• Le #remède sera-t-il finalement pire que le #coronavirus ?

    Je ne suis pas une grande admiratrice de Donald Trump. Et son tweet du 23 mars où il affirmait « Nous ne pouvons pas laisser le remède être pire que le problème lui-même », m’a consternée. On ne peut pas comparer la perte de vies humaines à celle de points de croissance. Quelques jours avant, le 19 mars, la présidente du Conseil d’Etat vaudois Nuria Gorrite disait de son côté, à l’antenne de la RTS, le #choix terrible auquel les autorités étaient confrontées : « Ou on envoie mourir les gens ou on les envoie au #chômage. »

    Marquantes, ces deux déclarations face à l’#épidémie de coronavirus m’interpellent. Je me suis documentée, j’ai cherché des voix éclairantes dans le maelström de chiffres ascendants, de courbes alarmantes, de stratégies étatiques établies à la hâte. J’en ai trouvées très peu, au début du moins. Mais, depuis cette semaine, l’état de sidération dans lequel beaucoup d’entre nous ont été plongés se dissipe, légèrement. Les cerveaux semblent à nouveau et partiellement capables d’appréhender autre chose que le danger imminent : le coronavirus, les #morts qu’il entraîne dans son sillage, l’impact sur la chaîne de #soins_hospitaliers. Des questions sur les #externalités_négatives des choix effectués à mi-mars émergent, timidement.

    Parce que oui, se focaliser sur le #danger_imminent est normal et naturel, mais cela peut conduire à la #catastrophe. En sommes-nous là ? Nous dirigeons-nous vers une catastrophe commune, nationale, incontrôlable et inquantifiable ? « Ruiner » le pays, et la population qui va avec, est-il le bon remède pour lutter contre #Covid-19 ? Quels sont les indicateurs sur lesquels s’appuie le Conseil fédéral pour décider de l’échec ou de la réussite de sa #stratégie de lutte contre le Covid-19 ?

    Poser ces questions, c’est passer pour une personne amorale. Pourtant, elles sont nécessaires, vitales même ! Pour une simple et bonne raison : il ne s’agit pas de choisir entre morts et chômeurs ou entre vies humaines et points de #croissance. Mais aussi d’évaluer l’impact de la #déscolarisation généralisée, de l’augmentation des #violences_conjugales, de l’accentuation des #précarités_sociales et de l’impact sur la #santé en général créé par la rupture de chaîne de soins pour les patients souffrant d’autres maladies comme le soulignait le président de la Société médicale de la Suisse romande, Philippe Eggimann, dans une tribune publiée sur Heidi.news le 31 mars.

    Le #choix_moral qui nous est imposé par la situation actuelle est le suivant : combien de décès dus à Covid-19 pensent pouvoir éviter nos autorités avec les mesures prises et combien de décès sont-elles prêtes à accepter à cause desdites mesures ? Le véritable et fondamental enjeu est là.

    Et loin de moi l’envie de préférer certains morts à d’autres, mais le choix fait par le Conseil fédéral nous confronte tous à cette équation-là. Le Centre for Evidence-Based Medicine résumait bien ce point de bascule le 30 mars : « Le #confinement va nous mettre tous en #faillite, nous et nos descendants, et il est peu probable à ce stade de ralentir ou d’arrêter la circulation du virus. La situation actuelle se résume à ceci : l’#effondrement_économique est-il un prix à payer pour arrêter ou retarder ce qui est déjà parmi nous ? »

    Sortir du tunnel aveuglant

    Pour être capable de restaurer cette pensée globale nécessaire, il est urgent de combattre l’#effet_tunnel généré par la #panique. Les neurosciences étudient ce phénomène sur des personnes soumises à un #stress intense : pilotes d’avion, militaires, pompiers, etc. Confrontés à des dangers immédiats, leur cerveau « tunnelise » leur attention. Cette #tunnelisation de l’attention peut être résumée ainsi : à trop se focaliser sur un danger imminent, on n’est plus capable d’appréhender des #risques_périphériques plus dangereux.

    Dans un article paru le 17 juin 2015, le magazine français Sciences et Avenir expliquait comment « la concentration dont font preuve les pilotes de ligne lors de situation de stress intense peut se retourner contre eux », parce qu’ils ne sont alors pas capables de tenir compte d’informations périphériques cruciales pouvant mener au crash de leur appareil. Le professeur Frédéric Dehais, de l’Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace (ISAE) à Toulouse, travaille depuis de nombreuses années sur ce sujet et développe des « prothèses cognitives » pour l’aviation.

    Le 31 mars, Daniel Schreiber, entrepreneur américain actif dans les fintechs et directeur de Lemonade, signait une tribune sur ce même sujet perturbant : « Les décès dus à des conséquences involontaires sont difficiles à compter, mais ils doivent quand même compter ». Son propos : « Il ne suffit pas d’examiner l’impact de nos politiques sur l’#aplatissement_de_la_courbe du coronavirus ; nous devons également essayer de prendre en compte les #conséquences_cachées et involontaires de nos politiques. The Lancet, par exemple, a calculé que la grande récession de 2008 a entraîné à elle seule 500’000 décès supplémentaires dus au cancer, avec ‘des patients exclus des traitements en raison du chômage et des réductions des #soins_de_santé’. Une autre étude publiée dans le BMJ a estimé que la récession a causé 5’000 décès par suicide rien qu’en 2009. »

    Où est l’outil de pilotage ?

    A ce stade, les autorités ne semblent pas encore capables de sortir de cet abrutissant effort contre l’ennemi invisible, le seul objectif qui compte, comme l’a confirmé Grégoire Gogniat, porte-parole de l’OFSP est : « La priorité absolue pour le Conseil fédéral est la #santé de la population ».

    Des fissures dans l’édifice monolithique se font néanmoins sentir, comme la création de la Task Force scientifique Covid-19, le 31 mars. Ce qui n’empêche pas l’OFSP de camper sur ses positions accentuant encore le phénomène de persévération : tout le monde doit rester à la maison, ne doivent porter des #masques que les malades, ne doivent être testés que les personnes à risque, etc. Alors même que le groupe de neuf experts présenté jeudi 2 avril à Berne étudie le port du masque pour tous et des #tests_massifs pour l’ensemble de la population.

    Face à ces #injonctions_contradictoires, l’observatrice que je suis se pose légitimement la question : mais où est l’outil de pilotage de la #crise ? Sur quelles bases, scientifiques ou empiriques, ont été prises ces décisions ? Les nombreux observateurs et acteurs contactés depuis une dizaine de jours arrivent à la conclusion qu’une bonne partie des décisions prises mi-mars l’ont été par un petit groupe restreint au sein de l’OFSP de manière empirique, sur la base de données scientifiques lacunaires.

    Comme pour confirmer ces craintes, l’économiste du comportement et neuroéconomiste zurichois Ernst Fehr, professeur de microéconomie et de recherche économique expérimentale, ainsi que vice-président du département d’économie de l’Université de Zurich, accusait les politiciens de prendre des décisions basées sur des données insuffisantes dans une vidéo en allemand publiée sur le site de la NZZ, le 25 mars : « La base la plus importante pour la prise de décision est le nombre de nouvelles infections chaque jour. Et c’est une base de décision très imparfaite ».

    Contacté, l’office fédéral s’explique : « Ces données seront publiées. L’OFSP cite généralement les références scientifiques sur lesquelles il fonde ses décisions dans ses publications. Et les données scientifiques utilisées sont accessibles dans les sources habituelles d’informations scientifiques (Pub Med, sites de l’OMS, du Centers for Disease Control, de l’ECDC). » Sans préciser quelles études, ni avec quels experts, internes et externes.

    Le rôle du #Parlement

    La tension existant entre réponses politiques et réponses scientifiques est palpable. Pour y voir plus clair et surtout obtenir des réponses, le Parlement a un rôle crucial à jouer. C’est l’organe de contrôle du Conseil fédéral. Mais il s’est « auto-suspendu », avant de convenir de la tenue d’une session extraordinaire début mai. Les membres des Commissions de la sécurité sociale et de la santé publique (CSSS) se réunissent le 16 avril pour évoquer la crise actuelle.

    Contactés, plusieurs conseillers nationaux membres de la CSSS sont impatients de pouvoir discuter de tout cela. A l’instar de Pierre-Yves Maillard, conseiller national vaudois (PS) :

    « Le coronavirus est à l’évidence plus dangereux que la grippe, mais quels moyens se donne-t-on pour savoir à quel point et où on en est dans la diffusion de cette maladie ? Ne faudrait-il pas créer des groupes représentatifs de la population et estimer avec eux régulièrement, au moyen de #tests_sérologiques, le nombre de ceux qui ont été atteints, parfois sans le savoir ? Cela permettrait d’estimer un peu mieux les #taux_de_mortalité et de savoir à quel stade de l’épidémie nous sommes. Pour estimer mieux la gravité de cette crise, on pourrait aussi essayer de savoir où en est-on dans l’évolution globale de la #mortalité, toutes causes confondues. Ces données paraissent indispensables à un bon pilotage du Conseil fédéral. Il sera utile d’échanger avec l’OFSP sur ces questions. »

    Pour Philippe Nantermod, conseiller national valaisan (PLR), « ils s’appuient sur les mêmes indices que nous, soit ceux que les cantons leur envoient, mais on en saura davantage après le 16 avril ».

    Pour Céline Amaudruz, conseillère nationale genevoise (UDC), « le Conseil fédéral et ses services doivent jouer la transparence quant aux données dont ils disposent, ceci notamment afin d’étayer l’action qu’ils mènent. Par contre, je ne juge pas utile de distraire des forces pour fournir des données qui ne seraient pas essentielles pour lutter contre le virus. La priorité doit être la santé, le reste peut se traiter plus tard. »

    Et, enfin, pour Léonore Porchet, conseillère nationale vaudoise (Les Verts), « il est indispensable que les décisions du Conseil fédéral, en tout temps, soient prises sur la base de données et informations à disposition du Parlement. C’est pour cela que je regrette fortement que le Parlement n’ait pas pu suivre la gestion de crise et n’arrive qu’en aval de ces décisions. »

    Ma question centrale de savoir si le remède sera pire que le mal a perturbé plusieurs de mes interlocuteurs ces derniers jours. Peut-être est-ce trop « morbide », pas encore le bon moment ou simplement que la déflagration sociale va permettre aux politiciens de jouer leurs cartes partisanes pour obtenir les avancées qu’ils estiment nécessaires.

    De mon côté, je pense qu’il existe un risque (identifié par les autorités ?) de tester à large échelle parce que l’on pourrait trouver que le coronavirus est moins mortel que les données sur lesquelles les autorités se sont appuyées pour justifier le confinement.

    https://www.heidi.news/sante/le-remede-sera-t-il-finalement-pire-que-le-coronavirus
    #crise_économique #économie #éthique #démocratie #Suisse #politique #science

  • Positive Outlook—In Taiwan, Singapore And South Korea Life Is Continuing With Relative Normality
    https://www.forbes.com/sites/jamesasquith/2020/04/01/positive-outlook-in-taiwan-singapore-and-south-korea-life-is-continuing-with-relative-normality/#193833f07335

    Life is certainly not as it was before, however, South Korea and Singapore have stopped short of full lockdowns.

    The early adoption of face masks, social distancing and rationing of important supplies including hand sanitizer has meant that many restaurants have remained open in Singapore and #Taiwan. However, venues that are subject to mass gatherings such as concert halls and nightclubs have been strictly encouraged to close.

    #Singapour #Corée_du_Sud #masques #planification #pandémie
    Petit article sur comment ces trois États ont géré la crise et pourquoi ça leur permet aujourd’hui d’avoir des mesures de #confinement réduites au minimum. (Je bave devant les nouvelles de ma pote de Singapour qui est encore sortie boire un pot hier et qui ce matin a reçu par sms gouvernemental les nouvelles d’un 4e mort seulement, alors que le pays a plein de connexions avec la Chine et que les paniques d’achat de PQ là-bas ont eu lieu fin janvier.)

  • « Mentir systématiquement.
    Prendre les citoyens pour des idiots.
    Confisquer le pouvoir pour une clique.
    Organiser son irresponsabilité entre amis.

    Ce gouvernement est disqualifié ! »

    Masques : les preuves d’un mensonge d’Etat.
    https://www.mediapart.fr/journal/france/020420/masques-les-preuves-d-un-mensonge-d-etat

    Pénurie cachée, consignes sanitaires fantaisistes, propositions d’importations négligées, stocks toujours insuffisants, entreprises privilégiées : basée sur de nombreux témoignages et documents confidentiels, une enquête de Mediapart révèle la gestion chaotique au sommet de l’État, entre janvier et aujourd’hui, sur la question cruciale des masques. Et les mensonges qui l’ont accompagnée. Les soignants, eux, sont contaminés par centaines.

    Les cinq principales révélations de cette enquête explosive.
    https://twitter.com/fabricearfi/status/1245508058748522496

    Article en entier : [ merci à lui ]
    https://seenthis.net/messages/837554

  • Masques : les preuves d’un mensonge d’Etat | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/020420/masques-les-preuves-d-un-mensonge-d-etat

    Fin janvier et début février, le ministère de la santé, conscient de la faiblesse des stocks d’État, n’a décidé de commander qu’une très faible quantité de masques, malgré des alertes internes. Le matériel a de surcroît mis plusieurs semaines à arriver.

    Après ce premier fiasco, l’État a créé, début mars, une cellule interministérielle dédiée à l’achat de masques. Mais là encore, le bilan s’est avéré catastrophique : lors des trois premières semaines de mars, la cellule n’a pu obtenir que 40 millions de masques, soit l’équivalent d’une semaine de consommation au rythme contraint actuel. La cellule a notamment raté plusieurs possibilités de livraisons rapides.

    Le gouvernement a caché cette pénurie pendant près de deux mois et, en fonction des stocks, a adapté ses consignes sanitaires sur le port du masque. Fin février, le directeur général de la santé préconisait un masque pour toute personne en contact avec un porteur du Covid. Un mois plus tard, la porte-parole de l’exécutif déclarait que c’était inutile…

    Des entreprises dans des secteurs « non essentiels » de l’économie ont continué à consommer des masques, pour des raisons économiques. Exemple : l’avionneur Airbus, qui semble avoir bénéficié d’un traitement de faveur. Dans le même temps, des personnels soignants continuent à travailler sans ces masques protecteurs, faute de stocks suffisants.

    Le gouvernement tente désormais de renflouer les stocks, avec une stratégie à 180° : il faut préparer la sortie de confinement, « où on sait qu’il faudra massivement équiper » la population, ainsi que l’a admis la secrétaire d’État à l’économie, Agnès Pannier-Runacher, dans une réunion dont Mediapart a obtenu l’enregistrement.

    L’article fait 5 pages. Je ne mets pas tout. Je passe l’intro au dessus de la partie citée ci-dessus, et je colle la suite par bouts dans des réponses

    ACTE I (fin janvier 2020). Mensonge sur une pénurie

    « La grande erreur aux États-Unis et en Europe est, à mon avis, que la population ne porte pas de masque. » Dans le très sérieux magazine américain Science, un haut scientifique chinois a rappelé, le 27 mars, une évidence face au coronavirus, qui « se transmet par les gouttelettes respiratoires » : « Il faut porter un masque. »

    « Le simple fait de parler peut transmettre le virus, a souligné George Gao, directeur général du Centre chinois de contrôle et de préventions des maladies, qui fut en première ligne dans la lutte contre le Covid-19. De nombreux individus atteints sont asymptomatiques, ou ne présentent pas encore de symptômes : avec un masque, on peut empêcher les gouttelettes porteuses du virus de s’échapper et d’infecter les autres. »

    Le problème : mi-janvier, au début de l’épidémie en Chine, les stocks de masques sont quasi inexistants en France.

    Selon nos informations, on dénombre alors moins de 80 millions de masques dits « chirurgicaux » – plus 80 millions supplémentaires commandés avant l’épidémie, mais pas encore livrés – et zéro en stock de masques dits « FFP2 ». Les premiers sont des masques anti-projection de base, destinés à la population, avec une durée de vie limitée à quatre heures. Ils ne protègent pas ceux qui les portent, mais empêchent ces derniers de contaminer d’autres personnes par leurs postillons.

    Les seconds – ainsi que leur version haut de gamme, les FFP3 – sont, eux, des masques de protection respiratoires à destination du personnel soignant. Seuls les FFP2 et FFP3 protègent leurs porteurs. En cas de pandémie, il faut pouvoir en distribuer, au minimum, à tous les personnels de santé les plus exposés : soignants hospitaliers, médecins de ville, pompiers, ambulanciers… Et pourtant, la France n’en a aucun en stock.

    Ce choix n’est pas celui du gouvernement actuel mais de son prédécesseur. En 2013, la ministre de la santé, Marisol Touraine, avait en effet décidé de supprimer les stocks stratégiques de l’État et de transférer cette compétence aux employeurs, qu’ils soient privés ou publics, désormais chargés « de constituer des stocks de masques pour protéger [leur] personnel ».

    Au lieu de jouer la transparence sur cette pénurie – qui n’est pas de son fait –, et d’expliquer que le peu de stock disponible sera réservé en priorité aux soignants, le gouvernement d’Édouard Philippe choisit de ne pas informer les Français. Et d’utiliser de faux arguments sanitaires pour masquer des stocks insuffisants. Il expliquera ainsi tour à tour que les masques sont inutiles pour la population générale, puis qu’ils ne sont pas efficaces car les Français ne savent pas les porter, pour désormais, sur le tard, tenter d’équiper « massivement » la population afin de sortir du confinement.

    #corinavirus #scandale_d_état #masques #matériel_médical

    • ACTE II (fin janvier – début février). Une réaction lente et insuffisante

      Nous sommes en janvier. Dans l’entourage du professeur Jérôme Salomon, le directeur général de la santé, on s’inquiète déjà, selon les informations recoupées de Mediapart : les responsables politiques n’osent pas avouer à la population que les masques risquaient de manquer, et préfèrent dire dans un premier temps que les masques sont inutiles, jusqu’à ce que les commandes arrivent.

      Le 24 janvier, quelques heures avant la confirmation de trois cas européens (et français) de coronavirus, la ministre de la santé Agnès Buzyn se veut rassurante à la sortie du Conseil des ministres : « Les risques de propagation du virus dans la population [française – ndlr] sont très faibles.

