkeit künftig besser gewahrt.»

      IT-Jurist Messmer lässt dieses Argument nicht gelten: «Neue Pflichten werden eingeführt, bestehende Schwellen drastisch gesenkt und die Privatsphäre im Netz systematisch abgeschafft. Diese Verordnung ist einer der bisher gravierendsten Angriffe auf unsere digitale Freiheit.»

      Und der Staat wird sehr wohl bald bei Unter­nehmen anklopfen.

      Auskünfte mit wenigen Klicks

      Denn: Alle potenziell betroffenen IT-Unternehmen mit 5000 Nutzerinnen oder Kunden müssen sich bei den Bundes­behörden innert kurzer Frist melden. Versäumen sie dies, droht ihnen eine Busse. Verlangt eine kantonale Staats­anwaltschaft eine Auskunft, müssen sie diese unter anderem direkt im Verarbeitungs­system des Bundes eingeben.

      Jonathan Messmer von der IT-Anwalts­kanzlei Ronzani/Schlauri sagt: «Im Extremfall könnten Strafverfolgungs­behörden alle fünf Sekunden eine automatisierte Anfrage an Unternehmen mit vollen Überwachungs­pflichten stellen und somit ‹in Echtzeit› alle soeben erst registrierten Zugriffe rausholen und eine ganze Historie aufbauen.»

      Die Schweiz will mit dieser Revision also einen riesigen digitalen Überwachungs­apparat bauen, damit die Behörden neu auf Knopfdruck unbegrenzt viele Auskünfte abfragen können. Dass das Volumen bereits heute enorm gross ist, zeigen die letzte Woche vom Überwachungs­dienst veröffentlichten Zahlen: Die Kantone und die Bundes­behörden haben doppelt so viele Überwachungs­massnahmen angefordert wie im Vorjahr.
      Noch mehr Macht für Big Tech

      Doch nicht nur der Inhalt, sondern auch der Zeitpunkt der Verordnung ist fragwürdig. So ist am Europäischen Gerichtshof für Menschen­rechte in Strassburg eine Klage gegen Vorratsdaten­speicherung hängig, eingereicht von der Digitalen Gesellschaft. Beschwerde­führer sind unter anderem Grünen-Nationalrat Balthasar Glättli und «Beobachter»-Chefredaktor Dominique Strebel.

      International lässt sich die Verordnung fast nur mit den drakonischen Internet­gesetzen von Russland, China und dem Iran vergleichen, die entweder eine Realnamen­pflicht oder eine Mobiltelefon­nummer für E-Mail, Hosting und alle Arten von digitalen Dienst­leistungen verlangen. China fordert etwa Personalien bei der Registrierung für populäre Apps wie Wechat ein. Sollte die Schweiz die neue Cybercrime Convention der Uno ratifizieren, könnten sich jene Diktaturen bei der Strafverfolgung von Dissidentinnen schlimmsten­falls ebenfalls bei den Schweizer KMU bedienen. Denn diese verlangt eine Zusammenarbeit aller Strafverfolgungs­behörden weltweit.

      Es ist eine Reform, die nicht nur auf Threema und Proton zielt – zwei der wichtigsten IT-Firmen –, sondern auf unzählige Schweizer Unternehmen, die heute wohl noch gar nichts von diesen Konsequenzen wissen.

      Die Schweiz sabotiert ihre eigene IT-Industrie damit in einem Moment, wo sie sie am stärksten braucht: in geopolitisch turbulenten Zeiten, in denen die Privacy-Tech-Branche extremen Zulauf erhält und hiesige Cloud-Unternehmen wie Infomaniak auf Plakaten mit «sichere Schweizer Cloud» werben. Gerade jetzt, wo Bundesbern damit beginnt, sich Gedanken zur digitalen Souveränität zu machen und zur Loslösung von Big-Tech-Konzernen. Und gerade jetzt, wo bereits zwei Kantone ein «Recht auf digitale Integrität» und damit auch Anonymität in ihren Verfassungen verankert haben und in weiteren Kantonen politische Debatten dazu angelaufen sind.

      Die Ironie dabei: Mit dieser Verordnung werden amerikanische Big-Tech-Konzerne wie Meta noch mächtiger. Denn für Whatsapp – wie der Sprecher des Diensts Überwachung Post- und Fernmelde­verkehr bestätigt – gelten die Schweizer Gesetze nicht.

      https://www.republik.ch/2025/05/07/die-schweiz-ist-drauf-und-dran-autoritaere-ueberwachungsstaaten-zu-kopieren

    • Maître du #cryptage, #Proton est « prêt à quitter Genève »

      Andy Yen, patron du service de courriel et Cloud aux 100 millions d’utilisateurs, refuse l’espionnage que veut imposer la Confédération.

      En bref :

      – Le géant genevois des e-mails et du Cloud cryptés Proton quittera la Suisse en cas de durcissement de la surveillance qui lui est imposé.
      – Une réponse à la refonte de l’ordonnance sur la #surveillance des télécommunications, mise en consultation jusqu’au 6 mai.
      – L’Allemagne apparaît comme une destination alternative pour l’entreprise de messagerie cryptée, esquisse son patron, Andy Yen.

      https://www.tdg.ch/surveillance-le-geant-des-mails-cryptes-proton-pret-a-quitter-geneve-94740218821

  • De l’acétamipride détecté pour la première fois dans l’eau de pluie au Japon
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/06/03/de-l-acetamipride-detecte-pour-la-premiere-fois-dans-l-eau-de-pluie-au-japon


    A Tokyo, le 16 juillet 2024. YUICHI YAMAZAKI/AFP

    Le hasard concocte parfois de surprenantes collisions d’agendas. Samedi 31 mai, quatre jours après que les députés français, de l’extrême droite au bloc central, ont renvoyé la proposition de #loi_Duplomb afin de la faire adopter en commission mixte paritaire, des chercheurs japonais font état dans la revue Environmental Monitoring and Contaminants Research des premières détections de pesticides néonicotinoïdes dans l’eau de pluie. Avec, comme substance la plus fréquemment détectée, le fameux acétamipride – que le texte déposé par le sénateur (Les Républicains) de la Haute-Loire vise à réintroduire en France. « Les nuages sont devenus un vecteur de contamination de l’environnement global », résume le chimiste et toxicologue Jean-Marc Bonmatin (Centre national de la recherche scientifique), qui travaille depuis trente ans sur cette famille de pesticides.

    Conduits par Masumi Yamamuro (université de Tokyo), les auteurs ont prélevé une dizaine d’échantillons d’eau de pluie, recueillis entre avril 2023 et septembre 2024, au cœur de deux villes japonaises, Tsukuba (260 000 habitants) et Kashiwa (430 000 habitants), situées dans des régions agricoles de l’archipel. Les chercheurs ont mesuré la présence de #néonicotinoïdes dans 91 % des échantillons, c’est-à-dire tout au long de l’année – à l’exception de janvier – , l’acétamipride étant présent dans 82 % des cas. Ces produits demeurent autorisés au Japon, notamment en traitement de la culture du riz et des monocultures de pins.

    https://archive.ph/f1QtA

    le parapluie, accessoire défensif indispensable

    #eau

  • Malade des pesticides, Albert Chotard s’en est allé en plein débat sur la loi Duplomb
    https://france3-regions.franceinfo.fr/bretagne/ille-et-vilaine/rennes/malade-des-pesticides-albert-chotard-s-en-est-alle-en-ple
    https://france3-regions.franceinfo.fr/image/hD6rRrfmZO55GiqiXHwF1vJaPnE/930x620/regions/2025/06/02/albert-683d730232e21914829356.jpg

    Il avait 78 ans. Albert Chotard est décédé ce 31 mai 2025, épuisé par un double combat. Depuis près de 30 ans, il luttait contre la maladie de #Parkinson et contre la cause de sa maladie, les #pesticides. Alors que la #Loi_Duplomb doit être étudiée en commission mixte paritaire, sa mort soulève tristesse et colère.

