• Adama : République, pas Beaumont-sur-Oise cette année | AFP | 08.07.23

    https://www.mediapart.fr/journal/fil-dactualites/080723/marches-de-deuil-et-colere-contre-les-violences-policieres-samedi-en-franc

    Sept ans après la mort d’Adama Traoré, jeune homme noir décédé peu après son interpellation par des gendarmes en juillet 2016, une marche commémorative était prévue samedi après-midi à Persan et Beaumont-sur-Oise, au nord de Paris. Mais le préfet du Val-d’Oise l’a interdite jeudi et sa décision a été confirmée vendredi soir par la justice administrative, saisie en urgence par la soeur aînée d’Adama, Assa Traoré.

    Les juges des référés ont motivé leur décision par « le contexte des émeutes qui ont suivi le décès de Nahel », 17 ans, tué par un policier lors d’un contrôle routier le 27 juin à Nanterre, dans la banlieue ouest de Paris. Ces derniers « ont estimé que, bien que les violences aient diminué ces derniers jours, leur caractère extrêmement récent ne permet de présumer que tout risque de trouble à l’ordre public ait disparu », a fait valoir le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

    La préfecture a demandé « aux organisateurs de bien vouloir respecter cette décision de justice et d’appeler publiquement à ne pas se rendre sur les lieux ». Dans un message vidéo diffusé sur Twitter, Assa Traoré a confirmé qu’« il n’y aura pas de marche (samedi) à Beaumont-sur-Oise ».

    [Et d’ajouter :] « Le gouvernement a décidé de mettre de l’huile sur le feu » et « de ne pas respecter la mort de mon petit frère », a-t-elle accusé, évoquant « un manque de respect total » et qualifiant de « prétexte » l’argument brandi par le préfet d’une pénurie de forces de l’ordre pour sécuriser le cortège.

    Assa Traoré a indiqué qu’elle serait présente « samedi à 15h00 place de la République » pour crier « au monde entier que nos morts ont le droit d’exister, même dans la mort ». Elle n’a toutefois pas directement appelé ses soutiens à la rejoindre, ce qui aurait pu être assimilé à l’organisation d’une manifestation sauvage [ciel !].

  • @Youbrak
    https://twitter.com/Youbrak/status/1676902437599191041

    Une provocation inadmissible !
    La préfecture souhaite interdire la marche Adama VII ! Ils prennent cette décision suite à la publication de l’appel unitaire des forces de gauche. C’est une décision politique pour empêcher la solidarité avec les habitants des quartiers populaires !

    @Prefet95
    https://twitter.com/Prefet95/status/1676893637446172672

    Compte tenu des violences survenues les jours passés et face au risque de débordements et de troubles à l’ordre public que l’évènement peut susciter, #préfet95 a informé le comité « Vérité pour Adama » qu’il envisage d’interdire la marche, le rassemblement et le concert prévus le samedi 8 juillet 2023 à Persan et à Beaumont.

    #manifestation #interdiction

  • À visage dévoilé – Le combat de #Masih_Alinejad

    Portrait de la journaliste et militante féministe Masih Alinejad, devenue célèbre pour avoir lancé le mouvement de protestation contre le port du hijab obligatoire en Iran. Chevelure flamboyante et verbe haut, la journaliste et militante féministe Masih Alinejad, aujourd’hui exilée à New York, lutte depuis l’adolescence contre le port du hijab obligatoire en Iran. En lançant le mouvement « My Stealthy Freedom » (« ma liberté furtive »), puis la campagne « sur les réseaux sociaux, elle a appelé les femmes de son pays à poster des photos d’elles dévoilées, et remporté un grand succès. Mais son combat ne s’arrête pas à la seule cause féministe. En novembre 2009, lors de la répression du mouvement de protestation à Téhéran, les opposants au régime trouvaient le moyen, malgré la suspension d’Internet, de lui faire parvenir des photos et des témoignages sur les violences commises par les forces de l’ordre. Dénonçant sans relâche le non-respect des droits de l’homme en Iran, malgré les menaces qu’elle subit et les représailles à l’encontre de sa famille, dont trois membres ont été arrêtés en 2019, la dissidente poursuit inlassablement sa lutte en faveur des libertés : « J’ai choisi d’être la voix de tous ceux qui ne peuvent s’exprimer », martèle-t-elle. Après plusieurs documentaires sur la corruption des dirigeants de la République islamique, Nahid Persson Sarvestani, réalisatrice iranienne aujourd’hui installée en Suède, a voulu rencontrer Masih Alinejad aux États-Unis. De ses premières révoltes à ses investigations, de ses victoires à ses colères, ce film en forme d’hommage retrace le parcours de cette combattante courageuse à l’énergie inaltérable.

    https://www.les-docus.com/a-visage-devoile-le-combat-de-masih-alinejad

    #Iran #révolution #voile #résistance #répression #manifestations

  • Soulèvements de la Terre : nouvelle vague de convocations devant la justice

    https://reporterre.net/Soulevements-de-la-Terre-nouvelle-vague-de-convocations-devant-la-justic

    Après la dissolution des Soulèvements de la Terre, au moins huit personnes ont été convoquées par la justice. Des rassemblements de soutien sont prévus partout en France le 28 juin.

    Cette nouvelle semaine s’annonce encore tendue pour le mouvement écologiste.
    Après la vague d’arrestations du 20 juin et la dissolution des Soulèvements de la Terre le 21 juin, au moins huit personnes sont convoquées par la justice pour avoir organisé à Sainte-Soline (Deux-Sèvres) une manifestation interdite (certains pour une action d’octobre 2022, d’autres pour celle de mars dernier) ou appelé à y participer.

    Parmi elles, trois participants aux Soulèvements de la Terre, ainsi que le secrétaire général de la CGT des Deux-Sèvres, le secrétaire général de Solidaires 79, le porte-parole de la Confédération paysanne 79, l’ancien porte-parole de la Confédération paysanne, Nicolas Girod, et le porte-parole du collectif Bassines non merci, Julien Le Guet. Elles sont attendues simultanément dans différentes gendarmeries le mercredi 28 juin. Certaines sont déjà averties qu’elles seront mises en garde à vue, quand d’autres doivent être entendues en simple audition libre.

  • La mairie de Gruson continue à nettoyer les tags anti-Darmanin Marie Vandekerkhove - la noix du nord

    Le 6 mai, jour même de son inauguration, le nouvel hôtel de ville avait été la cible de vandalisme, avec des graffitis insultants pour le ministre de l’Intérieur qui s’était déplacé pour la cérémonie. Les auteurs courent toujours. Et la mairie de frotter…

    « L’enquête est en cours », assure-t-on du côté de la compagnie de gendarmerie de Douai, qui gère la commune de Gruson. Mais les investigations n’ont toujours pas permis d’identifier les cinq auteurs encagoulés qui, le 6 mai à l’aube, ont souillé les tout nouveaux bâtiments de la mairie. Selon des sources bien informées, les vandales avaient bien préparé leur coup. Ils ont réussi à rendre leur véhicule invisible des caméras de vidéosurveillance, n’ont pas laissé d’empreintes sur l’extincteur retrouvé à proximité. L’appareil, qu’ils avaient rempli d’huile de vidange, leur avait apparemment servi à asperger la façade de la mairie.

    Sur ce côté-là, il faut vraiment prêter l’œil pour trouver trace de souillure. « Nous avons fait nettoyer par des professionnels. Et nous allons bientôt faire refaire les soubassements et la peinture », prévoit Olivier Turpin. Alors qu’il n’est pas carté, le maire de Gruson s’est retrouvé bien malgré lui au centre d’une polémique : c’est sa commune et l’inauguration de sa nouvelle mairie, à laquelle avait prévu de participer Gérald Darmanin, qui avait été désignée par un collectif cible d’une « casserolade » contre la réforme des retraites. Le nombre d’opposants et d’agitateurs prévu a sans doute fait paniquer la République qui s’était fendue d’un communiqué sur la non-venue du ministre de l’Intérieur. Celui qui est aussi élu à Tourcoing était finalement présent.

    Des insultes réapparues
    Quand, au petit matin du 6 mai, les élus ont découvert les tags contre Gérald Darmanin, ils ont immédiatement lavé les briques à l’eau chaude. Les insultes étaient largement estompées. « Or elles sont réapparues », se désole Olivier Turpin qui a bien tenté de les effacer à nouveau. « Mais le nettoyeur à haute pression qu’on a utilisé fend les briques donc on doit y renoncer et trouver un produit qui convienne », explique-t-il. Les travaux de la nouvelle mairie, qui avaient pris du retard, se sont achevés juste avant l’inauguration. Trop tôt pour donner le temps aux entreprises d’imperméabiliser le mur… La facture pour le nettoyage s’élève déjà à 7 000 €.

    #casserolades #casseroles #casserolade #révoltes #france #macron #foutriquet #histoire #reformedesretraites #casseroladegenerale #gérald_darmanin #manifestation #peinture

    Source : https://www.lavoixdunord.fr/1343363/article/2023-06-21/la-mairie-de-gruson-continue-nettoyer-les-tags-anti-darmanin

    La suite de https://seenthis.net/recherche?recherche=gruson

  • Renseignements : la commission de contrôle s’alarme de la hausse des demandes concernant l’activisme politique
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/06/15/renseignements-la-commission-de-controle-s-alarme-de-la-hausse-des-demandes-

    (...) la CNCTR veille sur les faits et gestes des services secrets français. Dès qu’ils utilisent une technique pour collecter des informations – écoutes, géolocalisation, données informatiques, captation d’image et de son, etc. –, ils doivent solliciter l’avis consultatif de la CNCTR.

    [...]

    La CNCTR reproche aux services d’avoir souvent confondu l’entrave d’actions violentes avec la surveillance d’une activité militante. La prévention des violences collectives « ne doit pas être interprétée, estime la Commission, comme permettant la pénétration d’un milieu politique ou syndical, ou la limitation du droit constitutionnel de manifester ses opinions, y compris extrêmes, tant que le risque d’atteinte grave à la paix publique n’est pas avéré ». Les services, de leur côté, affirment avoir été confrontés à une diversification de la menace.
    La vigilance de la CNCTR sur l’action de l’Etat face aux « violences collectives » ne donne que plus de poids à son appel à repenser, par ailleurs, l’architecture même du contrôle dont elle est garante sur l’activité des services de renseignement. Le législateur a donné des pouvoirs à la CNCTR à une époque où le cœur de la surveillance technique passait par les écoutes téléphoniques, appelées dans le jargon, les « interceptions de sécurité ». Or, aujourd’hui, dit-elle, elles sont devenues le parent pauvre de la collecte du renseignement.
    Messageries cryptées
    Désormais, les échanges transitent par des messageries cryptées, ce qui a conduit les services à contourner l’obstacle en collectant les données informatiques ou en implantant des dispositifs de captation du son et d’image qui ont augmenté de 55 % en 2022. Or, à la différence « des écoutes », rappelle la CNCTR, ces dernières techniques ne sont soumises à aucun quota, ne sont pas centralisées, sont gérées par les services demandeurs qui sont juge et partie, comme la Direction générale de la sécurité intérieure et la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et ne sont pas accessibles à distance pour la CNCTR.

    https://justpaste.it/cspk6

    #renseignement #surveillance #activisme #militantisme #manifestation #occupation #blocage

  • Des militants européens venus manifester en France se retrouvent bannis du territoire

    Cinq #antifascistes italiens ont été arrêtés mardi 6 juin. Ils avaient participé à la manifestation en hommage à Clément Méric et risquent l’expulsion. Avant eux, un Suisse, une Allemande et un Belge ont subi le même sort, avant d’être placés en rétention et renvoyés dans leur pays.

    DepuisDepuis plusieurs mois, le ministère de l’intérieur multiplie les obligations de quitter le territoire français (OQTF) et les interdictions administratives du territoire (IAT) à l’égard de militantes et militants européens venus manifester en France, au prétexte qu’ils représentent une « menace réelle » pour le pays.

    Chaque fois, le procédé est le même : les personnes sont interpellées avant, pendant ou après une manifestation organisée sur le sol français, placées en centre de rétention administrative (CRA) puis expulsées lorsque le juge des libertés et de la détention ou le tribunal administratif ne décide pas de leur libération.

    Les militant·es ont alors interdiction de revenir en France, même lorsqu’ils y ont des attaches ou des liens familiaux. Pour les manifestant·es concerné·es comme pour les acteurs associatifs, ces pratiques du ministère s’apparentent à une nouvelle façon de mater les mobilisations dans le cadre de luttes politiques, sociales ou écologistes, à l’heure où l’« ultragauche », l’« écoterrorisme » et le « terrorisme intellectuel de l’extrême gauche » sont largement pointés du doigt par Gérald Darmanin.