      Le 13 février, trois jours avant sa démission pour mener la campagne des municipales à Paris, Agnès Buzyn annonce lors d’un point presse sur le Covid-19 un grand « marché public européen » pour un approvisionnement massif de masques, plutôt que chaque pays s’équipe séparément. Un mois et demi plus tard, plus personne n’en parle.

      La Commission européenne commence simplement à examiner les offres, pour une mise à disposition des équipements prévue deux semaines après la signature du contrat… « Nous faisons de notre mieux pour accélérer considérablement le processus administratif de la passation conjointe de marchés », a répondu, le 30 mars, le service de presse de la Commission, sans nous donner la moindre indication de date, volume ou répartition par pays de la commande.

      « Peut-être qu’il y a eu des erreurs, concède à Mediapart un membre de la cellule de crise. Sans doute l’État n’a pas été assez réactif, et trop sage dans les demandes. Les procédures de marchés publics sont très bien par temps calme, mais totalement inadaptées par tempête où il faut prendre des décisions rapides, alors que la mise en concurrence est de trois mois… ».

      Pour lui, le problème initial vient surtout « du choix de ne pas avoir de stocks stratégiques de masques ».

      Mi-janvier, « en l’état des connaissances scientifiques, et avec les contraintes budgétaires imposées, la prise de décision était compliquée », plaide-t-il, et « la personne qui aurait alors, dans l’état actuel des finances de la France, dit “on va dépenser des centaines de millions d’euros pour une crise hypothétique”, on lui aurait ri au nez. Dès le départ, on savait que ce serait une gestion de crise liée à la pénurie – de masques, de tests, de respirateurs, de lits de réanimation. À partir de là, vous pouvez anticiper, faire un tas de choses bien – et on en a fait – vous avez perdu la guerre d’entrée. »

      Le gouvernement a aussi clairement sous-estimé la rapidité et la virulence de l’épidémie. « On était conscient dès le départ qu’une vague allait nous arriver, poursuit la même source, mais on ne pensait pas qu’elle serait de cette force-là, que le virus serait aussi violent, avec des patients qui peuvent se dégrader d’un seul coup et qu’il faut intuber d’urgence. »

      Mi-février, le ministère sonne l’alerte auprès de Santé publique France, notamment à l’occasion d’une réunion technique destinée à la mise en place du schéma directeur de stockage et de distribution. Il faut passer à la vitesse supérieure, arrêter de passer par ses traditionnels marchés publics longs, prospecter partout, « en mode guerrier », leur dit-on.

      L’agence ne semble pas prendre pleinement conscience de l’urgence de la situation. Sa léthargie est, plus largement, due à son fonctionnement : elle est née en 2016 de la fusion de trois instituts sanitaires et « armée comme un plan quinquennal au temps de l’Union soviétique », estiment certaines sources.

      Censée être plus réactive et moins soumise aux contraintes administratives que le ministère, la machine SPF souffre en fait de la même lourdeur alors qu’elle doit mener des opérations urgentes. D’autant que, depuis la fusion, son volet « intervention », géré par l’ancien Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), a été négligé. Questionnée par Mediapart, la direction de SPF n’a pas souhaité répondre, nous renvoyant vers le ministère de la santé.

      Dans la foulée de cette alerte, mi-février, le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), un organisme dépendant de Matignon chargé d’organiser la réponse de l’État aux crises les plus graves, qu’elles soient terroristes ou sanitaires, se réunit avec différents ministères. Il demande de s’appuyer sur les quatre industriels français producteurs de FFP2. Puis le cabinet du ministre de la santé convoque ces quatre industriels, et regroupe toutes les commandes d’État via un acheteur unique, SPF. L’objectif : peser davantage dans les négociations avec les fournisseurs.

      En cette fin février, l’épidémie atteint l’Italie de manière inquiétante et l’exécutif commence à s’affoler. Le 25 février, une réunion interministérielle de crise est organisée autour du premier ministre Édouard Philippe. Selon la réponse du ministère de la santé à Mediapart, un « besoin » supplémentaire de 175 millions de masques FFP2 est identifié « sur la base d’une épidémie de 3 mois ». Toujours selon le ministère, Olivier Véran mandate le même jour Santé publique France afin que ces masques soient commandés.

      Publiquement, le ministère de la santé se veut rassurant lors de ses points presse. « Pour ces masques à haut niveau de technicité [les FFP2 – ndlr] », « la commande publique a été passée », afin de « constituer un stock de plusieurs dizaines de millions », déclare Olivier Véran le 26 février, promettant, le lendemain, ne pas être « en réaction » mais « depuis des semaines dans l’anticipation ».

      « Nous avons et nous garderons un temps d’avance », jure-t-il.

      « Il n’y a pas de sujet de pénurie », insiste de son côté Jérôme Salomon, le DGS.

      Deux jours plus tard, tandis que l’agence européenne de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) requalifie à la hausse le risque d’importation en Union européenne, la ministre dissuade, sur RTL, de porter le masque chirurgical, qui n’est utile, dit-elle, que « quand on est malade ». Elle relativise : « Quand vous croisez quelqu’un dans la rue, le risque d’attraper le virus est faible. » Elle affirme aussi que « des dizaines de millions de masques [sont] en stock, en cas d’urgence », que « tout cela est parfaitement géré par les autorités ». « Et si un jour il fallait porter un masque, nous distribuerions le masque, il n’y a absolument aucune raison d’aller en acheter », ajoute-t-elle.

      Les Français font tout l’inverse. Dès la mi-janvier, « beaucoup de gens se sont rués dans les pharmacies pour acheter des masques, dans les magasins de bricolage, en ligne, partout. Ça a beaucoup vidé les stocks », a indiqué, lors d’une réunion interne confidentielle, le directeur commercial pour la zone Ouest Méditerranée du fabricant américain 3M, l’un des leaders mondiaux des masques. D’autant plus que « beaucoup de masques qui étaient stockés en France sont partis en Chine ou ailleurs ». La pénurie dans le circuit commercial a été si violente que 3M « a arrêté dès la fin janvier de fournir les pharmacies » françaises et « priorisé vers les hôpitaux », poursuit le directeur commercial.

      Les propos d’Agnès Buzyn sont aussi en décalage complet avec la réalité vécue au même moment par la cellule de crise du ministère de la santé, qui planche sur un plan d’action pour les différents stades de l’épidémie. Composée de 25 personnes, issues du CORRUSS (le centre de veille du ministère) et de la sous-direction « veille et sécurité sanitaire », cette cellule s’alarme des maigres stocks de masques. « On a commencé à s’inquiéter et on s’est mis en ordre de bataille pour acheter massivement fin janvier », confie à Mediapart, sous le couvert de l’anonymat en raison de sa fonction, un membre de la cellule de crise.

      Le 24 janvier, la Direction de générale de la santé (DGS) saisit l’agence Santé publique France (SPF), sous la tutelle du ministère, pour faire un inventaire des stocks de matériel médical. Le 30 janvier, elle lui demande d’acquérir « dès que possible » 1,1 million de masques FFP2 seulement, selon un document obtenu par Mediapart :

      S’agissant des masques chirurgicaux, la DGS ne préconise pas de nouvel approvisionnement autre que la commande de 80 millions de masques, déjà passée avant l’arrivée de l’épidémie et destinée à atteindre un stock national d’environ 160 millions. Cela semble alors suffisant aux yeux des autorités sanitaires.

      Le 7 février, nouvelle demande de la DGS à SPF. Il s’agit cette fois d’acquérir 28,4 millions de FFP2, à travers « une procédure accélérée d’achat », en contactant seulement les trois gros producteurs français. Du côté des masques chirurgicaux, aucune commande supplémentaire n’est passée. Pire : la DGS ordonne de sortir des stocks 810 000 chirurgicaux ayant une date de péremption courte (31 mars, 31 août 2020), à destination de la Chine…

      Deux semaines après la première saisine, les résultats sont catastrophiques. Au 12 février, sur les 28,4 millions de FFP2 demandés, SPF n’en a reçu que 500 000 et en a commandé 250 000 autres, pas encore livrés. Et sur les 160 millions de chirurgicaux espérés, 30 millions manquent encore, commandés mais toujours pas livrés.

      L’inquiétude monte inévitablement au sein du ministère de la santé, qui s’alarme des difficultés d’approvisionnement, et de la lenteur de Santé publique France. Lors d’une réunion interne sur le sujet, le 11 février, il est acté qu’atteindre l’objectif de 28,4 millions de masques FFP2 est compromis. Ce qui n’empêche pas le nouveau ministre de la santé, Olivier Véran, de claironner, à plusieurs reprises, le 18 février, au micro de France Inter, que la « France est prête » face au « risque pandémique ».

      Comment expliquer ce fiasco ? Le ministère fait valoir qu’il s’est heurté à un marché très concurrentiel – offre limitée, demande accrue à travers le monde, prix en hausse –, notamment face aux Asiatiques, qui possèdent déjà leurs canaux d’approvisionnement habituels.

      Mais le gouvernement a objectivement commis plusieurs erreurs : des commandes en très faibles volumes, trop tardives, dispersées – chaque ministère commande de son côté, pesant moins dans les négociations – et, enfin, l’usage de procédures de marchés publics inadaptées à l’urgence. Y compris au niveau européen.

    • ACTE III (fin février – début mars). Les failles de la cellule commando

      Mais en coulisses, le gouvernement décide de changer de braquet. Santé publique France apparaît clairement sous-dimensionnée pour piloter les commandes, collectes et distributions de masques. Une stratégie agressive est mise en place. L’exécutif crée une cellule de crise interministérielle Covid-19, la CCIL (pour « cellule de coordination interministérielle de logistique »), qui est officiellement « activée » le 4 mars. Avec, en son sein, un service dédié aux achats de masques, chargé de faire remonter les stocks par tous les moyens possibles.

      Cette « sous-cellule masques » rassemble notamment des agents du ministère de la santé et du SGDSN. Sa direction est confiée à Martial Mettendorff, l’ex-directeur général adjoint de Santé publique France, celui-là même qui avait reçu la demande d’accélérer du ministère à la mi-février… Il sera remplacé à la tête de cette « cellule masques » moins d’un mois plus tard, par un commissaire général des armées.

      Le bilan de ce commando inter-ministériel est très maigre. Entre sa création et le 21 mars, soit un peu plus de trois semaines, la cellule n’a pu obtenir que 40 millions de masques tout compris (production française, réquisitions, dons et importations), selon le ministre de la santé. Soit seulement une semaine de consommation du stock stratégique au rythme actuel.

      Sur le papier, l’exécutif a pourtant frappé fort. Le 3 mars, l’État a décidé, par décret du premier ministre, de réquisitionner à la fois tous les stocks de masques sur le territoire, et ceux qui sortent des usines.

      Côté production, ce décret a réglé d’un seul coup les laborieuses négociations engagées en février avec les quatre fabricants dotés d’une usine en France. Ils sont désormais obligés de livrer exclusivement l’État et parviennent à doubler leur production, qui a atteint aujourd’hui 6 millions de masques par semaine. Soit une vingtaine de millions livrés au 21 mars.

      La réquisition des stocks détenus par l’ensemble des institutions et des entreprises françaises a pour sa part connu des ratés. Le 25 mars, la fédération CGT des services publics alerte le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner : des « dizaines de milliers de masques attendent toujours que l’on vienne les chercher ». Pour faire face à la pénurie en Haute-Savoie, le coordinateur CGT des pompiers, Sébastien Delavoux, a en effet appelé des syndicalistes dans plusieurs entreprises publiques de l’énergie. « On a trouvé des dizaines de milliers de masques en passant quelques coups de fil. Dans plusieurs endroits, les masques ont été rassemblés mais personne n’est venu les prendre », raconte-t-il.

      Le décret de réquisition a aussi eu des effets pervers. « On a navigué à vue », estime le membre de la cellule de crise déjà cité, pour qui « le remède a sans doute été pire que le mal ». Selon lui, « la réquisition n’a pas été préparée. Après le tweet d’Emmanuel Macron l’annonçant, il a fallu rapidement faire le décret ».

      Un élément clé en particulier n’a pas été « anticipé » : le fait que la réquisition allait « assécher les circuits traditionnels d’approvisionnement pendant deux semaines, parce que les professionnels qui livraient notamment aux établissements de santé et aux pharmacies ont arrêté, ne sachant pas ce qu’ils avaient le droit de faire ou s’ils allaient être payés ». « On s’est retrouvé en difficulté, et cela a clairement retardé l’approvisionnement en masques, raconte-t-il. Les Allemands, eux, ont par exemple interdit les exportations, au lieu de réquisitionner. »

      Le 20 mars, soit trois semaines après la réquisition, le gouvernement fait volte-face et autorise de nouveau les entités publiques et privées à importer librement des masques.

      Mais le résultat le plus décevant vient des achats à l’étranger. Selon une estimation de Mediapart, que le ministère de la santé nous a confirmé, la « cellule masques » a réussi à importer moins de 20 millions d’unités entre début mars et le 21 mars. Le ministre de la santé a indiqué publiquement que ces « difficultés » viennent de la « course mondiale aux masques » provoquée par la pandémie, qui fait qu’« aucun pays au monde ne fait face à sa demande ».

      Des erreurs ont cependant été commises. Selon nos informations, des propositions sérieuses ont, de fait, été ignorées. Comme celle de Julien, un expert en sourcing industriel en Chine, qui a souhaité rester anonyme (voir notre « Boîte noire »). Il a vécu dix ans sur place, connu plusieurs pandémies virales, et suit la crise de près par le truchement de ses amis confinés à Wuhan.

      Choqué par la politique française qui déconseille le port du masque, il s’est adressé le 13 mars au directeur général de la santé, Jérôme Salomon. « Porter un masque n’est pas un acte folklorique. C’est ce qui a permis et permet de contrôler la propagation du virus en Asie, lui écrit Julien via la plateforme LinkedIn. Le port du masque est obligatoire dans beaucoup de pays asiatiques. […] Les résultats sont probants. […] En Europe, surtout en France, le discours vis-à-vis du port du masque est irrationnel. Les mentalités aussi. Changeons-les. »

      « Il faut en priorité équiper les soignants, les stocks sont limités », lui répond le jour même le directeur général de la santé, confirmant en creux que la politique sanitaire française est en réalité dictée par la pénurie. Julien lui indique que la Chine a dopé ses cadences de production, qui atteignent 110 millions de masques par jour. « Pas si simple, je vous garantis que nous cherchons tous azimuts », lui répond Jérôme Salomon.

      Julien propose alors du tac au tac d’aider l’État en mobilisant son réseau en Chine. Jérôme Salomon l’aiguille vers Antoine Tesnière, le conseiller Covid du ministre de la santé. Deux jours plus tard, le 15 mars, il envoie une proposition détaillée et indique avoir trouvé des usines capables de fournir 6 à 10 millions de masques chirurgicaux par semaine dont 1 million de masques FFP2, une denrée rare. Son courriel est transmis au chef de la « cellule masques », Martial Mettendorff, et à la patronne du SGDN, Claire Landais.

      Le 16 mars, Julien s’entretient au téléphone avec l’adjointe d’Antoine Tesnière. Selon lui, elle lui répond que la cellule n’a pas besoin d’aide car elle a son propre réseau en Chine. Dans des échanges de SMS que Mediapart a pu consulter, les fournisseurs chinois de Julien écrivent qu’ils n’ont pas été contactés par l’État français.

      « J’ai été choqué, car je leur ai trouvé en trois jours des usines fiables, qui avaient des capacités, des certificats et des autorisations d’exporter, mais ils s’en fichaient, indique Julien. Le 16 mars, l’un des fournisseurs que j’avais contacté m’a dit avoir livré 70 millions de masques pour le Kazakhstan, en m’envoyant une vidéo de l’opération. »

      Le ministère de la santé nous a répondu que l’offre de Julien a été rejetée car elle manquait de « fiabilité ».

      Un membre de la cellule de crise reconnaît que l’examen des offres des importateurs a été mal géré, par manque de moyens humains et à cause de problèmes d’organisation qui ont ralenti le fonctionnement de la cellule pendant les deux premières semaines. « Ce flux de mails, on n’a pas été capables de le gérer, on a manqué d’organisation. Des gens n’ont pas eu de réponse, alors que c’était des offres sérieuses. »

      L’offre d’un de ces importateurs, Jérôme* qui a fourni à Mediapart l’intégralité de ses correspondances avec la cellule, a en effet été jugée sérieuse. L’État lui a en effet demandé de faire une proposition détaillée pour une première commande d’un million de masques produits en Chine, selon des courriels obtenus par Mediapart. Mais Jérôme a attendu une semaine avant de recevoir une réponse, finalement négative pour cause de prix jugés trop élevés…

      Certes, Jérôme a fait son offre au moment des méga-commandes annoncées par l’État, le 21 mars (voir plus bas). Mais ce délai d’examen interpelle au vu de l’urgence sanitaire et de la concurrence féroce sur l’approvisionnement. « La demande est telle qu’à chaque jour qui passait, la capacité disponible de mes fournisseurs baissait. L’un d’entre eux a pris une commande de 10 millions de pièces pour un autre pays », indique-t-il à Mediapart.

      À sa décharge, la cellule devait à la fois aller vite et vérifier le sérieux des offres pour éviter les escrocs. « La difficulté, c’est qu’il y avait aussi un flot de propositions étrangères de sociétés qui n’existaient pas, des masques FFP2 proposés à des prix délirants par rapport aux prix habituels, etc. », raconte une source interne. « Les propositions frauduleuses ont pullulé », a confirmé le ministère de la santé à Mediapart.

      Le cabinet d’Olivier Véran nous a répondu que la cellule interministérielle, composée de « professionnels » aguerris, « a reçu de nombreuses offres d’achat ou de don qui ont été examinées par ordre de priorité », et a « suivi l’ensemble des précautions nécessaires pour pouvoir s’approvisionner avec du matériel à la qualité reconnue, issu de sources fiables ». Le ministère ne souhaite pas commenter « l’ensemble des propositions d’offres » que nous lui avons soumises, car il n’y aurait pas de « preuve » que les entrepreneurs nous ayant dit être sérieux le soient vraiment.

      Il semble également y avoir eu des problèmes de communication entre les services de l’État en régions et la cellule nationale. L’histoire la plus emblématique est celle l’entreprise Prolaser, révélée par le quotidien Ouest-France. Lors de la semaine du 16 mars, cette PME, spécialiste des cartouches d’encre recyclées, identifie des fournisseurs chinois capables de livrer rapidement 500 000 masques par jour, grâce à son réseau sur place. L’entreprise s’adresse aux services locaux de l’État, sans succès. Le ministère de la Santé nous a indiqué ne pas avoir eu connaissance de cette proposition.

