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  • Le Sud global aux prises avec l’internationale « gen Z »
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/11/09/le-sud-global-aux-prises-avec-l-internationale-gen-z_6652762_3210.html?lmd_m

    Cet article est très intéressant, avec de nouvelles figures émergentes et la contradiction entre les capacités de mobilisation et les difficultés d’organisation qui sont le propre des mobilisation internet. Ce point a été largement documenté et souligné par Zeynep Tufekci dans son livre "Twitter & les gaz lacrymogènes" (C&F éditions - https://cfeditions.com/lacrymo)

    Je trouve une autre chose très fun :

    Au-delà de leur jeunesse, ils brandissent les mêmes mots d’ordre contre la corruption, le népotisme, les inégalités, le chômage, la dégradation des services publics.

    Euh si je ne m’abuse, ce sont aussi les questions et les mots d’ordre des mobilisations, en France, des questions mondiales qui sont le sous-produit du néolibéralisme (et de la défaite de la gauche face à lui).

    Du Népal au Pérou en passant par Madagascar, la révolte de la jeunesse portée par des revendications socio-économiques a désarçonné les Etats. Mais son mode de mobilisation horizontal, issu de la culture numérique, handicape aujourd’hui ses débouchés politiques.

    La jeunesse n’a pas attendu la génération Z pour descendre dans la rue. De Mai 68 aux « printemps arabes » de 2011, elle n’a pas cessé de fournir le gros des bataillons des soulèvements populaires et des révoltes.

    Alors pourquoi la récente focalisation sur cette fameuse « gen Z » – née entre la fin des années 1990 et le début des années 2010 –, dont les mobilisations en cascade secouent ou ébranlent les pouvoirs depuis 2024, avec un effet accélérateur ces derniers mois ? Du Bangladesh à Madagascar, en passant par le Maroc, le Népal, l’Indonésie, le Kenya ou le Pérou, une sorte d’internationale juvénile est entrée dans l’arène contestataire. Ce surgissement a pris de vitesse les Etats et laissé à l’écart des classes politiques souvent discréditées.

    Chaque mobilisation s’inscrit dans un contexte national singulier. Pourtant, bien des similitudes rassemblent ces indignés du Sud global. Au-delà de leur jeunesse, ils brandissent les mêmes mots d’ordre contre la corruption, le népotisme, les inégalités, le chômage, la dégradation des services publics, etc. Leurs doléances sont surtout socio-économiques, ce qui les distingue de leurs aînés dont les aspirations étaient plus expressément politiques (nationalisme, socialisme, démocratie…). Par cette orientation pragmatique, ils ont suscité une sympathie dans la population, allant très au-delà de leur tranche d’âge, les élevant à leur insu au rang de gardiens de l’intérêt général – voire de vigies morales – dans des pays ravagés par le cynisme et la trahison des élites.

    Un autre trait commun s’observe dans leur mode de mobilisation. Ces primo-manifestants sont d’ores et déjà des vétérans des réseaux sociaux. Ils sont nés et ont grandi avec la culture digitale, dont ils partagent les codes, le langage, l’esthétique – jusqu’au drapeau du manga One Piece (un crâne hilare coiffé d’un chapeau de paille), devenu l’emblème de cette « gen Z ». Cette praxis du numérique a favorisé la contagion par-delà les frontières, dans une sorte d’émulation universelle du défi à l’ordre injuste. Elle a aussi, et surtout, permis un anonymat dans les anfractuosités de plateformes comme Discord, où les mots d’ordre ont mûri au nez et à la barbe des services de renseignement.

    #Gen-Z #Mobilisation #Internationalisme

  • Voyages aux pays de grande liberté… (16)

    Si la part d’improvisation est plus ou moins importante dans les concerts et les enregistrements de jazz, certains musicien-ne-s n’hésitent pas à nous offrir de longues d’improvisations collectives. Certaines rencontres se font, hors schéma, hors structure, ou du moins nommée comme telle. Cela ne signifie pas qu’une ou des nervures ne soient pas sous-jacentes à ces improvisations. C’est éventuellement à l’auditrice et à l’auditeur de les rechercher. Voyages donc aux pays de grande liberté… Au hasard de ré-écoutes récentes.

    chronique de 9 cd

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/11/09/voyages-aux-pays-de-grande-liberte-16/#more-98868

    #musique #jazz

  • Vers des #collectivités libres

    Les collectivités et administrations diverses sont-elles définitivement soumises aux desiderata de #Microsoft ? Une dynamique s’enclenche pour basculer vers le libre, avec à la clé une #souveraineté retrouvée, de substantielles économies et un #impact_écologique largement amoindri.

    Pour des collectivités ou des administrations, la facturation des mises à jour de sécurité de Windows peut avoir des conséquences économiques lourdes. Microsoft, en effet, n’y va pas avec le dos de la souris : la firme entend les faire payer 53 euros par poste la première année, tout en prévenant que le prix doublerait à chaque année supplémentaire. Étudions un cas au hasard : prenons une petite ville… disons en Isère… au pif, #Echirolles. Cette municipalité de 38 000 habitants, située au sud de Grenoble, s’appuie sur un parc d’environ 1 500 ordinateurs. Mettre à jour toutes ses machines lui coûterait environ 80 000 euros la première année – sans compter les bouzins trop anciens pour supporter #Windows_11 et qu’il faudrait donc renouveler. Les prix doublant année après année, elle aura déboursé plus d’un demi-million d’euros au bout de trois ans, uniquement pour ces mises à jour. Juste parce que des petits génies du service commercial de Microsoft ont eu l’idée de faire payer ce qui était gratuit jusque-là.

    Panique sur l’Hôtel de ville échirollois ? Au contraire, calme olympien ! « Nous ne paierons aucune mise à jour », nous certifie, voix paisible, presque amusée, le directeur de la stratégie et de la culture numériques de la commune, Nicolas Vivant. Avouons-le maintenant, nous n’avons pas du tout choisi Échirolles par hasard : c’est l’une des communes françaises les plus en pointe dans le passage à #Linux et au #logiciel_libre. Une transition démarrée en 2021 avec l’adoption, à l’unanimité du conseil municipal, du schéma directeur « Échirolles numérique libre », établissant une ligne directrice jusqu’aux prochaines municipales de 2026.

    Logiciels libres et services publics

    Comme son nom l’indique, ce document acte notamment la volonté de s’orienter vers du logiciel libre. Moins, d’ailleurs, par souci économique que pour être en cohérence avec les #valeurs défendues par le conseil municipal de cette mairie historiquement communiste. « C’est sûr que si on veut être cohérents, il vaut mieux éviter de donner notre argent à une multinationale américaine », s’amuse Nicolas Vivant. Le document adopté observe : « Travail collaboratif au service de toutes et tous, transparence, une recherche de profit qui, quand elle existe, n’est que secondaire et orientée vers la réussite d’un projet commun… Les valeurs liées aux logiciels libres sont proches de celles du service public ». En outre, ces logiciels « sont et seront l’une des garanties de notre souveraineté numérique et d’une utilisation raisonnée des ressources informatiques ». Quatre ans plus tard, la manœuvre de Microsoft rend malgré elle hommage à la clairvoyance de ces élu·es… La volonté politique étant clairement établie, il restait à la traduire en actes. Basculer du jour au lendemain sur du libre, un particulier peut le faire, pas une collectivité. « On a commencé par travailler sur tout ce qui était invisible par les utilisateurs, par exemple tout ce qui est serveurs de fichiers, précise Nicolas Vivant. Que ces serveurs tournent avec Windows ou Linux, tout le monde s’en fout, pourvu que les fichiers soient accessibles et permettent de travailler en équipe. » La messagerie, l’intranet, la visioconférence… Toute l’infrastructure fonctionne désormais grâce à des logiciels libres.

    « J’ai une visibilité »

    Les choses deviennent un peu plus sensibles lorsqu’il s’agit de toucher aux ordinateurs des agents. Il y a souvent des peurs qu’il faut lever, un certain confort à utiliser des logiciels qu’on connaît déjà. Ce n’est pas pour rien que Microsoft biberonne la planète avec ses logiciels, allant jusqu’à les offrir à l’Éducation nationale ou à des organismes de formation. « On est sur une démarche de migration qui est lente, progressive, pragmatique », indique Nicolas Vivant, l’idée générale étant de basculer d’abord tous les logiciels sur du libre, afin qu’au final, le passage de Windows à Linux soit totalement indolore. Le changement du système d’exploitation est donc la dernière étape du processus. 6 % des postes ont déjà franchi la ligne, avec l’objectif de multiplier ce chiffre par trois dans les deux prochaines années.

    Le chemin vers la liberté est long, mais porte rapidement ses fruits : sur un budget informatique d’un million d’euros, l’utilisation massive de logiciels libres permet déjà à Échirolles d’économiser environ 350 000 euros par an ! « Et j’ai une visibilité sur le budget des années à venir, car je ne suis pas à la merci des décisions de Microsoft », ajoute Nicolas Vivant.
Pour Bertrand Maes, adjoint en charge du numérique à la mairie de Lyon, elle aussi engagée dans une migration vers le libre, ces économies ne doivent pas constituer une fin en soi. « Le temps de faire la bascule, on a décidé de ne pas lésiner sur l’accompagnement des agents. Car si le changement se fait mal, que les agents se sentent mal accompagnés, ça peut vite générer de la grogne et inciter les politiques suivants à revenir en arrière. »
    La roue de la croissance infinie…

    Dans cette municipalité dirigée par un maire EELV, « deux des grands axes que nous nous sommes fixés en matière de numérique sont la sobriété et la souveraineté. La façon de cocher ces deux cases, c’est d’aller vers du logiciel libre », exprime Bertrand Maes. Car le libre, et in fine Linux, permet aussi d’allonger considérablement la durée de vie des ordinateurs. Windows réclame en effet de plus en plus d’espace et de puissance, et finit par saturer la machine. Linux est nettement plus sobre. « Derrière Microsoft, il y a aussi les fournisseurs de processeurs, de cartes graphiques, les Intel, Invidia, etc, qui ont besoin d’énormes capacités d’investissements, donc de vendre beaucoup de puces et de processeurs. Ils poussent à faire des logiciels plus gourmands », et c’est la roue de la croissance infinie et de la catastrophe environnementale qui continue de tourner, observe Bertrand Maes.

    Cette roue qui mènera immanquablement à Windows 12, lequel sera certainement encore plus gourmand que son prédécesseur. L’arrivée de l’intelligence artificielle pourrait marquer un nouveau bond des capacités requises et donc rendre encore plus d’ordinateurs obsolètes… Selon l’élu lyonnais, on se trouve donc « à un moment où les choix des collectivités vont être particulièrement engageants. Par exemple au moment de renouveler du matériel : est-ce qu’il faut dès maintenant prévoir des ordinateurs très puissants qui pourront peut-être supporter Windows 12, ou rompre avec cette logique du toujours plus ? »

    https://lagedefaire-lejournal.fr/vers-des-collectivites-libres
    #collectivités_territoriales

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    ajouté à la Métaliste sur les institutions et municipalités qui claquent les portes à #Microsoft :
    https://seenthis.net/messages/1143366

  • L’#écologie de la carte bleue

    "Et si le consommateur, en réalité, n’y était pour rien, ou pour pas grand chose dans la terrible situation que nous vivons ? Et si le consommateur n’était pas lui-même « produit », ou inventé ? Et s’il fallait parler de « surproduction » plutôt que de « surconsommation », et rayer pour toujours ce mot de notre vocabulaire politique ?"

    Quand la jeunesse s’engage en écologie, quelques singes savants croient bon de faire remarquer que les jeunes feraient bien de commencer par « moins consommer », « s’acheter moins de vêtements » ou « jeter leur smartphone » avant de prétendre donner des leçons aux gouvernants.

    Cette même sagesse demi-habile s’oppose à toute élucubration anti-capitaliste en écologie en rétorquant systématiquement : « c’est bien beau de critiquer le #capitalisme, jeune fille, mais nous sommes tous responsables dans cette société consumériste ! si on n’avait pas trois télés et quatre ordinateurs par foyer, on pourrait critiquer le système ! »

    On retrouve jusq’au cœur des mouvements écologistes cette #auto-flagellation militante sur le thème de la « consommation », de la « surconsommation », voire de « l’#hyperconsommation ». Agir sur la consommation apparaît à nombre d’individus et d’organisations comme une solution simple et à portée de main, et donc comme un objectif politique intéressant : on fait donc des die-in dans les centres commerciaux, on bloque les McDo, on appelle au boycott ou à une consommation « bio et équitable ».

    Tentons une idée provocante : et si le consommateur, en réalité, n’y était pour rien, ou pour pas grand chose dans la terrible situation que nous vivons ? Et si le consommateur n’était pas lui-même « produit », ou inventé ? Et s’il fallait parler de « surproduction » plutôt que de « surconsommation », et rayer pour toujours ce mot de notre vocabulaire politique ? Et s’il fallait cesser d’agir en consommateur pour agir vraiment ? Donnons une chance à ces hypothèses, avec ce texte.

    Parmi les idées reçues les plus tenaces en écologie, il y a l’idée que la « surconsommation »1 serait le principal moteur de la destruction de l’environnement. L’humanité, prise comme « somme d’individus humains » sans tenir compte de ses hiérarchies ni de ses conflits internes, se serait rendue coupable, au fil des siècles, de « consommer » beaucoup trop de ressources naturelles. Un jour spécifique marque même le moment de l’année à partir duquel « l’humanité » commence à « surconsommer » : le jour du dépassement, qu’on atteint désormais dès juillet. Et combien de fois n’a-t-on pas entendu que les feux en Amazonie étaient directement causés par les steaks dans « nos assiettes » ?

    Nous soutenons, en revanche, que la théorie de la surconsommation vise à réduire la pratique écologiste à des choix de supermarché, à des petits ajustements dans un quotidien qui ne change pas vraiment, à une sorte d’écologie de la carte bleue. Alors que l’écologie pourrait aussi bien être une révolte contre les rapports sociaux et économiques à l’origine de la destruction du vivant. Le discours sur la « surconsommation » produit des sujets qui ne se conçoivent que comme des consommateurs coupables2. Il maintient l’écologiste dans le carcan de la société marchande, alors qu’il devrait s’en extirper, construisant avec d’autres les solidarités nécessaires pour faire naître un monde sans Amazon ou Intermarché. L’idée de surconsommation nous met des ornières et des chaînes qu’il nous faut arracher.

    En réalité, le consommateur en tant que figure historique apparue lors des deux derniers siècles n’y est pour rien (ou presque) dans la crise écologique que nous traversons. Le consommateur en tant que tel et les comportements qui lui sont associés n’ont d’ailleurs pas toujours existé, ni toujours été conçus comme tels : on voit apparaître les grands magasins et les réclames au XIXe siècle, et la consommation jadis réservée aux bourgeois se répandit finalement aux classes populaires lors de la première moitié du XXe siècle. La « naissance » du consommateur a servi à deux choses : écouler le surplus de marchandises produites par le capitalisme, et réintégrer les gens dans les rapports marchands sur leur temps de loisir, fraîchement arraché par des luttes sociales, pour couper court à tout ennui improductif ou désir de révolte. D’une certaine manière, la « consommation » a étendu le travail sur le temps de loisir, de sorte que nous continuons à travailler au bon fonctionnement de l’économie une fois sorti du bureau ou de l’usine.

    Dans l’imaginaire culturel de pas mal d’Occidentaux, le consommateur est assimilé à une sorte de zombie impuissant, incapable de se distinguer de la masse et se précipitant sur la marchandise lors des périodes de soldes. Cette image répond parfois au besoin des plus riches de stigmatiser la consommation des classes populaires, tout en se revendiquant d’une consommation plus intelligente et éclairée. Cependant, nous pourrions reprendre la figure du zombie à notre compte afin de caractériser l’impuissance et la passivité de ceux et celles dont le seul horizon politique se réduit à « consommer mieux » ou « moins ».

    Si l’on veut que l’écologie tape là où ça fait mal, elle devra cesser de tracer une ligne de séparation artificielle entre la « surconsommation » et la surproduction là où elles ne sont que trop intimement liées : la surconsommation est avant tout un effet de la surproduction. Mais ce n’est pas suffisant. Car la surproduction est aussi un effet, ou plutôt un problème chronique du capitalisme, qui a besoin de transformer de plus en plus de choses et de personnes en marchandises pour créer de la valeur. Il n’y a rien d’autre, derrière la « surconsommation » que la compulsion de croissance qui est inhérente au capitalisme. Si on peut toujours réduire sa consommation individuelle, le capitalisme aura toujours besoin que la consommation totale augmente, pour que la croissance continue.

    Le consommateur n’est donc pas une personne autant qu’il est une figure, un instrument de logiques qui dépassent son individualité. Cette distinction entre l’individu et la figure telle qu’elle est construite socialement va se révéler fondamentale pour la suite. Car si on peut absoudre en grande partie le consommateur de sa responsabilité dans la « crise écologique », il n’en faut pas moins l’assassiner ! Assassiner en nous le consommateur, cela veut dire donner une chance à l’humain se cachant sous l’identité désuète de producteur ou de consommateur, qui l’écrase tel un rocher ; faire exploser le carcan de la consommation, pour redécouvrir la multiplicité des activités et des actions nécessaires à une reprise en main de la question écologique.
    Existe-t-il un « choix de consommation » ?

    Prenons au mot l’idée de « surconsommation » : très bien, vous prétendez que nous, les petits individus, nous serions coupables de trop consommer. Essayons de déterminer à grands traits qui est responsable de quoi. Quelle est la position du consommateur dans l’économie ? Est-ce une position démocratique, depuis laquelle le consommateur peut décider, influer sur le cours du monde, arrêter la destruction des forêts et l’exploitation des pauvres ?

    A) Le « consommateur » arrive en bout de chaîne, une fois que tout a été choisi pour lui.

    Que s’est-il passé pour que le steak dans lequel croque le « consommateur » provoque des incendies en Amazonie ? Que s’est-il passé pour que l’ordinateur sur lequel je tape enrichisse des milices et exploite des mineurs au Nord-Kivu (Congo) ? Les critiques de la surconsommation ne s’intéressent pas beaucoup au contenu de cette mystérieuse chaîne de causes à effets. La vérité est très simple, tout le monde la connaît : le consommateur ne maîtrise rien du processus de production qui a mené au produit qu’il consomme.

    C’est la définition même du capitalisme, qui ne possède aucun caractère démocratique : une classe d’individus, les capitalistes, possèdent les moyens de production, ils décident donc de ce qui va être produit, et de comment cela va être produit (par exemple, une entreprise – Ikea – va couper illégalement du bois en Roumanie, puis l’importer en France sous forme de meubles). Les autres, les citoyens-consommateurs, sont privés des moyens de production, et sont donc réduits à travailler au service des capitalistes (en coupant du bois illégalement), et à consommer les produits que ces derniers leur proposent (chez Ikea)3.

    « Qu’à cela ne tienne ! » disent certains, « mais les capitalistes ne font que répondre à une demande, il suffit donc de ne plus consommer les produits qui détruisent la planète, et tout ira bien ! » C’est la tactique du boycott. Cette tactique fait l’impasse sur trois points très importants :

    1) L’asymétrie d’information est énorme entre le « consommateur » et les entreprises. Le consommateur, qui consomme hors de son temps de travail, n’a pas forcément les moyens, ni le temps, ni l’envie de devenir un Sherlock Holmes enquêtant sur sa propre consommation4. Même s’il souhaitait mener l’enquête, il aurait bien du mal à surpasser les grandes entreprises, qui elles s’appliquent bien à cacher les effets néfastes de leur activité. Ainsi, ExxonMobil, un géant pétrolier américain, était au courant du réchauffement climatique depuis les années 80, mais a investi massivement afin d’entretenir les doutes sur ce sujet, mentant même à ses investisseurs. De même, on nous présente régulièrement le parfait produit, la parfaite solution, équitable, bio, durable, avant de nous avouer quelques mois ou années plus tard que c’est en fait une catastrophe.

    2) Nous ne « choisissons » pas vraiment de consommer la plupart des choses que nous consommons. Nous naissons tous dans un monde déjà organisé autour des autoroutes, des aéroports, des ports, des centrales thermiques et nucléaires, et où l’économie marche au pétrole. Qui a choisi de construire tout ça ? « Nos parents » ? Ou les « décideurs », les capitalistes, les États ? Ces choix décisifs sur notre « mode de vie » ont été faits par une minorité (blanche et très riche), puis imposés à tout le reste du monde par la violence (colonisation). Qui peut aujourd’hui communiquer sans téléphone, qui peut prétendre à un emploi en périphérie sans avoir une voiture ? C’est le fonctionnement même de l’économie qui rend ces choses nécessaires, pas le fait que les « consommateurs » les consomment.

