• #Maladie_de_Parkinson : 2 fois plus de cas en 25 ans
    https://www.santepubliquefrance.fr/liste-des-actualites/maladie-de-parkinson-2-fois-plus-de-cas-en-25-ans

    La France fait partie des pays qui utilisent le plus de produits phytopharmaceutiques au monde, et environ 90% sont dédiés à l’usage agricole.

    Jusqu’à aujourd’hui aucune étude n’a évalué l’excès de risque de maladie de Parkinson parmi la population agricole française et peu d’études ont porté sur le rôle de l’exposition non-professionnelle en population générale.

    L’incidence de la maladie de Parkinson est plus élevée chez les exploitants agricoles qu’en population générale (+13%) :- +10% dans le secteur de la #viticulture comparé aux autres secteurs agricoles- l’incidence augmente avec la taille des surfaces agricoles.

    Des résultats qui justifient une surveillance accrue de la maladie chez les #agriculteurs et la poursuite d’études sur le rôle de l’exposition non professionnelle aux #pesticides en population générale.

  • COVID-19 : Sommes-nous à nouveau induits en erreur par les entreprises pharmaceutiques ?
    https://www.investigaction.net/fr/covid-19-sommes-nous-a-nouveau-induits-en-erreur-par-big-pharma

    En mars 2020, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré que l’épidémie de COVID-19 était une pandémie. Ce n’est pas une première foi. Dans un passé récent, l’OMS avait annoncé en juin 2009 que le H1N1 – connu aussi sous le nom de grippe porcine – était aussi une pandémie. Entre ces deux pandémies, de nombreux faits ont été négligés et il convient d’y revenir.


     
    Après l’épidémie de H5N1 (la grippe aviaire) et au début de celle de H1N1, les entreprises pharmaceutiques transnationales se sont lancées dans une compétition féroce pour fournir des traitements en l’absence de vaccins.

    Entre 2005 et 2009, l’antiviral oseltamivir, commercialisé par Roche sous le nom de Tamiflu, a réussi à être reconnu comme le médicament de choix pour la prévention et le traitement par plusieurs organismes internationaux tels que l’OMS, le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis d’Amérique et l’Agence européenne des médicaments.

    A cette époque, afin de préparer une “éventuelle opération de confinement”, l’OMS a reçu de Roche un don de trois millions de traitements d’oseltamivir destinés à constituer une réserve, selon le rapport du Comité d’examen du fonctionnement du Règlement sanitaire international (2005) en relation avec la pandémie de 2009 (H1N1) 2009, publié par l’OMS.

    L’OMS a encouragé les pays à introduire des plans de confinement rapide dans leurs mécanismes nationaux de préparation aux pandémies de grippe, selon le même rapport. En outre, l’OMS a élaboré dans le même but un “protocole de confinement rapide” reposant essentiellement sur l’oseltamivir.

    Comme il fallait s’y attendre, sous l’effet d’une panique globale de grande ampleur, Roche a reçu des commandes venues de pays du monde entier, notamment de l’Égypte. Des recherches ultérieures et la littérature révèlent que les décisions d’achat reposaient sur des essais cliniques financés par Roche, dont les résultats, selon les experts, étaient limités et incomplets, surtout en ce qui concerne l’efficacité et les effets secondaires du Tamiflu, dont certains se sont par la suite révélés dangereux.

    En outre, certaines informations fausses laissaient prévoir une flambée incontrôlable de l’infection. Une étude Cochrane a révélé que les bénéfices de l’oseltamivir étaient faibles en ce qui concerne la diminution des symptômes, car ce médicament ne réduisait leur durée que d’une demi-journée tout au plus.

    Les auteurs de cette étude, qui se sont arrangés pour obtenir les rapports complets des recherches cliniques originales, ont également pu se faire une idée plus claire des effets secondaires de l’oseltamivir. A la fin, l’étude Cochrane a posé la question de savoir si la constitution de réserves d’oseltamivir était justifiée.

    On peut voir ce qui précède sous un autre angle.
    Les entreprises pharmaceutiques font en général pression sur les gouvernements lors de telles crises. Durant la pandémie de H1N1, la méthode adoptée par Roche a consisté essentiellement à persuader les gouvernements de signer des conventions d’achat de Tamiflu car, à l’époque, les premiers arrivés étaient les premiers servis.

    Il est à relever que ces négociations ont eu lieu dans un contexte de tension mondiale et de compétition inavouée entre les pays pour se procurer le traitement le plus vite possible à une même et unique source.

    Une telle situation démontre la gravité des pratiques monopolistiques du marché pharmaceutique mondial. La probabilité de voir se répéter ce scénario est d’autant plus grande que les pays continuent à négocier l’accès aux médicaments sur un marché monopolistique, comme le prouve l’achat par les États-Unis à Gilead Sciences de tout le stock existant de remdesivir et les conventions d’achat préalables de vaccins potentiels par plusieurs pays européens.

    A l’époque, les ventes d’oseltamivir avaient dépassé les 18 milliards de dollars étasuniens, payés pour moitié par les gouvernements. Les États-Unis ont par exemple dépensé plus de 1,5 milliard de dollars pour constituer des stocks d’oseltamivir, en se fondant sur les recommandations du CDC, alors que le Royaume-Uni a dépensé pour sa part 770 millions de dollars étasuniens pour ce même médicament entre 2006 et 2014.

    Aucune donnée officielle n’est disponible concernant la somme totale dépensée par l’Égypte pour acheter de l’oseltamivir. Quelques informations ont cependant fait état d’un accord entre le ministère de la santé et Roche pour la livraison de 2 500 kg de l’ingrédient pharmaceutique actif de ce médicament, à fabriquer par une succursale de la faîtière pharmaceutique, dont le président a estimé la valeur à environ 100 millions de livres égyptiennes.

    L’OMS est une organisation intergouvernementale qui doit, à ce titre, rendre des comptes à ses États membres. En 2010, ces États membres ont évalué les performances de l’OMS qui avait déclaré que la grippe H1N1 était une pandémie. Cette décision avait suscité les réserves de la communauté scientifique internationale et des milieux politiques, qui estimaient qu’elle avait été prématurée, provoquant une confusion mondiale et coûtant des millions de dollars aux budgets des pays.

    Ce qu’il est important de relever à propos de la lutte contre la COVID-19 est qu’il n’y a pas de “nouveau” médicament qui ait été expérimenté contre le virus. Ceux qui font l’objet d’études sont connus ou sont déjà sur le marché. Les essais auxquels ils sont soumis visent à démontrer qu’ils ont un effet spécifique contre le virus SARS-CoV-2 qui provoque la COVID-19.

    Ce repositionnement ou cette réorientation de médicaments existants constitue une pratique courante dans la recherche en cas de flambées épidémiques soudaines. En outre, qui plus est, la recherche et le développement pharmaceutiques ne produisent plus de substances pharmaceutiques “nouvelles”, se contentant le plus souvent d’améliorer des produits existants ou de leur ouvrir des indications supplémentaires.

    Les essais cliniques menés par l’OMS ont débuté avec quatre propositions de traitement, pour la plupart fort coûteux. Trois mois après le début déclaré de la pandémie, la compétition s’est réduite à deux médicaments : le remdesivir, produit par Gilead Sciences, et le favipiravir, produit par FUJIFILM Toyama Chemical, sous le nom commercial d’Avigan, dont il a été rapporté plus tard qu’il n’avait pas montré d’effet convaincant dans certains essais contre le coronavirus, ce qui a repoussé son approbation jusqu’à la fin des essais.

    En mars dernier, avec l’épidémie de COVID-19, la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis a décidé d’accorder au remdesivir le “statut de médicament orphelin”, qui assure normalement à l’entreprise productrice toute une série de droits exclusifs en plus des droits de propriété intellectuelle.
    Cette décision a été accueillie avec surprise et scepticisme dans les milieux spécialisés du monde entier, en raison de sa teneur et de son calendrier.

    Selon les définitions qu’en donnent tant l’OMS que le droit étasunien, les maladies orphelines sont celles qui affectent un petit nombre d’individus d’une manière qui n’incite pas à la mise au point de médicaments pour les traiter, ce qui justifie aussi le prix potentiellement élevé de leur traitement.

    La COVID-19, déclarée pandémie, est tout le contraire d’une maladie orpheline et la désignation comme “médicament orphelin” révèle l’intention de l’entreprise de maximaliser les ventes et les bénéfices du remdesivir une fois que la FDA l’a approuvé.
    Avec l’augmentation du nombre de cas diagnostiqués aux États-Unis d’Amérique, des pressions croissantes ont conduit Gilead Sciences à retirer sa désignation de médicament orphelin. Quelques semaines plus tard, le remdesivir a été approuvé par la FDA pour utilisation en cas d’urgence sur des patients atteints de COVID-19, à la suite de quoi l’entreprise a fait un don de 1,5 millions de traitements au gouvernement étasunien.

    A la mi-avril, les médias ont rapporté que le gouvernement égyptien avait convenu avec FUJIFILM Toyama Chemical d’utiliser le favipiravir (Avigan) pour le traitement de la COVID-19 en Égypte. Cet accord ne s’est jamais matérialisé, car quelques semaines plus tard le ministre de la santé a annoncé que l’Égypte participerait à l’essai clinique du remdesivir coordonné par l’OMS.

    Entretemps, l’entreprise égyptienne Eva Pharma a signé un accord de licence volontaire non-exclusif avec Gilead pour la fabrication de remdesivir destiné à être distribué dans 127 pays. Actuellement, l’approvisionnement en Égypte et limité à l’aide aux patients hospitalisés en quarantaine.
    Une préoccupation croissante a commencé à se manifester sur le plan mondial face à la précipitation avec laquelle on a compté sur le remdesivir avant que son efficacité soit démontrée, d’autant plus que les résultats des essais publiés montrent qu’il n’y a aucun bénéfice thérapeutique ayant la moindre signification statistique.

    Des demandes de brevet ont été déposées pour le remdesivir dans de nombreux pays et certaines ont déjà été accordées. Le bureau des brevets égyptien a rejeté la demande pour le remdesivir en 2017 pour des raisons techniques, mais la décision finale reste en suspens car le demandeur a fait appel.

    Gilead a récemment fixé le prix du traitement par le remdesivir (6 flacons) à 3 120 dollars étasuniens pour les privés et à 2 340 dollars pour les régimes d’assurance nationaux aux États-Unis d’Amérique. Le prix de ce médicament est exorbitant et ne peut être justifié ni par les coûts de recherche et de développement, car il ne s’agit pas d’un nouveau composé, qui n’a donc pas été breveté dans plusieurs pays.

    Par ailleurs, la recherche a démontré que le coût de production du remdesivir pourrait ne pas dépasser 5,58 dollars par traitement. D’ailleurs, l’entreprise pharmaceutique indienne Cipla a annoncé qu’elle produirait une version générique du remdesivir au prix d’environ 400 dollars étasuniens.

    A la lumière des taux élevés d’incidence et de mortalité de la COVID-19, ainsi que des pressions exercées sur les gouvernements pour qu’ils prennent des mesures destinées à protéger leurs peuples, on assiste à une compétition entre les entreprises pharmaceutiques pour préserver leurs parts d’un marché mondial lucratif.

    Cette compétition se manifeste par des tentatives d’enrôler de grandes quantités de patients dans des essais cliniques hâtivement menés pour faire la démonstration de résultats favorables, ou défavorables, à un médicament donné, pour signer des conventions d’achat préalables avec des gouvernements, comme c’est le cas actuellement entre Gilead et le gouvernement étasunien, et pour chercher à faire enregistrer les brevets dans le plus grand nombre de pays possible afin d’y obtenir des droits exclusifs, notamment la possibilité de vendre le médicament au prix le plus élevé possible.

    Au milieu de la crise actuelle, dont les répercussions économiques et sociales au niveau mondial sont sans précédent, il est préoccupant d’assister au retour du scénario H1N1. Les gouvernements se lancent une fois de plus dans des “achats de panique” et accumulent de manière irrationnelle des stocks de médicaments, dont aucun n’a fait la preuve de son efficacité contre la COVID-19. Ne tire-t-on vraiment aucun enseignement du passé récent ?
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  • #Souffrance_au_travail à #Campus_France : le coût social du « #soft_power »

    Plusieurs salariés de l’agence Campus France dénoncent un management agressif dans un contexte de réduction des effectifs, alors que la structure chargée de la promotion de l’#enseignement_supérieur français à l’étranger fait face à de multiples #procédures_judiciaires. La direction parle de litiges isolés.

    Pour se rencontrer, cela n’a pas été simple. Ces salariés ou ancien salariés de Campus France réunis ce jour de printemps autour d’une table sont tous hospitalisés en psychiatrie après des #dépressions sévères et doivent presque chaque jour se faire soigner pour ne pas vaciller davantage. « J’ai deux enfants, c’est dur pour eux de me voir comme ça », glisse Laura Foka, ancienne cadre du service communication. Ils dénoncent tous un #management_toxique qui les rend malades.

    Campus France est un établissement public industriel ou commercial (#Epic) chargé de la #promotion de l’enseignement supérieur français à l’étranger ainsi que de l’accueil des étudiants et des chercheurs étrangers en France, sous la double tutelle du ministère des affaires étrangères et du ministère de l’enseignement supérieur. Ces Epic, qui ont fleuri ces dernières décennies en marge de l’#administration_française, tirent leur financement de la puissance publique mais appliquent à leurs salariés les règles du #droit_privé.

    En mai 2018, neuf salariés de Campus France, constitués en collectif, alertent leur direction ainsi que toutes leurs tutelles dans un courrier sévère sur ce qu’ils considèrent comme une surexposition délétère aux #risques_psychosociaux : « Aujourd’hui, de nombreux salariés sont touchés par un management qui repose sur une #désorganisation_du_travail, une absence d’objectifs clairs, une extrême #violence des échanges entre la direction et certains collaborateurs. » Quelques mois après, l’un d’entre eux fait une tentative de #suicide.

    « J’étais en #dépression à cause du travail depuis deux ans, explique Ronel Tossa, salarié du service comptabilité, sous le coup d’une procédure de licenciement notamment pour « #abus_de_liberté_d’expression », qu’il conteste aux prud’hommes (ce motif a été utilisé dans d’autres procédures de #licenciement chez Campus France). J’accompagnais beaucoup de gens qui n’allaient pas bien… C’est moi qui ai fini par passer à l’acte. » Après que le Samu l’eut trouvé à son domicile, Ronel Tossa a passé deux jours dans le coma, puis est resté quatre mois hospitalisé en psychiatrie. Il continue aujourd’hui d’aller à l’hôpital trois jours et demi par semaine. Son geste ainsi que sa maladie ont été reconnus en accident et maladie professionnelle.

    La situation, cependant, n’évolue guère. En novembre 2019, Ronel Tossa, Laura Foka et deux autres salariés couchent à nouveau par écrit leurs vives inquiétudes : « Qu’attendez-vous donc pour réagir ? » Là encore, aucune réponse des tutelles ou des membres du conseil d’administration de Campus France, pourtant en copie.

    Abdelhafid Ramdani, l’un des signataires, a lui cessé d’attendre. Il entend porter plainte au pénal, notamment pour #harcèlement_moral_systémique_et_institutionnel, notion entrée dans la jurisprudence à la suite du procès France Télécom. Plusieurs autres salariés devraient, si la plainte est instruite, se constituer parties civiles.

    « J’adorais mon métier, explique Abdelhafid Ramdani, responsable informatique, en poste depuis 1997. Pendant vingt ans, et auprès de quatre chefs différents, pas toujours simples, je n’ai eu que des bons retours. Puis un nouveau manager, proche de la nouvelle direction, est arrivé et à partir de là, la situation s’est dégradée. »

    Il est en arrêt de travail depuis 2017, sa dépression a également été reconnue comme #maladie_professionnelle et sa situation a fait l’objet d’un rappel à l’ordre de l’#inspection_du_travail : « Le #risque_suicidaire qu’il avance et repris par le médecin du travail est avéré […]. Une fois de plus la direction relativise et écarte même d’un revers de main ce risque. » Avant de conclure : « Je n’omets pas que le dossier de M. Ramdani est à replacer dans un contexte plus large et qui concerne l’ensemble de l’organisation du travail de votre entreprise notamment sur les relations tendues et pathogènes existant entre la direction et un certain nombre de salariés. » Abdelhafid Ramdani a depuis porté #plainte devant les prud’hommes pour harcèlement et pour contester une #sanction_disciplinaire à son encontre et déposé une première plainte au pénal, classée sans suite en mai 2020.

    Au total, sur un effectif de 220 salariés, Campus France a dû faire face, ces dernières années, à au moins une douzaine de procédures prud’homales. Pour la direction de Campus France, interrogée par Mediapart sur ces alertes, « ces litiges isolés ne reflètent en rien une détérioration générale du climat social » au sein de l’établissement. Elle vante de son côté le faible nombre de démissions depuis la création de l’établissement en 2012 (8 sur les 190 salariés présents à l’époque), ainsi que son « souci de préserver le bien-être au travail des salariés », y compris dans la période récente liée au Covid-19. Selon nos informations, plusieurs dizaines de salariés en CDD ont néanmoins vu leur contrat s’achever brutalement à l’issue de la crise sanitaire, ce qui a fragilisé les équipes.