      Résultat : juste après la parution du décret du 20 mars autorisant de nouveau les institutions et les entreprises à s’approvisionner, les conseils départementaux de Vendée et du Maine-et-Loire en profitent pour passer des commandes pour 1,2 million de masques, pour leur compte et celui des communautés de communes de leur territoire. Ils seront notamment livrés aux Ehpad et aux personnels qui aident les personnes âgées à domicile.

      Prolaser a indiqué à Mediapart avoir sécurisé 500 000 livraisons par jour, avec un premier avion qui a atterri ce lundi 30 mars. Le conseil départemental de Vendée confirme avoir reçu le même jour un premier lot de 30 000 masques, qui permettra de pallier la pénurie en attendant « les livraisons de l’État ».

      Il existe enfin des stocks de masques qui n’ont pas le certificat européen CE, mais respectent des normes étrangères dont les caractéristiques sont très proches. Le 16 mars, Henri(1), patron d’une société d’importation d’objets publicitaires, repère un stock chinois de 500 000 masques chirurgicaux chinois à la norme non-européenne EFB95, destinée à l’origine au marché brésilien. Il a l’idée de les importer en France pour les proposer « à prix coûtant ». « Ces masques étaient conformes et de bonne qualité. Ma réflexion était qu’il vallait mieux avoir des masques, même sans marquage CE, que pas de masque du tout », raconte-t-il.

      Henri contacte les douanes pour leur demander si une importation est possible. « Il leur fallait juste l’accord des services de santé, ce qui est compréhensible. Mais malgré plusieurs relances, nous n’avons pas eu de retour de leur part. Nous avons dû libérer le stock, qui est parti dans d’autres pays. »

      Vu la pénurie, l’Espagne a décidé le 20 mars d’autoriser temporairement l’importation de ces masques aux normes étrangères. La France a choisi pour sa part de réquisitionner à partir du 13 mars les masques dépourvus de marquage CE stockés sur son territoire, mais a attendu le 27 mars pour autoriser les importations.

      Le gouvernement semble donc avoir raté, au mois de mars, plusieurs opportunités de livraisons, dans un contexte de pénurie où les acheteurs publics comme privés se livrent une concurrence féroce auprès des fabricants chinois. « C’est la guerre entre les pays pour être servi, relate un acheteur d’un groupe français. Les ambassadeurs en Chine en sont quasiment à dormir sur les palettes pour sécuriser les lots. Et à ce jeu-là, la France s’est réveillée tard. »

      Ce n’est pas Renaud Muselier qui dira le contraire. Ce mardi 31 mars, le président de la Région Sud (ex-Provence-Alpes-Côte d’Azur) a annoncé, sur la chaîne russe RT, qu’une partie d’une commande française de 4 millions de masques en provenance Chine a été tout simplement détournée vers les États-Unis à la dernière minute. « Sur le tarmac [de l’aéroport], en Chine, une commande française a été achetée par les Américains cash, et l’avion qui devait venir en France est parti directement aux États-Unis », a dénoncé le président de Région.

      Plusieurs entrepreneurs en contact avec l’État ont indiqué à Mediapart avoir prévenu la « cellule masques » que le retard pris dans les commandes se paierait cher. Car dès la mi-mars, le marché chinois est devenu une « jungle », le « far west », selon ces sources.

      Les industriels chinois se sont rués sur le marché du masque, devenu le nouvel « or blanc », ouvrant des usines à tour de bras. Avec pour conséquence une baisse de la qualité et une difficulté croissante pour trouver des stocks fiables. Les Pays-Bas ont ainsi découvert qu’un lot de 1,3 million de masques chinois livrés le 21 mars était défectueux.

      En France, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a expliqué, dans une note confidentielle, avoir reçu, le 26 mars, 700 000 masques « sans marquage CE ». Ces masques « sont conformes », insistent la Région Île-de-France, à l’origine de la commande, et l’ARS, qui l’a contrôlée.

      Le ministère nous a indiqué avoir passé, dès le 11 mars, une commande 175 millions de masques, sans préciser si elle incluait les volumes achetés aux producteurs français.

      Quel que soit le volume commandé à l’import, il a tardé à arriver : entre la fin février et le 21 mars, la cellule interministérielle n’a réussi à se faire livrer que moins de 20 millions de masques achetés à l’étranger.

      Le ministère nous indique que sa « performance » doit être évaluée en tenant compte du « contexte inédit » auquel tous les pays acheteurs ont été confrontés, c’est-à-dire la difficulté à se fournir dans un contexte d’offre mondiale insuffisante et de concurrence exacerbée.

    • ACTE IV (mars). La cellule de Bercy et le scandale Airbus

      C’est le credo du gouvernement depuis le début de la crise : « La distribution des masques privilégie toujours les soignants et les personnes les plus fragiles », répétait, samedi 28 mars, le ministre Olivier Véran. C’est exact, mais « privilégier » ne signifie pas « réserver ». S’il a été fortement réduit, le gouvernement n’a jamais coupé l’approvisionnement des entreprises, au nom de sa politique consistant à préserver autant que possible l’activité économique (lire nos enquêtes ici, là, là et là).

      Lorsque le gouvernement a réquisitionné, le 3 mars, par décret, tous les masques présents sur le territoire, il n’a pas ordonné la saisie de l’intégralité des stocks des entreprises. Selon Marianne, le ministère de la santé avait souhaité récupérer, une semaine plus tard, les masques de l’industrie agroalimentaire, qui en consomme plus de 1,5 million par semaine. Avant d’y renoncer sous la pression des industriels et du ministre de l’agriculture.

      Après une période de flottement, le gouvernement a précisé les règles : les entreprises qui avaient l’obligation légale de fournir des masques à leurs salariés avant la crise, pour des raisons de sécurité au travail, peuvent continuer à le faire, a indiqué le 30 mars la secrétaire d’État à l’économie, Agnès Pannier-Runacher, lors d’un point presse téléphonique.

      Le 20 mars, en libéralisant les importations – seules les commandes supérieures à 5 millions de masques doivent être déclarées et sont susceptibles d’être réquisitionnées –, les autorités ont aussi permis aux entreprises françaises de se fournir en masques, alimentant ainsi la concurrence sur un marché déjà sous forte tension.

      Plus surprenant encore : Bercy a créé, au sein de sa Direction générale des entreprises (DGE), une cellule chargée d’aider les entreprises à importer des masques. Distincte de la cellule interministérielle chargée d’approvisionner l’État pour le personnel soignant, elle coordonne un réseau de 150 acheteurs privés disséminés dans les grands groupes français. La secrétaire d’État a précisé que la « cellule entreprises » se fournit auprès de fabricants chinois « de plus petite taille », les « volumes les plus importants » étant « fléchés » en priorité vers la cellule qui fournit l’État.

      Dès lors que l’État a « verrouillé » ses approvisionnements en passant des commandes géantes annoncées le 21 mars (lire ci-dessous), Agnès Pannier-Runacher trouve « normal » que Bercy s’emploie à « aider les entreprises, puisqu’elles permettent de donner une résilience supplémentaire à la France ».

      Interrogée lundi 30 mars par Mediapart lors de son point presse, elle s’est montrée plus embarrassée sur le nombre de masques consommés par les entreprises. « Moins de quelques millions par semaine », a-t-elle répondu. Questionné par la suite sur les volumes exacts, son cabinet a refusé de répondre.

      La secrétaire d’État a assuré que le privé « ne vient pas en concurrence avec la santé », et qu’il serait « erroné d’opposer l’un à l’autre ». Elle affirme que l’État « déstocke » suffisamment de masques chaque semaine pour les hôpitaux, que l’unique « question » qui se poserait serait la « logistique » de leur distribution aux soignants.

      Cette affirmation est fortement contestable, vu la pénurie qui sévit chez les soignants (lire plus bas). D’autant plus que la libéralisation d’achat des masques datant d’il y a seulement dix jours, la consommation de masques par les entreprises est amenée à augmenter. Et que ces masques sont loin d’être utilisés par les seuls secteurs essentiels ou exposés, comme l’alimentaire et les caissières de supermarché.

      Le cas le plus emblématique est celui du géant Airbus.

      Alors que la crise du Covid-19 a cloué au sol 80 % de la flotte aérienne mondiale, il n’y a aucune urgence à assembler des avions. Airbus a pourtant rouvert ses usines françaises le 21 mars, au prix d’une consommation de masques très importante, selon nos informations.

      Et l’avionneur semble avoir bénéficié d’un passe-droit. Le 20 mars, le directeur commercial de la zone Ouest-Méditerranée du fabricant de masques 3M distribue à ses troupes un document confidentiel intitulé « communication covid » décrivant les secteurs à livrer en priorité. Il s’agit, explique-t-il lors d’une conférence téléphonique, des consignes données par le gouvernement.

      Tout est à première vue logique. La « priorité 1 » concerne les commandes des établissements de santé, de l’industrie pharmaceutique du « gouvernement ». Les secteurs essentiels (alimentaire, énergie) sont en « priorité 2 », tandis que toutes les autres entreprises sont en « priorité 3 », c’est-à-dire « non prioritaires ».

      Toutes les autres, sauf Airbus, classé dans le document en « priorité 2 ». Pourquoi ? « C’est basé sur des priorités qui sont définies par le gouvernement. […] Ce n’est pas nous qui décidons de ces priorités », répond le directeur commercial de 3M, le fabricant de masques, lors d’une conférence téléphonique interne du 20 mars. « Je ne vais pas juger, on n’est pas là du tout pour juger, mais jusqu’à présent, ça faisait partie des priorités », ajoute-t-il. Selon un autre document confidentiel de 3M, Airbus n’a été retiré de la « priorité 2 » que le 25 mars, et reclassé de facto en « priorité 3 », au même titre que l’ensemble des entreprises aéronautiques (ci-dessous).

      Le gouvernement a-t-il vraiment donné instruction à 3M de favoriser Airbus ? Le fabricant de masques n’a pas démenti, se bornant à affirmer qu’il tient « parfaitement compte des recommandations du gouvernement, s’agissant notamment de donner la priorité aux professionnels de santé ». Airbus indique qu’il n’a « pas connaissance de ce classement en priorités 1, 2 ou 3 ». Bercy et le ministère de la santé ne nous ont pas répondu sur ce point.

      Quoi qu’il en soit, après cinq jours d’arrêt pour cause de mise en place du confinement, les usines françaises d’Airbus ont rouvert le 21 mars. Le lendemain, le PDG de l’avionneur, Guillaume Faury, annonçait sur Twitter qu’un de ses A330 s’était posé à Toulouse avec 2 millions de masques chinois, dont « la majorité sera donnée aux gouvernements ». « Nous travaillons pour soutenir les équipes médicales qui sauvent des vies sur le terrain », se félicite-t-il.

      Mais Guillaume Faury a oublié de dire que la cargaison était aussi destinée à ses usines. « Une petite partie a été conservée par Airbus afin d’assurer la sécurité des personnels qui travaillent sur nos sites », reconnaît aujourd’hui l’entreprise. L’avionneur s’est donc bien servi d’un convoi humanitaire pour se fournir discrètement.

      Mediapart s’est procuré les consignes distribuées aux ouvriers à l’entrée des usines : le port du masque chirurgical est obligatoire « lorsque l’activité ne permet pas le respect de la distance de 1 m », avec « changements des masques toutes les 4 heures ». Selon nos informations, la majorité des ouvriers portent des masques. Vu les effectifs d’Airbus, cela représente plusieurs milliers de masques par jour. L’entreprise n’a pas démenti ce chiffre.

      Il y a plus choquant encore : les mêmes consignes indiquent que le « port d’un masque FFP3 » est obligatoire « si exposition aux poussières / brouillard d’huile ». Les masques FFP3, encore plus performants et chers que les FFP2, sont en effet indispensables pour protéger les ouvriers à certains postes. Mais leur utilisation en pleine crise du Covid interroge. Les masques FFP2 et 3 sont les seuls qui protègent leur porteur contre le Covid, et même les soignants en première ligne dans la lutte contre le virus ont du mal à s’en procurer. « Je suis écœuré qu’on utilise des FFP3 alors que ça ne sert à rien d’assembler des avions en ce moment, confie un salarié d’Airbus. Ces masques devraient être donnés aux hôpitaux. »

      Interrogé, Airbus assure qu’il « limite sa consommation en masques chirurgicaux et FFP3 au strict nécessaire afin d’assurer la sécurité de ses employés ». Le groupe justifie la poursuite de ses activités malgré la crise du Covid par la nécessité de « garantir la survie à long terme » de la filière aéronautique, « un secteur primordial et stratégique pour la France ». Airbus indique enfin avoir « rapatrié environ 6 millions de masques, destinés en grande majorité aux services de santé européens » (lire la réponse intégrale dans l’onglet Prolonger).

      Le cas d’Airbus ne pose aucune problème au gouvernement : le ministère de la santé nous a répondu que depuis la libéralisation des importations décidée le 20 mars, toutes les entreprises « dont l’activité nécessite le port d’un masque chirurgical ou de type FFP2/FFP3 », même les non essentielles, ont le droit d’en acheter.

    • ACTE V [mars]. La pénurie actuelle de masques

      Hôpital Bichat, à Paris. Pour affronter la « vague » de patients qui submerge l’Île-de-France, l’établissement a poussé les murs pour augmenter ses capacités d’accueil. Son service de réanimation est passé de 28 lits à 45 lits en quelques jours seulement, la semaine dernière. Cet effort est déjà insuffisant : la jauge est pleine, à 100 %, selon nos informations.

      Dans les autres services aussi, le personnel soignant est en première ligne pour prendre en charge un flot de patients « plus ou moins dégradés ». Mais la pénurie de masques se fait lourdement sentir.

      « Le week-end dernier, on m’a donné trois masques, pas des FFP2 qui nous protègent mais des simples chirurgicaux, pour toute une nuit », dénonce Sarah*, qui était mobilisée auprès de 24 patients Covid, porteurs avérés du virus, la « plupart dans un état critique ». Cette infirmière de 28 ans, qui travaille habituellement en milieu associatif, s’était portée volontaire pour renforcer les équipes hospitalières. « On m’a dit que j’allais être protégée. On m’avait montré des vidéos pour bien m’habiller en cellule Covid, etc. ». En réalité, l’infirmière a l’impression « d’avoir été envoyée au casse-pipe sans protection ». « C’est très traumatisant, je suis sûre d’être désormais contaminée », dit-elle.

      Au lendemain de sa nuit, Sarah a appelé l’astreinte pour annoncer qu’elle ne reviendrait plus à Bichat. En guise de dernier mot, l’hôpital lui a donné le numéro de la ligne directe d’un infectiologue.

      Si le personnel est ainsi rationné, c’est parce que les réserves de masques ont atteint un niveau critique. L’AP-HP, qui emploie 100 000 professionnels sur 39 hôpitaux comptait moins de 2,4 millions de masques en stock au 31 mars, selon les synthèses de sa « cellule masques ».

      Le stock est largement dominé par une réserve de 2 millions de FFP2, dont le réapprovisionnement est à ce jour très incertain. L’AP-HP a donc serré les vis dans tous les établissements de santé, en priorisant le personnel des services de réanimation. Sur les trois derniers jours, du 29 au 31 mars, seulement 20 000 FFP2 ont été distribués en moyenne tous les jours. Et ce, alors que les hôpitaux d’Île-de-France font face à un afflux record de patients (lire ici).

      Conséquence : les consignes édictées, au début de la crise, par les autorités de santé sont tombées à l’eau. Le 20 février, dans une note adressée aux établissements de santé, le ministère exigeait que tout soignant au contact d’un cas « possible » de Covid-19 porte un FFP2. Mais la doctrine officielle d’utilisation de masques a ensuite évolué, rappelle le ministère de la santé.

      Pour restreindre le port du FFP2, les autorités se sont appuyées sur un avis, rendu le 4 mars, par la Société française d’hygiène hospitalière (SF2H), qui a considéré que ces masques pouvaient être réservés « aux personnels soignants qui réalisent des gestes médicaux invasifs ou des manœuvres au niveau de la sphère respiratoire » sur les patients Covid-19. La SF2H s’est elle-même appuyée sur une recommandation de l’Organisation mondiale de la santé ayant pour but de « rationaliser » l’utilisation de matériel médical face au risque de pénurie mondial.

      Pour les masques chirurgicaux aussi, la distribution est désormais très contrôlée. Et pour cause, il ne restait plus que 294 000 masques en stock ce mardi 31 mars. Le ratio des entrées et sorties sur les derniers jours montre la gravité de la situation : en trois jours, l’APHP a distribué 829 750 masques… et n’en a reçu dans le même temps que 7 500.

      L’urgence est telle que l’AP-HP se mobilise avec l’université Paris-Saclay, et le géant du luxe Kering, pour fabriquer quelques centaines de masques supplémentaires par jour à l’aide de quelque 60 imprimantes 3D…

      Dans le même temps, selon les chiffres officiels communiqués par sa direction générale, le nombre de professionnels de l’AP-HP contaminés depuis le début de l’épidémie a grimpé à 1 200 personnes « avec une proportion importante de médecins, proche de 40 % ».

      Le problème ne concerne pas seulement l’Île-de-France. Dans de nombreux territoires et depuis plusieurs semaines, des personnels soignants estiment ne plus avoir les moyens de travailler en sécurité.

      Dès le 19 mars, un infirmier en réanimation au centre hospitalier de Perpignan, où du personnel médical a depuis été contaminé, expliquait à Mediapart les conséquences du manque de masques : « Habituellement, hors Covid, pour les patients en isolement, on doit porter une surblouse étanche, des gants, une charlotte, un masque FFP2, et en sortant de la chambre on jette tout. Aujourd’hui, on nous demande de garder nos masques FFP2 le temps de validité (trois à quatre heures). Sauf que quand on s’occupe d’un patient, on prend des gouttelettes sur le masque, qu’ensuite on va aller téléphoner avec, aller et venir dans le service. Là, on se met vraiment en danger, par souci d’économie. On nous dit : “Il n’y a pas de masque.” »

      La pénurie frappe toute la chaîne hospitalière. Comme dans cet hôpital psychiatrique de Lorraine qui a dû donner 25 % de son stock (10 000 masques chirurgicaux sur 40 000) au CHU de Nancy. La raison ? Même « après les réquisitions du gouvernement », la dotation accordée à l’antenne départementale de l’ARS « permet très difficilement de faire face aux besoins exprimés », explique par mail la direction de l’hôpital, le 18 mars.

