• How an EU-funded security force helped Senegal crush democracy protests

    An elite EU-trained Senegalese police unit was meant to tackle cross-border crime. Instead it was used to quash a popular movement, an Al Jazeera investigation has found.

    The Senegalese government deployed a special counterterrorism unit, created, equipped, and trained with funding from the European Union, to violently suppress recent pro-democracy protests, a joint investigation between Al Jazeera and porCausa Foundation reveals.

    Since 2021, the trial of popular and controversial opposition leader #Ousmane_Sonko has led to demonstrations across the West African nation, in which dozens have been killed. Al Jazeera and porCausa obtained visual evidence, Spanish government contracts, a confidential evaluation report, and testimonies from multiple sources suggesting that the EU-funded #Rapid_Action_Surveillance_and_Intervention_Group, also known as #GAR-SI, was used to violently crush those protests.

    In one video, security personnel in the same type of armoured vehicles the EU bought for #GAR-SI_Senegal are seen firing tear gas at a protest caravan organised by Sonko last May. Al Jazeera verified that the incident happened in the southern Senegalese village of #Mampatim, about 50km (31 miles) from Kolda, in the Casamance region.

    The EU-funded elite units were instead meant to be based in Senegal’s border areas with Mali to fight cross-border crime.

    Elite unit

    #GAR-SI_Sahel was a regional project lasting between 2016 and 2023 and funded with 75 million euros ($81.3m) from the EU’s Emergency Trust Fund for Africa (#EUTF_for_Africa), a pot of development funding dedicated to addressing the root causes of migration in Africa.

    The programme was implemented by the #International_and_Ibero-American_Foundation_for_Administration_and_Public_Policies (#FIIAPP), a development agency belonging to Spain’s Ministry of Foreign Affairs. GAR-SI units were created across the region, in countries like Burkina Faso, Chad, Mali, Mauritania, Niger and Senegal, “as a prerequisite for their sustainable socio-economic development”.

    The Senegalese 300-strong unit, created in 2017, cost more than 7 million euros ($7.6m at the current exchange rate) and was aimed at creating a special intervention unit in the town of #Kidira, on the border of Mali, to protect Senegal from potential incursions by armed groups and cross-border crimes, including migrant smuggling.

    Modelled after Spanish units that fought against the separatist movement Basque Homeland and Liberty, also known by the Spanish initials ETA, GAR-SI Senegal has received technical training and mentoring from the Spanish Civil Guard as well as French, Italian and Portuguese security forces.

    After the completion of the project, at the request of all stakeholders, the EU delegation in Senegal continued with a second phase using another funding mechanism, according to one Spanish and one Senegalese police source familiar with the matter. About 4.5 million euros ($4.9m) was earmarked for a second 250-strong GAR-SI Senegal unit near the town of Saraya, close to the border with Guinea and Mali.

    A second unit was also created in Mali but for other countries, especially Chad, the project was considered to be a “failure”, according to the former Senegalese police official, who said the EU lost money by paying for equipment that was not appropriate for use.

    https://www.aljazeera.com/features/2024/2/29/how-an-eu-funded-security-force-helped-senegal-crush-democracy-protests

    #Sénégal #police #formation #EU #UE #Union_européenne #démocratie #ingérence #contre-terrorisme #Trust_Fund #Espagne #France #Italie #Portugal #frontières #financement #Mali #Tchad #équipement

  • Niger : les flux migratoires augmentent depuis l’abrogation de la loi anti-passeurs (OIM)
    https://www.dakaractu.com/Niger-les-flux-migratoires-augmentent-depuis-l-abrogation-de-la-loi-anti-

    Niger : les flux migratoires augmentent depuis l’abrogation de la loi anti-passeurs (OIM)
    Les flux migratoires vers la Libye et l’Algérie ont significativement augmenté depuis l’abrogation par les militaires au pouvoir au Niger d’une loi criminalisant le trafic illicite de migrants, selon un rapport de l’Organisation internationale des migrations (OIM) consulté par l’AFP dimanche."Depuis le mois de décembre 2023, les flux de manière générale ne cessent de progresser", indique l’OIM, attribuant cette hausse « à l’abrogation de la loi 036/2015 » adoptée en 2015 et abrogée en novembre. Dans le nord du Niger, couloir de passage des migrants subsahariens en route vers la Libye, l’Algérie ou l’Europe, les flux transfrontaliers ont augmenté de 50% par rapport à décembre 2023, et les flux « sortants » depuis le Niger de 69%, selon l’OIM.
    « Les principales nationalités observées au niveau des points de suivi des flux étaient les Nigériens (75%), les Nigérians (7%), les Tchadiens (5%) et les Maliens (2%) », précise l’organisation.Les ressortissants nigériens dans leur immense majorité pratiquent une migration dite « circulaire » entre le Niger et les pays du Maghreb en quête d’opportunités économiques, au contraire de migrants d’autres nationalités qui font route vers les frontières de l’Europe. La loi controversée de 2015 avait fait du Niger un partenaire stratégique de la politique migratoire de l’Union européenne (UE).
    L’UE a suspendu sa coopération avec le Niger dans la foulée du coup d’État qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum en juillet dernier. Le transport de migrants constitue depuis des décennies l’un des piliers de l’économie du nord du Niger, une région désertique située sur les anciennes routes caravanières, devenue un couloir de trafics transsahariens. Les militaires au pouvoir avaient dénoncé une loi adoptée « sous l’influence de certaines puissances étrangères » et qui « ne prenait pas en compte les intérêts du Niger et de ses concitoyens » pour justifier cette abrogation, largement saluée par les habitants de cette région.

    #Covid-19#migrant#migration#niger#UE#nigeria#tchad#mali#routemigratoire#oim#flux#frontiere#sante

  • L’UE octroie 210 millions d’euros à la #Mauritanie pour lutter contre l’immigration clandestine

    L’UE a prévu une enveloppe de 210 millions d’euros pour aider la Mauritanie à réduire le nombre de migrants transitant par son territoire en direction des #îles_Canaries, ont annoncé la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, et le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, lors d’une visite dans le pays d’Afrique de l’Ouest jeudi (8 février).

    Il s’agit là du plus récent #accord de l’UE avec un pays africain visant à financer un large éventail de secteurs, mais aussi à réduire l’immigration clandestine vers l’Europe, après les accords conclus avec la Tunisie, le Maroc et l’Égypte l’année dernière.

    Au cours de la cérémonie, à laquelle assistait également le président mauritanien, Mohamed Ould El-Ghazaouani, un investissement de 210 millions d’euros a été annoncé pour soutenir les efforts de la Mauritanie en ce sens, pour financer l’#aide_humanitaire et pour offrir des opportunités à la #jeunesse mauritanienne.

    Ursula von der Leyen a également reconnu le rôle « primordial » de la Mauritanie pour la stabilité dans la région, raison pour laquelle une partie de l’enveloppe annoncée sera allouée à la sécurité. Bruxelles aidera ainsi la Mauritanie à « sécuriser » ses #frontières avec le #Mali, en guerre depuis 2012.

    La présidente de la Commission a cité d’autres domaines et projets qui profiteront du financement européen, tels que l’hydrogène vert, la connectivité ou encore l’emploi.

    Bien que la Mauritanie ne partage pas de frontière avec l’UE, un nombre important de demandeurs d’asile transitent par son territoire. Le pays d’Afrique de l’Ouest accueille plus de 100 000 réfugiés, principalement en provenance du Mali, selon les données du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).

    La présence de Pedro Sánchez à Nouakchott jeudi s’explique par le fait que, selon les registres officiels, 83 % des migrants arrivant aux îles Canaries en Espagne par des voies irrégulières transitent par la Mauritanie. La question de l’immigration clandestine en provenance du pays est donc un enjeu important pour Madrid.

    Par le passé, l’UE a déjà conclu plusieurs accords et mis en œuvre plusieurs projets couvrant différents domaines avec les pays africains. Dans certains d’entre eux, par exemple, le bloc investit depuis des années dans la formation, l’assistance et la fourniture d’équipements pour les gardes-frontières terrestres et maritimes.

    L’importance nouvelle de la Mauritanie

    En raison de sa position périphérique et de sa faible notoriété, la Mauritanie a jusqu’à présent échappé à l’attention du public.

    Cependant, les eurodéputés ont déjà fait pression pour que cela change, certains soulignant que la stabilité relative du pays en faisait une exception dans la région du Sahel, fréquemment secouée par des coups d’État militaires et des insurrections ces dernières années.

    « Nous, sociaux-démocrates, soutenons les partenariats qui sont basés sur les principes de l’État de droit et des droits de l’Homme — la Mauritanie est un modèle pour cela », a déclaré Katarina Barley, eurodéputée et tête de liste du Parti social-démocrate allemand (SPD) pour les élections européennes de juin, à Euractiv.

    Les précédents accords de l’UE en matière de migration en Afrique ont fait l’objet de controverses en raison des conditions imposées aux demandeurs d’asile et des tendances autoritaires des gouvernements partenaires.

    En Mauritanie, les conditions semblent être différentes. Selon Mme Barley, elles sont meilleures, et l’UE devrait se concentrer sur la consolidation de régimes similaires en tant que « partenaires égaux ».

    La sociale-démocrate allemande espère que cet accord constituera un « modèle de coopération entre l’Afrique du Nord-Ouest et l’UE ».

    Cet accord s’inscrit également dans le contexte de l’importance géopolitique croissante de la Mauritanie, en raison de ses réserves de #gaz_naturel et de sa position stratégique sur la côte atlantique.

    Ces caractéristiques lui ont permis de faire l’objet de sollicitations de la part de pays comme la Russie et la Chine, tandis que l’alliance militaire de l’OTAN a également décidé d’intensifier sa collaboration avec le pays.

    https://www.euractiv.fr/section/international/news/lue-octroie-210-millions-deuros-a-la-mauritanie-pour-lutter-contre-limmigra

    #externalisation #asile #migrations #réfugiés #aide_financière #UE #EU #Union_européenne #Canaries #route_Atlantique

  • Le #Mali, le #Burkina_Faso et le Niger quittent la #Cedeao, la région ébranlée

    Les trois régimes issus de coups d’Etat prennent le risque de compromettre la #libre_circulation des biens et des personnes, et repoussent le retour des civils au pouvoir.

    En décidant de se retirer de la #Communauté_économique_des_Etats_d’Afrique_de_l’Ouest (Cedeao), les régimes militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger issus de coups d’Etat prennent le risque de compromettre la libre circulation et repoussent le retour des civils au pouvoir. La Cedeao, organisation économique régionale de quinze pays, s’est opposée aux coups d’Etat ayant successivement porté au pouvoir les militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger, imposant de lourdes sanctions économiques au Niger et au Mali.

    En août 2023, elle est allée jusqu’à menacer d’intervenir militairement au Niger pour y rétablir l’ordre constitutionnel et libérer le président Mohamed Bazoum renversé. Le dialogue est pratiquement rompu entre l’organisation et les régimes de Bamako, Ouagadougou et Niamey, qui ont créé l’Alliance des Etats du Sahel (AES) et accusent leurs voisins d’agir sous l’influence de « puissances étrangères », en premier lieu la France, ancienne puissance coloniale dans la région.

    Des élections étaient en théorie prévues au Mali et au Burkina Faso en 2024, censées assurer le retour à un gouvernement civil, préalable exigé par la Cedeao pour lever ses sanctions et rétablir ces pays dans ses instances décisionnelles. Mais les partisans des régimes militaires souhaitent allonger la durée des transitions, invoquant la lutte antidjihadiste. Le nouvel homme fort du Niger, le général Abourahamane Tiani, n’a pas encore annoncé de calendrier de transition.

    « Les Etats de l’AES ont anticipé un débat qui devait venir, celui de la fin des transitions. La sortie de la Cedeao semble remettre au second plan cette question », estime Fahiraman Rodrigue Koné, spécialiste du Sahel à l’Institut des études de sécurité (ISS). « Bien installés dans les palais et devant les délices du pouvoir, ils [les dirigeants des pays de l’AES] veulent s’éterniser dans les fauteuils présidentiels », fustige Le Patriote, quotidien du parti au pouvoir en Côte d’Ivoire.

    L’inquiétude des ressortissants des trois pays

    La Cedeao garantit aux citoyens des pays membres de pouvoir voyager sans visa et de s’établir dans les pays membres pour y travailler ou y résider. L’annonce du retrait burkinabé, nigérien et malien, suscite donc l’inquiétude de centaines de milliers de ressortissants de ces pays, particuliers ou commerçants.

    Les trois pays enclavés du Sahel et leurs principaux partenaires économiques côtiers comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire sont toutefois membres de l’#Union_économique_et_monétaire_ouest-africaine (#Uemoa, huit pays), qui garantit elle aussi en principe la « liberté de circulation et de résidence » pour les ressortissants ouest-africains, ainsi que le dédouanement de certains produits et l’harmonisation des tarifs et des normes, à l’instar de la Cedeao.

    Les conséquences d’un #retrait pourraient être plus marquées aux frontières du Niger et du Nigeria, pays n’appartenant pas à l’Uemoa. Le géant économique d’Afrique de l’Ouest représente plus de la moitié du PIB de la Cedeao et est le premier partenaire économique du Niger dans la région. Les 1 500 kilomètres de frontière qui séparent les deux Etats sont toutefois mal contrôlés et en proie aux attaques des groupes armés. Une part importante des flux échappent aux contrôles douaniers.

    « Même si c’est par la contrebande, les biens et les personnes vont rentrer au Niger. Vous ne pouvez pas séparer Sokoto [nord du Nigeria] de Konni [Niger], c’est un même peuple », assure ainsi Chaïbou Tchiombiano, secrétaire général du Syndicat des commerçants, importateurs exportateurs et grossistes du Niger.

    « Juridiquement, un retrait sans délai n’est pas possible »

    Les régimes du Mali, du Burkina et du Niger ont annoncé leur retrait « sans délai », mais les textes de la Cedeao prévoient qu’une demande doit être déposée par écrit un an avant. La Cedeao a affirmé dimanche qu’elle n’avait pas encore reçu une telle notification. « Juridiquement, un retrait sans délai n’est pas possible. Ces Etats devront trouver une forme d’entente et des négociations iront dans le sens de trouver les moyens de faire ce retrait de manière progressive », estime Fahiraman Rodrigue Koné.

    Alors que les groupes djihadistes progressent au Sahel et jusqu’aux marges des Etats côtiers, « la région se fragmente, devient objet de concurrence géostratégique plus forte, et cela n’est pas une bonne nouvelle pour la stabilité », avertit le chercheur.

    Les vives critiques formulées par ces régimes et leurs partisans à l’encontre du franc CFA, la monnaie commune des pays membres de l’Uemoa, pourraient également conduire les pays de l’AES à quitter cette organisation, et à renoncer à la libre circulation des biens et des personnes en attendant l’émergence d’une #zone_de_libre-échange continentale africaine, encore à l’état de projet.

