• [Talk From Homografía] Talk From Homografía #27
    https://www.radiopanik.org/emissions/talk-from-homografia/talk-from-homografia-27

    ce mois-ci TFH se penche sur la question de la #santé_mentale, en particulier celle de nos amis pédés.

    Invité.x.s

    Arturo Mazzeo, Psychologue Clinicien, référent santé mentale et chargé du projet Chemsex, Ex Aequo

    Hugo Mega, coach transformatif spécialisé en dynamiques de genre et thérapie des images subconscients, Liminal

    qques ref d’Hugo : https://www.labonnepoire.be https://www.helloasso.com/associations/noussommes https://www.facebook.com/events/213857235000513 https://trestresbonmedecin.be https://www.planf.be/Sante-LGBTQI https://epicentre.brussels

    Team

    Réalisation : Suzy Q Host.ess : Prinzessin & King (...)

    #visibilité #masculinité•e•s #santé_mentale,visibilité,masculinité•e•s
    https://www.radiopanik.org/media/sounds/talk-from-homografia/talk-from-homografia-27_17160__1.mp3

  • #Chowra_Makaremi : « Le #viol devient le paradigme de la loi du plus fort dans les #relations_internationales »

    En #Ukraine, Poutine revendique de faire la guerre au nom du genre. En #Iran, le régime réprime implacablement la révolution féministe. Dans d’autres pays, des populistes virilistes prennent le pouvoir. Une réalité que décrypte l’anthropologue Chowra Makaremi.

    IranIran, Afghanistan, invasion russe en Ukraine, mais aussi les discours des anciens présidents Donald Trump ou Jair Bolsonaro ou du chef de l’État turc, Recep Tayyip Erdogan : tous ont en commun de s’en prendre aux #femmes, comme l’explique l’anthropologue Chowra Makaremi.

    L’autrice de Femme ! Vie ! Liberté ! Échos du soulèvement en Iran (La Découverte, 2023) fait partie des chercheuses sollicitées par Mediapart pour #MeToo, le combat continue, l’ouvrage collectif publié récemment aux éditions du Seuil et consacré à la révolution féministe qui agite le monde depuis l’automne 2017 et le lancement du fameux mot-clé sur les réseaux sociaux. Depuis, toutes les sociétés ont été traversées de débats, de controverses et de prises de conscience nouvelles. Entretien.

    Mediapart : « Que ça te plaise ou non, ma jolie, il va falloir supporter. » Cette phrase a été prononcée le 7 février 2022 par le président russe, #Vladimir_Poutine, devant Emmanuel Macron. Elle était adressée à l’Ukraine et à son président, Volodymyr Zelensky, qui venait de critiquer les accords de Minsk, signés en 2015 pour mettre fin à la guerre dans le Donbass. Quelle lecture en faites-vous ?

    Chowra Makaremi : Le viol devient le paradigme de la #loi_du_plus_fort dans les relations internationales. La philosophe #Simone_Weil souligne dans un texte combien la #guerre relève de la logique du viol, puisque sa matrice est la #force qui, plus que de tuer, a le pouvoir de changer l’être humain en « une #chose » : « Il est vivant, il a une âme ; il est pourtant une chose. [L’âme] n’est pas faite pour habiter une chose ; quand elle y est contrainte, il n’est plus rien en elle qui ne souffre violence », écrit-elle.

    Cette comptine vulgaire de malfrats que cite #Poutine dit la culture criminelle qui imprègne sa politique. Elle me fait penser à ce que l’anthropologue Veena Das nomme la dimension voyou de la souveraineté étatique : la #truanderie comme n’étant pas seulement un débordement illégitime du pouvoir mais, historiquement, une composante de la #souveraineté, une de ses modalités.

    On le voit avec le pouvoir de Poutine mais aussi avec ceux de #Narendra_Modi en #Inde (dont parle Veena Das), de #Donald_Trump aux #États-Unis, de #Jair_Bolsonaro au #Brésil, de #Recep_Tayyip_Erdogan en #Turquie. Quand Poutine a dit sa comptine, personne n’a quitté la salle, ni Emmanuel Macron ni la presse, qui a cherché, au contraire, à faire parler la symbolique de cette « remarque ». Tout le réseau de sens et de connexions qui permet à cette cruelle boutade de tenir lieu de discours guerrier intuitivement compréhensible et audible montre que le type d’#outrage dont elle relève est une #transgression qui appartient, à la marge, à l’#ordre.

    On parle de la #masculinité_hégémonique au pouvoir avec Poutine, mais elle fait écho à celle de nombreux autres chefs d’État que vous venez de citer. Quelles sont les correspondances entre leurs conceptions de domination ?

    Il n’y a pas, d’un côté, les théocraties comme l’Iran et l’Afghanistan, et, de l’autre, les populismes virilistes de Trump, Erdogan, Bolsonaro, qui s’appuient sur des « #paniques_morales » créées par la remise en cause des rôles traditionnels de #genre, pour s’adresser à un électorat dans l’insécurité. Bolsonaro, très lié à l’armée et à l’Église, s’est appuyé sur je ne sais combien de prêcheurs pour mener sa campagne. Dimension religieuse que l’on retrouve chez Poutine, Modi, Erdogan.

    La #religion est un des éléments fondamentaux d’un #pouvoir_patriarcal très sensible à ce qui peut remettre en question sa #légitimité_symbolique, sa #domination_idéologique, et dont la #puissance est de ne pas paraître comme une #idéologie justement. Cette bataille est menée partout. Il y a un même nerf.

    Quand l’anthropologue Dorothée Dussy parle de l’inceste et de sa « fonction sociale » de reproduction de la domination patriarcale, son analyse est inaudible pour beaucoup. C’est ainsi que fonctionne l’#hégémonie : elle est sans pitié, sans tolérance pour ce qui peut en menacer les ressorts – et du même coup, en cartographier le pouvoir en indiquant que c’est là que se situent les boulons puisque, précisément, la puissance de l’hégémonie est dans l’invisibilité de ses boulons.

    Si on prend le #droit_de_disposer_de_son_corps, en Occident, il s’articule autour de la question de la #santé_contraceptive et du #droit_à_l’avortement et dans les mondes musulmans, autour de la question du #voile. De façon troublante, une chose est commune aux deux situations : c’est le viol comme la vérité des rapports entre genres qui organise et justifie la #contrainte sur les femmes à travers leur #corps.

    En Occident, le viol est le cas limite qui encadre juridiquement et oriente les discussions morales sur l’#avortement. Dans les sociétés musulmanes, la protection des femmes – et de leur famille, dont elles sont censées porter l’honneur – contre l’#agression_masculine est la justification principale pour l’obligation du voile. Il y a de part et d’autre, toujours, cet impensé du #désir_masculin_prédateur : un état de nature des rapports entre genres.

    C’est ce qu’assènent tous les romans de Michel Houellebecq et la plupart des écrits du grand Léon Tolstoï… « L’homme est un loup pour l’homme, et surtout pour la femme », dit un personnage du film Dirty Dancing. Cette population définie par ces rapports et ces #pulsions, il s’agit de la gouverner à travers l’#ordre_patriarcal, dont la domination est posée dès lors comme protectrice.

    L’Iran et l’#Afghanistan figurent parmi les pays les plus répressifs à l’encontre des femmes, les régimes au pouvoir y menant un « #apartheid_de_genre ». Concernant l’Afghanistan, l’ONU parle même de « #crime_contre_l’humanité fondé sur la #persécution_de_genre ». Êtes-vous d’accord avec cette qualification ?

    Parler pour la persécution de genre en Afghanistan de « crime contre l’humanité » me semble une avancée nécessaire car elle mobilise les armes du #droit pour désigner les #violences_de_masse faites aux femmes et résister contre, collectivement et transnationalement.

    Mais il me paraît tout aussi important de libérer la pensée autour de la #ségrégation_de_genre. À la frontière entre l’Iran et l’Afghanistan, au #Baloutchistan, après la mort de Jina Mahsa Amini en septembre 2022, les femmes sont sorties dans la rue au cri de « Femme, vie, liberté », « Avec ou sans le voile, on va vers la révolution ». Dans cette région, leur place dans l’espace public n’est pas un acquis – alors qu’il l’est à Téhéran – et elles se trouvent au croisement de plusieurs dominations de genre : celle d’un patriarcat traditionnel, lui-même dominé par la puissance étatique centrale, iranienne, chiite.

    Or, en participant au soulèvement révolutionnaire qui traversait le pays, elles ont également renégocié leur place à l’intérieur de ces #dominations_croisées, chantant en persan, avec une intelligence politique remarquable, le slogan des activistes chiliennes : « Le pervers, c’est toi, le salopard, c’est toi, la femme libérée, c’est moi. »

    C’est en écoutant les femmes nommer, en situation, la #ségrégation qu’on saisit le fonctionnement complexe de ces #pouvoirs_féminicides : en saisissant cette complexité, on comprend que ce n’est pas seulement en changeant des lois qu’on les démantèlera. On se trouve ici aux antipodes des #normes_juridiques, lesquelles, au contraire, ressaisissent le réel dans leurs catégories génériques. Les deux mouvements sont nécessaires : l’observation en situation et le #combat_juridique. Ils doivent fonctionner ensemble.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/040124/chowra-makaremi-le-viol-devient-le-paradigme-de-la-loi-du-plus-fort-dans-l

  • Luttes féministes à travers le monde. Revendiquer l’égalité de genre depuis 1995

    Les #femmes, les filles, les minorités et diversités de genre du monde entier continuent à subir en 2021 des violations de leurs #droits_humains, et ce tout au long de leur vie. En dépit d’objectifs ambitieux que se sont fixés les États pour parvenir à l’#égalité_de_genre, leur réalisation n’a à ce jour jamais été réellement prioritaire.

    Les progrès réalisés au cours des dernières décennies l’ont essentiellement été grâce aux #mouvements_féministes, aux militant.es et aux penseur.ses. Aujourd’hui, la nouvelle génération de féministes innove et donne l’espoir de faire bouger les lignes par son inclusivité et la convergence des luttes qu’elle prône.

    Cet ouvrage intergénérationnel propose un aperçu pédagogique à la thématique de l’égalité de genre, des #luttes_féministes et des #droits_des_femmes, dans une perspective historique, pluridisciplinaire et transnationale. Ses objectifs sont multiples : informer et sensibiliser, puisque l’#égalité n’est pas acquise et que les retours en arrière sont possibles, et mobiliser en faisant comprendre que l’égalité est l’affaire de tous et de toutes.

    https://www.uga-editions.com/menu-principal/nos-collections-et-revues/nos-collections/carrefours-des-idees-/luttes-feministes-a-travers-le-monde-1161285.kjsp

    Quatrième conférence mondiale sur les femmes


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Quatri%C3%A8me_conf%C3%A9rence_mondiale_sur_les_femmes

    #féminisme #féminismes #livre #résistance #luttes #Pékin #Quatrième_conférence_mondiale_sur_les_femmes (#1995) #ONU #diplomatie_féministe #monde #socialisation_genrée #normes #stéréotypes_de_genre #économie #pouvoir #prise_de_décision #intersectionnalité #backlash #fondamentalisme #anti-genre #Génération_égalité #queer #LGBTI #féminisme_décolonial #écoféminisme #masculinité #PMA #GPA #travail_du_sexe #prostitution #trafic_d'êtres_humains #religion #transidentité #non-mixité #espace_public #rue #corps #écriture_inclusive #viols #culture_du_viol

  • Les femmes ne fonctionnent pas comme les hommes

    « - Ça fait 4 ans que j’essaie de féminiser cette émission mais les femmes c’est tjs ‘je ne parlerai que dans le domaine où je suis compétente’
    – Mais si elles préfèrent ne pas raconter n’importe quoi, c’est peut-être une bonne chose non...? » @landais_camille, juste et drôle 🙏🏼

    https://twitter.com/NegarHaeri/status/1713143416811405462

    #femmes #télé #TV #féminisation #experts #compétence #sous-représentation #hommes #tutologie #genre

  • [Talk From Homografía] #talk From Homografía #24
    https://www.radiopanik.org/emissions/talk-from-homografia/talk-from-homografia-24

    Nous discuterons de la question et de bien d’autres avec Hugo Mega, l’initiateur de Liminal qui a animé un workshop au dernier festival Homografía. Invité unique de cet épisode, Hugo est aussi le fondateur de Male Identities, un projet dédié à l’animation de conversations et d’ateliers autour de la #déconstruction du patriarcat, du conditionnement personnel et de la conscience incarnée.

    Hugo Mega, coach et thérapeute, Liminal

    Host, #musique : Prinzessin

    Réalisation, musique : Suzy Q

    #transformation #masculinité.s #coaching #musique,talk,déconstruction,transformation,masculinité.s,coaching
    https://www.radiopanik.org/media/sounds/talk-from-homografia/talk-from-homografia-24_16599__1.mp3

  • est une vieille dame saine et équilibrée (hum...), vous le savez bien, alors elle n’est ni du côté des un(e)s, ni du côté des autres. C’est seulement qu’elle ne comprend pas comment le monde parvient encore à jouer les vierges effarouché(e)s à chaque fois qu’une attaque, qu’une « opération spéciale » ou qu’une guerre se déclenche ou se réveille quelque part. La vie est une s***perie, Sapiens Sapiens est la pire des s***peries au sein de la vie, la masculinité est la pire des s***peries parmi les Sapiens Sapiens — c’est ainsi depuis des centaines de milliers d’années et on continue à dire « Ah bah ça alors ! Un conflit ! Comment est-ce donc possible ? On ne s’y attendait pas du tout ! »

    Amusez-vous à dresser la liste des États, des pays ou plus globalement des entités territoriales-économiques-politiques-religieuses-ethniques qui ne sont pas impliqué(e)s dans une guerre, officiellement ou en soum-soum, là, aujourd’hui, en vendémiaire 232 : vous n’en trouverez aucun(e), ou quasiment aucun(e) — d’ailleurs les rares qui ne le seraient pas à l’instant T prennent juste une petite pause avant de retourner dans la mêlée.

    Les seules solutions ? Le kimilsungisme-kimjongilisme-kimjongunisme ou la fin du monde.

  • L’espace public des hommes entre eux, une forme notoire de sexualité secrète
    https://metropolitiques.eu/L-espace-public-des-hommes-entre-eux-une-forme-notoire-de-sexualite-

    La sexualité secrète entre hommes est au cœur de cet épisode de l’émission « Le #genre en ville ». Laurent Gaissad, socio-anthropologue, revient sur les modalités de rencontre entre hommes, et sur la marginalisation sociale, spatiale et temporelle de leurs pratiques sexuelles. Émission : Le genre en ville Laurent Gaissad montre l’existence d’une recomposition territoriale et temporelle des espaces urbains lorsqu’ils deviennent des lieux de drague. L’organisation spatiale du désir décrite dans cet #Podcasts

    / sexualité, homosexualité, masculinité, genre

    #sexualité #homosexualité #masculinité

  • Plongée ethnographique dans un club de #boxe d’un #ghetto de #Chicago
    https://metropolitiques.eu/Plongee-ethnographique-dans-un-club-de-boxe-d-un-ghetto-de-Chicago.h

    Jeune sociologue, Loïc Wacquant a enquêté dans un club de boxe du ghetto de Chicago à la fin des années 1980. Il montrait que les boxeurs se protègent de la rue et de ses dangers en exposant leurs corps aux coups. Son dernier livre nous plonge dans les archives et les photos de cette enquête qui a fait date. Cet ouvrage sur la boxe est particulièrement original, puisqu’il comprend de nombreuses photos du temps où son auteur, alors étudiant en sociologie à l’Université de Chicago, explorait le ghetto #Commentaires

    / boxe, #sport, masculinité, ghetto, #États-Unis, Chicago, #ethnographie, #photographie

    #masculinité
    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met-marliere.pdf

  • Hardi, compagnons ! (Clara Schildknecht) // Les éditions Libertalia
    https://www.editionslibertalia.com/catalogue/poche/hardi-compagnons

    Masculinités et virilité anarchistes à la Belle Époque

    Cet ouvrage aborde d’une façon novatrice, par le prisme de la domination de genre, un sujet d’études déjà défriché par les historien·nes : la constellation anarchiste française, dans ses diverses composantes (syndicalistes, illégalistes, milieux libres), entre 1871 et 1920.
    On y croise Ravachol et la bande à Bonnot, Émile Pouget, Louise Michel, Rirette Maîtrejean, Vigo, Libertad, Madeleine Pelletier, Germaine Berton, E. Armand, Henriette Roussel...
    L’autrice analyse le rapport à la violence souvent héroïsée et s’interroge sur la glorification virile, l’homophobie et la phraséologie misogyne qui avaient trait dans le milieu. Elle aborde la réappropriation des marqueurs de virilité par certaines militantes, le paraître libertaire, les tentatives d’égalité. Ce faisant, elle propose une relecture stimulante et passionnante de ces années charnières.