    Campus France rappelle également que « seules deux situations conflictuelles ont été tranchées par la juridiction prud’homale. Dans les deux cas, les salariés ont été déboutés de l’intégralité de leurs demandes, y compris celles qui portaient sur l’éventualité d’un harcèlement moral ». Contactés par Mediapart, les deux représentants des salariés au conseil d’administration ainsi que la nouvelle secrétaire du comité économique et social (CSE), qui a pris ses fonctions au printemps, abondent dans une réponse identique par courriel, estimant avoir « fait le vœu d’une construction collective plutôt que d’une opposition portant constamment sur les mêmes cas isolés et non représentatifs de l’ambiance actuelle positive de Campus France et du traitement des salariés, que ce soit pour les conditions de travail ou salariales ».

    Nombre de dossiers sont cependant en procédure. L’agence a été condamnée en mars 2019 pour #discrimination_syndicale, puis en appel, en décembre de la même année, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par ailleurs, elle fait face à plusieurs contentieux devant le tribunal administratif, soit pour contester des reconnaissances de maladie professionnelle ou d’accident du travail, portant tous sur la #santé_mentale, soit pour contester un refus de licenciement de salarié protégé. Enfin, à Montpellier, où Campus France possède une délégation, une main courante a été déposée par un salarié contre un collègue, résultat de tensions laissées en jachère pendant plusieurs années.

    Lors de l’avant-dernier conseil d’administration (CA) de l’agence le 25 novembre 2019, le représentant du ministère des finances a d’ailleurs pointé, à l’occasion d’une « cartographie des risques », le recours à au moins cinq avocats – un nombre significatif pour une structure de cette taille –, le coût financier des procédures juridiques engagées et la multiplication de ces procédures. « Ce qui veut dire que même les tutelles, alors même qu’il n’y a pas plus mauvais employeur que l’État, ont remarqué cette dérive », ironise l’un des participants, qui souhaite rester anonyme.

    « Au cours de ce CA de novembre, on m’a présenté un accord d’entreprise, signé par la direction comme les syndicats, c’est un signe clair d’apaisement, tempère Frédéric Petit, député MoDem des Français de l’étranger et membre depuis 2017 du conseil d’administration de Campus France. Que dans un effort de restructuration administrative il y ait des tensions, c’est plutôt normal. Je sais qu’il y avait des salariés isolément qui n’étaient pas bien, j’en étais conscient et cela a été exprimé au cours des conseils d’administration, surtout entre 2017 et 2018. »

    « C’est comme si le petit avait mangé le gros »

    Le collectif de salariés n’est cependant pas le seul à avoir sonné l’alarme sur le #climat_social. D’après plusieurs documents et témoignages recueillis par Mediapart, de nombreux élus du personnel, membres du comité hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), puis le CSE se sont inquiétés des tensions existantes, presque sans relâche depuis la création de Campus France, tout comme les deux inspecteurs du travail successivement en poste jusqu’en 2018.

    L’un de ces élus, bien au fait des dossiers, résume la situation ainsi : « Campus France, c’est un bateau ivre. Le management y est devenu agressif, sans imagination, et il se contente d’enterrer les dossiers ou de pousser à la faute. »

    L’histoire de Campus France explique en partie ces problèmes. L’établissement a fusionné en 2012 plusieurs organismes en une seule et unique agence : l’association #Egide, opérateur à l’époque pour la gestion des bourses et des séjours des étudiants étrangers ; le groupement d’intérêt public #EduFrance, renommé Campus France, chargé de la promotion de l’enseignement du français à l’étranger, et les activités internationales du #Centre_national_des œuvres_universitaires_et_scolaires (#Cnous). Au sein de la toute nouvelle agence Campus France, les cultures professionnelles s’entrechoquent presque immédiatement.

    Pensée pour gagner en #efficacité, l’agence agglomère différents statuts, salaires, fonctions, et des personnes issues d’organismes ayant déjà subi des réorganisations, parfois douloureuses. Dans un rapport commandé par le CHSCT de Campus France en 2016, les experts tentent de résumer la situation : celle d’une petite structure, Campus France, comparée à une start-up d’intellos faiblement hiérarchisée, d’une quarantaine de salariés, jeunes et presque tous cadres, qui a avalé une grosse association, Egide, et une partie du Cnous, où travaillaient majoritairement des employés, parfois vieillissants.

    « On a de manière intelligente et novatrice réorganisé l’administration d’État sur des objectifs, se félicite Fréderic Petit, membre, en tant que député, du conseil d’administration de plusieurs structures de ce type. On a enfin une gestion des deniers de l’État par projet, et non plus par structure, ce qui était quand même hallucinant. »

    « C’est comme si le petit avait mangé le gros », souligne pourtant, rétrospectivement, Laura Foka, dans une structure où va régner des années durant un « #mépris_réciproque » raconte également un ancien cadre dirigeant, entre « manants » et « jeunes flambeurs ».

    À l’époque, c’est donc en partie à ces #réorganisations successives que la plupart des salariés attribuent, selon ce même rapport, leurs difficultés, qui confinent aux risques psychosociaux. L’arrivée d’une nouvelle directrice à la tête de Campus France, en juillet 2015, semble avoir jeté de l’huile sur le feu.

    #Béatrice_Khaiat a passé une bonne partie de sa carrière dans les cabinets ministériels, notamment celui de l’éducation et de la culture. Proche des milieux socialistes, elle entre en 2012 dans celui du premier ministre Jean-Marc Ayrault, après avoir été directrice déléguée de Campus France, avant la fusion. En 2015, elle devient directrice générale de l’établissement, par décret du président de la République, un mandat renouvelé pour trois ans le 7 mars 2019, malgré les différentes alertes.

    Plusieurs membres de la direction quittent d’ailleurs le navire peu de temps avant sa nomination, à coup de transactions financières. D’après des courriels que nous avons pu consulter, on s’y inquiète déjà de « #harcèlement_caractérisé », d’une volonté de « faire la peau » à d’anciens membres d’Egide, de la persistance de « clans et de factions ». L’un d’entre eux a même, selon nos informations, porté #plainte contre sa directrice auprès de la police, après des propos tenus en réunion. Une plainte classée sans suite.

    Dès le départ, ses manières très directes étonnent : « Lors de la première réunion avec le personnel, Béatrice Khaiat nous a dit qu’à Campus France, on ne vendait pas “des putes ou de la coke”, une manière de souligner que notre matière était noble, se souvient un salarié, qui souhaite rester anonyme. Nous étions dirigés jusque-là par un ambassadeur, tout en retenue… Disons que c’était rafraîchissant. Mais ce mode d’expression a donné le ton sur la suite. J’ai des dizaines de témoignages d’#humiliation de salariés, de feuilles jetées à la figure… »

    Laura Foka en a fait l’expérience. À son retour de congé maternité en 2016, après avoir donné naissance à un deuxième enfant, elle participe à une réunion de service où Béatrice Khaiat plaisante sur son cas. « Au troisième enfant, je licencie », lâche la directrice. Lors d’un point d’actualité, rebelote : « Après deux enfants, il faut se remettre au travail », déclare Béatrice Khaiat devant le personnel réuni. Laura Foka se recroqueville au fond de la salle, et fond en larmes.

    « Mère de famille elle aussi, madame Khaiat a plaisanté avec l’une de ses collègues sur une expérience vécue par toutes les deux, celle d’une jeune mère devant assumer tout à la fois ses obligations professionnelles et familiales, explique aujourd’hui la direction, qui rappelle une #féminisation à 62 % de l’encadrement de Campus France ainsi qu’un score « presque parfait » à l’index de l’égalité homme-femme. Ces propos ont été repris de manière déformée. » Ils ont pourtant été confirmés par plusieurs témoignages et jugés suffisamment sérieux pour avoir fait l’objet d’un courrier de l’inspecteur du travail, qui rappelait à Campus France le risque de « #harcèlement_discriminatoire ».

    Très fragilisée par ces propos, Laura Foka se sent depuis un moment déjà sur la sellette. Dans son service communication, presse et études, c’est l’hécatombe depuis l’arrivée d’un nouveau manager. Les salariés serrent les dents, préviennent en vain les ressources humaines, attendent près d’un an et demi avant d’alerter les syndicats en 2017. Nombre d’entre eux ont des #pensées_suicidaires. Une enquête du CHSCT est déclenchée pour danger grave et imminent.

    Dans l’intervalle, cinq salariés du service, soit presque la totalité du département, quittent Campus France, « à l’américaine, leurs cartons sous le bras », raconte Laura Foka. Cette dernière pour inaptitude, qu’elle finit par accepter, de guerre lasse, face à l’inquiétude de son médecin, et deux pour faute grave ; les derniers dans le cadre de #rupture_conventionnelle, plus ou moins contrainte.

    L’une d’entre eux écrit ainsi ceci, un an plus tard, dans un courrier officiel à la DIRECCTE : « J’en suis arrivée au point de demander une rupture conventionnelle en septembre 2017 pour fuir des conditions de travail intenables et une situation devenue insupportable. » Contredisant les déclarations de la direction qui affirme que « l’intégralité des ruptures conventionnelles depuis la création de l’établissement en 2012 ont été faites à la demande des salariés qui souhaitaient partir et ont été approuvées par les administrateurs salariés ».

    Pour Zoubir Messaoudi, salarié du service informatique, la descente aux enfers professionnelle coïncide également avec l’arrivée de Béatrice Khaiat aux manettes et d’un nouveau manager au service informatique : « Mon ancien chef avait jeté l’éponge, mon N+1 était mis sur la touche. J’arrivais le premier au bureau et repartait le dernier, et pourtant, je recevais des mails où l’on me reprochait tout et n’importe quoi, comme si la direction essayait de constituer un dossier… Je viens du domaine de la prestation de service, où nous sommes clairement de la chair à canon, mais même là-bas, j’étais traité avec plus de respect. »

    Après un premier avertissement pour avoir quitté les locaux à 16 heures un jour de grève des transports (avertissement contesté aux prud’hommes, qui a tranché en sa faveur en 2018), Zoubir Messaoudi est convoqué pour licenciement en juin 2019. Sous le choc, il s’évanouit, ce qui nécessite l’intervention des pompiers et son hospitalisation en psychiatrie. Placé en arrêt de travail, il sera licencié quelques mois après pour faute grave, alors que l’arrêt court toujours, accusé de mauvaise foi vis-à-vis de son supérieur, de dénigrement de sa hiérarchie et de négligence professionnelle.

    « Durant un arrêt de travail et sous certaines conditions, l’employeur peut licencier un salarié, argumente Campus France. En l’occurrence, nous avons estimé, au vu de la gravité des faits commis par le salarié, que ces conditions étaient réunies. » Zoubir Messaoudi se souvient, lui, d’avoir passé « un sale été » l’an passé : « J’avais envie de me jeter par la fenêtre tellement j’avais mal. J’ai négligé ma femme, ma fille. » Il conteste aujourd’hui son licenciement aux prud’hommes.

    Se développer tous azimuts, trouver des recettes propres, répondre à l’ambition politique

    À quand remontent les alertes collectives ? Campus France les a-t-il ignorées ? Le premier rapport sur les risques psychosociaux, rédigé par le cabinet Orseu, agréé par le ministère du travail, est immédiatement contesté par la direction, qui remet en cause le professionnalisme des experts mandatés. Il concluait néanmoins en avril 2016 à un « risque psychosocial majeur ».

    Le deuxième rapport sur la qualité de vie au travail, rédigé par le cabinet (non agréé) Empreinte humaine un an plus tard est bien moins sévère, mais ne dément pas que l’organisation du travail puisse être améliorée. Il s’est ensuivi de séances menées par des psychologues du travail, pour que les salariés aient le moyen de s’exprimer. « Ces séances ont été l’occasion de larmes, de colère, d’insultes, rapporte un élu. Et il a fallu attendre un an et demi pour avoir un retour. Malgré nos demandes, la direction n’en a strictement rien fait. »

    Le 27 mars 2018, le CHSCT se félicite qu’une formation en droit social, de plusieurs dizaines de milliers d’euros, ait finalement été organisée à destination des managers, avant de regretter qu’elle ait été essentiellement « dédiée au processus de licenciement, à l’éventail des sanctions disciplinaires, au recueil des preuves, etc. » avant de s’interroger benoîtement pour savoir si ces formations « ne visent pas à étayer une politique de réduction de l‘effectif ». Une formation, s’insurgeaient les élus, qui abordait aussi la question « du licenciement des salariés protégés ».

    Deux autres enquêtes, à la suite d’alertes pour danger grave et imminent, ont donné lieu à des passes d’armes. La première, lancée par le CHSCT (où sont représentés direction et élus du personnel) au sujet de Ronel Tossa, aboutit à deux rapports divergents, l’un de la direction et l’autre des élus. C’est pourtant le premier que transmettra Campus France au juge en charge de trancher sur la légalité de son licenciement, le présentant comme le rapport du CHSCT, ce que ne manqueront pas de contester les élus de l’époque ainsi que le salarié concerné.

    Le ministère du travail lui-même, sollicité sur le licenciement de Ronel Tossa, mandaté par la CFDT comme délégué du personnel, a débouté l’établissement public en février 2019, reprenant les mots de l’inspecteur pour justifier sa position. Dans un mémoire auquel nous avons eu accès, il parle d’une « organisation pathogène volontaire » où le cas de ce salarié est à « replacer dans le contexte global de cette société, une hiérarchie qui dénie tout droit à ses salariés et qui a organisé un système de #souffrance_au_travail ».

    Campus France a fait appel de cette décision et assure avoir « contesté ces propos dans le cadre d’un recours hiérarchique mettant en cause l’impartialité de l’inspecteur du travail ». L’agence a manifestement eu gain de cause, car cet inspecteur a depuis été remplacé, au grand dam de plusieurs salariés. La direction enfonce d’ailleurs le clou : « Aucune situation correspondant à du harcèlement moral n’a été retenue et aucune mesure en conséquence n’a été prise par l’inspection du travail. »

    Elle se félicite également qu’aucune alerte pour danger grave et imminent n’ait été déclenchée depuis 2018. Même son de cloche auprès des salariés du conseil d’administration et de la secrétaire du CSE : « Le personnel Campus France a tourné la page depuis longtemps – sachant que la grande majorité ignorait ces #conflits_sociaux – afin de poursuivre la construction d’une véritable #culture_d’entreprise qui a pu être en défaut lors de la création de l’EPIC par la fusion en 2012 de deux entités distinctes et avec des fonctionnement différents. »

    Or pour cet ancien élu, très au fait de tous ces dossiers, la direction n’a pas cessé de vouloir au fil des ans « casser le thermomètre ». Lors d’une réunion du CHSCT, où sont évoquées la situation d’Abdelhafid Ramdani et la nécessité de déclencher une nouvelle #alerte pour #danger_grave_et_imminent (la médecin du travail évoquant le risque suicidaire), le directeur des ressources humaines explique ainsi à l’assemblée sidérée que « tout le monde meurt un jour ». « Après plusieurs tergiversations, on a quand même obtenu une enquête, élargie à toute la direction informatique », poursuit l’élu présent ce jour-là, sans trop y croire. « Les gens savaient que ceux qui étaient en conflit avec la direction étaient virés ou au placard, et donc ils se sont tus. » De fait, ce deuxième rapport ne conclut pas à un quelconque harcèlement.

    La médecin du travail elle-même, ont raconté à plusieurs reprises les salariés, se contente souvent de renvoyer la souffrance dos à dos, et évoque le décès, en 2015, d’Elsa Khaiat (parfois orthographié Cayat), la sœur de Béatrice Khaiat, lors de l’attentat de Charlie Hebdo, pour expliquer une forme d’emportement de la directrice générale. Le service de presse de Campus France fera d’ailleurs de même, en préambule de ses réponses à nos questions, pour nous décrire une « femme entière », issue d’une « famille engagée ».

    Plus profondément, ce que redoutent certains élus et salariés, c’est une forme de dégraissage déguisé des #effectifs, alors qu’une première vague de départs a déjà eu lieu lors de la fusion, en 2012. Cinq ans plus tard, en 2017, l’expert du comité d’entreprise s’inquiète d’une hausse des ruptures conventionnelles et d’une enveloppe dédiée à ces départs de 150 000 euros.

    « Un #abus_de_droit », soutien ce même expert, qui rappelle la mise sur pied par le gouvernement d’un « nouveau dispositif de rupture conventionnelle collective pour éviter des dérives ». Ce même expert, en septembre 2019, revient à la charge : « La première cause des départs sont les ruptures conventionnelles, qui représenteraient 30 % des départs sur les quatre dernières années », soit 31 postes en CDI. Tous ont été « homologués par l’inspection du travail », se défend Campus France, qui parle de « faits erronés », sans plus de précisions et assure que son équipe a maintenu les effectifs à flot, depuis la fusion.

    Mais à plusieurs reprises, le message envoyé aux salariés est clair : « La porte est grande ouverte », dira même un représentant de la direction lors d’une réunion avec les délégués du personnel, en mars 2017. Lors d’un pot de départ d’une salariée à l’occasion d’une rupture conventionnelle, à l’extérieur des locaux de Campus France, Béatrice Khaiat prend la parole, et incite, selon des témoins de la scène, les salariés à faire de même : « Faites comme elle, d’ailleurs, c’est magnifique ! », s’enthousiasme la responsable.