    "lI n’y avait pas de prévention, s’étonnent aujourd’hui ses enfants , Virginie, Frédérique et Cédric. Les mélanges de produits se faisaient dans un seau dans la cour. Et après, les bidons, parfois mal rincés, on jouait avec, on s’en servait pour tenir les bâches. On ne se rendait pas compte du danger !’
    Et puis un jour de1997, alors qu’il monte à cheval, Albert Chotard s’aperçoit qu’il ne peut soudain plus glisser son pied dans l’étrier. Son médecin et un neurologue posent le diagnostic : maladie de Parkinson. Il a 39 ans.

    https://www.facebook.com/victimepesticide.ouest
    https://victimepesticide-ouest.ecosolidaire.fr

    « Nous sommes scandalisés, révoltés, s’émeut Michel Besnard. Chez tous les malades du collectif, il y a beaucoup de colère face au déni de nos élites politiques ! Ils sont soumis à des lobbys, il n’y a que le pognon qui compte ! Cette loi, poursuit-il, est un scandale, une régression. Le gouvernement est dans les mains de la FNSEA qui dicte ses mesures. »

    https://seenthis.net/messages/902331
    #agriculture #suicide

  • « La loi Duplomb va rendre l’avenir ingouvernable autrement que par le mensonge, la dissimulation ou l’attrition des normes sanitaires »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/06/01/la-loi-duplomb-va-rendre-l-avenir-ingouvernable-autrement-que-par-le-mensong


    Des palettes d’eau minérale Perrier, dans l’usine d’embouteillage de Nestlé SA, à Vergèze (Gard), en juin 2017. BALINT PORNECZI/BLOOMBERG VIA GETTY IMAGES

    L’affaire Nestlé le montre de manière aiguë, mais les exemples ne manquent déjà pas. En juin 2023, le tribunal administratif de Rennes condamne l’#ARS de Bretagne à refaire ses calculs, celle-ci s’étant rendue coupable d’une sélection un peu trop judicieuse de ses données, de manière à rendre plus présentables les #eaux_de_baignade des plages bretonnes, contaminées par la matière fécale des porcheries géantes de la région.

    A l’échelle nationale, la réglementation européenne encadrant la présence de produits de dégradation des pesticides dans l’eau potable n’est simplement pas appliquée. Si les autorités la mettaient en œuvre de manière stricte pour l’acide trifluoroacétique (TFA), un polluant éternel notamment issu de la dégradation de pesticides fluorés, la majorité des Français ne recevraient plus au robinet une eau conforme aux critères de qualité (sans doute plus des deux tiers, selon les estimations de Que choisir et Générations futures).

    Partout en France, les distributeurs et les collectivités savent qu’il faudra bientôt soit tricher sur l’application de la réglementation, soit changer les normes pour pouvoir continuer à distribuer de l’#eau_potable dans un grand nombre de territoires. Trois inspections générales (environnement, santé, agriculture et alimentation) ne disent pas autre chose. Dans un rapport récent, elles soulignent l’« échec global » de la protection de la ressource en eau et assurent que « sans mesures préventives ambitieuses et ciblées, la reconquête de la qualité des eaux est illusoire ».

    En adoptant le texte Duplomb, la représentation nationale rendrait définitivement illusoire cette reconquête, nécessitant à terme toutes sortes de tours de passe-passe réglementaires pour abaisser sans le dire le niveau de protection des populations. La proposition de loi est d’ailleurs bien faite : elle a anticipé cette nécessité en prévoyant de placer l’Agence nationale de sécurité sanitaire (#Anses) sous la tutelle de l’#agro-industrie.

    https://archive.ph/dUnjz

    #eau

  • #France_Travail : des #robots pour contrôler les chômeurs·euses et les personnes au #RSA

    France Travail déploie actuellement des robots visant à automatiser et massifier le contrôle des personnes inscrites à France Travail. Depuis le 1 janvier 2025, cela inclut également les personnes au RSA. Il s’agit d’une nouvelle étape du dangereux projet de #gestion_algorithmique des personnes sans-emplois, porté par le directeur général de France Travail, #Thibaut_Guilluy. Retour sur le contexte de cette mise en place et ses implications sociales.

    Sous l’impulsion d’Emmanuel Macron, les #contrôles réalisés par France Travail sont passés de moins de 200 000 en 2017 à plus de 600 000 en 2024. Il y a tout juste un an, l’exécutif surenchérissait et fixait à l’institution un objectif de 1,5 million de contrôles en 20271.

    Parallèlement était votée, en décembre 2023, la loi dite « #Plein_Emploi », entrée en vigueur le 1er janvier dernier. Cette dernière vient modifier en profondeur les modalités du contrôle des personnes sans-emplois via deux mesures phares. La première est l’extension du pouvoir de contrôle et de #sanctions des personnes au RSA par France Travail. La seconde concerne l’obligation pour toute personne suivie par France Travail – qu’elle soit au RSA ou au chômage – de réaliser 15 « heures d’activité » hebdomadaires sous peine de sanctions.

    C’est dans ce contexte que France Travail déploie actuellement une refonte de son processus de contrôle. Dénommée « #Contrôle_de_la_Recherche_d’Emploi_rénové » (ou « #CRE_rénové »), elle vise tant à « arriver à mettre en oeuvre 1,5 million de contrôles […] à l’horizon 2027 » qu’à prendre en compte les « évolutions introduites par la loi “Plein Emploi” »2.

    #Automatisation et #massification des contrôles

    Pour atteindre l’objectif de massification des contrôles, France Travail mise sur l’automatisation3. Début 2025, ses dirigeant·es ont ainsi annoncé que le « CRE rénové » s’accompagnerait du déploiement de « robot[s] d’aide à l’analyse du dossier » destinés à assister la personne en charge du contrôle. L’objectif affiché est de réaliser des « gains de productivité » permettant de réduire la durée d’un contrôle pour pouvoir alors les multiplier à moindre coût4.

    Pour ce faire, ces « robots » ont pour tâche de classer les personnes ayant été sélectionnées pour un contrôle selon différents degrés de « #suspicion »5 afin de guider le travail du contrôleur ou de la contrôleuse. Concrètement, ils réalisent un #profilage_algorithmique de la personne contrôlée sur la base de l’analyse des #données_personnelles détenues par France Travail.

    Ce #profilage prend la forme d’une #classification en trois niveaux : « #clôture » (pas de suspicion), « #clôture_potentielle » (suspicion moyenne) ou « #contrôle_potentiel » (suspicion forte)6. Ce résultat est alors transmis, en amont du contrôle, au contrôleur ou à la contrôleuse afin de l’inciter à se concentrer sur les dossiers considérés comme suspects par l’#algorithme, tout en clôturant rapidement le contrôle pour les autres.