    « Les services de renseignement anticipent la participation à la journée nationale d’action de mardi de membres de l’ultragauche venus de l’étranger », avait ainsi annoncé le ministre de l’intérieur dans un tweet le 4 juin, se targuant d’avoir déjà pris dix-sept interdictions administratives du territoire pour « empêcher ces individus de rejoindre les cortèges et le cas échéant de faciliter leur interpellation ».

    Interrogé sur les cas spécifiques que nous documentons dans cet article, le ministère de l’intérieur ne nous a pas répondu.

    Parmi eux, plusieurs ressortissantes et ressortissants italiens venus participer à la manifestation en hommage à Clément Méric, le week-end dernier à Paris, ont été interpellés mardi 6 juin au soir dans une pharmacie d’Aubervilliers. Cinq de ces militant·es antifascistes ont été embarqué·es au commissariat, et deux ont été depuis libérés. Les trois autres, deux femmes et un homme, ont été placé·es aux CRA de Vincennes (Val-de-Marne) et du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne) avec l’objectif de les expulser vers l’Italie.

    Mais leur audience devant le juge des libertés et de la détention jeudi 8 juin est venue contrarier la décision du ministère de l’intérieur et permettre leur sortie du CRA ; le juge estimant que la mesure, qui ne correspond pas à une mesure d’éloignement classique et reste limitée dans le temps, « visait à les évincer de la tenue d’une manifestation » et qu’il y avait eu là « un détournement des conditions ouvrant au placement en rétention administrative ».

    Selon nos informations, tous les trois font ainsi l’objet d’une interdiction administrative du territoire. Mais, fait surprenant, il s’agit d’une IAT temporaire, prise le 2 juin et allant jusqu’au 11 juin, ce qui est peu courant. La mesure, qui permet d’empêcher un étranger d’entrer en France lorsque sa présence constitue un danger grave comme des activités terroristes, peut concerner tous les étrangers, y compris les Européens. La personne concernée ne peut demander son retrait qu’au bout d’un an. Le ministère de l’intérieur doit réexaminer les motifs de l’IAT tous les cinq ans et peut l’abroger à tout moment.

    « Le ministère de l’intérieur tente sans avoir besoin de se justifier et voit ce qu’il se passe ensuite. On dépose des recours, mais les délais en justice sont longs », estime Me Camille Vannier, avocate particulièrement engagée sur ce type de dossiers. Des recours visant à contester l’IAT de ces militantes et militants antifascistes italiens devraient être déposés dans les jours qui viennent devant la justice. « Cela remet encore plus en question le droit de manifester en France et de circuler au sein de l’Union européenne », ont dénoncé leurs soutiens dans un communiqué.

    C’est aussi le cas de Lou*, 24 ans, originaire de Suisse et venu le 23 mars en France en vue de participer à des conférences sur l’accès à l’eau et « éventuellement » à la manifestation contre la mégabassine à Sainte-Soline le 25 mars. Il a été interpellé à Melle (Deux-Sèvres), la veille de la manifestation, lors d’un contrôle du véhicule qui le transportait, suivi d’un contrôle d’identité qui a tout fait basculer. « Les policiers ont dit qu’il y avait un souci avec moi. Ils m’ont dit : “Vous, vous vous écartez, vous savez pourquoi.” »

    Le jeune homme affirme ne pas savoir ce qui lui est reproché à ce moment-là. Les gendarmes finissent par lui expliquer qu’il est « interdit de territoire » en France. Lou tombe alors des nues et se voit contraint de les suivre au commissariat. « Au départ, raconte-t-il, je pensais que je sortirais dans la soirée. » Ses amis, qui n’ont pas été ennuyés après le contrôle d’identité, décident de l’attendre. Il passe finalement la nuit en cellule, après un échange avec une agente de police judiciaire qu’il juge « extrêmement cassante », dans le cadre d’une retenue administrative.

    « Dès le départ, quand je suis entré dans son bureau, j’ai été traité comme un ennemi et une personne dangereuse. Elle ne m’a pas laissé appeler mes proches. J’ai pu appeler une avocate mais elle a précisé que si elle ne répondait pas, je n’en aurais pas. » Le jeune homme, qui envisageait de participer à la manifestation de Sainte-Soline, avait pris soin de mémoriser le numéro de téléphone d’une avocate spécialisée – comme beaucoup de manifestant·es aujourd’hui. « Heureusement, elle a répondu alors qu’il était tard le soir. Elle était là le lendemain matin. »

    Il découvre qu’il fait l’objet d’un arrêté ministériel portant interdiction administrative du territoire « en raison de son comportement personnel », qui lui est alors notifié en présence de l’avocate. Sur le document que nous avons pu consulter, daté du 23 mars – soit le jour de son entrée en France et deux jours avant la manifestation de Sainte-Soline –, il est indiqué qu’il « constituerait une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société » et « qu’il y a urgence à [l’]éloigner du territoire français » vers la Suisse. Puis, plus loin : « Le suivi dont il a fait l’objet à ce titre a mis en évidence la gravité de la menace sur l’ordre et la sécurité publics qu’il représente. »
    « Le CRA et les joyeuses procédures qui vont avec »

    Lou raconte son transfert ultra-sécurisé jusqu’au CRA de Bordeaux le samedi soir, menotté durant tout le trajet, « à 160 km/heure sur l’autoroute » et avec un changement de véhicule sur un parking, de nuit, comme s’il était « au milieu d’un trafic de drogue ou pire encore ». « Ensuite, j’ai eu la chance de découvrir le CRA et les joyeuses procédures qui vont avec », ironise-t-il.

    Il y passe trois nuits avant de découvrir le mardi, lors de son passage devant la juge des libertés et de la détention (qui refuse de le libérer), qu’il est également fiché S. Sa quatrième nuit au CRA sera la dernière : il est renvoyé en Suisse mercredi 29 mars par avion.

    À ce jour, Lou ne comprend toujours pas pourquoi il fait l’objet de cette interdiction administrative d’entrée et de séjour en France. Il affirme n’avoir « jamais eu affaire à la police » sur le sol français. Celui qui se décrit comme un militant écologiste explique avoir commencé à participer à des actions de désobéissance civile en 2019 uniquement en Suisse, notamment avec Extinction Rebellion. Il dit avoir relayé, sur les réseaux sociaux, des appels à manifester à Sainte-Soline, mais aussi, depuis environ deux ans, des informations sur les violences policières.

    Le jeune homme a fait l’objet d’une condamnation en 2021, pour opposition aux actes de l’autorité et insoumission à une décision de l’autorité, après avoir bloqué une place publique dans le cadre d’une action et avoir refusé d’évacuer les lieux lorsque les forces de l’ordre le lui ont demandé, en septembre 2020. Des faits qui lui ont valu une amende et devraient être effacés de son casier le 15 juin prochain. « Des choses pas très graves », balaie-t-il, précisant que l’action était « pacifique ».

    Me Vannier, l’avocate de Lou, pointe une « chasse aux militants » et aux manifestants, de manière « totalement aveugle ». « Son cas en est emblématique. Il n’y a aucun détail, aucune motivation derrière cette interdiction de territoire, ce qui est très inquiétant. C’est un laboratoire de répression qui est réutilisé pour d’autres. » Le cas de son client serait le premier d’une longue série à venir, craint-elle.

    « C’est déjà en train de s’étendre, constate Paul Chiron, chargé du soutien et des actions juridiques à La Cimade, association de défense des droits des étrangers. On était surpris pour le Suisse et on retrouve le même schéma pour les Italiens. C’est un détournement du droit des étrangers et de la lutte antiterroriste. »

    Dans un registre très similaire, deux autres militant·es, un Belge et une Allemande, Julia*, ont aussi fait l’objet d’une interpellation dans le cadre d’une manifestation organisée en France et ont été placé·es en CRA en vue de leur éloignement vers leur pays d’origine, en mars et mai derniers. Bien qu’ils ne soient pas visés par une IAT, ils ont aussi eu l’interdiction de circuler sur le territoire français – depuis annulée par la justice dans le cas de Julia.

    Vivant entre la France et l’Allemagne depuis son enfance, Julia a pour coutume de manifester, où qu’elle se trouve, pour la journée internationale des travailleurs et des travailleuses. Ce 1er mai, elle est à Paris en vacances et participe avec des ami·es au rassemblement qui prend la direction de la place de la Nation.

    D’après son récit, il est 16 heures lorsqu’elle est interpellée après une charge policière : « Au moment où les CRS foncent vers nous, tout le monde commence à fuir. Je trébuche et me fais matraquer au sol, avant de me faire menotter, retrace-t-elle. J’ai eu l’impression que c’était complètement arbitraire, ça aurait pu être moi comme la personne à côté. » Elle est interpellée en possession d’une bombe de peinture, de pétards et d’une paire de lunettes de piscine, et n’est pas connue des services de police.

    Elle est ensuite embarquée dans un fourgon qui doit la conduire au commissariat. Dans le véhicule, elle affirme avoir assisté à une scène cocasse, où un fonctionnaire de police s’agace en découvrant que la fiche d’interpellation est incomplète. « Ceux qui m’ont interpellée n’avaient pas coché les faits qui m’étaient reprochés, raconte Julia. Les policiers débattent dans la voiture pour décider quelle case cocher : “On ne va pas noter port d’armes ?”, interroge celui qui tient la fiche d’interpellation. “Par contre, on lui met jet de projectiles”. » Des faits qui apparaissent sur sa fiche d’interpellation que nous avons pu consulter, mais pour lesquels elle n’est finalement pas poursuivie.
    Refus de signer pour un avertissement pénal

    Au commissariat, elle est immédiatement placée en garde à vue et passe la nuit dans une cellule « immonde », jonchée de déchets, et équipée d’un petit matelas et d’un seul plaid, qu’elle doit partager avec une autre gardée à vue. Le lendemain, Julia est conduite au tribunal de Paris et passe de longues minutes enfermée sans être fixée sur son sort.

    Elle est finalement présentée à un substitut du procureur qui lui propose de signer un avertissement pénal probatoire (APP), une procédure qui vaut reconnaissance de culpabilité, mais permet d’échapper aux poursuites.

    Il lui est reproché les infractions suivantes : « rébellion », « participation à un groupement en vue de commettre des actes de violence et de dégradation », « dissimulation volontaire du visage » et « outrage » envers un agent de police pour avoir craché à ses pieds. Elle indique seulement avoir voulu expulser les fumées de gaz lacrymogène inspirées pendant son interpellation.

    Julia refuse de signer l’APP, car elle ne s’estime coupable de rien. « Le substitut du procureur était pressé et contrarié, mais il finit par m’indiquer que je vais pouvoir sortir libre », se remémore-t-elle. Au bout de trente minutes d’une interminable attente, enfermée dans un box vitré, elle s’étonne de n’avoir toujours pas été libérée. On l’informe alors qu’elle est désormais visée par une OQTF et qu’elle va être transférée vers le CRA du Mesnil-Amelot. « J’étais complètement choquée et abasourdie », se souvient-elle.

    Sur le document que nous avons pu consulter, daté du 2 mai, le lendemain de l’interpellation, il est indiqué, comme pour Lou, que Julia « constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société » et « qu’il y a urgence à l’éloigner du territoire français » sans « lui accorder aucun délai de départ volontaire ». Elle est par ailleurs visée par une interdiction de circuler en France (ICTF) pendant trois ans.

    La préfecture de police de Paris justifie le placement en CRA par le risque que Julia se soustraie à son obligation de quitter le territoire, alors même qu’elle dispose d’un billet retour pour l’Allemagne, d’un logement fixe à Berlin et d’un travail stable outre-Rhin.
    1 500 euros de dédommagement pour une semaine en CRA

    Elle retient de son séjour d’une semaine en CRA une leçon de vie sur « la formidable solidarité entre femmes, qui se serraient les coudes dans la précarité » et « l’absurdité de la menace à la sécurité publique construite autour d’elles, alors qu’elles sont mères de famille, travaillent et essayent simplement de s’en sortir ». Au cours de sa semaine d’enfermement, elle est présentée à deux reprises à un juge qui confirme son maintien en rétention.