    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/01/29/le-mali-le-burkina-faso-et-le-niger-quittent-la-cedeao-la-region-ebranlee_62
    #fin

  • Des compagnies aériennes décident de ne plus embarquer de Français vers le Niger
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/02/02/des-compagnies-aeriennes-decident-de-ne-plus-embarquer-de-francais-vers-le-n

    Des compagnies aériennes décident de ne plus embarquer de Français vers le Niger
    Le Monde avec AFP
    Publié hier à 10h04
    Des compagnies aériennes desservant Niamey, capitale du Niger, ont décidé de ne plus embarquer de passagers français vers cette destination, dont plusieurs ont récemment été refoulés à leur arrivée, a appris mercredi l’AFP de sources aéroportuaires. « Selon les autorités nigériennes, tout passager de nationalité française n’est plus autorisé à rentrer sur le territoire nigérien. Par conséquent, ces derniers ne seront plus acceptés sur nos vols sur cette destination », indique une note interne d’Air Burkina consultée par l’AFP.
    Dans un communiqué publié mercredi soir 31 janvier, la compagnie burkinabée affirme que « cette note n’émane pas » d’elle et qu’elle « ne saurait être tenue pour responsable des conséquences éventuelles qui pourraient en découler ». Le texte ne dit rien sur l’embarquement ou non de ressortissants français.
    Une source proche de la compagnie Royal Air Maroc (RAM) a indiqué que « les passagers français à destination de Niamey ne peuvent plus embarquer à bord » des avions de la RAM, « sans autorisation spéciale des autorités nigériennes et ce depuis près d’une semaine ». Sollicitées par l’AFP, d’autres compagnies desservant Niamey, Ethiopian Airlines, Asky, Air Tunisie et Turkish Airlines, n’ont pas répondu dans un premier temps à la question de savoir si elles continuaient à embarquer des ressortissants français vers le Niger.
    Egalement interrogées, les autorités nigériennes n’ont pour l’instant pas confirmé que les Français souhaitant ou devant venir à Niamey étaient désormais persona non grata sur leur territoire. Les relations entre le Niger et la France, ancienne puissance coloniale dans la région, n’ont cessé de se dégrader depuis le coup d’Etat militaire du 26 juillet 2023 qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum.
    L’ambassade de France au Niger, dont Paris avait annoncé la fermeture peu avant Noël, est officiellement close « jusqu’à nouvel ordre » et poursuivra ses activités depuis Paris, avait annoncé le ministère des affaires étrangères français, le 2 janvier. Le ministère soulignait que « depuis cinq mois, notre ambassade subit de graves entraves rendant impossible l’exercice de ses missions : blocus autour de l’ambassade, restrictions des déplacements pour les agents et refoulement de tous les personnels diplomatiques qui devaient rejoindre le Niger ».
    La fermeture d’une ambassade, mesure extrêmement rare, avait été décidée en parallèle au retrait des derniers soldats français déployés au Niger dans le cadre de la lutte antiterroriste, qui ont quitté le pays le 22 décembre 2023. Après le coup d’Etat du 26 juillet, les militaires au pouvoir avaient rapidement exigé le départ des soldats français – environ 1 500 déployés pour lutter contre les djihadistes – et dénoncé plusieurs accords militaires conclus avec Paris.
    Le régime militaire avait aussi prononcé fin août l’expulsion de l’ambassadeur de France, Sylvain Itté. Celui-ci était resté près d’un mois coincé à l’intérieur de la représentation diplomatique avant de la quitter sur décision du président Emmanuel Macron qui avait ordonné qu’il reste en place après le coup d’Etat. Le journal français Le Canard enchaîné a évoqué un veto du ministère français des affaires étrangères à la parution d’un livre de M. Itté qui, selon une source diplomatique contactée par l’AFP, aurait pu « être préjudiciable à nos intérêts de sécurité ».
    Depuis le départ de la France, le Niger comme le Mali et le Burkina Faso voisins également dirigés par des militaires issus de coups d’Etat et confrontés à la violence djihadiste se sont rapprochés d’autres partenaires, dont la Russie.Dans ce contexte, la Turquie a affirmé jeudi vouloir aider le Niger à « renforcer son indépendance » après l’annonce par Niamey de son retrait de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao). « Le président Erdogan a exprimé le soutien de la Turquie aux mesures prises par le Niger pour renforcer son indépendance politique, militaire et économique », a indiqué la présidence turque à l’issue d’un tête-à-tête à Ankara entre le président turc Recep Tayyip Erdogan et le premier ministre nigérien Ali Mahamane Lamine Zeine, nommé par le régime militaire au pouvoir à Niamey.
    La Turquie dit vouloir renforcer ses échanges commerciaux avec le Niger, qui a annoncé mardi – à la suite du Mali et du Burkina Faso – avoir notifié son retrait de la Cedeao, une décision aux conséquences potentiellement lourdes pour son économie et sa stabilité politique. La Cedeao s’est employée en vain à obtenir le retour le plus rapide possible de civils au pouvoir à Niamey, Bamako et Ouagadougou, où des coups d’Etat ont renversé les présidents élus.Selon la présidence turque, M. Erdogan a déclaré que « la Turquie s’opposait aux interventions militaires étrangères qui victimisent le peuple nigérien et continuerait à le faire ». Ankara, qui a étendu sa présence au Sahel et souhaite y accroître encore son influence en profitant notamment du départ forcé de la France, a adopté une position conciliante avec les militaires arrivés au pouvoir au Niger à l’issue d’un coup d’Etat fin juillet. La situation au Niger est scrutée de près par Ankara, le pays sahélien étant situé à la frontière sud de la Libye, où la Turquie possède de très nombreux intérêts.

    #Covid-19#migrant#migration#niger#france#mali#burkinafaso#CEDEAO#circulation#vol#sante#turquie#maroc

  • « Le franc CFA suscite bien trop de détestation pour que l’on s’en tienne au statu quo »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/01/18/le-franc-cfa-suscite-bien-trop-de-detestation-pour-que-l-on-s-en-tienne-au-s

    Marie de Vergès, 18 janvier 2024

    Les rumeurs concernant le souhait des juntes sahéliennes de créer leur propre monnaie rendent nécessaire une réflexion sur une nouvelle gouvernance monétaire en Afrique de l’Ouest, relève dans sa chronique Marie de Vergès, journaliste au « Monde ».

    Qu’on se le dise, certains ont encore foi dans le franc CFA. Cette monnaie commune à quinze pays africains, indexée à l’euro et garantie par la France, s’impose comme une valeur refuge au Nigeria et au Ghana du fait de l’effondrement, ces dernières années, de leurs propres devises, le naira et le cedi. En comparaison, la stabilité et la convertibilité du franc CFA en font un actif recherché par les hommes d’affaires et les commerçants, qui se soucient peu des controverses relatives à cette « relique coloniale ».

    De fait, la monnaie commune a joué un rôle plutôt protecteur face aux turbulences de l’économie mondiale. Tandis que l’envolée soudaine des taux d’intérêt et du dollar rimait avec dépréciations brutales de la monnaie et inflation galopante dans une bonne partie du continent, la parité avec l’euro a limité les dérapages au sein de la zone franc. Les prix ont augmenté moins vite qu’ailleurs, les risques de surendettement y sont demeurés plus contenus.

    Voilà pour les faits. Mais tous les raisonnements économiques du monde ne parviendront pas à gommer l’impopularité de cette monnaie, dont l’acronyme signifiait jusqu’en 1958 « franc des colonies françaises d’Afrique ». Plus de soixante ans après les indépendances, ses nombreux détracteurs la dépeignent comme l’ultime legs de la « Françafrique », perpétuant la domination de Paris sur ses anciennes possessions.
    Lire aussi | Les exagérations et manipulations de Giorgia Meloni, qui accuse la France d’exploiter certains pays d’Afrique avec le franc CFA

    « Quatre-vingts pour cent, peut-être même 90 % des jeunes Africains pensent qu’il faut sortir du franc CFA », assénait l’entrepreneur camerounais William Elong, interrogé par Radio France internationale (RFI) et Jeune Afrique le 12 janvier. Ce spécialiste des drones, qui fut le plus jeune diplômé de l’Ecole de guerre économique à Paris, réagissait à l’ambition prêtée aux juntes qui dirigent le Mali, le Burkina Faso et le Niger de quitter la zone franc pour créer leur propre monnaie. « Une idée magnifique », selon M. Elong.

    Dessiner une nouvelle feuille de route

    Quel crédit faut-il donner à un tel projet ? A ce jour, celui-ci n’a été guère plus qu’esquissé par les putschistes au pouvoir à Bamako, Ouagadougou et Niamey. Réunis depuis septembre 2023 au sein d’une Alliance des Etats du Sahel, les trois pays se sont bornés à indiquer leur souhait d’approfondir leur coopération économique et monétaire. Mais, sur fond de rhétorique souverainiste, l’allusion a été largement interprétée comme le dessein d’un abandon du franc CFA. Sur les réseaux sociaux, les internautes ouest-africains sont déjà nombreux à imaginer la naissance prochaine d’une banque centrale des Etats du Sahel…

    Il n’est pas interdit de quitter la zone franc. La Guinée, la Mauritanie et Madagascar l’ont déjà fait, de même que le Mali, sorti en 1962, avant d’y revenir en 1984. Mais un départ groupé dans un contexte de tensions inédites entre les pays de la région pourrait bien précipiter le démantèlement de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, l’un des deux sous-espaces de la zone franc avec la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale.

    Une transition abrupte a toutes les raisons d’effrayer, tant pèsent lourdement les risques de fuite des capitaux et de dévaluations en série. Mais s’il reste défendu par quelques-uns, le franc CFA suscite bien trop de détestation pour que l’on s’en tienne au statu quo. Fin 2019, à Abidjan (Côte d’Ivoire), Emmanuel Macron et son homologue ivoirien, Alassane Ouattara, avaient semblé ouvrir la voie en annonçant publiquement la fin du franc CFA en Afrique de l’Ouest. Celui-ci devait être remplacé par l’eco, une monnaie censée fédérer à terme tous les pays de la région.

    Plus de quatre ans plus tard, malgré des réformes de fonctionnement, ce passage de relais tarde à se matérialiser. De l’épidémie de Covid-19 au conflit russo-ukrainien, plusieurs crises sont passées par là. Les péripéties sont, et resteront, nombreuses, mais le temps est venu de dessiner une nouvelle feuille de route. Comment se projeter dans l’après ? Selon quelles modalités et quel calendrier ? La réflexion éviterait un saut dans l’inconnu improvisé et donc périlleux, tout en permettant à la France et à ses anciennes colonies de tourner enfin une page d’histoire tourmentée.

    #FrancCFA #impérialisme #finance #monnaie #Mali

  • Un article qui peut sembler peu critique par rapport à ce qui se publie habituellement dans la revue AfriqueXXI. Mais cette question des "méharistes" permet de réfléchir aux successions et imbrications des périodes (avant, pendant, après la colonisation), autrement dit cette troupe de police du désert relève-t-elle du leg ou de l’héritage colonial ?

    Mauritanie. Sur les traces des « sentinelles du désert »

    https://afriquexxi.info/Mauritanie-Sur-les-traces-des-sentinelles-du-desert

    Une brigade spécialisée, les méharistes, sillonne à dos de dromadaire la région frontalière avec le Mali. Au plus près des populations, ces militaires recueillent des renseignements, prodiguent des soins et tentent ainsi de prévenir d’éventuelles incursions armées. Mais cette stratégie peut-elle expliquer à elle seule l’absence d’attaques dans le pays depuis 2011 ?

    Marco Simoncelli > Maria Gerth-Niculescu > 26 janvier 2024

    Dans la région du Hodh Ech Chargui, le vent et le sable modèlent à leur guise les paysages desséchés de l’est de la Mauritanie. Ici, le soleil fait parfois grimper les températures à plus de 50 °C. Mais pour Mohamed Salem Ould Salem, les dunes et les acacias épineux n’ont rien de menaçant. À dos de dromadaire, ce sous-officier patrouille dans le désert depuis vingt-huit ans. « Nous pouvons parcourir jusqu’à 70 kilomètres par jour dans des zones inaccessibles aux véhicules. Nous portons des armes légères pour nous déplacer avec agilité », confie le militaire mauritanien, assis à l’ombre d’un acacia et en pleine préparation du traditionnel ataya (thé vert).

    Les cheveux grisonnants et le visage rond, Mohamed Salem fait partie de la brigade des méharistes, membre du Groupement nomade (GN), une unité de la Garde nationale mauritanienne. Il raconte avec sérieux son amour du désert et son sens du devoir. Aussi appelées « les sentinelles du désert », les patrouilles du GN effectuent des déplacements pouvant durer plusieurs semaines afin d’atteindre les zones les plus reculées.

    En ce mois de novembre 2023, leur destination est le petit village de Mekhezin, où les habitants les attendent sous une grande tente dressée pour l’occasion. Les dromadaires et leurs cavaliers sont accueillis avec des cris de joie. Plus que militaire, l’action des méharistes s’apparente à un service de proximité, qui propose une assistance médicale, mais aussi une aide administrative ou encore une distribution de matériel scolaire. Assis en tailleur sur un tapis coloré, Famouri Keita, méhariste infirmier, ausculte des femmes et des enfants qui se pressent en nombre. « Nous sommes parfois à des dizaines, voire des centaines de kilomètres de tout centre de santé », explique-t-il.❞

    (Suite à lire sur le site d’Afrique XX1 afin notamment d’accéder aux photos)

    #Mauritanie #LegColonial #Police #armée #terrorisme

  • Le #Mali, le #Niger et le #Burkina_Faso quittent la #Cédéao « sans délai »

    Le Burkina Faso, le Mali et le Niger, trois pays dirigés par des régimes militaires, ont annoncé dimanche qu’ils quittaient la #Communauté_économique_des_Etats_d'Afrique_de_l'Ouest (Cédéao) avec effet immédiat. L’annonce a été faite via un communiqué lu à la télévision nigérienne.

    Les régimes militaires au pouvoir au Burkina Faso, au Mali et au Niger ont décidé de retirer leur pays, avec effet immédiat, de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), organisation sous-régionale de 15 membres, ont-ils annoncé dimanche 28 janvier dans un communiqué conjoint.

    Les dirigeants respectifs des trois États sahéliens, « prenant toutes leurs responsabilités devant l’histoire et répondant aux attentes, préoccupations et aspirations de leurs populations, décident en toute souveraineté du retrait sans délai du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest », dit le communiqué lu sur les médias d’État de ces pays.

    Les trois pays, confrontés à des problématiques similaires d’insécurité, de jihadisme et de pauvreté, ont des relations tendues avec la Cédéao depuis que des militaires y ont pris le pouvoir par la force, en 2020 au Mali, en 2022 au Burkina Faso et en 2023 au Niger.

    La Cédéao essaie d’endiguer les coups de force et de pousser au retour le plus vite possible des civils au pouvoir. Elle a pris de lourdes sanctions contre le Mali et le Niger et est allée jusqu’à menacer de recourir à la force dans ce dernier pays. Elle a suspendu les trois pays de ses organes.

    https://www.france24.com/fr/info-en-continu/20240128-%F0%9F%94%B4-le-mali-le-niger-et-le-burkina-faso-quittent-la-c%C3
    #fin #Afrique_de_l'Ouest #coup_d'Etat

  • Tunisie : 20 jeunes sénégalais rapatriés à Dakar
    https://www.seneweb.com/news/Afrique/tunisie-20-jeunes-senegalais-rapatries-a_n_430772.html

    Tunisie : 20 jeunes sénégalais rapatriés à Dakar
    Par : - Seneweb.com | 17 janvier, 2024 à 15:01:28 | Lu 906 Fois |
    Tunisie : 20 jeunes sénégalais rapatriés à Dakar
    Bloqués à Tataouine (Tunisie) depuis plusieurs semaines, 20 sénégalais candidats à l’émigration clandestine ont été rapatriés à Dakar dans la nuit du mardi 16 au mercredi 17 janvier. L’information a été donnée par l’Association internationale pour Médina-Mary (AIMM) dans un communiqué.
    « Un groupe de plus de 20 jeunes Sénégalais a été rapatrié de Tunisie, dans la nuit du mardi 16 au mercredi 17 janvier 2024, après avoir échoué de rejoindre l’Europe par la Méditerranée. Ils étaient coincés à Tataouine, depuis plus d’un mois, alors qu’ils étaient avec des jeunes de Gambie (majoritaire), du Mali, Guinée, entre autres, qui eux, avaient été rapatriés par leurs gouvernements respectifs », lit-on sur le communiqué.Pris en charge par l’Organisation internationale des migrations à Tataouine, ces jeunes sénégalais avaient lancé un appel au Gouvernement, le 25 décembre dernier, pour les aider à rentrer au Sénégal. Mouhamed CAMARAÉ

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#OIM#tunisie#rapatriement#migrationirreguliere#gambie#mali#guinee#jeunesse

  • L’effet domino de la politique migratoire de l’UE au Sahel - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/54008/leffet-domino-de-la-politique-migratoire-de-lue-au-sahel