    France Travail se réfugie dans l’#opacité

    À travers notre campagne France Contrôle, nous avons déjà parlé de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), la première à se lancer dans ce contrôle algorithmique des populations. Le fait qu’elle soit rejointe par France Travail démontre une fois de plus pourquoi il est fondamental de s’opposer, par principe, à l’usage d’algorithmes de profilage à des fins de contrôle. Mais également d’exiger la transparence autour du fonctionnement de ces algorithmes, afin de mieux pouvoir les combattre tant politiquement que juridiquement.

    Dans le cas présent, cette transparence est d’autant plus importante que l’objectif d’un contrôle de la #recherche_d’emploi – « une appréciation globale des #manquements [de la personne contrôlée] afin de sanctionner un comportement général »7 – est très flou et propice à l’#arbitraire. L’analyse du #code de l’algorithme pourrait aussi appuyer un combat juridique, tel que l’actuel contentieux contre la CNAF.

    Mais sur le sujet des « robots » de contrôle – comme sur beaucoup d’autres8 – la direction de France Travail se refuse à toute transparence. Son directeur est allé jusqu’à déclarer à la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) « qu’aucun algorithme n’est utilisé dans le cadre du « CRE rénové » […] » suite à la saisine déposée par des journalistes de Cash Investigation ayant travaillé sur ce sujet9.

    Un profilage policier

    En l’absence de transparence sur le fonctionnement de ces « robots », nous ne pouvons qu’avancer quelques hypothèses sur le fonctionnement du profilage algorithmique. Côté technique, la direction de France Travail a déclaré que le « robot » n’était pas basé sur de l’intelligence artificielle, sans toutefois exclure qu’il puisse l’être à l’avenir10. En conséquence, le profilage serait le résultat d’opérations algorithmiques simples issues de la combinaison de différents critères construits à partir des données personnelles détenues par France Travail11.

    Quant à la nature de ces critères, des pistes sont données par un document distribué aux équipes de contrôle de France Travail il y a quelques mois. Assumant pleinement un discours policier, la direction de France Travail y présente une « grille d’analyse » venant préciser le « niveau d’importance » de différents « indices » permettant de caractériser les « manquements » des personnes contrôlées.

    Parmi ces éléments, notons notamment l’absence de périodes récentes de travail ou de formation, l’absence de mobilisation des outils numériques mis à disposition par France Travail (offres, CV ou carte de visite en ligne), l’absence de contact avec son ou sa conseiller·ère, les résultats des derniers contrôles de recherche d’emploi, l’absence de candidatures envoyées via le site de France Travail ou encore le non-respect des 15 « heures d’activité » prévue par la loi « Plein Emploi ».

    Tout indique que ce travail de #rationalisation du processus de contrôle aurait servi de base à la construction du « robot » lui-même. En effet, en plus du résultat du profilage, le « robot » fait remonter au contrôleur ou à la contrôleuse une liste d’éléments issus de cette grille. Ces remontées permettent alors à la personne en charge du contrôle d’apprécier la décision de classification du « robot », sans pour autant qu’il ou elle ait accès à ses règles de fonctionnement précises.
    Automatisation et violence institutionnelle

    Le déploiement d’algorithmes de profilage à des fins de contrôle participe activement à la politique de #répression et à la #paupérisation des personnes sans-emplois. La massification des contrôles à laquelle contribue ce processus d’automatisation entraîne mécaniquement une hausse du nombre de sanctions et de pertes de #droits associé·es.

    Ainsi, d’après les documents de France Travail, 17% en moyenne des contrôles aboutissent à une radiation12. Dans l’hypothèse où ce taux resterait constant, l’augmentation de 500 000 à 1,5 million de contrôles par an implique que le nombre de radiations associées passerait d’environ 85 000 aujourd’hui à 255 000 en 202713. Ajoutons que l’impact des contrôles n’est pas le même pour toutes et tous : d’après les chiffres disponibles, les personnes n’ayant pas le bac ou étant au RSA sont sur-représentées parmi les personnes radiées suite à un contrôle14. L’automatisation des contrôles est donc une manière d’écarter les plus précaires de France Travail.

    Notons enfin, comme le rappellent cinq chercheurs et chercheuses dans le livre Chômeurs, vos papiers !15, qu’aucun travail scientifique ne vient valider le récit mis en avant par nos dirigeant·es selon lequel les contrôles favoriseraient la reprise d’emploi. Cette hypocrisie politique n’a pour fondement qu’une vision stigmatisante et infantilisante des personnes sans-emplois, visant à nier toute responsabilité collective vis-à-vis du chômage de masse et à le réduire à une problématique individuelle.

    À l’inverse, ajoutent les auteurs·ices, les effets négatifs des contrôles sont largement documentés. En plaçant les personnes contrôlées dans une situation humiliante – « où au stigmate de l’assisté s’ajoute celui du tricheur »16 – s’accompagnant de lourdes démarches de justification, ils induisent un effet dissuasif vis-à-vis de l’accès aux droits. En retour, ils contribuent à l’augmentation du non-recours, dont le taux est estimé à plus de 25% pour l’assurance chômage et à 30% pour le RSA17. À ceci s’ajoute le fait qu’il plonge dans la précarité celles et ceux contraints·es à accepter des postes pénibles, sous-payés et précaires.

    Loi « Plein Emploi » : des contrôles aux effets démultipliés

    Tout ceci est d’autant plus inquiétant à l’heure où entre en vigueur la loi « Plein Emploi », qui vient renforcer l’impact et le champ des contrôles réalisés par France Travail.

    En premier lieu via l’instauration d’une obligation de 15 « heures d’activité » pour toute personne sans-emploi18. À la violence qu’elle entraîne en termes de niveau de contrôle et d’intrusion dans la vie privée des personnes contrôlées, cette mesure conjugue une contrainte administrative extrêmement lourde de par la difficulté que chacun·e aura pour justifier ces heures. Elle vient ainsi considérablement renforcer l’arbitraire des contrôles et, de fait, les pouvoirs de répression de France Travail. Si la difficulté qu’il y aura à (faire) respecter cette mesure pourrait la faire paraître presque illusoire, notons cependant que France Travail développe déjà un agenda partagé entre personne sans-emploi et conseiller·ère, c’est-à-dire un outil numérique dédié au contrôle de ces « heures d’activité ».

    En second lieu, parce que la loi « Plein Emploi » vient étendre les prérogatives de contrôle de France Travail sur les personnes au RSA19. Jusqu’alors, les sanctions relatives au RSA relevaient de la compétence du département et le retrait de son bénéfice nécessitait le passage devant une commission pluridisciplinaire dédiée. Via les « suspensions-remobilisations »20, la loi « Plein Emploi » a désormais introduit la possibilité pour les départements de déléguer à France Travail la compétence de suspension du RSA. Dans ce cas, France Travail pourra suspendre le RSA d’une personne à la suite d’un contrôle de manière unilatérale et sans que l’avis d’une commission de contrôle de la suspension soit nécessaire.
    Face au contrôle algorithmique, lutter

    À l’heure où nous écrivons ces lignes, la contestation monte de toute part contre le renforcement des contrôles à France Travail.