    « La direction, en CHSCT, devant l’inspecteur du travail et au cours de points d’information, a fait savoir, à de multiples reprises, que la porte était “grande ouverte”. Cela n’a jamais été un incident isolé, mais des propos récurrents », témoigne Ambroise Dieterle, secrétaire du CSE jusqu’en mai 2020, aujourd’hui en reconversion professionnelle.

    La question financière n’est pas étrangère à cette tendance. Un an après son arrivée, la directrice générale l’annonce aux élus : la #masse_salariale est trop importante au vu du #budget dont elle dispose, et devra être amputée d’un million d’euros. Les départs auront lieu, au fil de l’eau, alors même que l’agence doit se développer tous azimuts, trouver des recettes propres, et répondre à l’ambition politique. Derniers en date, le « #Make_our_planet_great_again », d’Emmanuel Macron, initiative qui a fortement mobilisé Campus France, ou encore le récent programme #Al-Ula, accord de coopération entre la France et l’Arabie saoudite.

    « C’est une question de dosage dans sa mission d’intérêt public, rappelle un ancien haut dirigeant de Campus France. Un Epic comme Campus France doit faire des recettes mais reste soumis à un agent comptable public. On a toutes les contraintes du droit privé, très contraignant, et celles de la comptabilité publique, extraordinairement lourdes. »

    Pour un ancien salarié œuvrant dans la gestion des bourses étudiantes, qui vient de quitter Campus France avec pas mal d’amertume, le problème réside plutôt dans ce que tout le monde « vienne prendre commande » chez Campus France, ministères, université, grandes écoles. Or l’arbitre à la toute fin, « c’est Bercy [le ministère des finances – ndlr] ». Quitte à une perte de sens dans les missions, poursuit-il : « Nous étions des fluidificateurs pour les étudiants, nous sommes devenus des auxiliaires de police, des collectionneurs de pièces. Notre image auprès d’eux, et des ambassades, se dégrade considérablement. »

    La critique n’est pas neuve. En 2012, un article du Monde racontait les débuts chaotiques de l’agence Campus France, ses tarifs devenus élevés, et ces étudiants étrangers, livrés à eux-mêmes à leur descente de l’avion. Quelques jours plus tard, le président du conseil d’administration Christian Demuynck (membre des Républicains) présentait même sa démission, critiquant une « gestion sans stratégie ni ambition de l’établissement par quelques fonctionnaires des tutelles nuisant gravement tant à son indépendance qu’à la qualité de son travail ».

    Dans la même lettre, que nous avons pu consulter, il rajoutait ceci : « J’espère que ma démission sera l’occasion pour l’État de mener un examen nécessaire des établissements publics qui sont nombreux, comme Campus France, à subir un tel mode de gestion. » Tout comme leurs salariés, sommés de suivre, parfois dans la douleur.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/080720/souffrance-au-travail-campus-france-le-cout-social-du-soft-power?onglet=fu
    #travail #conditions_de_travail

  • VELINGARA Distribution de l’aide alimentaire : Le virus est dans le Registre national unique | Lequotidien Journal d’informations Générales
    https://www.lequotidien.sn/velingara-distribution-de-laide-alimentaire-le-virus-est-dans-le-registr

    Autre localité, autre problème. Dans la commune de Vélingara, ce sont des femmes membres de familles ayant un des leurs à l’étranger qui se sont plaintes d’avoir été injustement écartées des heureux bénéficiaires. « Pour la simple raison qu’un fils ou un époux est à l’étranger, oubliant que ceux-ci sont aussi, ou plus, durement impactés par la maladie. Nos époux et enfants n’envoient plus rien. Ils ne travaillent plus ou sont confinés. Malgré mon insistance, le délégué de quartier a refusé d’enrôler le moindre ménage d’émigré », s’est plainte Fatoumata Danso, épouse d’émigré. C’est en réponse à cette complainte d’une quarantaine de familles d’émigrés que le secrétaire général du Rassemblement pour la citoyenneté et le développement (Rcd), Ibrahima Barry, a décidé de venir en appui à 35 de ces ménages. Comme il l’a auparavant fait avec les griots, les photographes, les disc-jockeys, « jakarta men », chauffeurs et cochers dont les activités sont ralenties par la pandémie

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#famille#sante#aidealimentaire#maladie

  • « Il faut impliquer les personnes touchées dans la réponse à cette maladie », Peter Piot
    L’accroche en une « Nous devons vivre avec le Covid-19, comme nous vivons avec le VIH ».
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/06/11/peter-piot-il-faut-impliquer-les-personnes-touchees-dans-la-reponse-a-cette-

    Directeur de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, le médecin et microbiologiste belge Peter Piot a été nommé conseiller de la présidente de la Commission européenne pour la recherche sur le Covid-19. Propos recueillis par Paul Benkimoun

    Entretien. Directeur de la London School of Hygiene & Tropical Medicine, le médecin et microbiologiste belge Peter Piot fut l’un des codécouvreurs du virus Ebola, avant d’être à la tête de l’Onusida (Programme commun des Nations unies sur le VIH-sida), de 1995 à 2008. Récemment nommé conseiller de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, pour la recherche sur le nouveau coronavirus, il a été lui-même sévèrement touché par le Covid-19.

    Quel regard portez-vous sur la manière dont le monde a réagi face au Covid-19 ?

    Ce que le Covid-19 nous a montré, c’est l’importance d’un leadership et d’avoir un bon système de santé publique préexistant. A part Singapour, Taïwan et Hongkong, tout le monde a sous-estimé l’ampleur et la vitesse avec lesquelles le virus pouvait se répandre. Les nations asiatiques avaient conservé le mauvais souvenir de l’épidémie de SRAS [syndrome respiratoire aigu sévère] en 2003 et étaient plus sensibilisées. Ils ont réagi en conséquence. Les pays qui ont immédiatement mis en place des dispositifs de dépistage ont eu le moins de décès. L’Allemagne a montré le chemin. Dès la fin janvier, elle disposait d’un test diagnostique et n’a pas attendu d’avoir beaucoup de cas pour l’utiliser à grande échelle.

    A l’autre extrême, le Royaume-Uni a réagi tardivement et a commencé à parler de mise en quarantaine pour les voyageurs quand le nombre de cas était en diminution. C’était trop et trop tard. En France comme de l’autre côté de la Manche, les stocks de masques constitués après la pandémie grippale [A(H1N1)] de 2009-2010 ont disparu des budgets. Et il y a eu un sous-investissement dans la santé publique.

    Vous évoquiez le reflux de la pandémie. Pourrions-nous en être bientôt débarrassés ?

    Nous ne sommes qu’au début de l’épidémie. Il n’y a aucune raison qu’après avoir atteint cette ampleur, elle disparaisse spontanément. Nous n’avons pas encore une immunité de groupe, même en Suède, où la stratégie qui misait là-dessus a échoué. Ce n’est que dans un an ou deux ans que nous pourrons faire le bilan de la riposte qui aura été la plus efficace.

    La situation dans le monde, mais aussi à l’intérieur des frontières nationales est hétérogène…

    Cette pandémie est un ensemble de nombreuses épidémies locales. Toutes les régions d’un pays ne sont pas touchées uniformément. L’action doit donc être locale ou régionale. La majorité des pays relâchent les mesures de distanciation physique. Des flambées épidémiques sont probables, mais pas de grande ampleur dans l’immédiat. Nous ne devons pas adopter une approche « bulldozer » et fermer tous les pays, mais cela suppose un niveau d’information en temps réel, très précis et très local, sur l’épidémie, afin de la maîtriser.

    Donc, cela implique de vivre avec le Covid-19…

    Oui, nous devons vivre avec le Covid-19, comme nous vivons avec le VIH. Nous devons admettre que l’éradication de ce virus n’est pas réalisable actuellement. La seule maladie infectieuse qui ait été éradiquée est la variole, et nous n’en sommes pas très loin avec la polio. Mais c’est tout.
    Si nous ne contrôlons pas le Covid-19, le système de santé ne peut fonctionner normalement. Il nous faut donc une approche de réduction des risques en minimisant l’impact de cette maladie et en réfléchissant à ce que nos sociétés sont prêtes à accepter pour cela.

    Il n’est pas possible de revenir au même confinement, pas tous les deux mois… Il a des effets secondaires énormes et des répercussions sur les autres pathologies : une surmortalité par infarctus du myocarde, AVC, cancer, faute d’accès aux soins essentiels ; il y a un fort retentissement sur la santé mentale. Sans parler des problèmes économiques. Vivre avec le Covid-19, cela signifie trouver des compromis entre la protection de la population et ne pas aggraver les problèmes. Il est nécessaire de modifier les comportements à grande échelle sur le port du masque, le lavage des mains et la distanciation physique. Dans beaucoup de pays, l’épidémie a surtout touché les maisons de retraite, les hôpitaux, les foyers des travailleurs du secteur de la santé et les prisons. Nous devons concentrer nos efforts sur ces lieux.

    Comment le continent africain va-t-il faire face à la pandémie ?

    Les épidémies voyagent. Il n’y a pas de raison que celle-ci évite l’Afrique. Le Covid-19 s’est pas mal implanté, notamment en Afrique du Sud, dans la région du Cap, mais ce n’est pas aussi spectaculaire qu’en Europe ou dans les Amériques. Est-ce une simple question de temps ? Le fait d’avoir une population plus jeune, en moyenne, que celle du Vieux Continent pourrait jouer. Des facteurs climatiques pourraient-ils atténuer le risque ? Nous l’ignorons. Reste que les mesures de distanciation physique ne sont pas applicables dans les grands townships, comme Khayelitsha, en Afrique du Sud, Kibera, au Kenya, ou dans les grandes villes africaines surpeuplées.
    C’est le même problème en Inde. A Bombay, les cas explosent, certains hôpitaux placent deux malades par lit… Hongkong a une densité de population très élevée, mais ses habitants vont plus loin que les recommandations des autorités.

    Que vous inspire la mobilisation internationale pour mettre au point un vaccin contre le Covid-19 ?

    Ce qui a déjà été accompli en cinq mois est impressionnant. Des laboratoires universitaires ou commerciaux, et non des moindres, ont commencé à travailler dès janvier. Lors du Forum de Davos [21-24 janvier], la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies a accordé des financements à quatre projets de recherche sur les vaccins. Il existe plus d’une centaine d’initatives. Une dizaine d’entre elles, peut-être, aboutiront.

    Qu’attend-on d’un vaccin contre le Covid-19 ?

    Son cahier des charges comprend quatre conditions. Le vaccin doit démontrer qu’il protège contre l’infection ou, au moins, atténue les effets de la maladie et réduit le nombre des décès. Cela implique des essais cliniques dans une population où l’incidence du Covid-19 soit suffisante. Elle diminue en Europe. Peut-être au Brésil… D’une manière générale, peu de vaccins sont efficaces sur les maladies respiratoires, en dehors de celui contre le pneumocoque. Le vaccin doit aussi ne pas avoir d’effets secondaires. Avec une administration à très grande échelle, des effets indésirables rares toucheraient un nombre important de personnes. Une fois ces deux premières conditions remplies, il ne faut pas espérer une autorisation de mise sur le marché avant 2021.

    Troisième condition, des milliards de doses d’un vaccin contre le Covid-19 devront être produites. Une capacité de production qui n’existe pas à l’heure actuelle. Il faut investir pour acquérir et construire des unités de production répondant aux normes d’hygiène et de sécurité, avant de savoir si le candidat vaccin va marcher. Enfin, il faut tout faire pour que tous ceux qui ont besoin du vaccin y aient accès. La collaboration internationale ACT souligne la nécessité d’un accès équitable. C’est très important au moment où l’on voit apparaître un nationalisme vaccinal.

    Donald Trump affirme que les vaccins produits aux Etats-Unis seront réservés aux Etats-Unis. Il faut à tout prix éviter cela. Néanmoins, il faudra faire des choix sur les priorités pour la vaccination. Cela donnera lieu à des débats très durs, tant qu’il y aura une pénurie de vaccins.

    Vous avez été atteint du Covid-19. Comment avez-vous vécu votre maladie ?

    C’est une sale maladie, avec des aspects chroniques chez beaucoup de ceux qui l’ont eue. Ironiquement, j’ai passé la plus grande partie de ma vie d’adulte à combattre les virus, à leur mener la vie dure. Là, un virus a pris sa revanche sur moi ! C’est quand même différent quand on en fait l’expérience personnelle : je deviens − pour reprendre une expression néerlandaise − un « expert d’expérience ». Comme cela est devenu habituel dans la lutte contre le sida, il faut impliquer les personnes touchées dans la réponse à cette maladie.

    #Maladie_chronique

    • Oui, c’est un aspect qui me frappe depuis le déconfinement : la quantité impressionnante de mesures de réductions des risques, partout, depuis qu’on est déconfinés. Évidemment le port du masque assez systématique, mais aussi les sièges condamnés dans les transports en commun, la promotion du télétravail, les magasins avec des cheminements imposés pour éviter de trop se croiser, les files d’attente délimitées pour imposer les distances…

      Et ce qui me chagrine, c’est que je ne me souviens pas qu’une seule de ces mesures ait été imposées avant le confinement. Dans mon souvenir, on n’est pas loin d’être passés de « rien » ou « vraiment pas grand chose » à « tout le monde enfermé ». Si le but est de limiter le taux de reproduction, pourquoi aucune de ces mesures n’a été tentée avant ? Et est-ce que ces mesures ont été efficaces, avant, dans les pays qui ont limité l’impact de Covid-19 ?

    • C’est le truc qui m’a grrrrr en colère en mars : pourquoi on n’a strictement rien fait avant ? À part l’interdiction des rassemblements de plus de 5000 puis 1000 puis 100, avant le 15 mars rien sur le masque dans les milieux confinés, rien sur les comportements.

      Et ça me fout en rogne aujourd’hui encore de voir des mesures ultra compliquées imposées aux fonctionnaires (biblio ou Ehpad, ils et elles se plaignent de mesures disproportionnées et pas vraiment justifiées en l’état des connaissances : le bouquin en quarantaine trois jours en plus d’avoir la couv nettoyée et que la personne qui l’a consultée avait un masque et les mains passées au gel) alors que par ailleurs la vie sociale redevient une fête du slip : les hommes (nos amis couillus) baissent le masque dans le métro, les masques ne sont pas obligatoires dans des lieux publics confinés (dans mon magasin bio même le personnel n’en met plus, en rayons ou derrière les plastiques), les inconnus refont des bises. Une copine me racontait ce truc : elle cause avec une copine bobo du 11e qui porte un masque, elle lui demande pourquoi, on est en extérieur, la copine commence à expliquer et là un pote à elle arrive, se tient à distance de la meuf masquée mais à 30 cm de celle qui ne l’est pas.

      Ce que j’observe, c’est une disparition de la volonté de se prendre en main parce que les chiffres sont rassurants (et alors même que des personnes restent confinées par angoisse, merci pour elles de ne rien faire), le tout avec un vernis de rebellitude à la BHL : « Franchement j’en reviens pas de comment on a été obéissants, un vrai troupeau. » Alors que oui, on a bien fait vu nos moyens (pas de masques, pas de tests, pas de vaccin), on peut regretter d’avoir dû prendre des mesures low-tech dans un pays qui a les moyens, on peut s’indigner que ces mesures aient été appliquées avec un bâton, sans aucune confiance dans la capacité à se protéger et protéger leurs proches, et de manière pseudo-indifférenciée selon la géographie du virus (à la campagne dans une région pas touchée comme dans une métropole où le virus circule).

      Mais repasser en mode « je m’en fous », sans rien mesurer comme risque et sans penser sa réduction, au risque ensuite de devoir se refaire imposer un confinement sévère et extrêmement préjudiciable aux autres dimensions de la vie, c’est ce que libéralisme fait de mieux ces jours-ci. Ça me fait gerber.

  • On va enfin le savoir, grâce à une étude randomisée en double aveugle : est-ce que la prière est efficace pour soigner les malades de Covid-19 qui sont en soins intensifs ?

    The COVID-19 ICU PRAYER Study - Full Text View - ClinicalTrials.gov
    https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT04361838

    This is a multicenter; double blind randomized controlled study investigating the role of remote intercessory multi-denominational prayer on clinical outcomes in COVID-19 + patients in the intensive care unit. All patients enrolled will be randomized to use of prayer vs. no prayer in a 1:1 ratio. Each patient randomized to the prayer arm will receive a “universal” prayer offered by 5 religious denominations (Christianity, Hinduism, Islam, Judaism and Buddhism) in addition to standard of care. Whereas the patients randomized to the control arm will receive standard of care outlined by their medical teams. During ICU stay, patients will have serial assessment of multi-organ function and APACHE-II/SOFA scores serial evaluation performed on a daily basis until discharge. Data assessed include those listed below.