    Le 9 mai, elle quitte, menottes au poignet, le CRA du Mesnil-Amelot et se voit conduite au tribunal administratif de Melun pour une audience. Son avocate, Me Vannier, conteste devant le juge l’OQTF dont elle fait l’objet et demande l’annulation de son interdiction de circuler en France. Le tribunal satisfait entièrement à ces demandes et oblige l’État à verser à Julia 1 500 euros pour ses frais d’avocat.

    « 1 500 euros pour une semaine en CRA, je n’appelle pas ça un dédommagement », fustige Julia. Au cours de l’audience, le juge administratif inflige un camouflet au ministère public en concluant que la menace à l’ordre public n’était pas fondée.

    L’épilogue de cette semaine cauchemardesque ne rassure pas pour autant Julia, qui réfléchira désormais « à deux fois avant d’aller manifester en France ». Celle qui avait déjà participé à des rassemblements à Marseille pour le droit au logement assure toutefois qu’elle ne se laissera pas impressionner par ces décisions administratives, « qui sont faites pour intimider ». « Je continuerai à manifester avec mes amies en France », déclare-t-elle.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/090623/des-militants-europeens-venus-manifester-en-france-se-retrouvent-bannis-du

    #arrestation #manifestation #France #OQTF #IAT #interdiction_de_territoire #CRA #rétention #détention_administrative #expulsion #antifa #ultragauche #Clément_Méric #droit_de_manifester #menace #Extinction_Rebellion #chasse_aux_militants #répression

  • VAGUE D’ARRESTATIONS À RENNES : QUAND LA FLICAILLE SORT LE CHALUTIER CONTRE LE MOUVEMENT SOCIAL - DEFENSE COLLECTIVE
    https://defensecollective.noblogs.org/post/2023/05/31/vague-darrestations-a-rennes-quand-la-flicaille-sort-le-c

    Ce mardi dès 6h du matin, la police rennaise a procédé à la perquisition de plusieurs appartements de camarades à Rennes. À notre connaissance 5 d’entre eux sont actuellement toujours en garde-à-vue . Nous n’avons pas connaissance des faits exacts qui leurs sont reprochés, nous savons toutefois que les enquêtes concernent plusieurs manifestations s’étalant de février à avril 2023, lors du mouvement social contre la réforme des retraites. Elles comprennent dans leurs motifs une association de malfaiteurs à caractère criminel , information confirmée par nos avocats mobilisés sur ces garde-à-vues.

     
    À Rennes, ce n’est pas la première fois que le mouvement social est confronté à une tentative de criminalisation de cette envergure : en 2016, lors du mouvement contre la Loi Travail, 20 personnes qui participent à une action « métro gratuit » sont visées par une instruction criminelle et inculpées pour « association de malfaiteurs » . Très vite, la solidarité se diffuse au sein du mouvement social : personne ne se rend aux convocations, l’instruction se fissure. Après des années de procédure, l’affaire des « 20 du métro » finit en queue de poisson pour nos enquêteurs adeptes du coup de filet : les camarades s’en sortirons finalement avec de simples amendes contraventionnelles . Nous avons écrit plusieurs textes sur cette affaire, disponibles sur notre blog : https://defensecollective.noblogs.org/post/2021/04/02/comment-la-justice-rennaise-veut-qualifier-des-assemblees et https://defensecollective.noblogs.org/les-proces/affaire-des-20-du-metro-2016

    Dans ce mouvement des retraites, particulièrement combatif à Rennes, la solidarité au sein des cortèges et la diffusion de pratiques de défense collective ont été des atouts majeurs face à la répression : nous avons vu de très nombreuses arrestations finir sans suites, des camarades sortir par dizaines du commissariat sans avoir décliné leur identité, et même des affaires pourtant très médiatisées se terminer en relaxe pour les camarades. La honte pour nos pêcheurs du dimanche du comico de Rennes.

    Pressurisés par la préfecture, la maire, et la presse qui dramatisent depuis le début du mouvement la moindre action contestataire, les flics n’ont plus comme seule solution pour apaiser les bourgeois que de monter de toutes pièces une enquête criminelle. Enquête qui leur permet de mobiliser plus de moyens répressifs qu’à l’habitude, quitte à ce qu’elle soit déqualifiée en raison d’un manque d’éléments tangibles par la suite. 

    L’effet voulu est double : satisfaire la bourgeoisie rennaise effrayée, et paralyser par la peur les camarades du mouvement social. De notre côté n’oublions pas que la qualité parfois misérable de leur travail nous a déjà offert de nombreuses opportunités de relaxe devant les tribunaux.

    Là où une GAV classique ne peut dépasser les 48h (qui sont déjà 48h de trop), une des particularité des enquêtes criminelles est de pouvoir prolonger cette durée jusqu’à 72h, puis 96h. Passées ces 48h une prolongation confirmera qu’il s’agit d’une instruction criminelle.

    Il est possible que dans le cadre de ces affaires d’autres personnes soient recherchées : nous recommandons vivement à chacun de faire attention à ses affaires portées ou utilisées pendant le mouvement. Cela peut vouloir dire : s’en débarrasser, les prêter à quelqu’un d’autre, les cacher quelque part,… Toutefois pas de mouvement hâtifs : restons discrets sur ces déplacements ! Les flics comptent souvent beaucoup sur l’effet coup de pied dans la fourmilière : taper fort puis observer ensuite où ça s’agite, pour trouver leurs futures cibles.

    (graissage repris de https://twitter.com/Defense_Co/status/1663827883314278400)

    edit la GàV d’une des personnes arrêtées a été prolongée à #96h

    #Rennes #manifestations #retraites #police #criminalisation #perquisitions #arrestations #association_de_malfaiteurs_à_caractère_criminel

  • À Lyon, des manifs contre la réforme des retraites s’en étaient pris au quartier huppé du 6e arrondissement et nombreuses furent les mobilisations be water dont la multiplicité (simultanée) et l’imprévisibilité avaient obéré l’aptitude policière à nasser et arrêter. Depuis le Premier mai, entre collaboration de la CGT, utilisation de l’ADN et de drones, la justice et la police travaillent...

    Caisse de So - Lyon @CaissedesoLyon
    https://twitter.com/CaissedesoLyon/status/1663257265921458200

    🚨Durant la manifestation/carnaval du 26 mai, un jeune homme a été interpellé à la Croix-Rousse. Les policiers auraient retrouvé son #ADN dans la quinquallerie Foussier qui a été pillé pendant la #Manifestation1erMai

    Déjà « connu des services » pour avoir incendié un véhicule de police pendant les #giletsjaunes et participé au saccage du local du PS en 2016, il a été placé en détention avant sa comparution immédiate demain à partir de 14h au tribunal.

    Plusieurs choses à retenir :
    ➡️ des enquêtes sont encore en cours pour les manfestations de mars, avril et mai. Par ex, un homme (arrêté et condamné pour une manif) s’est fait prequisitionner à la mi-mai et aura un procès l’année prochaine pour le 1er mai.
    Un autre manifestant a été arrêté le 16 mai, toujours pour la manifestation du 1er mai. Il a été écroué et est passé en comparuton immédiate le 19 mai.
    ➡️ si les policiers ne dispersent pas instantanément les rassemblements/manifs non-déclarées, c’est très certainement parce qu’ils passent au crible les participant-e-s pour essayer de mettre le grappin sur les gens qu’ils recherchent toujours🕵️‍♀️.
    ➡️ en cas de garde-à-vue pour le 1er mai ou autre, on a toujours rien à déclarer ! Et en cas de perquiz, c’est toujours bien si les enquêteurs ne trouvent pas 🧥🧣🧢👜 qui nous incriminent. À bon entendeur !
    Rdv le 6 juin dans la rue !

    Que s’est-il passé ce 1er mai à Lyon ?
    https://groupeantifascistelyonenvirons.com/2021/05/04/communique-suite-a-la-manif-du-1er-mai

    Le bloc avance lentement pour rester compact et ne pas se détacher du reste de la manif. Au bout de 300 mètres, Jackie, leader de l’UD #CGT de Lyon vient à l’avant de notre bloc et nous demande d’aller plus vite car ils n’arrivent pas à avancer. Le bloc accélère donc le pas mais nous réalisons que la CGT n’avance pas pour autant. Une personne vient nous voir et nous informe qu’elle aurait entendu un flic en civil, dire à un responsable de la CGT, qu’ils allaient procéder à des arrestations dans le bloc. Le bloc s’arrête pour attendre le reste de la manif, mais trop tard. La manœuvre entre CGT et police était déjà en place, un cordon de plusieurs dizaines de CRS encercle le bloc dans son dos. Le bloc comprend qu’il est en train d’être nassé, les banderoles se retournent pour faire face à cette ligne de police mais nous sommes entouré-es.

    Immédiatement une première charge fonce dans le Pink bloc et leur arrache les banderoles. Le bloc explose suite aux percées de flics par devant, à l’arrière et sur les cotés en simultanée. Les flics se replient aussitôt et le bloc se reforme pour se sécuriser. Il ressort les banderoles mais dans la foulée, une deuxième charge beaucoup plus violente est opérée. La CGT, qui n’a toujours pas bougé de sa ligne, regarde le spectacle, cacahuètes à la main.

    Lyon : deux individus interpellés « grâce à l’utilisation d’un drone » lors de la manifestation du 1er Mai
    https://www.lefigaro.fr/actualite-france/manifestations-du-1er-mai-deux-individus-interpelles-a-lyon-grace-a-l-utili

    Les drones de surveillance en appui aux forces de l’ordre font déjà leur effet à Lyon. Moins de deux heures après le départ de la manifestation du 1er Mai, les policiers ont interpellé deux individus repérés par un drone alors qu’ils allaient s’en prendre à la mairie du 7e arrondissement, a annoncé la préfecture.

    #police #drones #manifestation #arrestation #répression

  • 1 579 manifestants interpellés lors d’une action pour le climat aux Pays-Bas
    https://www.lemonde.fr/climat/article/2023/05/27/plus-de-1-500-manifestants-interpelles-lors-d-une-action-pour-le-climat-aux-

    Plus de 1 500 manifestants ont été arrêtés, samedi 27 mai, lors d’une manifestation du mouvement écologiste Extinction Rebellion à La Haye pour protester contre les subventions aux combustibles fossiles. D’après un porte-parole d’Extinction Rebellion, la manifestation a rassemblé quelque 7 000 personnes en ce samedi après-midi ensoleillé. Selon l’agence de presse néerlandaise ANP, jamais autant de manifestants n’avaient été arrêtées.
    Il s’agissait de la septième action du mouvement sur le tronçon Utrechtsebaan de l’autoroute A12 dans le centre de La Haye, situé à deux pas du Parlement et des principaux ministères.

    les enjeux écologiques, objets d’une foule de records

    #écologie #climat #manifestation #blocage #répression

  • « Jeudi Noir » - Rapport d’enquête sur la répression sanglante des manifestation du 20 octobre 2022 au Tchad - OMCT-LTDH - Avril 2023
    https://www.omct.org/site-resources/files/Rapport-Tchad-OMCT-LTDH-_-Avril-2023.pdf

    Le 20 octobre 2022, le Tchad s’est réveillé dans un chaos infernal marqué par une répression sans précédent de manifestants pacifiques écrasés par des bombes lacrymogènes et des tirs à balles réelles de la part des forces de sécurité. Ce « Jeudi Noir » restera dans l’histoire comme le jour de la prise de pouvoir effective du général Mahamat Idriss Déby Itno, fils du défunt président, Idriss Déby Itno, grâce à un recours excessif et brutal à la force en dehors des principes démocratiques constitutionnellement consacrés.
    Six mois après la répression sanglante de manifestations au Tchad, l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) et la Ligue Tchadienne des Droits de l’Homme (LTDH) publient un rapport d’enquête qui documente l’usage planifié et disproportionné de la force armée, la traque des opposants, les disparitions forcées et les déportations massives vers des lieux de détention où la torture a été pratiquée. Trois mois d’enquêtes dans la capitale N’Djamena et les villes de Moundou, Mongo, Doba et Koumra, et une cinquantaine de témoignages de rescapés, de familles de victimes et de témoins oculaires, ont permis d’établir que la répression des manifestations du 20 octobre 2022 par les autorités tchadiennes s’est soldée par la mort de 218 personnes, des dizaines de torturés, des centaines de blessés, au moins 40 cas de disparitions et 1300 arrestations.

    #Tchad #Répression #Torture #Manifestations #Disparitions_forcées

  • En Corrèze, un maire ne veut pas « subir le même sort que celui de Saint-Brevin »

    L’ouverture d’un Cada cet hiver à Beyssenac a provoqué de nombreuses manifestations dans la commune. L’élu, qui a reçu des menaces de mort, se sent « abandonné par l’Etat ».