    Du Défenseur des Droits à la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), en passant par le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion (CNLE), l’ensemble des institutions de lutte contre la pauvreté critiquent vertement la loi « Plein Emploi » et ses velléités autoritaires21.

    De leur côté les associations de lutte contre la précarité se regroupent et dénoncent une réforme « inhumaine, injuste et inefficace », tandis que sur le terrain, les premier·ères concernées s’organisent. En Bretagne, le Conseil départemental du Finistère a ainsi été occupé par des personnes réunies en « Assemblée Générale contre la réforme du Rsa-france-travail »22.

    Devant la multiplication des oppositions et la diversité des modes d’actions, nous appelons toutes celles et ceux qui refusent la destruction de notre système de protection sociale et la violence des politiques néo-libérales dont elle s’inspire à s’organiser et à rejoindre ces luttes de la manière qui leur convient le mieux.

    De notre côté, nous tâcherons d’y contribuer à travers la documentation de cette infrastructure numérique de surveillance que les dirigeant·es de France Travail mettent en place dans le cadre de la loi « Plein Emploi ». Nous appelons par ailleurs les personnes ayant connaissance des critères utilisés par les robots de contrôle à nous contacter à algos@laquadrature.net ou à déposer des documents de manière anonyme sur notre SecureDrop (voir notre page d’aide ici). Si vous le pouvez, vous pouvez nous aider en nous faisant un don.

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    References

    ↑1 Pour les chiffres de 2017, voir l’étude de Pôle Emploi « Le contrôle de la recherche d’emploi : l’impact sur le parcours des demandeurs d’emploi » disponible ici. Pour 2024, voir « Bilan du Contrôle de la recherche d’emploi » disponible ici. Pour les annonces d’Emmanuel Macron dès son arrivée au pouvoir voir cet article de 2017 et cet article de 2021. L’objectif de 1,5 million a été annnoncé par Gabriel Attal en 2024, voir cet article.
    ↑2 « Information en vue d’une consultation sur le contrôle de la recherche d’emploi rénové », Comité Social d’Entreprise Central des 9 et 10 octobre 2024, disponible ici.
    ↑3 A noter que le CRE rénové s’accompagne aussi d’une réduction des droits des personnes contrôlées afin de réduire le temps nécessaire à un contrôle. Il s’agit de mettre en place une procédure « flash » permettant de faire « l’économie de l’entretien téléphonique » et/ou de l’envoi d’un formulaire à la personne contrôlée, deux choses qui étaient systématiques jusqu’alors lors d’un CRE. En cas d’« avertissement avant sanction », la personne contrôlée disposera de 10 jours pour justifier de sa situation. Voir « Information sur le pilote du contrôle de la recherche d’emploi (CRE) rénové », Comité Social d’Entreprise Central des 13 et 14 mars 2024, disponible ici.
    ↑4 « Information sur le pilote du contrôle de la recherche d’emploi (CRE) rénové », Comité Social d’Entreprise Central (CSEC) des 13 et 14 mars 2024, disponible ici.
    ↑5 La sélection des personnes relève d’un autre traitement algorithmique. Elles sont le fruit de requêtes ciblées (métiers en tensions…) et aléatoires, de signalements agence ou encore d’« alertes automatiques » incluant désormais certains des flux provenant de la « gestion de la liste ». Voir le document « Information sur le pilote du contrôle de la recherche d’emploi (CRE) rénové », Comité Social d’Entreprise Central des 13 et 14 mars 2024, disponible ici.
    ↑6 Ces informations se basent sur des discussions avec des équipes de France Travail ayant eu accès aux résultats des profilages réalisés par les robots. Notons aussi l’existence d’une catégorie « erreur » pour les dossiers n’ayant pas pu être traités par l’algorithme.
    ↑7 « Information sur le pilote du contrôle de la recherche d’emploi (CRE) rénové », Comité Social d’Entreprise Central des 13 et 14 mars 2024, disponible ici.
    ↑8 Une grande partie de nos demandes d’accès aux documents administratifs restent sans réponse. Nous reviendrons sur ce point dans un article dédié.
    ↑9 L’avis de la CADA citant le directeur de France Travail est disponible ici.
    ↑10 Propos tenus lors du CSEC de France Travail du 22 novembre 2024.
    ↑11 On pense assez naturellement à un algorithme du type « arbre de décision ».
    ↑12 Voir le tableau 1 du document Le contrôle de la recherche d’emploi en 2023, France Travail, disponible ici. A noter que ce chiffre est passé à 20% dans les régions ayant expérimentées le CRE rénové avant sa généralisation. Voir la slide 15 de ce document présenté en Comité Social et Economique Central de France Travail le 9 octobre 2024.
    ↑13 A noter ici que l’effet de la loi « plein emploi » sur le nombre total de radiations n’est pas clair. En effet, une partie de la « gestion de la liste » – situations entraînant auparavant une radiation automatique tel que l’absence à un rendez-vous ou l’absence à formation – est transférée au CRE. Pour des statistiques sur les radiations et les sorties des personnes inscrites à France Travail est disponible ici sur le site de la DARES.
    ↑14 Voir Le contrôle de la recherche d’emploi en 2023, France Travail, tableau 2, disponible ici. Voir aussi le tableau 1 de l’étude « Le contrôle de la recherche d’emploi : l’impact sur le parcours des demandeurs d’emploi », Pôle Emploi, 2018.
    ↑15 C. Vives, L. Sigalo Santos, J.-M Pillon, V. Dubois et H. Clouet, « Chômeurs, vos papiers ! », 2023. Cet essai revient sur les aspects historiques, politiques et sociologiques du contrôle dans les politiques publiques de l’emploi. Concernant l’impact des contrôles, notons l’étude « Le contrôle de la recherche d’emploi : l’impact sur le parcours des demandeurs d’emploi » publiée par Pôle Emploi en 2018, qui ne permet pas de conclure, tels que les résultats sont présentés, à un quelconque impact statistiquement significatif du contrôle.
    ↑16 V. Dubois, « Contrôler les assistés », Chapitre 10. Voir aussi l’article de Lucie Inland disponible ici, cet article du Monde et le rapport du Défenseur des Droits « La lutte contre la fraude aux prestations sociales » disponible ici. La Fondation pour le logement des défavorisés, le Défenseur des droits et le collectif Changer de Cap ont par ailleurs collecté de nombreux témoignages décrivant la violence vécue par les allocataires lors des contrôles. Difficultés de recours, contrôles répétés, suspension automatique des prestations sociales, intrusion humiliante dans les moindres recoins de la vie privée. Nous vous invitons à lire l’ensemble de ces témoignages disponibles ici.
    ↑17 C. Hentzgen, C. Pariset, K. Savary, E.Limon, « Quantifier le non-recours à l’assurance chômage », Direction de l’Animation de la recherche, des Études et des Statistiques, 2022, disponible ici. Céline Marc, Mickaël Portela, Cyrine Hannafi, Rémi Le Gall , Antoine Rode et Stéphanie, Laguérodie « Quantifier le non-recours aux minima sociaux en Europe », 2022, disponible ici.
    ↑18 Le nombre « d’heures d’activités hebdomadaires » à réaliser peut être diminué en fonction des difficultés personnelles (handicap, parent isolé…). Voir l’article 2 de la loi pour le « Plein Emploi ».
    ↑19 L’obligation d’inscription concerne aussi les personnes en situation de handicap suivies par Cap Emploi et les « jeunes » accompagnés par une mission locale ayant conclu un « Parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie » ou un « contrat d’engagement jeune ». Voir l’article 1 de la loi pour le « Plein Emploi ».
    ↑20 L’article 3 de la loi pour le « Plein Emploi » prévoit notamment la possibilité pour un département de déléguer le « prononcé des mesures de suspension du versement du RSA » pour les personnes dont France Travail est l’organisme référent. L’article 2 de la même loi une coopération accrue entre France Travail. Il précise aussi que France Travail est en charge du contrôle du « Contrat d’Engagement » des personnes au RSA dont il est l’organisme référent et qu’il peut proposer au Conseil Départemental des sanctions (suspension/radiation) concernant le versement du RSA. Des précisions seront apportées par décret dont une version préliminaire a fuité dans la presse.
    ↑21 Voir notamment la déclaration de la CNCDH, l’avis du CNLE et cette étude publiée par le Secours Catholique, Aequitaz et ATD Quart Monde.
    ↑22 Voir notamment cet appel et cet article sur leur action au conseil départemental du Finistère. Vous pouvez les contacter à l’adresse ag-rsa-francetravail-brest chez riseup.net.