  • En Tunisie, un chatbot pour contrer le coronavirus
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/06/02/en-tunisie-un-chatbot-pour-contrer-le-coronavirus_6041546_3212.html

    Le SAMU tunisien a en effet été saturé d’appels, de mi-mars à fin avril, avec des pics de 30 000 en une journée, selon les données de Samir Abdelmoumen, médecin urgentiste membre de la Commission nationale de lutte contre le coronavirus au sein du ministère de la santé : « En un mois et demi, nous avons eu pratiquement l’équivalent de dix-sept ans d’activité en matière d’appels. Au début, c’étaient des gens qui appelaient pour demander des informations ou dénoncer un voisin qui rentrait de l’étranger et sortait de chez lui. Ensuite, nous avons eu des appels plus spécifiques liés à la maladie. »

    #Covid-19#migrant#migration#diaspora#Tunisie#chatbot#information#fakenews#étranger#maladie#santé

  • Analyse de 65 ans de travaux sur le lien entre forêt, déforestation et émergence de #maladies_infectieuses

    La pandémie mondiale de Covid-19 met en lumière l’importance de certains domaines scientifiques jusque-là peu étudiés, comme le lien entre les #écosystèmes, leur #biodiversité et l’émergence de nouvelles maladies infectieuses. En effet, les humains exploitent de plus en plus leur #environnement et sont par conséquent plus exposés à certains #microbes tapis dans l’#ombre, ce qui peut accroître les risques de nouvelles #contaminations. Des chercheurs d’INRAE, du Cirad, de l’IRD et de l’Institut Pasteur de la Guyane viennent d’effectuer, dans la revue Environmental Research Letters, une analyse de synthèse bibliométrique sur un corpus de 565 publications, publiés entre 1953 et 2018, sur les liens entre forêts, déforestation et maladies infectieuses émergentes. Ils pointent une fragilité des connaissances sur cet enjeu majeur.

    https://www.inrae.fr/actualites/CP-analyse-lien-foret-deforestation-maladie
    #déforestation #forêt #santé

    • https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/ab8dd7

      Deforestation and associated changing landscapes are major components of environmental changes, with important implications for ecosystem functioning and biodiversity conservation. Tropical forests are hot-spots of biodiversity, and also an important source of new potential emerging microbial threats to human. While forests provide multiple goods and ecosystem services which benefit people in many ways, they also play an important role in health-related legends, myths, and fairy tales from all over the world. Although plausibly numerous abundant microbial forms may exist with a forest origin, our systematic literature review shows that forest-derived infection studies are relatively unexplored and both taxonomically and geographically biased through time. Since biodiversity has been associated with emergence of novel infectious diseases at macro-scale, we describe the main biogeographical patterns in the emerging infection-biodiversity-forest loss nexus. Then, we illustrate four fine-scale case studies to decipher the underlying processes of increased infection risk in changing forest clearing landscapes. Finally, we identify scientific challenges and regional management measures required to mitigate these important emerging threats.

  • #COVID survivor receives $840,000 statement for treatment, with more on the way
    https://www.thedenverchannel.com/news/local-news/covid-survivor-receives-840-000-statement-for-treatment-with-more-

    CENTENNIAL, Colo. — Robert Dennis spent weeks in the hospital, fighting and beating the coronavirus. He’s now back at home, working his way through recovery, but he’s not done with the virus entirely just yet. The high school teacher just received his first itemized statement for the cost of his care: $840,386.94.

    “Seeing that number yesterday for the first bill it kind of took your breath away again,” Robert’s wife Suzanne, who also beat the virus, told Denver7.

    The statement covers Robert’s time at Sky Ridge Medical Center, where he was in the intensive care unit and intubated for two weeks.

    “His meds just at the hospital are a quarter million dollars,” Suzanne said.

    What is not included is Robert’s three weeks at Spalding Rehabilitation Hospital, or his wife’s trips to the emergency room when she was fighting the virus. The couple estimates their total bills to top one and a half million dollars.

    “It’s scary. I don’t care how much you have covered. It’s scary to see that kind of number and not really know,” Suzanne said.

    The couple has insurance. They plan on calling to make sure that they are covered early next week.

    The Colorado Division of Insurance tells Denver7 that if their department regulates the insurance, that patient will be protected by a state emergency regulation. Also, if the hospital that treated a patient received CARES Act funding, they are not required to send surprise bills for COVID-19 treatment.

    On March 10th, Vice President Mike Pence told reporters, “All of our major health insurance companies have now joined with Medicare and Medicaid and agreed to waive all copays, cover the cost of all treatment for those who contract the coronavirus, they’ve committed to no surprise billing, and they’ve committed to encourage telemedicine.”

    “I would have probably sat down and cried yesterday if didn’t know we had insurance and that was pretty good, but if you don’t have that comfort of knowing something is there, I don’t know how you make that ok with yourself,” Suzanne said.

    #assurance #maladie #etats-unis

  • Exclusive: big pharma rejected EU plan to fast-track vaccines in 2017 | World news | The Guardian
    https://www.theguardian.com/world/2020/may/25/exclusive-big-pharma-rejected-eu-plan-to-fast-track-vaccines-in-2017
    https://i.guim.co.uk/img/media/6230b4de41f5442c335f7a07c3904e7d718a1bfe/0_182_5454_3272/master/5454.jpg?width=1200&height=630&quality=85&auto=format&fit=crop&overlay-ali

    The world’s largest pharmaceutical companies rejected an EU proposal three years ago to work on fast-tracking vaccines for pathogens like coronavirus to allow them to be developed before an outbreak, the Guardian can reveal.

    The plan to speed up the development and approval of vaccines was put forward by European commission representatives sitting on the Innovative Medicines Initiative (IMI) – a public-private partnership whose function is to back cutting-edge research in Europe – but it was rejected by industry partners on the body.

    The commission’s argument had been that the research could “facilitate the development and regulatory approval of vaccines against priority pathogens, to the extent possible before an actual outbreak occurs”. The pharmaceutical companies on the IMI, however, did not take up the idea.

    The revelation is contained in a report published by the Corporate Europe Observatory (CEO), a Brussels-based research centre, examining decisions made by the IMI, which has a budget of €5bn (£4.5bn), made up of EU funding and in-kind contributions from private and other bodies.

    The IMI’s governing board is made up of commission officials and representatives of the European Federation of Pharmaceutical Industries (EFPIA), whose members include some of the biggest names in the sector, among them GlaxoSmithKline, Novartis, Pfizer, Lilly and Johnson & Johnson.

    A global lack of preparedness for the coronavirus pandemic has already led to accusations in recent weeks that the pharmaceutical industry has failed to prioritise treatments for infectious diseases because they are less profitable than chronic medical conditions.

    The world’s 20 largest pharmaceutical companies undertook around 400 new research projects in the past year, according to Bloomberg Intelligence. Around half were focused on treating cancer, compared with 65 on infectious diseases.

    There are eight potential vaccines for coronavirus in clinical trials, but there is no guarantee of success. One of the most promising, being developed at Oxford University, is said to have only a 50% chance of being approved for use.

    The CEO report says that rather than “compensating for market failures” by speeding up the development of innovative medicines, as per its remit, the IMI has been “more about business-as-usual market priorities”.

    The report’s authors cite a comment posted on the EFPIA’s website, since removed, selling the advantages of the initiative to big pharma as offering “tremendous cost savings, as the IMI projects replicate work that individual companies would have had to do anyway”.

    The European commission’s “biopreparedness” funding proposal in 2017 would have involved refining computer simulations, known as in silico modelling, and improved analysis of animal testing models to give regulators greater confidence in approving vaccines.
    The hunt for a coronavirus vaccine

    Minutes of a meeting of the IMI’s governing board in 2018 reveal that the proposal was not accepted. The IMI also decided against funding projects with the Coalition for Epidemic Preparedness Innovations, a foundation seeking to tackle so-called blueprint priority diseases such as Mers and Sars, both of them coronaviruses.

    “While the scope of a regulatory topic as proposed by the commission was not supported by EFPIA industries, the theme of regulatory modernisation is considered very important by industries, and will be further discussed,” the minutes record. “Interaction with the Coalition for Epidemic Preparedness Innovations (CEPI) continues but no immediate co-investment is expected.”

    In response to the report, a spokeswoman for the IMI said infectious diseases and vaccines had been a priority from the outset. She highlighted a €20m project known as Zapi launched in 2015 following the Ebola pandemic and which focuses on biopreparedness.

    The IMI launched funding for “innovations to accelerate vaccine development and manufacture” in January.

    The spokeswoman said the topic had been competing with other priorities at the time of the 2017 proposal, including research into tuberculosis, auto-immune diseases and digital health.

    “The report seems to suggest the IMI has failed in its mission to protect the European citizen by letting pass an opportunity to prepare society for the current Covid pandemic,” she said.

    “This is misleading in two ways: the research proposed by the EC in the biopreparedness topic was small in scope, and focused on revisiting animal models and developing in silico models to better define/anticipate the type and level of immune response elicited in animals and humans in order to increase regulators’ confidence in the evidence base for alternative licensing procedures.

    “IMI’s projects have contributed, directly or indirectly, to better prepare the research community for the current crisis, eg the Ebola+ programme or the Zapi project.”

    The CEO report says the directing influence of big pharma on the IMI’s research agenda has led it to becoming dominated by industry priorities, and sidelining poverty-related and neglected diseases, including coronaviruses.

    The thinktank points to official evaluations that found the IMI had enabled competing global companies to work together with small and medium-sized businesses and academia, but that it was difficult to identify positive socioeconomic outcomes.

    The most recent evaluation in 2017 questioned whether the European pharmaceutical industry should continue to be the “main driver” on the future of medicine.

    The CEO also says that as a result of the industry’s domination of the IMI, there are significant gaps in funding for diseases pinpointed by the World Health Organization (WHO) Report on Priority Medicines for Europe and the World as of public health importance, for which pharmaceutical treatments either do not exist or are inadequate.

    Seven of the 25 priority areas the WHO identified have no IMI projects, including neonatal conditions and postpartum haemorrhage, according to the report.

    Seventeen IMI projects relate to Alzheimer’s disease, 12 to diabetes and 10 to cancer. As important as these diseases are, there is no lack of wider interest in providing treatments, leading the report to question whether EU money has been appropriately spent.

    “Clearly, these disease areas are not suffering from a market failure, as the global pharmaceutical industry is investing heavily in them already, which is not surprising, given the large market potential for new treatments,” the CEO writes.

    An IMI spokeswoman said that about a third of the IMI budget was spent on infectious diseases, including antimicrobial resistance, vaccines, Ebola and tuberculosis, and that other funds went on cross-cutting issues in drug development.

    #Big_pharma #Recherche #Europe #Financement #Collaboration #Maladies_négligées

  • Isolement, précarité, perte de repères : comment le confinement a fait basculer psychologiquement certains étudiants
    https://www.lemonde.fr/campus/article/2020/05/26/isolement-precarite-perte-de-reperes-comment-le-confinement-a-fait-basculer-

    De jeunes adultes ont été particulièrement fragilisés par la disparition de leur vie d’avant. Les professionnels redoutent une vague de maladies psychiatriques.

    Pour Edmond, 27 ans, le confinement a été « la goutte d’eau qui a fait déborder le vase ». « Sans préavis, on m’a coupé de tous mes liens sociaux. On m’a plongé dans un isolement physique mais aussi émotionnel, faisant remonter toutes mes difficultés passées », raconte cet étudiant gabonais en master d’économie à l’université de Bordeaux. « Abandonné » très tôt par ses parents à Libreville (Gabon), puis par son meilleur ami, décédé en 2013, il a vécu l’annonce du gouvernement comme un « nouvel abandon ». Du jour au lendemain, il a dû faire une croix sur sa paie de commis dans un restaurant asiatique, et s’en remettre aux banques alimentaires déployées dans sa cité universitaire.

    Attaques de panique, altération du sommeil, ruminations anxieuses, idées noires… Après une dizaine de jours d’enfermement dans sa chambre du Crous de 13 m2, Edmond craque et avale un cocktail dangereux de médicaments. « J’étais prêt à dire oui à la mort si elle venait », assume-t-il. Le 30 mars, il est admis dans l’un des services psychiatriques du centre hospitalier Charles-Perrens à Bordeaux, pour entamer ce qu’il nomme aujourd’hui son « retour d’outre-tombe ».
    Si la tentative de suicide constitue l’un des pires scénarios, les professionnels de santé mentale font valoir leur inquiétude quant à l’impact du confinement sur le bien-être de milliers d’autres étudiants. Isolement, précarité financière, perte de repères : cumulée à de multiples facteurs d’anxiété et de stress, la crise liée à l’épidémie due au coronavirus a déstabilisé une population déjà psychiquement vulnérable.

    Les étudiants davantage touchés

    Pendant le confinement, la Nightline – un service nocturne d’écoute géré par des étudiants, pour des étudiants – est arrivée à saturation des demandes de soutien par tchat. « On a retrouvé les thématiques habituelles : exacerbation du sentiment de solitude, angoisse de l’avenir, difficulté à trouver un espace intime rassurant, pensées suicidaires… Mais ces difficultés semblent clairement aggravées par la crise », constate le président de l’association, Florian Tirana.

    Plusieurs enquêtes en cours devraient permettre de mesurer l’ampleur du phénomène et d’anticiper une possible vague de maladies psychiatriques, redoutée par les professionnels. « Il va falloir être très vigilant. Selon nos premiers chiffres, la catégorie des 16-29 ans est celle pour qui le score de bien-être a le plus nettement baissé pendant le confinement, avance Nicolas Franck, professeur de psychiatrie à l’université Lyon-I et chef de pôle au centre hospitalier Le Vinatier, coauteur d’une étude en ligne sur l’impact du confinement sur la santé mentale des Français. Leur confiance en eux et leur sentiment d’utilité ont été fragilisés. »

    Plus ancrés dans la durée, les résultats préliminaires de l’enquête « Confins » sont également éloquents. « Sur la santé psychique, les étudiants ont systématiquement des scores plus inquiétants que les non-étudiants », analyse le médecin neurologue Christophe Tzourio, professeur d’épidémiologie à l’université de Bordeaux. Les premiers chiffres varient souvent du simple au double : 27 % des étudiants se déclarent tristes, déprimés ou désespérés « plus de la moitié du temps voire tous les jours », contre 16 % chez les non-étudiants ; 40 % se sentent fatigués ou sans énergie, contre 21 % chez les non-étudiants ; 30 % se voient comme des « perdants », contre 15 % chez les non-étudiants ; 27 % se déclarent « en permanence inquiets, de façon excessive », contre 16 % pour les non-étudiants…

    « Une année universitaire hors-norme »

    Reste à comprendre pourquoi les étudiants présentent une plus grande fragilité que le reste de la population. « Il faut commencer par mettre en perspective cette année universitaire hors-norme. Les grèves de l’hiver avaient déjà perturbé le premier semestre et miné certains jeunes, qui sont finalement très peu allés en cours, rappelle Christophe Ferveur, psychologue de la Fondation santé des étudiants de France et président du Réseau de soins psychiatriques et psychologiques pour les étudiants (Resppet). Mis bout à bout, les différents éléments de la chaîne peuvent faire entrer le jeune adulte dans une clinique du découragement, du laisser-tomber, voire du désespoir. »

    Puisque les trois quarts des premiers épisodes de troubles psychiatriques surgissent avant 24 ans, la période étudiante représente l’âge de tous les dangers, dans un contexte si particulier. « Le confinement aura une fonction traumatique pour l’ensemble de la population, et d’autant plus pour des jeunes encore en construction, alerte Claude Vedeilhie, psychiatre au bureau d’aide psychologique universitaire de Rennes et président de l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (Anpaa) Bretagne. Pour certains, c’est un coup d’arrêt à un processus d’autonomisation. »

    Pour Tatiana, étudiante de 22 ans, on peut même parler d’un coup de massue. « Pendant le discours du président, le 16 mars, j’entendais les gens partir à toute vitesse de ma résidence. Ils dévalaient les escaliers, se remémore-t-elle. Mes parents m’ont appelée : ma demi-sœur allait venir me chercher. J’ai eu une heure pour tout préparer, je ne pouvais pas m’arrêter de pleurer. Pleurer pour mes examens, pour mes amis. Pleurer de dépendre encore une fois de ma mère et de son compagnon : il y a toujours eu des tensions, et le seul souvenir de la maison me faisait peur. » Le choc émotionnel est tel que la jeune femme développe, quelques jours après, un douloureux zona sur l’épaule droite. « Ça faisait trois ans qu’on travaillait sur un projet : notre licence. Il a fallu mettre de côté tous nos sacrifices et tenter de réussir à distance. C’était horriblement stressant et frustrant. »
    Un « effet de régression »

    Si l’isolement reste un facteur aggravant, le retour à la vie de famille a pu réveiller des blessures cachées et réactualiser certains conflits. « Le propre de cette période étudiante, c’est de s’éloigner de sa famille pour construire sa vie. Pour une partie des patients, il a été très difficile de revivre l’emprise parentale dont ils essayaient de se départir », note Claude Vedeilhie, qui a par ailleurs remarqué une augmentation des comportements addictifs. Pour beaucoup de jeunes – en formation à la fois psychique et universitaire –, il y a eu un « effet de régression », selon les termes de Christophe Ferveur : « On leur a coupé les ailes en plein envol. »

    De retour dans sa famille, Memet a d’ailleurs craint « de ne pas pouvoir faire face ». Entré cette année en master à Sciences Po Paris après une licence à l’université de Nanterre, ce garçon de 23 ans a ce qu’il appelle lui-même « le syndrome de l’imposteur ». « Malgré la bienveillance de l’administration, je me suis toujours senti étranger à cette institution. En même temps, j’ai toujours vu l’école comme un lieu d’épanouissement et là, on me l’a enlevé, dit-il. Le décalage entre le 27, rue Saint-Guillaume et la banlieue de mes parents, dans l’Essonne, a été très dur à gérer. » D’origine kurde, ses parents ont fui la Turquie. En raison d’un contexte familial parfois éprouvant, il est contraint de retourner dans ses 20 m2 parisiens : « Je suis parti quelques jours en serrant les dents pour terminer un exposé sur la dette publique… J’ai eu très peur de craquer, de tout arrêter. Je sais aujourd’hui que ça va laisser des traces. »

    Happés par leurs cours, révisions et autres petits boulots, certains étudiants ont tendance à enfouir leurs émotions dans une forme d’hyperactivité. « C’est un suivi très particulier, admet la psychiatre Marion Lenoir-Roy, qui donne des consultations à l’espace santé étudiants de l’université de Bordeaux. Ces jeunes n’ont jamais le temps d’aller mal. Le confinement a pu être un déclencheur de troubles anxieux pour ceux qui transportaient déjà de grosses valises. »

    « Un retard potentiel de l’accès aux soins »

    Plus que jamais, psychiatres et psychologues ont dû assurer la continuité des soins tout en répondant à de nouvelles demandes. Téléconsultations, porte-à-porte dans les résidences Crous, ateliers via Skype de méditation, sophrologie ou rigologie (une sorte de yoga par le rire) : « Il a fallu faire preuve d’inventivité ! », admet Christian Régnier, directeur du service universitaire de médecine préventive de Sorbonne-Université, qui compte 75 000 étudiants.

