• Un tribunal correctionnel incompétent à juger un viol : une décision exceptionnelle | Azur Schmitt
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    Le tribunal correctionnel de Valenciennes s’est déclaré incompétent pour juger un viol, rapporte « La Voix du Nord ». Une décision exceptionnelle qui doit inciter les victimes à refuser coûte que coûte la correctionnalisation des viols, qui doivent être jugés pour ce qu’ils sont, des crimes, en cour d’assises, rappelle la juriste Azur Schmitt. Source : Le Plus

    • Grande nouvelle !!!

      Le viol est un #crime, et en tant que tel il doit obligatoirement faire l’objet d’une instruction. C’est sans compter sur le parquet qui décide de violer (sic) la loi et les principes fondamentaux de notre droit. Le parquet, souvent, très rapidement, renvoie l’accusé, lequel accusé entre ses mains sera devenu prévenu, devant le tribunal correctionnel.

      Dans l’affaire pour laquelle le tribunal correctionnel s’est déclaré incompétent, le parquet avait pris soin de noter « agression sexuelle » dans la citation à comparaître. Mais il arrive qu’il ne prenne même pas cette peine. Dans l’affaire précitée, l’avis (convocation à l’audience) à victime contenait les termes « atteinte sexuelle avec deux pénétrations par contrainte ». Le parquet est tellement certain qu’il n’y aura pas de réaction (ni de la partie civile, ni de la défense, ni du tribunal) qu’il peut se permettre de reconnaître le viol tout en demandant au tribunal correctionnel de juger une agression sexuelle.

      Renvoyer un viol devant le tribunal correctionnel est totalement illégal, c’est pourquoi le tribunal correctionnel est dans son droit lorsqu’il se déclare incompétent. De la même manière, lorsque c’est la partie civile qui soulève l’incompétence du tribunal correctionnel, celui-ci, n’a pas d’autre choix que de se déclarer incompétent, parce que le tribunal correctionnel n’est pas compétent pour juger les crimes.

      Les victimes qui déposent plainte pour viol et qui se voient renvoyées vers le tribunal correctionnel doivent ABSOLUMENT savoir qu’il leur suffira de soulever l’incompétence du tribunal correctionnel [1] pour que ce qu’elles ont subi – un viol – soit jugé comme tel. C’est-à-dire comme un crime, par une cour d’assises.

      Bien entendu, ça sera plus long. Il faudra supporter une longue procédure avant le procès. Mais c’est le prix à payer pour que cesse la négation du viol. Car la correctionnalisation a des conséquences lourdes : la non-reconnaissance de ce qui a été subi, une peine légère lorsque ce n’est pas un sursis total, un dédommagement moindre, et pire : la correctionnalisation peut aboutir à la prescription pure et simple. Enfin, pour l’ensemble des victimes et de la société, la correctionnalisation participe largement à la banalisation du viol.

      La correctionnalisation est une pratique si répandue que le viol n’est déjà quasiment plus un crime. Que les victimes soulèvent l’incompétence du tribunal correctionnel si elles souhaitent être reconnues comme victime d’un crime et que les viols ne soient pas effacés des statistiques. Ces fameux 2% de condamnations, qui bien entendu ne tiennent aucun compte des viols déguisés en délits et jugés par les tribunaux correctionnels.

  • Dans l’engrenage de la terreur. Perdre en liberté sans gagner en sécurité, par Patrick Baudoin
    http://www.monde-diplomatique.fr/2015/12/BAUDOIN/54366
    " Les attentats ne trouvent pas leur source dans une insuffisance de lois."

    Alors que la facilité avec laquelle circulent les djihadistes souligne l’insuffisance des moyens mis au service de la justice, le gouvernement répond par un déni de justice supplémentaire, avec la prolongation de l’état d’urgence.

    Dès 1986, après une vague d’attentats attribués à Action directe, un régime d’exception avait été instauré, jetant les bases de la législation antiterroriste française : infractions et règles procédurales spécifiques, durée de garde à vue allongée, pouvoirs policiers renforcés, corps de magistrats spécialisés, cour d’assises spéciale. Depuis lors, plus d’une quinzaine de textes visant chaque fois à renforcer le système d’exception se sont empilés. Le 22 juillet 1996 a ainsi été adoptée une loi qui introduisait en tant qu’infraction autonome la notion très souple d’association de malfaiteurs « en relation avec une entreprise terroriste ». Une disposition que le juge d’instruction Marc Trévidic qualifie d’« outil terriblement efficace, mais également potentiellement dangereux pour les libertés individuelles ».

    Dans le contexte de l’après-11-Septembre, une loi ciblant la menace islamiste et présentée comme temporaire, votée le 15 novembre 2001, a été pérennisée par une loi du 18 mars 2003. Elle comporte des dispositions facilitant les perquisitions domiciliaires ou les contrôles des zones aéroportuaires et portuaires, et fait obligation aux opérateurs de conserver et de communiquer leurs données en matière de communications. Ces moyens de surveillance et de contrôle ont été complétés et renforcés par la loi du 9 mars 2004, dite « Perben II », de lutte contre le terrorisme et la grande criminalité, puis par une loi du 23 janvier 2006, consécutive aux attentats de Londres en juillet 2005. Cette dernière autorise par exemple le développement intensif de la vidéosurveillance et l’accès aux fichiers administratifs, et prolonge la durée de la garde à vue de quatre à six jours en cas de « risque de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger ».

    Plus récemment, une loi du 13 novembre 2014, censée répondre aux craintes suscitées par les « loups solitaires » après l’attentat commis six mois plus tôt au Musée juif de Bruxelles, a créé le délit d’entreprise terroriste individuelle. Une nouvelle dynamique apparaît avec ce texte : des pouvoirs accrus sont accordés à l’administration et à l’exécutif, avec l’introduction d’une interdiction administrative temporaire de sortie du territoire sur décision du ministre de l’intérieur, ou d’une interdiction administrative d’entrée sur le territoire français, en cas de menace, à l’encontre de tout ressortissant étranger ne résidant pas habituellement en France.

    Les attentats des 7 et 9 janvier 2015 à Paris ont quant à eux été suivis du vote de la loi sur le renseignement, dont l’objectif affiché était de renforcer les moyens des services secrets en légalisant des procédés particulièrement intrusifs pratiqués de longue date. Ce texte, arguait le gouvernement, permettrait de mieux encadrer les activités des services. Or l’étendue de son champ d’application, dénoncée par les défenseurs des droits humains, leur laisse au contraire les mains libres pour exercer sans contrôle judiciaire une surveillance à grande échelle qui peut concerner non seulement les individus ciblés, mais aussi leur entourage.

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