    Clara Schildknecht est enseignante. Ce livre est issu d’un M2 soutenu au Centre d’histoire du XIXe siècle de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

    Je n’ai pas lu mais le sujet me semble très intéressant (dans ma liste).

    • Venant juste de terminer la lecture de ce livre, je propose cette #recension.

      De l’antiféminisme légendaire de Proudhon jusqu’aux remous provoqués par l’onde de choc MeToo dans les mouvements les plus radicaux, la « masculinité et virilité anarchiste », loin de ne constituer qu’un sujet d’étude abstrait, est une constante qui traverse l’histoire du mouvement libertaire.

      La critique de l’anarchisme « réellement existant ou ayant existé », si l’on peut dire, sous l’angle de son contenu intrinsèquement masculiniste, semble une approche des plus stimulantes. Cela devrait contribuer à débarrasser les fondamentaux libertaires de l’une de ses scories récurrentes, parmi les plus pénibles.

      L’étude de Clara Schildknecht, Hardi Compagnons ! ne concerne que la période dite de « la Belle époque ». Il s’agit, dans l’histoire du mouvement anarchiste français, d’une séquence historique importante.

      C’est à cette période que se sont constituées les différentes tendances, dans la continuité du collectivisme antiautoritaire de la première internationale : communistes libertaires, auteurs d’attentats (propagande par le fait), syndicalistes révolutionnaire et individualistes.

      Quelle que soit la tendance, on glorifie le rôle strictement masculin du « compagnon » anarchiste, lequel, par son tempérament viril sera supposé être le plus à même de provoquer le salut révolutionnaire.

      La place qu’occupent les femmes, de façon générale, dans la vie des anarchistes est des plus accessoires. On s’adresse, par exemple, aux mères, nécessairement cantonnées au rôle de l’éducation des enfants, pour les convaincre des bienfaits de la propagande antimilitariste. On est loin des audaces radicales, réellement émancipatrices, de Fransisco Ferrer.

      Les théorises anarchistes de cette époque comportent parfois une critique des instituions patriarcales et religieuses telles que le mariage ou des rôles assignés aux femmes dans la procréation, notamment dans les théories néomalthusiennes. Il n’en reste pas moins que la critique est formulée de façon ultra majoritaire par des hommes. Il n’est pas question de remettre en cause la place occupée par les femmes dans la société en tant qu’opprimées ni même d’envisager que puisse exister l’expression autonome de cette dénonciation par les femmes elles-mêmes.

      Les « compagnes », dans les communautés individualistes, sont considérées le plus souvent comme faire-valoir de « l’amour libre ». Si on leur reconnaît le droit à ne pas limiter leur sexualité à un seul partenaire c’est aussi pour que les hommes puissent mieux en profiter.

      L’autrice montre que les représentations dominantes de l’époque, en matière de discrimination de genre, sont bien inscrites dans les esprits, fussent-ils anarchistes.

      Lorsque certaines femmes accèdent au statut reconnu par la société d’anarchiste à part entière, c’est pour mieux en faire des sortes de créatures extraordinaires, à la fois fascinantes et repoussantes. Ces femmes anarchistes sont probablement alors perçues comme étant encore plus mystérieuses que leur alter ego masculins, tel Ravachol qui s’efforce, notamment lors de son procès, de présenter toutes les marques de virilité – courage et absence de peur - pour affirmer sa défiance et son opposition à l’autorité de l’État.

      Quand Louise Michel ou Henriette Roussel revendiquent l’usage de la violence révolutionnaire, elles sont systématiquement renvoyées, dans la représentation de l’époque, à leur supposée laideur physique. Bien entendu, les anarchistes ne reprennent pas à leur compte ces stéréotypes dégradants mais ils n’échappent pas aux représentations de l’être extraordinaire au sens propre du terme, parce que femme et s’exprimant par la violence, en tant que révolutionnaire anarchiste.
      Remarque personnelle : on peut considérer qu’il s’agit de représentations profondes et tenaces qui se sont manifestées notamment lors de l’enterrement de notre brave Louise Miche, femme du peuple, et qui lui vaudront le statut d’icône quasi-religieux dont elle fait l’objet, encore aujourd’hui, dans les milieux libertaires.

      L’autrice nous révèle qu’il n’y a visiblement pas pire injure dans le mouvement anarchiste de l’époque (et probablement la classe ouvrière) que celle, déjà en usage de « tante » ou de « tapette ». Miguel Almeyreda, par exemple, en fera les frais. On moquera sa tendance à porter de beaux habits, histoire de lui reprocher, de façon détournée, son ralliement à Gustave Hervé.

      Enfin, il est rappelé que les revendications féministes, le plus souvent, ravalées sous le sobriquet méprisant de « suffragettes » sont alors majoritairement considérées, dans les milieux anarchistes, comme des fantaisies réformistes.

      Considérant que l’anarchisme est partie constitutive du mouvement ouvrier, il serait probablement erroné de considérer qu’à la même époque, l’idéologie masculiniste et misogyne ne s’exprimait pas de façon tout aussi caricaturale dans les autres tendances socialistes de l’époque. Une étude plus générale, si elle n’existe pas déjà, serait fort utile pour évaluer cette hypothèse.

      Voilà, en tout cas, qui devrait nous interroger sur le fait que, dans 100 ans, s’il y a encore du monde sur cette planète en mesure de formuler des critiques sociales, on mettra certainement en exergue tout un tas d’aberrations et contradictions idéologiques, alors insoupçonnées, mais portées par les mouvements radicaux de ce début du 21e siècle.

      #Clara_Schildknecht #Hardi_compagnon #anarchisme #virilisme #virilité #masculinité #sexisme #critique_sociale #féminisme #syndicalisme_révolutionnaire #individualisme

  • Masculinité positive et droits des #LGBT au #Maroc
    https://laviedesidees.fr/Masculinite-positive-et-droits-des-LGBT-au-Maroc.html

    L’égalité des sexes et des genres s’inscrit dans une mobilisation aujourd’hui planétaire. Au Maroc comme ailleurs, des activistes luttent pour faire advenir une société plus juste, dans laquelle la sexualité ne se vivrait plus dans la peur. Chercheur en biologie moléculaire à l’université Hassan II de Casablanca, Soufiane Hennani milite pour l’égalité des genres, la liberté sexuelle et les droits des personnes LGBT au Maroc. Lauréat du programme pour le changement social de l’Arab Fondation For Freedom (...) #Entretiens

    / #International, #femmes, #Entretiens_vidéo, sexualité, Maroc, égalité , #militantisme, masculinité, (...)

    #sexualité #_égalité_ #masculinité
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20230217_hennani.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20230217_hennani.docx

  • Mean Streets en libre accès jusqu’au au 31 mars (parce que quand même)
    https://www.arte.tv/fr/videos/028121-000-A/mean-streets

    Réalisé avec un petit budget et tourné caméra à l’épaule, ce film nous offre la première collaboration du cinéaste avec le tout jeune Robert De Niro. Celui-ci étoffe son rôle de gamin orgueilleux et récalcitrant par un jeu brillant qui crève l’écran. Maître de la provocation irrévérencieuse et du sourire en coin, il donne la réplique à un Harvey Keitel remarquable en jeune poulain de la #mafia.

    #film #cinéma #Scorcese #Robert_De_Niro #Harvey_Keitel #masculinité_toxique #rock #playlist #N-Y

  • Être homme sous le #nazisme
    https://laviedesidees.fr/Farges-Mailander-Marcher-au-pas-et-trebucher.html

    À propos de : Patrick Farges et Elissa Mailänder (dir.), Marcher au pas et trébucher. #masculinités allemandes à l’épreuve du nazisme et de la guerre, Presses du Septentrion. #Histoire du masculin et histoire des hommes, ce livre collectif montre que, si la masculinité nazie « idéale » s’opposait à celle des Juifs et des homosexuels, elle était elle-même questionnée et morcelée, dans la sphère privée comme à la guerre.

    #Allemagne #guerre_mondiale #homosexualité
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/202212_nazommes.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20221230_nazommes.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20221230_nazommes.pdf

  • Mascolinità in gioco lungo la Rotta Balcanica
    https://www.meltingpot.org/2022/11/mascolinita-in-gioco-lungo-la-rotta-balcanica

    Papers, una rubrica di Melting Pot per la condivisione di tesi di laurea, ricerche e studi. Per pubblicare il tuo lavoro consulta la pagina della rubrica e scrivi a collaborazioni@meltingpot.org. Alma Mater Studiorum – Università degli Studi di BolognaCorso di laurea in Antropologia, religioni, civiltà orientali Mascolinità in gioco lungo la Rotta BalcanicaUn’esplorazione critica del confine da una prospettiva di genere di Arianna Egle Ventre (Anno Accademico 2019/2020) Introduzione Non esistendo a priori, il confine è un processo in itinere che non giunge mai ad un compiutezza; è uno spazio in costruzione la cui irresolutezza è meglio descritta dal termine inglese bordering, (...)

  • Tuer les femmes, une histoire mondiale.
    Les couilles sur la table 74.
    https://www.youtube.com/watch?v=0eq4raE722k


    https://www.youtube.com/watch?v=JcwmGXs2zNs

    #fémicide - Mot inventé dans les années 1970 par les féministes de la seconde vague qui sert à nommé un crime qui n’existe pas car il est confondu avec les homicides. Le fémicide désigne un assassinat de femmes par un partenaire masculin. Ce concepts reste utilisé pendant 20 ans.

    #féminicide - Au Mexique, à Ciudad Juares les féministes montrent que les femmes n’ont pas été tuées par leur conjoint, donc le mot « féminicide » est formé pour apporté une nuance. La majorité des corps ont été supplicié, violés, mutilés, démembrés, on parle de « surmeurtre ». C’est Marcela Lagarde de los Ríos qui forge le mot en 2006 pour désigné une crime colléctif, car de très nombreux hommes sont impliqués, c’est un crime d’état car il a participé avec les cartels, il y a une tendance gynocidaire/génocidaire dans ces crimes qui cherche à détruir tout ce qui fait des femmes une groupe et un univers.

    #continuum_féminicidaire - Après #me_too on se rend compte qu’on ne peu pas parlé uniquement des partenaires intimes comme destructeurs de femmes, les agresseurs sont polymorphes car des femmes sont tuées par des membres de leur famille. En élargissant le concepts on arrive au « continum fémicidaire » car il s’agit d’un agrégat de violences que les femmes ont elles même du mal à perçevoir. (Ici je pense que les scandales sanitaires qui touchent systématiquement les femmes font partie de se continuum)

    #misogynie #masculinité #haine #terrorisme #domestication #crime_de_propriétaire #domination_masculine

    • Féminicides
      Une histoire mondiale
      Christelle Taraud
      Dans tous les pays du monde, à toutes les époques, des femmes ont été tuées parce qu’elles étaient des femmes.
      L’historienne Christelle Taraud réunit dans ce livre les meilleures spécialistes mondiales de la question, des œuvres d’artistes et d’écrivaines, des témoignages et des archives… pour comprendre le continuum de violences qui s’exerce contre les femmes depuis la préhistoire.
      Un ouvrage essentiel et inédit, autant scientifique que politique.

      Avec les contributions de Gita Aravamudan, Claudine Cohen, Silvia Federici, Rosa-Linda Fregoso, Elisa von Joeden-Forgey, Dalenda Larguèche, Patrizia Romito, Rita Laura Segato, Aminata Dramane Traoré et plus d’une centaine d’autres autrices et auteurs.

      https://www.editionsladecouverte.fr/feminicides-9782348057915

      –—

      Dans tous les pays du monde, à toutes les époques, des femmes ont été tuées parce qu’elles étaient des femmes.
      L’historienne Christelle Taraud réunit dans ce livre évènement les meilleures spécialistes mondiales de la question, des œuvres d’artistes et d’écrivaines, des témoignages et des archives… pour comprendre le continuum de violences qui s’exerce contre les femmes depuis la préhistoire. Un ouvrage essentiel et inédit, autant scientifique que politique.

      Introductions
      Une histoire mondiale des féminicides : pour quoi faire ? Par Christelle Taraud
      Quand les femmes sont tuées en raison de leur genre : le regard d’une féministe tunisienne, par Dalenda Larguèche
      Et avant l’histoire ? Introduction par Claudine Cohen
      Partie I. Chasse aux « sorcières », introduction par Silvia Federici
      Partie II. Esclavage et colonisation comme féminicide, introduction par Christelle Taraud
      Partie III. Meurtres de femmes et féminicides de masse, introduction par Rosa-Linda Fregoso
      Partie IV. Masculinismes et féminicides, introduction par Patrizia Romito
      Partie V. Féminicides et génocides, introduction par Elisa von Joeden-Forgey
      Partie VI. Normes de beauté, mutilations corporelles et annihilations identitaires, introduction par Christelle Taraud
      Partie VII. Tuer les filles, les domestiquer et les marchandiser, introduction par Gita Aravamudan
      Conclusions
      La guerre contre les femmes : un manifeste en quatre thèmes, par Rita Laura Segato
      En finir avec les féminicides par une sororité renforcée, par Aminata Dramane Traoré
      Les autrices et les auteurs

      https://www.santementale.fr/2022/09/feminicides-une-histoire-mondiale

  • Evidence and Data on Trans Women’s Offending Rates
    https://committees.parliament.uk/writtenevidence/18973/pdf

    1. The Swedish Study
    Cecilia Dhejne, Paul Lichtenstein, Marcus Boman, Anna L. V. Johansson, Niklas Långström, Mikael Landén (2011) Long-Term Follow-Up of Transsexual Persons
    Undergoing Sex Reassignment Surgery: Cohort Study in Sweden
    https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0016885

    Summary of findings
    This Swedish cohort study by Dhejne et al. (2011) followed a population of individuals who had undergone surgical and legal sex reassignment involving hormonal and surgical
    treatment between 1973 and 2003 (324 in total) and compared them to a matched control group of their birth sex. It is crucial to emphasise that this study looks only at those who have undergone hormonal and surgical transition, which is a much tighter group than individuals who self- identify as transgender.

    The primary purpose of the study was to consider whether medical transition helps patients (leads to better social and health outcomes) and to inform what support they might need post transition. It is methodologically robust, peer reviewed, large scale
    comparative source on offending rates comparing transwomen and women. It compared the likelihood of a person having one or more criminal convictions, and convictions for violent crime (defined as “homicide and attempted homicide, aggravated assault and
    assault, robbery, threatening behaviour, harassment, arson, or any sexual offense”).

    The study can be divided into two cohorts 1973-1988 and 1989-2003 with the difference being that the latter cohort received adequate mental health provision. The findings show that transsexual individuals were more likely to be criminal than non-transsexuals of the same birth sex in the first cohort (1973-1988), and no different from their birth sex in the second group (1989-2003).
    The researchers state:
    ‘male-to-females . . . retained a male pattern regarding criminality. The same was true regarding violent crime.’

    MtF transitioners were over 6 times more likely to be convicted of an offence than female comparators and 18 times more likely to be convicted of a violent offence. The group had no statistically significant differences from other natal males, for convictions in general or
    for violent offending. The group examined were those who committed to surgery, and so were more tightly defined than a population based solely on self-declaration.
    ...