    L’effet domino de la politique migratoire de l’UE au Sahel
    Par Ana P. Santos Publié le : 21/12/2023
    Le pouvoir militaire au Niger a récemment abrogé une loi censée lutter contre le trafic de migrants. La décision met à mal la stratégie de l’Union européenne à confier les politiques de contrôle migratoire aux pays d’origine.Les putschistes au pouvoir au Niger ont abrogé au mois de novembre une loi anti-passeurs de 2015. Les militaires ont également annulé les condamnations antérieures prononcées en vertu de cette loi. La loi contre le trafic de migrants criminalisait le transport de migrants depuis la ville d’Agadez, au centre-nord du Niger, vers la Libye et l’Algérie, deux points de départ courants pour les migrants subsahariens cherchant à atteindre l’Europe. Cette loi bénéficiait du soutien de l’Union européenne (UE) à travers le Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique (FFUE) doté de 5 milliards d’euros. Sa suppression est le dernier épisode en date dans la dégradation des relations diplomatiques déjà limitées entre le Niger et l’UE.
    « En révoquant la loi de 2015, la junte militaire réitère la fin de la coopération avec l’UE, y compris en matière de migration, qui était cruciale pour la stratégie migratoire de l’UE », explique à InfoMigrants Alia Fakhry, chercheuse associée au Conseil allemand pour les relations étrangères (GCFR). Entre 2014 et 2020, plus d’un milliard d’euros du FFUE sont allés au Niger. Pendant que Bruxelles regrette l’abrogation de la loi anti-passeurs, une partie de la population locale semble bien accueillir la fin de la criminalisation.
    « Si nous voyons des migrants, nous les transportons », a déclaré à France 24 Sidi Mamadou, 42 ans, ancien passeur et militant pour l’immigration légale.
    Selon Alia Fakhry, « les contrebandiers étaient perçus comme des transporteurs qui faisaient passer des marchandises et des personnes à travers les frontières. Des convois militaires accompagnaient les convois des passeurs pour des raisons de sécurité, mais l’armée touchait également des pots de vin auprès des passeurs. D’une certaine manière, jusqu’en 2015, le trafic de migrants était approuvé par l’État. Il était en partie contrôlé par des acteurs militaires et générait des revenus ». Depuis, la loi anti-passeurs était notamment critiquée pour ses conséquences négatives sur les personnes qui bénéficiaient directement ou indirectement de la présence de migrants au Niger.
    La région d’Agadez était, jusqu’en 2015, une importante plaque tournante de ce transit. Migrants, commerçants et travailleurs saisonniers faisaient vivre l’économie. En 2015, « les passeurs, mais aussi les commerçants, les vendeurs de nourriture et ceux qui hébergeaient (des migrants) ont soudainement perdu leur emploi », explique Alia Fakhry. La décision de la junte militaire laisse ainsi entrevoir un possible retour à la situation d’avant 2015.
    L’inefficacité des politiques migratoires restrictives « L’obsession (de l’UE) pour l’immigration est bien connue », assure Yéra Dembele, présidente de la Fédération Euro-Africaine de Solidarité (FEASO), un groupe de réflexion sur la migration basé à Paris. Au cours des dernières décennies, l’Europe s’est détournée de sa politique migratoire d’après-guerre, qui visait à attirer la main-d’œuvre immigrée dont elle avait cruellement besoin pour se reconstruire après la Seconde Guerre mondiale. Ces dernières années, l’UE a décidé de renforcer les contrôles aux frontières terrestres et maritimes afin d’empêcher l’immigration irrégulière.
    Selon Yéra Dembele, « lorsque l’on observe l’évolution des flux au cours de ces différentes phases, on se rend compte que le durcissement des politiques n’a eu pratiquement aucun effet, si ce n’est d’augmenter le nombre de migrants noyés en mer ». Yéra Dembele en veut aussi aux politiques migratoires et de développement dans les pays d’origine, notamment en Afrique, qui s’alignent sur les pays d’accueil « sans réelle volonté politique de satisfaire les besoins qui poussent les jeunes à émigrer au péril de leur vie ».
    Des analystes estiment qu’il est trop tôt pour prédire à quel point le nouveau pouvoir au Niger va influencer la dynamique migratoire régionale. La chercheuse Alia Fakhry estime néanmoins que l’érosion du partenariat avec le Niger pourrait pousser l’UE à mettre en place des coopérations similaires avec d’autres pays africains dans la région, comme cela est déjà le cas avec la Tunisie et la Libye. « L’UE continue de consolider sa stratégie en matière de migration. L’accord conclu avec la Tunisie cet été (l’accord est au stade d’un mémorandum d’entente, ndlr) est une illustration de ce que nous pouvons décrire comme un effet domino. Avec la chute du Niger, un domino est tombé. L’UE cherche donc à consolider d’autres partenariats », affirme Alia Fakhry."Avec la fin de la coopération avec le Niger, il y a une leçon importante à tirer pour les Européens : en poursuivant une stratégie migratoire qui repose trop sur la coopération avec des partenaires de bonne volonté, les Européens deviennent la proie des sautes d’humeur et des changements de régime", ajoute-t-elle. Depuis 2020, sept coups d’État ont eu lieu en Afrique, dont cinq dans des pays situés dans la région du Sahel : au Burkina Faso, en Guinée, au Tchad, au Mali et enfin, dernier en date, au Niger, en juillet dernier. Les prises de pouvoir par les militaires s’inscrivent dans un environnement d’insécurité politique, de pauvreté et de terrorisme dans le Sahel.
    Les données de l’agence européenne de gestion des frontières Frontex indiquent que cette année a connu la plus forte augmentation depuis 2009 du nombre de passages irréguliers le long de la route de l’Afrique de l’Ouest, qui relie les pays de la sous-région aux îles Canaries en Espagne.Les traversées de l’océan Atlantique se font depuis le Maroc, le Sahara occidental, la Mauritanie, le Sénégal et la Gambie, des pays et régions qui sont dans le prolongement du Sahel. L’UE et le Royaume-Uni ne réagissent souvent que ponctuellement en créant de nouvelles formes de contrôle aux frontières dans les pays d’origine. Toutefois, les experts et les défenseurs des droits de l’homme affirment que les politiques migratoires, qui sont principalement élaborées d’un point de vue européen, ne tiennent pas compte de la nature des mouvements en Afrique, qui sont influencés par l’histoire à la fois culturelle et coloniale. « Lorsque nous entendons parler de migration, nous pensons qu’il s’agit de quitter l’Afrique pour aller ailleurs, en Europe par exemple. Mais ce dont on parle rarement, c’est que les déplacements en Afrique se font principalement d’un pays africain voisin à l’autre, et ce depuis des siècles », rappelle Makmid Kamara, militant et chercheur sur les droits de l’homme. « Les frontières ont été mises en place par les puissances coloniales pour diviser les territoires qu’elles avaient conquis et, en ce sens, elles sont artificielles. Pour de nombreux Africains, le fait de se déplacer d’un pays voisin à un autre ne constitue pas un franchissement de frontière », constate Makmid Kamara.Selon lui, « ce que nous voyons de plus en plus, c’est comment l’instabilité politique récurrente déplace les gens et transforme les routes utilisées pour les mouvements économiques en voies de refuge ».Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) estime qu’environ 3,7 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du Sahel et que plus d’un demi-million de réfugiés et de demandeurs d’asile cherchent une protection dans les pays voisins. Les régions du Centre-Nord au Burkina Faso accueillent le plus grand nombre de personnes déplacées et affichent les niveaux d’insécurité alimentaire les plus élevés.

    #Covid-19#migrant#migration#niger#mali#burkinafaso#agadez#algerie#routemigratoire#sahel#migrationirreguliere#HCR#FRONTEX#insecurite#frontiere#vulnerabilite

  • Lutte contre l’immigration irrégulière : 16 candidats dont 03 guinéens et 01 malien interpellés à la plage de Lobor à Mboro
    https://www.dakaractu.com/Lutte-contre-l-immigration-irreguliere-16-candidats-dont-03-guineens-et-0

    Lutte contre l’immigration irrégulière : 16 candidats dont 03 guinéens et 01 malien interpellés à la plage de Lobor à Mboro
    Dans ses opérations courantes de sécurisation, la compagnie de Gendarmerie de Thiés a interpellé ce 23 décembre 2023, 16 candidats à l’émigration dont 03 guinéens et 01 malien, sur la plage de Lobor à Mboro. Elle a également procédé au démantèlement d’un réseau de trafic de carburant à Kayar. Au cours des opérations, 01 camion de 20.000 litres et 05 bidons de 20 litres de gasoil ont été saisis ainsi que 800 litres de super.

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#emigration#migrationirreguliere#reseau#trafic#mboro#mali#guinee#securisation#thies#genadarmerie

  • Lutte contre l’immigration irrégulière : 93 candidats de nationalités étrangères interpellés
    https://www.dakaractu.com/Lutte-contre-l-immigration-irreguliere-93-candidats-de-nationalites-etran

    Lutte contre l’immigration irrégulière : 93 candidats de nationalités étrangères interpellés
    Dans le cadre de la lutte contre l’émigration irrégulière, la Gendarmerie nationale a mené une série d’opérations dans différentes localités du pays, dans la période du 15 au 16 Décembre 2023. En effet 93 candidats tous de nationalités étrangères, sont interpellés entre Thiés (toglou) et Saint-Louis (Gandiol). Parmi les 93 candidats on compte 83 maliens, 07 gambiens et 03 mauritaniens
    Ils ont été respectivement appréhendés par la brigade de proximité de Diass et la SR de Saint-Louis.

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#migrationirreguliere#mali#gambie#mauritanie#gendarmerie

  • Privés de visas, les étudiants sahéliens victimes collatérales des tensions entre la France et les régimes putschistes
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/12/05/prives-de-visas-les-etudiants-saheliens-victimes-collaterales-des-tensions-e

    Privés de visas, les étudiants sahéliens victimes collatérales des tensions entre la France et les régimes putschistes
    Malgré une inscription dans une université française, de nombreux Burkinabés, Maliens et Nigériens ont dû renoncer. Paris se défend de toute une mesure de rétorsion.
    Par Coumba Kane
    « Pour nous, cette année, c’est fini la France », souffle Fodé*. Admis à l’université d’Angers en licence économie et gestion, le jeune Burkinabé n’ira pas étudier dans l’Hexagone. Jusqu’au 30 septembre, date butoir pour rejoindre la faculté angevine, Fodé a espéré partir. Mais, à l’instar de centaines d’autres étudiants du Burkina Faso, mais aussi du Niger et du Mali, également inscrits dans des établissements français, il n’a pas pu déposer sa demande de visa. Depuis cet été, les services consulaires français sont fermés dans ces pays dirigés par des juntes, « pour des raisons de sécurité », justifie-t-on au ministère des affaires étrangères.
    La mesure a été annoncée en septembre en pleine crise diplomatique entre la France et le Niger. Après la prise de pouvoir par les militaires fin juillet, Paris a refusé de reconnaître les nouvelles autorités, qui maintiennent toujours le président Mohamed Bazoum captif. Les tensions ont abouti au départ précipité des troupes françaises et de l’ambassadeur de France.
    Pris au piège de ces dissensions politiques, les étudiants des Etats concernés oscillent entre désespoir et incompréhension. La sélection est si rude que Fodé pensait avoir fait « le plus dur » en réussissant à obtenir une admission via Campus France, l’agence française de promotion à l’étranger de l’enseignement supérieur français et de l’accueil des étudiants étrangers en France. (...)
    Côté français, on confirme le statu quo tout en se défendant d’avoir pris une mesure de rétorsion contre des régimes militaires qui affichent leur hostilité à la France. « Il ne faut pas inverser les responsabilités, ce sont les juntes qui portent atteinte à nos relations. Nous souhaitons préserver les liens avec les forces vives de ces sociétés, notamment les étudiants », réagit-on au Quai d’Orsay. Le ministère affirme ne pas avoir « de visibilité sur la suite », mais assure réévaluer « les conditions sécuritaires dans ces pays, de façon à ajuster au mieux la mesure ». Signe d’une légère accalmie, les services de Campus France ont rouvert le 1er octobre au Mali et au Burkina Faso. Les étudiants de ces pays peuvent à nouveau tenter une admission en France pour la prochaine année universitaire… sans garantie d’obtenir un visa. Reste à savoir si ceux qui avaient déjà été admis, devront reprendre la fastidieuse procédure à zéro. « Nous n’avons pas d’information sur ce point », répond-on à Campus France.
    Au Niger, où la plateforme demeure fermée « pour des raisons de sécurité », l’horizon apparaît plus incertain. Chaque fois qu’il passe devant le consulat français à Niamey, Houzaifa Hamma Issaka a le « cœur qui se serre ». L’étudiant nigérien titulaire d’une licence en droit avait obtenu une inscription à l’université de Nice. Il se préparait à déposer sa demande de visa quand le coup d’Etat s’est produit. « Mes démarches administratives m’ont coûté 150 000 francs CFA (228 euros), soit cinq fois le salaire moyen. Rien ne m’a été remboursé et je me retrouve sans perspectives d’études », se désole l’étudiant qui visait un master en droits humains.
    Comme lui, près d’une centaine de Nigériens admis dans des établissements publics et privés français a perdu une année universitaire. Désemparés, certains ont tenté, en vain, de déposer leur demande de visa au Bénin voisin. « J’ai fait 1 000 km pour tenter ma chance. Mais l’agent a refusé, car je n’ai pas de certificat de résidence. Pourquoi ne pas numériser les demandes ? », s’interroge Ibrahim Maiga. « L’option dématérialisée pour le dépôt d’un visa n’est pas possible ni au Sahel ni ailleurs, répond le ministère des affaires étrangères qui argue d’une procédure immuable. Lors du dépôt du dossier, les données biométriques des demandeurs sont prises, le passeport récupéré afin qu’on y accole une vignette. »Certains étudiants sahéliens, bénéficiaires d’une bourse française, ont néanmoins eu plus de chance. Visés par la mise à l’arrêt de la mobilité internationale fin août suite à la « suspension de l’aide au développement », ils avaient appris quelques jours avant leur départ pour la France l’annulation de leur séjour de recherche. Puis, début octobre, la mesure, dénoncée dans les milieux académiques, avait été levée pour leur permettre de se rendre en France.Koffi, étudiant en géographie à l’université de Ouagadougou, était attendu le 1er septembre à Paris-1 La Sorbonne. Mais deux jours avant, il a reçu un mail lapidaire. « En quelques lignes, on m’a expliqué que mon séjour d’études était annulé. Pourtant j’avais un visa, un logement. Ça a été un choc. » Le 1er novembre, il a finalement pu s’envoler pour Paris avec son visa initial de six mois. « Je vais pouvoir étudier jusqu’à fin janvier. Je suis bien loti car certains boursiers ont perdu beaucoup de temps avec ces restrictions. » En effet, malgré le déblocage de la situation, les durées de visa n’ont pas été allongées.
    Doctorant en géographie et titulaire d’une bourse octroyée par l’ambassade de France, Hamidou Zougouri bénéficiait d’un visa courant de septembre à décembre. Mais il n’a pu se rendre à Paris que début octobre. « J’ai perdu un mois de recherche » explique-t-il par téléphone, à peine rentré de France. « J’ai tout de même travaillé au mieux grâce à l’investissement de mon directeur de thèse », se réjouit l’étudiant rattaché au CNRS. « Mais il aurait fallu nous informer de cette décision des semaines à l’avance pour qu’on s’organise. On a eu l’impression que la France nous abandonnait en plein vol. »

    #Covid-19#migrant#migration#france#niger#mali#burkina#sahel#etudiant#visas#politiquemigratoire#crise

  • « The yellow queen – a road movie »
    https://www.meltingpot.org/2023/11/the-yellow-queen-a-road-movie

    Un viaggio in autobus di sola andata da Colonia a Bamako (Mali): 7.200 km, 21 giorni. Un viaggio i cui protagonisti sono il bus e il suo autista, Christian, appassionato di meccanica e viaggi. Dal 2012 porta in #Mali solo Mercedes O 303 che come dice lui: “E’ il miglior bus che sia mai stato costruito: un telaio indistruttibile, un motore immortale che può fare facilmente fino a 2 milioni di km, meccanica semplice e facilità nel montare i pezzi di ricambio”. Questi bus non possono più circolare in Europa, ma a Bamako, per le ragioni appena citate, sono molto

    #Notizie #Arti_e_cultura #Film_e_documentari #Germania

  • La France suspend les visas pour les étudiants du #Mali, #Burkina_Faso et #Niger

    Paris a décidé de suspendre les visas pour les étudiants du Mali, du Burkina Faso et du Niger. La France justifie sa décision par la fermeture de ses #services_consulaires dans ces pays. Les relations avec ces trois États sont tendues depuis les #coups_d’État successifs.

    Les étudiants originaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger ne pourront plus obtenir de visa pour poursuivre leur scolarité en France. Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé samedi 16 septembre suspendre les visas pour ces trois pays. « Les services #campus_France et visas ne peuvent plus fonctionner normalement », indique le ministère, en raison de la fermeture des services consulaires français.

    Les étudiants maliens, burkinabè et nigériens déjà sur le territoire français ne sont en revanche pas concernés par la mesure. « Les artistes, étudiants et chercheurs déjà en France poursuivent normalement leurs activités et leurs études, et sont les bienvenus », ajoute la même source.

    Campus France, qui est l’agence française de promotion à l’étranger de l’#enseignement_supérieur français et de l’accueil des étudiants étrangers en France, précise que les bourses accordées aux étudiants de ces trois pays déjà sur le territoire français « restent actives ».

    La France compte actuellement quelque 3 000 étudiants maliens, 2 500 burkinabè et 1 200 nigériens dans ses établissements d’enseignement supérieur.

    « Le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères n’a jamais donné instruction de suspendre la coopération avec le Mali, le Niger et le Burkina Faso, ou leurs ressortissants. C’est la coopération de la France dans ces trois pays qui est suspendue, compte tenu du contexte sécuritaire et politique », a-t-il ajouté auprès de l’AFP.

