Maroc et corruption médiatique : deux absents obsédants au tribunal de Paris
Par Daniel Schneidermann
| Arrêt sur images
▻https://beta.arretsurimages.net/chroniques/maroc-et-corruption-mediatique-deux-absents-absents-au-tribunal
Ni la journaliste Mireille Duteil, ni le directeur du Point Etienne Gernelle, ne sont venus assister au procès en diffamation à propos du Maroc, intenté à Arrêt sur images et Orient XXI.
Pourquoi ? Mais pourquoi diable Mireille Duteil, journaliste retraitée du Point, et son ex-journal, ont-ils décidé de nous poursuivre pour diffamation ? C’est la question qui m’a poursuivi, toute l’après-midi d’hier, sur le banc inconfortable de la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, où je comparaissais, en compagnie de mes confrères Alain Gresh et Olivier Quarante, poursuivis par la même Mireille Duteil, et le même Le Point, pour la même affaire de corruption présumée de journalistes français par le Maroc.
Et si Mireille Duteil et Le Point se sont sentis diffamés, pourquoi eux seuls ? Pourquoi pas les trois autres journalistes français également cités dans cette affaire dite des #marocleaks, Dominique Lagarde (L’Express), José Garçon (Libération) et Vincent Hervouët (LCI) ? Mireille Duteil s’est-elle sentie davantage diffamée que ses confrères ? Le Point est-il un journal particulièrement sensible ? Il est vrai que Etienne Gernelle, directeur du Point, semble avoir un désir irrépressible de trainer en Justice notre petite équipe. Je vous avais raconté l’an dernier le procès ahurissant qu’il nous avait fait à propos d’une chronique d’Alain Korkos, affaire dans laquelle, bien entendu, nous avons été relaxés, et Gernelle débouté.
Toutes ces questions torturantes se doublaient d’une autre. Si Mireille Duteil et Etienne Gernelle se sont sentis à ce point diffamés par ma chronique, titrée « Maroc : le retour de l’abominable vénalité de la presse française ? », pourquoi aucun des deux n’a-t-il eu le courage de venir affronter à la barre les odieux diffamateurs que nous sommes ? Pourquoi Mireille Duteil n’est-elle pas venue clarifier le statut de sa collaboration avec L’Observateur du Maroc , publication confidentielle dont le directeur, Ahmed Charai, est un proche du pouvoir marocain ? Pourquoi n’est-elle pas simplement venue dire si elle était payée pour cette abondante collaboration, et si oui, combien ? Pourquoi Gernelle (ou son prédecesseur Franz-Olivier Giesbert) ne sont-ils pas venus dire s’ils connaissaient l’existence de cette pige, et si cela ne constituait pas, à leurs yeux, un conflit d’intérêt dans sa couverture du Maghreb pour un grand hebdomadaire indépendant comme Le Point ? Pourquoi ne sont-ils pas venus expliquer les raisons du black out, dans Le Point, hebdomadaire indépendant, sur le conflit du Sahara occidental, à enjeu stratégique pour le pouvoir marocain ?