    #criminalité #masculinité #transgenre #prison

    • 2. Ministry of Justice 2020 Data
      The question of whether transwomen match male or female patterns of criminality is specifically addressed by the 2020 FOI referenced by Fair Play For Women (who have submitted evidence to the Committee). This is first time there has been official data to compare the rate of sex offending in 3 different groups. Men vs women vs transwomen. The hyperlinks below link to the FOI spreadsheet.
      MOJ stats show 76 of the 129 male-born prisoners identifying as transgender (not counting any with GRCs) have at least 1 conviction of sexual offence. This includes 36 convictions for
      rape and 10 for attempted rape. These are clearly male type crimes (rape is defined as penetration with a penis).
      Here is the number compared with figures for sex offending rates in men and women over the same period.
      Comparisons of official MOJ statistics from March / April 2019 (most recent official count of transgender prisoners):

      76 sex offenders out of 129 transwomen = 58.9%
      125 sex offenders out of 3812 women in prison = 3.3%
      13234 sex offenders out of 78781 men in prison =
      16.8%

      3. Michael Biggs, ‘The Transition from Sex to Gender in English Prisons: Human Rights and Queer Theory’, SocArXiv, 17 May 20204
      On pages 10 and 11 Biggs reference the MOJ and Fair Play for Women statistics. On pager 11 he states:

      ‘Of the 125 transgender prisoners counted by the prison service in 2017, 60 had been convicted of sexual offenses, including 27 convicted of rape (BBC News 2018). In the overall prison population, by comparison, 19% of males had been convicted of sexual crimes and only 4% of females (Ministry of Justice 2018b).

      #violences_sexuelles #viols

    • The converse is the ever-increasing tide of referrals of patients in prison serving long or indeterminate sentences for serious sexual offences. These vastly outnumber the number of prisoners incarcerated for more ordinary, non-sexual, offences. It has been rather naïvely suggested that nobody would seek to pretend transsexual status in prison if this were not actually the case. There are, to those of us who actually
      interview the prisoners, in fact very many reasons why people might pretend this. These vary from the opportunity to have trips out of prison through to a desire for a transfer to the female estate (to the same prison as a co-defendant) through to the idea that a parole board will perceive somebody who is female as being less dangerous through to a [false] belief that hormone treatment will actually render one less dangerous through to wanting a special or protected status within the prison system and even (in one very well evidenced case that a highly concerned Prison Governor brought particularly to my attention) a plethora of prison intelligence information
      suggesting that the driving force was a desire to make subsequent sexual offending very much easier, females being generally perceived as low risk in this regard. I am sure that the Governor concerned would be happy to talk about this.

    • Je n’ai pas tout lu, mais... en résumé... tu nais mâle, tu restes mauvais ? Ou même en t’identifiant femelle, tu conserves les tares du patriarcat ? A moins que ce ne soit que la testostérone ? Pourtant, avec intervention chirurgicale, la testostérone est supposée réduite ?

      L’étude qui fait couler des « male tears »...

    • Je ne crois pas que l’étude donne d’explication sociologique ou psychologique ou physiologique, et se borne à la constatation de ces taux en essayant d’être solide sur la durée et un pays entier. Je suppose pour que ça serve de base à approfondir dans d’autres études plus spécifiques ensuite et sur d’autres champs de recherche.

      This suggests that the sex reassignment procedure neither increased nor decreased the risk for criminal offending in male-to-females. By contrast, female-to-males were at a higher risk for criminal convictions compared to female controls and did not differ from male controls, which suggests increased crime proneness in female-to-males after sex reassignment.

      La suggestion est que quand on a été en lien d’une manière ou d’une autre avec la masculinité soit avant (MtF), soit après changement de sexe/genre (FtM, ça ne parle pas que des nés M), cela donne des taux plus haut en criminalité que le groupe contrôle de genre femmes. Et que donc dans tous les cas la masculinité est un problème, et est difficile à s’en débarrasser quoi qu’on en dise (puisque les MtF ont un taux similaire aux M cis).

    • tu nais mâle, tu restes mauvais ? Ou même en t’identifiant femelle, tu conserves les tares du patriarcat ? A moins que ce ne soit que la testostérone ? Pourtant, avec intervention chirurgicale, la testostérone est supposée réduite ?

      J’imagine que c’est pour démontré que tu peu pas parlé de ce sujet ^^
      La testo est pas mentionné dans l’étude et si c’était l’explication les femmes qui en prennent commetraient autant de crimes sexuels que les hommes hors c’est pas le cas.

      J’ai vu nulle part mentionné les mots gentils ou méchants non plus. Les trans ne sont pas bons ou mauvais, les hommes non plus, personne n’est ontologiquement bon ou mauvais à part dans les émissions de CNews et c’est justement ce genre de pensée binaire et essentialisantes qui pause de gros pbl en ce moment. Si il y a des gens bons ou mauvais, on va pas discuter avec les mauvais, on a plus qu’a les éliminer, les erradiquer. Or il est question nulle part d’éliminer qui que ce soit (sauf les TERF qu’il faut bruler comme j’ai appris le 8 mars dernier).

      Les hommes commettent 98% des crimes sexuels ca ne veux pas dire que 98% des hommes sont des criminels sexuels. Mais ca me semble important de savoir si les hommes qui se transidentifient femmes restent un danger pour les femmes. On parle ici d’hommes qui sont en prison et faut quand même violer copieusement pour être condamné car il y a entre 1 et 5% de condamnation des viols en France. Peut être que les hommes transidentifiés sont plus susceptibles d’être incarcérés que les homme qui ne se transidentifient pas mais pour le dire il faudrait une étude.

      Aux USA et au Canada les hommes qui s’auto-identifient femmes sont incarcérés avec les femmes et ca pause des problèmes aux femmes.
      Parmis les hommes transidentifiés femmes il y a une part atteinte de dysphorie de genre mais il y a aussi une part de fétichistes sexuels appelés autogynophiles et il y a aussi une part d’opportunistes qui se servent des revendications des libfem et transactivistes pour agresser des femmes en accedant à leurs espaces.

      Perso ca m’importe de ne pas enfermé des violeurs de femmes avec les femmes juste parcequ’ils ont déclaré qu’ils se sentent femme dans leur petit cœur de violeur. On me dira qu’il y a des psys qui peuvent en décidé mais justement non, les transactivistes sont psychophobes et psychiatrophobes et ils exigent que seul leur autodéclaration soit prise en compte.

      Aussi il n’y pas bcp de monde pour s’intéresser à la place des femmes transidentifiés homme dans les prisons. C’est vrai qu’il y en a peu et qu’etant des femelles illes n’interessent que très très très secondairement.
      Faut il les mettre avec les hommes qu’ils soient opérés ou pas ?
      Et il n’y a pas que des MtF et FtM chez les trans. Que faire des gender neutres, genderfluides, agender et des 107000 genres inventés par chaque personne qui veux performer des stérotypes pour son développement personnel ?
      Et les xénogender est ce qu’il faut les mettre au zoo puisqu’ils s’auto-identifient poney, dauphin ou chaton ?
      Si on a un pédocriminel atteint du syndrome de Peter pan est-ce qu’il faut le placé dans un foyer pour mineur puisque c’est son identité et que « l’identité ne se discute pas » ?


      En France les hommes qui se transidentifient femmes ne veulent pas être avec les femmes car ils préfèrent la compagnie des hommes, leur tran-identification leur permet d’avoir une cellule seule ce qui ne serait pas le cas avec les femmes. Les prisons pour femmes sont aussi peu nombreuses et ca les arrangent pas non plus pour les visites.
      Pour plus de détail là dessus
      https://www.youtube.com/watch?v=8RKbIHijgMs

      Les études sur les personnes trans sont rares et difficiles à faire. Les transactivistes harcèlent et détruisent la carrière des chercheuses et chercheurs qui voudraient investiguer ce sujet sans adhéré à leurs croyances. J’ai moi même subit de nombreuses menace et pressions ainsi que mes proches de la part de transactivistes et libfem. D’ailleur pour cette étude suédoise il y a de telles pressions des transactivistes que les chercheurs essayent d’euphémisé leurs résultats (sur la question du suicide).
      https://www.transadvocate.com/fact-check-study-shows-transition-makes-trans-people-suicidal_n_15483

      Les hommes transidentifiés femmes sont identiques aux hommes qui ne se transidentifient pas femmes sur le plan de leur dangerosité vis à vis des femmes. D’un point de vue féministe ca m’interesse de le savoir. L’étude est pas parfaite (il me semble que la seconde cohorte comporte 2-3 ans de données en moins que la première) et une étude isolée ne dit rien. Il en faudrait d’autres.

    • L’étude semble à double tranchant. Soit les mâles finissent en prison parce qu’ils sont socialisés mâles dans l’enfance, et c’est le patriarcat qui est en cause. Soit les mâles ont des gênes spécifiques, qu’une transition ne désactive pas, et alors, ce sont les mâles en général qui sont dangereux.

    • Bah ma citation de l’étude répond et donc non @biggrizzly :

      By contrast, female-to-males were at a higher risk for criminal convictions compared to female controls and did not differ from male controls, which suggests increased crime proneness in female-to-males after sex reassignment

      Donc bah oui, ça serait bien plutôt la masculinité et le patriarcat le problème (diantre, quelle surprise).

    • Le fait que des FtM aient aussi des problèmes de violence laisserait à penser que c’est plus un problème sociologique que biologique. Dans un cas (MtF) on a une diminution de la testostérone et dans l’autre (FtM) une augmentation... mais les comportements sont globalement les même, au moins ça laisse penser que ce n’est pas une variable très pertinente (sauf à penser qu’en avoir été « imprégné » à un moment à des répercussions à long terme) . Cela dit on est d’accord que l’étude ne donne pas de réponse là dessus, ce ne sont que des suppositions.

    • Merci pour vos réponses. Je n’étais pas allé assez loin dans la lecture, mes plates excuses pour le non-effort.
      Donc, l’étude est à renouveler. Pouvoir définitivement claquer le bec de tous les flemmards qui ne peuvent s’empêcher de tout voir à travers le prisme génétique serait une bonne chose pour l’humanité.

  • ANDROCÈNE. QUEL EST LE GENRE DE L’ANTHROPOCÈNE ?

    Quelles sont les relations entre le capitalisme industriel, la destruction environnementale et le patriarcat ? En interrogeant le genre de l’Anthropocène – l’Androcène – , la revue Nouvelles Questions Féministes (NQF) porte la focale sur les acteurs qui sont responsables de la dégradation du vivant, ceux qui en ont le plus bénéficié et qui continuent d’innover en la matière.

    Important : NQF refuse l’essentialisme https://invidious.fdn.fr/watch?v=yF7cTZaYi0g&local=true

  • Antiféminisme et garçons-fleurs en Corée
    https://laviedesidees.fr/Antifeminisme-et-garcons-fleurs-en-Coree.html

    L’élection de Yoon Suk-yeol comme président de la Corée du Sud, avec sa rhétorique antiféministe, contraste avec la féminisation croissante des hommes et des garçons, particulièrement dans la K-pop. Paradoxe étonnant ou errements de la lutte contre les #inégalités ?

    #International #populisme #femmes #Asie #masculinité
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20220916_coree.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20220916_coree.pdf

  • #Colonia_per_maschi. Italiani in Africa Orientale: una storia di genere

    Quella degli italiani che combatterono o lavorarono nelle colonie africane del fascismo è una storia poco e mal conosciuta. Questo libro intende fornire un contributo di conoscenza sui comportamenti e i sentimenti di quanti, militari o civili, furono coinvolti nella colonizzazione dell’Etiopia (1935-41). Attraverso lo studio di memorie e diari inediti, ma anche della propaganda e della letteratura coloniale coeva, il volume indaga sul significato del colonialismo per gli italiani in termini di identità maschile, sia sul piano dell’esperienza vissuta che su quello dell’immaginario e della rappresentazione, pubblica e privata. Partendo dall’ipotesi della conquista coloniale come «terapia» per arginare la «degenerazione» del maschio e, in questa chiave, dal mito dell’Africa come luogo di frontiera e «paradiso dei sensi», il saggio intreccia l’analisi dei modelli maschili e delle politiche coloniali del fascismo con la ricostruzione delle esperienze quotidiane e delle percezioni di sé degli italiani. In particolare, sulla scia di molti studi coloniali stranieri focalizzati sulle variabili di genere e razza, l’analisi si sofferma sulla sfera dei complessi e multiformi contatti con gli uomini e le donne della società locale. Ne emerge un quadro articolato e contraddittorio, un complesso di relazioni tra colonizzatori e colonizzati sicuramente caratterizzato da gerarchie e razzismo, ma anche da rapporti amicali, erotici e omoerotici, paternalistici e, talora, paterni.
    Come scrive Luisa Passerini nella prefazione, questo libro è un «contributo originale [...] a un tema di grande rilevanza, che permette di comprendere meglio sia la complessità del passato recente della nazione sia le difficoltà di fare i conti con il suo retaggio coloniale».

    http://www.ombrecorte.it/vecchio/more.asp?id=129&tipo=documenta

    #colonialisme #colonisation #Italie_coloniale #colonialisme_italien #genre #femmes #livre #masculinité #identité_masculine

    –—

    ajouté à la métaliste sur la #colonialisme_italien:
    https://seenthis.net/messages/871953

    • La conquête de l’Éthiopie et le rêve d’une #sexualité sur ordonnance (1), par Marie-Anne Matard-Bonucci.

      PARTIE 1

      Le 9 mai 1936, à Rome, dans un discours retransmis par des milliers de haut-parleurs dans toute l’Italie, Mussolini annonce la conquête de l’Éthiopie. Du Palais de Venise où il est acclamé par une foule en liesse, le Duce prétend donner au monde une leçon de civilisation, célébrant le combat de l’Italie contre « l’arbitraire cruel », « l’esclavage millénaire » et la victoire de la justice sur la barbarie. La veille, dans un climat analogue, le Duce s’est adressé aux organisations féminines du régime, et a remercié les femmes d’avoir soutenu l’héroïsme de leurs frères, fils et maris en résistant aux sanctions décrétées par la Société des Nations1. Quelques mois plus tôt pour la journée de la « Foi », des cohortes de femmes avaient offert leur alliance, le don de l’anneau nuptial symbolisant l’engagement de toute la nation dans l’aventure coloniale.

      Cette communion des genres sur l’autel de l’impérialisme fasciste ne doit pas masquer que la guerre d’Éthiopie fut un pic d’exaltation de la virilité par un régime qui l’avait élevée à des sommets jamais atteints2. « Rappelez-vous que la passion des colonies est la plus masculine, la plus fière et la plus puissante qu’un Italien puisse nourrir ; aimez-les plus encore pour les sacrifices qu’elles nous ont coûtés et qu’elles nous coûteront que pour les richesses qu’elles pourront nous apporter. Préparez-vous à mesurer dans les colonies votre force de dominateur et votre pouvoir de condottiere » exhortait le maréchal Rodolfo Graziani, devenu vice-Roi d’Éthiopie en juin 19363. Guerre coloniale et fasciste, le conflit éthiopien fut pensé comme un temps fort dans la stratégie destinée à créer un « homme nouveau fasciste »4. Soldats et colons étaient invités par le Duce, le maréchal Graziani et les élites fascistes à se comporter en peuple dominateur et impitoyable. Tous les moyens furent bons pour écraser un adversaire aussi mal équipé que déterminé : emploi de gaz asphyxiants, bombardements, massacres de civils, anéantissement des élites5. L’Éthiopie fut le théâtre d’une violence extrême. Soldats et hiérarques expérimentèrent l’hubris guerrière, comme aux meilleurs temps du squadrisme, l’infériorité présumée des indigènes autorisant une cruauté particulière. Dans son journal, l’intellectuel et hiérarque fasciste Giuseppe Bottai déplorait des épisodes de barbarie dont s’étaient principalement rendus coupables des officiers et dirigeants : « Le mouton des classes moyennes devient un petit lion, confondant l’héroïsme et la cruauté »6. Starace, le secrétaire national du parti fasciste, n’avait pas hésité à donner l’exemple, se livrant à des exercices de tir sur des prisonniers tandis que des soldats prenaient la pose près de cadavres ou brandissaint des restes humains comme des trophées.