    https://www.laquadrature.net/2025/05/22/france-travail-des-robots-pour-controler-les-chomeurs%C2%B7euses-et-le

    #contrôle #surveillance #loi_plein_emploi #chômeurs

    –-
    voir aussi : https://seenthis.net/messages/1116620
    ping @karine4

  • [Affiches] En solidarité avec les attaques contre des maton.nes et la #loi_narcotrafic
    https://nantes.indymedia.org/posts/146271/affiches-en-solidarite-avec-les-attaques-contre-des-maton-nes-et-l

    “On relait ici les communiqués de #DDPF (Défense des Droits des Prisonniers Français) qui sont sortis après les attaques qui ont eu lieu entre le 12 et le 15 avril 2025 devant plusieurs prisons, écoles de maton.nes et logements de l’Administration Pénitentiaire. Ils ont été publiés sur un fil Telegram…

    #Attaque #Prison #Répression #Solidarité #France #Global

  • Communiqué de presse :
    Pour une consécration du principe de fraternité à la frontière

    Le 12 septembre 2024, la #CEDH rejetait la requête formulée par #Loïc_Le_Dall, à la suite de sa condamnation pour « aide à l’entrée d’un étranger en situation irrégulière en France ». Cette décision, qui mit fin à plus de 6 ans de procédure, est un camouflet pour l’ensemble des militants et militantes des droits des personnes étrangères, qui demandent aux Institutions européennes de garantir l’application systématique de l’immunité humanitaire aux frontières.

    Loïc Le Dall, président d’Emmaüs La Roya et membre du conseil d’administration de l’Anafé, militant de la défense des droits des personnes exilées, a été arrêté à la frontière franco-italienne en janvier 2018 alors qu’il conduisait sa voiture avec à son bord une personne racisée. Relaxé par le tribunal correctionnel puis condamné par la cour d’appel, la Cour de cassation a finalement confirmé en janvier 2023 sa condamnation pour « aide à l’entrée d’un étranger en situation irrégulière en France » en excluant l’immunité humanitaire pour l’aide à l’entrée. Aucune réponse n’a été apportée concernant le manque de caractérisation de l’infraction par la cour d’appel. C’est en effet sans aucun élément matériel permettant de savoir si la personne était ou non « étrangère » et « en situation irrégulière » que la cour d’appel a décidé de condamner Loïc Le Dall.

    Résolu à faire prévaloir le principe de fraternité qui motive son engagement et estimant qu’il a été victime d’une atteinte à son droit fondamental de porter assistance aux personnes vulnérabilisées par devoir de conscience, le président d’Emmaüs La Roya a déposé en mai 2023 une requête devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH). Cette dernière a rendu une décision d’irrecevabilité le 12 septembre 2024.

    Face à cette décision, Loïc Le Dall a déclaré : « nous sommes pris·e dans un étau juridique entre l’interdiction d’aider à l’entrée sur le territoire d’une personne y compris lorsque sa vie est en jeu lorsqu’elle se présente à une frontière terrestre et le risque d’être poursuivi·e pour non-assistance à personne en danger – et ce, sans compter la culpabilité s’il lui arrive quelque chose. » avant de conclure : « j’invite tous les juges des juridictions françaises et de la CEDH qui ont participé à mon procès à venir constater les violations des droits que nous observons au quotidien depuis 9 ans à la frontière franco-italienne. Je leur ferai découvrir la réalité de cette frontière et les accueillerai dans notre communauté ».

    Pour nos organisations, cette décision est dangereuse pour toutes les personnes qui défendent les droits des personnes exilées en France. La CEDH n’a pas pris en compte le fait que les éléments constitutifs de l’infraction n’étaient pas constitués. Elle n’a surtout pas pris la mesure du durcissement de la législation française à l’encontre des défenseurs et défenseures des droits des personnes en migration, ni des pratiques de l’administration.

    Nos organisations appellent à une modification des textes afin de garantir l’application systématique de l’immunité humanitaire aux frontières. Les personnes solidaires ne doivent plus être inquiétées, poursuivies ou condamnées pour leurs actions de fraternité à l’égard des personnes en migration. La défense des droits des personnes étrangères aux frontières que ce soit en mer, en montagne ou dans les plaines, ne doit plus être réprimée. À l’image de l’obligation de sauvetage en mer qui prohibe de poursuivre les organisations qui sauvent des vies en mer, et même si cela va à l’encontre des dispositions du Pacte sur l’immigration et l’asile et de la réforme Schengen qui ont accordé des dispositions permettant de réprimer les organisations y compris humanitaires dans certaines conditions, il serait temps que l’Union européenne se dote d’un mécanisme dédié au droit d’aider autrui à titre humanitaire, y compris à la frontière. Nos organisations continueront à militer pour ce droit et à soutenir les personnes exilées et toutes celles et ceux qui leur viennent en aide.

    https://anafe.org/pour-une-consecration-du-principe-de-fraternite-a-la-frontiere
    #fraternité #frontières #principe_de_fraternité #migrations #réfugiés #criminalisation_de_la_solidarité #solidarité

  • Lettre au préfet de Loire Atlantique
    https://nantes.indymedia.org/posts/145409/lettre-au-prefet-de-loire-atlantique

    Plateforme 44 des ONG pour la #Palestine Contact : AFPS44 Pôle associatif Désiré Colombe 8 rue A. Leloup 44100 #Nantes afpsnantes@wanadoo.fr le 8 mai 2025 M. le Préfet de #Loire-atlantique Préfet de Région 6, Quai Ceneray Nantes Objet : Demande d’audience urgente/ Mise en œuvre de la résolution de l’AGNU du…

    #Local

  • Kiabi, Shein, Decathlon : la fast fashion encaisse des millions d’euros d’argent public avec le don de vêtements invendus
    https://disclose.ngo/fr/article/kiabi-shein-decathlon-la-fast-fashion-encaisse-des-millions-deuros-dargent

    Les marques d’habillement à bas prix tirent profit de leurs invendus écoulés auprès d’associations comme Emmaüs ou La Croix Rouge, révèle Disclose, en partenariat avec Reporterre, à partir de documents confidentiels. Le résultat de la loi anti-gaspillage qui les encourage, depuis 2022, à donner leurs surplus en échange de 60 % de réduction fiscale. Au risque de financer la surproduction de l’industrie textile. Lire l’article

    • Les marques d’habillement à bas prix tirent profit de leurs invendus écoulés auprès d’associations comme Emmaüs ou La Croix Rouge, révèle Disclose, en partenariat avec Reporterre, à partir de documents confidentiels. Le résultat de la loi anti-gaspillage qui les encourage, depuis 2022, à donner leurs surplus en échange de 60 % de réduction fiscale. Au risque de financer la #surproduction de l’industrie textile.