    L’actualité de Saint-Brevin-les-Pins a résonné jusqu’à Beyssenac, en Corrèze. Dans ce petit village d’environ 350 habitants entouré de champs et de vergers, l’ouverture d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada) a fait grand bruit. Après avoir découvert la nouvelle dans la presse locale, au milieu de l’hiver, la population s’est divisée entre opposants et défenseurs, plus silencieux, du projet. Au milieu : le maire (LR) Francis Comby, cinq mandats au compteur. Il a été témoin des affrontements entre membres de l’Action française et militants antifas, des cagoules et des fumigènes devant sa mairie, fin février. 150 personnes réunies, du jamais-vu. « Depuis, il ne passe pas un jour sans que l’on me parle du Cada. Aujourd’hui, quand je vois ce qu’il est arrivé à ce maire [Yannick Morez, ndlr]… Je me sens dans la même situation que lui et j’espère que je ne vais pas subir le même sort », réagit-il.

    L’édile a déposé trois plaintes : une pour menaces de mort reçues sur sa boîte mail dans les jours qui ont suivi l’annonce et deux pour diffamation. Francis Comby préfère se mettre en retrait et « calmer le jeu ». Il assure que la municipalité n’a jamais été concertée et, « mis devant le fait accompli », c’est à lui que les habitants demandent des explications. « Je me sens totalement abandonné. L’Etat ignore les élus, impose son projet et, en plus, m’envoie au tribunal », s’emporte celui qui a fait valoir, mi-mars, le droit du conseil municipal de préempter les parcelles où s’est depuis installée la structure. La procédure a été attaquée par la préfecture de la Corrèze devant le tribunal administratif de Limoges (Haute-Vienne), qui a suspendu la délibération du conseil municipal.
    « Nous sommes là pour avoir la paix »

    Toutes les prises de paroles du maire sont désormais scrutées et font régulièrement l’objet de reprises sur les réseaux sociaux. Les deux collectifs d’opposants restent à l’affût du moindre événement lié à l’accueil d’étrangers, qu’il soit en Limousin ou ailleurs en France. Mercredi 10 mai au soir, les membres de Sauvons Beyssenac – l’un des deux collectifs locaux qui souhaitent l’abandon du projet, appuyé par Reconquête – relayaient sur Facebook la démission du maire de Saint-Brevin fraîchement annoncée. La dernière sortie du collectif Non au Cada de Beyssenac – le deuxième, qui se revendique « apolitique » tout en étant soutenu par le délégué départemental Rassemblement national, Valéry Elophe – remonte au 1er mai. Un petit groupe s’est retrouvé en face de l’ancien hôtel-restaurant où sont accueillis les exilés pour manifester. Un moment « très convivial », racontent-ils sur Internet. « Contrairement à ce qui a été dit dans les journaux, les manifestations continuent et continueront dans les prochaines semaines. »

    Plusieurs demandeurs d’asile ont assisté à la scène depuis les fenêtres de la réception, devant lesquelles patrouille régulièrement la gendarmerie. Cela faisait tout juste deux semaines que six femmes et un bébé venaient de s’installer sur place, encore secoués par leur périple. « C’était difficile. On entendait les cris, les gendarmes sont venus pour les faire partir », décrit Doris, Congolaise de 46 ans. Elle a découvert ce qu’il se disait au sujet du Cada avant même d’arriver. « Je me demandais pourquoi les gens ne voulaient pas de notre présence. Nous sommes là pour avoir la paix », poursuit Doris. L’association leur a expliqué comme elle pouvait. « Dès qu’il y a quelque chose de nouveau, les gens ont peur. Il y a aussi une méconnaissance du statut de demandeurs d’asile. S’ils sont là, c’est qu’ils sont en danger dans leur pays », insiste Camille, travailleuse sociale à Viltaïs, l’association mandatée par l’Etat pour gérer l’accueil.
    Lieu de vie et de passage

    Depuis un mois, l’ancienne auberge du village est redevenue un lieu de vie et de passage. Des habitants passent régulièrement saluer, déposer des dons ou proposer de l’aide. Dans la cuisine, Mariama prépare un plat typique de Guinée. L’odeur du mouton mijotant dans sa sauce au piment embaume la salle de vie où discutent les autres résidentes. « Certaines se sont déjà liées d’amitiés. Il y a beaucoup de solidarité entre elles », constate Patricia. L’animatrice sociale jongle entre les coups de téléphone pour organiser des activités sur place : cours de français, cuisine, couture, yoga… Un couple et leur bébé doivent arriver le lendemain. A la fin du mois, ils seront 20 sur place, la moitié de la capacité totale à terme du centre. Dans la matinée, trois résidentes ont marché jusqu’à la supérette d’une commune voisine. Se promener leur évite de cogiter. Un habitant les a récupérées sur le chemin du retour pour leur éviter de porter leurs sacs de courses sur plusieurs kilomètres. « Voir tous ces gens qui sont gentils avec nous, ça fait chaud au cœur, disent-elles. Nous, on est heureuses ici. »

    https://www.liberation.fr/societe/en-correze-un-edile-ne-veut-pas-subir-le-meme-sort-que-le-maire-de-saint-

    #Beyssenac #Cada #réfugiés #anti-réfugiés #asile #migrations #hébergement #France #centre_d'accueil #Francis_Comby #menaces_de_mort #Sauvons_Beyssenac #Non_au_Cada_de_Beyssenac #manifestation #Viltaïs #solidarité

    voir ce fil de discussion sur #Saint-Brévin :
    https://seenthis.net/messages/992104

    ping @karine4

    • Demandeurs d’asile : A Beyssenac, la mécanique du #mensonge au service de l’extrême-droite

      L’affaire de Saint-Brévin - et la démission de son maire après l’incendie de son domicile - a sidéré la France. Mais ailleurs aussi dans le pays, l’extrême-droite jette de l’huile sur le feu sur la question de l’accueil des réfugiés. Cette atmosphère teintée de haine et de xénophobie fracture des communautés jusqu’alors paisibles, dans les campagnes où on se regarde désormais en chien de faïence. A 550 km de Saint-Brévin, à Beyssenac, la vie s’écoule tranquillement. Ou plutôt s’écoulait : depuis plusieurs semaines la tension est au plus haut dans le petit village de Corrèze, secoué par une affaire identique.

      Sur la toile, Beyssenac est un point presque invisible. Et il faut zoomer, et re-zoomer encore, sur la carte d’Internet pour que l’invisible apparaisse. Dans la vie réelle, le village corrézien de 357 âmes tient en une place avec sa mairie, la demeure du maire en miroir, une église, un cimetière, des toilettes publiques, un bar associatif. Beyssenac s’étend en revanche sur des centaines d’hectares bornés par des fermes, maisons individuelles, qui émergent au milieu de prés troués d’étangs où paissent des bovins. Quelques bois cachent des hameaux et des chasseurs, des pêcheurs, quelques animaux sauvages peuvent être aperçus à la dérobée.

      Il n’existe aucun commerce de proximité et l’économie, outre l’élevage de vaches limousines, consiste à cultiver frénétiquement la fameuse pomme golden importée d’Amérique, que la politique agricole commune européenne a fait prospérer.

      Depuis quelque temps, la coupe sauvage et la vente de grands arbres fait aussi office de complément à cette agriculture peu soigneuse de l’environnement mais, au premier coup d’œil, la carte postale de cette France immobile donne le change. Simplement, les nappes phréatiques ont bu les intrants et autres pesticides, et le tronçonnage des forêts a fait découvrir aux habitants de nouvelles perspectives, dans lesquelles le vent désormais s’engouffre.
      Des migrants en Corrèze

      Mike (le nom a été changé) est Anglais. Il est venu s’installer à Beyssenac avec sa femme il y a environ 5 ans. Il y a acheté et rénové avec goût une jolie vieille maison de pierres, comme beaucoup de Britanniques et de Néerlandais, parmi d’autres nationalités. « En Angleterre, explique-t-il, une maison comme celle-ci et un terrain équivalent sont inabordables pour nous ». Le Brexit a fait le reste.

      Mike travaillait près de Liverpool, dans une concession automobile. Il fait partie d’une petite communauté étrangère qui s’est progressivement installée ici, à cinq minutes de la « frontière » avec la Dordogne. Elle a été renforcée ces derniers mois par l’arrivée de réfugiés ukrainiens, encadrés par une association locale de Pompadour, une commune non loin, et une Néerlandaise, qui a pris l’initiative de louer un bus pour aller chercher des femmes et des enfants à la frontière polonaise.

      Qui dit maisons à vendre dit tout (aussi) d’un exode local à peine compensé par l’arrivée de citadins ou d’étrangers. Européens ou pas, ils vivent généralement une existence parallèle aux habitants, aussi peu polyglottes que les Britanniques eux-mêmes, à de rares exceptions.

      « Nous sommes des migrants », sourit William, en montrant sa carte de séjour. Artisan débarqué de la région de Brighton, il a élu domicile avec sa jeune famille il y a une quinzaine d’années dans la communauté de communes dite du « Pays de Lubersac-Pompadour », dont Francis Comby, 60 ans, est le président. Le maire LR de Beyssenac est aussi vice-président du conseil départemental de Corrèze. En 2021, il aurait été barré par son propre camp, ayant prétendu accéder au siège de Pascal Coste selon des Beyssacois moqueurs.
      Des acquéreurs pour La Mandrie

      La vie politique dans ces communes n’est guère excitante. Bien souvent les élections se jouent sur une liste unique (c’était le cas pour Francis Comby), ce qui ne stimule pas spécialement la créativité des conseils municipaux. La gestion de l’existant suffit. Et l’existant est morne et silencieux. Tenter de se faufiler dans les alcôves de la politique régionale puis nationale est plus exaltant. La seule menace pour les élus (de droite) de la Com’com, dans leurs rêves de carrière, sont les votes en faveur de l’extrême-droite qui se consolident à chaque élection nationale à cause de la passivité et du suivisme de ces mêmes élus. Cela n’a pas l’air d’inquiéter.

      Sauf que, en novembre 2022, le maire UDI d’Arnac-Pompadour, raconte un témoin de la scène, Alain Tisseuil, élu lui aussi sans opposition, s’enquiert auprès de Francis Comby de la façon dont il va cohabiter avec Viltaïs. Cette association a acheté l’auberge de La Mandrie pour héberger et accompagner des demandeurs d’asile le temps (plusieurs mois) qu’ils préparent leur dossier pour l’OFPRA (l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui instruit ces dossiers pour le compte du ministère de l’Intérieur), dans le but d’obtenir (sans garantie) le statut de réfugié.

      Cela fait plus d’un an et demi que la famille Millot cherchait un acheteur pour son auberge, qui vivote. Il n’y a plus beaucoup de baptêmes, peu de fêtes de famille. Le tourisme ne prend guère, le manque d’activités - à part le rugby amateur et le cheval, auxquels tout le monde ne s’adonne pas - dans le périmètre est patent. Sinon, les amateurs de randonnées autour de Beyssenac ne trouveront que des parcours goudronnés. Et culturellement, la Com’com est un désert. Le cinéma et la salle de spectacle les plus proches sont à une demi-heure de route, à Uzerche.
      La Montagne vend la mèche

      L’auberge dispose d’un restaurant et de maisonnettes séparées, d’une piscine. Elle est située à l’écart du village, à quelques trois ou quatre kilomètres. Une seule habitation la jouxte. Avant Viltaïs, il n’y a eu qu’un vague projet privé consistant à accueillir des personnes âgées, dont la région vieillissante est déjà, par la force des choses, pourvue. Francis Comby avait eu vent d’une reprise éventuelle par quelques-unes de ses connaissances - le trésorier de la Société des courses de Pompadour et Philippe Bombardier, ancien DRH des Haras nationaux et ex-directeur de cabinet à la mairie de Limoges après son passage à droite en 2014, aujourd’hui directeur général des services au Conseil départemental de la Creuse mais aussi président de la Société de concours hippique, toujours à Pompadour.

      Les deux hommes sont donc aussi des connaissances d’Alain Tisseuil. Le maire de Pompadour cumule pour sa part avec la présidence du conseil d’administration de l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE). Le cheval, activité dépensière, réclame des sollicitudes. L’hypothèse tournait autour d’un gite qui aurait été bien utile aux officiels et socio-professionnels autour des activités hippiques. Claude Chabrol y reconnaitra le sien. Las ! La Montagne, le quotidien local, rend publique fin janvier l’ouverture prochaine d’un centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Une annonce que le maire déplore immédiatement, expliquant « qu’on a besoin de restaurants et d’hébergements dans le secteur ».