      En dépit de discours affichant un humanisme à l’italienne, les autorités fascistes ne réprimèrent pas ces pratiques barbares des combattants, jugeant plus important de modifier les comportements sur un autre terrain : celui de la sexualité. Quelques mois après le début des hostilités, les relations des Italiens avec les femmes éthiopiennes devinrent, aux yeux des élites fascistes, une véritable « question » politique et une bataille prioritaire du régime.

      Les Éthiopiennes, obscurs objets de désir

      Préparée par plusieurs décennies d’idéologie nationaliste, la conquête de l’Éthiopie avait suscité de nombreuses attentes au sein de la population italienne. Au désir des plus démunis d’accéder à la propriété foncière s’ajoutaient des motivations plus complexes où se mêlaient confusément, comme dans d’autres contextes coloniaux, exotisme et érotisme. La beauté légendaire des femmes de la région n’était pas pour rien dans l’attrait de cet Eldorado, l’espoir de les posséder apparaissant aussi légitime que la prétention à s’emparer des terres.
      Photographies d’Éthiopiennes forcément dénudées, comme dans la plupart des représentations des femmes africaines jusqu’aux années Trente, romans populaires publicités et chansons avaient aussi contribué, avant et pendant la conquête, à répandre le stéréotype de créatures à la sensualité exacerbée, offertes au plaisir de l’homme blanc7. Dans l’Italie puritaine qui n’autorisait la nudité que dans l’art, les poitrines des Éthiopiennes nourrissaient tous les fantasmes. « Les Italiens avaient hâte de partir. L’Abyssinie, à leurs yeux, apparaissait comme une forêt de superbes mamelles à portée de main » se souvient Léo Longanesi8. Pendant la guerre, de nombreux dessins humoristiques véhiculés par la presse ou des cartes postales opposaient l’image d’un peuple d’hommes arriérés et sauvages et de femmes séduisantes et avenantes9. Dans un registre qui se voulait humoristique, le dessinateur Enrico De Seta, sur une carte intitulée « Bureau de poste », montrait un soldat devant un guichet postal. Il s’apprêtait à expédier un curieux colis : une femme abyssine empaquetée dans une couverture, dont dépassaient la tête et les pieds10 !

      En 1935, la chanson Faccetta Nera, (Petite frimousse noire) avait accompagné les troupes en campagne. Composée d’abord en dialecte romain, la chanson était devenue très populaire dans sa version italienne11. Les paroles étaient à l’image des sentiments complexes des colonisateurs à l’égard des femmes africaines : volonté de possession et de domination, promesse de libération et de civilisation, désir et fascination. « Facetta Nera, Belle abyssine, attends et espère, l’heure est prochaine. Quand nous serons près de toi nous te donnerons une autre loi et un autre roi. Notre loi est esclavage d’amour, notre slogan est liberté et devoir etc. »12.

      L’imaginaire des romanciers ou chansonniers n’était pas sans rapport avec une certaine réalité des rapports hommes femmes en Éthiopie. Tandis qu’en Italie les interdits pesant sur la sexualité des femmes étaient encore très forts, l’Éthiopie offrait aux femmes, surtout aux Amharas, une liberté plus grande, les relations hors mariage n’étant pas frappées d’opprobre comme dans les sociétés catholiques européennes. Non seulement le concubinage était une pratique qui n’était pas réprouvée par l’entourage – le mariage dämòs permettait aux femmes une forme d’union contractuelle temporaire- mais il pouvait s’inscrire, comme l’ont révélé des travaux récents, du point de vue des Éthiopiennes, dans le cadre d’une stratégie d’élévation sociale, voire d’émancipation13. La pratique du madamismo était répandue, en Somalie et en Érythrée, y compris parmi les fonctionnaires et militaires de haut grade14. En Érythrée, le fonctionnaire Alberto Pollera, pour convaincu qu’il fût des bienfaits de la colonisation, et en dépit de ses responsabilités, n’en avaient pas moins six enfants de deux femmes érythréennes15. Comme l’écrit Giulia Barrera : « The madamato was a set of relationships grounded in the material basis of colonialism and shaped by colonial discourse but it was lived out by concrete individuals : by men who participated in very different ways in the colonial enterprise and by women who were note merely passive victims »16.

      Pour les 300 000 pionniers et soldats présents après la conquête, certains subirent, effectivement, le « doux esclavage » mentionné par la chanson. Même quand la fascination n’était pas au rendez-vous, le concubinage s’imposait presque par défaut, représentant « la véritable institution des rapports sexuels sous le colonialisme »17. En dépit de la propagande visant à les attirer, bien peu de femmes de métropole avaient accepté de s’installer sur place, craignant l’insécurité ou des conditions de vie précaire. Peu après la conquête, un navire de 2000 épouses et fiancées fut appareillé à destination de l’Empire18. En 1938, 10 000 Italiennes avaient accepté de participer à l’aventure coloniale, dont la moitié dans la capitale de l’Empire. Le régime avait également cherché à installer des prostituées blanches recrutées dans la péninsule mais, là encore, l’offre était restée largement inférieure à la demande19. Les hommes continuaient de fréquenter assidûment les sciarmute, les prostituées indigènes, que les autorités s’efforçaient contrôler. Parmi les 1500 femmes autorisées à faire le commerce du sexe à Addis Abeba, et contrôlées lors de visites médicales, les autorités distinguaient trois catégories, identifiables à la couleur d’un petit drapeau affiché sur leur tucul, l’habitation traditionnelle : jaune pour les officiers, verte pour les soldats et travailleurs, noir pour les troupes coloniales. Cette prostitution encadrée et hiérarchisée ne couvrait pas davantage les besoins et certains responsables militaires s’indignaient des longues files d’attente devant les bordels indigènes. Restaient enfin les prostituées occasionnelles ou clandestines, présentes sur l’ensemble du territoire.

      Entre l’exploitation sexuelle des indigènes et la chasteté existait toute une gradation de comportements. Le concubinage fut l’un d’entre-eux qui présentait, avant d’être placé hors la loi, de nombreux avantages pour les colons. Avant la conquête de l’Éthiopie, dans les colonies italiennes d’Afrique noire, Somalie et Érythrée, il était fréquent que des fonctionnaires de l’administration coloniale ou des militaires vivent avec des femmes africaines. Les compagnes des Italiens étaient nommées les madame et le concubinage le madamismo. Ces unions donnaient souvent lieu à la naissance d’enfants métis qui eurent la possibilité, à partir de 1933, en vertu de la « Loi organique pour l’Érythrée et la Somalie » d’obtenir la nationalité italienne20. En Érythrée, en 1935, on comptait 1000 métis sur une population de 3500 Italiens21. Pour les colons, la mise en ménage avec des Éthiopiennes, résultait de motivations diverses, parfois concomitantes, qui n’excluaient pas le sentiment amoureux : disposer d’une compagne pour partager le quotidien et les tâches ménagères, disposer d’une partenaire sexuelle stable et plus sûre que des prostituées. Le journaliste Indro Montanelli, enrôlé comme volontaire en Éthiopie à l’âge de 23 ans, fut nommé à la tête d’un bataillon d’indigènes Érythréens. Il dit avoir « acheté » à son père pour 500 lires, une jeune fille de douze ans. Pratique répréhensible en métropole mais diffusée dans les colonies, celle-ci était justifiée en ces termes : « mais à douze ans [en Afrique] les jeunes filles sont déjà des femmes ». À son départ, il revendit la jeune fille « petit animal docile » à un officier de haut rang, lequel disposait déjà d’un « petit harem »22 Selon son témoignage, la jeune fille était musulmane.

      Avant que le racisme ne devînt doctrine officielle du fascisme, les points de vue sur les unions mixtes étaient partagés. Lidio Cipriani s’alarmait du métissage alors que les démographes Corrado Gini ou Domenico Simonelli y voyait une opportunité de régénération des populations européennes et, pour le second, un facteur de peuplement pour les colonies23. Dans la presse coloniale, les unions mixtes n’étaient pas encore dénoncées24. En février 1936, dans l’Illustrazione coloniale, Lorenzo Ratto opposait l’attitude raciste des colonisateurs britanniques à la tradition « romaine » de fraternisation avec les populations vaincues. Réprouvant le métissage avec les « nègres », il admettait les unions mixtes avec les Éthiopiennes, racialement supérieures : « les plus belles filles de race sémitico-éthiopiennes, facilement sélectionnables sur les plateaux éthiopiens pourront être choisies par les pionniers du Génie militaire rural pour faire partie de nos colonies en tant qu’épouses légitimes (…) »25.

      Texte paru in D. Herzog, Brutality and desire. War and Sexuality in Europe’s Twentieth Century, Palgrave Macmillan, 2008.

      Pour aller plus loin :

      La guerre d’Éthiopie, un inconscient italien, par Olivier Favier. Sur le mausolée au maréchal Graziani à Affile (août 2012), la naissance d’une littérature italophone et postcoloniale et le documentaire de Luca Guadagnino, Inconscio italiano (2011). Voir aussi : L’Italie et ses crimes : un mausolée pour Graziani, par Olivier Favier.
      Mémoire littéraire, mémoire historique, entretien croisé avec Aldo Zargani et Marie-Anne Matard-Bonucci, par Olivier Favier.
      Le fascisme, Auschwitz et Berlusconi, par Marie-Anne Matard Bonucci, Le Monde, 11 février 2013. Marie-Anne Matard-Bonucci est professeure d’histoire contemporaine à Paris VIII, Institut Universitaire de France. Elle est également l’auteure de L’Italie fasciste et la persécution des juifs, Paris, Puf, 2012.

      « Éloge des femmes italiennes » discours prononcé le 8 mai 1936, in B. Mussolini, Édition définitive des œuvres de B. Mussolini, ed. Flammarion, vol. XI, 1938, p. 69-71. [↩]
      Voir G. L. Mosse, L’image de l’homme. L’invention de la virilité moderne, Pocket, Agora, p. 179-203. B., Spackman, Fascist Virilities : Rhetoric, Ideology, and Social Fantasy in Italy, University of Minnesota Press, 1996. [↩]
      Cité par F. Le Houérou, L’épopée des soldats de Mussolini en Abyssinie. 1936-1938. Les ensablés, L’Harmattan, 1994, p. 50. [↩]
      M.-A. Matard-Bonucci, P. Milza, L’Homme nouveau entre dictature et totalitarisme, Fayard, 2004. [↩]
      A. Sbacchi, Legacy of Bitterness. Ethiopia end fascist Italy, 1935-1941, The Read Sea Press, 1997. Voir en particulier le chapitre 3, “Poison gas and atrocities in the Italo-Ethiopian War, 1935-1936”, p. 55-85. A. Del Boca (dir.) , I gas di Mussolini. Il fascismo e la guerra d’Etiopia, Roma, Editori riuniti, 1996. G. Rochat, « L’attentato a Graziani e la repressione italiana in Etiopia 1936-1937 », in Italia contemporanea, 1975, n. 118, pp. 3-38. Plus généralement, voir l’œuvre considérable d’A. Del Boca, de R. Pankhurst. Voir aussi A. Mockler, Haile Selassie’s war : The Italian Ethiopian campaign, 1936-41, Oxford University Press, 1984, rééd. Grafton Books, 1987. [↩]
      G. Bottai, Diario 1935-1944, Ed . Bur, 2001, p. 102, note du 16 mai 1936. [↩]
      Sur la littérature coloniale : G. Tomasello, La letteratura coloniale italiana dalle avanguardie al fascismo, Palerme, Sellerio, 1984. R. Bonavita, « Lo sguardo dall’alto. Le forme della razzizzazione nei romanzi coloniali nella narrativa esotica », in La menzogna della razza. Documenti e immagini del razzismo e dell’antisemitismo fascista, Grafis, Bologne, 1994, p. 53-62. [↩]
      Cité par A. Petacco, Faccetta nera, Mondadori, ed. 2008, p. 191. [↩]
      Voir les vignettes reproduites dans le catalogue La Menzogna della Razza, p. 156-157. Sur l’iconographie coloniale : A. Mignemi., Immagine coordinata per un impero, GEF, 1984, Novara. G. Campassi, M.-Teresa Sega, « Uomo bianco, donna nera. L’immagine della donna nella fotografia coloniale » in Rivista di storia e teoria della fotografia, vol. 4, n° 5, 1983, p. 54-62. [↩]
      L. Goglia, « Le cartoline illustrate italiane della guerra etiopica 1935-1936 : il negro nemico selvaggio e il trionfo della civiltà di Rome » dans le catalogue de l’exposition La menzogna della Razza, cit. p. 27-40. L’image décrite est située dans le catalogue, à la p. 175. [↩]
      S. Pivato, Bella ciao. Canto e politica nella storia d’Italia, GLF, Editori Laterza, Bari-Laterza, 2007, p. 161-162. [↩]
      Le texte de la chanson est publié par A. Petacco, op. cit., p. 189-190. [↩]
      Après avoir été ignorée dans leur dimension raciste et sexiste, les relations hommes-femmes ont été analysées en privilégiant la clef de lecture de l’oppression coloniale puis du genre. Voir G. Campassi, « Il madamato in Africa orientale : relazioni tra italiani e indigene come forma di agressione coloniale » in Miscellanea di storia delle esplorazioni, Genova, 1987, p. 219-260. Giulia Barrera, dans une étude pionnière, se place du point de vue des femmes érythréennes livrant une vision plus complexe des rapports de genre dans ce contexte : G. Barrera, Dangerous Liaisons, Colonial Concubinage in Eritrea, 1890-1941, PAS Working Paper, Program of african Studies, Northwestern University, Evanston Illinois, USA, 1996. [↩]
      Carlo Rossetti « Razze e religioni nei territori dell’Impero », L’impero (A.O.I). Studi e documenti raccolti e ordinati da T. Sillani, Rome, La Rassegna italiana, XVI, p. 76. L’auteur était le chef du Bureau des études du Ministère de l’Afrique italienne. [↩]
      B. Sorgoni, Etnografia e colonialismo. L’Eritrea e l’Etiopia di Alberto Pollera 1873-1939, Torino, Bollato Boringhieri, 2001. [↩]
      G. Barrera, Ibid., p. 6. [↩]
      Voir A. Gauthier, “Femmes et colonialisme” in M. Ferro (dir.), Le livre noir du colonialisme. XVIe-XXIe siècle : de l’extermination à la repentance, Poche, Pluriel, Hachette, 2006, p. 759-811. La citation est à la p. 802. Voir également A.-L. Stoler, Carnal Knowledge and Imperial Power : Race and the Intimate in Colonial Rule, Berkeley : University of California press, 2002. [↩]
      Article de Carlo Rossetti, Capo dell’Ufficio studi del Ministero dell’Africa italiana, « Razze e religioni eni territori dell’Impero », in L’impero (A.O.I). Studi e documenti raccolti e ordinati da T. Sillani, La Rassegna italiana, XVI, p. 76. [↩]
      Sur la prostitution, A. Del Boca, La caduta cit. p. 244-245. Pankhurst, R. « The history of prostitution in Ethiopia », Journal of Ethiopian Studies, 12, n° 2, p. 159-178. [↩]
      À condition, disait le texte de loi, que les intéressés « se montrent dignes de la nationalité italienne par leur éducation, culture et niveau de vie ». Loi du 6 juillet 1933, n° 999. [↩]
      Chiffre cité par A. Del Boca, op. cit., p. 248. [↩]
      Le témoignage de I. Montanelli est cité par E. Biagi in 1935 e dintorni, Mondadori, 1982, 58-61. [↩]
      Sur C. Gini, M.-A. Matard-Bonucci, L’Italie fasciste op. cit., p. 74-75. D. Simonelli, La demografia dei meticci, 1929. [↩]
      Avant la guerre d’Éthiopie, on ne trouve pas de textes dénonçant les méfaits du métissage dans la presse coloniale. Voir le mémoire de maîtrise inédit de F. Marfoli, La vision des Éthiopiens sous le fascisme : étude de quatre revues coloniales italiennes, dir. O. Dumoulin, Université de Rouen, sept-oct 2001. [↩]
      Illustrazione coloniale, Fev. 1936, n.2, « Metodo romano per colonizzare l’Etiopia ». [↩]

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      PARTIE 2
      La conquête de l’Éthiopie et le rêve d’une sexualité sur ordonnance (2), par Marie-Anne Matard-Bonucci.