      Interrogée par Mediapart, l’ARS Grand Est déclare qu’il s’agissait d’une « demande » et aucun cas d’une « réquisition » : « Cela s’est fait avec l’accord de ces derniers, et appuyé par de la solidarité entre établissements dans une période de crise. Personne n’a été lésé », ajoute-t-on, au service de presse.

      Les conséquences n’ont pourtant pas été neutres : pour libérer du matériel, le personnel soignant de l’hôpital psychiatrique – dont plusieurs patients sont atteints du Covid-19, selon une note interne – a été invité par sa direction à ne plus porter de masque du tout pour la prise en charge de ceux ne présentant pas de symptômes. « Nous sommes exposés depuis près de 15 jours », fulmine une infirmière, qui redoute que le virus prospère entre patients et professionnels asymptomatiques.

      « On nous annonce depuis le début des livraisons de masque en pharmacie, mais où sont-ils ? On ne comprend pas ! », s’alarme, dans la Sarthe, la docteur Audrey Bidault. Depuis plusieurs semaines, cette gériatre compte ses masques, qu’elle distribue au « compte-gouttes » autour d’elle.

      Pour sa consommation personnelle, la médecin « réutilise les masques chirurgicaux sur quelques jours, ce qui n’est pas idéal, bien évidemment ». Mais les réserves fondent. Alors elle réfléchit à la possibilité de recycler ses « derniers FFP2 en les décontaminant à une température de 70 °C pendant une durée de trente minutes ».

      Malgré tout, Audrey Bidault se sait aujourd’hui privilégiée : elle est l’une des rares professionnelles à avoir constitué son propre stock en achetant du matériel sur internet début mars. La raison ? Un voyage en famille au Japon – où la quasi-totalité de la population est équipée d’un masque – dont elle est rentrée, fin février, avec la certitude que la France devait se préparer à la propagation du virus.

      En atterrissant sur le sol français, la docteur Bidault avait alerté les plus hautes autorités, à commencer par le directeur général de la santé, le professeur Jérôme Salomon. « Serait-il possible d’avoir des distributions de masques chirurgicaux à la population sur de multiples lieux ? », lui demande-t-elle, le 24 février, sur LinkedIn. Le professeur Salomon rétorque : « Les masques chirurgicaux sont utiles en cas d’épidémie et ils sont distribués aux personnes de retour de Chine et aux personnes au contact de malades. » Audrey Bidault relance : « Selon moi, cela s’avérera insuffisant. Nous ne sommes pas assez dans la prévention. » « Nous sommes bien d’accord et soutenons toutes les actions de prévention », répond Jérôme Salomon.

      Quatre jours plus tard, la France passe au « stade 2 » de l’épidémie.

    • ACTE VI (seconde quinzaine de mars). Méga-commandes et méga com’

      La France est toujours en « stade 2 » quand le gouvernement maintient le premier tour des municipales du 15 mars. Aucun masque n’est fourni par l’État aux présidents et assesseurs des bureaux de vote. Le lendemain soir, Emmanuel Macron annonce le confinement de la population pour deux semaines.

      Le Covid-19 a alors déjà fait 148 morts.

      Dans les jours qui suivent, l’exécutif martèle ses éléments de langage sur l’inutilité du port du masque. « Les Français ne pourront pas acheter de masque dans les pharmacies parce que ce n’est pas nécessaire quand on n’est pas malade », déclare la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, le 19 mars. « Je ne sais pas utiliser un masque […] ce sont des gestes techniques », ajoute-t-elle le lendemain.

      Le message est diffusé sur tous les tons, sur toutes les chaînes. « Il faut sortir de ce fantasme autour des masques, abonde Agnès Pannier-Runacher le même jour sur BFM Business. Respecter une distance de plus d’un mètre, c’est beaucoup plus efficace qu’un masque. Et surtout on a des cas de contaminations de gens qui portent des masques et le tripotent tout la journée. »

      Le summum est atteint le 25 mars lorsque Sibeth Ndiaye déclare que « le président de la République n’est pas muni d’un masque, tout simplement parce qu’il n’y a pas besoin d’un masque quand on respecte la distance de protection vis-à-vis des autres ». Le soir même, Emmanuel Macron visite l’hôpital de campagne de Mulhouse, dressé par l’armée, avec le précieux masque FFP2 sur le visage.

      En parallèle, Olivier Véran reconnaît enfin la pénurie, le 19 mars, au Sénat, puis lors d’un discours télévisé deux jours plus tard. Il explique, avec près de deux mois de retard, que l’État n’avait que « 150 millions » de masques chirurgicaux et aucun FFP2 en stock fin janvier.

      Olivier Véran livre aussi un bilan très noir. Il admet que, depuis la fin février, l’État n’a réussi à se procurer que 40 millions de masques, tous circuits confondus (production française, dons, réquisitions et import). Il n’y a plus qu’un petit million de FFP2 en stock, et 80 millions de masques chirurgicaux. De quoi tenir seulement deux semaines. Alors même que tous les soignants ne peuvent être servis, la France consomme désormais 40 millions de masques par semaine.

      Mais ces chiffres sont éclipsés par une autre annonce du ministre, ce même 21 mars : près d’un mois après la création de la cellule interministérielle, il indique que l’État est enfin parvenu à commander « plus de 250 millions de masques » à des fournisseurs chinois. La commande ne cesse d’enfler la semaine suivante par voie de presse : 600 millions de masques le 27 mars selon Le Monde, et 1 milliard le lendemain, le samedi 28 mars, selon France Info.

      Ce dernier chiffre est officiellement confirmé le même jour par Olivier Véran lors d’une conférence de presse avec le premier ministre Édouard Philippe. Mais avec une nuance de taille : « Plus d’un milliard de masques » sont commandés en Chine « pour la France et l’étranger, depuis la France et l’étranger, pour les semaines, les mois à venir ».

      Le ministère de la santé nous a précisé qu’il s’agit de commandes faites par la France, mais s’est contredit lui-même sur leur origine. Le cabinet d’Olivier Véran nous a en effet répondu que ce milliard de masques allait « être importé », pour ajouter juste après que ce chiffre « comprend [aussi] la production nationale ». Si cette seconde version est la bonne, ça veut dire que la commande chinoise est donc bien inférieure au milliard.

      Qu’importe, le jour de l’annonce, le chiffre d’un milliard de masques commandés en Chine a tourné en boucle dans les médias. L’opération de communication a fonctionné.

      Car le vrai sujet n’est pas le nombre de masques commandés, mais la date à laquelle ils vont arriver de Chine. Et cela inquiète le gouvernement. Il y a « des incertitudes sur la possibilité de valider les commandes faites, l’incertitude sur la réalité de leur livraison », confiait la secrétaire d’État à l’économie, Agnès Pannier-Runacher, le 27 mars, lors d’une conférence téléphonique avec la filière textile, dont Mediapart s’est procuré l’enregistrement.

      « Je n’ai la certitude que les importations sont effectivement sur notre territoire […] qu’à la minute où l’avion qui doit amener les masques atterrit sur le tarmac des aéroports français », a ajouté Olivier Véran le lendemain.

      Vu la concurrence sur les achats de masques chinois, il faut d’abord s’assurer que les masques soient bel et bien fabriqués, ensuite qu’ils soient de bonne qualité, et surtout trouver des avions pour les livrer. Avec 80 % de la flotte mondiale clouée au sol, les prix du fret aérien ont explosé, et il est devenu très difficile de trouver des avions cargo disponibles.

      Comme l’a raconté Le Monde, le « pont aérien » vanté par l’exécutif a été organisé dans la plus grande précipitation. Un appel d’offres a été lancé dans le week-end des 21-22 mars, juste après l’annonce de la première commande de 250 millions de masques par Olivier Véran. Le marché a été remporté par Geodis, filiale privée de la SNCF, qui est parvenue à affréter deux Antonov 124, dont le premier s’est posé lundi à l’aéroport de Paris-Vatry (Marne), avec 8,5 millions de masques à bord.

      Le gouvernement et Geodis n’ont communiqué aucun chiffre précis sur le volume et le planning des livraisons. Le ministère de la santé a refusé de nous les donner.

      Geodis annonce 16 vols supplémentaires « dans les prochaines semaines », mais aucun volume de masques. Les vols sont programmés au mois d’avril, selon la direction de l’aéroport citée par l’Agence France-Presse (AFP). À raison d’une dizaine de millions de masques par vol, cela pourrait correspondre, si tout se passe comme prévu, à une quarantaine de millions de masques par semaine. Juste assez pour assurer le rythme de consommation actuel, qui comprend donc des restrictions pour le personnel soignant.

      L’État va toutefois pouvoir compter sur un filet de sécurité supplémentaire, grâce aux dons d’entreprises comme le Crédit agricole et surtout LVMH. Le numéro 1 mondial du luxe indique à Mediapart avoir passé le 20 mars une commande de 40 millions de masques made in China offerts à la France, dont 12 millions des précieux FFP2, la livraison étant prévue à raison de 10 millions par semaine au mois d’avril.

      « La grande difficulté, c’est de trouver des avions », indique-t-on au siège du groupe. Le premier lot de 2,5 millions de masques est arrivé en France dimanche à bord d’un appareil d’Air France affrété par le groupe Bolloré. L’avion transportait aussi 3 millions de masques supplémentaires commandés par des entreprises françaises, dont 1 million pour le groupe Casino, destinés à équiper ses caissiers et caissières.

    • ACTE VII (fin mars). Changement de doctrine

      Pour tenter de faire oublier la pénurie et la lenteur de sa réaction depuis la fin janvier, l’exécutif multiplie les opérations de communication. Mardi 31 mars, Emmanuel Macron a visité l’usine de masques Kolmi-Hopen, près d’Angers, pour affirmer son nouvel objectif : la France doit atteindre « une indépendance pleine et entière » en matière de production de masques « d’ici la fin de l’année ».

      Le chef de l’État a vanté la mobilisation des quatre usines françaises, dont la production est passée de 3,5 à 8 millions de masques par semaine, avec l’objectif de grimper à 10 millions « fin avril », et même 15 millions grâce à l’aide de « nouveaux acteurs ».

      Soit un tiers seulement de la consommation actuelle, elle-même insuffisante.

      La veille, la secrétaire d’État à l’économie Agnès Pannier-Runacher avait communiqué sur l’« initiative » gouvernementale pour produire des masques en tissu grâce aux professionnels de l’industrie textile. Alors que le projet a aussi été initié par les entreprises du secteur.

      Certes, le 6 mars, Bercy avait en effet écrit à une représentante de la filière textile pour lui demander d’envisager de produire des masques. Mais plusieurs autres entreprises se sont mises spontanément à produire des masques pour répondre aux appels à l’aide lancés sur les réseaux sociaux par des soignants frappés de plein fouet par la pénurie. La scène, surréaliste, s’est répétée ces derniers jours encore, malgré les annonces tonitruantes du gouvernement de commandes de centaines de millions de masques en Chine.

      De véritables filières de distribution se sont mises en place de manière informelle pour pallier les carences de l’État. En Isère, le personnel médical a trouvé le soutien de la marque de jeans 1083, basée à Romans (Drôme). « Nous avons été appelés le 16 mars par plusieurs médecins qui nous connaissent dans le secteur. Ils nous ont dit qu’ils étaient en rupture de masques et que le CHU de Grenoble leur avait envoyé un tutoriel pour en fabriquer eux-mêmes », raconte le fondateur de l’entreprise, Thomas Huriez.

      « Il n’avait pas le temps pour fabriquer les masques, ni forcément la compétence et les machines à coudre. Ils nous ont donc sollicités pour le faire, ajoute-t-il. On s’y est mis le lundi soir, et on commençait à distribuer le mardi midi. » Depuis la marque a distribué gratuitement des « milliers de masques » à des médecins, dans des Ehpad. D’autres fabricants français ont fait de même.

      Ce n’est que le 18 mars que Bercy a demandé au Comité stratégique de filière mode et luxe de structurer le projet et d’encadrer la mobilisation de la filière. L’objectif : fabriquer deux types des produits aux caractéristiques proches des masques chirurgicaux et FFP2, en version légèrement dégradée. L’État a défini des normes et mobilisé un laboratoire de l’armée pour tester les prototypes. 179 entreprises ont répondu à l’appel ; 81 prototypes ont été validés.

      L’exécutif espère que le filière pourra produire 500 000 masques par jour « dans les prochains jours », et 1 million d’ici la fin du mois. L’objectif n’est pas d’équiper les personnels soignants, mais les salariés du privé et les fonctionnaires que l’État est aujourd’hui incapable de protéger. « Celles et ceux qui sont exposés aux services à domicile, à nos transporteurs, à nos pompiers, à nos forces de l’ordre, à nos caissiers et caissières, aux guichets, à toutes les professions qui sont aujourd’hui exposées qui, je le sais, ont souvent une angoisse et attendent, des masques », a déclaré Emmanuel Macron.

      Conférence téléphonique d’Agnès Pannier-Runacher avec les entreprises du textile membres du projet de fabrication de masques, le 27 mars 2020.

      Derrière ce forcing pour doper la production nationale se cache un changement de doctrine sur le port du masque, à l’opposé du discours officiel sur sa prétendue inutilité. C’est ce qu’a exposé la secrétaire d’État à l’économie Agnès Pannier-Runacher, vendredi 27 mars, lors d’une conférence téléphonique sur les masques avec la filière de l’industrie textile, dont Mediapart s’est procuré l’enregistrement.

      Il faut « augmenter massivement, massivement, notre autonomie en matière de masques », a indiqué la secrétaire d’État. « L’enjeu pour nous, c’est finalement de préparer la sortie de confinement, où on sait qu’il faudra massivement équiper » la population, a-t-elle ajouté. Interrogé par Mediapart, son cabinet a refusé de commenter, au motif que « la doctrine d’usage des masques » est « exclusivement du ressort du ministère de la santé ». Le ministère n’a pas répondu sur ce point.

      Les propos de la secrétaire d’État montrent pourtant que le gouvernement ne croit pas à son discours officiel sur la primauté exclusive des « gestes barrières ». Une fois le confinement terminé, la population sera en effet de nouveau exposée au virus, avec le risque d’une reprise de l’épidémie.

      Dans ce contexte, le masque est un moyen de protection efficace. Quatre pays d’Europe centrale (République tchèque, Slovaquie, Autriche et Slovénie) ont d’ailleurs rendu, ces derniers jours, son port obligatoire dans l’espace public.

      Au moins six plaintes pénales ont déjà été déposées devant la Cour de justice de la République (CJR) contre le premier ministre Édouard Philippe, l’ex-ministre de la santé Agnès Buzyn et son successeur Olivier Véran, accusés d’avoir mal géré la crise, notamment au sujet des masques (lire ici).

      Lors de sa visite de l’usine de masques Kolmi-Hopen, Emmanuel Macron a dénoncé les « irresponsables » qui en sont « déjà à faire des procès alors que nous n’avons pas gagné la guerre ». « Ensuite viendra le temps des responsabilités. Et on regardera tous et toutes ce qu’on pouvait mieux faire, ce qu’on aurait pu mieux faire », a-t-il promis.

      Le chef de l’État a réclamé que cet examen soit réalisé « avec un principe de justice, à l’égard de tous les choix passés, quels que soient d’ailleurs les responsables politiques ». Il a estimé que ceux qui ont « pris des décisions il y a cinq ou dix ans » ne « pouvaient pas anticiper ce qu’on vient de vivre ».

      « Quand on vit quelque chose qui est inédit, on ne peut pas demander aux gens de l’avoir prévu il y a dix ans », a-t-il ajouté, précisant qu’il souhaite que ce « principe de justice » soit appliqué « à l’égard de tous et toutes ».

    • « Le langage politique est conçu pour que les mensonges paraissent vrais et les meurtres respectables, et pour donner à du vent l’apparence de la solidité » - Orwell

      Chez LREM, on le maîtrise mal...

      Merci Mediapart.

    • Au lieu de jouer la transparence sur cette pénurie – qui n’est pas de son fait –, et d’expliquer que le peu de stock disponible sera réservé en priorité aux soignants, le gouvernement d’Édouard Philippe choisit de ne pas informer les Français.

      Et si on ne sait pas les porter (c’est vrai !), qu’on nous apprenne !

  • #Coronavirus. La saisie de 4 millions de #masques à #Lyon par la #France énerve la #Suède

    La société #Mölnlycke a fait transiter par la France des masques qu’elle comptait rediriger en partie vers l’#Espagne et l’#Italie. Mais au nom de la #réquisition des #stocks de #matériels_médicaux en France pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, ces masques ont été saisis le 5 mars dernier.

    L’affaire tombe mal en pleine épidémie du Covid-19 en Europe. La France a réquisitionné le 5 mars un stock de quatre millions de masques appartenant à une entreprise suédoise, révèle L’Express mercredi 1er avril 2020.

    Or, la moitié de ces masques devait être redirigée ensuite vers l’Espagne et l’Italie, pays durement touchés par la propagation du coronavirus.

    Réquisition d’office

    Les masques appartiennent à la société Mölnlycke, spécialisée dans les produits médicaux jetables, qui venaient de se les faire livrer de Chine, rapporte L’Express. Arrivés en Europe par cargo à Marseille, ces masques avaient rejoint la plateforme basée à Lyon de cette entreprise avant d’être redistribués ensuite.

    Sauf que le gouvernement avait décidé le 3 mars de réquisitionner tous les stocks de matériels sur le sol français. Les millions de masques ont donc été saisis d’office.

    Branle-bas de combat pour l’entreprise suédoise qui demande de l’aide au gouvernement de son pays. Mais cela n’aura aucun effet pendant deux semaines. Le Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN) acceptera alors de laisser partir la moitié de ces masques « à titre dérogatoire » vers l’Italie et l’Espagne.

    D’autres saisies avaient créé la polémique en Europe

    Cette affaire rappelle celle qui avait opposé Prague à Rome récemment. La police tchèque avait récupéré le 23 mars une cargaison de centaines de milliers de masques et des appareils respiratoires lors d’une opération de police. Mais cette cargaison était en réalité destinée à l’Italie, pays le plus durement touché par le coronavirus actuellement en Europe.