    Vendredi, le ministère de la Recherche et de l’Enseignement supérieur avait indiqué à l’AFP être « contraint de suspendre [ses] services de visas et [sa] coopération civile pour des raisons de sécurité ». Pour autant « il n’est pas question de stopper des coopérations existantes avec des universités ou d’autres établissements scientifiques ».

    Pour des raisons de sécurité, la France a suspendu depuis le 7 août la délivrance de visas depuis Niamey, Ouagadougou et Bamako. Les relations avec ces trois pays sont tendues depuis les coups d’État successifs.


    https://www.infomigrants.net/fr/post/51896/la-france-suspend-les-visas-pour-les-etudiants-du-mali-burkina-faso-et

    #suspension #visas #France #étudiants #étudiants_étrangers #université #facs

  • De Bamako à Niamey, l’annonce de la suspension des demandes de visas plonge les étudiants dans l’incertitude
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/09/22/de-bamako-a-niamey-l-annonce-de-la-suspension-des-demandes-de-visas-plonge-l

    De Bamako à Niamey, l’annonce de la suspension des demandes de visas plonge les étudiants dans l’incertitude
    Le ministère des affaires étrangères français évoque le « contexte sécuritaire » au Mali, au Burkina Faso et au Niger dirigés par des juntes pour justifier une telle mesure.
    Par Coumba Kane
    David*, 22 ans, compte les jours. Son admission à l’université d’Angers sera annulée s’il ne s’y présente pas d’ici à la fin du mois de septembre, mais il est bloqué à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso. Comme d’autres étudiants burkinabés, maliens et nigériens, le jeune homme ne peut plus déposer de demande de visa vers la France depuis plusieurs jours. La raison ? Le « contexte sécuritaire » dans ces trois pays dirigés par des juntes, invoqué le 16 septembre par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, sollicité par l’AFP.
    « Les services Campus France [l’agence française de promotion à l’étranger de l’enseignement supérieur français et de l’accueil des étudiants étrangers en France] et visas ne peuvent plus fonctionner normalement », expliquait alors le Quai d’Orsay, tout en assurant que « les artistes, étudiants et chercheurs déjà en France poursuivent normalement leurs activités et leurs études, et sont les bienvenus ».
    Quelques jours plus tôt, une polémique a éclaté après la publication d’une directive administrative émanant des directions régionales des affaires culturelles qui appelait les centres dramatiques et chorégraphiques nationaux et les scènes nationales à cesser toute collaboration avec les trois Etats sahéliens. Le président français Emmanuel Macron avait par la suite nuancé, assurant qu’il n’y avait « ni boycott ni représailles » et que la France allait continuer à accueillir des artistes du Sahel s’ils étaient en possession de visas.
    Mais du côté du ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur, qui indique « qu’il n’est pas question de stopper des coopérations existantes avec des universités ou d’autres établissements scientifiques », un certain embarras persiste. Dans un courriel envoyé aux établissements universitaires daté du 31 août et détaillant les instructions du Quai d’Orsay, le ministère disait « regretter les conséquences de cette situation pour les candidats à une mobilité en France », tout en précisant « qu’il s’agit d’une suspension des mobilités et non d’une annulation ».
    L’instruction, qui concerne aussi les invitations de chercheurs à des conférences et colloques, a entraîné la suspension des bourses pour les étudiants pourtant titulaires d’un visa. Pour les autres candidats à la mobilité en France, l’avenir est également suspendu. Au Burkina Faso, au moins 115 étudiants admis dans des établissements français sont en attente d’un visa, selon un décompte établi par le Collectif des étudiants burkinabés. Pour la plupart, la date limite d’arrivée en France est fixée à la fin de septembre.
    Comment rebondir alors que l’année universitaire est sur le point de débuter ? « Je bataille depuis décembre pour monter mon projet d’études. J’y ai mis du temps et mes économies. J’avais tout misé sur une formation en France. Maintenant, c’est dur de me projeter sereinement. Je me sens coincé malgré moi », se désole David. Le manque à gagner est aussi financier. « Entre l’assurance santé, la prise de rendez-vous pour déposer ma demande de visa et l’inscription auprès de Campus France, j’ai dépensé environ 250 000 francs CFA [quelque 380 euros] », calcule l’étudiant burkinabé. « La France est un pays souverain, je le comprends. Mais nous n’avons pas à subir la crise diplomatique avec nos dirigeants. Nous sommes les victimes collatérales de l’histoire », regrette-t-il, tout en espérant que la promesse du Quai d’Orsay de « réévaluer la situation à l’aune de l’évolution sécuritaire dans la région » aboutisse à une levée rapide de la mesure.
    Au Mali voisin, même stupéfaction chez Moulaye Simpara. L’étudiant de 23 ans en informatique aurait dû s’envoler pour Paris le 20 septembre. Lui aussi avait surmonté les obstacles administratifs, passé la sélection de Campus France, puis décroché une place dans une université privée à Vincennes et réglé les frais d’inscription de 3 150 euros. Il préparait son rendez-vous avec Capago, la société à laquelle les autorités françaises sous-traitent la prise en charge des demandes de visa, quand il a découvert sur les réseaux sociaux la décision du Quai d’Orsay. « Je ne comprends pas. Je suis déçu et en colère, soupire-t-il. Les problèmes entre la France et le Mali, nous, étudiants, n’y sommes pour rien. Pourquoi nous punir ? » L’étudiant bamakois avait choisi Vincennes pour parfaire sa formation en ingénierie et réseaux. « Il y a quelques semaines, le centre des impôts où j’étais en stage a subi une panne informatique pendant quatre jours. Cela a entraîné des pertes financières majeures. Faute de compétences chez nous, le centre a fait appel à un technicien européen pour résoudre la panne. Je voulais poursuivre mes études en France pour acquérir une expertise et rentrer servir mon pays », se justifie-t-il.
    Malgré les tensions politiques et diplomatiques qui opposent Paris aux capitales sahéliennes depuis deux ans, la France est restée une destination privilégiée pour les étudiants ouest-africains. Au cours de l’année 2022-2023, Campus France a recensé un total de 3 000 étudiants maliens, 2 500 Burkinabés et 1 200 Nigériens inscrits dans l’enseignement supérieur. Ces derniers pourront poursuivre leur cursus en France. Mais les conditions d’admission se compliquent.
    Au sein de l’association des étudiants en médecine du Burkina Faso qu’il préside, Cheikh Simpore constate ces difficultés persistantes pour ceux qui tentent de suivre un stage en France. « Les CHU français étaient traditionnellement les établissements d’accueil pour nos étudiants à la recherche d’un stage d’un mois. Mais face aux refus de visa qui coûte 50 000 francs CFA [quelque 75 euros] et qui n’est pas remboursé, depuis quelques années, ils se tournent vers la Belgique, le Maroc ou le Cameroun. Nous avons aussi des médecins qui ont dû ces derniers jours renoncer à des formations spécialisées en France à cause de cette mesure », explique-t-il.
    Même si les autorités françaises tentent de rassurer sur leur volonté de maintenir le lien avec les ressortissants du Sahel, la décision de suspendre les visas dans les trois pays suscite de nombreuses critiques de part et d’autre de la Méditerranée. « C’est un signal incompréhensible envoyé à la jeunesse africaine, alors que toute la stratégie du président Macron est justement fondée sur un renforcement des liens avec cette catégorie de la population. Quand on fait le sommet de Montpellier, c’est pour parler à ces jeunes. C’est par ailleurs contraire à nos valeurs et nos intérêts. Face aux juntes, nous incarnons un modèle de démocratie, d’accès à l’éducation. Instaurer un rapport de force avec des régimes autoritaires se défend, mais pas avec les populations que nos politiques de développement ont toujours tenté d’aider », regrette un élu de la majorité.
    « C’est un manque de tact que de s’en prendre aux étudiants, aux chercheurs et aux artistes. Ce sont les alliés naturels de la France car ils se retrouvent souvent dans des valeurs prônées par elle. En attaquant ces catégories, la France risque de renforcer le rejet dont elle se dit victime », craint un ministre ouest-africain.

    #Covid-19#migrant#migration#france#niger#mali#burkinafaso#crise#visas#politiquemigratoire#etudiant#chercheur#artiste

  • « Arrêter la circulation des idées, des savoirs et des créations artistiques avec l’Afrique est un contresens historique »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/09/20/arreter-la-circulation-des-idees-des-savoirs-et-des-creations-artistiques-av

    « Arrêter la circulation des idées, des savoirs et des créations artistiques avec l’Afrique est un contresens historique »
    Tribune
    Alors que 3 millions d’étudiants effectuent ces jours-ci leur rentrée dans les universités françaises, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, sur ordre de l’Elysée, donne instruction au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et à celui de la culture de suspendre toute coopération universitaire, scientifique et culturelle avec le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Sans même vouloir évoquer la Guinée, le Tchad, le Gabon, ou la Centrafrique, pour lesquels Paris n’a pas jugé utile de suspendre sa coopération universitaire, scientifique et culturelle, on peut se demander pourquoi les chercheurs, les étudiants, les acteurs culturels et les artistes du Burkina Faso, du Mali et du Niger sont ainsi visés par une suspension des visas d’entrée en France.
    Les chercheurs, les universitaires, les étudiants et les artistes sont les premières victimes des régimes autoritaires, tandis que la liberté d’expression et la pensée critique se rétrécissent dans ces pays en crise. La France ne veut-elle pas entendre ce que les intellectuels et les artistes maliens, burkinabés et nigériens ont à dire ? La tradition d’accueil des intellectuels et des artistes, et l’exception culturelle dont s’enorgueillit la France doivent-elles être brutalement bafouées ?
    Les intellectuels et les artistes ont en commun d’être des passeurs de savoirs et d’émotions mis en partage. Ils nous conduisent là où l’individuel, voire l’intime, et le collectif se rejoignent pour construire une histoire commune et inventer l’avenir. La connaissance et la culture, c’est ce qui nous relie les uns aux autres et qui fait notre humanité.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés La France suspend les mobilités étudiantes avec le Niger, le Mali et le Burkina Faso
    Tout débute, semble-t-il, le 24 mai 2021, avec le second coup d’Etat au Mali, qui met un terme au processus de transition difficilement négociée avec la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), au profit du colonel Assimi Goïta, nouveau chef de l’Etat. Ce coup d’Etat s’accompagne d’un changement d’alliance stratégique du Mali, qui fait alors appel à la Russie. Le 17 février 2022, la France décide de retirer ses forces au Mali, conduisant le pays hôte à mettre fin le 2 mai à l’accord de défense avec la France. Le 16 novembre, Paris cesse son aide publique au développement au Mali. Commence alors un processus similaire avec le Burkina Faso, puis le Niger. Le 30 septembre 2022, le Burkina connaît un second coup d’Etat militaire en moins de huit mois, avant de mettre fin à son tour à l’accord de défense avec la France, le 23 janvier.
    Le 18 février, Paris ordonne le retrait de ses troupes stationnées dans le pays. Le 26 juillet, un nouveau coup d’Etat intervient, cette fois au Niger. Trois jours plus tard, Paris réplique encore par la suspension de ses actions d’aide au développement et d’appui budgétaire au Niger, conduisant ce dernier à mettre fin le 4 août à l’accord de défense avec la France.
    Le Mali, le Burkina et maintenant le Niger ; cela commence à faire beaucoup. Le 7 août, la France décide la suspension collective de la délivrance des visas aux ressortissants burkinabés, maliens et nigériens, tandis que de son côté, appuyant cyniquement la décision de Paris, Air France stoppe ses dessertes aériennes sur les trois pays.
    Après l’arrêt des aides publiques au développement, puis celui de la délivrance des visas et des bourses d’étude, c’est désormais la suspension de toute coopération culturelle avec le Mali, le Niger et le Burkina Faso qui est rendue publique à travers un banal courriel envoyé le 11 septembre par le haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère de la culture, aux directions régionales des affaires culturelles.
    A en croire la communication officielle, la France punisseuse aurait le droit pour elle, arguant qu’en raison de la dégradation de la situation sécuritaire dans ces trois pays, les consulats ne sont plus en mesure de délivrer des visas de façon sereine. C’est là une curieuse réponse, lorsque la mise en danger du personnel consulaire et des ressortissants français n’est pas attestée dans les faits. En qualité de membre fondateur de l’Unesco, la France est en réalité tenue de respecter les engagements pris en vertu des accords et principes de cette organisation internationale. Et parmi ces engagements figure la promotion de la libre circulation des personnes dans le cadre des échanges culturels, scientifiques et éducatifs.
    Or une telle obligation ne peut souffrir du pouvoir discrétionnaire reconnu aux Etats en matière de protection de leur territoire national. Prise en défaut à l’égard de ces engagements dans le cadre d’une convention internationale qui a la primauté sur le droit interne, la France se met également hors du droit international au regard de son engagement pour la réalisation des objectifs de développement durables (ODD).
    La suspension des coopérations, des visas et des bourses aura en effet comme conséquence directe et immédiate d’entraver la participation des chercheurs, des enseignants, des étudiants, des acteurs culturels et des artistes maliens, nigériens et burkinabés à de nombreux programmes de recherche, d’éducation et de création. Enfin, l’illégalité dans laquelle l’Etat français s’est mis en sanctionnant ces trois pays du Sahel est susceptible de recours auprès des juridictions internationales, dès lors que les mesures prises touchent les peuples et les personnes, et non les régimes, dont on connaît par ailleurs la capacité de résistance, sinon de résilience face aux sanctions internationales. Le monde universitaire, de la recherche et de la culture a une dimension internationale et il se situe dans une temporalité qui n’est nullement celle de l’action politique et diplomatique. En revanche, il se nourrit, et depuis fort longtemps, de la circulation globalisée des personnes, des savoirs, des créations, des technologies.
    Si empêcher une telle circulation est illégal et même un non-sens, c’est aussi un contresens historique qui concourt à ce que la France se replie un peu plus sur elle-même et s’appauvrisse, au moins autant que ses partenaires sahéliens. Arrêter l’histoire, c’est hypothéquer l’avenir. Aussi, en tant que collectif d’universitaires, de chercheurs, d’acteurs culturels et d’artistes internationaux, nous demandons au gouvernement français le rétablissement immédiat de la délivrance des visas aux ressortissants du Mali, du Burkina Faso et du Niger, ainsi que la reprise de tous les programmes de coopération culturelle, universitaire et scientifique avec ces trois pays. Texte à l’initiative de Fatoumata Coulibaly, géographe, université des sciences sociales et de gestion de Bamako (Mali) ; Charles Grémont, historien, IRD (France) ; Gilles Holder, anthropologue, CNRS (France) ; Stéphanie Lima, géographe, institut national universitaire Jean-François-Champollion (France) ; Emmanuelle Olivier, ethnomusicologue, CNRS (France) ; Ophélie Rillon, historienne, CNRS (France) ; Mathias Vicherat, directeur de Science Po Paris.Liste complète des signataires

    #Covid-19#migrant#migration#france#niger#mali#burkinafaso#afrique#cooperation#developpement#crise#visas#universitaire#chercheur#artiste#culture#politiquemigratoire

  • La France suspend les mobilités étudiantes avec le Niger, le Mali et le Burkina Faso
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/09/15/la-france-suspend-les-mobilites-etudiantes-avec-le-niger-le-mali-et-le-burki