      Le spectre du #métissage

      La proclamation de l’Empire représenta un tournant dans l’histoire du racisme et de la doctrine fasciste. Jusque-là, la domination des Italiens sur les populations coloniales s’était traduite par un racisme colonial assez banal. En Libye, aucune législation sur le métissage n’avait été adoptée et les Arabes étaient autorisés à fréquenter les bordels des Européens. À une économie propre au racisme qui valorisait les populations arabes par rapport aux habitants d’Afrique noire s’ajoutaient des facteurs objectifs limitant les risques de procréation des couples mixtes : les femmes italiennes y étaient plus nombreuses et les mariages « à court terme » n’existaient pas1.

      Dans la radicalisation raciste de l’été 1936, il est difficile de savoir si la question sexuelle fit office de catalyseur ou servit de révélateur. Mussolini était ulcéré depuis longtemps par l’idée même des couples mixtes. En avril 1934, il avait exigé de retirer de la circulation le roman Amour noir : « Il s’agit des amours d’un Italien avec une négresse. Inadmissible de la part d’une nation qui veut créer un Empire »2. Deux jours après la proclamation de l’Empire, le chef du gouvernement ordonna à Badoglio et Graziani de n’autoriser aucun Italien civil ou militaire à rester plus de six mois sans femme en Éthiopie pour prévenir « les terribles et prévisibles effets du métissage »3. Échafaudant de grands projets d’expansion économique pour l’Empire, Mussolini avait expliqué, à la même époque, au baron Aloisi, chef de cabinet du Ministère des affaires étrangères, son intention d’y envoyer « beaucoup d’Italiens, mais avec l’obligation d’emmener leurs femmes, car il faut absolument éviter le danger d’une race de métis qui deviendraient nos pires ennemis »4. En juin 1936, Facetta Nera tomba en disgrâce peu après avoir subi les assauts du journaliste à succès, Paolo Monelli. Dans un article intitulé « Donne e buoi dei paesi tuoi », et peut-être écrit sur ordonnance, il mettait au défi l’auteur de la chanson de partager quelques jours de l’existence d’une « facetta nera », « une de ces abyssines crasseuses, à la puanteur ancestrale qui puent le beurre rance qui dégouline à petites gouttes dans le cou ; détruites dès l’âge de vingt ans par une tradition séculaire de servage amoureux et rendues froides et inertes dans les bras de l’homme ; pour une beauté au visage noble cent ont les yeux chassieux, les traits durs et masculins, la peau variolée »5. La plume haineuse vitupérait le romantisme à l’eau de rose de la chanson et dénonçait l’incitation à fréquenter les « petites négresses puantes », qui conduisait au métissage et au « délit contre la race ». En rupture avec le climat de badinage et de libertinage qui avait accompagné la conquête de l’Éthiopie, l’article était en phase avec l’évolution idéologique de l’époque. En novembre 1936, devant le Grand Conseil du fascisme Mussolini affirma la nécessité « d’affronter le problème racial et de l’introduire dans la littérature et la doctrine fascistes »6.

      À cette date, la constitution d’un corpus de littérature et de propagande raciste était en bonne voie. Depuis plusieurs mois, le roman d’aventure de la conquête coloniale occupait les pages des journaux. À partir de mai 1936, s’insinua bientôt la figure d’épouvante du métis, en métropole comme dans les colonies, dans les feuilles fascistes comme dans la presse dite d’information7. Non seulement le métissage portait atteinte au prestige de la race mais le métis était présenté tantôt comme un délinquant en puissance, tantôt comme un malheureux. Un haut fonctionnaire du Ministère de l’Afrique italienne brossait un tableau assez sombre : « On a assez vu, en Érythrée et en Somalie, des officiers et fonctionnaires, parfois de grade élevé, vivre maritalement avec des femmes indigènes donnant naissance à une catégorie d’infortunés ; leur paternité italienne n’empêchait pas, une fois le père rentré en métropole, et si les missionnaires n’intervenaient pas, qu’il vive son adolescence dans le milieu de la race maternelle. Ces malheureux étaient évités par les Blancs et méprisés par les Indigènes8.

      Pour la bataille de la race on fit appel à des racistes patentés tels Lidio Cipriani, lequel agitaient depuis le début des années Trente l’épouvantail du métissage entre races supérieures et inférieures9. Ses multiples expéditions « du Cap au Caire » l’avaient imposé comme spécialiste des populations africaines, par des reportages dans des journaux grand public et dans l’Illustrazione italiana10. En 1937, il devint le directeur de l’Institut et du musée d’anthropologie de Florence, l’un des plus renommés d’Italie. Il s’imposa comme l’un des acteurs de premier plan de la croisade contre le métissage jouant un rôle important dans la principale revue du racisme militant, La Difesa della razza, lancée à l’été 193811. Il mit à la disposition de la revue ses collections de photographies des populations africaines12.

      La Difesa della Razza excella dans l’invention de procédés de photomontages destinée à matérialiser visuellement le métissage. Un quart des couvertures interpellait les lecteurs sur ce thème. L’une d’entre elles montrait l’addition d’un faciès de femme blanche et d’homme noir dont il résultait un masque grotesque. Une autre accolait une tête de blanche et d’Africain : de cet étrange Janus, surgissait une tête de mort édentée. Deux mains, l’une blanche, l’autre noire s’enlaçaient laissant choir une fleur fanée. Plus classique, la couverture de mai 1940, mettait en présence une Ève africaine offrant le fruit défendu à un « aryen ». Un cactus, au premier plan signalait, une fois encore, le danger de la fusion des races13.Le Parti fasciste suscita sa propre littérature sur le sujet. En 1939, parut Le problème des métis sous l’égide de l’institut fasciste de l’Afrique italiennes14. « Dieu a créé les blancs, le diable les mulâtres » pouvait-on lire en exergue15. En Afrique, le Parti fasciste fit campagne pour changer les mentalités. Guido Cortese, secrétaire du faisceau d’Addis Abeba, interprétait fidèlement le nouveau cours politique16 : « Le folklore, celui des nus, des pleines lunes, des longues caravanes et des couchers de soleil ardents, des amours folles avec l’indigène humble et fidèle, tout cela représente des choses dépassées, qui relèvent du roman de troisième ordre. Il serait temps de détruire tout de suite les romans, illustrations et chansonnettes de ce genre afin d’éviter qu’ils donnent naissance à une mentalité tout autre que fasciste ».

      Réformer les pratiques sexuelles des Italiens dans l’Empire

      Le 19 avril 1937, un décret-loi fut adopté pour sanctionner les rapports « de nature conjugale » entre citoyens italiens et sujets de l’Empire, passibles de un à cinq ans de prison17. La loi frappait les Italiens seuls et non les sujets de l’Empire – une situation qui serait bientôt considérée comme injuste par certains fascistes qui réclameraient un durcissement de la loi18. Avec les mesures pour la défense de la race qui installèrent l’antisémitisme d’État à l’automne 1938, la question était affrontée dans le cadre de la partition entre citoyens, ou non, de race italienne. Les juifs, comme les sujets de l’Empire, n’appartenaient pas à la race italienne. Dans ce cadre, les mariages entre individus de race différente étaient interdits : même si elle s’appliquait à l’Empire, la loi visait principalement les unions mixtes impliquant des juifs, très fréquentes, alors que celles-ci prolongeaient rarissimement une situation de madamismo.

      Dans l’Empire les troupes d’occupation et les colons pouvaient continuer à fréquenter les maisons closes et les très nombreuses prostituées africaines, les sciarmute19. En juin 1939, une nouvelle loi précisait et aggravait la précédente, la répression des couples mixtes et du métissage s’intégrant dans un texte plus large de défense du prestige de la race20. Tout délit, quel qu’il fût, était passible d’une peine plus lourde (un quart à un tiers) s’il y avait atteinte au prestige de la race italienne, ou lorsqu’il était commis en présence d’un indigène ou en complicité avec celui-ci. La loi reconduisait les dispositions de 1937 sanctionnant les relations de nature conjugale entre Italiens et sujets de l’Empire mais une disposition nouvelle marquait le franchissement d’un seuil dans la lutte contre le métissage. L’article 11, « Inchiesta relativa ai meticci » invitait les Procureurs à diligenter une enquête, en présence d’un enfant métis, probablement conçu après l’entrée en vigueur de la loi d’avril 1937. Le texte annonçait (art 20, Meticci) des dispositions à venir concernant la position des métis dans l’Empire. En mai 1940, de nouvelles dispositions assimilaient les métis à des sujets africains, interdisant aux pères italiens de les reconnaître. À l’instar des mesures antisémites, les lois coloniales ignoraient le statut de métis, par crainte sans doute que l’invention d’une catégorie juridique n’installe durablement le phénomène.

      La répression s’exerça de plusieurs façons. Plusieurs officiers furent rapatriés en métropole et parfois radiés des cadres de l’armée21. S’agissant des civils, il incombait à la police et à la justice de mettre un terme à des agissements qualifiés par le Duce de « scandaleux » et de « criminels ». Une « police » du madamismo était habilitée à distribuer des « billets jaunes » de mise en garde22.

      Plusieurs procès furent attentés à des Italiens pour réprimer le délit de madamismo23. Un premier jugement fut rendu en septembre 1937. Plusieurs dizaines d’autres procès suivirent devant les tribunaux d’Addis Abeba, Asmara, Gondar, Harar. Le nombre de procès peut sembler anecdotique en regard d’un phénomène qui concernait plusieurs milliers d’individus. Mais les textes des décisions de justice sont cependant riches d’enseignements quant à la façon dont les juges interprétaient la loi. La difficulté consistait dans l’établissement du délit, avec ce que cela supposait d’atteintes à la vie privée des individus. Confronté à un premier procès pour madamismo, en novembre 1938, le Tribunal de Gondar admettait la difficulté à juger en regard du caractère récent de la jurisprudence constituée. Il résumait efficacement la ligne de conduite suivie par les juges dans la plupart des procès : « Compte-tenu des jugements rendus par les autres Tribunaux de l’Empire, ce Tribunal entend diriger l’enquête vers la recherche des preuves matérielles telle que la vie commune menée pendant un certain temps et caractérisée par des rapports sexuels réitérés ; il s’agit aussi de déceler, sur le plan moral ou psychique, les éléments attestant d’un lien spirituel particulier qui ressemble d’une façon ou d’une autre à notre affectio maritalis24. À l’évidence, le fait d’avoir des relations sexuelles avec des Africaines n’était pas en cause. Plusieurs sentences laissaient transparaître la compréhension des juges à l’égard des « besoins sexuels » des expatriés, de la nécessité d’un « défoulement physiologique ». Les rapports sexuels occasionnels avec une domestique dès lors qu’elle ne vivait pas sous le même toit n’étaient pas condamnés25.

      Le sexe était toléré avec les indigènes pourvu qu’il fût dénué de tout affect. Dans une affaire de madamismo, les juges de Gondar estimaient que l’accusé -que son attachement manifeste à la femme accablait- n’aurait pas été coupable « s’il s’était servi de la femme seulement comme prostituée en lui payant le prix d’accouplements occasionnels puis en la congédiant après avoir satisfait ses besoins sexuels »26. En dépit de l’affichage d’un tel cynisme, certains juges prétendaient imposer une morale dans le commerce sexuel entre homme blancs et femmes noires, s’indignant parfois des pratiques de certains colons27. Deux Italiens furent ainsi condamnés pour atteinte au prestige de la race, pour avoir partagé une seule chambre à coucher avec deux Éthiopiennes. « Sans nul doute, l’acte sexuel accompli en présence de tiers offense la pudeur et dénote une pudeur inférieure à celle qui existe chez les peuples civilisés, et en particulier au sein du peuple italien du fait de la conjonction heureuse des principes du fascisme et des enseignements moraux du catholicisme. Cela est d’autant plus répréhensible si l’on tient compte de la réserve notoire des femmes indigènes en matière de sexualité. »28

      Comment statuer sur l’existence de rapports sexuels dès lors qu’ils n’étaient plus « de simples échanges destinés à assouvir une pulsion physique »29. Comment établir la réalité d’une relation de nature conjugale ? La cohabitation prolongée constituait donc une présomption importante qui ne fut pas toujours considérée comme suffisante pour l’établissement des faits. Le caractère passionnel de certaines relations était considéré comme preuve de culpabilité. Quelques procès avaient été motivés par des plaintes de femmes contre la violence dont elles avaient été victimes30. La violence contre les femmes n’intéressait pas les juges en tant que telle mais en ce qu’elle révélait une dépendance affective des accusés, en proie à la jalousie. Plusieurs affaires trahissaient le manque de confiance des Italiens à l’égard de leurs compagnes31. Les recommandations de fidélité sexuelle étaient prises pour l’aveu d’une affection coupable. Les cadeaux étaient considérés comme des indices à charge : le caractère utilitaire de certains présents pouvait être plaidé mais ceux qui n’étaient manifestement destinés qu’à faire plaisir, enfonçaient les accusés32. Tous les éléments « à charge » étaient réunis dans une affaire jugée en septembre 1939. Une Africaine avait été embauchée pour 150 lires par mois comme domestique par un homme dont elle partageait le couvert et la couche. L’homme était subjugué par cette femme au point de vanter ses qualités dans son entourage, de lui offrir des parfums. Il était allé la rechercher quand elle l’avait abandonné pour épouser un « homme de sa race ». Pour les juges, la culpabilité était flagrante : « Cohabitation, table commune, confiance et tendresse, jalousie réciproque, cadeaux de coquetterie et non utilitaires font de la petite servante une compagne de vie, ce qu’est justement l’épouse »33. Les marques de tendresse ou d’attention particulière à l’égard des indigènes étaient particulièrement suspectes : raccompagner une femme chez elle le soir, la désigner comme sa femme34, lui rendre visite lorsqu’elle était malade35.

      « L’affection », la passion qualifiée parfois « d’enivrement » étaient en revanche répréhensibles. Le mot « amour » n’était jamais employé, tant les juges considéraient cette éventualité comme improbable ou inconvenante. En janvier 1939, un homme fut condamné à un an et demi de prison pour madamismo. Facteur aggravant, l’homme avait avoué aimer la femme indigène36. Il avait admis lui avoir fait des cadeaux, à elle et à sa mère. Espérant fonder un foyer, il avait préparé une lettre au Roi pour demander à l’épouser. Les juges diagnostiquaient un cas « macroscopique d’ensablement »37, « car ici, le blanc ne désire pas simplement la Vénus noire en la tenant à ses côtés pour des raisons de tranquillité et pour bénéficier de rapports faciles et sûrs mais c’est l’âme de cet Italien qui est troublée ; il est entièrement dévoué à la jeune noire qu’il veut élever au rang de compagne de sa vie et qu’il associe à tous les évènements, y compris hors sexualité, de sa vie38. »

      La lutte contre le métissage inaugura bien, sur le plan juridique, la mise en œuvre d’un racisme biologique fondé sur le principe de la pureté du sang. En ce sens, elle marquait un changement radical dans les conceptions qui avaient prévalu jusque-là en matière de citoyenneté et d’identité, dans l’Empire comme en métropole. Toutefois, ces mesures furent adoptées pour répondre à une question de gouvernance coloniale locale : il n’était pas encore question d’une politique globale de la race -à aucun moment, des mesures analogues ne furent envisagées pour prévenir les métissages arabo-italiens en Libye, autre importante colonie de peuplement italienne- ni de mesures visant les juifs39.

      La partie qui se jouait en Éthiopie concernait autant l’Italie que la corne de l’Afrique. Le front pionnier de l’Empire ramenait sur le devant de la scène les projets de révolution anthropologique et de construction de l’homme nouveau et les difficultés à les mettre en œuvre.

      Sexe, race et totalitarisme fasciste.