      Sur le papier, l’offre est alléchante. Vingt palettes de vêtements neufs de la marque Shein envoyées depuis la Chine, gratuitement. Delphine Peruch, coordinatrice d’une #recyclerie dans le Var, n’en revient pas lorsqu’elle reçoit cette proposition, en novembre dernier. Elle a pourtant décliné : « Notre philosophie est de donner une seconde vie aux vêtements, pas de revendre du #neuf ». Ces derniers mois, son association croule sous les dons, comme toute la filière du #ré-emploi textile, asphyxiée par les #surplus. À la #Croix-Rouge, en Vendée, on ne récupère plus les vêtements confiés par les particuliers. Chez #Emmaüs, « on pousse les murs, on construit des chapiteaux, et certains dons ont dû être jetés », rapporte Louana Lamer, responsable textile de l’association.

      Le secteur craque face à une production de vêtements débridée. Chaque seconde, près de 100 pièces neuves sont injectées sur le marché français. Une hausse de 30 % en seulement quatre ans. « On a créé un système malade où il est normal de produire en trop, dénonce Emmanuelle Ledoux, directrice générale de l’Institut national de l’économie circulaire. Il faut que tout soit disponible tout le temps, jouer sur la #nouveauté, réduire les coûts avec des #économies_d’échelles… Le résultat, ce sont des niveaux élevés de surproduction. » Des vêtements qui ne servent à rien, donc, et qui alourdissent le #bilan_écologique désastreux de l’industrie de la mode, responsable de 8 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde.

      Pour limiter l’impact des textiles invendus, la loi anti-gaspillage interdit leur #destruction depuis 2022. Les entreprises présentes sur le marché français sont désormais obligées de les recycler, les vendre à des déstockeurs ou les donner à des #associations en échange d’une réduction fiscale équivalant à 60 % de la valeur des vêtements. Un effet d’aubaine méconnu, mais largement exploité par des poids lourds du secteur comme Shein, Decathlon et Kiabi.

      D’après l’enquête de Disclose, en partenariat avec Reporterre, qui s’appuie sur des documents internes et l’analyse d’une dizaine de rapports d’entreprises, les géants de la fast fashion reçoivent plusieurs millions d’euros de #réductions_d’impôt pour leurs surplus donnés à des associations. Exemple : pour un pantalon vendu 12 euros par Shein, la marque chinoise peut escompter une ristourne fiscale de 7,20 euros si elle choisit de l’offrir à une #recyclerie. De quoi rendre la surproduction rentable pour une enseigne capable de réduire ses coûts de fabrication à quelques dizaines de centimes par article. Mais en bout de chaîne, ce sont les associations qui trinquent : ensevelies sous les vêtements, elles doivent aussi, de plus en plus, les détruire par leurs propres moyens, voire… aux frais du contribuable.

      Un cadeau de Shein contre un reçu fiscal

      « Nous produisons ce que les clients veulent, au moment où ils le veulent et là où ils le veulent », assure le PDG de Shein, #Donald_Tang, dans un entretien au JDD en mars dernier. Selon lui, « ce modèle maximise l’efficacité et réduit le gaspillage presque à zéro ». Vraiment ? Sur le marché privé du #déstockage, où des entreprises s’échangent des lots de vêtements invendus, les colis du mastodonte chinois de la mode sont partout. Ils se vendent même par camions entiers, sur des sites web examinés par Disclose.

      Mais depuis quelques années, les habits Shein produits pour rien ont trouvé de nouveaux débouchés, bien plus rentables : les #brokers en invendus. Ces jeunes pousses françaises mettent en relation les grandes marques de vêtements avec les associations spécialisées dans le don. C’est l’un de ces brokers, baptisé #Dealinka, qui a contacté la recyclerie varoise de Delphine Peruch, en fin d’année dernière, pour lui proposer les palettes de vêtements de Shein.

      Cette #start-up créée en 2023, un an après l’entrée en vigueur de la loi anti-gaspillage, collabore avec les grands acteurs de la solidarité : Les Restos du Cœur, le Secours Populaire ou Les Petits Frères des Pauvres. À ses clients de la fast fashion, Dealinka promet de « réduire les frais liés aux stocks encombrants [et] associés à la destruction des produits ». Surtout, elle insiste sur « les dons effectués par les entreprises à des associations [qui] peuvent être éligibles à des #avantages_fiscaux ». Un argument que l’on retrouve dans un e-mail envoyé à la recyclerie du Var et consulté par Disclose. Dealinka propose ainsi « 21 m3 de marchandises » de Shein, en échange d’un « reçu fiscal que nous retournerons à notre client donateur ». La cargaison étant estimée à 53 167 euros, le « client donateur » — la marque chinoise ou l’un de ses importateurs — peut ici espérer déduire 31 900 euros de ses impôts.

      « La #défiscalisation est d’autant plus intéressante financièrement que, dans le cadre du don, ce sont les entreprises elles-mêmes qui déterminent la valeur de leurs produits », décrypte Romain Canler, directeur de l’Agence du don en nature. Pour Shein, qui propose la bagatelle de 7 000 nouvelles références par jour, d’après les calculs de l’ONG Les Amis de la Terre, rien ne filtre sur le nombre d’invendus. Pas plus que sur le montant des économies fiscales réalisées. Interrogé par Disclose sur le manque à gagner pour l’État, le ministère de l’économie n’a pas donné suite. Mais pour une entreprise au moins, le cadeau du fisc se compte en centaines de milliers d’euros : Decathlon.

      « Donner, c’est bon pour ton portefeuille »

      D’après un tableau obtenu par Disclose, Decathlon a bénéficié de 709 000 euros d’avoirs fiscaux, en 2024, pour 1,18 million d’euros de produits invendus donnés via #Comerso. Le slogan de cette entreprise qui, à l’instar de Dealinka, relie les marques et les associations ? « Vos invendus ont de la valeur ». Dont acte : la ristourne fiscale reversée à Decathlon, propriété de la richissime famille Mulliez, a presque triplé entre 2021 et 2024, toujours selon ce document interne. « En 2023, ces dons en nature équivalent à 0,01 % du chiffre d’affaires de Decathlon France », relativise la marque auprès de Disclose.

      « On commence à générer pas mal de cash » (Thomas Moreau, cofondateur de la start-up #Done, un broker d’invendus qui travaille pour Decathlon)

      La promesse d’économies fiscales, c’est aussi l’argument coup de poing de l’autre broker partenaire de l’enseigne française, la start-up lilloise Done. Le déstockage de vêtements vers des associations y est carrément présenté comme un « acte noble récompensé par 60 % en réduction d’impôt ». « On commence à générer pas mal de cash », confiait l’un des cofondateurs de la start-up à La Voix du Nord, en janvier dernier. Done prélève une commission de 12 % sur la valeur des stocks récupérés. Soit 12 000 euros pour 100 000 euros de vêtements offerts à des associations, les 48 000 euros restants revenant aux enseignes sous forme de réduction fiscale.