    La France suspend les mobilités étudiantes avec le Niger, le Mali et le Burkina Faso
    Fin août, des étudiants de ces trois pays ont reçu un message du ministère des affaires étrangères les informant de l’annulation de leur séjour en France en raison de la crise diplomatique en cours.
    Par Soazig Le Nevé
    L’e-mail est arrivé le 30 août, deux jours avant le départ pour la France de Koffi (les étudiants cités témoignent avec un prénom d’emprunt), étudiant burkinabé et doctorant en géographie. « J’ai le regret de vous informer que nous annulons notre soutien pour votre séjour en France, toutes les prestations de Campus France sont annulées (billet d’avion, allocations et assurance santé) », y annonçait un interlocuteur du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
    La décision fait suite aux « événements intervenus à Niamey [Niger] fin juillet », poursuit l’auteur de ce message que Le Monde s’est procuré, en référence au coup d’Etat mené par des généraux désormais au pouvoir. « La France a suspendu son aide au développement à destination du Burkina Faso, du Mali et du Niger. Cette décision concerne également les bourses de mobilité du gouvernement français, dont vous êtes bénéficiaire », acte-t-il. Soit une somme de 1 500 euros mensuels, pour une durée de trois mois, que devait percevoir Koffi durant son séjour de recherche en France.
    Le jeune homme avait pourtant un visa, valable jusqu’en février 2024, explique-t-il au Monde, ainsi qu’un billet d’avion payé par Campus France, l’agence française de promotion de l’enseignement supérieur français à l’étranger. « La situation s’étant dégradée au cours de l’été, les vols Air France ont été suspendus, relate l’étudiant de l’université Joseph-Ki-Zerbo, à Ouagadougou, dont la thèse est codirigée par une chercheuse de l’Institut des mondes africains, une unité du CNRS située à Aubervilliers. Malgré cela, Campus France m’avait acheté un nouveau billet, la semaine de mon départ. » L’espoir a donc été brutalement douché, à réception de l’e-mail, le 30 août.
    La déception fut tout aussi grande pour Aya, une autre étudiante burkinabée, qui devait démarrer un master d’informatique à l’université Lyon-II. « Tout était fin prêt, ma fille avait rendez-vous pour obtenir son visa le 8 août, mais c’est le 4 août que l’interdiction de les délivrer est tombée », se désole son père. Selon lui, des dizaines d’étudiants se retrouvent immobilisés pour une durée inconnue et sont « les victimes innocentes de la crise diplomatique actuelle ». Ce qui aura pour conséquence de restreindre l’influence de l’Hexagone, estime-t-il. « Tout est toujours si compliqué avec la France que de plus en plus de jeunes se tournent vers le Ghana pour apprendre l’anglais et partir ensuite faire des études aux Etats-Unis », relate-t-il.
    Le « contexte sécuritaire » a conduit à une forte réduction du nombre d’agents présents dans les consulats, ce qui limite la capacité à délivrer des visas, explique-t-on au Quai d’Orsay tout en soulignant que les étudiants ne sont pas spécifiquement visés par ces restrictions, pas plus que les artistes. Une directive administrative, émanant des directions régionales des affaires culturelles, a créé la polémique, le 14 septembre, demandant à cesser toute collaboration avec les trois Etats. Lors d’un déplacement en Côte-d’Or, vendredi 15 septembre, Emmanuel Macron a nuancé, en assurant qu’il n’y avait « ni boycott ni représailles » et que la France allait continuer à accueillir des artistes du Sahel s’ils étaient en possession de visas.
    Selon le père d’Aya, il sera possible de relancer les procédures de délivrance, qui, depuis 2022, sont en grande partie gérées par des employés burkinabés au sein de la société Capago, mandatée par le gouvernement français pour traiter les dossiers qu’ils transmettent in fine pour validation au consulat. Du côté du ministère de l’enseignement supérieur, on assure que concernant la délivrance de nouveaux visas, la situation sera « réévaluée dans les semaines à venir à l’aune de l’évolution sécuritaire dans la région ». « Il n’a jamais été question et il ne sera jamais question ni de faire payer les populations pour les erreurs de leurs dirigeants ni de confondre coopération scientifique et politique », justifie l’entourage de Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur.
    Les coopérations existantes avec des universités ou d’autres établissements scientifiques se poursuivront, ajoute-t-on. « Les intellectuels, les chercheurs et les étudiants qui doivent se rendre en France et qui détiennent déjà un visa pourront, comme les artistes, continuer de le faire », affirme l’entourage de la ministre. Le cas du doctorant Koffi montre pourtant que jusqu’ici, la détention d’un visa ne semble pas suffire pour permettre une mobilité. Une chose est sûre, selon le ministère : les étudiants originaires des trois pays qui poursuivent leurs études actuellement en France et bénéficient d’une aide financière d’un opérateur public continueront de la percevoir. Au cours de l’année 2022-2023, Campus France a recensé un total de quelque 3 000 étudiants maliens, 2 500 Burkinabés et 1 200 Nigériens.

    #Covid-19#migrant#migration#france#mali#niger#burkinafaso#etudiant#intellectuel#chercheur#visas#politiquemigratoire#crise

  • En France, la crise au Sahel provoque une confusion diplomatico-culturelle
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/09/15/en-france-la-crise-au-sahel-provoque-un-cafouillage-diplomatico-culturel_618

    En France, la crise au Sahel provoque une confusion diplomatico-culturelle
    Un courrier demandant la suspension de tout projet de coopération avec les artistes du Mali, du Niger et du Burkina Faso a provoqué, jeudi, l’indignation des milieux du spectacle vivant et un spectaculaire rétropédalage de la part des autorités concernées.
    Par Joëlle Gayot, Sandrine Blanchard et Philippe Ricard
    Publié hier à 05h00, modifié hier à 11h55
    La polémique et la confusion qu’elle a suscitée jeudi 14 septembre sont à la hauteur des incertitudes générées par la suspension, par la France, de toute forme de coopération avec le Niger, le Mali et le Burkina Faso, y compris dans le domaine de la culture, pourtant très loin des enjeux sécuritaires qui déchirent la région. La crise diplomatique qui sévit entre la France et les trois pays du Sahel, en raison d’une « épidémie » de coups d’Etat militaires dénoncée par le président de la République, Emmanuel Macron, vient de déborder sur le territoire artistique. Au point de déclencher, en quelques heures, l’indignation dans les milieux du spectacle vivant et un spectaculaire rétropédalage de la part des autorités concernées.(...)
    Tout commence jeudi matin, à l’initiative du tout-puissant Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles (Syndeac). Ce dernier dénonce un courrier « au ton comminatoire » envoyé la veille par les directions régionales des affaires culturelles (DRAC). « Sur instruction du ministère de l’Europe et des affaires étrangères », assène le document révélé par l’organisation syndicale, les établissements culturels subventionnés ont appris qu’ils devaient « suspendre, jusqu’à nouvel ordre, toute coopération avec les pays suivants : Mali, Niger, Burkina Faso ».
    Ce message, expédié aux structures – les centres dramatiques et chorégraphiques nationaux et les scènes nationales – qui dépendent des DRAC, est passé par le secrétariat du ministère de la culture. Les mesures préconisées sont radicales, à en croire le courrier mis en cause par le Syndeac : « Tous les projets de coopération qui sont menés par vos établissements ou vos services avec des institutions ou des ressortissants de ces trois pays doivent être suspendus, sans délai, et sans aucune exception. Tous les soutiens financiers doivent également être suspendus, y compris via des structures françaises, comme des associations par exemple. De la même manière, aucune invitation de tout ressortissant de ces pays ne doit être lancée », est-il précisé en quelques lignes tranchantes.
    Cette rafale de consignes venue d’en haut provoque la stupeur dans les milieux culturels. « Nous n’avons jamais connu d’injonction de la sorte, explique Bruno Lobé, vice-président du Syndeac et directeur du Manège, scène nationale de Reims (Marne). La philosophie de la France vis-à-vis d’artistes vivant dans des pays avec lesquels elle est en conflit a toujours été de continuer à les inviter, sans jamais rompre le dialogue. Ces créateurs sont déjà empêchés de travailler par leurs propres gouvernants. Si nous en rajoutons une couche, ce sera, pour leur viabilité, mais aussi pour l’image de la France, une véritable catastrophe. »
    La mise en œuvre de l’approche préconisée par les autorités françaises constituerait un précédent. Et une incohérence que souligne Bruno Lobé : « Au début de la guerre en Ukraine, le discours tenu était le suivant : “Continuez à soutenir les artistes russes. Ils ne sont pas Vladimir Poutine.” Quelle est la différence entre un artiste burkinabé, malien, nigérien et un artiste russe ? » (...)
    Si les instructions de la missive devaient être suivies, non seulement des artistes feraient les frais de la dissension des politiques, mais les théâtres et les festivals seraient contraints de bouleverser leurs programmations de saison. Cependant, la polémique oblige très vite les deux ministères à clarifier leurs intentions.
    Si la coopération culturelle publique est bien à l’arrêt, tout comme l’aide au développement et l’appui budgétaire, seuls les artistes n’ayant pas encore reçu de visas sont concernés. Dans les trois pays, justifie encore le Quai d’Orsay, « nous avons suspendu la délivrance de visas, nos postes n’étant plus en mesure de traiter ces demandes du fait de la situation sécuritaire dégradée ».
    L’épisode pourrait néanmoins laisser des traces. « C’est sans doute un fonctionnaire zélé du ministère de la culture qui a rédigé le courrier sur la base de consignes un peu générales des affaires étrangères, qu’il a dû surinterpréter », observe une source sous couvert d’anonymat. Un nouveau message devait être envoyé vendredi par le ministère de la culture afin de clarifier la situation, a indiqué Mme Abdul Malak sur RTL. D’ici là, les professionnels du spectacle vivant risquent de rester sur leurs gardes. « Le fait que ce soient des zones d’influence ou d’anciennes colonies françaises doit jouer dans l’énervement du gouvernement », observe Bruno Lobé. « La sanction est politique, mais celle qui va véritablement souffrir de ses conséquences, c’est la population. Pourquoi viser la culture ? Ce n’est pas très malin », conclut Hassane Kassi Kouyaté.

    #Covid-19#migrant#migration#france#niger#burkinafaso#mali#artiste#visas#politiquemigratoire#crise#culture#postcovid

  • Projets artistiques avec le Sahel : « Il n’est pas question d’arrêter d’échanger avec les artistes et les lieux culturels », assure la ministre de la culture
    https://www.lemonde.fr/culture/article/2023/09/15/projets-culturels-avec-le-sahel-il-n-est-pas-question-d-arreter-d-echanger-a

    Projets artistiques avec le Sahel : « Il n’est pas question d’arrêter d’échanger avec les artistes et les lieux culturels », assure la ministre de la culture
    Seuls les « nouveaux projets de coopération qui démarreraient maintenant et demanderaient des visas, ou d’envoyer des Français » au Burkina Faso, au Mali, au Niger, sont concernés par la demande de suspension, affirme Rima Abdul Malak.
    Confrontée à l’indignation du secteur culturel depuis la diffusion d’un message demandant la suspension de tout projet de coopération avec les ressortissants du Mali, du Niger et du Burkina Faso, la ministre de la culture, Rima Abdul Malak, s’est employée, vendredi 15 septembre, à déminer le sujet.« Ce n’est pas un boycott, pas de représailles », a-t-elle affirmé sur RTL. « Il n’est pas question d’arrêter d’échanger avec les artistes et les lieux culturels, des musées, des festivals et des théâtres » du Niger, du Mali et du Burkina. « Tous les artistes qui ont déjà des visas et qui ont des tournées prévues ou des spectacles prévus, ceux-là vont pouvoir venir comme prévu. Tous ceux qui sont d’origine burkinabée, nigérienne ou malienne, mais qui vivent en France évidemment, ne sont pas du tout du tout concernés », a précisé la ministre. Sont concernés les « nouveaux projets de coopération qui démarreraient et nécessiteraient des visas, ou d’envoyer des Français là-bas », compte tenu du « contexte sécuritaire extrêmement dégradé ». Un « message » sera renvoyé vendredi pour repréciser les mesures.
    Le gouvernement est mis en cause depuis la diffusion, mercredi, d’un message émanant des directions régionales de la culture (DRAC), qui représentent le ministère et sont chargées de conduire la politique culturelle de l’Etat dans les régions et les départements, appelant à « suspendre sans délai, et sans aucune exception » tous les « projets de coopération qui sont menés (…) avec des institutions ou des ressortissants de ces trois pays ». « Tous les soutiens financiers doivent également être suspendus, y compris via des structures françaises, comme des associations par exemple. De la même manière, aucune invitation de tout ressortissant de ces pays ne doit être lancée », poursuivait le message.
    Ce message a provoqué la colère des acteurs culturels : « Cette interdiction totale concernant trois pays traversés par des crises en effet très graves n’a évidemment aucun sens d’un point de vue artistique et constitue une erreur majeure d’un point de vue politique. C’est tout le contraire qu’il convient de faire », a cinglé le Syndeac dans un communiqué. « Cette politique de l’interdiction de la circulation des artistes et de leurs œuvres n’a jamais prévalu dans aucune autre crise internationale, des plus récentes avec la Russie, aux plus anciennes et durables, avec la Chine », a-t-il ajouté.
    Jeudi, confronté à la polémique, le ministère de la culture avait assuré n’avoir demandé « aucune déprogrammation d’artistes, de quelque nationalité que ce soit ». « Cette décision n’affecte pas les personnes qui seraient titulaires de visas délivrés avant cette date ou qui résident en France ou dans d’autres pays », a-t-il ajouté.

    #Covid-19#migrant#migration#france#mali#niger#burkinafaso#culture#visas#politiquemigratoire#postcovid#artiste

  • 🛑 Une fois n’est pas coutume... on relaie l’éditorial du dernier numéro du journal « Lutte Ouvrière » (8 septembre)... avec lequel on partage l’essentiel du point de vue, si l’on fait abstraction de la rhétorique et de la déclamation hautement et indéniablement « trotsko-trotskyste »... 😅🙃

    « On vit chez les fous ! », s’est étranglé Macron, lundi dernier, à propos de la vague de putschs en Afrique, devant les ambassadeurs réunis à l’Élysée. Mais qui sont les fous dans cette histoire ? Ceux qui rejettent la présence française au Mali, au Burkina Faso et au Niger, ou ceux qui, comme Macron, sont prêts à déclencher une nouvelle guerre qui enfoncera davantage le Sahel dans le chaos guerrier ?
    Macron joue les matamores contre la junte nigérienne et refuse de rappeler son ambassadeur. Il ne digère pas que la France soit poussée dehors. À l’entendre, l’armée française aurait sauvé le Sahel du djihadisme ! Mais la population est bien placée pour faire le vrai bilan de l’opération Barkhane, lancée il y a dix ans : les bandes armées continuent de pulluler, elles rackettent et sèment la terreur dans une zone de plus en plus étendue (...)

    #Afrique #putschs #Macron #Françafrique #exploitation #capitalisme #militarisme #guerre #djihadisme #dictature #Mali #Niger #BurkinaFaso #Congo-Brazzaville #Gabon #Bongo #Tchad... #domination #France #EtatsUnis #Russie #Chine #Néocolonialisme #impérialisme #LutteOuvrière

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    ▶️ https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/09/06/bas-la-francafrique-travailleurs-dafrique-et-de-france-memes
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  • Comment l’Europe sous-traite à l’#Afrique le contrôle des #migrations (1/4) : « #Frontex menace la #dignité_humaine et l’#identité_africaine »

    Pour freiner l’immigration, l’Union européenne étend ses pouvoirs aux pays d’origine des migrants à travers des partenariats avec des pays africains, parfois au mépris des droits humains. Exemple au Sénégal, où le journaliste Andrei Popoviciu a enquêté.

    Cette enquête en quatre épisodes, publiée initialement en anglais dans le magazine américain In These Times (https://inthesetimes.com/article/europe-militarize-africa-senegal-borders-anti-migration-surveillance), a été soutenue par une bourse du Leonard C. Goodman Center for Investigative Reporting.

    Par une brûlante journée de février, Cornelia Ernst et sa délégation arrivent au poste-frontière de Rosso. Autour, le marché d’artisanat bouillonne de vie, une épaisse fumée s’élève depuis les camions qui attendent pour passer en Mauritanie, des pirogues hautes en couleur dansent sur le fleuve Sénégal. Mais l’attention se focalise sur une fine mallette noire posée sur une table, face au chef du poste-frontière. Celui-ci l’ouvre fièrement, dévoilant des dizaines de câbles méticuleusement rangés à côté d’une tablette tactile. La délégation en a le souffle coupé.

    Le « Universal Forensics Extraction Device » (UFED) est un outil d’extraction de données capable de récupérer les historiques d’appels, photos, positions GPS et messages WhatsApp de n’importe quel téléphone portable. Fabriqué par la société israélienne Cellebrite, dont il a fait la réputation, l’UFED est commercialisé auprès des services de police du monde entier, notamment du FBI, pour lutter contre le terrorisme et le trafic de drogues. Néanmoins, ces dernières années, le Nigeria et le Bahreïn s’en sont servis pour voler les données de dissidents politiques, de militants des droits humains et de journalistes, suscitant un tollé.

    Toujours est-il qu’aujourd’hui, une de ces machines se trouve au poste-frontière entre Rosso-Sénégal et Rosso-Mauritanie, deux villes du même nom construites de part et d’autre du fleuve qui sépare les deux pays. Rosso est une étape clé sur la route migratoire qui mène jusqu’en Afrique du Nord. Ici, cependant, cette technologie ne sert pas à arrêter les trafiquants de drogue ou les terroristes, mais à suivre les Ouest-Africains qui veulent migrer vers l’Europe. Et cet UFED n’est qu’un outil parmi d’autres du troublant arsenal de technologies de pointe déployé pour contrôler les déplacements dans la région – un arsenal qui est arrivé là, Cornelia Ernst le sait, grâce aux technocrates de l’Union européenne (UE) avec qui elle travaille.