    Cette saisie avait suscité la colère dans la Botte, tandis que les autorités tchèques plaidaient la bonne foi. Au final, ces dernières ont envoyé une centaine de milliers de masques vers l’Italie pour calmer la polémique.

    https://www.ouest-france.fr/sante/virus/coronavirus/coronavirus-la-saisie-de-4-millions-de-masques-lyon-par-la-france-enerv

    #what_the_fuck !
    ... et que vive la #solidarité européenne !

    #Union_européenne #désunion_européenne #Europe #honte

    ping @reka @fil @simplicissimus

    •  » Un chef du Mossad raconte les coulisses de la « Mission respirateurs » impossible
      https://fr.timesofisrael.com/un-chef-du-mossad-raconte-les-coulisses-de-la-mission-respirateurs

      le gouvernement a chargé le Mossad d’obtenir plus de 130 000 articles nécessaires à la lutte contre l’épidémie du virus respiratoire, notamment des masques à gaz, des kits de dépistage du virus, des médicaments, des équipements de protection et, surtout, des respirateurs, qui sont devenus l’une des marchandises les plus recherchées au monde.

      « Le monde vend [des respirateurs] au compte gouttes. Nous devons trouver les failles », a déclaré M. Het. « Nous sommes les champions du monde des interventions, et nous savons comment gérer des opérations complexes. »

    • Sauf que le gouvernement avait décidé le 3 mars de réquisitionner tous les stocks de matériels sur le sol français. Les millions de masques ont donc été saisis d’office.

      Donc, le 3 mars, #Ils_savaient.

      Pourtant, le 11 mars, au conseil des ministres : « Une définition de la doctrine d’utilisation des masques est en cours de finalisation permettant d’assurer une mobilisation des différents professionnels de santé de concernés en leur assurant une protection adéquate. »
      On conseil juste aux gens de ne pas se serrer la main.

      Et où sont passés les stocks saisis ? (le stock des ARS a été saisi par les préfectures, puis… plus rien…)
      En tout cas pas vers ceux qui en avaient le + besoin pour juguler l’épidémie, à savoir les soignants, en train de tomber comme des mouches.

      #crime_d’État

    • Le 12 mars, discours du PR :

      C’est pourquoi je demande ce soir à toutes les personnes âgées de plus de 70 ans, à celles et ceux qui souffrent de maladies chroniques ou de troubles respiratoires, aux personnes en situation de handicap, de rester autant que possible à leur domicile. Elles pourront, bien sûr, sortir de chez elles pour faire leurs courses, pour s’aérer, mais elles doivent limiter leurs contacts au maximum. Dans ce contexte, j’ai interrogé les scientifiques sur nos élections municipales, dont le premier tour se tiendra dans quelques jours. Ils considèrent que rien ne s’oppose à ce que les Français, même les plus vulnérables, se rendent aux urnes.

  • German Ventilator Manufacturer: «Absolutely Mission Impossible» - DER SPIEGEL
    https://www.spiegel.de/international/germany/german-ventilator-manufacturer-absolutely-mission-impossible-a-549d1e18-8c21

    DER SPIEGEL: Why aren’t there enough masks out there?

    Dräger: When the crisis started, speculators quickly stepped in. They bought masks by the container, and are now selling them at extortionate prices. [...]

    #spéculation #masques #covid-19 #coronavirus #sars-cov2

  • Coronavirus : derrière la pénurie de masques, une répartition opaque sur le territoire

    Alors que la polémique persiste sur le manque de #masques pour les personnels médicaux confrontés au #Covid-19, Mediacités dévoile un document interne au ministère de la Santé qui pose question : les équipements de protection sont répartis en toute opacité sur le territoire français.

    https://www.mediacites.fr/enquete/national/2020/03/30/coronavirus-derriere-la-penurie-de-masques-une-repartition-opaque-sur-le-
    #paywall
    #inégalités #opacité #distribution #répartition #France

  • Coronavirus : des associations de soignants exigent en référé la « réquisition des moyens de production » de médicaments et matériel
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/03/30/coronavirus-des-associations-de-soignants-exigent-en-refere-la-requisition-d
    Une aide-soignante aide un infirmier à s’habiller, dans une tente installée à l’extérieur de l’hôpital Henri Mondor, à Créteil, depuis le 4 mars. ADRIENNE SURPRENANT POUR LE MONDE

    Le référé « mesures utiles » déposé en urgence au Conseil d’Etat demande une « réquisition des moyens de production » pour obtenir masques, respirateurs ou encore morphine.

    Plusieurs associations de santé et des juristes ont saisi en urgence le Conseil d’Etat, lundi 30 mars, pour sommer le gouvernement de réquisitionner, « à l’échelle industrielle », des usines de production pour fournir des masques, des respirateurs et des médicaments indispensables, qui commencent déjà à être rationnés. Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, prévient :
    « On est très inquiets du risque de pénurie et de rupture d’un certain nombre de médicaments indispensables contre la douleur, notamment la morphine et le curare. Pour le Covid-19, mais aussi en soins palliatifs. Le monde entier veut les mêmes médicaments, or nous avons en France le savoir-faire et les principes actifs, il faut que le gouvernement réquisitionne les moyens de production. »

    Le référé « mesures utiles », déposé par l’avocat Jean-Baptiste Soufron, permet de demander au juge administratif toutes sortes de mesures, qui peuvent être imposées à l’administration. Il est signé par « une coalition inédite » : Act Up-Paris, le Collectif inter-hôpitaux, le Collectif inter-urgences, la Coordination nationale des infirmières, l’Observatoire de la transparence des politiques du médicament, ainsi que par le professeur de droit Paul Cassia et le politologue Patrick Weil, tous deux membres de l’Association de défense des libertés constitutionnelles.

    Des demandes conséquentes

    Ces mesures sont conséquentes : les associations réclament des masques FFP2 et FFP3 pour les soignants, des masques chirurgicaux pour les malades – mais aussi pour l’ensemble de la population. Le personnel médical a besoin de pyjamas à usage unique, de gilets jetables, de surblouses, de lunettes, de tabliers, de pousse-seringues et de ventilateurs mécaniques, mais aussi « de moyens de dépistage massif », livrés à tous les laboratoires vétérinaires et de biologie. Les associations réclament la production en urgence et en France de toutes « les molécules apparaissant d’intérêt sanitaire » – tociluzimab, dexaméthasone, lopinavir, ritonavir, anakinra, midazolam et, bien sûr, morphine et curares.

    « Contrairement à ce qu’on raconte, les masques sont très utiles pour toute la population »

    « Le plus urgent, ce sont les masques et les respirateurs, explique André Grimaldi, professeur à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris et fondateur du Collectif inter-hôpitaux. Même chez les soignants, on est obligé de garder des masques toute la journée, voire le lendemain, ce n’est pas possible. Et contrairement à ce qu’on raconte, les masques sont très utiles pour toute la population, même avant le confinement. » Il estime que ce sont les infirmières qui vont en manquer le plus, en réanimation :
    « On a baissé la garde de la sécurité à l’hôpital. On ne peut pas y envoyer des gens sans précautions, malgré les applaudissements de 20 heures – si le gouvernement ne fait rien, la situation risque de se terminer par des droits de retrait du personnel. Il y a de la colère chez les soignants. »

    Si le Conseil d’Etat juge la requête recevable, il fixera une audience probablement dans les quarante-huit heures, après que le représentant du gouvernement aura présenté ses observations.

    #réquisition #médicaments #matériel_de_protection #masques_pour_tous #soins_palliatifs #santé #hôpital

  • Où sont les #masques, M. Macron ? – Histoire d’un #mensonge d’État – Le blog de Clémence Guetté
    https://clemence-guette.fr/2020/03/30/ou-sont-les-masques-monsieur-macron

    C’est l’histoire d’un dévoilement, d’un mensonge officiel, d’un mensonge qui s’est lentement déchiré.

    On a vu fleurir les témoignages sur les réseaux sociaux. Comme celui de Sabrina Ali Benali, médecin urgentiste à domicile.

    Je pars en garde pour la nuit en urgences à dom. On va voir des suspects #COVIDー19
    Il me reste 3 masques FFP2 et 2 masques patients. Pas de sur-blouses. J’ai peur de contaminer les patients fragiles, les personnes âgées. J’ai envie de pleurer… anxiolytique pris .
    — Sabrina AliBenali (@DrSabrinaaurora) March 15, 2020

    Des médecins, des AVS, des infirmières, cette demande revenait : « donnez-nous des masques ».

  • #Coronavirus en #France : comment les choix logistiques de l’#État ont mené à une pénurie de #masques
    https://www.france24.com/fr/20200329-coronavirus-en-france-comment-les-choix-logistiques-de-l-%C3%A9ta

    Le Premier ministre a [...] défendu la gestion de la crise sanitaire par l’État, critiqué pour avoir écarté, début mars, tout risque d’épuisement des stocks de masques.

    « Avant il y avait un stock massif centralisé au niveau de l’État », explique Aurélien Rouquet, professeur de logistique à la Neoma Business School. Ce dernier justifie la pénurie actuelle par des changements d’organisation logistique au niveau de l’État.

  • #Covid-19 : l’#ONU fait don d’un quart de million de #masques aux travailleurs de la #santé de New York | ONU Info
    https://news.un.org/fr/story/2020/03/1065322

    L’ONU va faire don de 250 000 masques aux travailleurs de la santé à New York, où se trouve le siège de l’Organisation, a annoncé samedi le Secrétaire général, António Guterres.

    #coronavirus #santé #etats-unis

    • @cdb_77 @fil est-ce que cette image est disponible quelque part. J’aimerai bien l’imprimer et la coller autour de chez moi et la poser dans l’épicerie bio qui ne protège ni ses salariés ni ses clients.

    • @alexcorp Les chiffres ne sont certainement pas très valides, avec d’énormes doutes sur beaucoup de pays (dont Chine, Iran, US…), et pas seulement la France. Mais partout ils sont sous-évalués, et c’est ce qu’on a de mieux pour le moment.

      @touti L’image vient du Financial Times, il faut ajouter soi-même la mention « masques »

    • Ce n’est pas la première fois que je vois ce dessin que je trouvais démonstratif (il confortait la colère : ici, en gros, on a pas de masques), mais là ça me saute aux yeux : pourquoi la Chine est-elle placée dans la zone « no masks » sur ce graphique graffité en deux zones ’avec’ ou ’sans’ ?

    • J’ai vu une super interview en italien sur le masque. Le masque de chirurgien qui empêche de transmettre le virus aux autres (geste civique pour tou·tes) sans se protéger, le masque FFP2 qui empêche de le choper soi-même mais qui le dissémine allègrement venant de soi et devrait donc être réservé aux #travailleurs_exposés (en particulier les soignant·es), sachant qu’en l’absence de tests on ne sait pas qui est porteur et qui est à protéger...

      C’était super intéressant. Un masque est-il utile ? Non, pas pour marcher dans la rue, faire du vélo ou prendre sa caisse, seulement en cas d’interactions avec des personnes à moins de 2m et qui parlent ou éternuent (parler étant un super moyen de disséminer le virus, contrairement à respirer). Comment utiliser un masque ? Le mettre en le touchant le moins possible, ne jamais le retoucher, l’enlever par les élastiques, ne jamais le mettre en contact avec d’autres choses puisqu’il est vite dégueulasse... Si pénurie et impossibilité de le jeter, le désinfecter en l’exposant au soleil ou aux UV.

      Le médecin faisait un peu flipper sur l’usage des masques et sa conclusion est qu’un mauvais usage ne sert à rien, voire contribue à la dissémination, donc le laisser aux soignant·es. Ou tester, former aux règles d’hygiène les personnes porteuses pour améliorer notre réponse. Mais sur ça, on est à la ramasse.

      L’ignorance tue, que ce soit sur le statut de chacun·e (où sont les tests ???) soit que les gestes d’hygiène soient finalement mal connus ou compris (je veux bien que les personnes qui ont le virus ne sortent pas en pensant bien faire avec un FFP2 et je n’ai aucune idée moi-même d’un paquet de trucs comme la durée de tenue du virus sur un vêtement, une boîte d’œufs si j’en retrouve un jour ou un emballage plastique).

      Je n’ai pas la référence (et en ce moment il y a plein de fausse monnaie qui court, celui-ci disait expliquer les recommandations de l’OMS) mais je peux demander.

  • Claude Got : « Nous n’avons pas encore intégré les méthodes qui ont réduit la mortalité en Chine »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/03/28/claude-got-nous-n-avons-pas-encore-integre-les-methodes-qui-ont-reduit-la-mo

    Quand le bilan de l’épidémie du Covid-19 sera terminé, l’insuffisance de dispositifs de protection personnelle apparaîtra comme l’erreur de gestion la plus grave. Minimiser l’intérêt des masques pour l’ensemble des personnes exposées a été une manœuvre pour réduire la faute des pouvoirs publics qui n’ont pas maintenu le stock de masques commandé par [l’ancienne ministre de la santé] Roselyne Bachelot, en 2009

    • Je repense depuis quelques jours à mon projet de voile laïque. En tout cas je vais pouvoir ressortir avec une voilette en plus de mon foulard de braqueuse comme ca je me touche pas le visage. Je verrai bien toute la population en abaya. Ca me ferai bien marrer de voire tous ces coqs gaulois élécteurs du FN contraint de porter le voile.
      #voile_laïque

    • La seconde erreur a été de dénigrer les méthodes de protection dites « artisanales » permettant d’attendre le retour à une production professionnelle suffisante. Il fallait définir les méthodes et les produits utilisables, validés par des spécialistes avant la fin du mois de février. La Chine a fait le bon choix d’associer le confinement dans les habitations et l’obligation d’être protégé par un masque. Elle a su mettre en œuvre plusieurs choix dans un délai très court que ce soit dans la fabrication d’hôpitaux ou le passage de 10 millions à 100 millions de masques par jour. Nous n’avons pas eu cette réactivité.

      https://www.craftpassion.com/face-mask-sewing-pattern

    • oui mais en france « On est les plus forts » ce gvt viriliste préfère dire « allez donc à la guerre à poil, les habits faits à la maison ne servent à rien, d’ailleurs les habits ne servent que quand vous êtes morts. Et puis on a #Geodis, mieux que les avions de l’armée car ils souspayent leurs ouvriers et d’ici 3 mois vous les aurez vos masques (#oupas) »

      tu as vu https://seenthis.net/messages/835160
      A propos de Geodis
      https://lemediapresse.fr/social/derriere-les-profits-records-de-geodis-la-souffrance-de-ses-ouvriers

      #engraissement_en_vue
      #profiteurs_de_guerre

    • Le vrai danger, c’est que le képi qui fait les contrôles, il voit le type, il va illico être persuadé qu’il le prend pour un con. (Et comme tu sais, le képi, il aime pas qu’on le prenne pour une con.)

    • Cent fois oui. Mais depuis le CHU de Grenoble (pour pallier la #pénurie) et de multiples initiatives venus d’en bas (masques fabriqués un peu partout, y compris à domicile, pour soi, les proches, voire au delà, fabrication avec imprimante 3D de visières de protection pour des soignants, de pièces de rechange pour des respirateurs), des initiatives émergent, circulent, se diffusent, par exemple :

      Distribution de repas à la Cantine des Pyrénées [ et de masques par les mêmes ] , publié le 23 mars.
      https://paris-luttes.info/distribution-de-repas-a-la-cantine-13688

      Utilisons ce temps libre pour imaginer la société de demain.
      La #Cantine_des_Pyrénées avait sous la main des masques FFP2, en grande quantité, et nous en avons distribué 30 000 à des structures de soin et du personnel soignant. Mais il en faudra bien plus.

      Ces apports immanents à la société sont d’ailleurs souvent cités par les personnels soignants ("les seuls masques qu’on a c’est des dons", « on demande et ou on nous apporte des repas », tandis que d’autres effectuent des gardes sans autre nourriture que celle qu’ils apportent individuellement, etc.).

      Si le retard de la star up nation persiste (et se reproduit, cf la pénurie de médicaments indispensables qui s’annonce), les institutions les plus officielles doivent désormais s’en mêler, suivre le mouvement, sans que cela fasse l’objet d’une politique effective (on est loin loin loin du raout Raoult).

      Téléchargez AFNOR Spec – Masques barrières version 1.0
      https://telechargement-afnor.org/masques-barrieres?_ga=2.21063035.130567097.1585335913-61532588

      AFNOR met à disposition de tous un référentiel de fabrication de masques, dit « #masques_barrières ». Pensé pour les néofabricants de masques et les particuliers, il permet de concevoir un masque destiné à équiper toute la population saine et complète la panoplie des indispensables gestes barrières face à l’épidémie de Coronavirus.

    • Testing the efficacy of homemade masks: would they protect in an influenza pandemic? - PubMed - NCBI (2013)
      https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24229526

      CONCLUSION:

      Our findings suggest that a homemade mask should only be considered as a last resort to prevent droplet transmission from infected individuals, but it would be better than no protection.

    • ah c’est bizarre moi je n’ai pas de blocage sur cet article (et je ne suis pas abonnée).

      PostEverything
      Perspective

      Simple DIY masks could help flatten the curve. We should all wear them in public.

      by Jeremy Howard

      Jeremy Howard is a distinguished research scientist at the University of San Francisco, founding researcher at fast.ai and a member of the World Economic Forum’s Global AI Council.

      March 28, 2020 at 8:18 p.m. GMT+1

      When historians tally up the many missteps policymakers have made in response to the coronavirus pandemic, the senseless and unscientific push for the general public to avoid wearing masks should be near the top.

      The evidence not only fails to support the push, it also contradicts it. It can take a while for official recommendations to catch up with scientific thinking. In this case, such delays might be deadly and economically disastrous. It’s time to make masks a key part of our fight to contain, then defeat, this pandemic. Masks effective at “flattening the curve” can be made at home with nothing more than a T-shirt and a pair of scissors. We should all wear masks — store-bought or homemade — whenever we’re out in public.

      At the height of the HIV crisis, authorities did not tell people to put away condoms. As fatalities from car crashes mounted, no one recommended avoiding seat belts. Yet in a global respiratory pandemic, people who should know better are discouraging Americans from using respiratory protection.

      Facing shortages of the N95 masks needed by health-care workers, the U.S. surgeon general announced on Feb. 29 that masks “are NOT effective in preventing general public from catching #Coronavirus,” despite significant scientific evidence to the contrary. This is not just a problem in the United States: Even the World Health Organization says, “you only need to wear a mask if you are taking care of a person with suspected 2019-nCoV infection.”