      Une fois l’Empire proclamé, le rêve colonial et l’utopie fasciste de l’homme nouveau se trouvèrent en contradiction, non sur le terrain de la violence mais sur celui de la sexualité. Objets de désir, d’abord instrumentalisées par la propagande, les « Vénus noires » furent bientôt diabolisées, leur fréquentation n’étant autorisée que dans le cadre d’une relation proscrivant tout affect. En organisant la prostitution en terre coloniale, le fascisme heurtait la morale en usage dans la péninsule, suscitait la réprobation du Vatican, mais se comportait comme la plupart des puissances coloniales confrontées à la demande sexuelle des troupes en campagne40.

      En revanche, en menant la lutte contre le madamismo à un niveau d’État, le fascisme se singularisait par une démarche fusionnant racisme et totalitarisme, la doctrine de la race venant au secours du projet de révolution anthropologique du régime. D’un côté, en traquant le concubinage des Italiens et des Africaines, les responsables fascistes cherchaient à prévenir le métissage au nom de conceptions racistes qui n’étaient guère originales en contexte colonial41. Mais le régime pourchassait aussi d’autres démons, les défauts supposés d’un peuple que le Duce voulait transformer : le sentimentalisme, un certain humanisme et des comportements jugés aux antipodes de la virilité fasciste.

      Dans la métropole, la volonté d’orienter les comportements affectifs et sexuels était à l’œuvre depuis plusieurs années. La famille et la procréation devaient borner l’horizon amoureux des Italiens. Dans cette perspective, l’homosexualité -masculine seulement- fut réprimée par le code pénal de 1931. En décembre 1926 une taxe sur le célibat fut adoptée, les célibataires ne cessant par la suite d’être montrés du doigt et pénalisés, par exemple dans leur carrière lorsqu’ils étaient fonctionnaires. Paolo Orano intellectuel proche du pouvoir assimilait le célibat à une forme « de fuoruscitismo » civil et social42.

      S’agissant du couple, il n’était guère besoin de légiférer sur les rapports hommes femmes tant la domination des premiers allait de soi. Toutefois, certains fascistes rêvaient aussi de marquer les relations amoureuses au sceau du totalitarisme fasciste. Dès 1915, le nationaliste Giovanni Papini, l’une des sources d’inspiration du fascisme, recommandait dans Maschilità de se libérer de la famille, du romantisme et de l’amour, opposant les femmes et hommes, le miel et la pierre, et dénonçant l’amour comme un asservissement43. Pour un régime qui érigeait la famille en absolu et qui s’appuyait sur l’Église pour gouverner, il semblait difficile, après 1922, de souscrire à la totalité de ce programme. Paolo Orano proposait une voie de compromis étant entendu que sous le fascisme, « L’État entre avec méthode et énergie au cœur de la moralité individuelle et domestique, car il est le maître de la vie sociale ». Il convenait de se libérer de l’idée bourgeoise suivant laquelle l’amour devait précéder le mariage et en finir avec les illusions romantiques et égoïstes de l’amour comme fin en soi. Le couple devenait une forme d’association tendue vers la procréation dont l’amour était une conséquence et non un préalable44.

      Cette philosophie des rapports homme femme inspira la politique fasciste en Éthiopie. L’éloignement, de plus fortes contraintes pour les hommes dans un contexte de guerre puis d’occupation permettaient, en théorie, de contrôler plus efficacement les comportements amoureux. Dans l’économie licite des pratiques sexuelles deux solutions s’offraient aux soldats colons fascistes, célibataires par force : la chasteté, le colonisateur cédant la place à une forme de moine soldat, ou la pratique d’une sexualité déconnectée de tout sentiment.

      Ceux qui firent le premier choix furent une minorité. Certains hommes mariés mirent un point d’honneur à résister à la tentation du sexe qui « était au cœur de toutes les préoccupations »45. Brandissant l’étendard de la fidélité au mariage, ils justifiaient l’obligation de chasteté et la frustration sexuelle par la morale, les valeurs du catholicisme, la loi fasciste et une répulsion d’ordre raciste46. Laissant femme et enfants dans la péninsule, Nicola Gattari était venu en Éthiopie comme soldat et y était resté pour se faire une situation, comme patron de camion. Dans certaines lettres adressées à sa femme bien-aimée, il abordait ce sujet délicat47 « Je suis un homme jeune plein de désirs mais qui peut les satisfaire ? Ces femmes noires puantes auprès de qui des milliers d’hommes de tous les âges contractent des infections ? Non, ma chérie, ton Nicola reviendra comme il est parti, je te le jure (…) Pense à nos retrouvailles, comme notre étreinte sera belle ! » Répondant à son épouse qui lui avait demandé, sans trop y croire, s’il était tombé amoureux d’une petite noire, il réaffirmait sa constance : … « Oui, je passerai peut-être pour un imbécile par rapport à d’autres et je dois admettre que ma volonté de rester fidèle aux liens sacrés du mariage doit être le fait d’un résident sur mille en Afrique. Si je me suis amouraché d’une petite négresse ? Je pourrais te répondre que pour conquérir une de ces pouilleuses il n’y a pas besoin d’être amoureux car ce sont des filles faciles : 5 lires suffisent et l’affaire est conclue ».

      La prostitution constituait donc une porte de sortie. Celle-ci ne bloquait pas nécessairement l’appel du concubinage, le passage de la condition de sciarmutta à celle de madama étant fréquente chez les femmes éthiopiennes48. En allant inspecter les chambres à coucher, en suscitant les confessions intimes lors des procès, l’État avait, en effet, pénétré « au cœur de la moralité individuelle et domestique ». De trop nombreuses barrières rendaient l’entreprise difficile dans la métropole : elle fut tentée, au nom de la lutte contre le métissage, dans l’Empire. Par leurs recommandations concernant les échanges avec les indigènes, les juges inventaient un idéal-type, celui d’une sexualité émancipée de tout sentiment, ramenée en définitive, à la « masculinité » exaltée par Papini.

      Quel fut l’impact des procès et des condamnations qui en résultèrent ? Le traitement judiciaire de la question permit aux juges de montrer leur zèle fasciste. Les sentences des procès furent autant de leçons de racisme et de fascisme, infligées peut-être surtout pour l’exemple à des hommes de milieux modestes49. En infligeant une peine d’un an et demi de prison à un prévenu manifestement amoureux d’une Éthiopienne le juge prétendait lui « éclaircir les idées »50.La répression installa un climat de peur parmi certains colons, à en juger par les comportements des couples qui se cachaient et d’amants qui se réunissaient une fois la nuit tombée51.

      En janvier 1939, l’anthropologue raciste Lidio Cipriani, était modérément optimiste : « Malheureusement l’obscénité des rapports sexuels entre Blancs et indigènes continue, mais il semblerait que les mesures racistes aient conduit à une diminution sensible des cas de fécondation indésirables … Il est probable que le blanc commence désormais à se rendre compte de l’inconvénient qu’il y a à s’abandonner sans vergogne à une femme de couleur »52. Toutefois, la plupart des témoignages invitent à penser que la loi contre le madamismo ne fut guère respectée, y compris par ceux qui devaient imposer l’ordre fasciste, et notamment les carabiniers53. En Érythrée, on dénombrait 10 000 les femmes africaines vivant avec des Italiens en 1935 et 15 000 en 194054.

      La question du sexe et du métissage, comme d’autres mesures destinées à réformer les comportements en profondeur traçait les limites de l’emprise fasciste sur les esprits et de sa capacité à façonner les mœurs.

      Texte paru in D. Herzog, Brutality and desire. War and Sexuality in Europe’s Twentieth Century, Palgrave Macmillan, 2008.

      Pour aller plus loin :

      La guerre d’Éthiopie, un inconscient italien, par Olivier Favier. Sur le mausolée au maréchal Graziani à Affile (août 2012), la naissance d’une littérature italophone et postcoloniale et le documentaire de Luca Guadagnino, Inconscio italiano (2011). Voir aussi : L’Italie et ses crimes : un mausolée pour Graziani, par Olivier Favier.
      Mémoire littéraire, mémoire historique, entretien croisé avec Aldo Zargani et Marie-Anne Matard-Bonucci, par Olivier Favier.
      Le fascisme, Auschwitz et Berlusconi, par Marie-Anne Matard Bonucci, Le Monde, 11 février 2013. Marie-Anne Matard-Bonucci est professeure d’histoire contemporaine à Paris VIII, Institut Universitaire de France. Elle est également l’auteure deL’Italie fasciste et la persécution des juifs, Paris, Puf, 2012.

      C. Ipsen, Demografia totalitaria, Il Mulino, p. 256. [↩]
      Propos rapporté par le Baron Pompeo Aloisi, chef de cabinet du ministre des affaires étrangères à partir de juillet 1932 : Journal (25 juillet 1932-14 juin 1936), Plon, Paris, 1957, p. 185. [↩]
      Télégramme de Mussolini à Badoglio et Graziani, in La menzogna cit., p. 20. [↩]
      B Aloisi, Journal, cit., p. 382. La conversation est datée du 8 mai. [↩]
      L’article parut dans La Gazzetta del popolo de Turin, le 13 juin 1936. [↩]
      G. Bottai, Diario 1936-1943, op. cit., p. 115. 19 novembre 1936. Rien ne prouve qu’à cette date, Mussolini songeait aussi à l’antisémitisme. [↩]
      La presse coloniale fut particulièrement mobilisée : en janvier 1940, Africa italiana sortait un numéro spécial « Discipline et tutelle des races dans l’Empire ». Un mois plus tard, la même revue traitait du rôle de la femme italienne dans l’Empire. [↩]
      C. Rossetti, Ibid. [↩]
      L. Cipriani, Considerazioni sopra il passato e l’avvenire delle popolazioni africane, 1932. Sur le personnage, voir : R. Maiocchi, Scienza italiana e razzismo fascista, La Nuova Italia, Firenze, 1999, p. 161-163. [↩]
      In Africa, dal Capo al Cairo est le titre du livre publié en 1932, Florence, Bemporad. [↩]
      Sur le rôle de cette revue dans le dispositif propagandiste raciste, M. A. Bonucci, L’Italie fasciste et la persécution des juifs, Perrin, 2007. [↩]
      P. Chiozzi, “Autoritratto del razzismo : le fotografie di Lidio Cipriani in La menzogna della razza, cit., p. 91-94. [↩]
      Les couvertures évoquées sont respectivement celles des numéros : A. III, 14-20/05/40
      A. III, 11- 5/04/40 ; A. IV, 3-5/12/40 ; A. III, 8-20/02/1940. [↩]
      G. Masucci, Il problema dei meticci, Istituto Fascista dell’Africa italiana, 1939, XVII. [↩]
      Un compte-rendu figure dans Razza e Civiltà, A. I, n°1, 23 mars 1940, p. 107. [↩]
      G. Cortese, Problemi dell’Impero, Pinciana, Rome, 1937. Cité in F. Le Houerou, op. cit., p.95. [↩]
      Décret-Loi (RDL) du 19 avril 1937, n°880, « Sanzioni per i rapporti d’indole coniugale fra cittadini e sudditi » [↩]
      Voir la position de Giovanni Rosso, « Il reato di madamismo nei confronti dell’indigena che abbia una relazione di indole coniugale con un cittadino italiano » in Razza e Civiltà, An I, n°1, p. 131-139. [↩]
      Voir A. Del Boca, La caduta dell’Impero, op. cit., p. 243-245. [↩]
      RDL n°1004 du 29 juin 1939. [↩]
      A. Del Boca évoque plusieurs cas, in La caduta cit. , p. 246-247. [↩]
      F. Le Houerou, op. cit., p. 95. [↩]
      La Revue Razza e Civiltà, publiée à partir de mars 1940 : il s’agissait de l’organe du Conseil Supérieur et de la Direction générale pour la Démographie et la race. Dans le cadre de la rubrique « Giurisprudenza e legislazione razziale » a publié de nombreux extraits des décisions judiciaires. Les analyses présentées ci-dessus se fondent sur l’analyse de 28 cas présentés par la revue. La moitié conclut au délit de madamismo ou d’atteinte à la dignité raciale. [↩]
      Sentence du Tribunal de Gondar du 19 novembre 1938, Président Maistro, Accusé Spano. RC, An I, n.1 p. 128-131. [↩]
      Sentence du 7 février 1939, accusé Venturiello, Pres. Carnaroli, RC, A. I, n°5-6-7, p. 549. [↩]
      Sentence du Tribunal de Gondar du 19 novembre 1938, Accusé Spano, Président Maistro RC, An I, n.1 p. 1p. 130. [↩]
      Voir Sentence de la Cour d’Appel d’Addis Abeba, 4 avril 1939, accusé Isella, Pres Carnaroli, RC, A. I, n°5-6-7, p. 552. [↩]
      Sentence du 21 décembre 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, accusés Lauria et Ciulla, Pres. Morando, RC, A. I, n°5-6-7, p.548. [↩]
      Sentence du 3 janvier 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, Accusé Melchionne, Pres Carnaroli, RC, A. I, n°5-6-7, p.548. « I congressi carnali perdono il carattere d’incontro a mero sfogo fisiologico ». [↩]
      Ainsi, le procès contre G. Spano a été suscité par une plainte de sa concubine auprès des carabiniers. Sentence du tribunal de Gondar du 19 novembre 1938, RC, An I, n°1, p. 128. [↩]
      Cour d’Appel d’Addis Abeba, Sentences du 31 janvier 1939, Accusé Seneca, Pres Guerrazzi ; 3. janvier 1939 Accusé Marca, Pres. Guerrazzi, RC, A. I, n°5-6-7, p. 548 et 551. [↩]
      Des cadeaux sont mentionnés dans plusieurs affaires. [↩]
      Sentence du 5 septembre 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, Procès contre Fagà, Pres Carnaroli, RC, A. I, n°5-6-7, p. 547. [↩]
      Sentence du 14 février 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, Procès contre Autieri, Pres Carnaroli , RC, A. I, n°5-6-7, p. 549. [↩]
      Sentence du 3 janvier 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, Procès contre Giuliano, Pres Carnaroli RC, A. I, n°5-6-7, p. 550. [↩]
      L’expression utilisée est « volerle bene ». [↩]
      On désignait comme insabbiati, « ensablés », les hommes restés vivre en Éthiopie, souvent aux côtés d’une Africaine. [↩]
      Sentence du 31 janvier 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, Procès contre Seneca, Pres Guerrazzi , RC, A. I, n°5-6-7, p 548-549 [↩]
      Outre que le métissage semblait inspirer moins de crainte s’agissant des Arabes que des populations d’Afrique noire, des raisons tenant au contexte proprement libyen expliquent un tel choix : présence plus nombreuse de femmes italiennes en Libye ; statut différent du mariage dans ce pays par rapport à l’Éthiopie. Cf. C. Ipsen, op. cit, p. 256. [↩]
      Au demeurant, en métropole aussi, le fascisme avait une politique visant à contrôler la prostitution sans l’interdire définitivement. Sur la duplicité du gouvernement italien qui réprima la présence de prostituées dans la rue et mais la tolérait dans des bordels soumis à un contrôle policier et sanitaire : V. De Grazia, Le donne nel regime fascista, Tascabili Marsili, p. 73-74. [↩]
      V. Joly écrit : « Les amours exotiques doivent être éphémères. Les femmes indigènes ne sont que des substituts qu’imposent la solitude et l’éloignement de la promise qui attend en métropole, simple rêve parfois. Elles ne doivent pas plus être sentimentales tant est vive la crainte du « métissage » affaiblissement pour la race du vainqueur », in « Sexe, guerre et désir colonial » in F. Rouquet, F. Virgili, D. Voldman, Amours, guerres et sexualité 1914-1945, Gallimard, BDIC, 2007, 62-69. [↩]
      La formule est de Paolo Orano in « Famiglia, razza, potenza », Il fascismo, vol. II, Pinciana, Rome, XVIII, p. 391-429. Le fuoruscitismo désignait l’exil antifasciste. [↩]
      Maschilità, Firenze, Libreria della Voce, 1915. [↩]
      P. Orano, Ibid. [↩]
      A. Del Boca, Gli Italiani in Africa orientale, La caduta dell’Impero, Rome-Bari, Laterza, 1982, p. 243. [↩]
      A. Del Boca donne quelques exemples parmi lesquels celui du Résident de Bacco ou encore le témoignage d’un Consul de la Milice. Ibid. p. 250. [↩]
      Ces lettres ont été publiées par S. Luzzatto, La strada per Adis Abeba. Lettere di un camionista dall’Impero (1936-1941), Paravia. Scriptorium, 2000 : Les citations sont aux pages 85 et 144. [↩]
      G. Barrera, op. cit. p. 26. [↩]
      Les sentences des procès ne permettent pas toujours de connaître la profession des accusés. Reste que l’impression dominante est celle de procès attentés à des hommes de condition modeste, issus du prolétariat ou d’une basse classe moyenne. Sur la sociologie des colons éthiopiens, F. le Houérou, op. cit., p. 115-135. [↩]
      Sentence du 31 janvier 1939, Cour d’Appel d’Addis Abeba, accusé Seneca, Président Guerrazzi, RC, A. I, n°5-6-7, p. 548-549. [↩]
      Autant qu’on puisse en juger par les allusions contenues dans certaines sentences à la crainte de perquisitions de la police pendant la nuit pour constater le délit. [↩]
      Archivio Centrale dello Stato (Rome) MCP, Gab., b. 151, lettre du 18/01/1939. Dans une autre lettre de l’hiver 1939, à une époque où il propose, il est vrai, ses services comme « consulente razziale nell’Impero », Cipriani revient sur la question (Lettre de Cipriani à Landra du 31/01/39, in ACS, MCP, Gab., b. 151). [↩]
      F. Le Houérou a recueilli 35 témoignages dont la plupart émanent des « ensablés », les Italiens restés sur place souvent après avoir vécu avec une Madama. Par sa nature, la population interviewée amplifie peut-être la réalité du phénomène. Voir en particulier, op. cit. p. 97-105. [↩]
      Chiffres cités par G. Barrera, op. cit., p. 43. [↩]

      http://dormirajamais.org/conquete-2

      via @olivier_aubert à qui je dis #merci (@olivier_aubert —> j’ai déplacé la référence ici, car plus appropriée qu’ici : https://seenthis.net/messages/972185)