    Cette eurodéputée allemande se trouve ici, avec son homologue néerlandaise Tineke Strik et une équipe d’assistants, pour mener une mission d’enquête en Afrique de l’Ouest. Respectivement membres du Groupe de la gauche (GUE/NGL) et du Groupe des Verts (Verts/ALE) au Parlement européen, les deux femmes font partie d’une petite minorité de députés à s’inquiéter des conséquences de la politique migratoire européenne sur les valeurs fondamentales de l’UE – à savoir les droits humains –, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Europe.

    Le poste-frontière de Rosso fait partie intégrante de la politique migratoire européenne. Il accueille en effet une nouvelle antenne de la Division nationale de lutte contre le trafic de migrants (DNLT), fruit d’un « partenariat opérationnel conjoint » entre le Sénégal et l’UE visant à former et équiper la police des frontières sénégalaise et à dissuader les migrants de gagner l’Europe avant même qu’ils ne s’en approchent. Grâce à l’argent des contribuables européens, le Sénégal a construit depuis 2018 au moins neuf postes-frontières et quatre antennes régionales de la DNLT. Ces sites sont équipés d’un luxe de technologies de surveillance intrusive : outre la petite mallette noire, ce sont des logiciels d’identification biométrique des empreintes digitales et de reconnaissance faciale, des drones, des serveurs numériques, des lunettes de vision nocturne et bien d’autres choses encore…

    Dans un communiqué, un porte-parole de la Commission européenne affirme pourtant que les antennes régionales de la DNLT ont été créées par le Sénégal et que l’UE se borne à financer les équipements et les formations.

    « Frontex militarise la Méditerranée »

    Cornelia Ernst redoute que ces outils ne portent atteinte aux droits fondamentaux des personnes en déplacement. Les responsables sénégalais, note-t-elle, semblent « très enthousiasmés par les équipements qu’ils reçoivent et par leur utilité pour suivre les personnes ». Cornelia Ernst et Tineke Strik s’inquiètent également de la nouvelle politique, controversée, que mène la Commission européenne depuis l’été 2022 : l’Europe a entamé des négociations avec le Sénégal et la Mauritanie pour qu’ils l’autorisent à envoyer du personnel de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, Frontex, patrouiller aux frontières terrestres et maritimes des deux pays. Objectif avoué : freiner l’immigration africaine.

    Avec un budget de 754 millions d’euros, Frontex est l’agence la mieux dotée financièrement de toute l’UE. Ces cinq dernières années, un certain nombre d’enquêtes – de l’UE, des Nations unies, de journalistes et d’organisations à but non lucratif – ont montré que Frontex a violé les droits et la sécurité des migrants qui traversent la Méditerranée, notamment en aidant les garde-côtes libyens, financés par l’UE, à renvoyer des centaines de milliers de migrants en Libye, un pays dans lequel certains sont détenus, torturés ou exploités comme esclaves sexuels. En 2022, le directeur de l’agence, Fabrice Leggeri, a même été contraint de démissionner à la suite d’une cascade de scandales. Il lui a notamment été reproché d’avoir dissimulé des « pushbacks » : des refoulements illégaux de migrants avant même qu’ils ne puissent déposer une demande d’asile.

    Cela fait longtemps que Frontex est présente de façon informelle au Sénégal, en Mauritanie et dans six autres pays d’Afrique de l’Ouest, contribuant au transfert de données migratoires de ces pays vers l’UE. Mais jamais auparavant l’agence n’avait déployé de gardes permanents à l’extérieur de l’UE. Or à présent, Bruxelles compte bien étendre les activités de Frontex au-delà de son territoire, sur le sol de pays africains souverains, anciennes colonies européennes qui plus est, et ce en l’absence de tout mécanisme de surveillance. Pour couronner le tout, initialement, l’UE avait même envisagé d’accorder l’immunité au personnel de Frontex posté en Afrique de l’Ouest.

    D’évidence, les programmes européens ne sont pas sans poser problème. La veille de leur arrivée à Rosso, Cornelia Ernst et Tineke Strik séjournent à Dakar, où plusieurs groupes de la société civile les mettent en garde. « Frontex menace la dignité humaine et l’identité africaine », martèle Fatou Faye, de la Fondation Rosa Luxemburg, une ONG allemande. « Frontex militarise la Méditerranée », renchérit Saliou Diouf, fondateur de l’association de défense des migrants Boza Fii. Si Frontex poste ses gardes aux frontières africaines, ajoute-t-il, « c’est la fin ».

    Ces programmes s’inscrivent dans une vaste stratégie d’« externalisation des frontières », selon le jargon européen en vigueur. L’idée ? Sous-traiter de plus en plus le contrôle des frontières européennes en créant des partenariats avec des gouvernements africains – autrement dit, étendre les pouvoirs de l’UE aux pays d’origine des migrants. Concrètement, cette stratégie aux multiples facettes consiste à distribuer des équipements de surveillance de pointe, à former les forces de police et à mettre en place des programmes de développement qui prétendent s’attaquer à la racine des migrations.

    Des cobayes pour l’Europe

    En 2016, l’UE a désigné le Sénégal, qui est à la fois un pays d’origine et de transit des migrants, comme l’un de ses cinq principaux pays partenaires pour gérer les migrations africaines. Mais au total, ce sont pas moins de 26 pays africains qui reçoivent de l’argent des contribuables européens pour endiguer les vagues de migration, dans le cadre de 400 projets distincts. Entre 2015 et 2021, l’UE a investi 5 milliards d’euros dans ces projets, 80 % des fonds étant puisés dans les budgets d’aide humanitaire et au développement. Selon des données de la Fondation Heinrich Böll, rien qu’au Sénégal, l’Europe a investi au moins 200 milliards de francs CFA (environ 305 millions d’euros) depuis 2005.

    Ces investissements présentent des risques considérables. Il s’avère que la Commission européenne omet parfois de procéder à des études d’évaluation d’impact sur les droits humains avant de distribuer ses fonds. Or, comme le souligne Tineke Strik, les pays qu’elle finance manquent souvent de garde-fous pour protéger la démocratie et garantir que les technologies et les stratégies de maintien de l’ordre ne seront pas utilisées à mauvais escient. En réalité, avec ces mesures, l’UE mène de dangereuses expériences technico-politiques : elle équipe des gouvernements autoritaires d’outils répressifs qui peuvent être utilisés contre les migrants, mais contre bien d’autres personnes aussi.

    « Si la police dispose de ces technologies pour tracer les migrants, rien ne garantit qu’elle ne s’en servira pas contre d’autres individus, comme des membres de la société civile et des acteurs politiques », explique Ousmane Diallo, chercheur au bureau d’Afrique de l’Ouest d’Amnesty International.

    En 2022, j’ai voulu mesurer l’impact au Sénégal des investissements réalisés par l’UE dans le cadre de sa politique migratoire. Je me suis rendu dans plusieurs villes frontalières, j’ai discuté avec des dizaines de personnes et j’ai consulté des centaines de documents publics ou qui avaient fuité. Cette enquête a mis au jour un complexe réseau d’initiatives qui ne s’attaquent guère aux problèmes qui poussent les gens à émigrer. En revanche, elles portent un rude coup aux droits fondamentaux, à la souveraineté nationale du Sénégal et d’autres pays d’Afrique, ainsi qu’aux économies locales de ces pays, qui sont devenus des cobayes pour l’Europe.

    Des politiques « copiées-collées »

    Depuis la « crise migratoire » de 2015, l’UE déploie une énergie frénétique pour lutter contre l’immigration. A l’époque, plus d’un million de demandeurs d’asile originaires du Moyen-Orient et d’Afrique – fuyant les conflits, la violence et la pauvreté – ont débarqué sur les côtes européennes. Cette « crise migratoire » a provoqué une droitisation de l’Europe. Les leaders populistes surfant sur la peur des populations et présentant l’immigration comme une menace sécuritaire et identitaire, les partis nationalistes et xénophobes en ont fait leurs choux gras.

    Reste que le pic d’immigration en provenance d’Afrique de l’Ouest s’est produit bien avant 2015 : en 2006, plus de 31 700 migrants sont arrivés par bateau aux îles Canaries, un territoire espagnol situé à une centaine de kilomètres du Maroc. Cette vague a pris au dépourvu le gouvernement espagnol, qui s’est lancé dans une opération conjointe avec Frontex, baptisée « Hera », pour patrouiller le long des côtes africaines et intercepter les bateaux en direction de l’Europe.

    Cette opération « Hera », que l’ONG britannique de défense des libertés Statewatch qualifie d’« opaque », marque le premier déploiement de Frontex à l’extérieur du territoire européen. C’est aussi le premier signe d’externalisation des frontières européennes en Afrique depuis la fin du colonialisme au XXe siècle. En 2018, Frontex a quitté le Sénégal, mais la Guardia Civil espagnole y est restée jusqu’à ce jour : pour lutter contre l’immigration illégale, elle patrouille le long des côtes et effectue même des contrôles de passeports dans les aéroports.

    En 2015, en pleine « crise », les fonctionnaires de Bruxelles ont musclé leur stratégie : ils ont décidé de dédier des fonds à la lutte contre l’immigration à la source. Ils ont alors créé le Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique (EUTF). Officiellement, il s’agit de favoriser la stabilité et de remédier aux causes des migrations et des déplacements irréguliers des populations en Afrique.

    Malgré son nom prometteur, c’est la faute de l’EUTF si la mallette noire se trouve à présent au poste-frontière de Rosso – sans oublier les drones et les lunettes de vision nocturne. Outre ce matériel, le fonds d’urgence sert à envoyer des fonctionnaires et des consultants européens en Afrique, pour convaincre les gouvernements de mettre en place de nouvelles politiques migratoires – des politiques qui, comme me le confie un consultant anonyme de l’EUTF, sont souvent « copiées-collées d’un pays à l’autre », sans considération aucune des particularités nationales de chaque pays. « L’UE force le Sénégal à adopter des politiques qui n’ont rien à voir avec nous », explique la chercheuse sénégalaise Fatou Faye à Cornelia Ernst et Tineke Strik.

    Une mobilité régionale stigmatisée

    Les aides européennes constituent un puissant levier, note Leonie Jegen, chercheuse à l’université d’Amsterdam et spécialiste de l’influence de l’UE sur la politique migratoire sénégalaise. Ces aides, souligne-t-elle, ont poussé le Sénégal à réformer ses institutions et son cadre législatif en suivant des principes européens et en reproduisant des « catégories politiques eurocentrées » qui stigmatisent, voire criminalisent la mobilité régionale. Et ces réformes sont sous-tendues par l’idée que « le progrès et la modernité » sont des choses « apportées de l’extérieur » – idée qui n’est pas sans faire écho au passé colonial.

    Il y a des siècles, pour se partager l’Afrique et mieux piller ses ressources, les empires européens ont dessiné ces mêmes frontières que l’UE est aujourd’hui en train de fortifier. L’Allemagne a alors jeté son dévolu sur de grandes parties de l’Afrique de l’Ouest et de l’Afrique de l’Est ; les Pays-Bas ont mis la main sur l’Afrique du Sud ; les Britanniques ont décroché une grande bande de terre s’étendant du nord au sud de la partie orientale du continent ; la France a raflé des territoires allant du Maroc au Congo-Brazzaville, notamment l’actuel Sénégal, qui n’est indépendant que depuis soixante-trois ans.

    L’externalisation actuelle des frontières européennes n’est pas un cas totalement unique. Les trois derniers gouvernements américains ont abreuvé le Mexique de millions de dollars pour empêcher les réfugiés d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud d’atteindre la frontière américaine, et l’administration Biden a annoncé l’ouverture en Amérique latine de centres régionaux où il sera possible de déposer une demande d’asile, étendant ainsi de facto le contrôle de ses frontières à des milliers de kilomètres au-delà de son territoire.

    Cela dit, au chapitre externalisation des frontières, la politique européenne en Afrique est de loin la plus ambitieuse et la mieux financée au monde.

    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/09/06/comment-l-europe-sous-traite-a-l-afrique-le-controle-des-migrations-1-4-fron

    #réfugiés #asile #contrôles_frontaliers #frontières #Sénégal #Rosso #fleuve_Sénégal #Mauritanie #Universal_Forensics_Extraction_Device (#UFED) #données #technologie #Cellebrite #complexe_militaro-industriel #Division_nationale_de_lutte_contre_le_trafic_de_migrants (#DNLT) #politique_migratoire_européenne #UE #EU #Union_européenne #partenariat_opérationnel_conjoint #dissuasion #postes-frontières #surveillance #technologie_de_surveillance #biométrie #identification_biométrie #reconnaissance_faciale #empreintes_digitales #drones #droits_fondamentaux #militarisation_des_frontières #Boza_Fii #externalisation #expériences_technico-politiques #Hera #opération_Hera #mobilité_régionale

    • Comment l’Europe sous-traite à l’Afrique le contrôle des migrations (2/4) : « Nous avons besoin d’aide, pas d’outils sécuritaires »

      Au Sénégal, la création et l’équipement de postes-frontières constituent des éléments clés du partenariat avec l’Union européenne. Une stratégie pas toujours efficace, tandis que les services destinés aux migrants manquent cruellement de financements.

      Par une étouffante journée de mars, j’arrive au poste de contrôle poussiéreux du village sénégalais de #Moussala, à la frontière avec le #Mali. Des dizaines de camions et de motos attendent, en ligne, de traverser ce point de transit majeur. Après avoir demandé pendant des mois, en vain, la permission au gouvernement d’accéder au poste-frontière, j’espère que le chef du poste m’expliquera dans quelle mesure les financements européens influencent leurs opérations. Refusant d’entrer dans les détails, il me confirme que son équipe a récemment reçu de l’Union européenne (UE) des formations et des équipements dont elle se sert régulièrement. Pour preuve, un petit diplôme et un trophée, tous deux estampillés du drapeau européen, trônent sur son bureau.

      La création et l’équipement de postes-frontières comme celui de Moussala constituent des éléments clés du partenariat entre l’UE et l’#Organisation_internationale_pour_les_migrations (#OIM). Outre les technologies de surveillance fournies aux antennes de la Division nationale de lutte contre le trafic de migrants (DNLT, fruit d’un partenariat entre le Sénégal et l’UE), chaque poste-frontière est équipé de systèmes d’analyse des données migratoires et de systèmes biométriques de reconnaissance faciale et des empreintes digitales.

      Officiellement, l’objectif est de créer ce que les fonctionnaires européens appellent un système africain d’#IBM, à savoir « #Integrated_Border_Management » (en français, « gestion intégrée des frontières »). Dans un communiqué de 2017, le coordinateur du projet de l’OIM au Sénégal déclarait : « La gestion intégrée des frontières est plus qu’un simple concept, c’est une culture. » Il avait semble-t-il en tête un changement idéologique de toute l’Afrique, qui ne manquerait pas selon lui d’embrasser la vision européenne des migrations.

      Technologies de surveillance

      Concrètement, ce système IBM consiste à fusionner les #bases_de_données sénégalaises (qui contiennent des données biométriques sensibles) avec les données d’agences de police internationales (comme #Interpol et #Europol). Le but : permettre aux gouvernements de savoir qui franchit quelle frontière et quand. Un tel système, avertissent les experts, peut vite faciliter les expulsions illégales et autres abus.

      Le risque est tout sauf hypothétique. En 2022, un ancien agent des services espagnols de renseignement déclarait au journal El Confidencial que les autorités de plusieurs pays d’Afrique « utilisent les technologies fournies par l’Espagne pour persécuter et réprimer des groupes d’opposition, des militants et des citoyens critiques envers le pouvoir ». Et d’ajouter que le gouvernement espagnol en avait parfaitement conscience.

      D’après un porte-parole de la Commission européenne, « tous les projets qui touchent à la sécurité et sont financés par l’UE comportent un volet de formation et de renforcement des capacités en matière de droits humains ». Selon cette même personne, l’UE effectue des études d’impact sur les droits humains avant et pendant la mise en œuvre de ces projets. Mais lorsque, il y a quelques mois, l’eurodéputée néerlandaise Tineke Strik a demandé à voir ces études d’impact, trois différents services de la Commission lui ont envoyé des réponses officielles disant qu’ils ne les avaient pas. En outre, selon un de ces services, « il n’existe pas d’obligation réglementaire d’en faire ».