      Le site correspondait bien aux critères d’évaluations demandés par l’État : « 30 places minimum », une localisation qui ne « contribue pas à surcharger des zones déjà socialement tendues ».

      Quand Alain Tisseuil s’enquiert auprès de Francis Comby de la façon dont les choses se présentent, ce dernier lui fait comprendre qu’il est capable de gérer la situation. Les maires des petites communes peuvent se rejoindre au cas par cas mais ils restent jaloux de leurs prés carrés électoraux.
      Le tract incendiaire

      « Bientôt des dizaines de migrants dans notre village ! » Mi-février, Mike a trouvé dans sa boîte un tract de Reconquête !. Quinze jours seulement après le premier article de La Montagne. Il ne comprend pas le zemmourien et s’interroge. « Quel est le problème ? »

      Le gros problème est que les habitants ne sont pas au courant. Le second est que les premières communications sur le Cada sont le fait de l’extrême-droite. Une pétition circule sur Change.org, via Facebook. Soit disant initiée par le collectif « Sauvons Beyssenac », elle est en réalité l’œuvre de Philippe Ponge, homme de Reconquête !, et de quelques affidés de circonstances. Ajoutez, pour que l’affaire monte, de multiples pages Facebook nourries toujours par les mêmes personnages, sous divers pseudonymes.

      Les élus ont failli en amont à anticiper et expliquer en quoi consiste une telle structure, informer de la vente de l’auberge à Viltaïs et indiquer quelle serait l’attitude républicaine à adopter. Trop tard, pas pensé, pas réfléchi. Le tapage de l’extrême-droite a fait le reste, remplissant le silence des agneaux.

      Ainsi, une avalanche de fausses informations se répercute sur les réseaux sociaux avant même que les maires, submergés, aient pu lever le petit doigt. Parmi ces télégraphistes de mauvais augure, on trouve le responsable du Rassemblement national (RN) en Corrèze, Valéry Elophe, conseiller départemental. Mais surtout deux autres défenseurs acharnés de la Corrèze… venus du Var : Camille Dos Santos de Oliveira, transfuge RN dans ce département, qui s’est présentée en 2022 à la députation sous la bannière Reconquête ! à Brive-La-Gaillarde. Ou encore Philippe Ponge, déjà cité, qui s’exprime également sur la toile sous le nom de Philippe Lebloque ou encore de Philippe Corrèze, lequel a l’oreille compréhensive de Sud Radio.

      Ponge-Lebloque-Corrèze, au choix ou tout ensemble, a été suppléant de la jeune femme précitée sur la liste de Brive. L’homme est apparu dans la presse en 2014, dans Var Matin, quand des colistiers se sont désolidarisés de la liste FN qu’il menait, avant les municipales à Bandol. Elle ne passa pas le premier tour, en dépit de ses responsabilités dans la sécurité auprès du département.

      À la faveur de l’éviction de Jean-Marie Le Pen du FN en 2015 par sa fille, Ponge dit faire partie des déçus de la nouvelle ligne pour tenter sa chance ensuite chez les zemmouristes, plus francs du collier.

      Pour parfaire le tableau, Philippe Bombardier, l’homme des concours hippiques de Pompadour connu de Francis Comby et Alain Tisseuil, est lui connu à Limoges pour ses sympathies monarchistes. Un détail qui a son importance. Comme le fait qu’au fil de ses diverses affectations dans l’administration, Bombardier avait eu l’occasion de croiser Philippe Ponge dans le Sud de la France.
      La peur, l’arme fatale

      La mécanique se met en place. C’est du grand classique : on bourre les systèmes de référencement et de calcul des plateformes et très vite il suffit de taper « Beyssenac » pour voir apparaître une communauté fictive vent debout contre le Cada. Bien sûr la peur est l’arme fatale pour dénoncer en vrac « Les migrants », les « clandestins », alerter sur le « Grand remplacement », le tout financé par « nos impôts », en fustigeant ceux qui ne s’opposent pas à l’arrivée (très strictement encadrée) des réfugiés en quête du statut de réfugié en les accueillant chez eux.

      Dans cette accélération des particules de la haine, personne ne songe que les Cada existent pour que cela ne soit pas possible : ces structures ont justement « pour mission d’assurer l’accueil, l’hébergement ainsi que l’accompagnement social, administratif et juridique des personnes dont la demande d’asile a été enregistrée au sens de l’article L.741-1 du CESEDA, pendant toute la durée de leur procédure ». Cela n’est aucunement rappelé.

      Au lieu de se questionner sur les subventions publiques fléchées vers les associations liées au cheval à Pompadour, ces « échos » de Beyssenac laissent entendre que les locaux auraient donc estimé que les « migrants » avaient déjà ruiné et mis à sac ce joli coin de Corrèze. On lit la crainte de voir les vaches « écorchées ». Sur la page de Francis Comby, les commentaires fusent, envisagent des « viols » ou des risques de « maltraitance aux enfants », en référence aux mineurs isolés. « Partout Callac » fait valoir sa prise de guerre. Saint-Brévin arrive.

      L’incendie sur la toile est instantané. Le maire de Beyssenac éprouve les pires difficultés à simplement expliciter en quoi il est incompétent sur le dossier qui relève de la préfecture. Et qu’il n’y a pas le début d’un débat à aviver, hormis celui sur le danger que constitue la diffusion de fausses informations. Il sait pertinemment en revanche que le vote RN est arrivé en tête dans son canton lors des législatives de 2022, et il préfère en tenir compte.

      Jointe par Blast fin février pour savoir quelle attitude adopter face à la panique et la paranoïa qui se répandent, l’association Viltaïs a répondu dans un mail : « Les services de l’État sont informés des agissements de certains partis politiques et ces derniers nous demandent de ne pas répondre pour l’instant. » Preuve aussi que Viltaïs est joignable sans problème, ce que réfute Francis Comby au même moment.
      La Reconquête des esprits

      Le 18 février, quelques jours plus tôt, une petite poignée de militants Reconquête ! déploie une longue banderole devant le château du marquisat de Pompadour - oui, le cadeau de Louis XV à sa maîtresse roturière -, à quelques kilomètres de là. Avec un message qui claque - « Zemmour président ! » - devant lequel ils se prennent en photo en connaissance de cause. Face à eux, il n’y a que deux gendarmes, le parking devant la vieille bâtisse qui abritait les bureaux des Haras nationaux étant désert. Les rares passants jettent un œil circonspect à la manif à cinq. Quelques militants de gauche et de la LDH se tiennent à distance.

      https://i.imgur.com/Ex7DX3i.png

      En réalité, Philippe Ponge est à la manœuvre. Reconquête ! compte à peine 490 adhérents déclarés dans toute la Corrèze. Mais les cinq du 18 février s’expriment pourtant au nom de tous les Corréziens. Les responsables du parti ont le don d’ubiquité. Ils sont partout.

      https://i.imgur.com/fl03p3y.png

      Pourtant, ce rapt de l’opinion ne sera pas davantage combattu par le maire de Beyssenac, qui trouvera « normal » l’inquiétude que les partisans d’Éric Zemmour sèment. Pire, l’élu la favorise en acceptant, parce que les sympathisants des idées d’extrême-droite existent à bas bruit et l’ont fait maire, une réunion publique au cours de laquelle va s’exprimer Valéry Elophe. Le Rassemblement national a pris ombrage de l’offensive des zemmouristes. Le 5 mars, le RN local manifeste devant la préfecture de Tulle. À Tulle, tout le monde s’en fiche royalement.

      Le 13 mars, le conseiller départemental intervient sur Boulevard Voltaire, au sujet de Beyssenac : « Je ne roule pas avec des gens de Reconquête qui font n’importe quoi en affichant des banderoles "Zemmour Président" et ne maîtrisent pas les dossiers. » A cheval sur ses dossiers, Elophe préfère s’attaquer à Viltaïs, qui « roule dans de luxueux SUV » - en réalité des voitures de service... comme l’Institut français du cheval et de l’équitation en possède quelques-unes. Ici comme à l’Assemblée, le RN roule lui avec le pied sur le frein, attend et fait diversion sur des questions accessoires.

      Quelques jours plus tard, le même Elophe interpelle le conseil départemental sur le financement de l’association sur la base d’un rapport. Ce rapport, signé par la chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpe, réclamait simplement des précisions et émettait des recommandations à Viltaïs, comme cela est heureusement son rôle. Peu importe, Reconquête ! et le RN se disputent la même proie. Les frères-ennemis de la droite extrême aboient contre l’État qui finance « les immigrés ». Le vocabulaire est approximatif mais il résonne clairement dans nos campagnes.
      Des approximations concurrentielles

      La première réunion publique avec des membres du RN s’est tenue la veille d’un conseil municipal, le 22 février dernier. Dans cette ambiance alarmiste le véritable sujet n’est pas abordé – le fait que la municipalité doit se conformer aux lois de la République et au droit d’asile. Au cours de cette réunion, aucune allusion non plus au cas d’Uzerche, un peu plus à l’Est, où un autre Cada a donné des résultats très satisfaisants en termes d’intégration ou de projets de vie. Un couple de Syrien vient d’ailleurs d’ouvrir un kebab à Pompadour : de la petite restauration, peu chère, dans un climat amical. Sur place, tout s’est passé au mieux grâce à l’implication du maire PCF Jean-Paul Grador. La municipalité s’était portée volontaire pour accueillir un centre d’accueil. La population n’a émis aucun cri.

      https://i.imgur.com/UTuurep.png

      A Beyssenac, une folle machine s’est emballée. L’extrême-droite ayant produit une bouillie de communiqués sur un terrain favorable, le conseil municipal vote une motion contre l’installation du centre d’accueil. C’est encore hors sujet mais le maire suit. Cette motion pose une série de questions sur le service proposé par le Cada, auxquelles Francis Comby ne donne pas de réponse. Il n’a pas travaillé.

      L’édile, acculé, se défend maladroitement contre ses propres électeurs qui l’accusent d’avoir donné son accord pour l’ouverture du centre. « J’ai demandé plusieurs fois depuis trois semaines à Monsieur le Préfet de Corrèze de tenir une réunion d’information à Beyssenac, écrit-il dans une lettre. À ce jour, je n’ai toujours pas reçu une lettre, un mail, ou un mot officiel à la mairie. » Cette molle et peu convaincante tentative de prise de contact d’une part, et la discrétion du préfet, c’est vrai, de l’autre, fermentent un pain béni pour le RN et Reconquête !, qui mènent le bal de la communication entre autres omissions épistolaires. Piégé par ses propres manquements, Francis Comby n’aura cessé de se justifier, en dénonçant les manques de l’État, du préfet, de Viltaïs, sans jamais questionner la présence de l’extrême-droite dans et hors sa mairie, qui d’ordinaire est plutôt adepte du chuchotement privé.

      Il se regarde marcher

      Ce manque cruel de clarté n’est pas passé inaperçu aux yeux de tous. Une habitante de Beyssenac (dont le nom ne sera sciemment pas cité) se désole de l’absence de position claire de son maire, qui se fait balader par son conseil municipal lui-même sous l’emprise de fausses informations, et qui ignore les lois encadrant le droit d’asile. « Il est maire ? Mais c’est le conseil municipal qui l’a désigné. Son nom a souvent été barré sur la liste unique, il n’apparaissait pas en tête. Francis Comby, il se regarde marcher. Mais il est élu au département, a fait des études de pharmacie… »

      Dans ces campagnes, le notable est censé connaître l’administration, le droit, la Constitution, en tirer avantage. On s’en remet à lui et patatras !
      Le nationalisme d’opérette

      Les choses empirent. Viltaïs prudente, le préfet jouant la montre, l’Action française se met à son tour en scène devant la mairie de Beyssenac. Le 27 février, une quinzaine de jeunes activistes identitaires plus que monarchistes, cagoulés, casques de moto en main, hurlent des slogans xénophobes. Devant eux un cordon de police. Un gendarme explique qu’ils ont l’autorisation de la mairie pour manifester une heure.

      https://i.imgur.com/rtJVtCO.png

      Ces militants viennent de Limoges, à plus de 60 kilomètres de là. Derrière le cordon de policiers, peu d’habitants du village mais plutôt des communes limitrophes, une petite centaine de partisans de formations de gauche, humanitaires et un petit groupe d’anarchistes se positionnent. Ils sont beaucoup plus nombreux. Dans la petite foule, il y a même des étrangers, tiens : des Britanniques venus dire leur incompréhension devant le spectacle de ce nationalisme d’opérette qui, lui aussi, se manifeste par des phrases sans aucun sens.