    3) Or, ce qui est premier dans l’économie, c’est l’offre, non la demande (la production, non la consommation). Car ceux qui ont le pouvoir, ceux qui prennent les décisions importantes, ceux qui produisent artificiellement des besoins par la privation et des normes par la publicité, ceux qui extorquent, qui pillent, qui dépossèdent, qui exploitent, ce ne sont pas « les consommateurs ». Certains organisent l’économie à leur profit, d’autres, les « consommateurs » n’ont le « choix » que de s’y adapter comme ils peuvent. C’est le mode de production dans lequel nous vivons qui est un scandale, et sa hiérarchie fondamentalement anti-démocratique. Le boycott n’a donc de sens que s’il s’étend à tout ce mode de production, et que s’il cherche à inventer d’autres manières de produire.

    B) La consommation des « consommateurs » est la plus petite partie de la consommation

    Enfin, rappelons rapidement qui sont les véritables « consommateurs ». Ceux qui consomment le plus, on l’oublie trop souvent, sont les grands producteurs, les grandes entreprises (les mêmes qui nous poussent à la consommation !). Car pour produire des marchandises, il faut bien consommer. Pour produire, par exemple, un meuble Ikea avec du bois roumain illégalement coupé, il me faut consommer des machines et des salariés pour couper le bois, d’autres pour le transporter, d’autres encore pour le transformer et l’assembler en meuble, et enfin, il me faut consommerdes directeurs marketing, des tonnes de papier, et des spots publicitaires pour que ce meuble se vende (trouve un petit « consommateur »).

    Dans une même logique, quel impact puis-je avoir en prenant des douches courtes, quand 90 % de l’eau est utilisée par l’industrie et l’agriculture ? A quoi sert-il que je me mette au « zéro déchet » quand les déchets des ménages représentent 10 % seulement de la masse totale des déchets produits ?5 Cela ne sert pas à rien, du point de vue d’une démarche personnelle — mais il ne faut pas se mentir sur l’impact de ces « petits gestes ». L’idée n’est pas d’opposer vulgairement « gestes individuels » et « actions collectives », qui pourraient aller de pair dans une optique de révolte contre un monde aliénant dans lequel on cherche d’autres manières d’exister, tout en travaillant à le renverser. Il s’agit uniquement de démanteler les discours nous appelant à faire chacun-e de notre mieux, tout en faisant totalement l’impasse sur les luttes collectives.

    Un rapport du think tank Carbon46 montre qu’avec tous les efforts du monde, des individus « héroïques » restreignant drastiquement leur consommation, mangeant végétarien et local, ne se déplaçant qu’à vélo ou en covoiturage, achetant tout d’occasion, ne réduiraient que 25% de leur empreinte carbone. Notons que ce genre de préoccupations héroïques intéressent surtout ceux qui ont le luxe d’avoir une grosse empreinte carbone, et le loisir de réfléchir à la réduire ; notons ensuite qu’il y a bien d’autres problèmes écologiques que le climat et l’empreinte carbone (pollution des océans, épuisement des sols, extinction des espèces, etc.) ; ajoutons enfin que ce chiffre de 25% est une parfaite (et fausse) abstraction : cette « étude considère l’empreinte carbone d’un ‘Français moyen’. Elle est égale à l’empreinte carbone du pays divisée par le nombre d’habitants [on fait donc abstraction de tous les rapports économiques de hiérarchie évoqués plus haut]. Ce Français moyen n’existe évidemment pas : il n’est qu’une vue de l’esprit qui permet de manipuler des données commodes [et qui a le malheureux effet de rapporter à des individus ce qui pourrait être rapporté à des entreprises, à des décideurs, à des choix historiques] ».

    La marge de « choix » du consommateur est donc extrêmement réduite. Consacrerait-il toute sa vie de consommateur à moins consommer qu’il ne changerait pas grand-chose à l’affaire. Là où le consommateur se prive d’une dizaine de trajets en avion dans sa vie, un zadiste, en bloquant la construction d’un aéroport, empêche des milliers de trajets en avion d’avoir lieu. Mais un zadiste, précisément, n’agit pas en consommateur. Pourquoi veut-on que nous agissions en consommateurs ? Y avait-il des consommateurs au Moyen-Âge, y en a-t-il sur les îles Andaman, où vit le peuple des Sentinelles7 ? Non. C’est donc qu’ils ont été inventés et produits à un moment de l’histoire. Qui a eu cette mauvaise idée ?
    Qui a inventé les surconsommateurs ? Les surproducteurs

    « La société de consommation, c’est aussi la société d’apprentissage de la consommation, de dressage social à la consommation–c’est-à-dire un mode nouveau et spécifique de socialisation en rapport avec l’émergence de nouvelles forces productives. »

    La Société de Consommation, Jean Baudrillard.

    L’invention de la figure et des comportements du consommateur correspond à une période bien précise de l’histoire économique. Sans avoir l’ambition d’en faire une analyse très détaillée, pointons-en rapidement les grandes lignes. Il y a d’abord une cause économique à l’invention du consommateur, c’est la nécessité d’écouler un surplus de marchandises. Ce besoin d’écouler la surproduction, de trouver des débouchés est une contrainte inhérente au mode de production capitaliste : pour créer de la valeur, il faut produire des marchandises, et il faut que ces marchandises soient achetées. Puisque le mode de production capitaliste carbure à la croissance (on investit pour récupérer une plus-value), il produit toujours plus de marchandises, peu importe la demande. Si la demande ne suit pas, il faut donc la créer artificiellement : c’est là qu’interviennent la publicité, les hausses de salaire, la baisse du temps de travail, les politiques fordistes et keynésiennes — et donc, la figure du consommateur : pour écouler le surplus de marchandises.

    Il y a aussi une cause politique : au début du XXe siècle, les luttes sociales et le spectre du communisme ont forcé les États et les capitalistes à faire des « concessions » (baisse du temps de travail, systèmes de protection sociale). L’invention du consommateur a donc répondu à un besoin politique : que les individus libérés sur leur temps de loisir ne passent pas ce temps à être heureux et improductifs, à faire des émeutes ou la révolution — non, bien mieux, qu’ils le passent à continuer à travailler pour les capitalistes : à consommer. Il n’y a là aucun « désir naturel de consommer » : placés sous tutelle de l’État qui revendique le monopole de la solidarité avec ses programmes de protection sociale (en cours de démantèlement), privés de nos amitiés par l’atomisation du travail, de l’urbanisation et des logements, qui structurellement empêchent toute vie commune, nous sommes forcés à la solitude, dont la seule échappatoire misérable consiste en la consommation effrénée des fragments de la vie des autres, que ce soit des séries Netflix ou des photos sur Instagram.

    Dans L’événement anthropocène, les chercheurs Jean-Baptiste Fressoz et Christophe Bonneuil montrent que la société de consommation et l’American way of life ont entièrement été produits par des dispositifs matériels et institutionnels au tournant des XIXe et XXe. Pour écouler le surplus de marchandises des usines tayloriennes, on commence à mettre des « marques » sur les produits, on encourage la vente par correspondance, on crée des supermarchés et des self-services ; la publicité, succédant à la réclame, fait l’apologie de la consommation comme mode de vie et marqueur de normalité sociale (elle suggère au consommateur qu’il souffre de défauts à corriger : il a besoin de cette pommade anti-ride).

    En même temps, la consommation de masse sert tout à fait explicitement à discipliner les travailleurs dans les usines : pour contrer l’absentéisme, Henry Ford crée la « journée à 5 dollars », et les grandes entreprises comme Ford, General Motors et General Electric mettent en place le « crédit à la consommation » (« acheter maintenant et payer plus tard ») pour inciter leurs travailleurs à acquérir leurs biens de consommation. La réparation, le recyclage, la sobriété sont présentés comme néfastes pour l’économie nationale, tandis que la consommation ostentatoire, la mode, l’obsolescence deviennent des pratiques respectables. Les syndicats finissent par trahir leurs idéaux révolutionnaires, et se contentent de revendiquer l’indexation des salaires sur les prix pour augmenter la consommation.

    Dira-t-on que les gens « surconsomment » beaucoup trop de trajets en voiture ? Le livre Road and Rail montre comment la centralité de la voiture dans l’urbanisme contemporain a été imposée partout au début du XXe (par des grandes compagnies et les Etats) malgré de fortes résistances de la population, alors que le tramway était le mode de transport (en commun) majoritaire. Dira-t-on que les gens « surconsomment » du chauffage, de l’électricité, des machines domestiques, depuis leurs petites maisons périurbaines ? Tout cela est le fruit de politiques publiques et du lobbying d’entreprises qui ont poussé activement les gens à devenir des « petits propriétaires » de lotissements de banlieue alimentés au tout-électrique (voir The Bulldozer in the Countryside, d’Adam Rome). Dira-t-on que « l’humanité » et « les consommateurs » ont été bien mal avisés le jour où ils se sont assemblés démocratiquement pour « choisir » le pétrole comme carburant du capitalisme ? Le livre d’Andreas Malm, Fossil Capital et celui de Timothy Mitchell, Carbon Democracy, démontrent que le choix des énergies fossiles, et en particulier celui du pétrole, a été le fait des classes capitalistes occidentales qui l’ont imposé à toute la planète, par la violence et au mépris de toute démocratie. Carbon Democracy revient par ailleurs sur la notion de « développement », qui plutôt que de représenter une volonté de progrès communément admise comme positive, cachait une volonté clairement colonialiste d’insérer les territoires et peuples victimes des impérialismes dans la division du travail global, tenue ensemble par une machinerie fonctionnant à base d’énergies fossiles8.
    Sauver la vie, tuer le zombie

    Tout a donc été fait pour qu’il soit extrêmement pénible au consommateur de résoudre le problème écologique. La figure et les comportements du consommateurs ont même été produits, pourrait-on dire, pour être impuissants, pour répondre sagement aux besoins de l’économie. Arrivés à ce point, nous jugeons donc le consommateur : non coupable de la catastrophe écologique qu’est notre monde.

    Le consommateur n’est pas coupable, certes, mais il faut tout de même le condamner à mort. Tous les bons films de zombies sont des films sur la société de consommation (voir l’excellent Zombie de Georges Romero). Le consommateur est cette créature étrange, à peine vivante, qui peuple les rues, les supermarchés, les parcs de loisir, les yeux dans le vide ou rivés sur son téléphone, faussement satisfaite, irrémédiablement solitaire et impuissante. Qui peut devenir agressive si on la contrarie dans son malheur. Retrouver un pouvoir d’action en écologie suppose une dézombification collective : il faut tuer en chacun de nous le consommateur.

    Voici donc quelques pistes et méthodes qui seront très utiles à cet effet. D’une part, le consommateur est produit de l’extérieur. Rien de plus efficace que de massacrer les consommateurs à la source, là où ils sont produits. On pourrait donc croire qu’il faut s’attaquer à la publicité, et à vrai dire les actions anti-pub sont toujours très réjouissantes, mais le cœur du problème n’est pas là. Dans une économie capitaliste, nous sommes des consommateurs avant tout parce que nous ne possédons pas et ne maîtrisons pas les moyens de production. Nous ne savons plus produire nos propres vêtements, notre propre nourriture, notre propre maison, comme tout le monde savait le faire il y a quelques siècles. On cessera donc d’autant plus d’être des consommateurs qu’on aura exproprié ceux qui s’accaparent les moyens de production, et qu’on se sera réapproprié collectivement les savoir-faire et les techniques nécessaires à une vie commune libre (jardiner, cultiver, coudre, construire, réparer, etc.).

    D’autre part, le consommateur nous tient de l’intérieur, quand nous sommes incapables de concevoir l’action écologique autrement que comme un acte de consommation (consommer moins, consommer mieux, et cela inclut le vote dans une démocratie libérale, qui n’est qu’un acte de consommation politique). Le consommateur est une figure inoffensive, il ne peut agir qu’en négatif en arrêtant de consommer tel produit. Il ne peut que s’indigner d’avoir été dupé quand on lui a fait manger du steak de cheval. Tuer le consommateur qui sommeille en nous ne signifie pas « arrêter de consommer » mais arrêter d’agir en consommateur, donc reconsidérer l’éventail des possibles dans les modes d’action. On ne fait jamais mieux pour son empreinte carbone ou pour l’écologie en général que lorsqu’on bloque des grands projets inutiles, et il y en a des tonnes sur le territoire français9.

    On ne redira jamais assez la richesse de ce que fut la ZAD de Notre-Dame-des-Landes du point de vue de l’action : recours juridiques, blocages économiques, mobilisations de masse, émeutes en centre ville, journées de conférences et d’accueil sur la zad, sabotage de nuit, construction de cabanes et de monuments artistiques, agriculture, musique, « non-marché » à prix libre, freeshop, convergence des luttes, tout cela a activement contribué à bloquer le projet d’aéroport, et à produire d’autres modes de vie. On ne trouve là rien qui relève de la « consommation », et ce fut la plus grande victoire de l’écologie française depuis bien longtemps.

    Il nous faut aussi poser sérieusement la question du renversement des institutions en place. On voit mal ce que pourraient faire une somme de consommateurs solitaires ou d’électeurs-tous-les-cinq-ans contre une chose aussi énorme que le système économique qui détruit la planète. Les gilets jaunes, les marches et les occupations sont un bon début — pour l’instant en échec, il est vrai : travaillons à offrir une suite grandiose !

    –—

    Notes

    1.↑Voir cet excellent article : https://theconversation.com/face-a-lurgence-climatique-mefions-nous-de-la-sur-responsabilisatio

    2.↑Sur la « production des consommateurs », il peut être utile de lire Marx :https://www.marxists.org/francais/marx/works/1857/08/km18570829.htm ; Debord, La Société du spectacle ; ou Louis Pinto, L’invention du consommateur.

    3.↑A propos de ces histoires de bois, voir : https://www.greenpeace.fr/bois-illegal-en-amazonie-la-france-impliquee ; https://www.greenpeace.fr/special-cash-investigation-les-forets-menacees-par-une-razzia-sur-le-bois

    4.↑NB. Sur ce point, nous ne revenons pas sur le postulat selon lequel il existerait des manières de consommer (et donc de produire) plus ou moins néfastes, certaines bienveillantes, voire bénéfiques et éthiques, et d’autres non,—au contraire, la notion même de consommation « éthique » n’est qu’un mythe capitaliste, le monde marchand y étant forcément régi par les logiques de l’exploitation du vivant. Par exemple, il n’existe pas encore de véritable produits « vegan », puisqu’à plusieurs endroits de leurs chaînes de production, ces produits reposent encore sur l’utilisation de fumier ou d’autres produits d’origine animale.

    5.↑Les lieux communs sur les différences de consommation entre individus et entreprises sont tirés d’un recueil de lieux communs : Cyril Dion, Petit manuel de résistance contemporaine.

    6.↑Le rapport de Carbon4 : http://www.carbone4.com/wp-content/uploads/2019/06/Publication-Carbone-4-Faire-sa-part-pouvoir-responsabilite-climat.pdf

    7.↑https://fr.wikipedia.org/wiki/Sentinelles_(peuple)

    8.↑Pour aller plus loin, voir deux sources d’inspiration de cet article : le chapitre « Phagocène » dans l’indispensable L’événement anthropocène de Christophe Bonneuil et Jean-Baptiste Fressoz, et la vidéo de Fressoz : « Transition, piège à cons », https://www.youtube.com/watch?v=lO0r5O4-2wU

    9.↑Pour Paris, à propos de grands projets, voir : https://lundi.am/Contre-les-grands-projets-depuis-Paris-Desobeissance-ecolo-Paris

    https://blogs.mediapart.fr/desobeissance-ecolo-paris/blog/151019/l-ecologie-de-la-carte-bleue-1
    #culpabilité #culpabilisation #surconsommation #surproduction #production #consommation #système #consumérisme #société_marchande #marchandisation #croissance #boycott
    signalé aussi par @monolecte
    https://seenthis.net/messages/1019622

  • #Migrations : les États membres discutent d’un renforcement de #Frontex et des #renvois vers des #pays_tiers

    Selon une note interne du Conseil de l’UE, les Vingt-Sept s’apprêtent à débattre d’un #renforcement du #mandat de Frontex pour travailler avec les pays tiers, y compris la possibilité d’organiser des #transferts de migrants entre des États non membres de l’UE — ce que les règles actuelles ne permettent pas.

    En mars, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait annoncé une réforme du mandat de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) pour 2026, s’engageant à renforcer le rôle de l’agence dans la gestion des retours de migrants.

    La question sera à l’ordre du jour des ministres de l’UE lors du prochain Conseil « Affaires intérieures ».

    La note interne du Conseil de l’UE, consultée par Euractiv, révèle que les États membres soutiennent largement le renforcement de la coopération avec les pays tiers, y compris l’exploration des options juridiques permettant à Frontex d’organiser « les retours de pays tiers vers d’autres pays tiers », par exemple en renvoyant les migrants d’un pays de transit vers leur pays d’origine ou vers un autre pays où ils pourraient demander la protection.

    Certains gouvernements ont également proposé de confier à Frontex un rôle de soutien dans les « #centres_de_retour », des installations situées dans des pays tiers où les migrants pourraient être transférés vers d’autres pays dans le cadre de la nouvelle proposition de l’UE en matière de retours.

    La note souligne également que cette plus grande flexibilité, notamment la possibilité de négocier des accords ciblés avec des pays tiers, pourrait faire de Frontex « un partenaire plus attractif » le long des principales routes migratoires vers l’Europe.

    La taille et le rôle du corps permanent de Frontex seront également évoqués au Conseil. Si Ursula von der Leyen s’est engagée à tripler ses effectifs pour atteindre 30’ 000 agents d’ici 2027, plusieurs capitales se montrent prudentes. Tout en soutenant une expansion, elles insistent pour que le « #mandat et les #tâches futurs » de Frontex soient clarifiés avant tout renforcement des #effectifs.

    Si les gouvernements de l’UE s’accordent sur le fait que la responsabilité principale de la gestion des frontières et des décisions de retours doit rester aux États membres, la note relève « l’intérêt » d’étudier le rôle de soutien que pourrait assumer Frontex dans le cadre d’une « #gestion_intégrée » des #frontières.

    Par ailleurs, plusieurs capitales estiment que la règlementation actuelle ne permet pas à Frontex de répondre aux exigences du nouveau #Pacte_européen_sur_la_migration_et_l’asile, qui entrera en vigueur l’été prochain, ni de contrer les « #menaces_hybrides » aux frontières de l’UE.

    La présidence danoise du Conseil de l’UE a demandé aux capitales de transmettre leurs commentaires à ce sujet.

    Ces discussions se déroulent alors que Frontex est au centre de controverses. L’agence a été accusée à plusieurs reprises de fermer les yeux sur des violations des droits aux frontières extérieures de l’Union, ce qui avait conduit en 2022 à la démission de son directeur exécutif, Fabrice Leggeri — aujourd’hui député européen. En parallèle, des enquêtes restent en cours sur son rôle présumé dans des refoulements illégaux de migrants.

    https://euractiv.fr/news/migrations-les-etats-membres-discutent-dun-renforcement-de-frontex-et-des-r
    #réfugiés #expulsions #pays-tiers #return_hubs

  • #Mani_libere

    Sei un imprenditore vittima di estorsione o usura?
    Vuoi uscirne ma non sai come fare?
    Ricordati che non sei solo.

    Le Associazioni Antiracket della Calabria sono al tuo fianco quotidianamente per accompagnarti nel difficile percorso di denuncia. La nostra rete offre 3 sportelli territoriali (Lamezia Terme, Cosenza, Polistena e uno sportello itinerante in tutta la Calabria) in cui forniamo gratuitamente consulenza legale, psicologica e finanziaria.

    Possiamo aiutarti
    – se ti trovi in difficoltà economiche e sei vittima di estorsione o usura;
    – se non hai ancora maturato la decisione di denunciare;
    – se hai già denunciato e devi rientrare sul mercato.

    https://manilibere.org
    #mafia #quitter #soutien #aide #extorsion #plainte #Calabre #Italie #résistance #témoignage

  • International social media campaign launched to stop the boats

    Today marks the launch of the latest phase of the government’s global campaign to warn migrants of the consequences of entering the UK illegally.