      Plutôt que d’interroger son modèle de production, qui alimente l’exploitation humaine au Bangladesh et en Chine, mais aussi la déforestation au Brésil comme l’a révélé Disclose, Decathlon fait du don un mantra. Sollicitée, l’enseigne indique qu’en 2024 « près de 90 % de [ses] magasins en France ont participé à des actions de dons, bénéficiant à plus de 200 associations ». Et à ses finances. Sur un site web destiné aux responsables de magasin, que Disclose a consulté, l’incitation fiscale est clairement présentée comme une motivation au don : « donner, c’est bon pour ton portefeuille ». Et à ce jeu-là, une autre enseigne de la famille Mulliez a redoublé d’ingéniosité : Kiabi.

      Le tour de passe-passe de #Kiabi

      En France, le champion français du prêt-à-porter ouvre un magasin tous les dix jours. Et plus de 800 000 vêtements Kiabi sont mis en vente chaque jour. Combien d’autres sont produits pour rien ? Selon les calculs de Disclose, basés sur ses déclarations extra-financières, la marque a généré au moins 5,6 millions d’invendus en 2023. Un volume qui a quasi doublé en deux ans. S’ils étaient tous mis en rayon ensemble, ces vêtements occuperaient environ 100 magasins de l’enseigne.

      Fort heureusement, Kiabi a trouvé une combine pour écouler ses surplus, tout en profitant de la générosité de l’État : les #Petits_Magasins. Avec ce concept « génial », comme elle le vante sur ses réseaux sociaux, la marque déstocke ses invendus auprès de boutiques solidaires qui vendent uniquement ses produits, sans passer par des intermédiaires. Encore mieux, ces Petits Magasins forment des salarié·es en insertion. L’idée, lancée en 2017, coche toutes les cases du cercle vertueux. À un gros détail près.

      Les Petits Magasins sont chapeautés par la société #Kivi, une joint-venture entre #Bunsha, la holding des magasins Kiabi, et le groupe d’insertion #Vitamine_T, qui compte le DRH de Kiabi à son conseil d’administration. Autrement dit, dans ce système « génial », Kiabi donne à Kiabi. Sauf « [qu’]il y a des rescrits fiscaux derrière ces dons », révèle le responsable de l’une de ces structures qui souhaite rester anonyme. Une information confirmée à Disclose par un ancien cadre de la marque.

      D’ici 2026, le leader français de la #mode_éphémère ambitionne d’écouler la totalité de ses invendus via les Petits Magasins fiscalement optimisables. Kiabi n’a pas souhaité communiquer à Disclose le montant des #exonérations_fiscales déjà obtenues grâce à cette opération. Mais en extrapolant ses derniers chiffres connus — 430 000 vêtements donnés aux Petits Magasins en 2021, d’une valeur de 1,9 million d’euros —, Kiabi aurait pu compter sur une réduction d’impôts de près de 15 millions d’euros si elle avait donné l’intégralité de ses invendus en 2023. Et sa soif d’argent public ne s’arrête pas là.
      Double peine pour les finances publiques

      Malgré un chiffre d’affaires record de 2,3 milliards d’euros en 2024, dont 45 millions d’euros reversés en dividendes à la famille Mulliez, Kiabi profite d’autres largesses publiques pour rentabiliser sa surproduction. À Reims (Marne), son tout nouveau Petit Magasin est implanté dans des locaux subventionnés par un bailleur social. À Hem (Nord), c’est la mairie qui a prêté un local rénové à ses frais. La communauté d’agglomération de Lens-Liévin (Pas-de-Calais) a quant à elle attribué, début mars, une subvention de 3 000 euros au Petit Magasin de Kiabi.

      En quelques années, au moins 30 de ces « #boutiques_solidaires » ont essaimé sur le territoire. Pourtant, Kiabi ne parvient pas à liquider l’ensemble de ses invendus : au moins un vêtement sur cinq donné aux Petits Magasins ne trouve pas preneur. Ces habits encore étiquetés sont alors susceptibles d’être donnés à des associations, au risque de concurrencer les véritables pièces de seconde main. « En injectant des invendus dans cette filière, les #fripes ne sont plus compétitives », regrette Emmanuelle Ledoux de l’Institut national de l’#économie_circulaire. La raison ? Les vêtements d’occasion demandent beaucoup plus de travail aux structures de ré-emploi, comme l’explique Lisa Coinus, ex-responsable textile au sein d’une ressourcerie à Arles : « Derrière une fripe de seconde main, il y a 20 minutes de travail de tri. Si elle nécessite un nettoyage, on passe à 30 minutes. Avec une petite réparation, on monte à 45 minutes. Une fringue Kiabi ou Shein neuve qui arrive, vous la mettez directement sur les étals ».

      Illustration de la saturation du secteur, son ancienne association accumule les stocks de vêtements sur un parking, à l’air libre. « En mars dernier, on a dépensé 8 000 euros pour enfouir 10 tonnes à la déchetterie », témoigne Lisa Coinus. Et quand les structures ne peuvent pas assumer ces coûts, les collectivités locales prennent le relais. C’est là un dernier coût caché des invendus de la fast fashion : un jour ou l’autre, ils finiront dans la filière des #déchets textiles. En théorie, cette dernière est financée par une #taxe versée par les enseignes de mode sauf… si les vêtements ont fait l’objet d’un don. « Au final, l’entreprise transfère à la collectivité la charge de l’élimination de ses déchets », analyse Bertrand Bohain, délégué général du Cercle du recyclage. Gouffre pour les #finances_publiques, inutile pour limiter la production exponentielle de la fast fashion, la loi anti-gaspillage porte décidément mal son nom.

      #Kiabi #Shein #Decathlon #invendus #vêtements #habits #mode #fast-fashion #dons #business #loi_anti-gaspillage #réduction_fiscale #industrie_textile #textile #occasion #seconde_main #second-hand

  • Un rapport identifie les freins au développement du #vélo en #France

    Six mois après la mort d’un cycliste à Paris, écrasé intentionnellement par un conducteur de SUV, le #rapport commandé par le ministère des transports fait quarante propositions pour améliorer la #cohabitation entre les différents types d’usagers de la route.

    Commandé au lendemain de la mort de Paul Varry, ce cycliste écrasé délibérément par un conducteur de SUV en plein Paris, le rapport d’Emmanuel Barbe, ancien délégué interministériel à la sécurité routière, publié lundi 28 avril, devait faire des propositions pour un meilleur « #partage_de_la_route ».

    Alors que les nouvelles mobilités (vélos, trottinettes…) se sont fortement développées ces dernières années, venant concurrencer l’espace de la #voiture en #ville, le rapport fait une quarantaine de propositions pour rendre cette cohabitation moins conflictuelle. Et pour continuer d’encourager ces pratiques écologiques et bonnes pour la santé.