      #femmes #stéréotypes #caricature #dessin_de_presse #passion #condottiere #squadrisme #désir #Faccetta_Nera #imaginaire #Amharas #concubinage #mariage_dämòs #union_contractuelle_temporaire #madamismo #Somalie #Erythrée #Ethiopie #doux_esclavage #rapports_sexuels #sciarmute #prostitution #bordels #exploitation_sexuelle #Loi_organique_pour_l’Erythrée_et_la_Somalie #Indro_Montanelli #racisme #fascisme #unions_mixtes #Difesa_della_Razza #photographie

  • « Tant qu’on sera dans un système capitaliste, il y aura du #patriarcat » – Entretien avec #Haude_Rivoal

    Haude Rivoal est l’autrice d’une enquête sociologique publiée en 2021 aux éditions La Dispute, La fabrique des masculinités au travail. Par un travail de terrain de plusieurs années au sein d’une entreprise de distribution de produits frais de 15 000 salariés, la sociologue cherche à comprendre comment se forgent les identités masculines au travail, dans un milieu professionnel qui se précarise (vite) et se féminise (lentement). Les travailleurs, majoritairement ouvriers, sont soumis comme dans tous les secteurs à l’intensification, à la rationalisation et à la flexibilisation du travail. Leur réponse aux injonctions du capitalisme et à la précarisation de leur statut, c’est entre autres un renforcement des pratiques viriles : solidarité accrue entre hommes, exclusion subtile (ou non) des femmes, déni de la souffrance… Pour s’adapter pleinement aux exigences du capitalisme et du patriarcat, il leur faut non seulement être de bons travailleurs, productifs, engagés et disciplinés, mais aussi des “hommes virils mais pas machos”. Pour éviter la mise à l’écart, adopter de nouveaux codes de masculinité est donc nécessaire – mais laborieux. Dans cette étude passionnante, Haude Rivoal met en lumière les mécanismes de la fabrique des masculinités au travail, au croisement des facteurs de genre, de classe et de race.

    Entretien par Eugénie P.

    Ton hypothèse de départ est originale, elle va à rebours des postulats féministes habituels : au lieu d’étudier ce qui freine les femmes au travail, tu préfères analyser comment les hommes gardent leur hégémonie au travail « malgré la déstabilisation des identités masculines au et par le travail ». Pourquoi as-tu choisi ce point de départ ?

    J’étais en contrat Cifre [contrat de thèse où le ou la doctorant.e est embauché.e par une entreprise qui bénéficie également de ses recherches, ndlr] dans l’entreprise où j’ai fait cette enquête. J’avais commencé à étudier les femmes, je voulais voir comment elles s’intégraient, trouvaient des stratégies pour s’adapter dans un univers masculin à 80%. Ce que je découvrais sur le terrain était assez similaire à toutes les enquêtes que j’avais pu lire : c’était les mêmes stratégies d’adaptation ou d’autocensure. J’ai été embauchée pour travailler sur l’égalité professionnelle, mais je n’arrivais pas à faire mon métier correctement, parce que je rencontrais beaucoup de résistances de la part de l’entreprise et de la part des hommes. Et comme je ne comprenais pas pourquoi on m’avait embauchée, je me suis dit que ça serait intéressant de poser la question des résistances des hommes, sachant que ce n’est pas beaucoup étudié par la littérature sociologique. J’ai changé un peu de sujet après le début de ma thèse, et c’est au moment où est sortie la traduction française des travaux de Raewyn Connell [Masculinités. Enjeux sociaux de l’hégémonie, Paris, Éditions Amsterdam, 2014, ndlr] : cet ouvrage m’a ouvert un espace intellectuel complètement fou ! Ça m’a beaucoup intéressée et je me suis engouffrée dans la question des masculinités.

    C’est donc la difficulté à faire ton travail qui a renversé ton point de vue, en fait ?

    Oui, la difficulté à faire le travail pour lequel j’ai été embauchée, qui consistait à mettre en place des politiques d’égalité professionnelle : je me rendais compte que non seulement je n’avais pas les moyens de les mettre en place, mais qu’en plus, tout le monde s’en foutait. Et je me suis rendue compte aussi que l’homme qui m’avait embauchée pour ce projet était lui-même extrêmement sexiste, et ne voyait pas l’existence des inégalités hommes-femmes, donc je n’arrivais pas à comprendre pourquoi il m’avait embauchée. J’ai compris plus tard que les raisons de mon embauche était une défense de ses propres intérêts professionnels, j’y reviendrai. Ce n’est pas qu’il était aveugle face aux inégalités – il travaillait dans le transport routier depuis 40 ans, évidemment que les choses avaient changé -, mais j’avais beau lui expliquer que les discriminations étaient plus pernicieuses, il était persuadé qu’il ne restait plus grand-chose à faire sur l’égalité hommes-femmes.

    Comment se manifeste cette “déstabilisation des identités masculines au et par le travail”, cette supposée « crise de la virilité », que tu évoques au début de ton livre ?

    Je me suis rendue compte en interviewant les anciens et les nouveaux que rien qu’en l’espace d’une génération, il y avait beaucoup moins d’attachement à l’entreprise. Les jeunes générations avaient très vite compris que pour monter dans la hiérarchie, pour être mieux payé ou pour avoir plus de responsabilités, il ne suffisait pas juste d’être loyal à l’entreprise : il fallait la quitter et changer de boulot, tout simplement. Ce n’est pas du tout l’état d’esprit des anciens, dont beaucoup étaient des autodidactes qui avaient eu des carrières ascensionnelles. Il y avait énormément de turnover, et ça créait un sentiment d’instabilité permanent. Il n’y avait plus d’esprit de solidarité ; ils n’arrêtaient pas de dire “on est une grande famille” mais au final, l’esprit de famille ne parlait pas vraiment aux jeunes. Par ailleurs, dans les années 2010, une nouvelle activité a été introduite : la logistique. Il y a eu beaucoup d’enquêtes sur le sujet ! Beaucoup de médias ont parlé de l’activité logistique avec les préparateurs de commandes par exemple, une population majoritairement intérimaire, très précaire, qui ne reste pas longtemps… et du coup, beaucoup d’ouvriers qui avaient un espoir d’ascension sociale se sont retrouvés contrariés. Ce n’est pas exactement du déclassement, mais beaucoup se sont sentis coincés dans une précarité, et d’autant plus face à moi qui suis sociologue, ça faisait un peu violence parfois. Donc c’est à la fois le fait qu’il y ait beaucoup de turnover, et le fait qu’il n’y ait plus le même sentiment de famille et de protection que pouvait apporter l’entreprise, qui font qu’il y a une instabilité permanente pour ces hommes-là. Et comme on sait que l’identité des hommes se construit en grande partie par le travail, cette identité masculine était mise à mal : si elle ne se construit pas par le travail, par quoi elle se construit ?

    Ça interroge beaucoup le lien que tu évoques entre le capitalisme et le patriarcat : la précarisation et la flexibilisation du travail entraînent donc un renforcement des résistances des hommes ?

    Oui, carrément. Il y a beaucoup d’hommes, surtout dans les métiers ouvriers, qui tirent une certaine fierté du fait de faire un “métier d’hommes ». Et donc, face à la précarisation du travail, c’est un peu tout ce qu’il leur reste. Si on introduit des femmes dans ces métiers-là, qui peuvent faire le boulot dont ils étaient si fiers parce que précisément c’est un “métier d’hommes”, forcément ça crée des résistances très fortes. Quand l’identité des hommes est déstabilisée (soit par la précarisation du travail, soit par l’entrée des femmes), ça crée des résistances très fortes.

    Tu explores justement les différentes formes de résistance, qui mènent à des identités masculines diversifiées. L’injonction principale est difficile : il faut être un homme « masculin mais pas macho ». Ceux qui sont trop machos, un peu trop à l’ancienne, sont disqualifiés, et ceux qui sont pas assez masculins, pareil. C’est un équilibre très fin à tenir ! Quelles sont les incidences concrètes de ces disqualifications dans le travail, comment se retrouvent ces personnes-là dans le collectif ?

    Effectivement, il y a plein de manières d’être homme et il ne suffit pas d’être un homme pour être dominant, encore faut-il l’être “correctement”. Et ce “correctement” est presque impossible à atteindre, c’est vraiment un idéal assez difficile. Par exemple, on peut avoir des propos sexistes, mais quand c’est trop vulgaire, que ça va trop loin, là ça va être disqualifié, ça va être qualifié de “beauf”, et pire, ça va qualifier la personne de pas très sérieuse, de quelqu’un à qui on ne pourra pas trop faire confiance. L’incidence de cette disqualification, c’est que non seulement la personne sera un peu mise à l’écart, mais en plus, ce sera potentiellement quelqu’un à qui on ne donnera pas de responsabilités. Parce qu’un responsable doit être un meneur d’hommes, il faut qu’il soit une figure exemplaire, il doit pouvoir aller sur le terrain mais aussi avoir des qualités d’encadrement et des qualités intellectuelles. Donc un homme trop vulgaire, il va avoir une carrière qui ne va pas décoller, ou des promotions qui ne vont pas se faire.

    Quant à ceux qui ne sont “pas assez masculins », je n’en ai pas beaucoup rencontrés, ce qui est déjà une réponse en soi !

    Peut-on dire qu’il y a une “mise à l’écart” des travailleurs les moins qualifiés, qui n’ont pas intégré les nouveaux codes de la masculinité, au profit des cadres ?

    Non, c’est un phénomène que j’ai retrouvé aussi chez les cadres. Mais chez les cadres, le conflit est plutôt générationnel : il y avait les vieux autodidactes et les jeunes loups, et c’est la course à qui s’adapte le mieux aux transformations du monde du travail, qui vont extrêmement vite, en particulier dans la grande distribution. C’est une des raisons pour laquelle le directeur des RH m’a embauchée : il avait peur de ne pas être dans le coup ! L’égalité professionnelle était un sujet, non seulement parce qu’il y avait des obligations légales mais aussi parce que dans la société, ça commençait à bouger un peu à ce moment-là. Donc il s’est dit que c’est un sujet porteur et que potentiellement pour sa carrière à lui, ça pouvait être très bon. Ça explique qu’il y ait des cadres qui adhèrent à des projets d’entreprise avec lesquels ils ne sont pas forcément d’accord, mais juste parce qu’il y a un intérêt final un peu égoïste en termes d’évolution de carrière.

    On dit toujours que les jeunes générations sont plus ouvertes à l’égalité que les aînés, je pense que ce n’est pas tout à fait vrai ; les aînés ont à cœur de s’adapter, ils ont tellement peur d’être dépassés que parfois ils peuvent en faire plus que les jeunes. Et par ailleurs, les jeunes sont ouverts, par exemple sur l’équilibre vie pro et vie perso, mais il y a quand même des injonctions (qui, pour le coup, sont propres au travail) de présentéisme, de présentation de soi, d’un ethos viril à performer… qui font qu’ils sont dans des positions où ils n’ont pas d’autres choix que d’adopter certains comportements virilistes. Donc certes, ils sont plus pour l’égalité hommes-femmes, mais ils ne peuvent pas complètement l’incarner.

    L’une de tes hypothèses fortes, c’est que le patriarcat ingurgite et adapte à son avantage toutes les revendications sur la fin des discriminations pour se consolider. Est-ce qu’on peut progresser sur l’égalité professionnelle, et plus globalement les questions de genre, sans que le patriarcat s’en empare à son avantage ?

    Très clairement, tant qu’on sera dans un système capitaliste, on aura toujours du patriarcat, à mon sens. C’était une hypothèse, maintenant c’est une certitude ! J’ai fait une analogie avec l’ouvrage de Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, pour dire que la domination masculine est pareille que le capitalisme, elle trouve toujours des moyens de se renouveler. En particulier, elle est tellement bien imbriquée dans le système capitaliste qui fonctionne avec les mêmes valeurs virilistes (on associe encore majoritairement la virilité aux hommes), que les hommes partent avec des avantages compétitifs par rapport aux femmes. Donc quand les femmes arrivent dans des positions de pouvoir, est-ce que c’est une bonne nouvelle qu’elles deviennent “des hommes comme les autres”, c’est-à-dire avec des pratiques de pouvoir et de domination ? Je ne suis pas sûre. C’est “l’égalité élitiste” : des femmes arrivent à des positions de dirigeantes, mais ça ne change rien en dessous, ça ne change pas le système sur lequel ça fonctionne, à savoir : un système de domination, de hiérarchies et de jeux de pouvoir.

    Donc selon toi, l’imbrication entre patriarcat et capitalisme est indissociable ?

    Absolument, pour une simple et bonne raison : le capitalisme fonctionne sur une partie du travail gratuit qui est assuré par les femmes à la maison. Sans ce travail gratuit, le système capitaliste ne tiendrait pas. [à ce sujet, voir par exemple les travaux de Silvia Federici, Le capitalisme patriarcal, ndlr]

    Ça pose la question des politiques d’égalité professionnelle en entreprise : sans remise en question du système capitaliste, elles sont destinées à être seulement du vernis marketing ? On ne peut pas faire de vrais progrès ?