      « Ils vont prendre notre boulot », entend-on alors que les demandeurs d’asile n’en ont pas le droit tant que l’OFPRA n’a pas statué sur leur cas, ou passé un délai de six mois – s’il ne l’a pas fait. Par ailleurs, la cueillette des pommes oblige chaque automne les agriculteurs locaux à faire venir par bus entiers une main d’œuvre étrangère. Mais, dans ce cas, cela est nécessaire. Car dans ces campagnes, autre non-dit, beaucoup de jeunes touchent des allocations et évitent les travaux pénibles. Parmi eux, le sentiment de jalousie perle. Le fait que le Cada soit installé dans un ancien Logis de France avec piscine et aire de jeux pour enfants a l’air d’agacer.

      Revoir ça à Beyssenac

      Francis Comby observe la scène de son jardin, pendant qu’une vieille dame, la larme à l’œil, glisse ce commentaire : « Et ce sont les mêmes qui déposent des gerbes devant les monuments aux morts ou à la Résistance… » Le premier magistrat, lui, se plaint de la division et du désordre crée par cette foutue Cada. Un axe qu’il reprendra devant les médias, dénonçant bien évidemment l’action de « l’ultra-gauche » après le face-à-face du samedi 25 février avec l’Action française. « Je ne veux plus revoir ça à Beyssenac ! En plus, je n’ai pas d’informations, ni de la préfecture, ni de l’association Viltaïs sur ce projet. »

      Le mantra de Francis Comby se heurte surtout au fait qu’il consent à ce que l’extrême-droite s’exprime librement devant chez lui ou l’auberge de La Mandrie. Ailleurs en France, d’autres élus ont eu le courage de contredire ces idées préconçues et même interdire à l’extrême-droite d’utiliser pour faire sa pub un symbole de la République. Francis Comby ne s’exprimera jamais sur le chaos et la sidération que seule la propagande a créés.

      Il en connaît pourtant les principaux agents. Certains de ses administrés témoignent clairement avoir peur de représailles à se déclarer sans opinion ou favorables au Cada. Et le maire se dit lui-même « menacé de mort. » Mais le 8 mars une autre réunion publique avec des membres du RN se tiendra à nouveau dans le village. Dans La Montagne, Francis Comby se défend encore à propos de ces deux réunions du Rassemblement national tenues dans la salle polyvalente de Beyssenac : « Elle est à la disposition de tous ceux qui en ont besoin. »

      En sillonnant par les champs, en rencontrant et discutant avec les habitants, les réactions sont très diverses. On n’est pas unanimement contre le Cada mais le sujet effraie. Pas sur le fond, personne n’en sait grand-chose, mais le climat importé par l’extrême-droite. La plupart des Beyssenacois voudrait simplement savoir comment cela fonctionne et qui sont ceux qui prétendent au droit d’asile. Des anciens sont touchés par le fait que La Mandrie fut jadis l’école du village.

      On va vous fusiller !

      Entre ceux qui se taisent, ceux que cela ne gêne pas et ceux qui connaissent les membres de « Sauvons Beyssenac ! », des jeunes ou des vieux fermiers sont désemparés. « Ils vont tuer les moutons. » Un jeune éleveur de chèvres, membre du collectif précité, justifie son courroux par une confidence de son agent immobilier : il lui a dit que sa ferme avait perdu 30% de son prix de vente. Comptait-il la vendre et abandonner le terrain, qu’il dit vouloir défendre ? Mystère. Face à l’insistance d’un petit groupe - des locaux venus de villages à proximité pour compenser l’inertie du maire, pour qu’il comprenne d’où viennent les gens qui arrivent au Cada et leur situation objective -, le jeune exploitant explose : « Chacun chez soi, et ce sera très bien. Partez ! Maintenant. Moi, s’il y avait la guerre chez moi, je me battrais, vous, vous partiriez ? On va vous fusiller ! »

      À Beyssenac, la conclusion du tour du village effectué par des militants de gauche ou des Droits de l’homme dément que la majorité des habitants s’oppose au Cada. Ils ont formé un collectif pour démontrer que, non, comme l’affirment les banderoles tendues par un pomiculteur devant La Mandrie, la majorité des habitants ne sont pas contre l’ouverture. Mais Facebook et les autres réseaux l’ont fait croire. Et ceux qui l’ont cru ont désormais peur.

      Le 16 mars dernier, la visite tardive du préfet de Corrèze a confirmé un racisme latent chez certains - « les Ukrainiens, ce n’est pas pareil », a-t-on entendu dans la salle de réunion - mais aussi le soutien de locaux dénonçant cette distinction.

      La stratégie de Viltaïs (avancer à pas feutré, prudence légitime) et l’incapacité du maire de Beyssenac à dépasser son propre ego ont facilité le travail de l’extrême-droite. Francis Comby persistera en instituant sous la pression de son conseil municipal un droit de préemption urbain sur le lieu-dit « Les Garennes », à l’endroit où se trouve le centre d’accueil pour demandeurs d’asiles. Sans aucune chance d’aboutir : un mois plus tard, le 25 avril, le tribunal administratif saisi par la préfecture a annulé son arrêté, contraire au droit.

      En réalité, ces errements d’élus locaux correspondent à la posture actuelle de la frange droitière des Républicains et d’une formation sans repères. À vouloir composer avec l’extrême-droite, en flirtant avec ses idées pour conserver des sièges, le risque est grand d’être débordé. Surtout quand on n’a soi-même pas d’idées.

      De quoi a-t-on peur au juste à Beyssenac ? Aujourd’hui, de son voisin. L’extrême-droite est parvenue à instiller la méfiance et la défiance des habitants les uns contre les autres, sur leurs pensées, leurs opinions, leurs libertés. Localement, la mécanique propagandiste de la droite dure a révélé que les élus et les principaux acteurs de cette agitation agressive ne sont pas étrangers les uns aux autres. Liés par les intérêts d’une politique locale souvent opaque, ils se sont habitués à composer ensemble pour exister. En creux, cette sinistre histoire a mis à jour les liens créés par la micro-économie du cheval, seul produit d’appel pour faire connaître ce recoin de France et à travers lequel ceux-là fabriquent leur réputation.

      Beyssenac est désormais identifié comme un de ces villages d’une France rurale où l’extrême-droite peut semer le désordre quand elle le désire, faisant passer des exilés pour une menace pour la survie des rites tribaux du « Pays vert ».

      Le 11 mars dernier, les sept premiers demandeurs d’asile accueillis à l’auberge de La Mandrie se sont installés sous protection de la gendarmerie. Six femmes et un bébé. L’une d’elles s’appelle Doris, elle a confié à La Montagne demander la protection de la France. Parce que « c’est un pays de lois. »

      https://www.blast-info.fr/articles/2023/demandeurs-dasile-a-beyssenac-la-mecanique-du-mensonge-au-service-de-lext

  • Manifestations : « Il faut remonter à la guerre d’Algérie pour retrouver de telles interdictions systématiques »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/05/12/manifestations-il-faut-remonter-a-la-guerre-d-algerie-pour-retrouver-de-tell

    L’autorité publique peut décider d’interdire une manifestation, mais uniquement si elle justifie de bonnes raisons de craindre des troubles graves à l’ordre public, et cette décision doit être motivée. Elle ne peut être de principe, imposée a priori comme un ordre du ministre aux préfets. On est dans le cadre d’une décision politique destinée à éteindre une polémique à l’Assemblée nationale. Le problème est que le ministre de l’intérieur, qui doit protéger l’Etat de droit, demande aux préfets, qui sont sous son autorité, de prendre des décisions qui, pour la plupart, seront illégales.
    [...]

    Si vous me permettez l’expression, les préfectures qui ont décrété des périmètres de protection sur la base de la loi SILT pour empêcher quelques mécontents de frapper sur des casseroles au passage d’un ministre ou du président sont en roue libre. Mais ce n’est pas très étonnant à partir du moment où le ministre de l’intérieur a, à deux reprises, tordu le droit devant la représentation nationale : une fois pour prétendre que les manifestations spontanées sont illégales, conduisant le Conseil d’Etat à sortir de sa réserve pour qualifier d’erronée cette assertion, et une autre pour interdire, a priori, toutes les manifestations d’un certain courant politique.

    Ainsi, se posent non seulement la question du respect du ministre pour les droits fondamentaux mais aussi celle de sa compétence, de la qualité de sa connaissance du contenu de la loi. Mais c’est aussi un signal délétère envoyé aux préfets. Sous la Ve République, il faut remonter à la guerre d’Algérie pour retrouver de telles interdictions systématiques de manifestations. Mais à l’époque, le préfet s’appelait Maurice Papon et la France était dans une guerre non dite…
    https://justpaste.it/bo8jh

    #Manifestations #interdiction_de_manifester #répression #préfets #police

  • Darmanin cache son déplacement à Gruson mais n’évite pas le concert de casseroles Yacha Hajzler - france3-regions

    La préfecture des Hauts-de-France avait vivement démenti l’annonce de la venue de Gérald Darmanin à Gruson, ce 6 mai. Pourtant, le ministre de l’Intérieur s’est bien rendu dans le Nord. Il a été rapidement repéré par les opposants à la réforme des retraites et n’a pas pu éviter le concert de casseroles.

    Un jeu de cache-cache qui n’a pas vraiment eu le succès escompté. Le 5 mai, dans un tweet publié sur son compte officiel, la préfecture des Hauts-de-France démentait fermement l’annonce d’un déplacement de Gérald Darmanin à Gruson, dans le Nord. « Il n’a jamais été question qu’il vienne », affirmait même l’autorité préfectorale. 


    La mairie de Gruson dégradée quelques heures avant la venue de Gérald Darmanin. • © France Télévisions

    Il faut dire que, sur les réseaux sociaux, les opposants à la réforme des retraites organisaient déjà leur concert de casseroles pour la venue du ministre de l’Intérieur.

    Malgré les démentis, un ministre bel et bien là
    Et, malgré les démentis, Gérald Darmanin était bien là, ce samedi 6 mai, au lieu dit et à l’heure dite. C’est lui-même qui l’a annoncé sur son compte twitter, photo tout sourires avec les élus locaux à l’appui. L’entourage du ministre a fait valoir auprès de l’AFP une décision prise « en dernière minute », une justification qui n’a pas convaincu les opposants nordistes. 

    En conséquence, le ministre n’a pas mis longtemps avant d’être retrouvé par les protestataires, qui ont déplacé la « casserolade » en dernière minute devant la mairie de Tourcoing, où Gérald Darmanin a fait escale comme à son habitude. 

    « Bah alors on se cache ? On fait publier des fakenews à la préfecture et au ministère de l’Intérieur parce qu’on a peur du peuple et de ses casseroles ? » , a interpellé le collectif lillois L’Offensive sur Twitter.



    La mairie de Gruson taguée et dégradée
    A Gruson, en lieu et place du ministre, c’est la mairie qui a fait les frais de la frustration des manifestants. Quelques heures avant la venue du ministre, la façade a été dégradée par des tags et un impressionnant déversement d’huile de vidange. 

    Sur les tags, on pouvait notamment apercevoir le symbole anarchiste ainsi que les mots « Darmanin violeur » , en référence à la plainte déposée à son encontre en 2017 et pour laquelle il a pour l’instant bénéficié d’un non-lieu. Noirci par les dégâts, l’édifice public est en cours de nettoyage.

    Source : https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/nord-0/darmanin-cache-son-deplacement-a-gruson-mais-n-evite-pa

    #casserolades #casseroles #casserolade #révoltes #france #macron #foutriquet #histoire #reformedesretraites #casseroladegenerale #gérald_darmanin #manifestation

  • La faute à Sainte Soline - La Grappe
    https://lagrappe.info/spip.php?article187

    Il y a beaucoup de justes critiques à faire de l’élan guerrier, notamment lorsqu’il devient prétexte à mépriser tout ce qui n’est pas lui : mais nous voulons aussi le chérir car, lorsqu’il est partagé par la foule , il est capable parfois de renverser l’ordre des choses. Entraîné.es par notre élan, nous avons fait l’erreur de foncer dans un dispositif fortifié, sur le terrain d’un ennemi qui a pris plaisir à meurtrir nos corps. Cette faute est largement partagée : nous nous sommes pris au jeu de la guerre, et sur ce terrain-là l’État et ses sbires seront toujours les plus forts. Sainte-Soline nous a amèrement rappelé que notre guerre est une guerre asymétrique, où l’objectif n’est pas d’anéantir l’ennemi, mais de faire fuir ses lignes. Seul un virilisme enivré de lui-même a pu nous faire croire que nous pourrions vaincre dans une confrontation frontale. Ne les laissons pas nous traumatiser au point de douter de nous-mêmes, mais demandons-nous si c’est vraiment la guerre que nous voulons mener, et quelle guerre.