    Every year, thousands of people are sold lies by organised criminal gangs who put profit before human life, smuggling people to the UK across one of the busiest shipping lanes in the world, the English Channel.

    The Home Secretary has launched a new campaign that will be rolled out in Vietnam, following successful social media activity in Albania last year which contributed to a 90% reduction in Albanian small boat arrivals.

    Using real testimonies from those who regret coming to the UK illegally, the adverts highlight the risks and consequences people face if they turn to criminal gangs and attempt the dangerous journey.

    A migrant, referred to as K, shares his reality of sleeping in a camp in Calais for 5 nights under the supervision of armed guards, before taking the long journey across the Channel to the UK. He says: “Never again would I risk my life in a small boat, even if you bribed me.”

    An increasing proportion of small boat migrants are Vietnamese, and they are 1 of the top 10 nationalities for migrants crossing the Channel illegally.

    The latest phase of the campaign, which will begin today (Monday 25 March), will harness social media adverts on Facebook and YouTube to directly target people who may be considering making dangerous and illegal journeys to the UK.

    The social media posts emphasise the consequences of travelling to the UK illegally and the dangers people can expect to face, as well as set out the risks of being indebted to and exploited by the people smuggling gangs who profit from facilitating small boat crossings.

    Home Secretary James Cleverly said:

    This is a powerful campaign which demonstrates first-hand that life for people arriving here illegally is a far cry from the lies they have been sold by the gangs on the other side of the Channel.

    Last year, similar work contributed to a 90% reduction in small boat arrivals from Albania, and overall numbers are down by a third, but there is more to do.

    Expanding our campaign to Vietnam, another key partner in our work to tackle illegal migration, will help us to save more lives and dent the business model of the criminals who profit from this vile trade.

    The campaign warns prospective migrants of the reality of living in the UK illegally with no right to be in the UK and no access to public services or funding.

    It includes testimonies from Home Office Immigration Enforcement and Border Force officers, who all too often encounter illegal migrants who have been sold into modern slavery or illegal working by their smugglers.

    Illegal migrants can be forced to live in inhumane, cramped and hazardous conditions by criminal gangs, with no access to basic hygiene, healthcare or legal employment.

    The campaign’s social media adverts direct users to a new website with additional video content from Immigration Enforcement and Border Force officers who describe some of the shocking cases they’ve encountered and their experiences of rescuing small boat migrants from life-threatening danger in the Channel.

    This stage of the campaign follows successful social media activity by the UK government in Albania, France and Belgium, and is the latest step in the UK’s efforts to work jointly with countries across the world to tackle the global migration crisis.

    Similar campaigns are also being considered for other priority countries.

    UK and Vietnamese authorities already work closely to prevent illegal journeys to the UK and remove those with no right to be here.

    Senior officials from the UK and Vietnam are due to meet in London on 17 April to discuss working in even closer partnership on migration issues.

    https://www.gov.uk/government/news/international-social-media-campaign-launched-to-stop-the-boats
    #réseaux_sociaux #propagande #UK #Angleterre #stop_the_boats #Manche #La_Manche #vidéo

    –-

    ajouté à la métaliste de #campagnes de #dissuasion à l’#émigration:
    https://seenthis.net/messages/763551

    • Facts on UK immigration. Trying to enter the UK illegally could cost you everything.

      People smugglers will tell you that travelling illegally to the UK will be safe and easy and that you’ll be able to build a good life here. Nothing could be further from the truth.

      Travelling to the UK illegally will cost you a lot of money. It could even cost you your life. Men, women and children have died trying to get to the UK in small boats or hidden in lorries.

      Go to the facts:
      UK immigration rules mean you could be detained and removed if you come to the UK illegally. Here’s what you need to know.

      https://www.youtube.com/watch?v=rC85bBq8MXo

      https://immigrationfacts.campaign.gov.uk

  • Le #Royaume-Uni et le #Vietnam concluent un nouvel #accord pour lutter contre l’immigration clandestine

    Pour lutter contre les traversées illégales de la #Manche par les migrants vietnamiens, un accord a été conclu entre Londres et Hanoï, ont annoncé les autorités britanniques mercredi. Son objectif est de lutter contre l’immigration clandestine en accélérant les procédures d’expulsion. « Le nombre d’arrivées illégales en provenance du Vietnam a déjà été réduit de moitié, mais il est possible de faire davantage », a déclaré le Premier ministre britannique dans un communiqué.

    Un nouvel accord migratoire a été signé entre le Royaume-Uni et le Vietnam mercredi 29 octobre, a indiqué le gouvernement britannique. Il permettra, selon le Home Office, « d’accélérer la procédure de retour des personnes n’ayant pas le droit de séjourner au Royaume-Uni ». Il s’agit du second traité conclu entre les deux pays. Un précédent accord avait déjà été signé en 2024.

    Grâce au partage de #données_biométriques et à des procédures administratives simplifiées, cet accord permettra de réduire « de 75 % le temps de traitement des documents des migrants en simplifiant les procédures administratives » et ainsi « de renvoyer plus rapidement et plus facilement ceux qui n’ont pas le droit de se trouver ici », a-t-il ajouté dans un communiqué.

    La signature de cet accord fait suite à une forte augmentation des arrivées en provenance de ce pays d’Asie du Sud-Est l’année dernière. Les Vietnamiens représentaient la plus importante nationalité à traverser la manche par #petites_embarcations durant le premier trimestre 2024, et la quatrième plus importante sur l’ensemble de l’année.

    Baisse des arrivées de Vietnamiens

    Selon le Premier ministre britannique Keir Starmer, cet accord, qui est « le plus ambitieux jamais conclu par le gouvernement vietnamien avec un autre pays », pourrait entraîner le retour de quatre fois plus de ressortissants vietnamiens n’ayant « aucun motif légitime de rester en Grande-Bretagne ».

    « Cet accord historique envoie un message clair : si vous entrez illégalement au Royaume-Uni, vous serez rapidement renvoyés », a encore déclaré Keir Starmer. Et d’ajouter : « Le nombre d’arrivées illégales en provenance du Vietnam a déjà été réduit de moitié, mais il est possible de faire davantage ».

    Selon les chiffres officiels britanniques, 1 026 Vietnamiens sont arrivés par « #small_boats » entre janvier et juin 2025, soit la moitié par rapport à la même période l’année précédente.

    « Ce pays est resté trop longtemps incapable d’expulser ceux qui n’avaient aucun droit de se trouver ici », a félicité la ministre de l’Intérieur, Shabana Mahmood, suite à la signature de cet accord.

    Campagnes de communication

    Un précédent accord avait déjà été signé en 2024 entre les deux pays. Il comprenait une série de mesures comme l’accroissement du partage de renseignements, la diffusion de messages de dissuasion et la facilitation des processus de retours des migrants illégaux du Royaume-Uni vers leur pays d’origine.

    Une #campagne sur les #réseaux_sociaux avait notamment été lancée au Vietnam via des vidéos reprenant des témoignages de migrants partageant les conséquences et les dangers de l’immigration vers le Royaume-Uni.

    « #One_in_one_out »

    Depuis le début du phénomène des « small boats » en 2018, les gouvernements britanniques successifs multiplient les accords avec différents pays pour lutter contre l’immigration irrégulière. Le Royaume-Uni a notamment conclu de nouveaux traités avec des pays comme l’#Irak ou les Balkans occidentaux.

    Le dernier en date est l’accord « one in one out », passé avec la #France. Cet accord - en vigueur depuis le mois d’août 2025 - prévoit le renvoi en France de migrants arrivés au Royaume-Uni à bord de « small boats », en échange de l’accueil par Londres de migrants se trouvant en France, sur le principe du « un pour un ».

    Malgré cela, les traversées de la Manche continuent d’être importantes. Depuis le début de l’année, 36 954 exilés sont arrivés en bateau au Royaume-Uni, selon les données du #Home_Office. Un chiffre qui dépasse désormais celui enregistré en 2024 qui s’élevait à 36 816 arrivées.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/67860/le-royaumeuni-et-le-vietnam-concluent-un-nouvel-accord-pour-lutter-con

    #UK #Angleterre #migrations #réfugiés #renvois #expulsions

  • #Macédoine_du_Nord : ce petit pays des #Balkans où les migrants vulnérables font une courte pause dans leur exil vers l’Europe (1/3)

    La Macédoine du Nord est un territoire de transit pour les exilés arrivés en Grèce souhaitant rejoindre l’Europe de l’Ouest. L’#asile y existe, mais il est rarement accordé dans ce petit pays hors de l’Union européenne. Dès lors, ce sont les profils les plus vulnérables - personnes blessées, familles, adolescents isolés - qui demandent l’asile. Le plus souvent, juste pour avoir quelques semaines de #répit avant de reprendre la route.

    Il se tient droit entre deux rangées de containers, vêtu d’un t-shirt blanc imprimé d’images de satellites et de cosmonautes, dans la grisaille d’octobre. Lal Mohammad, 25 ans, vient de faire enregistrer ses empreintes biométriques et celles de sa femme dans le centre de transit de Vinojug, tout au sud de la Macédoine du Nord, à la frontière avec la Grèce. Leur petite fille de 3 ans, Asra, boit un verre de jus de pomme assise sur un banc, amusée par la présence d’un chat errant à côté d’elle. La famille s’est déclarée demandeuse d’asile il y a un mois de cela, dès son entrée sur le territoire macédonien.

    Après une tentative de passage infructueuse par l’Evros, frontière terrestre entre la Turquie et la Grèce, cette famille afghane a atteint le sol hellénique après 4 jours et 4 nuits en mer. Tous trois ont passé plusieurs jours dans le camp fermé de #Thessalonique avant d’être transférés vers un second camp proche de la frontière macédonienne. "Là, on nous a dit que [pour avoir un rendez-vous pour demander l’asile], il nous faudra attendre un an et demi… Nous ne voulions pas attendre tout ce temps. Alors nous nous sommes rendus dans la forêt [marquant la frontière entre la Grèce et la Macédoine du Nord, ndlr] pour tenter le "game"" - surnom donné par les exilés aux tentatives de passages de frontières.

    Interceptée par la police macédonienne, la famille a été placée dans le centre de transit de Vinojug, l’unique centre à l’entrée du pays. Là, leur premier interlocuteur a été #Frontex, déployée depuis l’été 2023 dans le pays, surtout à la frontière avec la Grèce. Comme pour tous les exilés interceptés dans cette zone, deux choix se sont offerts à eux : soit opérer un "retour volontaire" côté grec, soit se déclarer demandeur d’asile.

    "J’ai demandé de l’aide à #ChatGPT : qu’est-ce que je dois faire ?"

    Pour Lal Mohammad, pas d’hésitation : avec sa femme et sa fille de 3 ans, pas question de faire demi-tour pour retenter une nouvelle fois le "game" dans la #forêt. Mais le passeur - qui a tout intérêt à ce que les exilés ne fassent aucune pause dans leur parcours, pour toucher plus vite la somme d’argent débloquable à chaque étape (4 000 euros pour aller de la Turquie à la Grèce, 800 euros pour aller de Macédoine en Serbie, selon le père de famille) - exerçait pourtant sur lui une forte pression.

    "Il nous harcelait, nous appelait tous les jours, en nous disant : "Revenez en Grèce". Moi je lui répondais : "Je ne vais pas fuir ne t’inquiète pas, l’argent est là, moi j’ai un enfant et une femme, je ne peux pas revenir comme ça” ; puis j’ai éteint mon portable pendant quelques jours". Le père de famille confie sa détresse : "J’ai même demandé de l’aide à ChatGPT : ’Qu’est ce que je dois faire, le passeur m’appelle tous les jours et je ne sais pas quoi faire ?’ ChatGPT m’a dit d’en parler aux responsables du centre".

    Demander l’asile ici à Vinojug signifie rester un mois dans ce centre de transit aux allures fantomatiques. On y circule entre les containers grisâtres hébergeant des bureaux d’associations, dont plusieurs ont quitté les lieux depuis des années. Les affiches sur leurs portes sont décomposées par le temps. Érigé en 2015 lors du pic d’arrivées, ce centre de transit est désormais marqué par ses infrastructures délaissées : immenses tentes d’ONG, jeux pour enfants, hangars...

    Au fond du campement s’alignent des containers abritant des chambres de 6 lits superposés. Vides pour la plupart. Ce jour-là, seule une dizaine de personnes est présente sur le campement. 320 exilés y ont défilé, au total, dans les trois premières semaines d’octobre. Dans les sanitaires au sol humide, une fuite d’eau fait entendre un bruit de gouttes en continu.

    Seulement 149 demandes d’asile enregistrées en 2025

    Au bout du mois écoulé ici, les empreintes biométriques sont relevées, comme pour Lal Mohammad et sa famille en ce jour d’octobre. Une camionnette de la police embarque dès le lendemain le groupe de demandeurs d’asile déclarés pour les transférer à #Skopje, la capitale. Là, tous seront hébergés dans l’unique centre pour demandeurs d’asile du pays, situé à #Vizbegovo, dans la banlieue.

    "J’espère que nous poursuivrons bientôt notre voyage", confie Lal Mohammad. Car le père de famille ne compte pas réellement rester en Macédoine du Nord. Il veut simplement un moment de répit pour sa famille sur une route de l’exil éprouvante.

    La Macédoine du Nord est en effet avant tout un pays de #transit, sur la route des Balkans. Un petit territoire d’à peine deux millions d’habitants mais stratégique : cerné par la Grèce, la Bulgarie, la Serbie, le Kosovo et l’Albanie, il ne se trouve pas dans l’UE ni dans Schengen et constitue la voie principale depuis la Grèce pour rejoindre la Serbie, puis de là, l’Europe de l’Ouest.

    En 2024, 4 055 personnes originaires de 35 pays ont été enregistrées au centre de Vinojug. Or, on ne comptait que 307 demandeurs d’asile cette année-là, selon les chiffres de la Macedonian Young Lawyers Association, spécialisée dans l’accompagnement des demandeurs d’asile. Dont 131 enregistrées à Vinojug.

    En 2025, le chiffre promet même d’être en deçà : depuis le début de l’année, 149 demandes ont été enregistrées. En majorité des Syriens (46 personnes), suivis des Népalais, Irakiens, Turcs, Afghans et Egyptiens. Certains vont au bout de la procédure mais combien, comme Lal Mohammad, comptent en réalité récupérer un peu - du repos, un téléphone, de l’argent ou de la santé - , avec un toit sur la tête, avant de poursuivre leur route vers la Serbie ou le Kosovo ?

    "Personne ne veut rester en Macédoine du Nord"

    Deux jours plus tard on retrouve Asra, la petite de 3 ans, assise sur un chemin caillouteux à quelques dizaines de mètres du centre pour demandeurs d’asile de Vizbegovo. Vêtue d’un t-shirt "I love my mum", elle fronce les sourcils sous ses bouclettes de cheveux châtains, concentrée à agripper des pierres une par une. Et à les jeter tour à tour, aussi loin que possible.

    "Ne jette pas sur la route, Asra !" Debout à ses côtés, Mohamad Azim, un adolescent de 16 ans, veille sur la petite. Le jeune Afghan la couve du regard puis s’agenouille auprès d’elle en ouvrant ses bras. Les traits froncés d’Asra s’évanouissent alors en un grand sourire. Contre le sweat vert à capuche de l’adolescent, elle se blottit avec force.

    Mohamad Azim a fait la rencontre d’Asra, de son père Lal Mohammad et de sa mère au centre de Vinojug. Comme eux, le jeune Afghan s’est déclaré demandeur d’asile. Mais comme eux aussi, "mon but, ce n’est pas de rester ici. Personne ne veut rester en Macédoine du Nord. Si c’était possible, je partirai tout de suite en Serbie". L’adolescent a demandé l’asile pour avoir un temps de répit. Car il reste marqué par la zone frontalière éprouvante, les nuits en forêt, le froid, la pluie. "Nous n’avions pas de quoi manger ni de quoi boire. On se nourrissait des quelques raisins que l’on trouvait".

    Lui aussi a subi les pressions du passeur pour avoir fait ce choix de la pause. "Il m’appelait sans cesse pour me dire : ’Qu’est ce que vous foutez là, revenez en Grèce, je ferai en sorte que vous traversiez de nouveau cette frontière pour aller en Serbie’". Tout en gérant cette pression, le jeune homme a pris le temps de réfléchir et de revoir ses plans : il n’envisage plus à l’Italie, mais la Suisse pour finir son parcours d’exil et y demander une protection.
    L’arrêt obligatoire des blessés

    D’autres personnes s’arrêtent simplement à Vizbegovo parce que leur corps ne leur permet plus d’avancer. Ainsi Mohamed, 25 ans, originaire du Maroc, est coincé là depuis un mois à cause d’un problème à la jambe. "J’ai quitté la Turquie en juin. J’étais seul et j’ai découpé la bâche arrière d’un camion avec un couteau pour y entrer en espérant rejoindre la Grèce. Une fois arrivé en Grèce, j’ai sauté pour descendre pendant que le camion roulait, ce qui m’a valu une fracture à la jambe droite."

    Aidé par un groupe de jeunes, il a poursuivi son chemin pour passer la frontière macédonienne avec cette jambe cassée. Intercepté et amené au centre de transit de Vinojug, il y rencontre la Croix-Rouge... Qui le transporte immédiatement à l’hôpital de Skopje. "J’ai subi une opération, on m’a posé un plâtre et depuis ma jambe s’est un peu améliorée. Je marche avec une béquille. Mais je veux continuer mon chemin. J’attends juste que ma jambe guérisse."

    Le centre pour demandeurs d’asile de Vizbegovo, de 90 places, a été rénové ces dernières années grâce à un financement de 700 000 euros de la banque de développement du Conseil de l’Europe, contracté avec l’#OIM. Si le centre paraît en bon état à l’extérieur - InfoMigrants n’a pas été autorisé à le visiter - et que les autorités assurent qu’un médecin y assure des visites régulières, les conditions à l’intérieur n’y sont pas toujours satisfaisantes, selon les exilés rencontrés.

    "La nourriture est insuffisante ici, avec un seul repas par jour, servi à midi - pour nous maintenir en vie", soupire Mohamed. Un fait corroboré par un autre jeune Afghan de 17 ans, Kayum Arubi, qui déclare : "Le centre n’est pas très propre et la nourriture, servie une fois par jour, est mauvaise".

    Pour celles et ceux qui vont au bout de la procédure d’asile, le résultat est décevant presque systématiquement. "Malheureusement, la plupart des décisions sont négatives. Le demandeur d’asile a 30 jours pour soumettre un recours auprès de la cour administrative", explique Mitko Kiprovski, avocat et chargé de plaidoyer de l’ONG Jesuit Refugee Service (JRS), qui accompagne les demandeurs d’asile dans ces démarches. Si ce premier recours n’aboutit pas, il est toujours possible de s’en référer à la Haute cour administrative de Skopje. Mais si le refus est définitif, la personne a 20 jours pour quitter le territoire.
    Mariam*, l’une des deux seules réfugiées de Macédoine du Nord : "ici, je n’ai besoin de personne"

    Ainsi, les protections internationales délivrées ces dernières années se comptent littéralement sur les doigts d’une main. En 2024, suite à une mission en Macédoine du Nord, les rapporteurs du Comité contre la Torture, organisation des Nations unies, s’inquiétaient de ne recenser que 3 personnes sous protection subsidiaire vivant dans le pays en 2023, tandis que zéro statut de réfugié n’avait été délivré entre 2016 et 2023. Le pays n’étant pas dans l’UE - bien que sa demande soit en cours -, les critères de l’asile y sont moins stricts et scrutés qu’ailleurs.

    Deux ans plus tard en 2025, on ne compte en Macédoine du Nord que 5 personnes réfugiées - à savoir deux femmes, l’une Congolaise et l’une Syrienne et leurs enfants respectifs -, ainsi que deux 2 personnes sous protection subsidiaire (un Afghan, un Marocain) vivant dans le pays. La troisième personne qui avait réussi à obtenir une protection subsidiaire, un mineur isolé syrien, a quitté le pays. Idem pour un Afghan qui avait obtenu le statut de réfugié.