      There are good reasons to believe DIY masks would help a lot. Look at Hong Kong, Mongolia, South Korea and Taiwan, all of which have covid-19 largely under control. They are all near the original epicenter of the pandemic in mainland China, and they have economic ties to China. Yet none has resorted to a lockdown, such as in China’s Wuhan province. In all of these countries, all of which were hit hard by the SARS respiratory virus outbreak in 2002 and 2003, everyone is wearing masks in public. George Gao, director general of the Chinese Center for Disease Control and Prevention, stated, “Many people have asymptomatic or presymptomatic infections. If they are wearing face masks, it can prevent droplets that carry the virus from escaping and infecting others.”

      My data-focused research institute, fast.ai, has found 34 scientific papers indicating basic masks can be effective in reducing virus transmission in public — and not a single paper that shows clear evidence that they cannot.

      Hospitals battling coronavirus are short on vital supplies. This aid group is rushing to help.

      Direct Relief provides aid to global hotspots during disasters. Now they are responding to the coronavirus outbreak at home, as U.S. hospitals appeal for help. (Ray Whitehouse, Julia Weissman, Nicholas Weissman/The Washington Post)
      Studies have documented definitively that in controlled environments like airplanes, people with masks rarely infect others and rarely become infected themselves, while those without masks more easily infect others or become infected themselves.

      Masks don’t have to be complex to be effective. A 2013 paper tested a variety of household materials and found that something as simple as two layers of a cotton T-shirt is highly effective at blocking virus particles of a wide range of sizes. Oxford University found evidence this month for the effectiveness of simple fabric mouth and nose covers to be so compelling they now are officially acceptable for use in a hospital in many situations. Hospitals running short of N95-rated masks are turning to homemade cloth masks themselves; if it’s good enough to use in a hospital, it’s good enough for a walk to the store.

      I’m an ER doctor. The coronavirus is already overwhelming us.

      The reasons the WHO cites for its anti-mask advice are based not on science but on three spurious policy arguments. First, there are not enough masks for hospital workers. Second, masks may themselves become contaminated and pass on an infection to the people wearing them. Third, masks could encourage people to engage in more risky behavior.

      None of these is a good reason to avoid wearing a mask in public.

      Yes, there is a shortage of manufactured masks, and these should go to hospital workers. But anyone can make a mask at home by cutting up a cotton T-shirt, tying it back together and then washing it at the end of the day. Another approach, recommended by the Hong Kong Consumer Council, involves rigging a simple mask with a paper towel and rubber bands that can be thrown in the trash at the end of each day.

      Masks used to ward off coronavirus show up on Hong Kong beaches
      Many Hong Kong residents have been wearing masks during the global coronavirus outbreak, but now discarded masks are washing up on area beaches. (Reuters)
      It’s true that masks can become contaminated. But better a mask gets contaminated than the person who is wearing it. It is not hard to wash or dispose of a mask at the end of the day and then wash hands thoroughly to prevent a contaminated mask from spreading infection.

      The virus makes us weigh the value of a life. We can’t know if we’ve gotten it right.

      Finally, the idea that masks encourage risky behavior is nonsensical. We give cars anti-lock brakes and seat belts despite the possibility that people might drive more riskily knowing the safety equipment is there. Construction workers wear hard hats even though the hats presumably could encourage less attention to safety. If any risky behavior does occur, societies have the power to make laws against it.

      Many authorities still advise only people with symptoms to wear masks. But this doesn’t help with a disease like covid-19, since a person who does not yet show symptoms can still be contagious. A study in Iceland, where there has been unprecedented levels of testing, found that “about half of those who tested positive [for covid-19] are nonsymptomatic,” according to Iceland’s chief epidemiologist, Thorolfur Gudnason. In fact, in early February, National Institute of Allergy and Infectious Diseases Director Anthony S. Fauci warned there was strong evidence that covid-19 spreads even among people without symptoms. If we all wear masks, people unknowingly infected with the coronavirus would be less likely to spread it.

      I also have heard suggestions that widespread usage of masks in the West will be culturally impossible. The story of the Czech Republic debunks this notion. Social media influencers campaigning to encourage DIY mask creation catalyzed an extraordinary mobilization by nearly the whole population. Within three days, there were enough masks for everyone in the country, and most people were wearing them. This was an entirely grass-roots community effort.

      When social distancing requirements forced a small bar in Prague to close, its owner, Štefan Olejár, converted Bar Behind the Curtain into a mask manufacturing facility. He procured sewing machines from the community and makes about 400 cotton masks per day. The bar employs 10 people, including a driver who distributes the masks directly to people who are not able to leave their homes.

      There are “mask trees” on street corners around the country, where people hang up masks they have made so others can take them.

      The most important message shared in the Czech Republic has been this: “My mask protects you; your mask protects me.” Wearing a mask there is now considered a prosocial behavior. Going outside without one is frowned on as an antisocial action that puts your community at risk. In fact, the community reaction has been so strong that the government has responded by making it illegal to go out in public without a mask.

      When I first started wearing a mask in public, I felt a bit odd. But I reminded myself I’m helping my community, and I’m sure in the coming weeks people who don’t wear masks will be the ones who feel out of place. Now I’m trying to encourage everyone to join me — and to get their friends to wear masks, too — with a social media campaign around #masks4all.

      Community use of masks alone is not enough to stop the spread. Restrictions on movement and commerce need to stay in place until hospital systems clearly are able to handle the patient load. Then, we need a rigorous system of contact tracing, testing and quarantine of those potentially infected.

      Given the weight of evidence, it seems likely that universal mask wearing should be a part of the solution. Every single one of us can make it happen — starting today.

    • Not wearing masks to protect against coronavirus is a ‘big mistake,’ top Chinese scientist says | Science | AAAS
      https://www.sciencemag.org/news/2020/03/not-wearing-masks-protect-against-coronavirus-big-mistake-top-chinese-sc

      (après ça je vais arrêter de spammer seenthis à propos de l’utilité des #masques ; je pense qu’on en est tous et toutes convaincues)

  • Masques : l’usine de Plaintel a fermé il y a deux ans - Bretagne - Le Télégramme
    https://www.letelegramme.fr/bretagne/masques-l-usine-de-plaintel-a-ferme-il-y-a-deux-ans-28-03-2020-12532801


    Président de Saint-Brieuc entreprises, et adjoint au maire de Saint-Brieuc, Jean Jacques Fuan fut le directeur de l’usine de fabrication de masques respiratoires de Plaintel, de 1991 à 2006.
    Photo archives Le télégramme

    En 2018, le groupe américain Honeywell ferme, sans états d’âme, l’usine de fabrication de masques de protection respiratoire de Plaintel (22) et détruit les machines. Un outil dont on aurait bien besoin en ce moment.

    « Quand je vois le nombre d’appels téléphoniques de chefs d’entreprise qui, ces derniers jours, me demandent si je sais où se trouvent les machines de l’usine Giffard, je mesure l’importance de la perte de cet outil dans le contexte actuel », confie aujourd’hui Joseph Le Vée, maire de Plaintel.

    « Scandaleux »
    Malheureusement, certaines machines, les plus simples, ont pris le chemin de la Tunisie et les lignes automatiques de fabrication des masques dont on manque tant aujourd’hui ont été détruites. Honeywell, qui a racheté l’usine, en 2010, les a vendues à un ferrailleur, après la cessation de l’activité et le licenciement de la quarantaine de salariés, en 2018. D’autant plus « scandaleux », selon Jean-Jacques Fuan, ex-directeur du site de 1991 à 2006, qu’elles avaient été fortement subventionnées par l’État pour produire des dizaines de millions de masques, lors de l’épidémie de H1N1 en 2009. Ce qui avait obligé l’entreprise à recruter 100 salariés supplémentaires, les effectifs culminant à 250 personnes.

    L’aventure avait bien commencé
    Le point d’orgue d’une belle aventure. Celle du fabricant de chapeaux briochin, Louis Giffard. Face au déclin de ces couvre-chefs dans les années 60-70, il se reconvertit dans la fabrication de masques de protection respiratoire. Une intuition inspirée lors d’un voyage aux USA mais aussi par un contexte où le monde de l’entreprise commence à prendre en considération la santé au travail. Les débuts promettent. L’activité est soutenue mais la méthode reste artisanale et les rebuts importants. Le rachat par le suédois Bilsom, en 1989, au décès de son créateur se traduit par l’industrialisation du site. La reprise, en 1993, par le groupe Dalloz, puis Spirian, le mène à son déclin. Une « mise à mort » qu’achève Honeywell, après huit ans d’activité réduite. « Et ce, malgré des repreneurs potentiels », affirme Jean-Jacques Fuan.

    « Entreprise d’utilité publique »
    « Quand les Américains sont arrivés, je me suis demandé non pas si mais quand on allait fermer », raconte un ancien salarié. « Quand ils achètent, c’est pour faire des bénéfices, de 15 à 20 %. Or, en France, c’est impossible. Et d’autant moins que c’était Honeywell qui achetait nos masques et en fixait les prix, au plus bas ! Nous étions en chômage la moitié du temps. Nous avons alerté les responsables politiques pour qu’ils défendent une entreprise d’utilité publique. Mais l’économie était reine et nous n’étions plus que 38 salariés. Où était le problème ? ». Serge Quéau, de Solidaires 22, rappelle que les sections CFDT et CGT de l’usine avaient, à l’époque, tiré la sonnette d’alarme et « s’étaient même adressées au Président Macron et au ministre de l’Économie, mais en vain. Aujourd’hui, le retour au réel est brutal ».

    Recréer le site en urgence ?
    « On ne comprend pas pourquoi la cinquième puissance mondiale n’est pas capable de produire suffisamment de masques », renchérit Christine Prunaud. L’exemple de Giffard démontre, selon la sénatrice communiste des Côtes-d’Armor, qu’il est vital de ne pas laisser détruire l’outil industriel du pays, surtout quand il concerne la santé. Et d’espérer, qu’après cette crise, « on reverra fondamentalement le modèle économique dominant ». À court terme, Serge Quéau suggère que l’on recrée en urgence une unité de production de masques à Plaintel : « Le personnel compétent existe et on pourrait utiliser une partie des 750 milliards débloqués par le Banque Centrale Européenne ». Encore faudrait-il trouver des machines…

    • Même sujet, avec un·e SR en congé maladie semble-t-il puisque les coquilles ne manquent pas et que c’est mal écrit.

      Une usine de masques fermée dans les Côtes d’Armor en 2018 : un crève coeur pour l’ex-directeur - France 3 Bretagne
      https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/cotes-d-armor/usine-masques-fermee-cotes-armor-2018-creve-coeur-ex-di

      L’Union Syndicale Solidaires des Côtes d’Armor ne mâche pas ses mots pour qualifier la fermeture de l’usine de masques respiratoires jetables Honeywell. L’entreprise était basée à Plaintel près de Saint Brieuc, mais son propriétaire américain baisse le rideau en 2018. Le site était pourtant rentable selon les ex-salariés, mais pas suffisamment sans doute.

      « Honeywell a pris la décision irresponsable en novembre 2018 de détruire ses huit machines en les faisant concasser par la déchetterie située sur la zone industrielle des Châtelet à Ploufragan », dénonce le syndicat Solidaires.

      « On était le principal fabriquant pour la France », se souvient Jean Jacques Fuan, directeur du site de 1991 à 2006, « et on vendait partout dans le monde : Japon, Corée, Etats-Unis ». C’est même à Plaintel qu’a été créé le masque FFP2 pliable, celui qui nous manque tellement aujourd’hui.

      « Aujourd’hui, le retour au réel est brutal », ajoute Solidaires dans un communiqué, « et c’est avec stupeur que le pays tout entier découvre avec la catastrophe sanitaire du coronavirus qu’il ne possède pratiquement pas de stocks de masques ».

      Jean-Jacques Fuan parle d’une « faiblesse des intervenants de l’Etat. L’entreprise avait bénéficié de subventions importantes au moment de la grippe H1N1, et pourtant aucune volonté de convoquer Honeywell pour tout mettre en oeuvre afin de sauver l’entreprise. »

      #masques #coronavirus #planification #industrie_de_marché

    • France 3 Bretagne
      30 mars 2020

      Qui se souvient de l’entreprise Honeywell de Plaintel près de Saint Brieuc ? Cette usine spécialisée dans la fabrication de masques a fermé en 2018. Aujourd’hui l’ancien directeur regrette que son entreprise n’ait pas été plus soutenue par les pouvoirs publics au moment du dépôt de bilan.

      Le reportage à Plaintel (22) de Jean-Marc Seigner, Catherine Bazille - archives 2009 - Interview : Jean-Jacques Fuan, ancien directeur de l’unité de production de Plaintel

      https://www.youtube.com/watch?time_continue=2&v=FyrHwknMCpA&feature=emb_logo

    • un rapport d’audit financier confidentiel réalisé en 2018, peu avant la fermeture de l’entreprise bretonne. Selon les conclusions de ce document, jamais révélé, jusqu’ici « le motif économique du plan de licenciement collectif est infondé ».

      « La fermeture du site apparaît relever de motifs financiers et stratégiques bien plus qu’économiques parce que le résultat net est construit artificiellement, analyse le document. Dire que le site de HSP (Honeywell Safety Products) Armor devrait fermer pour cause économique est techniquement infondé… à moins de considérer que fournir un dividende par action et une valorisation boursière 2017 record (et supérieur à la moyenne des 500 entreprises cotées les plus représentatives du marché boursier américain) est un motif économique. Ce qui est plus que discutable. Il est évident que la fermeture du site de Plaintel ne permettra pas d’augmenter le dividende par action de 9 % comme annoncé par le nouveau CEO (Chief Executive Officer) du groupe, mais cela participe bien à la stratégie économique et financière globale du groupe. »

    • Comment la France a sacrifié sa principale usine de masques basée en Bretagne

      Alors que la France manque cruellement de masques face à l’épidémie de coronavirus, une entreprise française, installée en Bretagne, qui pouvait en fabriquer jusqu’à 200 millions par an, a fermé en 2018 après avoir été rachetée par un groupe américain. Qui est responsable de ce fiasco ? La cellule investigation de Radio France a enquêté.

      « Pour eux, on est un peu comme des pions sur un jeu de Monopoly. » Antoine* est un « ancien » de l’usine de Plaintel, dans les Côtes-d’Armor. Depuis les années 90, il a vu passer plusieurs repreneurs de l’usine bretonne spécialisée dans la fabrication des masques respiratoires, notamment les fameux masques FFP2 indispensables au personnel médical. Il a connu le boom de l’entreprise au moment de la grippe H1N1, en 2009, lorsque l’usine fonctionnait « 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 » avec « huit machines, dont cinq supplémentaires », raconte-t-il. Une capacité de production multipliée par cinq et 300 employés pour fabriquer des masques pour la France entière.

      En pleine pandémie de coronavirus, et alors que la France manque actuellement cruellement de masques pour protéger les personnels soignants notamment mais aussi tous ceux qui continuent de travailler au contact du public, cette entreprise française, installée en Bretagne et qui pouvait en fabriquer jusqu’à 200 millions par an, a fermé en 2018 après avoir été rachetée par un groupe américain.

      « En 2005, j’avais signé un protocole d’accord avec le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, explique Roland Fangeat, ancien président de la division respiratoire du groupe Bacou-Dalloz, propriétaire de l’usine de Plaintel à l’époque. Nous nous engagions à garantir une production d’au moins 180 millions de masques par an. Le groupe a investi plus de près de neuf millions d’euros sur le site de Plaintel pour financer notamment une extension. Nous avions une capacité de production de 220 millions de masques par an, quatre millions par semaine, en cas de crise. »

      L’État s’engage, avant de se retirer

      Dans ce protocole d’accord, dont la cellule investigation de Radio France révèle l’existence, « l’État s’engage à commander à l’entreprise » plusieurs millions de masques chaque année. « L’État assurera le renouvellement de son stock arrivé à péremption », prévoit l’article 11 de cet accord. Une ligne de conduite alors suivie par l’État, malgré certains retards dans les commandes, comme le montre ce courrier du 14 juin 2006 de Dominique de Villepin : « Je tiens à vous assurer que l’État continuera à respecter ses engagements, en termes de quantité comme de calendrier », écrit le Premier ministre de Jacques Chirac.

      En 2010, le géant américain Honeywell rachète le groupe Sperian (le nouveau nom de Bacou-Dalloz) alors propriétaire de l’usine de Plaintel qui compte encore 140 salariés.
      Licenciements, délocalisation et fermeture

      « Lorsque les Américains arrivent à #Plaintel, ils nous expliquent qu’ #Honeywell est une chance pour nous et que nous allons ’intégrer’ un groupe mondial avec des ’valeurs’ et une force de frappe commerciale importante », témoigne Damien*, ancien employé de l’usine de Plaintel. Pourtant, dès 2011, le groupe annonce 43 suppressions d’emplois. Les plans de licenciement s’enchainent, le chômage partiel devient la règle. A l’été 2018, les 38 derniers salariés de l’entreprise sont finalement licenciés pour des motifs « économiques ».

      La production de masques est délocalisée sur un site déjà existant (créé dans les années 90) à Nabeul, en Tunisie. En septembre 2018, l’usine de Plaintel ferme ses portes. Un mois plus tard, les chaînes de production sont détruites. Alexandre*, lui aussi un ancien salarié, se souvient : « Lorsque je suis sorti pour ma pause-déjeuner, j’ai vu un semi-remorque embarquer un morceau de nos lignes de production qui mesuraient entre 50 et 60 mètres de long. Tout est parti chez le ferrailleur pour être détruit. J’étais vraiment choqué. J’avais l’impression de voir un corbillard chercher le corps d’un mort. C’est un peu à l’image de ce qui nous est arrivé au sein de l’entreprise. »

      Lors de sa fermeture, l’entreprise ne produisait plus que huit millions de masques par an.
      Le silence de l’État

      À l’été 2018, les élus du personnel, à la demande des salariés, tentent d’interpeller par mail le président de la République. Ils expliquent au chef de l’État que l’usine de Plaintel est « une entreprise d’utilité publique » dont l’actionnaire américain a tout fait pour la rendre « largement déficitaire » tout en « absorbant massivement les deniers publics ». « Nous sollicitons votre aide pour intercéder en notre faveur auprès des dirigeants du groupe » concernant « des indemnités de licenciement dont le niveau se situe très largement au deçà de ce qui se pratique habituellement chez Honeywell, en Europe de l’Ouest », peut-on encore lire dans ce courrier adressé à l’Élysée.