    En temps normal, seul un quart des jeunes présentant les signes d’un épisode dépressif déclarent avoir consulté un professionnel de santé mentale dans l’année. « Une douleur morale n’est peut-être pas la même douleur qu’une rage de dents, mais plus on décale la prise en charge, plus on prend le risque que cela s’aggrave, martèle le psychologue Yannick Morvan, membre de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE). Avec la crise sanitaire, on est face à une nouvelle inquiétude quant à un retard potentiel de l’accès aux soins et de ses conséquences éventuelles. »

    Raison de plus pour prendre les devants en termes de prévention et pour tenter de dédramatiser le recours à un professionnel. Très souvent, il y a déni, rejet, voire stigmatisation de l’entourage. « Ceux qui osent demander de l’aide forment la partie émergée de l’iceberg », souligne l’épidémiologiste Christophe Tzourio. « C’est le moment de prendre soin de soi et de développer des compétences en termes de bonne santé mentale. C’est un réflexe à prendre, pour que le mal-être ne s’enkyste pas », suggère Fanny Sauvade, psychologue et codirectrice de l’association Apsytude.

    Mais le déconfinement ne désigne pas non plus le bout du tunnel. Au contraire. La crise sanitaire renforce l’incertitude et l’inquiétude quant à l’avenir. A quoi bon ce diplôme ? A quoi bon ce futur travail ? Les contrecoups seront durables. « On dit aux jeunes que le monde va s’effondrer mais aussi que c’est à eux de bâtir le monde d’après ! Le climat actuel est très anxiogène pour cette génération, déplore Christophe Ferveur. Quand les cours et examens à distance s’arrêteront, il ne faudra surtout pas lâcher les étudiants. Comme la lumière des étoiles, l’étendue des dommages nous arrivera avec un temps de retard. » Après la continuité pédagogique du printemps, il s’agira, cet été, d’assurer une continuité psychologique.

    Pas mal de bêtises (...) mais aussi un contrepoint au constat que les psychiatrisés ont (auraient ?) dans l’ensemble mieux tenus le choc que ... les soignants en psychiatrie (et pas seulement sur le plan épidémiologique).
    Guerre, révolution, pandémie, autant de moments d’un commun qui s’impose et qui tendent à mettre la maladie mentale au second plan. Le vital, la singularité sont (pour partie) ailleurs, déplacés, remaniés. Si ce n’est, peut-être (?), pour certains entrants dans la carrière, si ton en croit cet article.
    Une particularité de la pandémie et des mesures qui l’accompagnent au prétexte de la juguler/diminuer : comment « s’en sortir sans sortir » (de chez soi, avec d’autres) quand ce qui relie est la séparation ?
    J’ai pas vu grand chose chez des praticiens, de la souffrance psychique en première personne ou/et du soin (si ce n’est des intervention salubres sur l’état de la psychiatrie confinée, à la façon, trop rare, de #Mathieu_Bellahsen).

    Par ailleurs, là encore, la #psychiatrie est nodale : c’est avec elle il me semble que la notion de santé a du s’assortir de celle de #maladie_chronique qui la contredit, et que l’on a retrouvé ensuite (?) avec de nombreuses pathologies (asthme, diabète, etc.) comme catégorie médicale.

    #étudiants

  • Comment la République de Corée a aplati la courbe sans confinement national ni fermeture des frontières : Rapport | Organisation internationale pour les migrations
    https://www.iom.int/fr/news/comment-la-republique-de-coree-aplati-la-courbe-sans-confinement-national-ni-fe
    https://www.iom.int/sites/default/files/styles/highlights/public/press_release/media/rok-covid19_response-picture_1.jpg?itok=hQpQVRom

    Depuis le premier cas de COVID-19 signalé le 20 janvier, ce pays de plus de 51 millions d’habitants compte 11 050 cas confirmés et 262 décès en date du 17 mai. Le rapport décrit les éléments clés de la réponse globale de la République de Corée contre la propagation du virus, qui devraient présenter un grand intérêt pour les autres pays actuellement aux prises avec le nouveau coronavirus et qui envisagent une gestion efficace de la mobilité pendant la pandémie. Le gouvernement de la République de Corée s’est concentré sur l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) pour effectuer des tests rapides à grande échelle, rechercher les contacts et diffuser des informations essentielles en cas d’urgence, tout en renforçant les contrôles aux frontières et en appliquant des mesures strictes de quarantaine dans le pays.
    Le rapport souligne en particulier la Procédure spéciale d’immigration qui est appliquée avec souplesse en fonction de l’évolution du coronavirus, à mesure que davantage de passagers proviennent des zones touchées. Afin d’empêcher l’exode de voyageurs infectés vers les pays étrangers, le pays a également renforcé son processus de dépistage aux points d’entrée.
    Le recours aux 3T - tests généralisés, traçage rigoureux et traitement gratuit - a permis au pays de gérer les flux de passagers entrants et sortants de manière ouverte et responsable. Le rapport met également en évidence des facteurs sous-jacents tels que le leadership, l’approche pangouvernementale, le soutien juridique et administratif systématique, la flexibilité des politiques et la confiance du public fondée sur la transparence, comme les principaux attributs de la gestion remarquable du pays concernant la COVID-19. « La nature contagieuse des maladies infectieuses et l’interconnexion du monde moderne ont amené de nombreux pays à recourir aux restrictions de mobilité comme principal outil de contention », a déclaré Miah Park, responsable du Bureau de l’OIM en République de Corée. Selon l’OIM, en date du 23 avril, 215 pays, territoires et zones avaient mis en œuvre 52 262 mesures restrictives au total.

    #Covid-19#migrant#migration#CoréeSud#frontière#pandémie#propagation#test#dépistage#flux#voyageurs#gouvernance#maladies-infectieuses#traçage#santé

  • « Dès que les êtres humains pénètrent dans un #écosystème, des #virus se propagent »

    Le Bruno Manser Fonds (BMF) s’est entretenu avec #Kinari_Webb, médecin et fondatrice de Health in Harmony, sur la manière dont la destruction de l’environnement affecte notre santé et permet la propagation de maladies telles que le #COVID-19.

    Kinari Webb, 48 ans, est médecin et fondatrice de « Health in Harmony », un projet intégrant service de #santé et #protection_de_l’environnement dans le #Kalimantan, la partie indonésienne de #Bornéo. Elle a achevé ses études de bachelor en biologie en 1993, pour ensuite partir à Bornéo y étudier les orangs-outans. Elle y a vu comment de nombreuses personnes ne pouvaient financer leurs soins de santé autrement qu’en défrichant. Elle a donc décidé d’étudier la médecine. Après ses études, elle s’est à nouveau rendue à Bornéo, où elle a créé « Health in Harmony » en 2005, dans les environs du parc national #Gunung_Palung. Elle vit à proximité de San Francisco ainsi qu’en Indonésie.

    De quelle manière l’environnement et la santé sont-ils liés ?

    Kinari Webb : La question est mal posée à mes yeux. En effet, elle présuppose que l’être humain n’est pas un animal et qu’il y a une scission entre l’homme et la nature. Mais c’est impossible : nous respirons l’air, nous buvons l’eau, nous nous alimentons. La croyance selon laquelle notre esprit serait séparé nous vient du Siècle des lumières et s’avère simplement fausse. Cette pandémie nous montre à l’évidence que nous sommes indissociables de la #nature, comme d’ailleurs du changement climatique : sans températures raisonnables, en l’absence de suffisamment d’oxygène, sans eau propre, sans nourriture saine, nous ne pouvons pas être en bonne santé, nous ne pouvons pas survivre.

    Comment les #défrichages impactent-ils la santé des populations rurales à Bornéo ?

    Là où nous travaillons, tout-un-chacun sait que son bien-être futur dépendra de la présence de la #forêt tropicale. Ils comprennent que la forêt produit de l’eau, que celle-ci irrigue les champs de riz et que les champs de riz à leur tour les nourriront. Ils savent que, sans eau propre, les maladies se propagent. Ils savent aussi que les défrichages détruisent l’équilibre de l’écosystème et occasionnent davantage de #maladies comme le paludisme.

    Quelles sont les répercussions de la déforestation et de la destruction de l’environnement sur la santé des êtres humains à l’échelle mondiale ?

    La plupart des gens savent que notre consommation de combustibles fossiles est à l’origine du changement climatique. Peu de gens savent par contre que la déforestation à l’échelle mondiale est à l’origine d’autant d’émissions de CO2 que l’intégralité du secteur des transports dans le monde. Lorsque nous défrichons les forêts ou les brûlons, nous rejetons d’énormes quantités de carbone dans l’atmosphère. Les sols tourbeux à Bornéo jouent ici un rôle incroyablement important. On peut se les représenter comme des stades précoces des champs pétrolifères, dans lesquels des feuilles et des branchages se sont accumulés durant des millions d’années et qui ne peuvent pas se décomposer car ils sont recouverts d’eau. Si l’on défriche ou incendie les forêts sur #tourbières, le carbone stocké s’en trouve libéré. Les arbres accumulent de plus en plus de carbone tant qu’ils sont sur pied, absorbant ainsi un tiers du CO2 mondial. Je vais être explicite : si nous perdons nos #forêts_tropicales mondiales, c’est la fin de l’espèce humaine. Compte tenu de la chaleur, la planète serait invivable pour nous êtres humains de même que pour la majeure partie des autres êtres vivants.

    Quel est le lien avec le COVID-19 ? Et qu’est-ce qu’une zoonose ?

    Une #zoonose est une maladie transmise de la faune sauvage à l’être humain. Dans les écosystèmes intacts, on rencontre rarement des zoonoses. Mais dès que les hommes pénètrent dans un écosystème, le déstabilisent et consomment des #animaux_sauvages, des virus de propagent. Les marchés proposant des #animaux vivants constituent ici la plus grande menace, car c’est ici qu’apparaissent la plupart des zoonoses : on y trouve des animaux de différents coins du monde, gardés dans des conditions de stress élevé. Leur #système_immunitaire s’effondre, les virus se multiplient et se propagent entre les animaux, passant la barrière des espèces à l’être humain. Cela n’a pas été le cas que pour le COVID-19, mais aussi dans les derniers SRAS, MERS, Ebola et même le VIH. Ne pas respecter les écosystèmes nous fait courir de grands dangers. Ce n’est qu’une question de temps jusqu’à ce qu’apparaisse la prochaine pandémie.

    La consommation de #viande_sauvage est donc remise en question. Comment vois-tu cela dans les villages ruraux de Bornéo, dans lesquels la viande de chasse constitue un aliment de base ?

    La consommation de la viande de chasse dans les zones rurales comporte certains risques. Pourtant, tant que ces animaux proviennent d’écosystèmes intacts, le risque est réduit. Il est probable que le COVID-19 est passé des #chauves-souris aux #pangolins avant de parvenir à l’être humain. Les pangolins sont notamment capturés en Malaisie, transportés vers la Chine pour y être vendus sur les marchés. C’est donc tout autre chose que lorsque de la viande de chasse est consommée d’un environnement intact. Ces villages à Bornéo consomment cette viande depuis longtemps et sont déjà entrés en contact avec des virus locaux. Ils possèdent déjà un #système_immunitaire qui sait réagir à ces virus afin de ne pas dériver en pandémie.

    Qu’en est-il des #élevages_intensifs ?

    Les élevages intensifs comportent aussi des risques, mais moins en ce qui concerne un virus totalement nouveau. Les forêts tropicales humides de ce monde ne recouvrent que 2 % de la superficie de la Terre, mais elles hébergent 50 % de toutes les espèces. C’est une richesse énorme aussi bien qu’une source de nouveaux virus dès le moment qu’on les transporte à l’autre bout du monde. Les élevages intensifs ne sont toutefois pas sans comporter de dangers, car un virus de la grippe peut s’y propager sans encombre, vu que les animaux y sont stressés et que leur système immunitaire s’en trouve affaibli. À l’avenir, en rétrospective nous nous demanderons comment nous avons pu faire une telle chose.

    Avec « Health in Harmony », vous travaillez à l’interface des services de santé et de la protection de l’environnement. Quelle idée se cache derrière votre projet ?

    La première fois que je me suis rendue à Bornéo, afin d’y étudier les orangs-outans, je suis tombée amoureuse de la forêt tropicale et des gens. Mais j’ai été sidérée de voir comment les gens, qui aimaient leur forêt, étaient contraints de la détruire pour payer leurs soins de santé. Un homme y avait abattu 60 arbres pour payer une césarienne. J’ai donc décidé d’étudier la médecine et suis ensuite retournée en #Indonésie. J’ai demandé aux gens où ils voyaient la solution. Ils m’ont expliqué qu’ils avaient besoin d’un accès à des soins médicaux à prix abordable et de connaissances en agriculture biologique, pour protéger la forêt tropicale. Nous avons mis leurs idées en œuvre et permis aux gens de payer leurs soins de santé au moyen de plants d’arbres et de travail. Après 10 ans d’activité, on a constaté un recul de 90 % des ménages réalisant leur revenu avec les défrichages. Nous avons pu arrêter la perte supplémentaire de forêt, sa surface ayant même gagné 21 000 hectares. La mortalité infantile a reculé de 67 % et la situation financière des populations s’est même améliorée.

    Compte tenu de ton expérience, à quoi ressemblerait une solution mondiale ?

    Nous avons démontré que les hommes et les écosystèmes peuvent prospérer ensemble. Nous devons comprendre que le bien-être des gens en Malaisie, qui capturent un pangolin parce qu’ils n’ont aucun autre revenu, et celui des gens en Chine, où le pangolin est envoyé, de même que celui de tous les êtres humain sur la planète, sont interdépendants. Nous avons tous besoin d’écosystèmes sains. Beaucoup voient une concurrence entre la nature et l’homme : « Comment pouvons-nous protéger la nature si nous devons manger ? » Mais cela ne fonctionne pas ainsi, c’est juste le contraire. Demandez aux gens où se trouvent les solutions et collaborez ! Les écosystèmes et les êtres humains en ressortent gagnants. Imagine que chacune et chacun bénéficie de soins de santé universels et doit y apporter sa contribution. Imagine que ta contribution individuelle dépend de combien tu prends l’avion et de la contrainte que tu as sur l’environnement.

    https://www.bmf.ch/fr/nouveautes/corona-suit-la-deforestation-138

    #virus #déforestation #élevage

  • Les « malades à la maison » du Covid-19, entre oubli et euphémisation | Caroline Hodak, AOC media
    https://aoc.media/opinion/2020/05/19/les-malades-a-la-maison-du-covid-19-entre-oubli-et-euphemisation

    Les chiffres des morts et des personnes hospitalisées pour Covid-19 sont scrutés quotidiennement. Après s’être inquiété de leur hausse, voilà qu’on se réjouit de leur baisse. Mais qu’en est-il de celles et ceux qui ont été malades à la maison ? En ne traitant que des morts et des malades hospitalisés, les discours se cristallisent sur la partie émergée de l’iceberg, et empêchent de remettre au cœur du dispositif de politique publique et sanitaire la connaissance médicale et le suivi des patients.

    En sciences sociales, particulièrement en sociologie et en ethnographie, mais aussi chez les historiens, dire d’où l’on parle, ou mieux, l’auto-analyse, éclaire un parcours et la réflexion de l’auteur. Dans ce prologue, il me semblait important de raconter d’où j’écris. Ni médecin, ni épidémiologiste, j’ai vécu le Covid-19 et ses conséquences socio-économiques comme tous les citoyens. Et puis, je l’ai vécu à l’épreuve des faits, au rythme des malades non testés, au fil de l’eau de ce qui s’est présenté à moi et des réalités médicales hors de l’hôpital. M’apercevant qu’en fait le sujet de la maladie, « les sujets » que sont les malades non testés, les #pasgrave, « les malades à la maison » n’étaient jamais évoqués alors qu’il s’agit de centaines de milliers de personnes.

