• #Inégalités : comment expliquer l’#hypocrisie de la gauche ?
    https://www.inegalites.fr/Inegalites-comment-expliquer-l-hypocrisie-de-la-gauche

    Si l’hypocrisie existe en matière d’inégalités sociales, elle vient donc de la gauche, et plus précisément d’une forme de « bourgeoisie culturelle ». Diplômée [3], elle occupe les centres de pouvoir au niveau national comme au niveau local, dans l’univers politique, médiatique, associatif ou professionnel. Cette #bourgeoisie culturelle vote le plus souvent à gauche, parfois jusqu’à l’extrême. Mais tout en tenant un discours très virulent contre les inégalités, elle s’intéresse surtout à l’école de ses enfants (la reproduction des inégalités dans le temps), à ses loisirs (la maîtrise de son temps), ou à son environnement (bien manger, bien respirer, etc.). Le sort des ouvriers qui travaillent à la chaîne ou des caissières n’est pas vraiment son problème. Elle célèbre la « mixité » (sociale, ethnoculturelle, etc.) tant qu’elle s’applique aux autres catégories et n’envahit pas ses quartiers.

    • Si certains phénomènes relevés sont réels, l’analyse ne tient pas. Il me semble par exemple tout à fait abusif d’en rester à ces « 16% de diplômés », un stock qui ne dit rien de la tendance à l’ouvert, de cette dynamique de la scolarisation de masse à laquelle paraissent s’opposer les réformes de l’université et du lycée en cours.
      LE NIVEAU D’ÉTUDES DE LA POPULATION ET DES JEUNES
      https://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/7/EESR7_ES_19-le_niveau_d_etudes_de_la_population_et_des_jeunes.php

      En France, les jeunes sont plus souvent diplômés de l’enseignement supérieur que les personnes plus âgées et plus souvent aussi que les jeunes vivant dans les autres pays de l’OCDE. À la fin des années 2000, 42 % des jeunes sortants de formation initiale sont diplômés de l’enseignement supérieur.

      Tout comme ce « la gauche », ici assimilée à la bourgeoisie cultivée, n’est pas sérieux (avec son corollaire : le populaire voterait FN, sans qu’il soit question d’abstention...).

      Il y aurait plutôt besoin d’analyser à nouveaux frais la prolétarisation des diplômés et d’autres catégories, sans le faire en terme de « déclassement », sans en passer par la référence à la classe moyenne ou à on ne sait quelle élite.

      #Louis_Maurin #justice_sociale #gauche

  • « Les tensions de notre société naissent dans le refus de voir la situation de domination des catégories aisées ». Entretien avec Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités

    « 5 avril 2017 - Les diplômés ont-ils pris en otage le discours sur les inégalités au détriment des classes populaires ? Entretien avec Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités. Extrait de Slate.fr.

    Alors que l’éducation supérieure devient l’atout primordial dans une économie de la connaissance, ce poids culturel est comme nié, ou à tout le moins minoré, au profit d’autres thématiques plus consensuelles, en particulier le déclassement des classes supérieures. Sans nier ces préoccupations, Louis Maurin invite à prendre du recul avec un discours qui risque de rendre invisibles des pans bien plus larges de la société française.

    La représentation de la société française semble prisonnière de stéréotypes : un pays surprotégé ou, à l’inverse, malheureux et en déclin. Qu’en est-il réellement ?

    Le débat sur les inégalités reste complètement pollué. D’un côté, par ceux qui nous disent que tout va pour le mieux, de l’autre par ceux qui exagèrent. Prenons l’exemple de la pauvreté. On estime que notre pays compte 9 millions de pauvres, dont les revenus se situent en-dessous de 60 % du niveau de vie médian (niveau qui partage la population en deux), alors que pendant très longtemps la référence était la moitié du niveau de vie médian.

    En changeant de seuil, on passe de 4,5 à 8,8 millions de pauvres… Or, ce seuil de 60 % correspond à 2.500 euros de revenu (après impôts et prestations sociales) pour une famille avec deux enfants. On est très loin du niveau de vie de certaines familles les plus démunies qui doivent faire appel à des secours d’urgence ou à des associations caritatives. À force de tout confondre, on arrive à ces discours selon lesquels en fait, les pauvres sont riches, ils ont des téléphones portables et des écrans plats et donc tout va bien dans la société française.