    De marginale, la pratique du vélo s’est généralisée dans les grandes villes, avec un nouveau cap franchi à la suite de l’émergence du covid, relève le rapport. En France, 25 % des personnes interrogées se déclarent cyclistes réguliers (elles pratiquent au moins une fois par semaine) et 32 % cyclistes occasionnels. De 15 000 kilomètres en 2010, le réseau des pistes cyclables en France est passé à 57 000 en 2022. Une densification particulièrement visible dans les grandes métropoles : à Lyon, le trafic vélo a été multiplié par six depuis vingt ans. À Paris, le volume de pistes cyclables est passé de 4,3 kilomètres en 1995 à plus de 1 000 kilomètres en 2021.

    Encouragé par un #plan_vélo en 2017 et par une #loi_d’orientation_des_mobilités (LOM) deux ans plus tard, cet essor n’empêche pas la France d’accuser malgré tout un retard certain par rapport à la moyenne de l’Union européenne (UE), puisque la part modale du vélo est de 3 %, contre 8 % à l’échelle européenne.

    Alors que « 53 % des déplacements domicile-travail effectués en voiture sont inférieurs à deux kilomètres », le potentiel de développement de ces mobilités alternatives reste énorme.

    La #dangerosité perçue de ce moyen de transport demeure un #frein important. Les cyclistes représentent 7 % des 3 190 personnes décédées dans un accident de la circulation en 2024. Les victimes sont majoritairement des hommes, plutôt âgés et hors agglomération.

    Les associations auditionnées par le rapporteur décrivent une augmentation des « #violences_motorisées » à l’égard des cyclistes, qui résultent selon elles d’un « cadre qui tolère encore trop souvent des comportements agressifs, menaçants ou dangereux au quotidien sur les routes ». Des réactions qui « sont aussi le fruit de décennies d’aménagements routiers dangereux, dont la conception influence directement la #sécurité et les comportements des usagers ».

    Le poids des #représentations

    Le rapport préconise que ces #violences soient désormais intégrées dans l’enquête dite de « #victimation », du service statistique ministériel de sécurité intérieure (SSMSI).

    Le texte souligne néanmoins que les #tensions sont généralisées dans le partage de la #voirie puisque les piétons, eux, concentrent leurs récriminations sur les cyclistes plus encore que sur les automobilistes.

    L’un des intérêts du rapport est de revenir sur la dimension culturelle très forte de ces conflits d’usage. Ainsi, le fait de « percevoir le véhicule comme une extension de sa personne (“je suis garé là”) » explique la réaction agressive engendrée par la perception d’une #menace contre son véhicule. On y apprend aussi le « lien entre le nombre de #stickers ou de marqueurs identifiant le #territoire_d’origine sur la voiture et la probabilité de la survenue d’un épisode de “#rage de la route” ».

    Avec un #imaginaire automobile construit autour des notions de « #liberté_individuelle, de #puissance, d’#émancipation », nourri par une imagerie publicitaire présentant un conducteur ou une conductrice seule dans un paysage bucolique, le #partage_de_la_route avec les cyclistes est naturellement vécu comme une #entrave.

    Le rapport propose sur ce point que le ministère des transports saisisse l’Autorité de régulation des professionnels de la #publicité (ARPP), afin que les publicités pour les voitures correspondent plus à la réalité de la présence de différents types d’usagers de la route.

    Le rapport n’élude pas non plus la dimension classiste et genrée qui se joue dans l’opposition entre #cyclistes et #automobilistes.

    L’#agressivité de certains automobilistes contre les cyclistes « bobos » des villes n’est pas sans fondements sociologiques. « Cette vision du #conflit_des_mobilités comme une “#lutte_des_classes larvée” remonte aux années 2000. Elle reflète, en la caricaturant, une dynamique réelle : le retour du vélo dans les grandes villes à partir des années 1990 s’est en effet traduit par une “inversion des pratiques entre cols-bleus et blancs” (en Île-de-France, les cadres sont passés de 1 % des usagers du vélo en 1976 à 22 % en 2010) », pointe le rapport.

    Ainsi, « la fréquence d’utilisation du vélo tend à augmenter avec le revenu mensuel du foyer, le recours à l’automobile pour les déplacements domicile-travail est beaucoup plus présent chez les ouvriers qualifiés que chez les cadres », ces derniers habitant toujours plus en centre-ville qu’en périphérie.

    Les biais de genre sont aussi très importants, avec des #hommes responsables de 83 % des accidents mortels sur la route en 2023. Mais des hommes qui continuent de toujours mieux réussir l’épreuve du permis de conduire, les femmes étant pénalisées par leur plus grande « aversion au risque ». Le rapport émet une série de recommandations pour que le permis de conduire intègre plus les questions de cohabitation sur la route, mais valorise également les comportements prudents.

    Un cadre légal inégalement respecté

    Le sentiment très largement partagé que les cyclistes s’affranchissent du respect du Code de la route (feux rouges grillés, rue prise à contresens, etc.) sans être verbalisés accroît aussi le ressentiment des automobilistes, admet le rapporteur au terme de ses six mois d’auditions. Pour y remédier, le rapport prône un renforcement des contrôles des cyclistes mais également des #amendes minorées, puisque la dangerosité pour les tiers de ces #infractions est assez faible.

    Enfin, le manque d’#infrastructures sécurisées est bien identifié comme un frein essentiel au développement du vélo. À cet égard, le rapport préconise de remettre les crédits supprimés au plan vélo – 2 milliards initialement prévus sur la période 2023-2027 –, qui avait montré de réels résultats depuis son lancement : « 14 000 kilomètres de pistes cyclables ont été construits entre 2017 et 2023 (+ 40 %) et leur fréquentation a augmenté de 57 % sur la même période. »

    Cette saignée budgétaire (20 % des sommes prévues initialement ont été débloquées en 2025) devrait selon le rapport avoir peu d’impact sur les grandes métropoles, mais « ralentira voire mettra un terme au développement d’#infrastructures_cyclables en milieu périurbain et rural, là où le financement de l’État constitue à la fois une légitimation politique et un effet de levier décisif ».

    Le rapporteur insiste aussi sur le fait que l’État ne s’est jamais beaucoup attaché à faire respecter les obligations légales de création d’#itinéraires_cyclables en vigueur depuis 1998. « Jusqu’à présent, c’est la volonté politique des exécutifs locaux qui a prévalu sur l’obligation légale. La situation contrastée des deux plus grandes villes universitaires du Grand Est que sont Strasbourg et Nancy, visitées durant cette mission, en est l’illustration : la première dispose d’une infrastructure cyclable omniprésente quand la seconde ne commence réellement à la développer que depuis 2021 », décrit-il. Le rapporteur demande donc que les villes en infraction soient plus systématiquement sanctionnées.

    Pour créer un environnement plus favorable au vélo, le rapport préconise de créer des « #zones_30 » dans chaque agglomération tant la limitation de la #vitesse en ville a prouvé son efficacité en matière de réduction des accidents, mais aussi du #bruit et de la #pollution en ville.

    Dans un communiqué, le ministère des transports a indiqué qu’il étudierait « attentivement les mesures proposées » et qu’un travail interministériel allait être lancé pour « définir les modalités de leur mise en œuvre ».

    https://www.mediapart.fr/journal/france/290425/un-rapport-identifie-les-freins-au-developpement-du-velo-en-france
    #mobilité #mobilité_douce #statistiques #chiffres #publicité #genre #classe_sociale