    Comment ça commença…

    À l’origine, j’ai fait partie d’au moins un cluster parisien infecté par le Covid-19 avant le confinement. Le 16 mars au soir, j’ai eu la confirmation via un WhatsApp collectif de ce cluster que mes maux de tête, courbatures, nausées et immense fatigue étaient vraisemblablement la version bénigne de ce que d’autres au sein de ce groupe vivaient en bien plus grave. J’ai en tout cas conclu : « C’est bon je l’ai eu ». Et pour moi, l’histoire était terminée. Je n’ai pas associé, deux jours plus tard, d’importantes inflammations à un pied rougi et douloureux à l’épisode précédent. J’imaginais une allergie à des chaussettes et que cela passerait.

    Ce n’est qu’un mois après que les pièces du puzzle se sont enchevêtrées. Le 9 avril, le SAMU m’emmène aux urgences (non Covid) pour douleurs thoraciques et tension différentielle suspectant un AVC. Je sors quelques heures plus tard avec pour diagnostic une crise d’angoisse, bien que je ne fusse pas angoissée. Mais bon, pourquoi pas. La semaine suivante, je suis de plus en plus fatiguée et, alors que j’en parle à des amis en évoquant les urgences du 9 avril et « ce truc bizarre au pied dorénavant violet », je comprends que ce que j’avais pris pour une allergie étaient des engelures et que « le violet » était en fait un acrosyndrome (modification de la peau suite à un problème vasculaire). Pas très en forme, je rappelle le SAMU qui, comme je ne tousse pas et n’ai pas de fièvre, me conseille de me reposer. À peine 24h plus tard, le 19 avril, je ne tiens plus debout, je claque des dents, je suis livide, les douleurs thoraciques, qui n’avaient pas tout à fait disparu, sont à nouveau vives et profondes. Le SAMU envoie la Croix Rouge qui, « embêtée par ses observations », appelle le SAMU en renfort. Huit personnes chez moi. Suspicion d’embolie pulmonaire. Je repars aux urgences. Je sors le soir même.

    Bilan à l’hôpital (en non Covid) : « Si vous étiez soignante, on vous testerait, mais vous ne l’êtes pas, donc on n’a pas le droit ». Diagnostic au regard de l’examen clinique et de mes symptômes : « Vous avez été vraisemblablement primo-infectée du Covid-19 mi-mars et vous avez fait une réaction immunitaire vasculaire inflammatoire marquée par vos engelures. Vous faites manifestement un rebond inflammatoire. Il n’y a pas de pronostic vital pour nous aux urgences. A priori vous n’êtes plus contagieuse depuis longtemps. En revanche, il faut dorénavant poursuivre les explorations en ville car les signes peuvent révéler une pathologie qui ne relève pas de ce que nous traitons ici ». Je rentre.

    Carnet de Bal

    Commence alors le parcours en ville. Généraliste. Cardiologue. Phlébologue. Service vasculaire à l’hôpital. Acrosyndrome et micro caillots. Anti-coagulants, puis avec la disparition des symptômes (douleurs thoraciques, maux de tête, vertige), fluidifiant. Reste la sensation de faim qui a disparu et l’épuisement. Les fourmillements et engourdissements de la jambe disparaissent progressivement. En tout, en comptant le SAMU et les 2 passages aux urgences : 5 ECG, 1 HolterECG, 2 échographies du cœur, 2 dopplers, 1 capillaroscopie, 1 angioscanner, 7 prises de sang. L’examen micro-neurologique était gardé en suspens si les symptômes de la jambe restaient ou augmentaient. Le test d’effort jugé inutile. Jamais testée Covid. En revanche une prise de sang pour voir si j’avais des anticorps. Négatif (pour le moment ? Ce n’est pas très clair encore. À refaire).

    Au bout de ce parcours, j’ai découvert que, « dans le fond », je suis en pleine forme, d’autant que je n’ai aucun antécédent personnel ou familial en cardio-vasculaire. Que je n’ai pas non plus de maladie auto-immune ou génétique. Parce que oui, à ce stade, les médecins ont besoin de vérifier tout cela pour savoir de quoi il s’agit. J’ai découvert que les réactions vasculaires et neurologiques sont liées au virus. Qu’il y a des rebonds, mais pas forcément. Que les symptômes s’expriment de façon sinusoïdale. J’ai aussi découvert les questions des médecins. La voix des malades. Leurs interrogations. Le polymorphisme des expressions, des pathologies, des durées. Et le vide. Le vide en matière de coordination des parcours. Ainsi que le poids des incertitudes.

    Depuis la mi-avril, quelques articles, rares, commencent à documenter ces aspects. Cependant, en dehors de ce que vivent les malades et les médecins pour juguler les pathologies et adapter les traitements à chacun, je me suis rendue compte que personne ne sait ce qu’est être malade du Covid hormis ce que tout le monde, via la presse et les discours dominants, qualifie de maladie respiratoire. Le Covid-19 n’est pas qu’une infection virale des poumons. L’incubation ne dure pas seulement 2 jours. La maladie ne dure pas 14 jours (parfois beaucoup moins, parfois beaucoup plus). Une fois qu’on a été infecté, on n’est pas forcément tiré d’affaire. Parfois oui, parfois non. Les rebonds existent et sont eux aussi polymorphes, parfois graves, parfois juste réactionnels, et très souvent bel et bien hors respiratoire. Parallèlement, celles et ceux qui sont hospitalisés sont confrontés à une route souvent longue avant de pouvoir être vraiment remis. Qu’on ne sait pas bien encore ce que signifie « être guéri » du Covid-19. Ni ce qui explique la diversité des cas, des pathologies, des réactions, des conséquences.

    En réalité, ce que j’ai découvert, c’est que les médecins apprennent au jour le jour, au fur et à mesure, à travers leurs patients et les pathologies ou les réactions qu’ils découvrent en même temps qu’ils auscultent. Que chaque jour, ils analysent, supputent, déduisent, estiment. Qu’ils échangent sur leurs fils WhatsApp entre spécialités différentes autour de ce qui est observé sur le malade qu’ils ont en commun. Ou de ce qu’ils partagent entre confrères d’une même discipline. Nous, malades, attendons des réponses, mais les médecins les trouvent en nous observant. Il est donc essentiel qu’ils puissent nous suivre et que ce qui s’exprime chez les patients soit partagé entre eux.

    Les médecins, en ville tout autant qu’à l’hôpital, apprennent à l’épreuve des faits et les faits sont les malades, la maladie et ses expressions. Et eux-mêmes voient concrètement qu’il n’y a pas un traitement miracle mais bien, en fonction des organes touchés et des organismes des patients, des traitements à ajuster et d’autres à ne même pas envisager. Cela dépend de chaque cas. Car à ce stade il n’y a pas de trends dominants, mais des cohortes différentes. Les signes propres à une catégorie d’âge se retrouvent chez une autre. Un malade avec des antécédents résiste là où un autre, sans antécédent, marque des faiblesses. « L’intelligence » du virus se joue des règles et des évidences.

    Alors…

    Parce qu’à l’origine je suis chercheure en histoire et sciences sociales et que « nommer », c’est qualifier ; que l’observation du terrain est ce qui permet de nourrir les catégories de l’analyse et que sans nommer, on ne pose pas les bonnes questions. Parce qu’en tant que conseil et directrice en communication et en transformation des organisations, je suis confrontée aux outils numériques, si souvent souhaités, qui ne répondent pas aux besoins si ceux-ci ne sont pas dûment corrélés aux réalités du terrain et que, dans mon métier, la fabrique des données est ce qui constitue non seulement les référentiels mais l’intérêt de l’outil. Je travaille souvent avec les enjeux propres aux data, leur modération, le RGPD, le stockage et surtout en amont, avec le data mining et donc avec le fait de « nommer » et qualifier pour créer de l’opératoire et de l’opérationnel.

    Enfin, parce que je me suis retrouvée ahurie face à ce que j’ai découvert au jour le jour dans les méandres de mon aventure Covid-19, grâce aux médecins et aux malades avec qui j’ai échangé, je me suis demandée : mais où sont les « malades à la maison » et leurs « maladies Covid » dans les discours et le plan de déconfinement ? Comment penser une politique publique à hauteur d’une épidémie dont les expressions sont multiples et évolutives si personne ne parle des malades et de leur maladie ? Alors j’ai écrit ce papier.

    Les malades sont majoritairement hors de l’hôpital

    Traiter des malades et de la maladie, c’est remettre au cœur du dispositif de politique publique et sanitaire la connaissance médicale et le suivi des patients. Casser les chaînes de contamination pour répondre à l’urgence est nécessaire dans l’immédiat de la crise mais une épidémie s’inscrit dans le temps long. Connaître les expressions de la maladie, accompagner la population avec les informations ajustées, en étant pragmatique et réaliste, c’est non seulement mieux comprendre le cycle de vie du virus et tous les effets du Covid-19 mais aussi soutenir une prévention active auprès de toute la population. Encore faut-il traiter de tous les malades.

    Le propre d’un virus lorsqu’il se déploie dans un organisme, c’est d’investir son hôte et de proliférer. Si on simplifie : soit l’hôte résiste, soit il tombe malade. Éventuellement l’infection peut être fatale. En focalisant l’attention sur le nombre de morts et de malades hospitalisés par l’infection au Covid-19, les autorités françaises ont construit un discours binaire qui oppose confinement et nombre de morts-cas graves, car l’urgence consistait à éviter l’explosion des services de réanimation d’un système hospitalier exsangue. Or si l’objet de la problématique d’urgence est le virus et son incidence sur les services de réanimation, quel est le véritable sujet d’un virus, au quotidien, dans la vie d’une population, si ce ne sont les malades ? Tous les malades.

    Peu d’études épidémiologiques ont été lancées et celles-ci sont principalement axées sur l’identification du nombre de personnes infectées et suivies en hôpital. À date, l’actualisation des projections estime que 4,4 % de la population française a été touché. Soit près de 3 millions de personnes (la marge se situe entre 1,8 et et 4,7 millions de personnes). D’un côté du spectre, les asymptomatiques[2] (50 % environ, voire plus, mais les chiffres varient tant on manque d’études au sein de différents clusters). De l’autre, les cas graves hospitalisés (3,6 %) et les morts (0,7 %)[3].

    Sur la base de ces estimations il reste donc environ 1,3 millions de personnes[4] ayant été, ou étant encore, malades à des degrés très divers « à la maison » (de quelques jours « pas bien » à quelques semaines et plusieurs traitements antibiotiques, et parfois même des incursions à l’hôpital hors respiratoire) auxquels s’ajoutent les patients « guéris » de l’hôpital qui ont encore de longs mois de rémission et de suivi médical. Si le risque de mourir appelle vigilance et moyens, les effets de la maladie parmi les 99 % de la « population malade qui ne meurt pas » ne sont pas sans conséquences. Certaines sont connus. D’autres en voie de découverte. D’autres encore en interrogations. L’urgence de la crise peut-elle occulter ce qui dans les faits vient toucher de nombreux malades au long cours et avec eux le système de santé bien au-delà des pics aigus ?

    Combien de personnes ont-elles été infectées, sous quelles formes et de quelles façons ? Quelle est la véritable ampleur de l’épidémie et ses conséquences ?
    Ne pas nommer, c’est euphémiser la réalité. C’est ne pas dire qu’outre la survie des services hospitaliers, le sujet Covid-19 est bel et bien un sujet de santé publique qui sort des murs de l’hôpital, et qui est bien plus vaste que celui des seules maladies respiratoires et impliquant de nombreuses spécialités médicales : cardiologie, phlébologie, angiologie, ORL, gastro-entérologie, dermatologie, neurologie avec, en première ligne, les médecins généralistes qui se trouvent non seulement à traiter les cas en première instance mais souvent à orchestrer un suivi de leurs patients avec plusieurs confrères.

    Ne pas désigner l’ensemble des malades, c’est aussi omettre un enjeu de taille : la totalité des pathologies et leurs conséquences, leur durée éventuelle. Les médecins le disent, entre eux et à leurs patients : ils ne savent pas si chez certains le virus est quiescent (au repos, dormant) et se manifeste par des résurgences. Les critères de guérison ne sont pas encore clairement établis. Il apparaît que le virus après s’être exprimé par une première symptomatologie (rhinite, erythème, engelures, diarrhées, bronchite, myalgie, troubles neurologiques, etc.) puisse aussi s’exprimer en récurrence par une seconde symptomatologie touchant d’autres organes parfois plusieurs semaines plus tard (AVC, embolie, myocardite, complications urinaires, etc.).

    Les médecins ignorent pour le moment si le virus en s’attaquant à certains organes ne crée pas des pathologies qui décompenseront ou laisseront des séquelles à moyen ou long terme, voire si chez certains asymptomatiques ou symptomatiques légers, il n’y a pas de sanctuaire viral. Car les symptômes, comme les expressions apparaissent sinusoïdales : cycliques, avec des fluctuations très différentes selon les patients, leur historique, mais aussi la charge virale et les réactions de chaque organisme. Autrement dit, les complications ne touchent pas que les formes respiratoires du Covid-19, ne se limitent pas à quelques jours, et peuvent susciter des rechutes ou des rebonds. Ces aspects ne semblent pas toucher la majorité des malades et sont curables.

    Mais complexes, multiples, ils touchent bien au-delà des personnes actuellement recensées, bien au-delà de quelques semaines, des milliers de personnes. Surtout, elles appellent un suivi ou une observation sur un temps long. Beaucoup de patients, notamment ceux sortis de l’hôpital, mais pas seulement, vont être suivis sur 3, 6 ou 12 mois ou certains comme les quelques cas d’enfants « Kawasaki-like » – on le sait par les documentations déjà établies de ces symptômes – auront un suivi sur plusieurs années. Comment aider alors les médecins de ville à pouvoir exercer en pluridisciplinarité pour les cas complexes de cette nouvelle pathologie ? Comment organiser le parcours de soins si les malades et la maladie ne sont pas désignés en tant que sujets ?

    De la nécessité d’une veille sanitaire selon les critères des maladies à déclaration obligatoire
    En ne nommant pas le sujet, en ne parlant pas des malades dans leur totalité, l’État et nous avec lui, oublions une grande partie des malades, falsifiant les référentiels, obérant une des fonctions premières de la politique sanitaire du pays telle que celle-ci est censée être portée par Santé Publique France : étayer le « besoin de connaissances de la maladie » ; « évaluer (…) le risque de séquelles de la maladie » ; « évaluer les programmes de lutte et de prévention menés par les pouvoirs publics pour en mesurer l’efficacité ». Pourtant l’État a construit, depuis plusieurs décennies déjà, les outils pour « disposer d’informations afin de préserver la santé de la population » avec le dispositif des Maladies à Déclarations Obligatoires, dispositif de surveillance de 33 maladies sources d’épidémies (tuberculose, paludisme, Zika, etc.) qui repose sur la transmission de données par les médecins et les biologistes (libéraux et hospitaliers) aux médecins inspecteurs de santé publique (Misp) et leurs collaborateurs des Agences régionales de santé (ARS) ; puis aux épidémiologistes de Santé publique France.

    Ce système de déclaration permet à la fois le partage des connaissances sur la base de toutes les observations de terrain et la confidentialité des données comme du secret médical, garantissant l’anonymat des malades tout en permettant le suivi médical idoine. Là repose la constitution d’un véritable réseau de veille sanitaire incluant toutes les pathologies liées à l’infection et pas uniquement les symptômes respiratoires (à date les déclarations sur le Réseau Sentinelle sont partielles et uniquement orientées respiratoires et pas obligatoires). Ce qui est donc incompréhensible, c’est pourquoi le Covid-19 n’est que partiellement devenu une Maladie à Déclaration Obligatoire (MDO). Le dispositif mis en place par l’article 6 de la loi du 12 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire est défini afin de « recenser les personnes infectées par le coronavirus et les personnes ayant été en contact avec celles-ci, dans l’objectif de la rupture des chaînes de transmission virale ». Cependant, « ce dispositif aura une durée très limitée » i.e. le temps du dispositif est celui de l’état d’urgence.

    La déclaration obligatoire s’applique donc à la crise mais pas à une véritable veille sanitaire qui permettrait de documenter les observations cliniques et pas seulement le suivi des infections recensées sur la base de quelques critères seulement (limitées aux personnes testées). Une telle veille sanitaire assurerait le lien entre médecine de ville, toutes spécialités médicales confondues, avec ce qui se passe à l’hôpital. Cela constituerait la plateforme pour lancer des études épidémiologiques au-delà du seul lycée de Crépy-en-Valois (Oise) ou du paquebot Diamond Princess. Cela permettrait aussi le suivi dans le temps des pathologies subséquentes qui s’inscrivent dans une temporalité différente que celle de la primo-infection. Une meilleure connaissance et une meilleure compréhension permettent alors une meilleure anticipation (versus réaction), pour une approche du healthcare et non pas uniquement du sickcare.