    Mariam*, 30 ans, est l’une de ces exceptions vivant à Skopje. Après avoir accouché en Grèce, cette Syrienne a traversé la frontière avec la Macédoine du Nord en 2018 alors qu’elle allaitait encore sa fille. Un peu comme Mohamed des années après elle, c’est la dangerosité du passage de frontière qui a stoppé son parcours. Entre la Grèce et la Macédoine, "la police a braqué ses projecteurs sur notre groupe. Tout le monde s’est enfui autour de moi. J’ai commencé à courir moi aussi en portant ma fille, mais je suis tombée dans un trou et je me suis cassé la jambe". En arrivant au centre de transit de #Vinojug, c’est l’association JRS qui la prend sous son aile et la transfère à l’hôpital de Skopje pour la soigner.

    Toutes les années qui ont suivi, JRS l’aide dans ses démarches d’asile et de logement, jusqu’à ce que Mariam obtienne le statut de réfugiée. L’ONG assure encore aujourd’hui un suivi de sa situation. La Croix-Rouge a pu, de son côté, lui trouver du travail chez eux, puis dans un restaurant, et lui prodiguer des cours de macédonien - un vrai défi pour Mariam, qui est analphabète. Aujourd’hui, sa fille a 9 ans. Elle est scolarisée et apprend le macédonien, avec moins de difficultés grâce à son jeune âge. Quant à la jambe de Mariam, après toutes ces années, "j’ai encore des broches... Je dois les faire retirer bientôt", glisse la Syrienne.

    Même si Mariam rencontre encore des difficultés pour apprendre la langue et pour subvenir aux besoins de sa fille avec son maigre salaire, elle l’assure : "Ici, c’est mieux qu’en Grèce. Là-bas, j’avais toujours peur. Je ne me sentais jamais à l’aise. Ici, j’ai des amis macédoniens que je vais voir et qui viennent me voir, je travaille et je n’ai besoin de personne."

    https://www.infomigrants.net/fr/post/67779/macedoine-du-nord--ce-petit-pays-des-balkans-ou-les-migrants-vulnerabl
    #route_des_Balkans #migrations #réfugiés #IOM

    • En Macédoine du Nord, la zone grise entre « #retours_volontaires » et expulsions déguisées vers la #Grèce (2/3)

      Dans la zone frontalière de la Macédoine du Nord, voisine de la Grèce, les migrants interceptés en arrivant dans ce pays des Balkans se voient offrir l’option du "retour volontaire" par la police macédonienne. Les témoignages recueillis sur place indiquent que la pratique - légale et encadrée sur le papier - navigue dans une zone grise où elle se transforme parfois en expulsions déguisées.

      Un chat roux bondit sur le capot de la voiture de la police aux frontières macédoniennes garée au beau milieu de l’allée centrale. Le félin bâille, s’étire de tout son long, s’assied pour contempler ce qui l’entoure. À l’intérieur du véhicule, un agent surveille d’un air blasé les agissements d’un groupe de jeunes tout juste arrivés ici, dans le centre de transit de Vinojug. Quelques mètres plus loin, un collègue observe lui aussi distraitement le groupe, l’œil davantage attiré par l’écran de son téléphone portable.

      Agglutinés dans l’ouverture de la porte du conteneur qui abrite leurs lits superposés, ces quatre jeunes tout juste arrivés de Grèce posent mille questions à la fois à qui veut bien les entendre. "Où se trouve Skopje [la capitale macédonienne] ?", "Si nous décidons d’aller là-bas, que va-t-il se passer ? Y a-t-il un camp ouvert là-bas ? Combien de temps ça prend pour nous y transférer ?" "Et si la police décide de nous renvoyer vers la Grèce, où est-ce qu’ils nous amèneront ?", s’enquièrent-ils.

      Arrivés hier soir dans ce centre fermé situé dans la petite ville frontalière de Gevgelija au sud de la Macédoine du Nord, ces jeunes sont plein d’incertitudes. Aux exilés venus de Grèce, interceptés et placés dans le centre de Gevgelija par la police aux frontières, deux choix se présentent. Soit demander l’asile pour rester en Macédoine du Nord et être transférés au centre pour demandeurs d’asile de la capitale, Skopje. Soit opérer un "retour volontaire" vers la Grèce.

      "Si nous retournons en Grèce et que la police nous arrête, nous serons emprisonnés pendant deux ans... Et puis dans la zone frontalière il y a des mafias qui pourraient nous kidnapper, nous avons peur", craint un des jeunes du groupe, Raheem, 19 ans, originaire du Caire en Egypte. Retourner en arrière pour s’en remettre une nouvelle fois aux passeurs et tenter un passage sans encombre ne lui semble pas le meilleur calcul.

      "Nous voulons juste être tranquilles et en sécurité... Si notre tranquillité passe par le retour en Grèce, qu’il en soit ainsi. Si notre tranquillité passe par un déplacement dans la capitale à Skopje, qu’il en soit ainsi", hésite-t-il.

      Le lendemain, nous apprenons que Raheem et les autres du groupe ont tous été ramenés en Grèce par la police. Y a-t-il vraiment eu un choix éclairé et informé ? Tous ces jeunes sans exception étaient-ils vraiment "volontaires" ? Mais surtout : qu’est-ce qu’un "retour volontaire" ?
      Les retours volontaires se font "à l’oral, sans documents à signer"

      En théorie, comme le définit l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), il s’agit du "retour assisté ou autonome vers le pays d’origine, de transit ou un pays tiers, sur la base du libre arbitre du retourné". Mais en pratique, en Macédoine du Nord, il s’agit d’une zone grise. Qui se décide uniquement à l’oral, s’installe dans un contexte de manque d’informations, et s’apparente parfois à un refoulement à chaud (ou "pushback") illégal.

      Contacté par Infomigrants, le ministère de l’Intérieur macédonien fournit sa définition de la procédure : "si ils ne sont pas demandeurs d’asile, si ils ne souhaitent pas postuler au programme AVRR (retour volontaire assisté et réintégration) de l’OIM, et si ils ne souhaitent pas rester au centre de transit de Gevgelija pour bénéficier d’une aide, ils sont libres de partir et nous savons qu’ils retournent en Grèce".

      Dans les premières années qui ont suivi le pic migratoire de 2015 et la création du centre de transit de Vinojug à Gevgelija, "la police ne laissait pas le choix et refoulait des groupes", observe Jasmin Redjepi, responsable de l’ONG Legis. En 2022 encore, le réseau Border Violence Monitoring publiait des cas documentés de pushbacks avec vidéos et localisations à l’appui. Qu’en est-il en 2025 ? "Aujourd’hui, la pratique a changé, il s’agit maintenant du choix des personnes", assure Jasmin Redjepi. Mais tout se fait à l’oral : "Il n’y a pas de document écrit à signer ou quoi que ce soit. La Grèce ne les empêche pas d’entrer en Macédoine, la Macédoine renvoie en Grèce : c’est une sorte de situation informelle entre les deux pays. C’est la même chose au nord, entre la Serbie et la Macédoine".

      Selon le responsable associatif, le déploiement en avril 2023 dans la zone frontalière sud de Frontex, l’agence européenne de protection des frontières, a fait évoluer positivement la pratique. "Désormais, quand quelqu’un veut rester ici et demander l’asile, son premier entretien se déroule avec Frontex qui indique ensuite à la police macédonienne : "Laissez-le au centre". Avant, il n’y avait que la police macédonienne, c’était bien plus arbitraire".

      L’analyse est partagée par les avocates de la Macedonian Young Lawyers Association (MYLA), qui rappellent que "ces centres de transit demeurent dans une situation juridique peu définie : ils sont placés sous un régime de "gestion de crise" qui dure depuis 2015, donc les gens à l’intérieur ont eux aussi un statut légal peu défini" - donc peu protecteur. "Ce sont des no man’s land, sous aucune juridiction", confirme Mitko Kiprovski, avocat et chargé de plaidoyer de l’ONG Jesuit Refugee Service. "Donc personne ne peut y émettre des documents, signer ou mettre un tampon".
      Sur un simple message du passeur, "les jeunes s’enfuient d’ici la nuit"

      Le "retour volontaire" est l’option très majoritairement retenue pour les exilés débarqués dans ce centre fermé de Vinojug, à la frontière. Mais pourquoi les exilés préféreraient-ils un retour vers la Grèce plutôt qu’un transfert vers la capitale et son centre ouvert pour demandeurs d’asile, à partir duquel il est aisé de partir vers la proche Serbie ?

      D’abord, à cause de la pression mise par les passeurs. Ceux-ci ont tout intérêt à ce que les exilés ne fassent aucune pause sur leur parcours, pour toucher plus vite la somme d’argent débloquable à chaque étape réussie. Or, être transféré de Vinojug vers la capitale Skopje prend du temps : souvent 30 jours d’attente. Mieux vaut donc, pour le business, que les migrants reviennent quelques centaines de mètres en arrière, tentent à nouveau le coup, passent sans encombres et atteignent plus vite la frontière serbe. "Il y a même des passeurs qui ont des stratégies : ils envoient un premier groupe en sachant qu’il va se faire intercepter, pour faire diversion et faire passer un second groupe derrière", évoque Jasmin Redjepi, de l’ONG Legis.

      C’est aussi l’analyse du ministère de l’Intérieur, qui détaille à Infomigrants : "ceux qui sont interceptés par la police macédonienne reçoivent immédiatement l’ordre des passeurs de retourner en Grèce, pour se rendre à nouveau au lieu de rassemblement, l’hôtel Hara, situé à environ 1,5 km, où un nouveau groupe est formé et où ils tentent à nouveau d’être passés clandestinement. Le paiement de l’activité de passeur ne sera effectué par la personne que lorsqu’elle sera arrivée du point A au point B, ce qui signifie qu’elle dispose d’un nombre illimité de tentatives pour être introduite clandestinement sur le territoire de notre pays. C’est pourquoi les personnes retournent volontairement en Grèce."

      De fait : de nombreux exilés acceptent la reconduite. Certains "s’enfuient" même de Vinojug avant que la police n’organise le trajet retour en fourgonnette. Car dans ce centre de transit fermé, les allées et venues sont contrôlées. "Par contre la nuit, ce n’est pas contrôlé. Souvent les jeunes s’enfuient de Vinojug la nuit. En passant au-dessus des grillages", glisse Jasmina, une autre membre de l’ONG Legis opérant au sein du centre de transit. Cette femme énergique aux cheveux rouges et au sourire doux semble connaître tous les secrets du centre, après plusieurs années d’expérience ici. Elle détaille : "Ils partent dès qu’ils reçoivent un message du passeur. Celui-ci leur indique de se rendre à telle ou telle localisation, juste de l’autre côté".

      e l’autre côté des grillages en effet, c’est la "green line" : la zone frontalière, couverte de quelques champs et d’herbes hautes. À l’horizon, la forêt et le paysage montagneux. La Grèce et son premier village, Idoméni, est toute proche. Une équipe d’InfoMigrants y avait d’ailleurs recueilli début octobre le témoignage d’une policière grecque, qui le reconnaissait : "Parfois ce sont les mêmes personnes qui retraversent, celles qui ont déjà été refoulées par la Macédoine du Nord".

      "Ces jeunes, on les retrouve ensuite 4, 5 fois de suite ici, dans le centre de transit", abonde Jasmina. Lorsqu’on lui demande son avis sur ce fonctionnement cyclique, la salariée se contente de hausser les épaules en un grand soupir.
      "Je ne voulais pas aller en Grèce les trois premières fois ! Ce sont les policiers qui me ramenaient"

      Reste que certains exilés résistent aux pressions des passeurs et ne sont en aucun cas "volontaires" pour retourner en arrière. C’est le cas de Mohammad Azim, 16 ans, qui a évité les appels "incessants" du trafiquant qu’il a payé - "Il me disait : ’Qu’est ce que vous foutez là, revenez en Grèce, je ferai en sorte que vous traversiez de nouveau cette frontière pour aller en Serbie”. Mais Mohammad Azim est fatigué de ces agissements. "Les passeurs ne font rien, on ne les voit jamais... On les paie mais je ne sais même plus pourquoi on les paie : c’est nous qui prenons tous les risques."

      Ce jeune homme assure donc avoir déclaré aux autorités, dès sa première interception, vouloir rester en Macédoine du Nord. Pour autant, la police aux frontières ne l’a laissé vraiment s’installer à Vinojug qu’au bout de la... quatrième tentative. À chaque fois, "les policiers macédoniens m’arrêtaient au passage de la frontière, ils m’envoyaient au centre de Gevgelija... Puis ils m’embarquaient avec un autre groupe de migrants qui était là dans ce centre pour nous ramener en Grèce", assure-t-il. Une expulsion, donc.

      Interrogé sur ces pratiques, le Crisis Management Centre (l’organe public régional qui régit le centre de Vinojug) nous renvoie vers le ministère de l’Intérieur, "parce qu’ils sont responsables de la procédure des retours volontaires". Du côté de Frontex, on nous invite également à nous adresser à l’Intérieur et on nous indique que "Frontex n’a pas reçu d’informations concernant le retour de demandeurs d’asile en Grèce." Sollicité par Infomigrants, l’Intérieur abonde : "nous n’avons reçu aucun signalement de ce type, ni de la part des autorités locales, ni de Frontex, ni des ONG".

      L’adolescent de 16 ans montre une camionnette blanche qui passe juste à cet instant sur la route derrière lui. "C’était dans ce genre de véhicules. Ça sert aux policiers pour mettre quasiment 10 personnes dedans. Ça s’est répété trois fois".

      Pourquoi n’a-t-il pas été refoulé, cette quatrième fois ? Difficile de le dire. Certains exilés croient savoir que cela dépend du nombre de places dans le centre de transit, ou des capacités de transfert vers Skopje. D’autres évoquent des décisions purement arbitraires. Quoi qu’il en soit : "On peut qualifier cette situation de pushback, surtout si cela se déroule loin de nos regards et que nous n’en sommes pas avertis", reconnaît et s’inquiète Jasmin Redjepi.
      Refoulé 8 fois d’affilée

      Bien que la présence de Frontex ait fait évoluer positivement les choses, il semble donc que cette pratique du refoulement vers la Grèce se poursuive. Moins systématiquement, plus discrètement. Mais tout aussi illégalement : un refoulement à chaud est contraire au droit car il empêche tout examen de la situation individuelle de la personne.

      Mohammad Azim a 16 ans. Or cette situation de minorité n’a jamais été prise en compte. Dans son rapport sur l’année 2024, les avocates de MYLA regrettaient déjà qu’il n’existe en Macédoine "rien pour les mineurs isolés, pas de procédure formelle de protection ni d’évaluation de l’âge" et que de manière générale "les migrants n’ont pas accès à un recours efficace contre l’expulsion informelle”.

      Rafiullah, un Afghan de 21 ans rencontré au centre pour demandeurs d’asile en banlieue de Skopje, raconte lui aussi avoir été refoulé... Huit fois d’affilée. Il doute même du nombre exact : "C’est seulement la 8ème ou la 9ème fois que l’on m’a enfin dit : "OK, tu peux rester ici".

      Or, Rafiullah affirme qu’il l’avait déclaré aux autorités dès la première interception : "Je voulais rester en Macédoine du Nord. Car je savais que si je demandais l’asile ici, à Gevgelija, après un mois on m’aurait transféré à Skopje. Et qu’une fois à Skopje, je pouvais aller facilement en Serbie".

      Maintenant qu’il a pu rester sur le territoire et rejoindre la capitale, le jeune homme n’a qu’une hâte : rejoindre l’Europe de l’Ouest, lui qui a un cousin travaillant dans une entreprise en France. Souriant, les yeux pétillants, il s’enquiert : "Est-ce que les Français sont plus bienveillants ? Ici, les gens dans les Balkans sont racistes : on me regarde toujours bizarrement comme ça" - il fronce les sourcils, la mine fermée, puis éclate de rire - "J’ai du mal à comprendre pourquoi".

      https://www.infomigrants.net/fr/post/67838/en-macedoine-du-nord-la-zone-grise-entre-retours-volontaires-et-expuls
      #renvois #expulsions #refoulements #push-backs

    • Interrogés, détenus comme témoins : en Macédoine du Nord, les conséquences sur les exilés de la lutte contre les passeurs (3/3)

      La lutte contre les passeurs est un enjeu stratégique en Macédoine du Nord, tant pour ce pays de transit sur la route des Balkans que pour l’Union européenne. Mais elle n’est pas sans revers : les personnes migrantes et les ONG témoignent notamment d’interrogatoires et de détentions arbitraires, sans cadre légal.

      Des dizaines et des dizaines de voitures s’entassent à l’entrée du centre de transit de Vinojug, au sud de la Macédoine du Nord. Un camion de marchandises dévoile, sous sa bâche, des montagnes de cageots. Un chien errant passe. Tous ces véhicules ont été saisis ces derniers mois par la police aux frontières macédonienne, lors des interceptions de groupes d’exilés tentant de franchir la frontière depuis la Grèce. Non loin de là, les reliefs du territoire grec dessinent l’horizon.

      "99%" des exilés qui passent dans cette zone frontalière le font grâce à un réseau de passeur, affirme le ministère de l’Intérieur macédonien, sollicité par InfoMigrants. L’Intérieur se dit tout à fait informé des lieux-clés : "lorsqu’ils arrivent en Grèce, ils reçoivent des instructions et sont envoyés vers un lieu de rassemblement situé près de la frontière, sur le territoire grec, près d’Evzoni, appelé Hôtel Hara, à environ 1,5 kilomètre" de Gevgelija, précise le ministère. Là, au pied de ce fameux hôtel tout simple, en bord de route, bordée d’une station-essence décrépie et de tables de pique-nique sous abri, "les passeurs les attendent et les conduisent à pied de manière illégale pour traverser le territoire macédonien."

      La lutte contre les passeurs en Macédoine du Nord, pays de transit pour les exilés souhaitant rejoindre l’Europe occidentale, est un enjeu national. Mais aussi et surtout européen - bien que ce petit pays des Balkans ne fasse pas partie de l’UE. Frontex y est déployé depuis avril 2023. Tout récemment, du 13 au 17 octobre, des experts de l’OLTIM (Office français de lutte contre le trafic illicite de migrants) sont venus former des policiers macédoniens sur la lutte contre les trafiquants. La formation est délivrée dans la cadre de "la coopération renforcée entre la France et le Royaume-Uni", précise le communiqué.

      Cette lutte active n’est pas sans conséquence sur les droits des exilés. À l’intérieur du centre de Vinojug, quatre jeunes hommes viennent d’arriver dans la nuit. "Le passeur m’a dit au téléphone : "Marche dans la forêt, et tu trouveras une voiture. Et dans trois ou quatre jours tu seras en Italie"", raconte l’un d’eux, Mohamed, un Soudanais de 21 ans. "Nous sommes restés deux jours dans la forêt sans manger, sous la pluie... Et il n’y avait pas de voiture", soupire-t-il.

      Les jeunes avaient formé un groupe de huit dans cette forêt. Mais ils ne sont désormais plus que quatre. Car après l’interception dans la nuit de leur groupe, "la police nous a amenés dans ce centre, a pris nos empreintes, a confisqué nos documents grecs et nos téléphones", racontent-ils. Puis quatre d’entre eux ont été emmenés à plus de deux heures de voiture de là, à Skopje, la capitale. Pour être entendus comme témoins au tribunal. Les quatre restés ici, l’air perdu, ne savent pas pourquoi, quand ils rentreront, ce qu’il va advenir d’eux-mêmes et de leurs effets personnels.
      Détenu comme témoin : la procédure "hors de tout cadre légal" en vigueur en Macédoine du Nord

      Ce transfert à Skopje pour être entendus comme témoins est une procédure inédite en Europe qui s’applique là en Macédoine du Nord. Systématiquement, une partie d’un groupe d’exilés intercepté est transféré à Skopje dans le centre de rétention de Gazi Baba (appelé "centre d’accueil pour les étrangers", en réalité un centre de détention pour ceux qui sont en irrégularité administrative). Le temps d’être présentés devant un juge. Non pas en qualité de prévenus ; mais bien de simples témoins.

      "C’est totalement illégal", dénonce Mitko Kiprovski, avocat et chargé de plaidoyer de l’ONG Jesuit Refugee Service (JRS). "C’est une situation qui n’est pas inscrite dans la loi. Le procureur donne des instructions orales à la police de détenir les personnes pour qu’elles témoignent contre les passeurs", expliquent les avocates de la Macedonian Young Lawyers Association (MYLA).

      "La détention arbitraire de migrants en situation irrégulière au centre de détention de Gazi Baba, qui doivent être présentés devant le tribunal pénal pour faire une déposition, reste préoccupante", épinglait déjà en octobre 2024 un rapport de la Commission européenne. Sollicité également sur ce sujet, le ministère de l’Intérieur n’a, à l’heure où nous écrivons ces lignes, pas répondu à nos questions sur ce point.