    #SLT #Les_soulèvements_de_la_terre #Sainte-Soline #introspection #stratégie

    • French publisher arrested in London on terrorism charge | UK news | The Guardian
      https://www.theguardian.com/uk-news/2023/apr/18/french-publisher-arrested-london-counter-terrorism-police-ernest-moret

      Ernest Moret was stopped at rail station and taken into custody, where he was questioned about his participation in French protests

      A French publisher has been arrested on terror charges in London after being questioned by UK police about participating in anti-government protests in France.

      Ernest Moret, 28, a foreign rights manager for Éditions la Fabrique, was approached by two plainclothes officers at St Pancras station on Monday evening after arriving by train from Paris to attend the London book fair.

      He was questioned for six hours and then arrested for alleged obstruction in refusing to disclose the passcodes to his phone and computer. His treatment was condemned as an attack on the right to demonstrate, amid calls for protests outside the UK embassy in Paris and the French Institute in London.

      Moret arrived at St Pancras at 7.15pm with his colleague Stella Magliani-Belkacem, the editorial director at the Paris-based publishing house, to be confronted by the two officers.

      Magliani-Belkacem told the Guardian: “When we were on the platform, two people, a woman and a guy, told us they were counter-terrorist police. They showed a paper called section 7 of the Terrorism Act of 2000 and said they had the right to ask him about demonstrations in France.”

      She added: “I’m still shaking. We are in shock about what happened.”

      She said French publishers had drafted a joint letter calling for a protest outside the British embassy in France on Tuesday evening about Moret’s treatment.

      When the officers began questioning Moret, Magliani-Belkacem called her friend Sebastian Budgen, a senior editor at Verso Books in London, at whose home she and Moret had arranged to stay.

      Budgen arranged for a lawyer to visit Moret. The lawyer called Budgen at 1am on Tuesday to confirm that Moret had been arrested over his refusal to tell police the passcodes to his confiscated phone and laptop. He was transferred to a police station in Islington, north London, where he remained in custody on Tuesday. He was later released on bail.

      Éditions la Fabrique is known for publishing radical left authors. Moret also represents the French science fiction novelist Alain Damasio and had arranged more than 40 appointments at the London book fair.

      A joint press release from Verso Books and Éditions la Fabrique condemned Moret’s treatment as “scandalous”.

      It said: “The police officers claimed that Ernest had participated in demonstrations in France as a justification for this act – a quite remarkably inappropriate statement for a British police officer to make, and which seems to clearly indicate complicity between French and British authorities on this matter.”

      It added: “We consider these actions to be outrageous and unjustifiable infringements of basic principles of the freedom of expression and an example of the abuse of anti-terrorism laws.”

      The statement said a protest was planned at the French Institute in London and called on France’s ambassador to the UK, Hélène Duchêne, to request Moret’s immediate release.

      Budgen said: “It is causing a stink at the London book fair and there’s a big stink in France as well … there’s been an increasingly repressive approach by the French government to the demonstrations, both in terms of police violence, but also in terms of a security clampdown.”

      Hundreds of thousands of people took to the streets in France last month over Emmanuel Macron’s use of constitutional executive powers to push through an unpopular increase in the pension age. The protests caused King Charles’s planned visit to France, his first overseas tour as monarch, to be postponed.

      The writers’ association Pen International said it was “deeply concerned” that Moret was detained on counter-terrorism grounds.

      Pamela Morton, senior books and magazines organiser for the National Union of Journalists, also expressed concern.

      She said it seemed “extraordinary that the British police have acted this way” in arresting a publisher on the way to the London book fair. “We will be taking this up with the police,” she added.

      A Metropolitan police spokesperson said: “At around 7.30pm on Monday 17 April, a 28-year-old man was stopped by ports officers as he arrived at St Pancras station, using powers under schedule 7 of the Terrorism Act 2000.

      “On Tuesday 18 April, the man was subsequently arrested on suspicion of wilfully obstructing a schedule 7 examination, contrary to section 18 of the Terrorism Act 2000.”

  • Ernest, #éditeur arrêté par la #police_britannique, doit être relâché | Le Club
    https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/180423/ernest-editeur-arrete-par-la-police-britannique-doit-etre-relache

    Ernest, éditeur arrêté par la police britannique, doit être relâché

    Alors qu’un responsable des droits étrangers des #éditions #La_Fabrique a été arrêté hier soir par la police britannique invoquant sa participation présumée à des #manifestations en France, un #collectif d’éditeurs et éditrices lui apporte son soutien. Cette arrestation « porte atteinte à la libre circulation des idées et aux droits fondamentaux des #maisons_d'édition et organes de #presse. » Ils et elles enjoignent la justice française à « intervenir pour garantir la protection de leurs ressortissants face à de telles mesures répressives. »

  • Foire du livre de Londres : un éditeur français arrêté à son arrivée au Royaume-Uni – Libération
    https://www.liberation.fr/culture/livres/foire-du-livre-de-londres-un-editeur-francais-arrete-pour-sa-participatio

    Le communiqué commun de la Fabrique (Paris) et de Verso Books (Londres) dénonce « le traitement scandaleux infligé par la police britannique à notre collaborateur Ernest, ressortissant français ». « Sa détention peut durer jusqu’à quatorze jours sans éléments matériels ni poursuites », dit-on à la Fabrique.

    Selon la maison d’édition, les policiers britanniques auraient justifié son interpellation par le fait qu’il aurait participé à des manifestations en France. « Une telle déclaration de la part d’un policier britannique est tout à fait insensée et semble clairement indiquer une complicité avec les autorités françaises sur ce dossier », poursuit le communiqué.

    #manifestations #antiterrorisme

  • Sainte Soline : repenser nos stratégies de lutte depuis une logique d’autonomie et de soin

    https://www.terrestres.org/2023/04/17/sainte-soline-repenser-nos-strategies-de-lutte-depuis-une-logique-dauton

    D’autres manières de faire auraient été envisageables.En termes de stratégie annoncée et de discours, il nous semble crucial de poser un objectif général qui permette à des tactiques différentes de vivre et de se compléter (chose qui a été faite le vendredi, avec l’arrivée des convois de tracteurs). Le plus important, aurions-nous aimé entendre, c’est d’être là ensemble, solidaires dans nos luttes, imprévisibles et déterminé·es. Déjouer le dispositif répressif – ne pas mesurer notre puissance à l’aune de la sienne. Aussi : bousiller le concept de victoire militaire. Si l’esprit collectif avait été moins unilatéralement concentré sur la conquête de la bassine à tout prix, peut-être que nous aurions pu développer plus de spontanéité en réalisant que l’intrusion ne serait pas possible.

    #Sainte-Soline #manifestation #tactique #contournement

    • La faute à Sainte-Soline ?
      https://iaata.info/La-faute-a-Sainte-Soline-5872.html

      C’est faire injure à la foule, et plus encore aux dites « premières lignes », que de parler de manipulation. Nous ne sommes ni des moutons, ni des soldat.es. Si nous avons foncé sur cette bassine, ce n’est pas par obéissance aveugle aux ordres, mais parce que nous voyons du sens à percer des lignes policières, symboles de la propriété privée des choses communes.
      Nous sommes des milliers à nous être préparé.es à cet événement en nous préparant à mener bataille : nous avons formé des groupes, nous avons fabriqué et acheminé du matériel, nous nous sommes coordonné.es, nous avons eu peur et nous avons eu du courage. (...)

      Tout cela ne va pas sans nous poser des questions – sur le professionnalisme militant, sur l’ampleur des récits autour de la reprise de terre, sur l’opportunisme dans le rapport à l’écologie, sur une forme de déconnexion d’avec les mouvements sociaux. A nos yeux, les promesses des soulèvements méritent largement l’aventure, avec les impuretés de toute tentative. En deux ans, s’est constituée une force capable de peser dans le jeu politique. Au moment de l’adaptation des infrastructures capitalistes à la crise climatique, nous avons peut-être une chance de mettre un frein à leur déploiement et de gêner réellement l’extension du capital à de nouveaux territoires.
      Aujourd’hui, nous avons l’impression que les Soulèvements sont à la croisée des chemins. L’organisation bénéficie d’une ouverture médiatique sans précédent, qui permet notamment de parler de dissolution du gouvernement à la télé. Cette dynamique médiatique fait des soulèvements une image à laquelle on peut s’identifier par un hashtag. Les images sont trop puissantes pour qu’elles restent des images sans modifier la consistance des choses. Sainte-Soline aurait pu être une trouée dans l’ordre médiatique, nous avons peur que la trouée qui a eu lieu modifie l’organisation à laquelle nous avons choisi d’appartenir. Alors, c’est aussi à nous, comités locaux, de faire que cette parole publique ne recouvre pas la réalité des Soulèvements, une réalité multiple, de paysannes, d’autonomes, de sabotage et de tout ce qui ne se dit pas sur les ondes.

  • À celles et ceux qui ont marché à Sainte-Soline - expansive.info
    https://expansive.info/A-celles-et-ceux-qui-ont-marche-a-Sainte-Soline-3904

    L’installation du campement et le passage du convoi nous montrent : premièrement qu’entre planification minutieuse dans une composition large et improvisation réactive, il est parfois possible de déjouer un dispositif asymétrique. Et que deuxièmement, nous sommes plus forts en mouvement. Cette intuition est renforcée par la tournure des événements du lendemain où d’une certaine manière, la conflictualité et l’affrontement se sont figés dans une guerre de positions, visiblement regrettable pour nous.

    Si l’on oriente maintenant le regard sur le samedi, nous pouvons comprendre que la répétition tactique entre la première bataille de Sainte-Soline et la deuxième apparaisse comme une grande erreur. Au sortir de l’événement, nous peinons à refaire le fil qui nous a mené là. Malgré le bon sens qui voudrait qu’on ne tente pas deux fois le même coup, c’est comme si une réduction progressive des possibilités en entonnoir nous avait poussé à reproduire le même mouvement.
    D’une certaine manière, nous n’avons pas su faire évoluer le déploiement tactique des cortèges depuis le rassemblement d’octobre. Dans cette rase campagne où les étendues s’étirent à perte de vue, il n’y a pas une infinité de voies possibles. C’est pourquoi, ce jour-là nous pensions à nouveau aller aux abords de la bassine, pour tenter de l’encercler, et d’y accéder si la situation le permettait. Nous n’étions cependant pas prêt.es à y pénétrer coûte que coûte.

    Avec les contraintes topographiques que l’on connaît - une vaste étendue à découvert pour accéder à la bassine en surplomb - la difficulté était de réussir à créer la surprise. Mais dès lors que nous avions annoncé publiquement aller à Sainte Soline et/ou Mauzé sur le Mignon, nous ne pensions pas garder un quelconque secret sur les objectifs de la journée. Le camp étant en dehors de la zone rouge, nous étions inquièt.es de la possibilité de se retrouver bloqué.es et de se heurter à un dispositif en bord de zone rouge, provoquant un affrontement à des kilomètres de la bassine. La Préfecture pouvait légalement nous arrêter devant la zone rouge, mais la gendarmerie avaient tiré les leçons d’octobre. Au matin, nous avons constaté avec soulagement que les ponts aux abords de Vanzay étaient libres. En établissant un fortin autour et dans le chantier de la bassine, l’état-major de la gendarmerie s’est assuré une position défensive forte. Le « fortin » était prévisible, malgré cela, nous avons manqué de temps et de créativité pour communiquer et déjouer cette situation. Il était difficile de forcer les gendarmes à sortir de la bassine. Les canalisations font partie de l’ouvrage, nous le disons régulièrement, mais les difficultés techniques pour les désarmer ne permettaient a priori pas d’en faire un objectif partageable par des dizaines de milliers de personnes.
    Malgré tout, nous avons pensé que si nous parvenions jusqu’à la bassine, le nombre nous permettrait de l’encercler et que le pourtour serait émaillé d’approches d’ordre divers, ce qui aurait permis éventuellement d’arracher de nouveau les grilles et de stopper, au moins temporairement, les travaux pendant quelques temps.