    Or, telle qu’actuellement communiquée dans le cadre du déconfinement, la mise en place d’un système de déclaration à l’Assurance maladie par les médecins généralistes et l’intervention de brigades d’intervention, ou « contact tracer »[5], pour suivre les cas contacts des personnes identifiées infectées, est un système de contrôle des contaminations et d’enregistrement de données qui relève de la surveillance des personnes : on veille pour contenir l’épidémie, pour éviter les morts mais les effets de l’épidémie sur la santé apparaissent totalement secondaires. Pourtant le fameux article 6 mentionne que des éléments probants du diagnostic clinique peuvent être retenus dans l’identification (alinéas 4 et 7) et qu’il s’agit de pouvoir orienter les personnes infectées vers un suivi médical pendant et après ces mesures (alinéa 9). Cependant ces points sont minorés dans ce qui est expliqué auprès des populations.

    L’attention portée aux chaînes de contamination et à l’isolement des personnes infectées et leurs contacts des deux derniers jours euphémise la question du suivi thérapeutique d’une part, du suivi des malades dans le temps d’autre part, alors que de nombreux facteurs cliniques démontrent que dans un nombre non négligeable de cas (encore à étudier pour connaître la proportion) la maladie ne s’arrête pas aux portes d’une quarantaine de deux semaines.

    Le cadre d’une déclaration obligatoire évite le piège d’écorcher le secret médical et les données personnelles
    L’approche actuelle rappelle certains manques de la première phase d’identification par les tests. Ceux-ci étaient principalement accordés aux malades souffrant de difficultés respiratoires aiguës (du fait des risques vitaux potentiels). Aujourd’hui, les critères exprimés publiquement pour le signalement sont non moins partiels : fièvre, toux, altération de l’odorat et du goût laissent de côté de nombreux autres symptômes qui sont non moins évocateurs d’une éventuelle infection au Covid-19 (dermatologiques, gastroentérologiques, ophtalmologiques, etc.). En limitant les critères d’identification de la maladie à leur strict minimum, on réduit les expressions de celle-ci. On élimine tous les autres critères que pourtant de nombreuses spécialités médicales font remonter. On soustrait toutes les autres cohortes de malades sources de contamination et sujets de pathologies.

    On ne permet pas à la population de savoir qu’un érythème, des engelures, une conjonctivite, des diarrhées, une infection urinaire etc. sont possiblement des signes d’infection aux Covid-19 et donc que ces personnes-là doivent aussi être rapidement testées pour savoir si elles doivent s’isoler de leur entourage. Tel qu’actuellement pensé pour le déconfinement, le recueil de données par le biais de l’infection et de la contamination réduit la focale à l’enregistrement des personnes, là où il doit être question d’une véritable politique publique sanitaire tenant compte de la maladie et des malades. Il est nécessaire d’encourager la population à une vigilance holistique des symptômes, puis également à une deuxième salve de vigilance de la part des personnes infectées durant plusieurs semaines, afin qu’elles informent leur médecin de tout autre signe.

    Ne pas opérer en ce sens, c’est biaiser la connaissance, biaiser les réalités du terrain. Sans porter l’attention sur la nécessité du suivi des personnes infectées, l’approche actuelle se concentre sur la désignation des personnes, ce qui peut pousser des patients à ne pas consulter ou à taire les symptômes de peur de subir une enquête qui pourrait leur être délétère pour des motifs personnels (avoir à déclarer un contact qu’ils ne souhaitent pas) ou professionnels (risque de stigmatisation sur leur lieu de travail, voire crainte du licenciement dans un contexte économique altéré). La protection des données et le secret médical doivent être garantis, mais l’attention devrait non moins se porter sur les soins pour que l’implication apparaisse dans ce qu’elle a de vertueux : dire pour guérir.

    Considérer la maladie à partir de critères cliniques, c’est faire prendre conscience des plus larges biais de contagiosité ou des besoins de suivis éventuels
    Enfin, le dispositif tel qu’expliqué à date engage un autre biais de désignation restrictif. La période d’incubation est encore mal connue et estimée entre 2 et 14 jours. Dans le cadre de la procédure définie actuellement, la brigade sanitaire a vocation à recenser les contacts des deux derniers jours de fréquentation d’un malade identifié. Là, on comprend que ce ne sont pas seulement les questions du secret médical et des données personnelles qui sont problématiques, mais aussi les bases mêmes de l’identification : à ne remonter les contacts que sur 2 jours, nombreux infectés potentiels sont inaperçus.

    Quel est le droit pour la brigade sanitaire de contrôler, décider pour des personnes supposées contaminées : vérifier si ces personnes s’isolent correctement, refont bien les tests, y embarquent également leur propre entourage en donnant à leur tour les noms des personnes fréquentées ? Jusqu’où un tel raisonnement est-il opératoire ? Jusqu’où enregistre-t-on les inter-connaissances et les cercles d’interaction ? Un tel exercice, replacé dans le contexte de la maladie permettrait une toute autre sensibilisation de la population. En recensant l’intrication sociale (embeddedness) de la contamination, mais pas le chemin du virus dans l’organisme, le corps social prend le pas sur le corps médical. L’individu et ses relations ont le dessus sur le malade et sa maladie.

    Par ailleurs, selon le type d’expression de l’infection un malade peut contaminer autrui 14, 21 ou 28 jours, voire plus selon la durée de ses propres infections, nombre de jours auxquels ajouter une semaine sans symptômes. Que ce soit pour un malade sorti d’hôpital et qui poursuit ses soins en ville, ou pour un malade soigné au Doliprane à la maison, le sujet est le même : la durée de contamination varie, l’éventualité de rebonds également. Là encore, les temps officiels de réclusion ne sont pas les temps des malades et de leurs pathologies. Même la délimitation de la contagiosité n’est pas encore maîtrisée par les médecins eux-mêmes à ce jour. La question d’un suivi régulier avec le médecin coordonnant les soins du malade est nécessaire, et mettre en place ce suivi participerait de la rétention des contaminations. Pourquoi ne pas expliquer tout cela afin que tous puissent agir de façon concertée et responsable puisque l’objectif est bien d’envisager, au-delà de la désignation du malade, la cure de la maladie ?

    La veille sanitaire non seulement soutient la planification des soins mais aussi la stratégie de prévention
    En ne traitant que des morts et des malades hospitalisés et dorénavant en créant un système qui entérine une politique d’enregistrement ad hoc des infectés, les discours se cristallisent sur la partie émergée de l’iceberg. En dehors de l’hôpital, le message officiel est qu’on ne considère le malade que comme un contagieux et pas comme un malade. Plus souvent qu’il ne tue, le virus touche les vivants et impose aussi ses conséquences chez ceux qui restent en vie. Se concentrer sur l’étape d’infection et la contamination, sur l’explosion de l’hôpital, ou sur une appli telle StopCovid, ne permet pas d’accompagner les malades et détourne des outils prioritaires qui construisent eux-mêmes les données nécessaires : les données cliniques et biologiques pour élaborer les catégories de l’analyse médicale, du parcours de soins des malades et les mesures de prévention et d’hygiène collective pour protéger les populations.

    Car le message de prévention pour les gestes barrières est affaibli avec cette vision binaire : ce n’est pas pareil d’évoquer le 1 % qui peut mourir, particulièrement au-dessus de 60 ans, que de dire clairement « il y a des risques pour toutes personnes contaminées » y compris les enfants. Ces risques touchent déjà plusieurs dizaines de milliers de personnes qui vont être suivies au long cours. Cela peut non seulement changer le message mais aussi réorienter toute la politique sanitaire en obtenant une conscience et une responsabilité plus grandes de l’ensemble de la population qu’il va falloir, en outre, réussir à maintenir dans le temps. Nommer la maladie et ses expressions, les malades et leurs spécificités, devient alors source d’informations pour tous. C’est prendre le sujet dans toutes ses réalités et l’accompagner au-delà du temps de crise, sur le temps long qu’impose sa versatilité et ses évolutions, pour les malades, la santé publique et la société dans son ensemble avec l’impact socio-économique sous-jacent aux maladies complexes.

    [1] Les chiffres officiels sont accessibles sur data.gouv.fr et santepubliquefrance.fr. On notera cependant que si la France déclare 139 000 cas confirmés, la source de Statista fondée sur les chiffres des chercheurs de Johns Hopkins indique 175 000 cas confirmés en France, ce qui rend toutes les considérations chiffrées somme toute compliquées.

    [2] 20 % des personnes infectées serait asymptomatique, selon une étude dans un cluster en Allemagne mais 50 % selon l’étude à bord du paquebot Diamond Princess (voir infra). AMMOUCHE (Marielle), « Covid-19 : 20% de patients asymptomatiques dans un cluster en Allemagne », Egora.fr, accessible ici.

    [3] Chiffres du 13 mai 2020 par une équipe d’épidémiologistes de l’Institut Pasteur réactualisant l’étude conduite le 21 avril et tenant compte de l’impact du confinement. Ces calculs sont fondés sur des modélisations et données d’hospitalisation et de santé. Simon Cauchenez & alii, « Estimating the burden of SARS-CoV-2 in France », Science, accessible ici.

    [4] Le calcul est établi sur la base de l’estimation des quelques 3 millions de personnes infectées, dont sont déduits 50 % d’asymptomatiques, les personnes hospitalisées et décédées. Sous réserve des marges à prendre en compte.

    [5] Sur le recrutement et les missions des brigades, plusieurs articles de presse : NouvelObs, LeFigaro, Slate.fr, LCI.fr, OuestFrance, BFM.tv.

    #hospitalo_centrisme #santé_publique

    • On ne permet pas à la population de savoir qu’un érythème, des engelures, une conjonctivite, des diarrhées, une infection urinaire etc. sont possiblement des signes d’infection aux Covid-19 et donc que ces personnes-là doivent aussi être rapidement testées pour savoir si elles doivent s’isoler de leur entourage

    • contribution remarquable, à diffuser largement !

      En ne traitant que des morts et des malades hospitalisés et dorénavant en créant un système qui entérine une politique d’enregistrement ad hoc des infectés, les discours se cristallisent sur la partie émergée de l’iceberg. En dehors de l’hôpital, le message officiel est qu’on ne considère le malade que comme un contagieux et pas comme un malade. Plus souvent qu’il ne tue, le virus touche les vivants et impose aussi ses conséquences chez ceux qui restent en vie. Se concentrer sur l’étape d’infection et la contamination, sur l’explosion de l’hôpital, ou sur une appli telle StopCovid, ne permet pas d’accompagner les malades et détourne des outils prioritaires qui construisent eux-mêmes les données nécessaires : les données cliniques et biologiques pour élaborer les catégories de l’analyse médicale, du parcours de soins des malades et les mesures de prévention et d’hygiène collective pour protéger les populations.

      #maladie_à_déclaration_obligatoire

    • D’ailleurs un des aspects que je constate à chaque fois que je tombe (malheureusement) sur une relation qui m’explique que hé ben dis donc tu te rends comptes qu’on a été confinés et qu’on a détruit l’économie pour aussi peu, et donc clairement partisans de la recherche rapide de l’immunité de groupe, il y a systématiquement l’occultation des gens qui en ont chié en étant malades chez eux.

    • Des #témoignages parmi d’autres, via la veille de @monolecte :
      Covid-19 : deux mois après leur infection, de nombreux patients présentent de nouveaux symptômes - France 3 Paris Ile-de-France
      https://seenthis.net/messages/854487

      Par contre, dans le texte, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris :

      Par ailleurs, selon le type d’expression de l’infection un malade peut contaminer autrui 14, 21 ou 28 jours, voire plus selon la durée de ses propres infections, nombre de jours auxquels ajouter une semaine sans symptômes.

      Elle veut dire qu’une personne peut être contagieuse aussi longtemps après l’apparition des symptômes, quand elle en a ? Je n’avais pas vu passer cette info.

  • Cats can catch #Covid-19 from other cats. The question is: Can we?
    https://www.statnews.com/2020/05/13/cats-can-catch-covid-19-from-one-another-study-finds-the-question-is-can-w

    ... the researchers suggested people should be aware of the possibility of transmission from cats to people, and keep cats away from anyone in a household who is suspected of being sick with Covid-19. “I think it’s good practice to have this in people’s minds,” Halfmann said. He and his co-authors also urged people not to abandon cats or give them up for adoption because of such concerns.

    They also advised cat owners to keep their cats indoors.

    “Cats are still much more likely to get Covid-19 from you, rather than you get it from a cat,” Keith Poulsen, director of the Wisconsin Veterinary Diagnostic Laboratory, said in a statement.

  • An outbreak of severe Kawasaki-like disease at the Italian epicentre of the SARS-CoV-2 epidemic: an observational cohort study - The Lancet
    https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(20)31103-X/abstract

    In the past month we found a 30-fold increased incidence of Kawasaki-like disease. Children diagnosed after the SARS-CoV-2 epidemic began showed evidence of immune response to the virus, were older, had a higher rate of cardiac involvement, and features of MAS. The SARS-CoV-2 epidemic was associated with high incidence of a severe form of Kawasaki disease. A similar outbreak of Kawasaki-like disease is expected in countries involved in the #SARS-CoV-2 epidemic.

    #Maladie_de_Kawazaki #enfants

  • A Genève, la pandémie de Covid-19 révèle une misère sociale jusqu’alors invisible
    https://www.lemonde.fr/international/article/2020/05/05/geneve-la-pandemie-de-covid-19-revelateur-d-une-misere-sociale-invisible_603

    A Genève, les sans-papiers – majoritairement des femmes philippines et latino-américaines – seraient près de 10 000. A l’échelle de la Suisse, « les chiffres parlent de 100 000 à 300 000 sans-papiers exclus des systèmes d’aide sociale », selon Mme Marra

    #Covid-19#migrant#migration#Suisse#travailleurs-invisibles#sans-papier#détresse-psychologique#misère#accès-santé#MSF#maladies-chroniques

  • #Homothérapies, #conversion_forcée

    Électrochocs, lobotomies frontales, « thérapies » hormonales… : dans les années 1970, aux États-Unis, la #dépsychiatrisation de l’homosexualité met progressivement fin à ces pratiques médicales inhumaines, tout en donnant naissance à des mouvements religieux qui prétendent « guérir » ce qu’elles considèrent comme un péché, une déviance inacceptable. Depuis, les plus actives de ces associations – les évangéliques d’Exodus ou les catholiques de Courage – ont essaimé sur tous les continents, à travers une logique de franchises. Bénéficiant d’une confortable notoriété aux États-Unis ou dans l’ultracatholique Pologne, ces réseaux œuvrent en toute discrétion en France et en Allemagne. Mais si les méthodes diffèrent, l’objectif reste identique : convertir les personnes homosexuelles à l’hétérosexualité ou, à défaut, les pousser à la continence. Comme Deb, fille d’évangélistes de l’Arkansas ouvertement homophobes, Jean-Michel Dunand, aujourd’hui animateur d’une communauté œcuménique homosensible et transgenre, a subi de traumatisantes séances d’exorcisme. De son côté, la Polonaise Ewa a été ballottée de messes de guérison en consultations chez un sexologue adepte des décharges électriques. Rongés par la honte et la culpabilité, tous ont souffert de séquelles psychiques graves : haine de soi, alcoolisme, dépression, tentation du suicide…

    Étayée par le travail de deux jeunes journalistes, dont l’un s’est infiltré dans des mouvements français – des rencontres façon Alcooliques anonymes de Courage aux séminaires estivaux de Torrents de vie, avec transes collectives au menu –, cette enquête sur les « thérapies de conversion » donne la parole à des victimes de cinq pays. Leurs témoignages, à la fois rares et bouleversants, mettent en lumière les conséquences dévastatrices de pratiques qui s’apparentent à des dérives sectaires. « Nous avons affaire à une espèce de psychothérapie sauvage qui peut amener à la destruction de la personnalité », affirme ainsi Serge Blisko, ancien président de la #Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires). En mars 2018, le Parlement européen a voté une résolution appelant les États membres à interdire ces prétendues thérapies. Jusqu’à maintenant, seul Malte a légiféré sur le sujet.


    https://boutique.arte.tv/detail/homotherapies_conversion_forcee
    #film #film_documentaire #documentaire
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  • Les zoonoses, entre humains et #animaux
    http://www.laviedesidees.fr/Les-zoonoses-entre-humains-et-animaux.html

    Le Covid-19 a remis sur le devant de la scène les zoonoses, ces maladies qui nous viennent des animaux. Elles sont nombreuses et certaines sont anciennes. Toutes elles interrogent notre rapport à un écosystème dont nous ne cessons d’altérer la biodiversité.