      De plus, parmi les quatre jeunes transférés à Skopje ce jour-là, se trouvaient deux mineurs, selon la base de données commune aux associations à Vinojug, et à la police aux frontières. "Nous avons longtemps mené un plaidoyer pour qu’il n’y ait plus de mineurs dans ce centre de détention", expliquent les avocates de la Macedonian Young Lawyers Association (MYLA). "Je passe mon temps à dire aux autorités que si elles veulent un jour intégrer l’Union européenne, il faut mettre fin à la détention administrative des enfants", insiste aussi Mitko Kiprovski.

      Cette pratique de la détention en tant que témoins s’est néanmoins améliorée. "Les années passées, les gens étaient détenus pour une plus longue période et la situation était pire", souligne Teodora Kjoseva Kostadinovska, de la Macedonian Young Lawyers Association. La période de détention en tant que témoin pouvait alors durer plusieurs semaines voire plusieurs mois.

      "Désormais, surtout en 2025, la situation s’est améliorée. Les gens sont détenus un ou deux jours. Ce qui n’est toujours pas légal, bien sûr", affirme Teodora Kjoseva Kostadinovska. En cas de jours non-ouvrés, les exilés peuvent rester jusqu’à 3 ou 4 jours en détention, précise de son côté Mitko Kiprovski.
      "La seule façon de sortir est de demander l’asile"

      Au-delà du fait qu’elle s’effectue hors de tout cadre légal, cette détention a des conséquences sur le parcours des exilés. Il est impossible de demander l’asile avant l’audience : “le dépôt d’une demande d’asile n’est autorisé qu’après que les témoignages de ces personnes devant le procureur dans le cadre des procédures engagées contre les passeurs ont été entendus", explique le rapport 2024 de la Macedonian Young Lawyers Association (MYLA).

      Enfin, après l’audience, les ONG expliquent que les personnes n’ont d’autre choix que de déposer une demande d’asile pour sortir de Gazi Baba. "La seule façon légale de sortir de détention est de faire une demande d’asile orale et ainsi d’être transféré au centre d’accueil pour demandeurs d’asile", en périphérie de Skopje, explique Mitko Kiprovski.

      MYLA a constaté aussi cette situation en 2024 à partir d’un groupe : "certains d’entre eux ont été transférés au centre d’accueil pour étrangers et, après avoir témoigné dans le cadre des procédures pénales engagées contre les passeurs, ils ont été libérés après avoir déposé une demande d’asile."

      Mais dans la pratique, ce qu’il se passe après est parfois aléatoire. Il arrive que les gens "soient laissés et partent dans des directions inconnues", indique Mitko Kiprovski. D’autres fois, les exilés sont ramenés au centre de transit de Vinojug. C’est le cas des quatre jeunes interrogés ce jour-là, qui ont rejoint, deux jours plus tard, les quatre restés à Vinojug. Tout de suite après, la police aux frontières les a reconduits sur le territoire grec, dans le cadre du "retour volontaire" qui s’applique là-bas - en réalité une zone grise frôlant parfois avec le refoulement illégal.
      "On m’a mis la pression" : des interrogatoires à l’intérieur même du centre de transit

      Rafiullah a l’allure droite, l’aisance et le sens de la tchatche des serveurs, lui qui a travaillé à ce poste dans un restaurant à Ankara, en Turquie, pendant trois mois, avant d’arriver en Grèce puis en Macédoine du Nord. L’anglais parfait, aussi. Le turc aussi : il l’a appris pendant ses mois à Ankara. Au total, ce jeune Afghan de 21 ans manie parfaitement cinq langues - en Afghanistan, il a suivi une formation de langues. "Je crois que plus j’apprends des langues, plus mon cerveau est capable d’en assimiler de nouvelles facilement", songe-t-il en souriant. Par conséquent, dans le centre de Vinojug, "j’aidais tout le monde, je faisais l’interprète".

      Mais cette faculté lui a attiré des ennuis "à cause ça, on me prenait pour un passeur". Déjà, le jeune homme a été dans le radar des autorités pour avoir tenté de passer huit fois d’affilée la frontière. "À chaque fois on me voyait avec un groupe différent. C’est aussi pour ça qu’on me prenait pour un passeur, je crois. La première fois, on ne m’a rien dit, les fois suivantes à chaque fois : pourquoi tu es avec ce groupe, tu es passeur ?"

      Debout dans son sweat à capuche vert aux côtés de Rafiullah, un autre jeune Afghan, Mohammad Azim, âgé de 16 ans, explique la logique : "quand tu essaies une fois et que tu échoues, que tu es reconduit en Grèce, le passeur te prend comme repère. Il te met avec quelques nouvelles personnes et te dit : "maintenant que tu sais comment ça fonctionne, c’est toi qui vas pouvoir les guider, et leur acheter un ticket de bus". De nombreux exilés tentent de monter dans un bus public qui se rend de Gevgelija à Skopje, très surveillé par la police.

      Rafiullah n’a pas choisi de passer huit fois : il assure avoir été refoulé contre son gré, lui qui voulait entrer dans le système d’asile pour être transféré à Skopje. Toujours est-il que la neuvième fois - il ne sait toujours pas pourquoi -, les autorités l’ont laissé s’installer à Vinojug... Non sans lui faire subir, cette fois, un véritable interrogatoire de police à l’intérieur même du centre de transit. "J’ai été interrogé par quelqu’un de la police, dans une salle en préfabriqué, tout seul. L’agent de police me demandait “tu es le passeur ? tu as aidé le passeur, non ?”. Il me mettait la pression, il me faisait croire que les autres m’avaient dénoncé comme tel."

      Pour rappel, "ces centres de transit demeurent dans une situation juridique peu définie", soulignent les avocates de MYLA. "Ils sont placés sous un régime de "gestion de crise" qui dure depuis 2015, donc les gens à l’intérieur ont eux aussi un statut légal peu défini". "Ce sont des no man’s land, sous aucune juridiction", confirme Mitko Kiprovski, avocat et chargé de plaidoyer de l’ONG Jesuit Refugee Service. "Donc personne ne peut y émettre des documents, signer ou mettre un tampon". Le cadre juridique de ce type d’interrogatoires, et l’accès à un droit à la défense, pose donc problème.

      Rafiullah explique à cet agent qu’il n’a fait qu’essayer de traverser comme les autres. "Je lui répondais que je n’avais rien à voir avec le passeur, que je savais qu’ils n’avaient rien contre moi, que moi je voulais rester ici en Macédoine. Après ça, ils m’ont laissé repartir dans le centre".

      Le jeune homme ne sera plus refoulé et bien enregistré comme demandeur d’asile à Vinojug. Mais "depuis cet interrogatoire, je n’ai plus jamais joué les interprètes. Je fermais ma bouche. Je ne parlais plus qu’anglais dans le centre". Un mois plus tard, il a été transféré au centre pour demandeurs d’asile de Skopje.
      À 16 ans, 10 mois de prison pour aide au passage

      C’est de ce centre situé en périphérie de la capitale, face à une lande à l’abandon et des toits en brique emmenant le regard vers les montagnes au loin, que sort ce midi-là, cigarette à la main, Kayum Aryoubi. D’emblée, il adresse un signe de la main. Son visage encore adolescent du haut de ses 17 ans, avec ses yeux ronds et ses grains de beauté autour d’une courte barbe, s’éclaire d’un sourire. Sur son k-way gris clair, au dos, il est écrit "A step forward" ("Un pas en avant").

      Le jeune homme est loin d’avoir eu un parcours insouciant. Il a quitté l’Afghanistan, avec un oncle, à l’âge de 10 ans. Toutes ces années, ils ont vécu en Turquie, puis en Grèce. Il y a onze mois de cela, tous deux ont franchi la frontière macédonienne : l’oncle a réussi à passer mais Kayum, lui, a été intercepté par la police. "On se trouvait dans un bus" - ce fameux bus public qui rejoint Skopje depuis Gevgelija - "quand la police nous a trouvés", commence l’adolescent. "Dans ce bus il y avait un Turc qui travaillait avec les passeurs. Mais ce Turc m’a dénoncé moi comme étant lié aux passeurs".

      Après une nuit au centre de transit de Vinojug, Kayum Aryoubi a été transféré à Skopje pour comparaître devant un tribunal. "Le Turc a témoigné contre moi. J’ai été condamné à 10 mois de prison". Il avait alors 16 ans.

      L’adolescent est incarcéré dans la prison de Kumanovo, au nord du pays, pour purger sa peine d’aide au passage. "C’était très violent”, souffle le jeune homme qui se dit traumatisé par son incarcération. "Les détenus étaient maltraités par les gardiens de cette prison, moi y compris. Je vivais dans une petite cellule avec 4 autres personnes". Les quatre étaient des prisonniers de droit commun macédoniens. "C’est là que j’ai appris le macédonien. Mais c’était très dur de vivre avec des gens de ce pays."

      À la fin de sa peine, on le transfère pour un mois à Gazi Baba, le centre de rétention pour étrangers. Les conditions au quotidien y sont meilleures, assure-t-il. Mais le jeune homme sombre mentalement. Il y a appris, il y a quinze jours, le décès de sa sœur et de ses deux frères dans un affrontement entre les Taliban et les Pakistanais. "Je me suis blessé avec un rasoir quand j’ai appris ça", confie-t-il en dévoilant, sur son torse, de longues cicatrices encore rouges. "Je voulais sortir de là. Et j’étais tellement triste que je ne savais pas ce que je faisais."

      Depuis trois jours, Kayum a été libéré de Gazi Baba et est hébergé en tant que demandeur d’asile déclaré dans ce centre ouvert de Skopje. Aujourd’hui, il veut partir en Serbie dès que possible. C’était son objectif depuis le début de son entrée sur le territoire macédonien. Mais pour ce faire, il a besoin d’un téléphone. Il y a onze mois, "quand j’ai été arrêté par la police macédonienne, ils m’ont pris mon téléphone. J’avais aussi 500 euros sur moi. Ils m’ont tout pris et ne me les ont jamais rendus", glisse-t-il.

      Le jeune homme espère un jour rejoindre la France pour y demander protection. "Obtenir l’asile y est moins difficile pour les Afghans", croit-il, "et j’ai des amis qui sont là-bas".

      https://www.infomigrants.net/fr/post/67859/interroges-detenus-comme-temoins--en-macedoine-du-nord-les-consequence
      #criminalisation_de_la_migration #passeurs #détention #détention_arbitraire

  • Alternatives #open_source : la #Commission_européenne va créer un #consortium pour les #communs_numériques

    La France et l’Allemagne sont parmi les membres fondateurs. « L’une des priorités stratégiques de l’Europe est de renforcer les alternatives ouvertes, interopérables et souveraines. »

    La Commission européenne annonce avoir adopté le 29 octobre « une décision établissant le consortium pour une #infrastructure_numérique_européenne_commune [#European_Digital_Infrastructure_Consortium ou DC-EDIC en anglais], un nouvel instrument permettant aux États membres de développer, de déployer et d’exploiter conjointement des #infrastructures_numériques transfrontières dotées d’une gouvernance et d’une personnalité juridique spécifiques ».

    Faciliter l’accès au financement

    Ce consortium aura son siège à Paris. La France, l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Italie en sont les membres fondateurs, les autres États membres pouvant adhérer à tout moment. Le Luxembourg, la Slovénie et la Pologne y participent déjà en tant qu’observateurs. L’objectif affiché est une réduction de la #dépendance de l’Union européenne « à l’égard des infrastructures et technologies numériques importées », qui « crée des vulnérabilités pour son économie et sa démocratie. L’une des priorités stratégiques de l’Europe est donc de renforcer les alternatives ouvertes, interopérables et souveraines.

    La mission du DC-EDIC est de mettre en œuvre un projet multinational sur les biens communs numériques dans les domaines de l’infrastructure et des services de données communs européens et de l’administration publique connectée. Elle mettra en commun les ressources des États membres et assurera la coordination avec les communautés afin de développer, de maintenir et d’étendre les biens communs numériques et de faciliter leur adoption. »

    Parmi les actions annoncées, le consortium devra « faciliter l’accès au financement, notamment par l’intermédiaire d’un guichet unique physique et en ligne et d’un pôle d’expertise ».

    IA, cloud, suites collaboratives, réseaux sociaux...

    Dans son propre communiqué, la Direction interministérielle du numérique (Dinum) précise que le consortium a pour objectifs de :

    • « proposer des alternatives ouvertes dans des domaines clés comme l’#intelligence_artificielle, le #cloud, les suites collaboratives, la #cybersécurité, la #géomatique ou les réseaux sociaux ;
    • renforcer l’écosystème européen en mobilisant les communautés techniques, académiques, publiques et privées ;
    • mettre en place un mécanisme de financement durable pour soutenir la production, la maintenance et la diffusion de ces communs à l’échelle européenne ;
    • encourager leur adoption par les administrations, les entreprises et les citoyens. »

    Par défaut sous #licence_libre

    La Commission indique que « pour maximiser la réutilisation et la transparence, tout logiciel développé conjointement est par défaut publié sous licence libre et open source. Les #marchés_publics respecteront les principes de non-discrimination et la politique en matière de données imposera des pratiques conformes au #RGPD, y compris des dispositions pour enquêter sur les atteintes à la sécurité.

    Les prochaines étapes prévues comprennent le recrutement officiel du directeur et de l’équipe fondatrice, et le lancement d’un projet de soutien au DEP [le Programme Europe numérique, un fonds de l’UE créé en 2021]. D’ici à 2027, #DC-EDIC mettra en place un guichet unique et un pôle d’expertise, ainsi qu’un forum et un prix sur les communs numériques et un rapport annuel sur l’état des communs numériques. »

    Ce consortium devrait être officiellement lancé le 11 décembre 2025 à La Haye, annonce la Dinum.

    Le #Programme_Europe_numérique indique qu’il « fournit un financement stratégique pour relever ces défis [les capacités numériques et la cybersécurité de l’UE], en soutenant des projets dans des domaines de compétences clés tels que le calcul haute performance, l’intelligence artificielle, la cybersécurité, les compétences numériques avancées et en veillant à la large diffusion des technologies numériques dans l’économie et la société.

    Il accompagne l’industrie, les petites et moyennes entreprises (PME) et l’administration publique dans leur transformation numérique grâce à un réseau renforcé de #pôles_européens_d'innovation_numérique (#PEI). »

    https://www.zdnet.fr/blogs/l-esprit-libre/alternatives-open-source-la-commission-europeenne-va-creer-un-consortium-pour-
    #alternative #souveraineté #interopérabilité #souveraineté_numérique

  • #Carbone_de_sang : comment un programme de #compensation des #émissions_de_carbone rapporte des millions grâce aux #terres autochtones du nord du #Kenya (2023)

    Depuis la création du premier parc national aux États-Unis il y a 150 ans, des “Aires protégées” ont été créées par les colonisateurs et les élites qui ont volé les terres des #peuples_autochtones et des communautés locales, au nom de la “#conservation”. Aujourd’hui, malgré les terribles violations des droits humains commises dans ces zones, et en l’absence de preuves solides attestant qu’elles contribuent à enrayer la perte de biodiversité, les grandes ONG de conservation (telles que #WWF et #WCS) continuent de présenter les Aires protégées comme la "solution" aux problèmes environnementaux bien réels auxquels nous sommes confrontés.

    Affublées d’une appellation en apparence innocente, “Solutions fondées sur la Nature”, les #Aires_protégées sont désormais proposées comme un moyen d’atténuer le #changement_climatique. On prétend que ces Aires peuvent “protéger” contre la #déforestation et d’autres activités qui libèrent du #carbone, et qu’elles pourraient donc être utilisées pour “compenser” les émissions de carbone produites ailleurs. En pratique, cela signifie que les Aires protégées peuvent être utilisées pour générer des "#crédits_carbone" que les pollueurs – qu’ils soient des entreprises, des gouvernements ou des particuliers – peuvent acheter sur les marchés pour “compenser” leurs émissions. En théorie, tout le monde est gagnant : plus il y a d’Aires protégées, plus le changement climatique est atténué. La biodiversité et le climat sont tous les deux sauvés !

    Mais la réalité est bien différente.

    "Ces personnes ont vendu notre air." Emanuel, peuple rendille, nord du Kenya

    La #compensation par les crédits carbone fait partie d’un nouveau courant de #marchandisation de la #nature. Ces projets fixent un prix à la nature, traitant les terres des communautés autochtones et locales comme un stock de carbone à échanger sur le marché afin que les pollueurs puissent continuer à polluer, que l’industrie de la conservation puisse mettre la main sur des milliards de dollars et que les spéculateurs puissent en tirer des profits. Les peuples autochtones et les communautés locales se retrouvent ainsi dépossédés et privés de leurs moyens de subsistance. Les mécanismes de compensation des #Solutions_fondées_sur_la_Nature sont du #colonialisme par le carbone et n’arrêteront pas la crise climatique.

    #Survival fait campagne pour mettre fin aux projets de compensation carbone dans les Aires protégées où les droits des peuples autochtones sont violés.

    La meilleure façon de protéger notre planète est de reconnaître et de respecter les #droits_territoriaux des peuples autochtones.

    https://www.survivalinternational.fr/campagnes/carbone-de-sang
    #éco-blanchissement #protection_de_la_nature #green-washing

  • L’#Observatoire_de_l’immigration_et_de_la_démographie, un #think_tank qui fabrique de la peur

    Complètement absent de la sphère académique, l’organisme, inconnu il y a deux ans, jouit d’une certaine audience dans l’espace public. S’il ne triche pas sur les chiffres, il les met au service d’une vision alarmiste de l’immigration.

    L’« échec collectif » de l’immigration étudiante, le « cercle vicieux » du coût de l’immigration, la « ruée » des Afghans vers l’Europe, l’asile « hors contrôle », l’« appel d’air » de la régularisation… A intervalles réguliers depuis deux ans, un think tank distille des études sur l’immigration, livrant clés en main des éléments de langage à quiconque voudrait agrémenter le débat public de considérations alarmistes. Avec un succès certain.

    L’Observatoire de l’immigration et de la démographie (#OID) jouit d’une confortable exposition médiatique. Son directeur, #Nicolas_Pouvreau-Monti, est régulièrement convié sur les plateaux des médias de Vincent Bolloré, CNews ou Europe 1, mais il a aussi été plusieurs fois l’invité de Franceinfo ou du magazine d’actualité d’Arte, « 28 minutes ». Il obtient fréquemment la reprise de ses tribunes et publications dans Valeurs actuelles, Le Journal du dimanche, Le Point, Le Figaro ou encore Marianne. Le 31 août, François Bayrou, encore premier ministre, avait même dû répondre à l’intervieweuse star du groupe Bolloré, Sonia Mabrouk, qui l’interrogeait sur les « 3,4 points de PIB [produit intérieur brut] » que coûte l’immigration, selon un « organisme de référence » : l’OID.

    Une consécration pour cette structure que personne ne connaissait avant 2023. M. Pouvreau-Monti ne boude pas son plaisir. Ce trentenaire a pu quitter son poste de conseiller chez Accenture pour se consacrer à temps plein à l’OID. Lorsqu’il a fondé l’observatoire en 2020 avec « cinq copains », trois ans après avoir été diplômé de Sciences Po Paris, il savait qu’il y avait « une place à prendre dans le #marché_des_idées ».

    A l’en croire, l’OID propose « une vision rationnelle et dépassionnée, fondée sur la rigueur scientifique et l’efficacité politique ». Surtout, il prend à rebours le « #rassurisme qui relativise l’ampleur des flux », un prisme qui jouirait selon lui d’une « hégémonie » dans les débats d’experts. Experts qui, eux, constatent, déroutés, l’audience et la respectabilité acquises par l’OID. Affiliée à l’Institut convergences migrations (ICM), un établissement de recherche, l’économiste Flore Gubert se désole : « Leur force de frappe est impressionnante, alors qu’à l’ICM nous sommes 800 chercheurs et nous ne sommes pas audibles. C’est décourageant. »

    Le constat est d’autant plus amer chez certains chercheurs qu’à force de se présenter sous les airs d’un « GIEC de l’immigration » (Paris Match, 5 janvier 2024), l’OID est confondu avec un organe scientifique… qu’il n’est pas. Car pour l’essentiel, il revisite des travaux de la statistique publique, souvent issus de l’Insee ou de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). « Ils sont complètement absents de la sphère académique », tient ainsi à souligner Jérôme Valette, économiste des migrations au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).