      Au Sénégal, les libertés civiles sont de plus en plus menacées et ces technologies de surveillance risquent d’autant plus d’être utilisées à mauvais escient. Rappelons qu’en 2021, les forces de sécurité sénégalaises ont tué quatorze personnes qui manifestaient contre le gouvernement ; au cours des deux dernières années, plusieurs figures de l’opposition et journalistes sénégalais ont été emprisonnés pour avoir critiqué le gouvernement, abordé des questions politiques sensibles ou avoir « diffusé des fausses nouvelles ». En juin, après qu’Ousmane Sonko, principal opposant au président Macky Sall, a été condamné à deux ans d’emprisonnement pour « corruption de la jeunesse », de vives protestations ont fait 23 morts.

      « Si je n’étais pas policier, je partirais aussi »

      Alors que j’allais renoncer à discuter avec la police locale, à Tambacounda, autre grand point de transit non loin des frontières avec le Mali et la Guinée, un policier de l’immigration en civil a accepté de me parler sous couvert d’anonymat. C’est de la région de #Tambacounda, qui compte parmi les plus pauvres du Sénégal, que proviennent la plupart des candidats à l’immigration. Là-bas, tout le monde, y compris le policier, connaît au moins une personne qui a tenté de mettre les voiles pour l’Europe.

      « Si je n’étais pas policier, je partirais aussi », me confie-t-il par l’entremise d’un interprète, après s’être éloigné à la hâte du poste-frontière. Les investissements de l’UE « n’ont rien changé du tout », poursuit-il, notant qu’il voit régulièrement des personnes en provenance de Guinée passer par le Sénégal et entrer au Mali dans le but de gagner l’Europe.

      Depuis son indépendance en 1960, le Sénégal est salué comme un modèle de démocratie et de stabilité, tandis que nombre de ses voisins sont en proie aux dissensions politiques et aux coups d’Etat. Quoi qu’il en soit, plus d’un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté et l’absence de perspectives pousse la population à migrer, notamment vers la France et l’Espagne. Aujourd’hui, les envois de fonds de la diaspora représentent près de 10 % du PIB sénégalais. A noter par ailleurs que, le Sénégal étant le pays le plus à l’ouest de l’Afrique, de nombreux Ouest-Africains s’y retrouvent lorsqu’ils fuient les problèmes économiques et les violences des ramifications régionales d’Al-Qaida et de l’Etat islamique (EI), qui ont jusqu’à présent contraint près de 4 millions de personnes à partir de chez elles.

      « L’UE ne peut pas résoudre les problèmes en construisant des murs et en distribuant de l’argent, me dit le policier. Elle pourra financer tout ce qu’elle veut, ce n’est pas comme ça qu’elle mettra fin à l’immigration. » Les sommes qu’elle dépense pour renforcer la police et les frontières, dit-il, ne servent guère plus qu’à acheter des voitures climatisées aux policiers des villes frontalières.

      Pendant ce temps, les services destinés aux personnes expulsées – comme les centres de protection et d’accueil – manquent cruellement de financements. Au poste-frontière de Rosso, des centaines de personnes sont expulsées chaque semaine de Mauritanie. Mbaye Diop travaille avec une poignée de bénévoles du centre que la Croix-Rouge a installé du côté sénégalais pour accueillir ces personnes expulsées : des hommes, des femmes et des enfants qui présentent parfois des blessures aux poignets, causées par des menottes, et ailleurs sur le corps, laissées par les coups de la police mauritanienne. Mais Mbaye Diop n’a pas de ressources pour les aider. L’approche n’est pas du tout la bonne, souffle-t-il : « Nous avons besoin d’aide humanitaire, pas d’outils sécuritaires. »

      La méthode de la carotte

      Pour freiner l’immigration, l’UE teste également la méthode de la carotte : elle propose des subventions aux entreprises locales et des formations professionnelles à ceux qui restent ou rentrent chez eux. La route qui mène à Tambacounda est ponctuée de dizaines et de dizaines de panneaux publicitaires vantant les projets européens.

      Dans la réalité, les offres ne sont pas aussi belles que l’annonce l’UE. Binta Ly, 40 ans, en sait quelque chose. A Tambacounda, elle tient une petite boutique de jus de fruits locaux et d’articles de toilette. Elle a fait une année de droit à l’université, mais le coût de la vie à Dakar l’a contrainte à abandonner ses études et à partir chercher du travail au Maroc. Après avoir vécu sept ans à Casablanca et Marrakech, elle est rentrée au Sénégal, où elle a récemment inauguré son magasin.

      En 2022, Binta Ly a déposé une demande de subvention au Bureau d’accueil, d’orientation et de suivi (BAOS) qui avait ouvert la même année à Tambacounda, au sein de l’antenne locale de l’Agence régionale de développement (ARD). Financés par l’UE, les BAOS proposent des subventions aux petites entreprises sénégalaises dans le but de dissuader la population d’émigrer. Binta Ly ambitionnait d’ouvrir un service d’impression, de copie et de plastification dans sa boutique, idéalement située à côté d’une école primaire. Elle a obtenu une subvention de 500 000 francs CFA (762 euros) – soit un quart du budget qu’elle avait demandé –, mais peu importe, elle était très enthousiaste. Sauf qu’un an plus tard, elle n’avait toujours pas touché un seul franc.

      Dans l’ensemble du Sénégal, les BAOS ont obtenu une enveloppe totale de 1 milliard de francs CFA (1,5 million d’euros) de l’UE pour financer ces subventions. Mais l’antenne de Tambacounda n’a perçu que 60 millions de francs CFA (91 470 euros), explique Abdoul Aziz Tandia, directeur du bureau local de l’ARD. A peine de quoi financer 84 entreprises dans une région de plus d’un demi-million d’habitants. Selon un porte-parole de la Commission européenne, la distribution des subventions a effectivement commencé en avril. Le fait est que Binta Ly a reçu une imprimante et une plastifieuse, mais pas d’ordinateur pour aller avec. « Je suis contente d’avoir ces aides, dit-elle. Le problème, c’est qu’elles mettent très longtemps à venir et que ces retards chamboulent tout mon business plan. »

      Retour « volontaire »

      Abdoul Aziz Tandia admet que les BAOS ne répondent pas à la demande. C’est en partie la faute de la bureaucratie, poursuit-il : Dakar doit approuver l’ensemble des projets et les intermédiaires sont des ONG et des agences étrangères, ce qui signifie que les autorités locales et les bénéficiaires n’exercent aucun contrôle sur ces fonds, alors qu’ils sont les mieux placés pour savoir comment les utiliser. Par ailleurs, reconnaît-il, de nombreuses régions du pays n’ayant accès ni à l’eau propre, ni à l’électricité ni aux soins médicaux, ces microsubventions ne suffisent pas à empêcher les populations d’émigrer. « Sur le moyen et le long termes, ces investissements n’ont pas de sens », juge Abdoul Aziz Tandia.

      Autre exemple : aujourd’hui âgé de 30 ans, Omar Diaw a passé au moins cinq années de sa vie à tenter de rejoindre l’Europe. Traversant les impitoyables déserts du Mali et du Niger, il est parvenu jusqu’en Algérie. Là, à son arrivée, il s’est aussitôt fait expulser vers le Niger, où il n’existe aucun service d’accueil. Il est alors resté coincé des semaines entières dans le désert. Finalement, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) l’a renvoyé en avion au Sénégal, qualifiant son retour de « volontaire ».

      Lorsqu’il est rentré chez lui, à Tambacounda, l’OIM l’a inscrit à une formation de marketing numérique qui devait durer plusieurs semaines et s’accompagner d’une allocation de 30 000 francs CFA (46 euros). Mais il n’a jamais touché l’allocation et la formation qu’il a suivie est quasiment inutile dans sa situation : à Tambacounda, la demande en marketing numérique n’est pas au rendez-vous. Résultat : il a recommencé à mettre de l’argent de côté pour tenter de nouveau de gagner l’Europe.

      https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/09/07/comment-l-europe-sous-traite-a-l-afrique-le-controle-des-migrations-2-4-nous
      #OIM #retour_volontaire

    • Comment l’Europe sous-traite à l’Afrique le contrôle des migrations (3/4) : « Il est presque impossible de comprendre à quoi sert l’argent »

      A coups de centaines de millions d’euros, l’UE finance des projets dans des pays africains pour réduire les migrations. Mais leur impact est difficile à mesurer et leurs effets pervers rarement pris en considération.

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      Au chapitre migrations, rares sont les projets de l’Union européenne (UE) qui semblent adaptés aux réalités africaines. Mais il n’est pas sans risques de le dire tout haut. C’est ce que Boubacar Sèye, chercheur dans le domaine, a appris à ses dépens.

      Né au Sénégal, il vit aujourd’hui en Espagne. Ce migrant a quitté la Côte d’Ivoire, où il travaillait comme professeur de mathématiques, quand les violences ont ravagé le pays au lendemain de l’élection présidentielle de 2000. Après de brefs séjours en France et en Italie, Boubacar Sèye s’est établi en Espagne, où il a fini par obtenir la citoyenneté et fondé une famille avec son épouse espagnole. Choqué par le bilan de la vague de migration aux Canaries en 2006, il a créé l’ONG Horizons sans frontières pour aider les migrants africains en Espagne. Aujourd’hui, il mène des recherches et défend les droits des personnes en déplacement, notamment celles en provenance d’Afrique et plus particulièrement du Sénégal.

      En 2019, Boubacar Sèye s’est procuré un document détaillant comment les fonds des politiques migratoires de l’UE sont dépensés au Sénégal. Il a été sidéré par le montant vertigineux des sommes investies pour juguler l’immigration, alors que des milliers de candidats à l’asile se noient chaque année sur certaines des routes migratoires les plus meurtrières au monde. Lors d’entretiens publiés dans la presse et d’événements publics, il a ouvertement demandé aux autorités sénégalaises d’être plus transparentes sur ce qu’elles avaient fait des centaines de millions d’euros de l’Europe, qualifiant ces projets de véritable échec.

      Puis, au début de l’année 2021, il a été arrêté à l’aéroport de Dakar pour « diffusion de fausses informations ». Il a ensuite passé deux semaines en prison. Sa santé se dégradant rapidement sous l’effet du stress, il a fait une crise cardiaque. « Ce séjour en prison était inhumain, humiliant, et il m’a causé des problèmes de santé qui durent jusqu’à aujourd’hui, s’indigne le chercheur. J’ai juste posé une question : “Où est passé l’argent ?” »

      Ses intuitions n’étaient pas mauvaises. Les financements de la politique anti-immigration de l’UE sont notoirement opaques et difficiles à tracer. Les demandes déposées dans le cadre de la liberté d’information mettent des mois, voire des années à être traitées, alors que la délégation de l’UE au Sénégal, la Commission européenne et les autorités sénégalaises ignorent ou déclinent les demandes d’interviews.

      La Division nationale de lutte contre le trafic de migrants (DNLT, fruit d’un partenariat entre le Sénégal et l’UE), la police des frontières, le ministère de l’intérieur et le ministère des affaires étrangères – lesquels ont tous bénéficié des fonds migratoires européens – n’ont pas répondu aux demandes répétées d’entretien pour réaliser cette enquête.
      « Nos rapports doivent être positifs »

      Les rapports d’évaluation de l’UE ne donnent pas de vision complète de l’impact des programmes. A dessein ? Plusieurs consultants qui ont travaillé sur des rapports d’évaluation d’impact non publiés de projets du #Fonds_fiduciaire_d’urgence_de_l’UE_pour_l’Afrique (#EUTF), et qui s’expriment anonymement en raison de leur obligation de confidentialité, tirent la sonnette d’alarme : les effets pervers de plusieurs projets du fonds sont peu pris en considération.

      Au #Niger, par exemple, l’UE a contribué à élaborer une loi qui criminalise presque tous les déplacements, rendant de fait illégale la mobilité dans la région. Alors que le nombre de migrants irréguliers qui empruntent certaines routes migratoires a reculé, les politiques européennes rendent les routes plus dangereuses, augmentent les prix qu’exigent les trafiquants et criminalisent les chauffeurs de bus et les sociétés de transport locales. Conséquence : de nombreuses personnes ont perdu leur travail du jour au lendemain.

      La difficulté à évaluer l’impact de ces projets tient notamment à des problèmes de méthode et à un manque de ressources, mais aussi au simple fait que l’UE ne semble guère s’intéresser à la question. Un consultant d’une société de contrôle et d’évaluation financée par l’UE confie : « Quel est l’impact de ces projets ? Leurs effets pervers ? Nous n’avons pas les moyens de répondre à ces questions. Nous évaluons les projets uniquement à partir des informations fournies par des organisations chargées de leur mise en œuvre. Notre cabinet de conseil ne réalise pas d’évaluation véritablement indépendante. »

      Selon un document interne que j’ai pu me procurer, « rares sont les projets qui nous ont fourni les données nécessaires pour évaluer les progrès accomplis en direction des objectifs généraux de l’EUTF (promouvoir la stabilité et limiter les déplacements forcés et les migrations illégales) ». Selon un autre consultant, seuls les rapports positifs semblent les bienvenus : « Il est implicite que nos rapports doivent être positifs si nous voulons à l’avenir obtenir d’autres projets. »

      En 2018, la Cour des comptes européenne, institution indépendante, a émis des critiques sur l’EUTF : ses procédures de sélection de projets manquent de cohérence et de clarté. De même, une étude commanditée par le Parlement européen qualifie ses procédures d’« opaques ». « Le contrôle du Parlement est malheureusement très limité, ce qui constitue un problème majeur pour contraindre la Commission à rendre des comptes, regrette l’eurodéputée allemande Cornelia Ernst. Même pour une personne très au fait des politiques de l’UE, il est presque impossible de comprendre où va l’argent et à quoi il sert. »

      Le #fonds_d’urgence pour l’Afrique a notamment financé la création d’unités de police des frontières d’élite dans six pays d’Afrique de l’Ouest, et ce dans le but de lutter contre les groupes de djihadistes et les trafics en tous genres. Or ce projet, qui aurait permis de détourner au moins 12 millions d’euros, fait actuellement l’objet d’une enquête pour fraude.
      Aucune étude d’impact sur les droits humains

      En 2020, deux projets de modernisation des #registres_civils du Sénégal et de la Côte d’Ivoire ont suscité de vives inquiétudes des populations. Selon certaines sources, ces projets financés par l’EUTF auraient en effet eu pour objectif de créer des bases de #données_biométriques nationales. Les défenseurs des libertés redoutaient qu’on collecte et stocke les empreintes digitales et images faciales des citoyens des deux pays.

      Quand Ilia Siatitsa, de l’ONG britannique Privacy International, a demandé à la Commission européenne de lui fournir des documents sur ces projets, elle a découvert que celle-ci n’avait réalisé aucune étude d’impact sur les droits humains. En Europe, aucun pays ne possède de base de données comprenant autant d’informations biométriques.

      D’après un porte-parole de la Commission, jamais le fonds d’urgence n’a financé de registre biométrique, et ces deux projets consistent exclusivement à numériser des documents et prévenir les fraudes. Or la dimension biométrique des registres apparaît clairement dans les documents de l’EUTF qu’Ilia Siatitsa s’est procurés : il y est écrit noir sur blanc que le but est de créer « une base de données d’identification biométrique pour la population, connectée à un système d’état civil fiable ».

      Ilia Siatitsa en a déduit que le véritable objectif des deux projets était vraisemblablement de faciliter l’expulsion des migrants africains d’Europe. D’ailleurs, certains documents indiquent explicitement que la base de données ivoirienne doit servir à identifier et expulser les Ivoiriens qui résident illégalement sur le sol européen. L’un d’eux explique même que l’objectif du projet est de « faciliter l’identification des personnes qui sont véritablement de nationalité ivoirienne et l’organisation de leur retour ».

      Quand Cheikh Fall, militant sénégalais pour le droit à la vie privée, a appris l’existence de cette base de données, il s’est tourné vers la Commission de protection des données personnelles (CDP), qui, légalement, aurait dû donner son aval à un tel projet. Mais l’institution sénégalaise n’a été informée de l’existence du projet qu’après que le gouvernement l’a approuvé.

      En novembre 2021, Ilia Siatitsa a déposé une plainte auprès du médiateur de l’UE. En décembre 2022, après une enquête indépendante, le médiateur a rendu ses conclusions : la Commission n’a pas pris en considération l’impact sur la vie privée des populations africaines de ce projet et d’autres projets que finance l’UE dans le cadre de sa politique migratoire.

      Selon plusieurs sources avec lesquelles j’ai discuté, ainsi que la présentation interne du comité de direction du projet – que j’ai pu me procurer –, il apparaît que depuis, le projet a perdu sa composante biométrique. Cela dit, selon Ilia Siatitsa, cette affaire illustre bien le fait que l’UE effectue en Afrique des expériences sur des technologies interdites chez elle.

      https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/09/08/comment-l-europe-sous-traite-a-l-afrique-le-controle-des-migrations-3-4-il-e

  • #Rapatriement de migrants : le #Maroc et le #Sénégal se veulent exemplaires

    Ce mercredi 23 août, 325 Sénégalais renvoyés du Maroc rentrent dans leur pays d’origine. Alors que les réfugiés vivent de plus en plus de drames, Rabat et Dakar assurent que ce retour s’est opéré dans les meilleures conditions possibles.