      Le 24 juillet 2018, le chef de cabinet de l’Élysée lui répond qu’il prend « bonne note » de ce courrier qu’il transmet au ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire. Le 7 août 2018, le chef de cabinet de Bruno Le Maire répond à son tour que « le ministre a pris bonne note des éléments (…) communiqués et a demandé à la délégation interministérielle aux restructurations d’entreprise et à la direction générale des entreprises de faire le point sur ce dossier. Vous serez directement informé de la suite qui pourra lui être réservé », explique le ministère de l’Économie. « Je n’ai eu aucune nouvelle… », témoigne auprès de la cellule investigation de Radio France l’un des salariés à l’origine de l’envoi de ce courrier.

      Contactée, la présidence de la République ne fait aucun commentaire. « C’est le temps de l’unité, pas de la polémique », souffle un proche de l’Élysée. Du côté du ministère de l’Économie, on assure « ne pas avoir eu les moyens d’empêcher une fermeture d’usine dans un secteur qui n’était pas alors considéré comme stratégique ».

      Ce n’est pas l’entreprise qui est en cause mais plutôt l’État qui a arrêté de stocker des masques, ajoute ce conseiller de Bruno Le Maire. Sans commande du ministère de la Santé entre 2010 et 2017, le site a été utilisé très en dessous de sa capacité. Si Honeywell avait eu une commande régulière de masques pour le compte de l’État, l’usine n’aurait pas fermé."

      « Ce message des salariés n’était pas une interpellation du chef de l’État demandant à conserver le site, souligne encore Bercy. Il s’agissait essentiellement d’une demande portant sur le niveau des indemnités de départ. Nous avons donc transmis à la Direccte [direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi] en lien avec le ministère du Travail. »

      « À l’époque, la fermeture de l’usine a été considérée comme un non-évènement, s’indigne Serge Le Quéau, militant au syndicat Solidaires des Côtes-d’Armor. Jamais la question de l’utilité sociale de cette production de masques n’a été abordée. »

      « Personne n’a rien fait lorsque notre usine a fermé, témoigne encore Coralie*, l’une des 38 personnes licenciées. C’est révoltant. On a eu l’impression qu’on nous laissait tomber. Quand je vois ce qui se passe en ce moment avec l’épidémie de coronavirus, je me dis que je devrais être en train de fabriquer des masques… »
      De l’artisanat à la mondialisation

      « C’est une belle histoire industrielle qui se termine par un beau gâchis », commente, un brin désabusé, l’ancien maire de Plaintel, Joseph Le Vée. Pour comprendre comment on en est arrivé là, il faut remonter à 1964, lorsque le Français Louis Giffard reprend l’activité de fabrication de chapeaux pour dames de son père. Le secteur est alors en déclin. Un an plus tard, Louis Giffard se lance donc dans la production de masques anti-poussières. En 1971, il crée une société anonyme à Saint-Brieuc (baptisée FILGIF puis GIFFARD) et tente de s’inspirer de ce qui se passe aux États-Unis avec la société 3M qui écrase le marché. Dans les années 80, Louis Giffard quitte ses locaux à Saint-Brieuc pour s’installer à Plaintel.

      « C’est l’époque où on commence à s’occuper plus sérieusement de la santé des salariés, explique l’ancien directeur général du site de Plaintel, Jean-Jacques Fuan. Il y a un essor important de ce qu’on a appelé les EPI, les équipements de protection individuelle. Mais la manière de produire des masques de Louis Giffard est assez artisanale. Elle entraîne jusqu’à 30 % de rebut. » Après la mort de Louis Giffard, l’entreprise est vendue au groupe suédois Bilsom, en 1986. Elle est rachetée par le groupe français Dalloz en 1993 qui devient le groupe Bacou-Dalloz en 2001 (rebaptisé Sperian en 2003).

      La production s’automatise et les normes se développent. « Nous vendions des masques dans le monde entier, se souvient Jean-Jacques Fuan, en Allemagne, en Angleterre, en Suède, à Taïwan, au Japon, en Amérique du Sud, aux États-Unis… Lorsque je suis devenu directeur industriel du groupe en 2003, j’ai été chargé d’harmoniser les pratiques des 48 sites de production en Europe et en Afrique. Mon rôle a consisté à rationaliser les fabrications du groupe pour faire des économies d’échelle. » Jean-Jacques Fuan quitte le groupe Sperian, alors propriétaire de l’usine de Plaintel, en 2006.

      Mais en Bretagne, on ne ressent pas encore l’effet des réductions des coûts. « Pour moi, ces années correspondent à une modernisation de l’entreprise, se souvient Alexandre*. C’est en 2010 avec Honeywell que tout bascule. »
      Un licenciement économique « infondé »

      La fermeture de l’usine de Plaintel était-elle vraiment inéluctable ? Les éléments recueillis par la cellule investigation de Radio France permettent d’établir que la reprise de l’usine bretonne par Honeywell en 2010 s’apparente plutôt à une opération financière sans réelle volonté de développer l’outil de production. C’est ce que montre notamment un rapport d’audit financier confidentiel réalisé en 2018, peu avant la fermeture de l’entreprise bretonne. Selon les conclusions ce document, jamais révélé, jusqu’ici « le motif économique du plan de licenciement collectif est infondé ». « La fermeture du site apparaît relever de motifs financiers et stratégiques bien plus qu’économiques parce que le résultat net est construit artificiellement », analyse le document.

      « Il est évident que la fermeture du site de Plaintel ne permettra pas d’augmenter le dividende par action de 9 % comme annoncé par le nouveau CEO (Chief Executive Officer) du groupe, mais cela participe bien à la stratégie économique et financière globale du groupe », poursuit le texte.

      Ce rapport d’audit note également « un changement de stratégie qui marginalise les masques au sein d’Honeywell Safety Products », la division de l’entreprise dont dépend l’usine de Plaintel. Honeywell « souhaite désormais se concentrer sur des activités davantage rentables, où il est leader et en avance dans la course technologique face à ses concurrents, explique le document. La priorité est de pousser l’offre sur les solutions connectées, à forte profitabilité. La priorité de la direction est de rationaliser la gamme et de se concentrer sur les marchés en forte croissance que sont l’Inde et la Chine. »

      « Le groupe Honeywell n’a finalement jamais investi dans le site de Plaintel, constate encore le rapport d’audit. Les seuls investissements significatifs ont concerné un bâtiment de près de 20 000 m² largement sur-dimensionné. Les investissements en machines et outils de production ont été plus que limités depuis la reprise du site de Plaintel par Honeywell. (…) La conséquence directe est que l’usine fonctionne depuis lors avec un outil vieillissant et aujourd’hui loin des performances des machines plus modernes. L’investissement incorporel (brevets notamment) a été inexistant et les dépenses de R & D [recherche et développement] n’ont pas concerné de réelles innovations mais presque exclusivement des homologations. Elles ont été largement financées par le Crédit impôt recherche. Ces éléments viennent étayer le fait que le site de Plaintel n’a jamais été une entité stratégique pour le groupe, insiste le rapport, mais bien un complément non core [non essentiel] de sa gamme d’EPI [équipement de protection individuelle] et une source potentielle de revenus élevés en cas de pandémie. Cela correspond tout à fait à la stratégie du groupe. Il n’investit que dans des marchés à forte croissance et à forte profitabilité puis accompagne ses activités matures sans investir jusqu’à arrêt ou cession de l’activité (..) Le marché du masque jetable reste en croissance et reste rentable à condition d’investir régulièrement dans ses outils de production et ses produits », ajoute le rapport d’audit.

      Ce désinvestissement du groupe Honeywell est confirmé par les témoignages d’anciens salariés que nous avons recueillis. « Il y avait une stratégie claire de fermeture de l’entreprise, assure Damien*. Pour un groupe américain comme Honeywell, l’investissement doit forcément être remboursé par les bénéfices en six mois, c’est impossible ! Les investissements étaient donc interdits. Si on voulait lancer des nouveaux produits, c’était à nous de nous débrouiller, il n’y avait pas de crédit pour la recherche-développement. À l’époque de l’ancien propriétaire, le groupe Sperian, un nouveau masque sortait tous les quatre ans, j’en ai vu défiler trois. Avec Honeywell, aucun nouveau masque n’a été développé sur le site de Plaintel en huit ans. En fait, on cherche à faire mourir l’entreprise. »

      « La période précédente a correspondu à une modernisation de l’entreprise, confirme Coralie*. Beaucoup d’innovations, la création d’un laboratoire et le renforcement du service recherche-développement. »

      « Nous avons découvert le système Honeywell, témoigne Antoine*. Ils appellent ça le ’Honeywell operating system’, ce qui correspond en fait au lean management, c’est-à-dire : l’usine maigre. Le but est de supprimer tous les gaspillages à travers une multitude de procédures souvent ubuesques. Réfléchir, c’était déjà commencer à désobéir. Il fallait appliquer les standards… même complètement idiots. Il y avait un système baptisé ’5 S’ qui établissait toute une série de règles pour un rangement poussé à l’extrême : chaque poubelle, téléphone ou même revue devait avoir une place bien déterminée. C’était du grand n’importe quoi. Honeywell appliquait également la technique du gemba, un mot japonais qui veut dire ’sur le terrain’. Le but était de faire venir les managers en force au sein de l’usine, ce qui stressait énormément les salariés. »

      « Honeywell surveillait constamment les stocks de matières premières, ajoute Damien*. Il ne fallait pas dépasser un certain niveau pour ne pas perdre de l’argent… parce qu’un stock, c’est de l’argent immobilisé. Et donc ce stock baissait régulièrement. Sauf que lorsqu’il fallait fournir des quantités importantes pour répondre à la demande d’un client, nous n’avions plus la capacité de le faire. Le client devait attendre trois mois. Du coup, il allait voir ailleurs. C’était un cercle vicieux : faute de commandes notre production baissait, donc notre stock diminuait… ce qui faisait à nouveau diminuer la production. »

      Une stratégie parfaitement assumée par le groupe américain. Ainsi, les catalogues de la firme américaine ne contiennent pas la gamme de masques Easyfit qui correspond aux masques utilisés en cas de pandémie. C’est ce qu’on constate dans le catalogue 2014-2015 ou 2016-2017 du groupe.

      « Le fait qu’Honeywell n’essayait pas de vendre la totalité des produits que l’usine de Plaintel était en capacité de produire montre bien que le groupe voulait fermer le site, c’est tout, ajoute Antoine*. D’ailleurs, ils encourageaient les salariés à partir. Dès que l’effectif est descendu sous la barre des 50 personnes, ils ont lancé le go pour la fermeture. »

      Contactée, la direction de la communication d’Honeywell a décliné notre demande d’interview. Elle se borne à réaffirmer que la décision de fermer le site de Plaintel « a été prise pour rationaliser [ses] activités mondiales et mieux servir [ses] clients ».
      Des choix financiers contestables

      Pourtant, les conclusions du rapport d’audit confidentiel de 2018 que la cellule investigation de Radio France a pu consulter montrent que le site de Plaintel était tout à fait être rentable. « L’activité d’Honewell de masques respiratoires jetables en Europe, dont celle de HSP (Honeywell Safety Products) Armor, est une activité rentable », peut-on lire dans ce document.

      « Les comptes sociaux de HSP Armor n’en témoignent que partiellement dans la mesure où :

      – Une partie (non négligeable) de la marge est captée par HSP Europe, l’entité de commercialisation du groupe pour ces produits.

      – Les frais généraux intègrent des coûts de management, de services centraux, de top management, de commercialisation et de reporting bien supérieurs à ce que peut supporter une entité de moins de 5 millions de chiffre d’affaires et de moins de 50 personnes. »

      Autrement dit : ce sont les choix financiers opérés par le groupe qui placent l’usine de Plaintel sous tension. Malgré cela, l’usine continue d’être profitable à Honeywell, constate encore le rapport d’audit. La « rentabilité économique [de l’usine] est avérée, peut-on lire dans le document, mais trop faible pour les standards du groupe » Honeywell.
      « Une mort programmée »

      « Ce qu’il faut bien comprendre c’est que l’usine de Plaintel n’avait pas accès directement au marché, explique Antoine*. Elle avait un unique client… c’était le groupe Honeywell. C’était lui qui fixait le prix d’achat des masques, donc si on ne rapportait pas assez d’argent, c’était de leur fait. Nous étions une goutte d’eau dans leur chiffre d’affaire. »

      « Le groupe a construit une rentabilité très faible du site de Plaintel, estime l’avocat Laurent Beziz, qui défend plusieurs salariés licenciés. Le groupe fixait les prix très faibles auxquels étaient vendus les articles [c’est ce qu’on appelle les prix de cession ou prix de transfert] tout en effectuant des refacturations importantes de frais. Résultat : la rentabilité était forcément insuffisante. Tout ça était planifié, il s’agit d’une construction économique. La mort de l’usine de Plaintel était programmée. »

      Ce point est également confirmé par l’audit réalisé en 2018 au sein de l’entreprise. « Avec une construction différente du compte de résultat, et notamment des prix de transfert, l’activité de HSPA aurait pu être bien plus profitable et dégager des résultats significatifs », conclut le rapport d’audit.

      « Il y a eu un abus de l’employeur dans l’exercice de son droit de cesser son activité », estime encore l’avocat Laurent Beziz. C’est la raison pour laquelle plusieurs salariés contestent leur licenciement devant le tribunal administratif et le conseil de prud’hommes. Parmi eux se trouvent cinq salariés « protégés » (délégués du personnel et représentants syndicaux) dont le licenciement a été refusé par l’inspection du travail.
      Quand le ministère du Travail déjuge l’inspection du Travail

      Dans une lettre datée du 22 janvier 2019 que la cellule investigation a pu consulter, l’inspecteur du travail de Saint-Brieuc estime que « le motif économique invoqué à l’appui de la demande de licenciement n’est pas avéré » estimant que « la seule volonté de majorer le profit de l’entreprise n’entre pas dans la définition des difficultés économiques. »

      Le 17 juillet 2019, la direction générale du travail désavoue l’inspection du travail, validant ainsi le licenciement économique de cinq salariés protégés de Plaintel. « Si une partie des moyens de production ont été déménagés en Tunisie afin d’être réutilisés par une autre entité du groupe, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit d’une entité juridique distincte de l’entreprise HSAP (Honeywell Safety Products Armor), estime la direction générale du Travail. De fait, la cause économique invoquée par l’employeur, à savoir la cessation totale et définitive de l’entreprise, doit s’apprécier au niveau de l’entreprise. Il est constant que la cessation totale et définitive de l’entreprise constitue une cause économique autonome sans qu’il n’appartienne à l’autorité administrative d’examiner la réalité d’éventuelles difficultés économiques rencontrées par l’entreprise en amont de la décision de cesser son activité. »

      Autrement dit : l’État n’a pas à interférer dans la décision, souveraine, d’Honeywell. « Nous contestons l’analyse du ministère du Travail, commente l’avocat des salariés, Me Beziz, il s’agit bien d’une délocalisation. » Contacté, le ministère du Travail n’a pas souhaité réagir. Quant à l’avocat d’Honeywell, Philippe Gautier, il n’a pas donné suite à notre demande d’entretien.
      Faire revivre l’usine de Plaintel ?

      « Avec cette crise du coronavirus, les vieux logiciels de compréhension doivent être modifiés, estime Serge le Quéau du syndicat Solidaires des Côtes-d’Armor. Il faut que l’État et surtout les citoyens et les salariés se réapproprient collectivement certains moyens de production essentiels à l’intérêt de la nation. » Avec d’autres, comme l’ancien directeur général du site de Plaintel, Jean-Jacques Fuan, Serge Le Quéau plaide pour une reprise de l’activité de l’usine à travers une Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC).

      L’idée avait été portée en 2001 par l’ancien secrétaire d’État à l’Économie sociale et solidaire du gouvernement Jospin, Guy Hascoët. Ce dernier est désormais en contact direct avec la présidence de la région Bretagne. « Ça va être la guerre sur les tarmacs d’aéroport autour des masques, estime Guy Hascoët. Alors que nous avons besoin de 40 millions de masques par semaine et que nous ne sommes même pas à dix en production hexagonale, il faut pousser le plus vite possible toutes les capacités pour se prémunir des épisodes à venir. Dans une situation d’extrême urgence, la Société coopérative d’intérêt collectif est le seul mécanisme qui permet à tous les Bretons de prendre des parts sociales au capital de l’usine devenant ’leur’ projet tout en échappant à la loi de la concurrence du marché. Si on a la possibilité de faire sortir un million de masques par jour d’ici six mois, il ne faut pas se poser de question. Cette compétition mondiale va être cruelle. »

      Le site de l’usine de masques de Plaintel a été réoccupé par l’entreprise Bio Armor, « spécialisée dans les produits naturels pour la nutrition, l’hygiène et l’environnement de l’élevage ».

      « Il y a des friches industrielles et des locaux disponibles dans la région pour relancer l’activité de l’usine, estime de son côté Serge Le Quéau. Les machines ont été détruites mais elles ont été fabriquées par une entreprise bretonne. Si de l’argent se débloque, on peut les reconstruire. Beaucoup d’anciens de Plaintel n’ont pas retrouvé de travail. Le savoir-faire est toujours là. »

      Ces derniers jours, le groupe américain Honeywell a annoncé qu’il ouvrait une usine à Rhodes Island pour faire face à la demande de masques aux États-Unis. « Une information assez dérangeante », commente l’ancien président de Plaintel, Roland Fangeat.

      *Les prénoms ont été modifiés

      https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/enquete-franceinfo-comment-la-france-a-sacrifie-sa-principale-usine-de-

      #délocalisation #désindustrialisation

  • 600 millions de masques : l’objectif du « pont aérien » en préparation entre la Chine et la France, Piotr Smolar et Nathalie Guibert
    https://www.lemonde.fr/international/article/2020/03/27/600-millions-de-masques-l-objectif-du-pont-aerien-en-preparation-entre-la-ch
    Déchargement par des soldats de l’armée tchèque de matériel médical en provenance de Chine, sur l’aéroport de Pardubice, le 22 mars. JOSEF VOSTAREK / AFP

    La rotation des avions pourrait durer plusieurs mois, en fonction des aléas de la production, afin de combler la pénurie de matériels dont souffrent les hôpitaux français.

    Six cents millions de #masques chinois, dont 74 millions de FFP2, les protections respiratoires les plus performantes. Tel est l’objectif spectaculaire du marché, en plusieurs volets, qu’est en train de passer la France avec des fabricants de la région de Shenzhen, en urgence. Confronté à la nécessité de reconstituer des stocks quasi vides, pouvant mettre en danger la vie des Français, selon ses détracteurs , le gouvernement compte initier un « pont aérien » avec la Chine.