    #Fonds_Périclès

    Et si l’OID se prévaut d’un « conseil scientifique », un seul de ses membres, #Gérard-François_Dumont, est docteur en sciences économiques et a dirigé des thèses. Il est par ailleurs connu pour présider la revue nataliste Population et Avenir et avoir contribué à l’étude qui fit la une du Figaro Magazine, en 1985, sous le titre « Serons-nous encore français dans 30 ans ? », accompagné de l’image d’une Marianne voilée. A l’époque, M. Dumont s’inquiétait, aux côtés de l’écrivain ultraréactionnaire #Jean_Raspail, de l’écart entre la #fécondité des Françaises et celle des « non-Européennes ».
    Parmi les quatre autres membres du conseil scientifique de l’OID, on trouve l’ancien diplomate #Xavier_Driencourt, qui préside aussi le comité stratégique du magazine d’extrême droite Frontières ; l’avocat et ancien conseiller sécurité de Valérie Pécresse, Thibault de Montbrial ; l’ex-préfet #Michel_Aubouin, contributeur occasionnel du mensuel d’extrême droite Causeur ; et l’ex-directeur général de la sécurité extérieure, #Pierre_Brochand, à qui l’on prête d’avoir conseillé Eric Zemmour pour peaufiner son programme de la présidentielle en 2022.

    De quoi orienter la « science » diffusée par l’OID, dont on sait mal comment il se finance. « Je ne ressens pas le besoin de #transparence », évacue M. Pouvreau-Monti à ce sujet, mentionnant vaguement « plusieurs centaines de donateurs ». On sait pour sûr qu’il bénéficie depuis 2023 du fonds Périclès, du millionnaire réactionnaire et partisan du rapprochement entre la droite et l’extrême droite, #Pierre-Edouard_Stérin. L’ambition du fonds est sans ambiguïté de « transformer durablement le paysage politique et social français ».

    M. Pouvreau-Monti, lui, est convaincu qu’il faut un mandat présidentiel pour entreprendre des « grandes manœuvres » en matière d’immigration, qui passent par une réforme de la Constitution ou la dénonciation de la Convention européenne des droits de l’homme. Peu étonnant pour celui qui était membre, à Sciences Po, de l’association souverainiste #Critique_de_la_raison_européenne, fondée par #Alexandre_Loubet – aujourd’hui député Rassemblement national (RN) de la Moselle et conseiller spécial de #Jordan_Bardella –, et dont a également été membre active #Sarah_Knafo, députée européenne Reconquête !.

    « On voit monter la défiance vis-à-vis du politique qui fait semblant de pouvoir, en même temps qu’on voit monter une crise de l’intégration. Le risque, c’est la rupture démocratique. Il y a urgence », déroule M. Pouvreau-Monti. Pour convaincre, il a été à l’école des conservateurs américains, en tant que lauréat de la #bourse_Tocqueville, fondée par un autre partisan de l’« union des droites », proche de M. Stérin et « conseiller opérationnel » de Périclès, #Alexandre_Pesey. A ce titre, il participe en 2019 à un voyage aux Etats-Unis, où il est formé au « passage médias et à la levée de fonds ».

    Vernis de respectabilité

    Pour marteler ses idées, l’OID s’appuie sur des « #chiffres béliers » : 66 % des étudiants étrangers n’obtiennent pas leur licence en trois ans, seuls 34 % des immigrés arrivés en 2023 occupaient un emploi en 2024, ou encore 580 millions de personnes dans le monde sont éligibles au droit d’asile en France. Pour s’en faire l’écho, outre ses relais médiatiques, M. Pouvreau-Monti se targue d’avoir une « surface de contact » qui va du bloc central à l’extrême droite, et il voudrait bien « mettre un pied à gauche ».

    L’OID a été reçu par le cabinet de #Gérald_Darmanin quand celui-ci était Place Beauvau, et #Bruno_Retailleau, alors ministre de l’intérieur, ne l’a pas moins bien traité. En novembre 2024, sur invitation d’élus #Les_Républicains, le think tank organise une conférence à l’Assemblée nationale et une autre au Sénat, sur le thème de la « crise de l’asile ».

    Quelques mois auparavant, en avril 2024, M. Pouvreau-Monti était reçu à la direction générale des étrangers en France, l’administration centrale chargée des immigrés, pour animer un « petit déjeuner » en présence d’une vingtaine de membres du personnel, dont le directeur lui-même, ainsi que des chefs de bureau et autres chargés de mission, sur le thème « L’immigration en France aujourd’hui. Un état des lieux ». « Le contenu de l’intervention a été très mal perçu, rapporte néanmoins une source interne à l’administration. On l’a fait remonter en disant, en substance, plus jamais ça. »

    Pas de quoi faire craquer le vernis de respectabilité de l’Observatoire qui s’offrait en juin, en signature d’une note sur les Afghans, la contribution du directeur de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, #Didier_Leschi. Le préfet chevènementiste présente, dans cette parution, l’immigration afghane comme un « phénomène massif », constitué de « jeunes, masculins, peu scolarisés », au « conservatisme social (…) difficilement compatible avec les valeurs françaises ». « On s’est croisé avec Didier Leschi sur cette idée, se souvient M. Pouvreau-Monti. Et on est allé voir la #Fondapol », un think tank qui a coédité l’étude de 35 pages. Interrogé sur le parti pris idéologique de l’OID, M. Leschi souligne au contraire l’excellence de leurs notes. « Ils s’intéressent aux effets sociaux de l’immigration que les chercheurs de gauche éludent, valorise le haut fonctionnaire. Et personne ne les prend en défaut sur les données. »

    Une assertion partiellement vraie. Le démographe François Héran, qui a occupé la chaire Migrations du Collège de France, a lu les 38 notes de l’OID. Il relève « des #biais de méthode, permettant de grossir les ordres de grandeur », comme le fait de citer des chiffres absolus de migrants sans jamais les rapporter à la population des pays d’accueil.

    Ainsi, M. Leschi parle d’une « ruée afghane vers l’Europe » alors que « les demandes d’asile des Afghans cumulées entre 2014 et 2024 totalisent 21 personnes pour 10 000 habitants », relativise M. Héran. La même étude présente la France comme le « pays de l’asile afghan ». Or, « sur les 929 200 Afghans enregistrés comme demandeurs d’asile dans l’Union européenne dans la même période, 11 % l’ont été en France, 39 % en Allemagne ».

    « Approximations » économiques

    M. Héran égrène les exemples. En janvier, Le Point dévoile une étude de l’OID selon laquelle 580 millions de personnes dans le monde pourraient obtenir l’asile en France. Le RN relaie cette extrapolation dans une campagne d’adhésion. Pourtant, « 80 % des déplacés externes dans le monde restent dans les pays limitrophes », rappelle M. Héran, qui note qu’un think tank britannique avait déjà estimé les demandeurs d’asile potentiels à plus de 700 millions, mais… pour le Royaume-Uni.

    De même, dans sa note sur « L’immigration dans les territoires. Quinze ans de bouleversement (2006-2021) », l’OID s’alarme d’un « basculement » des communes du Grand Ouest, où la présence immigrée a doublé. « Or, les données de l’Insee montrent qu’à l’échelle régionale il s’agit le plus souvent d’un passage de 2 % à 4 % ou de 3 % à 6 %. » « Le message martelé par l’OID est tout sauf “dépassionné”, conclut le chercheur. La France serait “débordée” par l’immigration. » Pourtant, « selon les données de l’OCDE ou de l’ONU, la France se situe au 35e rang dans le monde par la proportion d’immigrés et au 17e rang de l’Europe occidentale ».

    En matière économique, les parutions de l’OID suscitent les mêmes réticences au sein de la communauté scientifique. Le think tank insiste régulièrement sur la dégradation des comptes publics causée par l’immigration, en citant un chiffre de l’OCDE selon lequel les immigrés ne financent que 86 % des #dépenses_publiques qui leur sont affectées. « Ce chiffre est vrai, réagit l’économiste Jean-Christophe Dumont, chef de la division des migrations internationales à l’OCDE. Mais pour les natifs, c’est 96 %. Donc les natifs non plus ne financent pas la totalité des #dépenses_publiques qui leur sont affectées. Et comme ils représentent 90 % de la population, ce sont eux qui créent le déficit public. »

    Economiste au Cepii, Lionel Ragot épingle à son tour les « #approximations » de l’OID selon lequel si les immigrés avaient le même taux d’#emploi que les natifs, le gain pour le PIB français serait de 3,4 points. « Pour obtenir ce chiffre, ils considèrent que le taux d’emploi des immigrés et de leurs descendants augmenterait de 3,36 points s’il rejoignait celui des personnes sans ascendance migratoire et ils reportent cette augmentation au PIB, résume M. Ragot. Or, ce n’est pas parce que la population active augmente de 3,36 % que le PIB va augmenter de 3,36 %. Il faut considérer le nombre d’heures travaillées et pondérer ce volume par un indice de capital humain reflétant la qualité du #travail. Ensuite, le taux de croissance du PIB doit être pondéré par la part de la rémunération du facteur travail dans le revenu national. » Le chiffrage de l’OID apparaît donc largement surestimé.

    Dans une autre étude, l’OID évalue cette fois à 41 milliards d’euros le #coût net de l’immigration, en partant d’un coût brut estimé à 75 milliards d’euros, auquel le think tank retranche les impôts et les #cotisations_sociales versées par les étrangers. « Non seulement on ne sait pas comment ils obtiennent le chiffrage des recettes, mais en outre cela voudrait dire que les étrangers ne contribuent qu’à hauteur de 45,3 % aux dépenses publiques qui leur sont consacrées, analyse M. Ragot. Or, dans l’étude sur l’impact de l’immigration sur l’économie française, l’OID reprenait le ratio de 86 % de l’OCDE. La différence est énorme et à l’arrivée, les immigrés coûtent beaucoup plus cher. » Le mal est fait. Les chiffres s’instillent dans le débat public. Repris sur les plateaux télé et dans les journaux. A l’ère de la post-vérité, la croyance a gagné sur la réalité des faits.

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/10/29/l-observatoire-de-l-immigration-et-de-la-demographie-un-think-tank-qui-fabri
    #extrême_droite #peur #migrations #alarmisme #réfugiés #propagande #économie #préjugés
    ping @karine4

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    ajouté à la métaliste sur le lien entre #économie (et surtout l’#Etat_providence) et la #migration... des arguments pour détruire l’#idée_reçue : « Les migrants profitent (voire : viennent POUR profiter) du système social des pays européens »...
    https://seenthis.net/messages/971875

  • #Grèce : un scandale de #détournement des #aides de la #PAC éclabousse le gouvernement

    En Grèce, c’est « le » #scandale politico-financier qui agite actuellement l’opinion publique. Au cœur de l’affaire, il y a l’organisme grec en charge du paiement des #subventions de la #Politique_agricole_commune (PAC) européenne. Via cet organisme, entre 2017 et 2022, près de 45 millions d’euros auraient été détournés chaque année, soit au total, près de 300 millions d’euros dérobés à l’Europe.

    C’est un scandale d’ampleur, mais il a fait son retour ces jours-ci dans l’actualité en Grèce. L’affaire se déroule en deux volets. Il y a d’abord la #fraude elle-même - les centaines de millions d’euros détournés - et puis ensuite, la tentative de #couverture de cette fraude.

    À partir de 2021, l’Europe a des doutes et ouvre une enquête. On parle du Parquet européen qui est basé au Luxembourg et qui travaille sur les #fraudes_financières qui touchent l’Union européenne (UE). En résumé, les autorités grecques se montrent peu coopératives.

    #Faux_propriétaires et #faux_agriculteurs

    En mai, une perquisition policière a lieu dans les bureaux de l’organisme qui redistribuait les #subventions_agricoles européennes. Athènes décide alors de dissoudre purement et simplement l’#Opekepe, cet organisme qui, clairement, sent le soufre. Et depuis, les révélations sur ce scandale se succèdent, au quotidien, ici, dans les médias grecs.

    Concernant cette fraude, elle a été mise en place grâce à une bonne dose d’imagination de la part des membres de l’Opekepe. Pour détourner de l’argent européen, l’Opekepe, a inventé de faux propriétaires terriens et de faux agriculteurs, qui ont reçu des aides bien réelles, pour des troupeaux virtuels de moutons imaginaires et de chèvres fantômes sur des terres en fait vides, protégées, non agricoles, ou tout simplement inexistantes.

    Ce mélange de poudre aux yeux et de grand n’importe quoi a profité à un tas d’intermédiaires, dans un contexte de #clientélisme avéré. Et cet exercice d’imagination, il a été particulièrement « fertile » en# Crète, le fief politique du Premier ministre #Kyriakos_Mitsotakis.

    Une vague de démissions

    Il y a eu notamment une vague de démissions fin juin. L’ex-ministre de l’Agriculture entre 2019 et 2021, #Makis_Voridis, a quitté ses actuelles responsabilités ministérielles avec une poignée de ministres adjoints.

    Le Premier ministre, lui, n’est pas juridiquement visé, mais il est tout de même politiquement atteint par l’image de #corruption systémique que révèle ce scandale. Au point que Kyriakos Mitsotakis a été obligé de déclarer que dans cette affaire « l’insuffisance de l’État est évidente. Le clientélisme ne peut pas continuer à dicter notre manière de gouverner ».

    https://www.rfi.fr/fr/europe/20250708-gr%C3%A8ce-un-scandale-de-d%C3%A9tournement-des-aides-de-la-pac-%C3%A9c
    #détournement_de_fonds

    –-
    voir aussi le livre Pascoli di Carta (sur des procédés similaires en Italie) :


    https://seenthis.net/messages/1128629
    #Italie

    • Presunte frodi sui fondi agricoli dell’Ue: il peso del caso greco sul bilancio comunitario

      Il Parlamento europeo potrebbe valutare l’indagine della Procura europea su una presunta frode di ampio respiro su fondi agricoli dell’Ue, organizzata in Grecia

      Il co-presidente dell’Intergruppo del Parlamento europeo per la lotta alla corruzione ha dichiarato a Euronews che lo scandalo che coinvolge il presunto uso illecito, in Grecia, di fondi europei per l’agricoltura è destinato a giocare un ruolo nelle discussioni sul bilancio comunitario. L’eurodeputato tedesco dei Verdi Daniel Freund ha commentato la questione dei possibili falsi agricoltori che sta scatenando grandi discussioni nella nazione ellenica, sollevando dubbi sui metodi di gestione dei sussidi dell’Ue.
      A maggio l’avvio di un’indagine da parte della Procura europea

      La Procura europea (European public prosecutor’s office, Eppo) ha annunciato a maggio che un’indagine è in corso su una presunta frode di ampia portata, che coinvolgerebbe anche funzionari pubblici dell’Agenzia greca di pagamento e controllo degli aiuti comunitari di orientamento e garanzia (Opekepe).

      Cinque alti funzionari governativi, compresi un ministro e tre deputati, si sono dimessi venerdì a seguito delle accuse di coinvolgimento nel caso, che riguarda sussidi europei concessi tra il 2019 e il 2022 da parte della stessa Opekepe. Secondo la Procura, un «numero significativo di persone» avrebbe ricevuto sovvenzioni attraverso l’agenzia sulla base di false dichiarazioni: avrebbero affermato di possedere o affittare pascoli che in realtà erano terreni pubblici.

      «Nel settembre 2024, le autorità greche hanno posto l’accreditamento dell’Opekepe sotto osservazione e un piano d’azione è stato progettato per affrontare le carenze individuate», ha dichiarato il portavoce della Commissione europea a Euronews, aggiungendo: «Stiamo lavorando a stretto contatto con le autorità greche sulla situazione».
      Il dubbio su problemi strutturali nella gestione dei fondi Ue

      Freund ha invitato la commissione per il controllo del bilancio del Parlamento europeo a indagare se la presunta frode sia indice di problemi strutturali più profondi nella gestione dei fondi Ue da parte della Grecia: «La questione avrà sicuramente un ruolo nella discussione sul bilancio della Commissione dopo l’estate», ha spiegato. La Commissione ha dichiarato di non poter commentare le indagini penali o i processi penali in corso.

      Secondo il diritto europeo, gli Stati membri devono riconoscere solo gli organismi pagatori che soddisfano degli standard minimi per la gestione dei fondi europei; se un organismo non soddisfa queste condizioni, deve essere posto sotto osservazione e infine privato del suo riconoscimento.

      Il primo ministro greco Kyriakos Mitsotakis ha riconosciuto pubblicamente lo scandalo come «prova dell’inadeguatezza dello Stato» nell’affrontare la corruzione, impegnandosi a istituire una task force speciale per condurre un’indagine rapida e approfondita. «Il clientelismo non può governare il modo in cui conduciamo gli affari», ha detto al suo gabinetto, giurando che «dato che l’Opekepe non è riuscita a fare il suo lavoro, lo Stato lo farà a livello centrale».
      Il presunto coinvolgimento di due ex ministri coinvol

      A giugno l’Eppo, con sede ad Atene, ha trasmesso al Parlamento ellenico informazioni sul presunto coinvolgimento di due ex ministri dello Sviluppo rurale e dell’Alimentazione in reati penali. La Costituzione greca prevede che solo il Parlamento nazionale abbia il potere di indagare e perseguire i membri in carica o addirittura gli ex membri del governo greco.

      Questa limitazione legale ha costretto l’Eppo a dividere la sua indagine, una mossa che secondo l’ufficio potrebbe minare il suo mandato ai sensi del diritto dell’Ue. La Procura ha segnalato la questione alla Commissione europea, suggerendo che le protezioni legali nazionali per i ministri potrebbero limitare la competenza dell’Eppo e quindi violare il quadro giudiziario dell’Ue.

      L’ex ministro dell’Agricoltura Makis Voridis, che fino a poco tempo fa ricopriva la carica di ministro dell’Immigrazione, è stato uno di coloro che si sono dimessi la scorsa settimana. «Lo scandalo è il segnale più chiaro che gli Stati membri dovrebbero smettere di bloccare l’adozione della direttiva anticorruzione», ha dichiarato Nick Aiossa di Transparency International, secondo il quale «il fatto che lo schema di corruzione sia stato smascherato dimostra il valore della Procura europea».

      “Spero che il Parlamento greco tolga le immunità ai parlamentari coinvolti, per consentire un’indagine adeguata", ha dichiarato Freund.

      https://it.euronews.com/my-europe/2025/07/03/presunte-frodi-sui-fondi-agricoli-dellue-il-peso-del-caso-greco-sul-bil
      #Grèce

    • La Grèce arrête au moins 37 personnes pour fraude aux subventions agricoles européennes

      La police grecque a annoncé mercredi avoir arrêté au moins 37 personnes en lien avec une vaste fraude aux subventions agricoles de l’Union européenne pour laquelle des millions d’euros de versements frauduleux ont été octroyés.

      « Les autorités policières ont procédé à des dizaines d’arrestations dans le cadre du scandale de l’OPEKEPE (l’organisme grec chargé du versement des aides agricoles européennes, ndlr), à la suite d’une vaste opération menée dans plusieurs régions de Grèce », selon la police qui précise que, dans un premier temps, 37 personnes ont été interpellées.

      Des arrestations ont été effectuées à Athènes, Thessalonique, en Crète et dans d’autres régions dans le cadre d’une opération encore en cours, selon la police.
      Scandale

      Le scandale a été révélé en mai dernier lorsqu’une enquête du parquet européen a été rendue publique et que les locaux de l’OPEKEPE ont été perquisitionnés.

      Les enquêteurs européens avaient alors indiqué qu’"un nombre important" de personnes avaient obtenu des versements d’argent après de fausses déclarations sur la surface de leur parcelle ou sur le nombre de bêtes qu’ils possédaient.

      L’affaire a tourné au scandale, entraînant la démission d’un ministre, du directeur de l’OPEKEPE et deux autres hauts responsables, ainsi que la dissolution de cet organisme.

      Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis avait assuré début septembre que « les fonds ont déjà commencé à être récupérés ».

      D’après une enquête initiale des autorités grecques, la fraude est estimée à au moins 23 millions d’euros.

      https://www.rts.ch/info/monde/2025/article/fraude-aux-subventions-agricoles-en-grece-37-arrestations-29036393.html
      #arrestations #justice

    • Scandale des aides de la PAC en Grèce : 13 personnes en détention provisoire

      Treize personnes ont été placées ce mardi 28 octobre en détention provisoire, dont le chef présumé du réseau d’escrocs impliqué dans le vaste scandale de détournement de subventions agricoles européennes. Au total, le montant du préjudice au budget européen est estimé à près de 20 millions d’euros.