    Après un périple d’une vingtaine d’heures en bus en provenance de Dakhla, dans le sud du Maroc, 325 migrants sénégalais arriveront à Rosso, ville du nord de leur pays d’origine, en ce matin du 23 août. Ces candidats au passage en Espagne ont été repêchés par la Marine royale marocaine au large des îles Canaries au début du mois d’août.

    Ce n’est pas la première opération de rapatriement de la saison. Le 27 juillet déjà, Annette Seck, ministre chargée des Sénégalais de l’extérieur, avait remercié le Maroc de lui avoir envoyé 400 de ses compatriotes et, le 10 août, 283 autres migrants avaient également fait le voyage. À chaque fois, ce retour n’a été possible qu’avec la #coopération des autorités locales. Le Sénégal n’est d’ailleurs pas le seul pays d’Afrique subsaharienne avec qui le Maroc collabore en la matière. En septembre et en octobre 2020, le #Mali et la #Guinée avaient participé à l’#identification de leurs ressortissants afin d’aider à leur rapatriement par voie aérienne.

    Depuis 2005, le royaume mène ce type de campagnes en coopération avec l’#Organisation_internationale_pour_les_migrations (#OIM). Différentes associations et ONG critiquent la manière dont procèdent les autorités marocaines, estimant qu’il s’agit d’#expulsions_arbitraires, qui ne respectent pas de cadre légal. En 2018 déjà, le ministre marocain des Affaires étrangères, Nasser Bourita, avait répondu à ces critiques : « Ce que vous appelez des “#éloignements” sont faits selon les normes. » Selon le gouvernement, la ligne est claire et constante : ces déplacements sont destinés à briser les circuits mafieux de #traite_d’êtres_humains cherchant à gagner l’Europe. « Les ambassades des pays africains sont impliquées dans le processus d’identification. »

    « #Cadre_légal »

    En 2018, des migrants déplacés d’une ville à l’autre car les « conditions de vie [y étaient] meilleures », selon les autorités locales, avaient fait l’objet de procédures de retour dans leur pays d’origine. Et ce, en lien avec les ambassades concernées et l’OIM. Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) estimait alors que ces déplacements respectaient le « cadre légal », selon son président, Driss El Yazami, qui avait précisé que le CNDH s’assurait que les personnes vulnérables étaient protégées.

    En réponse, l’Association marocaine des droits humains (AMDH) avait dénoncé des #déplacements_forcés. Dans son rapport publié le 3 août dernier, cette dernière n’a pas changé de position et continue à pointer du doigt les mouvements forcés des migrants de la région du nord « vers des zones reculées à l’intérieur ou dans le sud du Maroc, ou encore vers la frontière maroco-algérienne ».

    Contacté par Jeune Afrique, Babou Sène, consul général du Sénégal à Dakhla, s’est montré plus précis sur la manière dont les opérations de rapatriement se déroulent : « Il s’agit d’un dispositif bien huilé. Les migrants qui ont besoin de soins sont transportés à l’hôpital, et leur prise en charge est assurée par le Maroc, tandis que le Sénégal paye les médicaments, les analyses nécessaires, et prend en charge l’alimentation des malades. Les autres [déplacés] sont accueillis dans un centre d’accueil et d’hébergement, en attendant de rentrer au pays. »

    Au préalable, les consulats respectifs des pays d’origine procèdent à l’identification des migrants. « Une fois cette étape terminée, j’alerte nos ambassadeurs à Rabat et à Nouakchott afin qu’ils informent les autorités marocaines de la présence de tel nombre de Sénégalais, et de la nécessité de prendre des dispositions pour leur gestion ici et leur retour au pays. » Le rapatriement peut également se faire par transport terrestre, et dans ce cas, une autorisation de transit est délivrée par le gouvernement mauritanien. Le consulat délivre les #sauf-conduits à l’ensemble des Sénégalais. La partie marocaine s’occupe du volet « transport » en mettant à disposition des bus jusqu’à #Rosso ainsi que d’autres villes du Sénégal.

    La route des Canaries est privilégiée

    Le consul tient à préciser que « tous les Sénégalais concernés par les récentes opérations de rapatriement ont été repêchés et secourus par la Marine royale marocaine, après s’être échoués au large des côtes africaines ». En effet, la traversée de l’océan vers les îles Canaries – une voie dangereuse, avec des courants forts – se termine souvent à Dakhla ou Laâyoune pour les migrants subsahariens.

    Face aux situations de plus en plus critiques dans lesquelles se retrouvent les réfugiés optant pour la Tunisie ou la Libye, la route des Canaries semble être privilégiée. Mi-avril, le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, s’était félicité de la diminution du nombre de passages par les Canaries mais, fin juillet, Annette Seck a reconnu devant la presse sénégalaise la recrudescence du phénomène. « Selon les statistiques, en 2022, 404 compatriotes ont été rapatriés depuis Dakhla, avait-elle alors indiqué. Entre avril et juillet 2023, quinze pirogues ont été arraisonnées dans les eaux territoriales marocaines, avec 1535 personnes à leur bord, dont 1237 passagers d’origine sénégalaise. »

    Entre le 1er janvier 2021 et octobre 2022, 4 747 migrants parvenus dans le royaume sont rentrés dans leur pays d’origine via le programme de retour volontaire de l’OIM. En 2022, ils étaient 2 457, majoritairement ivoiriens, guinéens et sénégalais, selon l’organisation. Pour justifier leur décision, 61 % ont souligné qu’ils manquaient des ressources financières nécessaires pour rester au Maroc.

    https://www.jeuneafrique.com/1475165/politique/rapatriement-de-migrants-le-maroc-et-le-senegal-se-veulent-exemplaires

    #renvois #expulsions #IOM #migrations #asile #réfugiés

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  • L’OIM réclame un corridor humanitaire pour les migrants coincés au Niger - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/51227/loim-reclame-un-corridor-humanitaire-pour-les-migrants-coinces-au-nige

    Des tentes de fortune abritant des migrants sont vues à Assamaka, au Niger, le 29 mars 2023 (Image d’illustration). Crédit : Stanislas Poyet/AFP
    L’OIM réclame un corridor humanitaire pour les migrants coincés au Niger
    Par RFI Publié le : 21/08/2023
    C’est une conséquence des sanctions ouest-africaines contre le Niger. Avec la fermeture des frontières, les migrants, notamment maliens et guinéens, ne peuvent plus sortir de ce pays sahélien.Les centres d’accueil de l’Organisation internationale des migrations (OIM) sont débordés au Niger. Le pays sahélien aux six frontières est traditionnellement un pays de transit pour les migrations notamment professionnelles des citoyens d’Afrique de l’Ouest, mais ceux qui devaient repartir dans leur pays ont été bloqués par la fermeture brutale de ces frontières, au lendemain du coup d’État. Plus de 1 000 retours volontaires de migrants ouest-africains étaient en particulier prévus par l’OIM au cours des dix derniers jours, principalement vers la Guinée et le Mali. Ils n’ont pas pu se concrétiser.
    Désormais, l’organisation intergouvernementale s’inquiète à mesure que le nombre de personnes en transit qui ont besoin d’aide grandit sur le sol nigérien, alors que les ressources de l’OIM diminuent.Selon elle, plus de 1 800 personnes attendent aux portes de ses centres de transit. Ces centres sont au nombre de sept, dont trois à Niamey et quatre à Agadez, et ils hébergeaient déjà 5 000 migrants en attente de retour. C’est pourquoi l’OIM appelle à l’établissement rapide d’un corridor humanitaire pour qu’ils puissent rentrer chez eux.

    #Covid-19#migrant#migration#niger#frontiere#crise#OIM#niamey#agadez#guinee#mali#sahel#corridorhumanitaire#transit#postcovid

  • #Niger coup: increasing instability, forced displacement & irregular migration across the #Sahel

    Niger coup: increasing instability, forced displacement & irregular migration across the Sahel, amidst billions of EU Trust Fund for Stability investments.

    On July 26, a military coup took place in Niger, when the democratically elected president was deposed and the commander of the presidential guard declared himself the leader. A nationwide curfew was announced and borders were closed. The military junta justified its actions claiming it was in response to the continuing deterioration of the security situation. On August 10, the leaders of the coup declared a new government, naming 21 ministers, including several generals, but with civilian economist Ali Mahaman Lamine Zeine as the new prime minister.

    This was the latest in a series of seven military coups in West and Central Africa since 2020, including in neighbouring Mali and Burkina Faso. In Mali, a coup within a coup took place in May 2021, when the junta leader of the 2020 coup stripped the president and prime minister of their powers and declared himself president. Burkina Faso suffered two military coups in 2022; in September 2022, the head of an artillery unit of the armed forces ousted the previous junta leader who had led a coup in January 2022, and declared himself president of Burkina Faso.

    To add to further potential instability and escalation in the region, the military governments of Burkina Faso and Mali quickly warned – in response to remarks by ECOWAS – that any military intervention against last week’s coup leaders in Niger would be considered a “declaration of war” against their nations. The coup leaders ignored an August 6 deadline by ECOWAS to relinquish power and release the detained elected president. At the August 10 ECOWAS emergency summit in Abuja, West African heads of state repeated that all options remain on the table to restore constitutional order in Niger and ordered the activation of its standby force.
    Niger, Mali, Burkina Faso: military coups in the three major recipients of the EU Trust Fund for Stability and addressing the root causes of irregular migration and displaced persons in the Sahel

    Interestingly, Niger, Mali and Burkina Faso have been prime target countries in the European Union’s efforts to increase stability in the region and address the root causes of irregular migration and displacement.

    In 2015, the European Union established the “EU Emergency Trust Fund for stability and addressing root causes of irregular migration and displaced persons in Africa”. Of a total fund of 5 billion EUR, the Sahel and Lake Chad is the biggest funding window, with 2.2 billion EUR committed between the start of the programme and the end of December 2022, across 214 projects.

    The three biggest recipient countries in the Sahel and Lake Chad region are indeed Niger (294 million), Mali (288 million) and Burkina Faso (190 million), in addition to 600 million for regional projects. Among the four various strategic objectives, overall the largest share of the budget (34%) went to security and governance activities (the other strategic priorities are economic opportunities, strengthening resilience and improved migration management). The security and governance objective has been the main priority in Mali (49% of all EUTF funding), Niger (42%) and Burkina Faso (69%) (as well as in Nigeria and Mauritania).

    However, the most recent EUTF monitoring report on the Sahel window offers a sobering read on the state of stability and security in these three countries. In summary:

    “In Burkina Faso, 2022 was marked by political instability and deepening insecurity. Burkina Faso has suffered from attacks from armed groups. The conflict has sparked an unprecedented humanitarian crisis. Burkina Faso is facing the worst food crisis in a decade”.

    In Mali, “the political process remains at risk considering the country’s worsening security situation and strained diplomatic relations. In an increasingly insecure environment, 8.8 million people were in need of humanitarian assistance in January 2023. In 2022, 1,378 events of violence were reported, causing 4,862 fatalities, a 31% and 155% increase, respectively, compared to 2021”.

    In Niger, it was estimated the country would “face an unprecedented food crisis during the 2022 lean season, resulting from conflict, drought, and high food prices. The humanitarian crisis is strongly driven by insecurity. The number of internal displacements and refugees in Niger kept rising.” These conclusions on Niger date from before the July 2023 coup.

    The report also concluded that 2022 was the “most violent and deadliest year on record for the countries of the Sahel and Lake Chad window, driven by the profound and continuing security crises in Nigeria, Mali, and Burkina Faso. Fatalities recorded in the ACLED database in Mali (4,867) and Burkina Faso (4,266) were the highest ever recorded, more than doubling (144% and 119%, respectively) compared to the average for 2020-2021.” Meanwhile, UNICEF reported 11,100 schools are closed due to conflict or threats made against teachers and students. The number of attacks on schools in West and Central Africa more than doubled between 2019 and 2020.

    In other words: despite billions of funding towards stability and addressing the root causes of irregular migration and displacement, we are seeing increasing instability, conditions in these countries actually driving more displacement and no lasting drop in irregular migration.
    Increasing forced displacement and irregular migration

    Indeed, as of July 2023, UNHCR reports a total of almost 3.2 million Internally Displaced Persons (IDPs) in the Sahel, compared to just under 50,000 when the EUTF was established in 2015. Similarly, UNHCR reports almost 1.5 million refugees and asylum seekers in the Sahel, compared to over 200,000 when the EUTF was established in 2015.

    Irregular migration across the Mediterranean between North Africa and Europe is also on the rise again. According to ISPI, the latest surge in irregular arrivals that Italy is experiencing (136,000 migrants disembarked in Italy in the twelve-month period between June 2022 and May 2023) is almost comparable, in magnitude, to the period of high arrivals in 2014-2017, when on average 155,000 migrants landed each year, which was one of the major drivers for establishing the EUTF. Between 2014 and 2017 close to 80% of all irregular arrivals along the Central Mediterranean route were citizens from sub-Saharan Africa. While figures for 2020-2022 show that the share of arrivals from sub-Saharan Africa fell – suggesting that the efforts to reduce migration may have had an impact – the trend has now reversed again. In the first five months of 2023, sub-Saharan Africans make up more than half of all arrivals again.
    Instability, displacement and irregular migration: because, despite, or regardless of billions of investments in stability and addressing root causes?

    Of course, despite all of the above, we cannot simply conclude the EUTF actually contributed to instability, more displacement and more irregular migration. We cannot even conclude that it failed to have much positive effect, as it not possible to establish causality and we do not have a counterfactual. Perhaps the situation in the Sahel would have been even worse without these massive investments. Surely, the billions of euros the EUTF spend on the Sahel have contributed to successful projects with a positive impact on people’s lives. However, we can conclude that despite these massive investments, the region is more unstable and insecure and faces much more forced displacement than when the EUTF investments started.

    As outlined in an earlier Op-Ed in 2020, the ‘root causes’ approach to migration is both dishonest and ineffective. One of the warnings referred to in that Op-Ed came from a 2019 report by the UK Foreign Affairs Committee concluding that the “EU’s migration work in the Sahel and Sub-Saharan Africa risks exacerbating existing security problems, fuelling human rights abuses, and endorsing authoritarian regimes. Preventing local populations from crossing borders may help cut the numbers arriving in Europe in the short term, but in the long term it risks damaging economies and creating instability—which in itself can trigger displacement”. This warning seems to be more valid then ever when looking at the current situation across the Sahel.

    In response to the latest coup in Niger, the EU announced immediate cessation of budget support and indefinite suspension of all cooperation actions in the domain of security. Similarly, France suspended all development aid and budget support with immediate effect. However, Niger has been a prime partner of the EU in fighting the jihadist insurgency in the Sahel and in curbing irregular migration to Europe. Niger’s new military leaders – when looking at the EU’s dealings with third countries to address irregular migration, most recently with Tunisia and Egypt, as well as earlier deals with Morocco and Turkey – are aware of the importance of migration cooperation with third countries for the EU. As such, they may use these issues as leverage in negotiations and to force acceptance of the new regime. It remains to be seen to what extent – and for how long – the EU will be able to maintain its current stance, and resist the pressure to engage with the new regime and resume cooperation, given the political importance that the EU and its member states accord to stemming irregular migration.
    Changing course, or not?

    The bigger question remains: it is becoming increasingly clear the current approach of addressing so-called root causes and trying to create stability to reduce migration and forced displacement is not really working. Now that we have seen military coups in all three major recipient countries of EUTF funding in the Sahel, will there be a significant change in the EU’s external migration policy approach in Africa and the Sahel going forward? Or will the current approach prevail, doing the same thing over and over again and expecting different results? What is ultimately needed is a more humane, rational, coherent and comprehensive approach to migration governance, which not only takes into account all aspects of migration (including visa policies, returns, labour migration, etc.), but goes beyond migration and migration-related objectives, and takes into account other policy areas, including trade, agriculture, arms and commodities exports, peace building and conflict resolution. When we are discussing the root causes of migration, we need honest debate and actions that include the real and very serious causes of migration and displacement.

    https://mixedmigration.org/articles/niger-coup-instability-displacement-migration

    #coup_d'Etat #migrations #politiques_migratoires #instabilité_politique #externalisation #EU_Emergency_Trust_Fund #Trust_Fund #Mali #Burkina_Faso #causes_profondes #root_causes #EUTF #insécurité #déplacés_internes #sécheresse

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