    Je pense que non. D’ailleurs, beaucoup de gens m’ont dit que mon livre était déprimant pour ça. Je pense que les politiques d’égalité professionnelle ne marchent pas car elles ne font pas sens sur le terrain. Les gens ne voient pas l’intérêt, parce qu’ils fonctionnent essentiellement d’un point de vue rationnel et économique (donc le but est de faire du profit, que l’entreprise tourne et qu’éventuellement des emplois se créent, etc), et ils ne voient pas l’intérêt d’investir sur ce sujet, surtout dans les milieux masculins car il n’y a pas suffisamment de femmes pour investir sur le sujet. J’ai beau leur dire que justement, s’il n’y a pas de femmes c’est que ça veut dire quelque chose, ils ont toujours des contre-arguments très “logiques” : par exemple la force physique. Ils ne vont pas permettre aux femmes de trouver une place égale sur les postes qui requièrent de la force physique. Quand les femmes sont intégrées et qu’elles trouvent une place valorisante, ce qui est le cas dans certains endroits, c’est parce qu’elles sont valorisées pour leurs qualités dites “féminines”, d’écoute, d’empathie, mais elles n’atteindront jamais l’égalité car précisément, elles sont valorisées pour leur différence. Le problème n’est pas la différence, ce sont les inégalités qui en résultent. On peut se dire que c’est super que tout le monde soit différent, mais on vit dans un monde où il y a une hiérarchie de ces différences. Ces qualités (écoute, empathie) sont moins valorisées dans le monde du travail que le leadership, l’endurance…

    Ça ne nous rassure pas sur les politiques d’égalité professionnelle…

    Si les politiques d’égalité professionnelle marchaient vraiment, on ne parlerait peut-être plus de ce sujet ! Je pense que les entreprises n’ont pas intérêt à ce qu’elles marchent, parce que ça fonctionne bien comme ça pour elles. Ca peut prendre des formes très concrètes, par exemple les RH disaient clairement en amont des recrutements : ”on prend pas de femmes parce que physiquement elles ne tiennent pas”, “les environnement d’hommes sont plus dangereux pour elles”, “la nuit c’est pas un environnement propice au travail des femmes”… Tu as beau répondre que les femmes travaillent la nuit aussi, les infirmières par exemple… Il y a un tas d’arguments qui montrent la construction sociale qui s’est faite autour de certains métiers, de certaines qualités professionnelles attendues, qu’il faudrait déconstruire – même si c’est très difficile à déconstruire. Ça montre toute une rhétorique capitaliste, mais aussi sexiste, qui explique une mise à l’écart des femmes.

    On a l’impression d’une progression linéaire des femmes dans le monde du travail, que ça avance doucement mais lentement, mais je constate que certains secteurs et certains métiers se déféminisent. On observe des retours en arrière dans certains endroits, ce qui légitime encore plus le fait de faire des enquêtes. Ce n’est pas juste un retour de bâton des vieux mormons qui veulent interdire l’avortement, il y aussi des choses plus insidieuses, des résistances diverses et variées.

    En plus, l’intensification du travail est un risque à long terme pour les femmes. Par exemple, il y a plus de femmes qui font des burnout. Ce n’est pas parce qu’elles sont plus fragiles psychologiquement, contrairement à ce qu’on dit, mais c’est parce qu’elles assurent des doubles journées, donc elles sont plus sujettes au burnout. Les transformations du monde du travail sont donc un risque avéré pour l’emploi des femmes, ne serait-ce que parce que par exemple, les agences d’intérim trient en amont les candidats en fonction de la cadence. Il faut redoubler de vigilance là-dessus.

    Tu analyses les types de masculinité qui se façonnent en fonction des facteurs de classe et de race. On voit que ce ne sont pas les mêmes types d’identités masculines, certaines sont dévalorisées. Quelles en sont les grandes différences ?

    Je ne vais pas faire de généralités car ça dépend beaucoup des milieux. Ce que Raewyn Connell appelle la “masculinité hégémonique”, au sens culturel et non quantitatif (assez peu d’hommes l’incarnent), qui prendrait les traits d’un homme blanc, d’âge moyen, hétérosexuel, de classe moyenne supérieure. Par rapport à ce modèle, il y a des masculinités “non-hégémoniques”, “subalternes”, qui forment une hiérarchie entre elles. Malgré le fait que ces masculinités soient plurielles, il y a une solidarité au sein du groupe des hommes par rapport au groupe des femmes, et à l’intérieur du groupe des hommes, il y a une hiérarchie entre eux. Les masculinités qu’on appelle subalternes sont plutôt les masculinités racisées ou homosexuelles. Elles s’expriment sous le contrôle de la masculinité hégémonique. Elles sont appréciées pour certaines qualités qu’elles peuvent avoir : j’ai pu voir que les ouvriers racisés étaient appréciés pour leur endurance, mais qu’ils étaient aussi assez craints pour leur “indiscipline” supposée. En fait, les personnes “dévalorisées” par rapport à la masculinité hégémonique sont appréciées pour leurs différences, mais on va craindre des défauts qui reposent sur des stéréotypes qu’on leur prête. Par exemple, les personnes racisées pour leur supposée indiscipline, les personnes des classes populaires pour leur supposé mode de vie tourné vers l’excès, les femmes pour leurs supposés crêpages de chignon entre elles…. C’est à double tranchant. Les qualités pour lesquelles elles sont valorisées sont précisément ce qui rend l’égalité impossible. Ces qualités qu’on valorise chez elles renforcent les stéréotypes féminins.

    Tu montres que le rapport au corps est central dans le travail des hommes : il faut s’entretenir mais aussi s’engager physiquement dans le travail, quitte à prendre des risques. Il y a une stratégie de déni de la souffrance, de sous-déclaration du stress chez les travailleurs : pour diminuer la souffrance physique et psychologique au travail, il faut changer les conditions de travail mais aussi changer le rapport des hommes à leur corps ?

    Je pensais que oui, mais je suis un peu revenue sur cette idée. Effectivement, il y plein d’études qui montrent que les hommes prennent plus de risques. C’est par exemple ce que décrit Christophe Dejours [psychiatre français spécialisé dans la santé au travail, ndlr] sur le “collectif de défense virile”, qui consiste à se jeter à corps perdu dans le travail pour anesthésier la peur ou la souffrance. Ce n’est pas forcément ce que j’ai observé dans mes enquêtes : en tout cas auprès des ouvriers (qui, pour le coup, avaient engagé leur corps assez fortement dans le travail), non seulement parce qu’ils ont bien conscience que toute une vie de travail ne pourra pas supporter les prises de risque inconsidérées, mais aussi parce qu’aujourd’hui la souffrance est beaucoup plus médiatisée. Cette médiatisation agit comme si elle donnait une autorisation d’exprimer sa souffrance, et c’est souvent un moyen d’entrée pour les syndicats pour l’amélioration des conditions de travail et de la santé au travail. Donc il y a un rapport beaucoup moins manichéen que ce qu’on prête aux hommes sur la prise de risques et le rapport au corps.

    En termes d’émotions, là c’est moins évident : on parle de plus en plus de burnout, mais à la force physique s’est substituée une injonction à la force mentale, à prendre sur soi. Et si ça ne va pas, on va faire en sorte que les individus s’adaptent au monde du travail, mais on ne va jamais faire en sorte que le monde du travail s’adapte au corps et à l’esprit des individus. On va donner des sièges ergonomiques, des ergosquelettes, on va créer des formations gestes et postures, on va embaucher des psychologues pour que les gens tiennent au travail, sans s’interroger sur ce qui initialement a causé ces souffrances.

    D’ailleurs, ce qui est paradoxal, c’est que l’entreprise va mettre en place tous ces outils, mais qu’elle va presque encourager les prises de risque, parce qu’il y a des primes de productivité ! Plus on va vite (donc plus on prend des risques), plus on gagne d’argent. C’est d’ailleurs les intérimaires qui ont le plus d’accidents du travail, déjà parce qu’ils sont moins formés, mais aussi parce qu’ils ont envie de se faire un max d’argent car ils savent très bien qu’ils ne vont pas rester longtemps.

    Donc ce sont les valeurs du capitalisme et ses incidences économiques (les primes par exemple) qui forgent ce rapport masculin au travail ?

    Oui, mais aussi parce qu’il y a une émulation collective. La masculinité est une pratique collective. Il y a une volonté de prouver qu’on est capable par rapport à son voisin, qu’on va dépasser la souffrance même si on est fatigué, et qu’on peut compter sur lui, etc. J’ai pu observer ça à la fois chez les cadres dans ce qu’on appelle les “boys clubs”, et sur le terrain dans des pratiques de renforcement viril.

    Tu n’as pas observé de solidarité entre les femmes ?

    Assez peu, et c’est particulièrement vrai dans les milieux masculins : la sororité est une solidarité entre femmes qui est très difficile à obtenir. J’en ai fait l’expérience en tant que chercheuse mais aussi en tant que femme. Je me suis dit que j’allais trouver une solidarité de genre qui m’aiderait à aller sur le terrain, mais en fait pas du tout. C’est parce que les femmes ont elles-mêmes intériorisé tout un tas de stéréotypes féminins. C’est ce que Danièle Kergoat appelle “le syllogisme des femmes”, qui dit : “toutes les femmes sont jalouses. Moi je ne suis pas jalouse. Donc je ne suis pas une femme.” Il y a alors une impossibilité de création de la solidarité féminine, parce qu’elles ne veulent pas rentrer dans ces stéréotypes dégradants de chieuses, de nunuches, de cuculs… Les femmes sont assez peu nombreuses et assez vites jugées, en particulier sur leurs tenues : les jugements de valeur sont assez sévères ! Par exemple si une femme arrive avec un haut un peu décolleté, les autres femmes vont être plutôt dures envers elle, beaucoup plus que les hommes d’ailleurs. Elles mettent tellement d’efforts à se créer une crédibilité professionnelle que tout à coup, si une femme arrive en décolleté, on ne va parler que de ça.

    Toi en tant que femme dans l’entreprise, tu dis que tu as souvent été renvoyée à ton genre. Il y a une forme de rappel à l’ordre.

    Oui, quand on est peu nombreuses dans un univers masculin, la féminité fait irruption ! Quels que soient tes attributs, que tu sois féminine ou pas tant que ça, tu vas avoir une pression, une injonction tacite à contrôler tous les paramètres de ta féminité. Ce ne sont pas les hommes qui doivent contrôler leurs désirs ou leurs remarques, mais c’est aux femmes de contrôler ce qu’elles provoquent chez les hommes, et la perturbation qu’elles vont provoquer dans cet univers masculin, parce qu’elles y font irruption.

    Toujours rappeler les femmes à l’ordre, c’est une obsession sociale. Les polémiques sur les tenues des filles à l’école, sur les tenues des femmes musulmanes en sont des exemples… Cette volonté de contrôle des corps féminins est-elle aussi forte que les avancées féministes récentes ?

    C’est difficile à mesurer mais ce n’est pas impossible. S’il y a des mouvements masculinistes aussi forts au Canada par exemple, c’est peut-être que le mouvement féministe y est hyper fort. Ce n’est pas impossible de se dire qu’à chaque fois qu’il y a eu une vague d’avancées féministes, quelques années plus tard, il y a forcément un retour de bâton. Avec ce qui s’est passé avec #metoo, on dirait que le retour de bâton a commencé avec le verdict du procès Johnny Depp – Amber Heard, puis il y a eu la la décision de la Cour Constitutionnelle contre l’avortement aux Etats-Unis… On n’est pas sorties de l’auberge, on est en train de voir se réveiller un mouvement de fond qui était peut-être un peu dormant, mais qui est bien présent. L’article sur les masculinistes qui vient de sortir dans Le Monde est flippant, c’est vraiment des jeunes. En plus, ils sont bien organisés, et ils ont une rhétorique convaincante quand tu ne t’y connais pas trop.

    Les milieux de travail très féminisés sont-ils aussi sujets à l’absence de sororité et à la solidarité masculine dont tu fais état dans ton enquête ?

    En général, les hommes qui accèdent à ces milieux ont un ”ascenseur de verre” (contrairement aux femmes qui ont le “plafond de verre”) : c’est un accès plus rapide et plus facile à des postes à responsabilité, des postes de direction. C’est le cas par exemple du milieu de l’édition : il y a énormément de femmes qui y travaillent mais les hommes sont aux manettes. Le lien avec capitalisme et virilité se retrouve partout – les hommes partent avec un avantage dans le monde du travail capitaliste, souvent du simple fait qu’ils sont des hommes et qu’on leur prête plus volontiers d’hypothétiques qualités de leader.

    Dans quelle mesure peut-on étendre tes conclusions à d’autres milieux de travail ou d’autres secteurs d’activité ? Est-ce que tes conclusions sont spécifiques à la population majoritairement ouvrière et masculine, et au travail en proie à l’intensification, étudiés dans ta thèse ?

    J’ai pensé mon travail pour que ce soit généralisable à plein d’entreprises. J’ai pensé cette enquête comme étant symptomatique, ou en tout cas assez représentative de plein de tendances du monde du travail : l’intensification, l’informatisation à outrance… Ces tendances se retrouvent dans de nombreux secteurs. Je dis dans l’intro : “depuis l’entrepôt, on comprend tout.” Comme partout, il y a de la rationalisation, de l’intensification, et de la production flexible. A partir de là, on peut réfléchir aux liens entre masculinités et capitalisme. Les problématiques de violence, de harcèlement sortent dans tous les milieux, aucun milieu social n’est épargné, précisément parce qu’elles ont des racines communes.

    Comment peut-on abolir le capitalisme, le patriarcat et le colonialisme ?

    Je vois une piste de sortie, une perspective politique majeure qui est de miser sur la sororité. La sororité fonctionne différemment des boys clubs, c’est beaucoup plus horizontal et beaucoup moins hiérarchique. Il y a cette même notion d’entraide, mais elle est beaucoup plus inclusive. Ce sont des dominées qui se rassemblent et qui refusent d’être dominées parce qu’elles refusent de dominer. Il faut prendre exemple sur les hommes qui savent très bien se donner des coups de main quand il le faut, mais faisons-le à bon escient. C’est une solution hyper puissante.

    Ne pas dominer, quand on est dominante sur d’autres plans (quand on est blanche par exemple), ça revient à enrayer les différents systèmes de domination.

    Tout à fait. Les Pinçon-Charlot, on leur a beaucoup reproché d’avoir travaillé sur les dominants, et c’est le cas aussi pour les masculinités ! Il y a plusieurs types de critique : d’abord, il y a un soupçon de complaisance avec ses sujets d’étude, alors qu’il y a suffisamment de critique à l’égard de nos travaux pour éviter ce biais. Ensuite, on est souvent accusé.e.s de s’intéresser à des vestiges ou à des pratiques dépassés, parce que les groupes (hommes, ou bourgeois) sont en transformation ; en fait, les pratiques de domination se transforment, mais pas la domination ! Enfin, on peut nous reprocher de mettre en lumière des catégories “superflues”, alors qu’on devrait s’intéresser aux dominé.e.s… mais on a besoin de comprendre le fonctionnement des dominant.e.s pour déconstruire leur moyen de domination, et donner des armes à la sororité.

    https://www.frustrationmagazine.fr/entretien-rivoal
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  • Le forçat de la Ve République
    https://laviedesidees.fr/Delphine-Dulong-Premier-ministre.html

    À propos de : Delphine Dulong, Premier ministre, Paris, CNRS Éditions, 2021, 390 p.. Delphine Dulong analyse le rôle du Premier ministre, qui est moins une institution claire qu’un fait relationnel : dyarchie avec le Président, travail interministériel incessant, obligations parlementaires. Position de force ou statut dominé ?

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    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20220331_premierministre.docx
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  • Le genre et le prêtre
    https://laviedesidees.fr/Le-genre-et-le-pretre.html

    Josselin Tricou, Des Soutanes et des hommes, enquête sur la masculinité des prêtres catholiques, Puf. Autrefois placard pour homosexuels, aujourd’hui rattrapée par les scandales de pédophilie, l’Eglise catholique tente de redonner un vernis de virilité à son personnel religieux, sacrifiant ainsi à la politique du genre.

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  • SALONS DE MASSAGE-BORDELS : un trafic de femmes vulnérables sur lequel on ferme les yeux
    https://revolutionfeministe.wordpress.com/2021/11/14/salons-de-massage-bordels-un-trafic-de-femmes-vulnera

    INTERVIEW DE FRED ROBERT

    Par Francine Sporenda

    Né en 1971 à Paris, Fred Robert est le co-créateur et porte-parole de Zéromacho. Il est père de trois enfants et ex-mari de deux femmes. C’est Florence Montreynaud qui lui a fait découvrir le féminisme en 2003 et il était auparavant très loin de se douter de l’ensemble des privilèges dont il profitait. Il estime être encore très loin de la déconstruction de sa virilité mais trouve qu’il est essentiel de s’adresser sans attendre à tous les hommes car ils sont le problème et le principal obstacle à l’égalité femmes-hommes.

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