      Une fraude « massive et systématique » : ce sont les mots du parquet européen qui avait annoncé, au printemps, mener une enquête sur cette affaire embarrassante pour la Grèce, qui implique également « des activités de blanchiment d’argent ».

      Dans le collimateur de la justice européenne : un réseau d’escrocs, qui opérait au moins depuis 2018. Et si l’on parle d’un « réseau », c’est parce que les fraudeurs auraient disposé, selon les enquêteurs, d’« une structure hiérarchique claire, avec des rôles distincts ». Concrètement, pour obtenir des aides agricoles de l’Union européenne, les membres de ce fameux réseau sont soupçonnés d’avoir déclaré – frauduleusement – des terres agricoles qui ne leur appartenaient pas, tout en multipliant – artificiellement – le nombre de moutons ou de chèvres du cheptel grec.

      Face à ce scandale qui éclabousse la Grèce depuis plusieurs mois, le gouvernement a d’ores et déjà annoncé la dissolution de l’Opekepe, l’organisme en charge du contrôle de ces aides européennes. « Quel que soit le coût politique » pour son camp, au pouvoir depuis 2019, le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a encore déclaré dimanche 26 octobre vouloir que toute la lumière soit faite sur cette affaire.

      https://www.rfi.fr/fr/europe/20251028-scandale-des-aides-de-la-pac-en-gr%C3%A8ce-13-personnes-en-d%C3%A9tenti

  • #Amazon prévoit de remplacer plus d’un demi-million d’#emplois par des #robots

    Le géant de l’e-commerce s’apprête à supprimer, dès ce mardi 28 octobre, plus de 30 000 postes de « cols blancs », et prépare un avenir où 75 % des opérations seront prises en charge par des #IA et des robots. De quoi raviver la crainte d’une apocalypse sur le marché de l’emploi.

    Ça y est, le « #grand_remplacement » par l’IA a commencé. Selon les informations obtenues par Reuters, Amazon prévoit de licencier jusqu’à 30 000 personnes à travers le monde dès ce mardi 28 octobre, soit près de 10 % de ses quelque 350 000 salariés en « col blanc ». Des ressources humaines au service Cloud en passant par le marketing, ces emplois de bureau sont aujourd’hui en première ligne face à la vague de l’intelligence artificielle.

    « Cette dernière initiative indique qu’Amazon réalise probablement suffisamment de gains de #productivité grâce à l’IA au sein de ses équipes pour justifier une réduction substantielle des #effectifs », a déclaré Sky Canaves, analyste chez eMarketer, auprès de Reuters. Alors même que l’entreprise a engrangé 18 milliards de dollars de profits en 2024, « Amazon a également subi des pressions à court terme pour compenser les investissements à long terme dans le développement de son infrastructure d’IA. »

    « La fin de l’humanité »

    Il n’en fallait pas plus pour raviver la crainte d’une apocalypse sur le #marché_du_travail. « L’IA signe la fin de l’humanité », « Ce n’est que le début », pouvait-on lire sur les réseaux sociaux à la suite de ces annonces. Cette seconde affirmation n’est pas complètement fausse puisque selon un rapport interne d’Amazon consulté par le New York Times le 21 octobre, la multinationale compte également couper dans la main-d’œuvre de ses entrepôts. À terme, 75 % de ses opérations pourraient être automatisées à l’aide d’IA et de robots, sans sacrifier ses objectifs de croissance.

    L’an dernier, rappelle le quotidien new-yorkais, les dirigeants d’Amazon ont déclaré au conseil d’administration qu’ils espéraient que ces technologies leur éviteront d’augmenter les effectifs aux États-Unis au cours des prochaines années… tout en vendant deux fois plus de produits d’ici 2033. Chose qui aurait, sans l’IA, nécessité l’embauche de 600 000 personnes.

    Tri des stocks, automatisation de l’emballage et du déplacement des articles… L’entreprise affirme disposer d’un million de robots à travers le monde, et est convaincue que les humains qui s’en occupent représenteront les emplois de demain. De quoi transformer en profondeur les emplois de la #logistique et du #transport, voués à devenir plus qualifiés et plus rares dans le futur. Même les livreurs du géant de l’e-commerce seront « augmentés » grâce à des lunettes connectées leur affichant les instructions de navigation et de livraison en temps réel.

    Mots tabous

    Une réalité que le deuxième employeur privé aux États-Unis ne semble pas encore prêt à assumer. Dans ce rapport, on apprend qu’Amazon tient à son image de « bonne entreprise citoyenne » et que pour compenser les conséquences de ses choix stratégiques sur le marché de l’emploi américain, celle-ci prévoit de participer davantage à des événements communautaires dans les zones où les pertes d’emplois risquent d’être importantes. L’entreprise envisage aussi d’éviter l’utilisation de termes comme « #automatisation » et « IA », privilégiant des mots comme « technologie avancée » et « #cobot » au lieu de « robot » pour mettre l’accent sur la collaboration des machines avec les êtres humains.

    Dans un communiqué, Amazon a indiqué que les documents consultés par le New York Times étaient « incomplets » et ne « reflétaient pas la stratégie globale de recrutement de l’entreprise », dans la mesure où elle prévoyait d’embaucher 250 000 personnes pour les fêtes de fin d’année – sans préciser combien de ses postes seraient permanents. De son côté, Jeff Bezos a assuré, lors de la Tech Week, le congrès de la technologie de Turin (Italie) début octobre, que la bulle de l’IA allait être « bénéfique, parce que quand la poussière retombe et qu’on compte les gagnants, la société profite de ces inventions. » Pas sûr que les 30 000 personnes licenciées l’entendent de cette oreille…

    https://usbeketrica.com/fr/article/amazon-prevoit-de-remplacer-plus-d-un-demi-million-d-emplois-par-des-ro
    #travail #licenciement #remplacement #AI #intelligence_artificielle #terminologie #mots

    voir aussi :
    Des milliers de licenciements chez Amazon : l’intelligence artificielle va-t-elle finir par prendre nos emplois ? (signalé par @fsoulabaille) :
    https://seenthis.net/messages/1143716

    • Est-ce que les collectivités locales qui ont fait des ponts d’or à Amazon au prétexte de la création d’emploi vont demander le remboursement des subventions ?

  • Arance marce
    https://onborders.altervista.org/arance-marce

    Il 3 novembre, un articolo apparso su Il Manifesto aggiorna e conferma quanto abbiamo scritto nei mesi scorsi: – a San Ferdinando i braccianti, per ora circa 250, ma il numero crescerà di molto nelle prossime settimane, vivono ancora nella tendopoli, senza servizi essenziali – varie organizzazioni tentano di fornire sostegno: pasti caldi, passaggi in […] L’articolo Arance marce proviene da ON BORDERS.

    #migrazioni_agricolture_globali_agricolture_locali

    • I frutti amari di uno Stato assente

      A San Ferdinando (Rc) i lavoratori migranti vivono ancora ammassati in una #tendopoli senza servizi essenziali. Nonostante i proclami del #decreto_Caivano, qui regna l’abbandono.

      Prima accalcati uno su l’altro nelle fabbriche di trasformazionedegli agrumi abbandonate, poi nella baraccopoli dove (tra gli altri)perse la vita anche Becky Moses, infine nella “nuova” tendopoli,allestita in pompa magna nel 2017 dal ministero dell’Internotargato Salvini e lasciata al suo destino nell’indifferenza generaleun paio di anni più tardi. Dalla rivolta di Rosarno del 2010, con imigranti in strada a chiedere giustizia per una situazione socialedivenuta ormai insostenibile, poco o nulla è cambiato. Nonostantel’inserimento del comune di San Ferdinando (Rc) nel decreto«Caivano bis» dello scorso anno, che ha stanziato fondi importantiper il superamento della tendopoli stessa, ma che è rimasto ancoraimbrigliato alla fase di progettazione, i lavoratori migranti vivonoancora di fatto in un vero e proprio slum piantato nel cuoremorente di una zona industriale mai decollata (alle spalle del portodi #Gioia_Tauro) e dove lo Stato, semplicemente, non c’è.

      SONO CIRCA 250, in questo momento, gli ospiti della tendopoli,ma i numeri sono destinati a crescere esponenzialmente nelleprossime settimane, via via che la stagione della raccolta degliagrumi entrerà nel vivo. Vengono principalmente dall’Africasubsahariana e la maggior parte di loro è in possesso di un regolarevisto di soggiorno. A San Ferdinando coprono principalmente ilperiodo tra ottobre e maggio, quando la necessità di braccia a bassocosto per la raccolta di olive, kiwi, arance e mandarini li fa legale quando si è fortunati, in grigio o in nero nella quasi totalità dei casi.

      ALLA TENDOPOLI si arriva attraversando il deserto spettrale della seconda area industriale del porto. Semi nascosta tra i pochi capannoni in funzione e le tante aziende sorte velocemente grazie ai finanziamenti a pioggia della vecchia legge speciale 488 (e altrettanto velocemente andate a gambe per aria), la tendopoli continua a essere un vero e proprio buco nero abbandonato a se stesso, da cui lo Stato si è tirato fuori dai tempi del primo lockdown legato al covid.

      A causa della pluriennale assenza di manutenzione delle tendeoriginariamente allestite dal ministero, dei tanti incendi che hannocausato anche diversi morti tra i migranti e delle continue aggiuntedi sgangherate e insicure baracche in legno legate al continuoflusso di lavoratori che non riescono ad accedere a un’abitazionedignitosa in zona, la realtà di questo slum ha continuato apeggiorare con il passare del tempo, lasciando gli ospiti che lopopolano (tutti uomini) in condizioni inaccettabili. L’acqua calda èun miraggio, se si esclude un container allestito con sei docce,dono, nel 2024, di Papa Francesco. E sono in tanti a usufruire dei“servizi” di uno degli ospiti che, al costo di 50 centesimi, vende aipropri clienti secchi d’acqua riscaldata al fuoco di falò improvvisati d’inverno quando nelle tende si accendono stufe, salta spesso lasciando intere porzioni dell’accampamento al buio.

      «DOPO IL PRIMO LOCKDOWN le cose non hanno fatto altroche peggiorare – racconta Michele Vomera, responsabile dellaCaritas diocesana – È sparito anche il posto fisso della polizia oltrea quello dei vigili del fuoco. Facciamo tutto quello che riusciamo afare grazie ai fondi della Caritas e ai tanti aiuti che arrivano dacittadini e commercianti della Piana di Gioia Tauro. Certo, iproblemi con gli abitanti del posto non sono stati pochi, ma almenosotto questo punto di vista le cose sono un po’ migliorate. Ancheperché se i lavoratori della tendopoli sparissero da un giornoall’altro, un intero comparto economico non riuscirebbe a stare inpiedi». Sono proprio i volontari della Caritas che provano a mettereuna pezza sui vuoti lasciati dalle istituzioni. Sono loro a garantire ilservizio mensa con pasti caldi serviti due volte alla settimana. Esono sempre loro ad occuparsi delle istanze che arrivano da questilavoratori. Che si tratti di un aiuto per la compilazione di unmodulo per la carta d’identità o di un passaggio in auto per unesame medico da fare all’ospedale più vicino: 25 chilometri.

      ACCANTO AL LORO anche i medici di Emergency, che garantiscono visite gratuite sul campo almeno due volte la settimana, e le tante associazioni del terzo settore (come nelle vicinanze in grado di togliere da quell’inferno una ventina di migranti) costrette a sostituirsi allo Stato.

      A dare supporto legale ai migranti ci sono invece gli avvocati del progetto Infinity: sono in due, Francesco Penna e Pasquale Costantino e offrono assistenza soprattutto per l’ottenimento dello status di rifugiato. Ma non solo: nel container che li ospita infatti raccolgono le denunce legate al mercato del lavoro nero e si occupano di curare, quando serve, il loro trasferimento in località protetta per evitare le ritorsioni di padroni e padroncini con pochi scrupoli.

      TOLTO PERÒ IL LAVORO svolto dai volontari, il resto è buio pesto. Con buona pace dei proclami governativi sul decreto Caivano. «Abbiamo un ottimo progetto per il superamento della tendopoli – racconta in sindaco di San Ferdinando Luca Gaetano, che quel buco nero sociale se lo è ritrovato sul groppone – ma siamo ancora alla preparazione della fase progettuale. Ci vorrà ancora tempo».

      L’idea è quella di costruire un altro insediamento nelle campagne della zona: una serie di moduli abitativi dignitosi e, accanto, un terreno di tre ettari confiscato alla ‘ndrangheta in cui, in una cooperativa creata ad hoc, lavoreranno gli stessi migranti.

      https://ilmanifesto.it/i-frutti-amari-di-uno-stato-assente
      #San_Ferdinando #exploitation #oranges #Italie #Calabre #agriculture #braccianti

  • Des #films sur #Bruno_Manser :

    Bruno Manser - La voix de la forêt tropicale

    Le film raconte l’histoire de Bruno Manser qui se rend à Bornéo en 1984 et apprend la survie dans la jungle avec les #Penan. L’avenir des populations autochtones est menacé par la déforestation et Bruno Manser mène les Penan dans une lutte contre les acteurs de l’industrie du bois et le gouvernement malaisien.

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Bruno_Manser_%E2%80%93_La_voix_de_la_for%C3%AAt_tropicale
    #Malaisie

    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/848359

    –-

    et des livres sur Bruno Manser :
    https://seenthis.net/messages/1145525

  • Des #livres sur #Bruno_Manser :

    Bruno Manser. La voix de la forêt

    En 1984, Bruno Manser, jeune suisse opposé à la société industrielle, découvre son paradis perdu : la forêt pluviale de #Bornéo et ses habitants, le peuple #Penan avec lequel il vivra pendant 6 ans. Face aux tronçonneuses et aux bulldozers des compagnies forestières qui déboisent ce territoire, Manser se lance dans l’#activisme et consacre sa vie à la défense de la #forêt_tropicale et les droits des peuples indigènes.
    Disparu au cours de son dernier voyage au #Sarawak en mai 2000, il est officiellement disparu et présumé mort en 2005... Ce #livre retrace la vie de ce personnage étonnant et hors-norme devenu un héros malgré lui. L’intégralité des bénéfices de ce livre sera reversée au Bruno Manser Fonds.

    https://www.hobo-diffusion.com/catalogue/9782954667126-bruno-manser-la-voix-de-la-foret

    #déforestation #Malaisie #biographie

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    et des films sur Bruno Manser :
    https://seenthis.net/messages/1145529

    • Lettre à Bruno Manser

      This photographic tribute to Bruno Manser is the first collaboration between Isabelle Ricq (b. 1983, France) and Christian Tochtermann (b. 1977, Poland). Isabelle specializes in documentary photography, Christian in architecture photography.

      Isabelle spent several years in this Indonesian portion of Borneo photographing the destruction of the forests and their replacement by gigantic palm-oil plantations, when she first heard of Bruno Manser. Seen from the other side of the border, Sarawak appeared to have preserved some of its forested areas thanks to native resistance and to the region’s high mountains, which seemed difficult to clear.

      It is with this naive view that they travelled for the first time to Bario, the place where Manser had disappeared 11 years earlier and which, they believed, must have been preserved. They arrived a year after a road leading to these high plateaux had been laid, and instead of finding a peaceful forest, they found the source of the situation documented in Indonesia: the opening of the road led to the arrival of trucks and the decline of the nomad populations.

      Once back in Europe, they gathered all the documentation they could find on this territory. Among these works was Voices from the rainforest, published by Bruno Manser in 1994. Upon opening it, they were surprised by the signature on the title page. It was completely unexpected, and made them feel as though Manser’s inscription was addressed to them, since this book appeared to have remained unopened. It was an invitation to take a closer look at this region, an invitation to return there, year after year.

      As though in answer to that message, they are now addressing the photographs in the book to Bruno Manser, that sincere and passionate man whom they would have liked to meet and who, over the years, simply became ‘Bruno’.

      https://sturmanddrang.net/collections/books/products/ricq-tochtermann-letter-to-bruno-manser?variant=14800576479267
      #photographie

    • Rainforest Hero: The Life and Death of Bruno Manser

      Ruedi Suter’s Rainforest Hero: The Life and Death of Bruno Manser was published in German in 2005 and translated into English in 2015. The book charts the life of the missing, presumed dead rainforest activist, Bruno Manser, who even in death is a rallying point for his own non-government organization, the Bruno Manser Fund (BMF) and others. Bruno’s disappearance starts and closes this otherwise chronological account of his life. It is now over 16 years since Bruno disappeared. The Swiss courts have declared him dead; life goes on, as do questions surrounding his last minutes. His family, friends and colleagues at BMF do not know how he died.

      A Foreword, by Wade Davis, outlines the world of Sarawak’s indigenous Penan community providing the context for readers not intricately tied to or aware of the conflicts and changing land-use patterns of the state. This formerly nomadic group harvested the forest’s resources as they circulated through areas of forest its members claimed. However, with the opening of the forest to logging and the subsequent loss of natural resources including wood, rattan, wild game and other jungle produce, the Penan have found themselves in conflict with logging companies and the state. They were and are battling not only for natural resources and their traditional way of life, but for survival itself.

      https://www.abebooks.fr/9783905252897/Rainforest-Hero-Life-Death-Bruno-3905252899/plp

  • #Alessandro_Mannarino | #Malamor

    Qui si nasce senza fiato e già la prima punizione
    uno schiaffo sopra il culo per la respirazione,
    mi diedero a mia madre unghie lunghe di ragazza
    mi riempì di cicatrici carezzandomi la faccia.

    Malamor, malamor malamor, malamor!

    Alla scuola elementare c’era un muro e una ringhiera
    ci misero sugli occhi una benda di bandiera,
    così da non vedere trascinando la catena
    da che parte ci arrivavano i bastoni sulla schiena.

    Malamor, malamor malamor, malamor!

    Quello che mi ha detto una ragazza all’ospedale
    è che l’uomo si fa bestia quando non riceve amore,
    ma io sono nato nella stalla nazionale
    e son diventato un bellissimo cinghiale.

    Malamor, malamor malamor, malamor!

    Quando cresci in un paese in provincia di lamiera
    non hai molta scelta tra la fame o la galera,
    se non muori per le botte o per atti criminali
    ti uccidono quei giorni sempre vuoti e tutti uguali.

    Malamor, malamor malamor, malamor!

    Ma io trovai un binario sulla linea regionale
    che rigava sempre dritto fino al campo militare,
    mi tagliarono i capelli e quando caddero per terra
    la mia testa era più vuota quindi pronta per la guerra.

    Malamor, malamor malamor, malamor!

    Quello che mi ha detto una ragazza all’ospedale
    è che l’uomo si fa bestia quando non riceve amore
    ma io sono nato nella stalla nazionale
    e son diventato un bellissimo cinghiale.

    Per fortuna ho la divisa che mi copre ogni ferita,
    per fortuna c’è il signore che mi offre un’altra vita,
    una medaglia al petto dai gradi di ufficiale
    e non ho più sentito niente farmi male,
    non piangerò mai più adesso che so fare
    il saluto militare e il verso del cinghiale.

    https://www.youtube.com/watch?v=dZv2re-bIbA


    #chanson #musique

  • "The Ashes of Moria"
    https://www.youtube.com/watch?v=3ISMAJPcAUg

    A cinque anni dall’incendio che lo ha distrutto (8-9 settembre 2020) l’impatto del campo di Moria è ancora presente nelle vite delle persone che lo hanno vissuto, mentre l’approccio alla migrazione da parte dell’Europa continua a essere quello della deterrenza, del contenimento e della detenzione.

    Attraverso una serie di interviste con persone migranti che hanno vissuto nel campo greco, operatori sociali e attivisti che lo hanno conosciuto da vicino, questo documentario esplora l’eredità di Moria, raccontando la durissima realtà del campo, le ripercussioni che ha causato sulla vita delle persone e il suo ruolo nelle politiche di detenzione e deterrenza e nei processi di integrazione.