    #biodiversité #maladie #épidémie #Sciences
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20200501_zoonoses.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20200501_zoonoses.pdf

  • Nigéria : l’OIM construit des centres de quarantaine dans les camps de déplacés internes tandis que l’Etat de Borno touché par le conflit enregistre ses premiers cas de COVID-19 | Organisation internationale pour les migrations
    https://www.iom.int/fr/news/nigeria-loim-construit-des-centres-de-quarantaine-dans-les-camps-de-deplaces-in
    #Covid-19#migrant#migration#Nigeria#Borno#déplacés-internes#infrastructures-sanitaires#camps#maladies#quarantaine#OIM

  • « Le Nigeria est mieux préparé que nous aux épidémies » , Entretien avec l’historien Guillaume Lachenal, 20 avril 2020
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/200420/le-nigeria-est-mieux-prepare-que-nous-aux-epidemies?onglet=full

    Leçons à tirer des façons dont le Sud fait face aux épidémies, approche sécuritaire des virus, relations entre le médical et le politique, logiques sous-jacentes à la « médecine de tri »…

    Guillaume Lachenal est historien des sciences, chercheur au Medialab de Sciences-Po. Ses principales recherches portent sur l’histoire et l’anthropologie des épidémies, de la médecine et de la santé publique dans les contextes coloniaux et post-coloniaux d’Afrique. Il a notamment publié Le Médicament qui devait sauver l’Afrique (La Découverte, 2014, traduction anglaise The Lomidine files, Johns Hopkins University Press, 2017) et Le Médecin qui voulut être roi (Seuil, 2017).

    Qu’est-ce que les épidémies vécues récemment par les pays du Sud peuvent nous apprendre sur ce qui se passe aujourd’hui ?

    Guillaume Lachenal : Comme le disaient déjà les anthropologues Jean et John Comaroff, la théorie sociale vient désormais du Sud, parce que les pays du Sud ont expérimenté, avec vingt ou vingt-cinq ans d’avance, les politiques d’austérité sous des formes radicales. Le néolibéralisme précoce s’est déployé au Sud, notamment dans les politiques de santé. Il est à l’arrière-plan des épidémies de sida et d’Ebola.

    On découvre aujourd’hui le besoin d’une grille de compréhension qui parte des questions de pénurie, de rareté, de rupture de stocks qui se trouvent être au cœur de l’anthropologie de la santé dans les pays du Sud. On parle aujourd’hui beaucoup de mondialisation, de flux et de la façon dont le virus a épousé ces mouvements, mais observée d’Afrique et des pays du Sud, la mondialisation est une histoire qui ressemble à ce qu’on voit aujourd’hui : des frontières fermées, des avions qu’on ne peut pas prendre, des mobilités impossibles.
    Jusqu’au début des années 2000, en Afrique, l’épidémie de sida, c’est une histoire de médicaments qu’on n’arrive pas à obtenir, qu’on fait passer dans des valises au marché noir… Durant la grande épidémie d’Ebola de 2014, les structures de santé ont été dépassées pour des raisons matérielles élémentaires : manque de personnel, pénurie de matériel…

    Il existe donc, au Sud, tout un corpus d’expériences riche d’enseignements, comme le soulignait récemment l’historien Jean-Paul Gaudillière. Comme Ebola, le Covid est à maints égards une maladie du soin, qui touche en premier lieu les structures de santé, mais aussi les relations de prises en charge domestiques. Surtout, le Sud nous montre comment on a voulu mobiliser une approche sécuritaire des épidémies, au moment même où on négligeait les systèmes de santé.

    Toute l’histoire de la santé publique dans ces pays rappelle pourtant qu’il ne suffit pas d’applications pour monitorer le virus et de drones pour envoyer les médicaments ; que ces modes de gouvernement sont de peu d’efficacité face à une épidémie. On peut tenter de transposer, ici, cette critique d’une gouvernementalité spectaculaire qui produit seulement une fiction de préparation.

    Il y a trois ans, la conférence de Munich sur la sécurité avait été inaugurée par Bill Gates qui affirmait que la menace principale pour le monde était de nature épidémique et pas sécuritaire. Depuis quinze ans, tous les livres blancs de la Défense mettent les épidémies tout en haut de l’agenda. Et nous sommes pourtant dépassés quand elle arrive. Cette contradiction n’est en réalité qu’apparente. Parce que nous avons en réalité confié cette question sanitaire à une logique de start-up, d’innovation et de philanthropie, dans laquelle la politique sécuritaire des États consiste d’abord à mettre en scène sa capacité à intervenir, à simuler son aptitude à gouverner, mais sans véritable moyen de le faire.

    L’anthropologue et médecin Paul Farmer, qui avait été notamment l’envoyé spécial des Nations unies à Haïti après le séisme en 2009, rappelait à propos du fiasco de la réponse à Ebola, en 2014, que la réponse à une épidémie, c’est avant tout « staff and stuff » , des gens et des choses. La France se prend aujourd’hui en pleine figure le manque de masques, de matériels et de tests, et expose ainsi l’hiatus profond entre un débat public expliquant qu’il faut tester davantage, se protéger davantage, et la matérialité de la situation, avec le manque de réactifs, l’incapacité de produire suffisamment de masques, mais aussi l’absence de personnels de santé publique capables de faire le suivi des cas.

    Actuellement, ce n’est pas d’idées, de stratégies, de perspectives critiques que l’on manque… On manque de choses. Les questions les plus intéressantes aujourd’hui sont logistiques et il est sans doute plus intéressant de parler à un brancardier de l’hôpital Delafontaine de Saint-Denis ou à un livreur de Franprix qu’à n’importe quel chercheur. La question centrale, aujourd’hui, c’est l’épidémiologie sociale : comment le virus s’engouffre dans les failles de nos sociétés : les inégalités, les conditions de vie, les différences d’exposition du fait du travail, et toutes les comorbidités qui aggravent la maladie, comme on le voit avec les disparités raciales aux États-Unis, ou le cas de la Seine-Saint-Denis, ici.

    Avec une certaine ironie, on constate que des pays comme le Cameroun ou le Nigeria sont mieux préparés car ils disposent de ce qu’on appelle des agents de santé communautaire ( Community Health Workers ) qui sont des gens peu formés – ce ne sont pas des infirmiers – mais qui sont des sortes d’aides-soignants de santé publique, qui s’occupent des campagnes de vaccination, mais aussi de surveillance épidémiologique, et qui s’avèrent très utiles pour faire le suivi des cas, et des contacts des personnes infectées. C’est un savoir social que ne peut faire la police ou un smartphone.

    Au moment d’Ebola, quelques cas se sont déclarés à Lagos, au Nigeria, et on a craint le pire dans une métropole comme celle-ci, avec un virus aussi mortel. Mais en réalité, le pays a pu s’appuyer sur ces personnes très bien implantées dans les quartiers et les communautés, qui devaient déjà faire face à une épidémie de polio, et ont donc su tracer les contacts, isoler les malades, et réussi à éteindre l’épidémie. Cette success story africaine rappelle que la principale réponse aux épidémies est une réponse humaine, qu’on a complètement négligée ici, où personne ne viendra frapper à notre porte, et où rares sont les quartiers organisés en « communautés ».

    Vous avez coordonné, en 2014, une publication sur la « médecine de tri », dont on saisit aujourd’hui l’ampleur. Pourquoi jugez-vous qu’il s’agit du paradigme de la médecine de notre temps ?

    Ces pratiques de tri qu’on découvre aujourd’hui dans le débat public sont routinières en médecine. Elles sont violentes pour les soignants, difficiles éthiquement, insupportables philosophiquement, mais elles sont aussi nécessaires. On ne peut pas bien soigner les gens sans choisir où faire porter ses efforts. Et ces pratiques de tri sur critères médicaux sont aussi un moyen de traiter les gens de manière égalitaire, au sens où ce ne sera pas seulement celui qui paie le plus qui aura le droit à un ventilateur par exemple.
    Cela dit, ce tri se fait parce qu’il existe un écart entre des ressources rares et les besoins des patients. Or, cette rareté peut aussi être produite, en raison par exemple de la politique d’austérité qui frappe les systèmes de santé. Il est donc important d’avoir un débat sur la production de cette rareté, par exemple au sujet de la réduction du nombre de lits. Mais ce qui produit de la rareté, c’est aussi l’innovation médicale en tant que telle. La dialyse, le respirateur, la réanimation soulèvent de nouvelles questions d’accès et de tri, qui ne se posent pas dans de nombreux pays du Sud où quasiment personne n’y a accès.

    Comment définissez-vous la « santé globale » ? Et pourquoi dites-vous qu’il s’agit du « stade Dubaï » de la santé publique, en faisant référence à la façon dont le sociologue Mike Davis faisait de Dubaï l’emblème du capitalisme avancé ?

    Depuis le milieu des années 1990, les questions de sécurité sanitaire et de biosécurité ont pris de plus en plus de place sur l’agenda. Les réponses très verticales à des épidémies comme celle de VIH ont été motivées avant tout par des préoccupations sécuritaires, notamment d’un point de vue américain, avec l’idée qu’il ne fallait pas les laisser hors de contrôle.

    Ce tournant sécuritaire a coïncidé avec un tournant néolibéral, notamment dans le Sud, où on a contraint les États à diminuer les dépenses de santé publique, et à avoir recours à la philanthropie, ou à développer des infrastructures privées. Lors de mes enquêtes en Afrique par exemple, j’ai pu constater que la santé publique n’était plus qu’un souvenir, dont les personnes âgées parlaient souvent avec nostalgie, comme d’une époque où on pouvait obtenir des médicaments et se faire soigner gratuitement. À partir de la fin des années 1990, tout devient payant et on passe à une approche beaucoup plus minimaliste et sécuritaire de l’intervention de l’État en matière de santé.

    Ce moment qu’on désigne comme celui de « Global Health » , de santé mondiale, est caractérisé, dans le Sud, à la fois par un retrait des États et par un boom du financement global, assuré en particulier par la fondation Gates et les grandes banques de développement dont la banque mondiale, qui mettent en place des infrastructures de santé, le plus souvent avec des partenariats public-privé.

    Pour le dire schématiquement, vous avez des dispensaires qui tombent en ruine et des hôpitaux champignons tout neufs qui poussent parfois juste à côté, construits par les Indiens ou les Chinois, et financés par les banques de développement. Pour les habitants, ces institutions sont le plus souvent des mirages, parce qu’ils sont payants, ou, au sens propre, parce que construire un hôpital, même en envoyant des médecins indiens comme on l’a vu par exemple au Congo, n’est pas très utile quand on manque d’eau, d’électricité, de médicaments…
    D’où la référence à Mike Davis. Ces infrastructures sont des coquilles de verre impressionnantes mais qui demeurent des énigmes pour les habitants, et favorisent toute une épidémiologie populaire qui s’interroge sur ce qu’on a pris ici pour financer cela là, sur l’économie extractive qui a permis la construction de tel ou tel hôpital.

    Cette épidémiologie populaire désigne la façon dont les populations confrontées à des épidémies de type VIH-sida ou Ebola les inscrivent dans des économies politiques globales et des formes vernaculaires de compréhension, et relient les épidémies à des interrogations sur le sens de la maladie.

    C’est comme cela qu’on entend que le sida a été envoyé par tel politicien soucieux de se venger de tel ou tel village, ou Ebola par MSF pour pouvoir prélever des organes sur les cadavres… C’est aussi comme ça qu’on relie telle maladie, comme l’ulcère de Buruli, avec une transformation du paysage, avec tel ou tel changement environnemental. Évidemment tout n’est pas vrai, loin de là, mais dire que l’Afrique est dégradée par une économie extractive, c’est banalement exact.

    L’utopie du docteur David, que vous avez étudiée dans Le Médecin qui voulut être roi , d’un monde dont l’organisation serait entièrement déterminée par la médecine est-elle en train de se réaliser ?

    L’histoire coloniale est riche d’enseignements car on y voit des médecins coloniaux qui, à l’instar du docteur David, peuvent enfin vivre leur rêve d’avoir les rênes du pouvoir et d’appliquer leur science à toute la société. Pendant la guerre, le docteur David possède ainsi un pouvoir absolu sur toute une partie du Cameroun. Il profite de ses pleins pouvoirs en tant que médecin pour lutter contre les épidémies. Mais ce qui est instructif, c’est qu’il découvre son impuissance et il n’arrive pas à changer grand-chose au destin des maladies, car il ne comprend pas la société locale, car il n’a pas tous les leviers d’action qu’il croit posséder en ayant pourtant à la fois la science médicale et le pouvoir politique.
    Il peut être intéressant de jouer du parallèle, car l’utopie qui donnerait tout le pouvoir aux médecins, et travaille toute la santé publique et la biopolitique, n’a jamais été vraiment mise en place, mais demeure à l’état de rêve et de projet politiques – Foucault parlait du « rêve politique de la peste » . Ce qu’on traverse en ce moment, c’est à la fois l’apparence d’une toute-puissance biopolitique, mais aussi l’impuissance fondamentale de tout cela, parce que la réalité ne coïncide pas avec le projet. Ce n’est pas parce que les citoyens ne respectent pas le confinement, au contraire, mais parce que les autorités, notamment municipales, improvisent et imposent une théorie du confinement qui est loin d’être fondée sur une preuve épidémiologique.

    Les derniers arrêtés municipaux, c’est le Gendarme de Saint-Tropez derrière les joggeurs ! Rien ne dit aujourd’hui que le virus s’est beaucoup transmis dans les parcs, et une approche de santé publique rationnelle, qui arbitrerait coûts, sur la santé mentale et les enfants notamment, et bénéfices, imposerait plutôt de les rouvrir au plus vite, avec des règles adaptées – comme en Allemagne par exemple. Comme à l’époque coloniale, on a plutôt l’impression d’une biopolitique qui ne calcule pas grand-chose, et dont la priorité reste en fait d’éprouver sa capacité à maintenir l’ordre.

    Dans un texte publié mi-février, vous affirmiez à propos de l’épidémie qui débutait alors, qu’il s’agissait d’un « phénomène sans message » et qu’il fallait « se méfier de cette volonté d’interpréter ce que le coronavirus “révèle” » . Vous situez-vous toujours sur cette position deux mois plus tard ?

    Je maintiens cette position d’hygiène mentale et d’hygiène publique qui me paraît importante. Sans vouloir jeter la pierre à quiconque, toute une industrie du commentaire s’est mise en place et on se demande aujourd’hui ce que le coronavirus ne « révèle » pas.

    En tant qu’enseignant qui se trouvait être en train de faire un cours sur l’histoire des épidémies lorsque celle-ci est apparue, je me méfiais de l’ennui qu’on peut ressentir à enseigner cette histoire si on s’en tient aux invariants : le commencement anodin, le déni, la panique, l’impuissance, les digues morales qui sautent, les tentatives plus ou moins rationnelles pour comprendre et contrôler, et puis la vague qui se retire avec ses blessures…

    Dans ce contexte, la pensée de l’écrivain Susan Sontag a été ma boussole, en tout cas une position qu’il me semble nécessaire de considérer : il est possible que tout cela n’ait pas de sens. La chercheuse Paula Treichler avait, dans un article célèbre, évoqué « l’épidémie de significations » autour du sida. On se trouve dans une configuration similaire, avec tout un tas de théories du complot, le raoultisme, mais aussi des interprétations savantes qui ne font guère avancer les choses. Il me paraît ainsi intéressant de relever l’homologie entre les théories du complot et celles qui attribuent cela à Macron, à Buzyn ou à telle ou telle multinationale, et qui ont en commun d’exiger qu’il y ait une faute humaine à l’origine de ce qui arrive.
    Ce sont des choses qu’on a beaucoup vues dans des pays du Sud qui n’ont jamais cessé de connaître des épidémies secouant la société, qu’il s’agisse du sida en Haïti et en Afrique ou du virus Ebola. Ces théories jugées complotistes ne sont pas forcément irrationnelles ou inintéressantes politiquement. Pendant la dernière épidémie d’Ebola au Kivu congolais, on a accusé le pouvoir central, l’OMS ou certains politiciens locaux d’être derrière l’épidémie pour profiter de « l’Ebola business ».

    Des enquêtes journalistiques menées depuis, comme celle d’Emmanuel Freudenthal, ont effectivement montré l’ampleur de la structure de corruption mise en place autour de la réponse Ebola au Kivu, même si cela ne veut pas dire qu’elle avait été provoquée. L’épidémiologie populaire, comme on la désigne en anthropologie de la santé, est porteuse de diagnostics sociaux et politiques qui sont souvent au moins aussi intéressants que certains discours de sciences sociales qui cherchent à mettre du sens là où il n’y en a pas toujours.

    Le stade Dubaï de la santé publique
    La santé globale en Afrique entre passé et futur
    Guillaume Lachenal
    Dans Revue Tiers Monde 2013/3 (n°215), pages 53 à 71
    https://www.cairn.info/revue-tiers-monde-2013-3-page-53.htm

    Sans gendarme de Saint-tropez : Security agents killed more Nigerians in two weeks than Coronavirus
    https://seenthis.net/messages/845017

    Articles cités :

    Covid-19 et santé globale : la fin du grand partage ?, Jean-Paul Gaudillière
    https://aoc.media/analyse/2020/04/02/covid-19-et-sante-globale-la-fin-du-grand-partage
    est sous#paywall...

    Donner sens au sida, Guillaume Lachenal
    https://journals.openedition.org/gss/2867

    Bill Gates, « l’homme le plus généreux du monde », ne l’est pas tant que cela
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/110519/bill-gates-l-homme-le-plus-genereux-du-monde-ne-l-est-pas-tant-que-cela?on

    En RDC, la Riposte de l’OMS rattrapée par l’« Ebola business »
    https://www.liberation.fr/planete/2020/02/04/en-rdc-la-riposte-de-l-oms-rattrapee-par-l-ebola-business_1776970

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