    Tout en restant l’un des pays où le taux de pauvreté est parmi les plus faibles au monde avec les pays du nord de l’Europe, la France a vu le nombre de pauvres augmenter d’un million en dix ans – au seuil à 50 % du niveau de vie médian donc. Sans avoir connu une explosion des inégalités comparable à celle des pays anglo-saxons, la France a connu un phénomène d’accroissement des inégalités qui ne s’observe pas seulement « par le haut », au sommet des revenus, mais aussi « par le bas ».

    Un des lieux communs des inégalités consiste à opposer les ultra-riches au reste de la population. Or, vous écrivez que cette focalisation sur le 1 % des plus riches nous exonère de réfléchir en profondeur aux questions qui fâchent…

    En France, les « riches » sont tous ceux qui gagnent plus que nous… Tout le monde pense qu’il y a trop d’inégalités, c’est normal. Mais en se focalisant sur les « ultras-riches », on loupe toujours le coche dans les débats sur la répartition des revenus : on montre du doigt certaines catégories étroites pour éviter une redistribution bien plus globale. Certes, l’enrichissement des très riches est indécent, mais se concentrer sur ce point est une façon pour les catégories aisées de se défausser, de repasser le mistigri de la solidarité. Aujourd’hui, en France, avec 3 000 euros nets par mois pour une personne seule (après impôts et prestations sociales), vous faites partie du club des 10 % des plus favorisés. Vous êtes quoi ? « Moyen » ? Toute une partie des catégories aisées, qui peuvent se réclamer de la gauche, se déguisent en « classes moyennes », parfois « supérieures ». Si tout le monde est moyen alors tout va bien, et il n’y a plus de domination sociale !

    Les inégalités augmentent-elles ?

    On peut faire trois constats.

    En haut de l’échelle des revenus, le « festival » des années 2000 qui ont conjugué marasme économique, montée du chômage, baisses d’impôts et hausse des hauts revenus s’est un peu atténué. Les rendements financiers ne sont plus les mêmes et, entre 2011 et 2013, la fiscalité s’est accrue pour les plus riches. Ils continuent de s’enrichir, mais plus avec les mêmes perspectives.

    Les catégories moyennes, qui ne sont ni « martyrisées », ni « étranglées », contrairement à ce qu’on entend parfois, ont, en revanche, depuis 2008 un niveau de vie qui n’augmente plus. Or, en matière de revenus, comme dans bien des domaines, c’est moins le niveau lui-même qui compte que l’écart entre votre situation et ce à quoi vous aspirez. Vous n’êtes pas « étranglé », votre situation est meilleure que celle des catégories inférieures, mais le freinage est brusque : il marque une rupture.

    On est depuis dix ans une société de stagnation des revenus, et c’est un changement historique. Depuis la Seconde Guerre mondiale, une partie des catégories sociales modestes (ouvriers, employés, agriculteurs), ont été aspirées par le haut et, à force de mobilité sociale, ont accédé aux couches moyennes. Elles arrivaient jusque récemment à obtenir des niveaux de consommation toujours plus élevés, une amélioration du logement, etc. Désormais, elles font du surplace. Rien ne dit que cela durera toujours, mais il faut y prêter attention, ce phénomène de freinage est une source de tensions. Alors que les politiques publiques ont, c’est normal, comme priorité d’alléger le fardeau des plus démunis, une partie des classes moyennes ont tendance à se sentir oubliées.

    En bas de l’échelle sociale, enfin, on observe un phénomène vraiment nouveau depuis notre précédent rapport de 2015 : la baisse de niveau de vie réel des plus pauvres. Là, il ne s’agit plus de stagnation, mais bien de marche arrière. Jusqu’à présent, le modèle social a amorti en partie le choc, ce qui explique qu’on ne vive pas une situation à l’américaine avec un effondrement du niveau de vie. Mais avec le chômage, les indemnisations qui arrivent à leur terme, les jeunes qui arrivent à l’âge adulte et deviennent autonomes avec des niveaux de vie de plus en plus faibles et les familles qui en se séparant peuvent devenir deux foyers pauvres, le phénomène est inquiétant.

    Une situation où les inégalités se creusent parce que les plus riches ont des revenus fous mais aussi où les plus pauvres continuent à s’élever est très différente d’une situation où les écarts se creusent des deux côtés. Plus encore qu’au sein des classes moyennes, une partie des couches populaires sont exclues du progrès et le vivent très concrètement avec la baisse de leur niveau de vie.


    * Parmi les dimensions des inégalités sociales, lesquelles sont les plus handicapantes ?

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    #diplômés #inégalités #Louis_Maurin