    #Moria #réfugiés #migrations #Grèce #camp_de_réfugiés #incendie #Lesbos #ce_qui_reste #silence #feu #camps_de_réfugiés #2020 #traces #hotspot #accord_UE-Turquie #asile #accampement #tente #froid #chaleur #tentes #sécurité #peur #nuit #viols #toilettes #survie #vols #criminalité #violence #faim #attente #santé_mentale #dépression #PTSD #queue #suicide #tentatives_de_suicide #enfer #dissuasion #politique_de_dissuasion #déshumanisation #propagande #nationalisme #racisme #instrumentalisation #instrumentalisation_politique #discriminations #bruits #sons #8_septembre_2020 #honte #contrôle_biopolitique #Kos #Samos #Kios #prisons #closed_controlled_accesse_centres (#CCACs) #éloignement #isolement #marginalisation #marges #camps_fermés #îles #Vastria

    –-

    ajouté à la métaliste sur l’#incendie de #septembre_2020 dans le #hotspot de #Moria, #Lesbos (#Grèce) :
    https://seenthis.net/messages/876123
    #film #documentaire #film_documentaire

    • “The Ashes of Moria”: che cosa rimane del campo profughi più grande d’Europa?

      Il film di Davide Marchesi e Majid Bakhshi, prodotto da ColoreFilm e distribuito in Italia da Altreconomia, ripercorre la storia di quello che è stato il simbolo del fallimento europeo in tema di “accoglienza” e “protezione”, sull’isola greca di Lesbo. A cinque dall’incendio che lo ha distrutto, il documentario porta nel cuore del campo, tra odori, rumori, paure e violenze. Allo stesso tempo offre le coordinate per capire i meccanismi attuali delle brutali politiche europee

      Mo Zaman cammina tra le macerie di un posto di cui riconosce gli odori, “gli stessi di albero di ulivo”, ma non i suoni. “Non avevamo questo silenzio prima qui”. Ricorda le sensazioni, il freddo e la paura, il terrore ma non gli spazi vuoti. Il suo è un ritorno in un luogo di cui conosce le strade a memoria nonostante di fatto non esista più. Mo Zaman è uno dei protagonisti di “The Ashes of Moria” (52′), il documentario di Davide Marchesi e Majid Bakhshi, prodotto da ColoreFilm e distribuito in Italia da Altreconomia, che a cinque anni dalla distruzione del campo di Moria sull’isola greca di Lesbo ripercorre la storia di quello che è stato l’emblema del fallimento europeo.

      È lui a raccontare che a Moria gli incendi erano frequenti e difficili da gestire, proprio come quelli che finirono per distruggerlo completamente. Il centro di identificazione e registrazione di richiedenti asilo e migranti più grande d’Europa, pensato come risposta a quella che erroneamente viene ancora definita la “crisi dei rifugiati” del 2015, nella notte tra l’8 e il 9 settembre 2020 bruciò irrimediabilmente.

      Eppure, come afferma Mo Zaman, “anche se possono cancellare Moria da questo posto, non potranno mai cancellare il nome di Moria”. Di certo non lo potranno mai cancellare dalla memoria delle migliaia di persone, al momento dell’incendio erano intorno alle 15mila, che vi sono passate e che vi hanno trascorso giorni, mesi, ma anche anni, in attesa. Le conseguenze, i residui, le ceneri di un’immensa crisi di salute mentale capace di fare più danni che quelli della guerra stessa da cui queste persone scappavano, come si racconta nel film, rimangono nella loro mente.

      “Mancava acqua potabile, cibo, elettricità, igiene -ricorda infatti Majid Bakhshi, uno dei due autori che ha vissuto nel campo-. È importante parlare della mia esperienza a Moria e, in generale, di persona che cerca di trovare la propria strada in condizioni difficili. Ciò che intendo dire è che, quando arrivi come migrante o rifugiato in Europa, o in qualsiasi altro paese del mondo, inizi un processo che sarà piuttosto difficile e per nulla, incerto e molto stressante. Può essere molto opprimente, soprattutto se non ricevi alcun supporto puntuale, e se devi affrontare tutti i problemi da solo. E trovo molto difficile anche staccarmi in qualche modo da alcuni di quei ricordi. Sono nella mia testa, come se dovessero restare con me per non so quanto tempo”.

      “Uno degli aspetti che spero che emerga è l’impatto psicologico a lungo termine della vita nel campo, non solo sulle singole persone che è sicuramente importantissimo, ma anche sulla società in generale -spiega il regista Davide Marchesi-. Avvicinarsi a queste persone e guardare le loro vite è struggente anche perché è doloroso pensare che noi abbiamo reso così difficile la loro vita”.

      Alternando immagini di archivio e fotografie, anche satellitari, alle interviste di chi ci ha vissuto, degli operatori sociali e degli attivisti, il documentario ci porta dentro il campo fino a farcene sentire la “puzza oscena” e le grida notturne, a farci provare il senso di insicurezza di ritrovarsi in un luogo pensato per accogliere fino tremila persone e arrivato a contenerne 25mila. Un posto dove i nervi a fior di pelle erano micce accese, dove si viveva giorno per giorno e contava solo sopravvivere.

      “Da una parte a Moria non ti veniva data possibilità di fare nient’altro se non preoccuparti di cose molto elementari, della sopravvivenza quotidiana -prosegue Marchesi-. Dall’altra ognuno si portava dentro questa gigantesca preoccupazione di che cosa gli sarebbe successo nel futuro, dell’attesa di una risposta alla richiesta di asilo”.

      La fame, le lunghe code, la mancanza di qualsiasi bene necessario trasformava le persone in poco tempo, cambiandone le mentalità e portandole a perdere qualsiasi tipo di fede. In una parola sola era l’inferno, usandone qualcuna in più Mo Zaman dice che “Moria eccelleva nell’essere orribile”.

      “Non credo che per noi sia possibile veramente capire che cosa significasse stare lì, perché è peggio che stare in prigione -aggiunge Marchesi-. Se non sai quando finirà l’attesa, psicologicamente è molto peggio. Per questo se da una parte le immagini di questo documentario testimoniano molto bene com’era Moria, dall’altra non gli rendono in nessun modo giustizia, perché manca il fattore temporale”.

      Dal cuore del campo “The Ashes of Moria” ci porta anche al di fuori, dandoci le giuste coordinate per ricostruire e comprendere quello che stava accadendo nel frattempo all’esterno. Non tanto una “crisi dei rifugiati” quanto del sistema di accoglienza di un’Europa lenta, impreparata, per certi versi anche sadica, che diventa una promessa tradita di una vita migliore e di diritti umani finalmente riconosciuti e protetti.

      “Abbiamo rischiato le nostre vite attraversando l’Egeo e non siamo venuti qui per essere abbandonati”, protestano le persone migranti. “Quando sono arrivata in Grecia ho subito discriminazione perfino per la mia esistenza. Come rifugiati non vogliono neppure che esistiamo”. E la domanda: “Dov’è finita l’umanità?” ricorre spesso nelle loro parole. Tutti sapevano che cosa succedeva ma nessuno faceva nulla per cambiare la situazione tanto che, come osserva nel film Carlotta Passerini, psicologa che lavorava con i residenti del campo “penso davvero che questo sia stato fatto per disumanizzare le persone. È più facile condannare qualcuno che non si considera umano o una persona che si comporta come te”.

      Moria sembra essere dunque il punto di partenza, l’origine di tutto quello che di peggio abbiamo ancora oggi: la propaganda che racconta le persone migranti come una minaccia pronta a invaderci, i nazionalismi e i razzismi. “In un certo senso è così -riflette Marchesi-. Ma allo stesso tempo nel momento in cui ho iniziato a fare ricerca, a cercare di capirne di più, mi sono accorto che alla fine l’approccio è sempre lo stesso. A Moria non è stato inventato nulla di nuovo. L’Europa da Schengen in poi ha reso evidente in tutti i modi che va bene la libera circolazione delle persone all’interno, ma chi viene da fuori deve essere ipercontrollato e se possibile tenuto fuori. Possiamo infatti chiamare le nuove costruzioni realizzate dopo Moria campi ad accesso controllato, possiamo chiamarli strutture ricettive, possiamo chiamarli Cpr, alla fine il modo di operare è uno: quello della detenzione e della deterrenza”.

      “Moria era usato per mettere paura alle persone -afferma infatti nel film Lefteris Papagiannakis, direttore del Greek council for refugees-. Ma non ha funzionato perché la deterrenza non funziona mai”. Così come non funzionerà per i cinque nuovi closed controlled access centre, vere e proprie prigioni in posti isolati, lontano da tutto e tutti. La loro costruzione nelle isole dell’Egeo settentrionale Chios, Kos, Leros, Lesbo e Samos è iniziata subito dopo la distruzione di Moria, già a partire dalla primavera del 2021, ricevendo più 250 milioni di finanziamenti dall’Ue (si veda su questo il progetto “Chiusi dentro. Dall’alto” pubblicato da Altreconomia in collaborazione con PlaceMarks nel settembre 2024).

      Da qui l’importanza di questo documentario: quella di “creare una testimonianza” affinché si mantenga alta l’attenzione su temi che nonostante il centro di Lesbo non esista più ancora ci riguardano. “Moria e in generale i campi sono dei laboratori di come si vogliono gestire le politiche migratorie e non solo -dice l’autore-. In questi luoghi, ad esempio, si testano nuove tecnologie di sorveglianza che poi verranno applicate non solo in ambito detentivo ma anche di controllo sociale. Per questo è importante creare documenti che possano rimanere nel tempo”.

      “The Ashes of Moria” è quindi un documentario sul campo di Moria e sulle persone migranti che ne sono stati prigioniere, ma si rivolge a noi, europei, occidentali e ci chiede di fare i conti con quello che siamo e abbiamo lasciato o contribuito a far accadere. “Non dobbiamo nasconderci o dimenticarci di quello che succede sui nostri confini -conclude Marchesi-. È importante riflettere su quello che come società, siamo capaci di fare a persone che in questo caso sono parte di una popolazione in movimento ma in un altri casi potrebbero essere le persone lgbtqi+ e in altri ancora i dissidenti politici o altro. Una società che è stata capace di fare quello che ha fatto a Moria nei confronti di persone che considerava una minoranza e che reputava in qualche modo ‘scomode’ sarà capace di farlo sempre e con chiunque”.

      https://altreconomia.it/the-ashes-of-moria-che-cosa-rimane-del-campo-profughi-piu-grande-deurop

    • E ci mancheranno «le parole per dirlo». Paolo, ciao, Francesco Raparelli
      https://www.dinamopress.it/news/e-ci-mancheranno-le-parole-per-dirlo-paolo-ciao

      8 Novembre 2025

      In memoria del compagno e grande filosofo Paolo Virno, scomparso il 7 novembre, per molti di noi Maestro di pensiero e di vita. Lo ricorderemo a Esc, via dei Volsci 159, lunedì 10, alle ore 11

      Succede, nella vita, che si impara a parlare una seconda, una terza volta, e ancora. A me, così è accaduto con Paolo Virno. Paolo Virno era un filosofo, quindi un artista delle parole. Uno che afferrava cristalli di pensiero, un’idea di mondo, nelle regole grammaticali. Uno che non aveva mai perso di vista ciò che conta, ovvero che pensiero e prassi sono tutt’uno con le preposizioni: “con”, “tra”, “fra”. Si agisce e si pensa con le altre e gli altri, tra le altre e gli altri, fra una cosa e l’altra. Nel mezzo – senza principio né fine.

      Aula 6 di Lettere, Sapienza, primavera del 1998. Per ricordare l’anno 1968, presentavamo il libro di Bifo dedicato a Potere Operaio. Comparve Paolo. Il corpo, senz’altro – così alto. Ma il corpo con la parola, con una parola che sapeva farsi corpo con i gesti delle mani, con la voce e il suo volume cangiante, imprevedibile. Filosofo del linguaggio, del linguaggio di Paolo mancava qualcosa senza vedere le mani, e la braccia, con quei movimenti ampi, quasi preparassero la scena dell’enunciato. «L’inserzione del linguaggio nel mondo», avrebbe detto lui.

      Certo Paolo era stato un militante sovversivo, un «marxista non pentito», un «comunista non di sinistra». E l’aveva pagata cara, la sua militanza, negli anni della controrivoluzione e della carcerazione preventiva senza sosta. Le parole di Paolo erano parole, ma c’era dietro pure la vita di una generazione che aveva tentato la rivoluzione. «Sconfitta», diceva. Vero, ma a che prezzo? La controrivoluzione italiana, per vincere, ha dovuto imporre, manovra finanziaria dopo manovra finanziaria, il declino del Paese.
      Se oggi l’Italia è fanalino di coda in Europa per quel che riguarda i salari, se l’economia sopravvive con il terziario low cost e l’edilizia che manda gli ultrasessantenni a crepare sui ponteggi, se duemila giovani formati al mese se ne vanno, è perché c’è voluta dedizione efferata per sconfiggere la rivoluzione.

      Con Paolo inventammo, a Esc, la Libera Università Metropolitana. Con Paolo, con Toni, con Franco, con Benedetto. E tante e tanti. Il primo seminario fu subito dopo l’occupazione di via dei Reti 15, primavera del 2005. Lo spazio era ancora disagevole, usavamo una stanzetta spoglia. Discutemmo di azione innovativa, secondo Paolo. Non riguarda il genio, l’eroe, il visionario l’azione innovativa, no. Ha a che fare con quel vivente che, per vivere, deve di volta in volta mettere in forma la propria vita, creare, in cooperazione con altre e altri, le condizioni della propria esistenza. Necessaria, l’azione innovativa, ogni qual volta si tratta di applicare la regola condivisa a un caso singolo; applicandola, tutto sommato, la regola la facciamo anche di nuovo. Differenza nella ripetizione. O anche: variazione storica della natura eterna che, per Paolo, sono le nostre facoltà specie-specifiche.

      L’accademia italiana, ovvero del Paese fallito per la controrivoluzione, ha accolto Paolo tardivamente. Non poteva che andare così. Con le sue opere tradotte in tutto il mondo, la pensione lo ha raggiunto presto – troppo. Ma gli studenti lo hanno amato, in Calabria e poi a Roma Tre. Piccoli e grandi, tutti imparavano a parlare di nuovo, con lui. Ogni corso, ogni lezione, imponeva di pensare in grande, di pensare sul serio. Nonostante l’ANVUR e la VQR, o altri acronimi che hanno per obiettivo l’umiliazione della vita associata.

      Paolo era alla ricerca del sindacato rivoluzionario del lavoro precario, sottopagato, migrante. Se – folli – abbiamo fondato le Camere del Lavoro Autonomo e Precario, lo dobbiamo anche a quel documento, con diversi discusso, ma da lui scritto più di vent’anni fa («Che te lo dico a fare?»). Non ha mai smesso di essere operaista, a costo di portare il broncio alle movimentazioni recenti. Non che non riconoscesse il ruolo della finanza, l’importanza della rendita immobiliare, la guerra e le sue politiche di bilancio: cercava l’estorsione di plusvalore, Paolo, sempre. A pensarci bene, era un modo per continuare a pensare il due, il «doppio potere», la «città divisa». Filosoficamente: il possibile del reale.

      Ora, senza Paolo, vicini a Raissa, si tratterà di cercare ancora «le parole per dirlo» – proprio quelle, non altre. E sarà impervio, ma occorre provarci.

    • Faire de la philosophie avec Paolo Virno
      https://www.multitudes.net/faire-de-la-philosophie-avec-paolo-virno`
      Entretien avec Michel Valensi

      Michel Valensi : Depuis ton premier livre, Convention et matérialisme (non traduit en français) qui date de 1986, et même depuis tes premiers écrits plus politiques des années 1970, jusqu’à ce dernier livre qui paraît aujourd’hui en français sous le titre Et ainsi de suite. La régression à l’infini et comment l’interrompre, consacré à la philosophie du langage, un long chemin a été parcouru. Pourrais-tu en rappeler les étapes principales ? (Ce qui revient à raconter ta vie d’une manière ou d’une autre…)

      Paolo Virno : J’ai commencé à m’occuper de philosophie de manière systématique à la suite d’une défaite politique. Je parle de la défaite des mouvements révolutionnaires qui ont occupé la sphère publique en Occident entre la mort de John Kennedy et celle de John Lennon, donc du début des années 1960 à la fin des années 1970. Ces mouvements, qui ont, d’emblée, éprouvé une véritable aversion pour le socialisme réel tel qu’il pouvait s’incarner dans l’Union soviétique, avaient utilisé Marx en dehors et contre la tradition marxiste, en la mettant en contact direct avec les luttes en usine et la vie quotidienne des sociétés développées. Un Marx lu en même temps que Nietzsche et Heidegger, et mis à l’épreuve de Weber et de Keynes.

    • Quelques notes à propos du general intellect, Paolo Virno, Futur Antérieur, 1992
      http://pinguet.free.fr/virno1992.pdf

      Pour en réactiver la puissance politique, il importe de mettre en oeuvre une critique de fond du « Fragment ». Ce sera celle-ci : Marx a identifié totalement le general intellect (ou encore le savoir en tant que principale force productive) au capital fixe, négligeant ainsi le côté sous lequel le même general intellect se présente au contraire comme travail vivant. Ce qui est précisément aujourd’hui l’aspect décisif.

      La connexion entre savoir et production, en effet, ne s’épuise pas dans le système des machines, mais s’articule nécessairement à travers des sujets concrets. Aujourd’hui, il n’est pas difficile d’élargir la notion de general intellect bien au-delà de la connaissance qui se matérialise dans le capital fixe, en y incluant aussi les formes de savoir qui structurent les communications sociales et innervent l’activité du travail intellectuel de masse. Le general intellect comprend les langages artificiels, les théories de l’information et des systèmes, toute la gamme des qualifications en manière de communication, les savoirs locaux, les « jeux linguistiques » informels et même certaines préoccupations éthiques. Dans les processus de travail contemporains, il y a des constellations entières de concepts qui fonctionnent par elles-mêmes en tant que « machines » productives, sans avoir besoin ni d’un corps mécanique, ni même d’une petite âme électronique.

      Nous appelons intellectualité de masse le travail vivant en tant qu’articulation déterminante du « general intellect ». L’intellectualité de masse – en son ensemble, en tant que corps social – est dépositaire des savoirs non divisibles des sujets vivants, de leur coopération linguistique. Ces savoirs ne constituent en aucune manière un résidu, mais une réalité produite justement par l’affirmation inconditionnée du « general intellect » abstrait. C’est précisément cette affirmation inconditionnée qui implique qu’une part importante des connaissances ne peut se déposer dans les machines, mais doit se manifester dans l’interaction directe de la force de travail. On se trouve face à une expropriation radicale, qui ne peut pourtant jamais se résoudre en une séparation complète et définitive.

      #general_intellect #travail_vivant #Intellectualité_de_masse

    • Paolo Virno, la métropole et l’organisation du conflit de classe (2005, pour la IVeme Internationale ah ah ah)
      https://www.revolutionpermanente.fr/Paolo-Virno-la-metropole-et-l-organisation-du-conflit-de-classe

      Sans la mobilisation du travail précaire, je crois que la situation de la lutte de classes italienne ne bougera pas.

      Le problème fondamental, c’est les formes d’organisation de ceux qui, par définition, sont ceux qui aujourd’hui ne semblent pas pouvoir être organisés, c’est-à-dire les travailleurs précaires. Pour organiser le travail précaire, il faut mobiliser la culture, les formes de vie, les goûts esthétiques, les inclinations éthiques, c’est-à-dire le monde de la vie comme le disent certains philosophes. Voilà le pari. Le travail précaire est semblable à une dimension complexive de l’existence.

      Alors je crois que le jeune ouvrier, et la jeune ouvrière surtout, de [Fiat] Melfi, montrent par leur condition et à travers leurs formes de lutte qu’ils viennent d’expérimenter une condition plus générale, commune aux travailleurs précaires. Ils sont la pointe d’un iceberg, même s’ils disposent d’un boulot relativement stable. Je crois que cette émergence, les autoferrotranvieri, les luttes de Melfi, sont comme une prémisse ou un symptôme de la mobilisation du travail social précaire. Et j’ajoute, précaire et également intellectuel. Par intellectuel je n’entends pas les gens qui ont fréquenté l’université, j’entends aussi ceux qui réalisent les tâches les plus humbles et mobilisent les capacités cognitives et linguistiques de notre espèce. Je n’entends pas par intellectuel une sorte de spécialisation, de qualification particulière, mais une expérience de travail qui comprend toujours, d’une manière fondamentale, l’utilisation des capacités linguistiques et cognitives de notre espèce. Alors je pense l’immigré ou le jeune précaire comme intellectualité de masse, à condition d’entendre intellectualité de masse par ce que je viens de définir.

      (...) pour nous, le « general intellect », le cerveau social, c’est la coopération du travail vivant (...)

      #classe_ouvrière #multitude #communisme