    3. Changement d’échelle
    Le 25 mars marque un bond dans la participation au mouvement contre l’accaparement de l’eau. Comment se coordonner et continuer à se déplacer ensemble en tenant compte de ce changement d’échelle ? Le grossissement considérable des cortèges implique l’évolution des modes de transmission de l’information et de prise de décision collective, avant et pendant la manifestation. Évolution que nous avons mal anticipée.

    https://seenthis.net/messages/996856

    #tactique #manifestation #Sainte-Soline

  • Réforme des retraites : « La décision du Conseil constitutionnel s’impose mais, parce qu’elle est mal fondée et mal motivée en droit, elle ne peut pas clore le contentieux »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/04/16/reforme-des-retraites-la-decision-du-conseil-constitutionnel-s-impose-mais-p

    Le constitutionnaliste Dominique Rousseau souligne, dans une tribune, les contradictions de la décision de l’institution de la rue de Montpensier sur la réforme des retraites qui fait selon lui « souffrir la logique juridique ».

    Inutile d’aller chercher dans le mode de nomination des membres du Conseil constitutionnel, dans leur passé politique, dans la mise au jour des intérêts particuliers et connivences des uns et des autres pour qui veut discuter la décision du vendredi 14 avril. Il suffit, simplement, de la lire pour qu’en sorte la critique :

    « § 65. En dernier lieu, la circonstance que certains ministres auraient délivré, lors de leurs interventions à l’Assemblée nationale et dans les médias, des estimations initialement erronées sur le montant des pensions de retraite qui seront versées à certaines catégories d’assurés, est sans incidence sur la procédure d’adoption de la loi déférée dès lors que ces estimations ont pu être débattues. » Enorme !

    « § 69. D’autre part, la circonstance que plusieurs procédures prévues par la Constitution et par les règlements des assemblées aient été utilisées cumulativement pour accélérer l’examen de la loi déférée, n’est pas à elle seule de nature à rendre inconstitutionnel l’ensemble de la procédure législative ayant conduit à l’adoption de cette loi. » Enorme !

    « § 70. En l’espèce, si l’utilisation combinée des procédures mises en œuvre a revêtu un caractère inhabituel, en réponse aux conditions des débats, elle n’a pas eu pour effet de rendre la procédure législative contraire à la Constitution. Par conséquent, la loi déférée a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution. » Enorme !

    « § 11. D’autre part, si les dispositions relatives à la réforme des retraites, qui ne relèvent pas de ce domaine obligatoire, auraient pu figurer dans une loi ordinaire, le choix qui a été fait à l’origine par le Gouvernement de les faire figurer au sein d’une loi de financement rectificative ne méconnaît, en lui-même, aucune exigence constitutionnelle. Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur à cet égard, mais uniquement de s’assurer que ces dispositions se rattachent à l’une des catégories mentionnées à l’article L.O. 111-3-12 du Code de la sécurité sociale. » Enorme !

    Le Conseil constitutionnel reconnaît ainsi que des ministres ont délivré des « estimations erronées » lors des débats parlementaires, que plusieurs procédures ont été utilisées « cumulativement » pour accélérer l’adoption de la loi et que l’utilisation combinée des procédures mises en œuvre a un « caractère inhabituel ».

    Un doute sur le bien-fondé juridique de la décision

    Il était donc logique en droit qu’il en conclue que le principe de clarté et de sincérité des débats parlementaires n’avait pas été respecté. Or, il juge que tous ces défauts ne rendent pas inconstitutionnel l’ensemble de la procédure législative...

    #paywall

    • La bourgeoisie se moque bien de la façade de ses institutions, du moment qu’elles imposent sa loi.

      Car en quoi le changement de numéro de la république pourrait empêcher les grandes fortunes, les capitalistes, d’imposer leur loi sur la société ? En quoi empêcherait-il les plans de licenciements des grandes entreprises et le développement du chômage ? En quoi une 6e République pourra-t-elle empêcher un patron du Medef (les véritables tauliers) de réclamer la baisse du smic, les 45 heures, la retraite à 67 ans, la liquidation des derniers services publics, etc. ?

      En rien.

      Car si les grandes familles bourgeoises font ce qu’elles veulent, cela ne repose pas sur la Constitution mais sur la propriété de leurs capitaux. C’est cela qui décide fondamentalement des politiques de l’État, pas les politiciens qui s’y succèdent.

      La bourgeoisie se moque bien de la façade de ses institutions, du moment qu’elles imposent sa loi. Et encore plus des discours tonitruants des lieutenants de LFI.

    • On peut passer à la 6ème république et continuer la lutte dans les entreprises pour reprendre le pouvoir. L’un n’empêche pas l’autre.@recriweb

      Pourquoi la validation de la réforme par le CC est une bonne nouvelle
      https://blogs.mediapart.fr/rpozzo/blog/150423/pourquoi-la-validation-de-la-reforme-par-le-cc-est-une-bonne-nouvell

      Attendre d’une brochette de 9 hauts fonctionnaires ou anciens ministres 100% Macron compatibles - d’une moyenne d’âge de 72 ans et payés 13 000 € par mois - qu’ils s’opposent à la sacro-sainte volonté présidentielle d’envoyer tout le monde au turbin jusqu’à 64 ans relevait de l’illusion ou de la naïveté dans le meilleur des cas. C’est donc sans plus d’étonnement que la demande de RIP (Référendum d’Initiative Populaire) pour proposer de bloquer l’âge de départ à 62 ans s’est vu rejetée. La raison ? La loi actuelle prévoyant déjà un départ à 62 ans, le CC n’a pas jugé utile un référendum. En plus d’être une insulte envoyée à la figure du peuple français et de son intelligence, c’est une vraie déclaration de guerre.

      Cet horizon qu’offrait la validation par le Conseil Constitutionnel a surtout permis au gouvernement de souffler un peu. Depuis le déclenchement du 49,3 par Elisabeth Borne, on voit clairement le pouvoir claquer des fesses face à la colère de la “foule illégitime”, les manifestations spontanées et quelques feux de poubelles. En bref, le spectre d’un retour d’un Gilets Jaunes 2.0. La date du 14 avril permettait surtout de continuer - ou en tout cas continuer d’essayer - de faire croire que le “texte suivait son cheminement démocratique”, comme si tout était normal, comme si tout allait rentrer dans l’ordre une fois le texte validé par les 9 et que la colère populaire aller s’évaporer devant la sagesse du conseil.

      Pour le gouvernement, cet épisode a constitué une vraie aubaine : Macron dans Pif, Dussopt dans Têtu et Schiappa dans PlayBoy, relance du sujet de l’immigration pour “écraser le sujet des retraites”, sans oublier les grands médias qui ont bien mis l’accent sur le retour de Quatennens dans le groupe LFI, tout est fait pour parler de tout sauf des retraites. De toute façon c’est inutile, attendons l’avis du Conseil Constitutionnel !

      Ce qui est décevant, c’est plutôt la position de l’intersyndicale qui une fois de plus s’est calée sur l’agenda du gouvernement et des institutions. Plutôt que de cultiver la colère de “la base” syndicale et militante engendrée par le 49.3 en décrétant la grève générale et reconductible dès le lendemain, l’intersyndicale ne dévie pas de sa ligne Berger et persiste à jouer les bons élèves. Oui, organiser une grève nationale se prépare. Oui, dès le choix d’un projet de loi de finances, on savait que le 49.3 avait de grandes chances d’être utilisé. Si on reprend les différentes journées de grèves éparpillées de semaine en semaine, elles ont été positionnées avant des échéances institutionnelles :

      16 février : veille du dernier jour de l’examen du texte à l’assemblée

      7 mars : veille du débat de la réforme au Sénat

      15 mars : jour du passage du texte devant la commission mixte parlementaire

      13 avril : veille du passage du texte devant le conseil constitutionnel

      Une stratégie assumée pour “mettre la pression” sur les parlementaires pendant l’examen du texte et avant les différents votes. Une stratégie systématiquement mise en échec : aucune des journées de manifestation n’a eu d’impact sur le “chemin démocratique” du texte. Ni les députés, ni les sénateurs, ni le gouvernement et depuis vendredi ni le conseil des sages n’a flanché. Comme dirait le bodybuilder du boulevard de Grenelle entre deux bouchées de steak tartare, personne n’a craqué.

      Forcément, les déambulations Bastille Nation ne font plus peur à personne. Et ça “la base” l’a vite compris. C’est assez frappant de voir le fossé entre les volontés des manifestants de durcir le mouvement, de mener des blocages, de mettre l’économie à genoux et la ligne de l’intersyndicale qui n’a pas bougé en trois mois de mobilisation. Nous pouvons déjà parler d’échec de l’intersyndicale qui, a trop vouloir respecter le jeu des institutions, n’a pas su capitaliser sur la colère et la détermination des travailleurs et des travailleuses. Parce qu’elle a cru possible de faire entendre raison et faire renoncer un gouvernement à son projet de réforme purement idéologique par la discussion, par la rationalité, l’argumentation. Par le jeu des institutions. Si victoire du camp social il y a, elle sera entièrement due aux mobilisations et initiatives de la base. L’intersyndicale n’a pas su instituer un rapport de force, alors qu’elle disposait de la plus grande mobilisation de travailleurs et de travailleuses depuis 30 ans.

      Voilà pourquoi la validation du texte par le Conseil Constitutionnel est une bonne chose pour le mouvement social. Les syndicats ne vont plus pouvoir “tenir leur base”, expression entendue à longueur d’émissions. Rien que cet élément de langage montre à quel point les bourgeois sont effrayés par le peuple. Un peuple qui pourtant se tient très sage, qui manifeste calmement, qui demande simplement à être écouté. Pourquoi ? Parce que les gens sont raisonnables, persuadés de vivre encore dans une démocratie fonctionnelle. Et qu’ont-ils obtenu en retour ? Mépris et coups de matraques. Les dirigeants syndicaux ne tiennent rien du tout, à part à leur place dans les matinales. Et j’espère que la suite du mouvement le prouvera.

      Parce que maintenant, que reste-t-il pour canaliser les colères ? Pour temporiser ? Plus rien, à part l’abandon de la réforme par Macron himself. C’est maintenant une confrontation directe entre lui et nous. La victoire ne viendra pas d’une rencontre entre Borne et les syndicats. Elle ne viendra pas des députés ou sénateurs d’opposition. Elle viendra par nous, et nous seuls. Désormais, nous allons dicter l’agenda. Nous allons décider des blocages, sabotages et des grèves reconductibles. Nous allons déclencher des manifestations spontanées. Nous allons aller jusqu’au retrait. Nous allons aller le chercher.

      Dehors les Bergers maintenant, place aux loups.

      R.Pozzo

    • Merci @marielle ! Je cite la fin, un bijou :

      Si victoire du camp social il y a, elle sera entièrement due aux mobilisations et initiatives de la base. L’intersyndicale n’a pas su instituer un rapport de force, alors qu’elle disposait de la plus grande mobilisation de travailleurs et de travailleuses depuis 30 ans.

      Voilà pourquoi la validation du texte par le Conseil Constitutionnel est une bonne chose pour le mouvement social. Les syndicats ne vont plus pouvoir “tenir leur base”, expression entendue à longueur d’émissions. Rien que cet élément de langage montre à quel point les bourgeois sont effrayés par le peuple. Un peuple qui pourtant se tient très sage, qui manifeste calmement, qui demande simplement à être écouté. Pourquoi ? Parce que les gens sont raisonnables, persuadés de vivre encore dans une démocratie fonctionnelle. Et qu’ont-ils obtenu en retour ? Mépris et coups de matraques. Les dirigeants syndicaux ne tiennent rien du tout, à part à leur place dans les matinales. Et j’espère que la suite du mouvement le prouvera.
      [...]
      Désormais, nous allons dicter l’agenda. Nous allons décider des blocages, sabotages et des grèves reconductibles. Nous allons déclencher des manifestations spontanées. Nous allons aller jusqu’au retrait. Nous allons aller le chercher.

      Dehors les Bergers, maintenant, place aux loups.

    • @marielle Pourquoi passer à la 6eme République si ça ne sert à rien ?

      Ou pire, contrairement à ce que tu dis, si ça sert à éviter « de faire des grèves coûteuses », « qui grèvent votre budget », ou « des manifestations rendues dangereuses [par le préfet Lallemand] » (sic, Mélenchon) ?

      Mélenchon est un social-démocrate. Il aspire à servir sa classe possédante (et son impérialisme) en maintenant la paix sociale avec des chimères du genre « 6e République ».

      Évitons de tomber dans ces vieux panneaux poussiéreux.