    Des #appareils_respiratoires sont aussi prévus, mais la question des tests du coronavirus demeure irrésolue. La rotation des avions pourrait durer près de 14 semaines, selon les informations du Monde, en fonction de la rapidité de la production sur place. Un avion-cargo doit décoller le 29 mars, pour ramener dix millions de masques. Un autre le 31 mars, avec une quantité similaire attendue.

    « Nous avons prévu des avions-cargos qui iront en Chine chercher les masques. Ils sont prévus, ils sont affrétés, on peut évoquer l’image du pont aérien. De fait, c’est ce qui va se passer », a expliqué le premier ministre, Edouard Philippe, au Sénat, le 25 mars. Il a fallu raccourcir au maximum les délais, trouver les premiers trajets, sans disposer de toutes les garanties sur la qualité des livraisons à venir. Un marché interministériel d’affrètement en urgence a été passé le week-end des 21 et 22 mars, mentionnant déjà quatre vols – à 1,5 million d’euros l’aller-retour – de 10 millions de masques chacun. L’ordonnateur est la Direction des achats de l’Etat (DAE), qui relève du ministre des finances et des comptes publics. La DAE procède à ces achats sous l’autorité du premier ministre.

    Un défi logistique

    Reste à faire voler des avions, ce qui est une gageure dans la période, des professionnels du secteur logistique évoquant une situation « non plus de crise mais de chaos ». Avico, le courtier privé de la défense qui a effectué, sur divers appareils, une trentaine de vols de rapatriement de Français depuis l’étranger, a ainsi tenté de trouver un avion immédiatement après l’appel gouvernemental. Un A340 portugais qui partait de Shanghaï dans le week-end avec une cargaison de masques disposait de place pour un fret supplémentaire. Mais ce créneau n’a pu être pris.

    Les cinq prestataires du ministère des armées pour les affrètements urgents de fret n’ont toutefois pas été sollicités pour ces vols de matériel médical. Et dans les circonstances actuelles, extrêmement précaires sur le plan de la circulation aérienne, il a été décidé de scinder le marché. En ce qui concerne la partie acheminement, c’est la société Geodis qui en a la charge. A elle de trouver les appareils capables de maintenir ce pont aérien. L’agence nationale Santé publique France est responsable de l’approvisionnement en masques. L’ambassade de France à Pékin essaiera, dans la mesure du possible, de vérifier la qualité de la production chinoise.

    Une fois en France, les équipements seront dans un premier temps acheminés dans les huit entrepôts de Santé publique France, répartis sur tout le territoire. Puis la livraison envisagée par le gouvernement serait confiée à différents prestataires. Selon nos informations, Girodmedical, un distributeur en ligne qui livre de grands comptes tels que les hôpitaux, est concerné. L’entreprise située dans la région de Nantes, a toutefois répondu au Monde : « Nous ne pouvons commenter aucune information ».

    La Chine « veut montrer sa force »

    D’autres pays européens ont procédé différemment, et plus vite. La République tchèque et la Slovaquie ont utilisé leur cotisation au contrat de transport stratégique Salis géré par l’OTAN avec un Antonov 124, le plus gros porteur du monde, pour acheminer des matériels médicaux depuis Shenzen, soit 70 tonnes le 21 mars, opération qui devait être renouvelée les 23 et 31 mars.
    A l’Elysée, on tient à souligner la réciprocité qui a existé entre Européens et Chinois, pour rejeter toute idée de sauvetage du Vieux Continent par Pékin. On rappelle qu’à la fin janvier, le gouvernement chinois avait sollicité l’aide de la Commission européenne, qui avait envoyé 56 tonnes de matériel sanitaire, notamment des combinaisons de protection, du désinfectant et des masques chirurgicaux. Aucune publicité n’avait alors été faite sur ce sujet, pour ne pas embarrasser la Chine. La réciproque n’est guère vraie.

    Aujourd’hui, la donne a changé. « On voit bien le récit géopolitique qui s’installe côté chinois, et dans une moindre mesure côté russe, dit une source à l’Elysée. Pékin veut montrer sa force, prétend avoir surmonté la crise et battu le virus au point de venir en aide au monde entier, en ciblant à court terme l’Europe. Il faut assumer le fait qu’on a besoin de ces masques à court terme, dans la guerre sanitaire dont parle le président. Ensuite, on aura une question plus générale à traiter, sur la dépendance économique, qu’on fait mine de découvrir sur les médicaments par exemple. Comment peut-on produire et distribuer nous-mêmes ? »

    Des contacts nourris entre Paris et Pékin

    Pékin n’a pas seulement davantage de moyens de production que les Européens. Le régime chinois accompagne ses cargaisons d’une puissante propagande, destinée à faire oublier son déni et ses mensonges pendant les deux premiers mois de la crise sanitaire, à Wuhan. Au cours des derniers jours, la Chine a envoyé des équipements respiratoires, des cargaisons de gants et de masques, à de nombreux pays européens, dont l’Italie, l’Espagne, la Grèce, la Serbie, et bien entendu la France. Des fournitures qui comportent de sérieux risques : le quotidien espagnol El Pais soulignait jeudi que les 640 000 tests envoyés au pays étaient défectueux, pas assez sensibles.
    Le milliardaire chinois Jack Ma a aussi organisé son propre réseau d’aide, par exemple vers la Belgique. Mais l’ampleur du marché passé par le gouvernement français dépasse largement les aides ponctuelles, de type humanitaire. Les contacts politiques entre les deux pays ont été nombreux ces derniers jours. En début de semaine, Emmanuel Macron s’est entretenu avec le président chinois Xi Jinping. De son côté, le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a dialogué par téléphone avec son homologue Wang Yi, jeudi 26 mars.

    Pékin est reconnaissant à la France de s’être opposée, parmi d’autres, lors de la visioconférence du G7 tenue la veille, aux propos incriminants tenus par le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo. Celui-ci souhaitait que les participants emploient dans un communiqué final l’expression « virus de Wuhan ». Le responsable américain a mis en cause directement le Parti communiste chinois pour l’ampleur de la crise. Ne pas reconnaître cette responsabilité équivaudrait, selon lui, à une forme de complicité passive, a rapporté une source française au Monde. D’où l’atmosphère extrêmement houleuse de la discussion, par écrans interposés.

    Le 14 mars : Covid-19 : la discrète bataille des masques entre la France, l’Allemagne et l’Italie

    La Commission européenne presse Paris et Berlin de partager leurs stocks avec d’autres pays.

    Montrer l’exemple. Empêcher que d’autres Etats soient tentés, eux aussi, de garder pour eux leurs masques, gants et autres combinaisons médicales. Neuf jours après que la France et l’Allemagne, selon des modalités différentes, ont décidé de conserver les matériels médicaux de protection dont elles disposaient sur leur territoire, alors que la situation italienne commençait à devenir préoccupante, la Commission européenne a fini par réussir, vendredi 13 mars, à les faire revenir à des considérations plus altruistes.

    Face à la progression dramatique de l’épidémie de coronavirus en Italie, Bruxelles ne pouvait pas rester inactive. D’abord, parce que le décret de réquisition de Paris et l’ordonnance d’interdiction d’exportation de Berlin, tous deux publiés le 4 mars, contrevenaient à l’un des principes fondamentaux régissant le marché intérieur de l’Union européenne (UE) : le droit à la libre circulation des marchandises. Ensuite, parce que les deux pays possèdent une quantité importante de matériels médicaux de protection : tandis que la France a constitué des stocks stratégiques, l’Allemagne en fabrique en grande quantité et a sur son territoire le centre de distribution d’un producteur américain.

    Indifférence
    « Les deux cas de figure étaient différents. La France voulait lutter contre la spéculation et garder les masques pour son personnel médical, les chercheurs en laboratoire et les malades. L’Allemagne, elle, gardait ses masques chez elle mais n’empêchait pas quiconque le souhaitait de s’approvisionner pour constituer des stocks », explique une source européenne. Deux situations distinctes, donc, mais pas de différence essentielle du point de vue de Bruxelles : pour la Commission, le décret de réquisition français comme l’interdiction d’exportation allemande étaient tout aussi inacceptables.
    Accusée d’indifférence à l’égard du drame que vivait l’Italie, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a compris qu’elle avait personnellement intérêt à se saisir du dossier. De son côté, le commissaire au marché intérieur, Thierry Breton, a pris contact avec les industriels pour faire un état des lieux des stocks et des capacités de production. Le sujet a été évoqué, le 6 mars, lors de la réunion extraordinaire des ministres européens de la santé, à Bruxelles. Mais c’est la tribune libre de l’ambassadeur italien auprès de l’UE, Maurizio Massari, publiée sur le site Politico, mardi 10 mars, qui a accéléré les choses. Le diplomate y racontait que son pays avait demandé des masques à ses partenaires, mais sans succès. « Seule la Chine a répondu. Ce n’est pas bon signe en ce qui concerne la solidarité européenne », écrivait-il.

    La Chine – d’où la pandémie est partie – a tout fait, de son côté, pour que son geste ait le plus de retentissement possible. Ainsi, dans la soirée de jeudi, un Airbus A350 en provenance de Shanghaï a atterri sur l’aéroport romain de Fiumicino. A son bord, neuf palettes contenant du matériel respiratoire, des électrocardiogrammes et plusieurs dizaines de milliers de masques, et d’autres matériels mis à disposition par la Croix rouge chinoise, mais aussi neuf médecins spécialistes chinois, ayant tous œuvré dans la lutte contre la propagation du virus dans l’empire du Milieu. A l’arrivée de l’avion, le chef de la diplomatie italienne, Luigi Di Maio, a chaleureusement salué les autorités chinoises : « C’est ce que nous appelons de la solidarité et je suis certain que d’autres arrivées se produiront », a-t-il remercié, ajoutant : « Nous ne sommes pas seuls, il y a des personnes dans le monde qui veulent aider l’Italie. » Comment mieux souligner que les partenaires le plus proches de l’Italie, eux, ont manqué à l’appel ?

    Bruxelles a donc demandé à la France et à l’Allemagne de revoir leur copie et d’y stipuler clairement que les matériels de protection présents sur leur sol pouvaient être mobilisés pour les appels d’offres conjoints de l’UE et les besoins de tel ou tel pays. « Il est possible de prévoir des restrictions d’exportations, mais il faut que ceux qui sont en contact avec les malades ou le virus, partout en Europe, soient prioritaires », explique un fonctionnaire.

    Réaction en chaîne

    Compte tenu de l’explosion des besoins en France et en Allemagne, les décisions de leurs gouvernements n’auraient sans doute pas bouleversé la donne. Outre-Rhin, par exemple, une entreprise comme Gehe Pharma Handel, qui fournit quotidiennement plus de 6 500 pharmacies dans le pays, a vu ses demandes en masques de protection respiratoire multipliées par dix depuis février. « Aujourd’hui, nous ne sommes que très partiellement en capacité de livrer les masques qui nous ont été commandés », explique la direction de l’entreprise. Et ce, alors que l’Allemagne – avec plus de 3 600 cas détectés dont 8 mortels – a été pour l’instant beaucoup plus épargnée que la France ou l’Italie.

    Berlin s’y sera repris à deux fois avant de fournir un texte qui convienne aux autorités européennes. Jeudi, le gouvernement allemand a proposé une mouture qui n’a pas été jugée à la hauteur, même si elle prévoyait la possibilité d’exporter du matériel de protection sous certaines conditions. Vendredi soir, Berlin était encore en train de travailler à la modification de son ordonnance. Selon le journal La Repubblica, samedi, l’Allemagne aurait autorisé l’envoi d’un million de masques et autre matériel de protection dans la péninsule.
    Trois autres pays ont cependant notifié à la Commission leur intention d’interdire l’exportation de matériel de protection médicale : la République tchèque, la Bulgarie et… l’Italie. D’autres, comme la Pologne, l’envisagent également. Face à ce début de réaction en chaîne en contradiction avec les promesses de solidarité formulées par Emmanuel Macron et Angela Merkel, la Commission a donc décidé de réagir. Vendredi, Mme von der Leyen a ainsi regretté que des « Etats membres empêchent les équipements de protection médicale d’arriver jusqu’aux patients et médecins qui en ont besoin, en ces temps où la solidarité est nécessaire ».

    Le 7 mars : Pékin a augmenté ses capacités de production et mène une diplomatie du masque à travers le monde pour redorer son blason.

    Foyer principal de l’épidémie due au coronavirus, la Chine démultiplie ses capacités de production de masques. Malgré les pénuries, elle met désormais un point d’honneur à en redistribuer à travers le monde – au côté souvent de matériel médical et de kits de test du virus. L’Iran, qui avait puisé dans ses stocks pour envoyer un million de masques en Chine début février au point d’en manquer très vite, en a reçu 250 000 de Pékin fin février. La Corée du Sud et le Japon, qui en ont fourni plusieurs millions, en ont reçu en retour des centaines de milliers récemment.

    Outre les donations gouvernementales chinoises, les patrons du privé sont appelés à la rescousse : Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, a annoncé, lundi 2 mars, une donation d’un million de masques au Japon et à l’Iran. La presse chinoise a rapporté début mars la distribution, fin février, de masques gratuits dans la rue à Nagoya, au Japon, par des étudiants chinois présents dans le pays dans le cadre d’un échange universitaire.

    Eviter la stigmatisation du pays
    Voici le temps de la « diplomatie du masque », devenu un signe de good will (« bonne volonté »), d’abord en Asie puis dans le reste du monde, après les fortes tensions géopolitiques générées par la propagation du coronavirus.
    Séoul était en plein réchauffement avec Pékin quand le Covid-19 a frappé – ce qui explique que la Corée du Sud n’ait pas imposé de quarantaine aux voyageurs venant de Chine – tout comme le Japon, qui devait accueillir Xi Jinping fin avril pour la première visite d’Etat d’un président chinois depuis 2008, après des années d’animosité. Le voyage a été repoussé.

    Dans les premières semaines de l’épidémie, la Chine s’était indignée de voir certains pays, notamment les Etats-Unis, fermer leurs frontières ou stigmatiser ses ressortissants – jusque des pays « amis » comme la Russie – tout en couvrant de louanges les alliés les plus fidèles, comme le Cambodge.
    « Quand une idéologie, une personne détenant des secrets comme Snowden, un nuage radioactif ou des migrants traversent une frontière entre deux pays, et ce faisant, provoquent des conséquences sur les rapports de pouvoir de part et d’autre, on est face à un facteur géopolitique. C’est le cas du virus, et il entraîne une géopolitique du masque », souligne, depuis Taipei, le sinologue Stéphane Corcuff, de Sciences Po Lyon.

    Les masques sont d’autant plus symboliques pour Pékin que Peter Navarro, le conseiller pour le commerce de Donald Trump, connu pour son hostilité à la Chine, en a fait fin février un enjeu stratégique de la bataille pour la « relocalisation » des industries parties dans l’ex-empire du Milieu : Pékin a « placé des restrictions à l’exportation des masques N95 [la meilleure qualité] » fabriqués en Chine par la société américaine 3M « pour que nous n’en recevions pas, elle a nationalisé nos usines », avait-il déclaré le 26 février sur la chaîne conservatrice Fox News, annonçant le projet de construire de nouvelles lignes de production de masques aux Etats-Unis. Dans un communiqué publié le 5 mars, le ministère chinois du commerce a déclaré « n’avoir jamais placé aucune restriction » à l’exportation de masques fabriqués en Chine.

    « L’usine du monde »
    Depuis quelques jours, les médias officiels chinois consacrent une grande place au boom de la production de masques dans le pays : celui-ci produit désormais 1,66 million de masques N95 par jour – soit cinq fois plus que début février. Il produit chaque jour 110 millions de masques toutes qualités confondues – soit douze fois plus que début février. Un long article sur le site de l’agence de lutte contre la corruption, publié le 3 mars, décrit cette montée en puissance industrielle comme un « code secret chinois », entendre, une « arme secrète ».

    « Le masque est devenu l’objet symbolique de la lutte contre l’épidémie. A travers les donations à l’extérieur, la Chine veut aujourd’hui démontrer que l’usine du monde a toujours d’énormes capacités de production », explique le chercheur en sciences politiques indépendant Chen Daoyin. « Avec l’épidémie, il y a eu beaucoup d’interrogations, en Chine comme à l’étranger, sur le “destin commun de l’humanité” [une antienne de la propagande] promis par la Chine, et aussi sur les risques pour les autres pays de mettre tous leurs œufs dans le même panier en faisant tout produire en Chine. Maintenant que l’épidémie s’est stabilisée en Chine et qu’une deuxième phase est en cours dans le reste du monde, Pékin redouble d’efforts pour reconstituer une image de leadership », poursuit-il.

    Le point d’orgue de ce retour en force d’une Chine volontariste et fière devait être un livre publié par le département de la propagande du Parti communiste, et intitulé Da guo zhan yi, soit « La grande puissance combat l’épidémie ». Les médias officiels ont annoncé sa publication officielle le 26 février – mais sa distribution n’a pas encore eu lieu. « L’annonce de la sortie du livre a généré plein de quolibets sur Internet, ils se sont sans doute dit que c’était prématuré et qu’il y aurait un retour de bâton. Donc ils attendent », explique un observateur des réseaux sociaux chinois, qui préfère garder l’anonymat.

    #Chine #usine_du_monde

    • Depuis quelques jours, les médias officiels chinois consacrent une grande place au boom de la production de masques dans le pays : celui-ci produit désormais 1,66 million de masques N95 par jour – soit cinq fois plus que début février. Il produit chaque jour 110 millions de masques toutes qualités confondues – soit douze fois plus que début février.

      C’est dément ces chiffres. Par jour !

    • Coronavirus : 16 millions de masques destinés à la France bloqués en Chine
      https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/les-infos-de-05h-coronavirus-16-millions-de-masques-destines-a-la-france-bloques

      Deux avions cargos n’ont pas pu décoller de Paris à cause de l’évolution récente des contrôles sanitaires effectués par les autorités chinoises à l’arrivée.
      L’annulation fait suite à l’évolution récente des contrôles sanitaires effectués par les autorités chinoises. Par peur d’une nouvelle vague de contamination, elles testent obligatoirement les pilotes à l’arrivée. Par ailleurs, le 31 mars, un pilote d’Air France a été testé positif et a été placé en quarantaine comme l’expliquait Le Monde.

      Les autorités chinoises sont très tatillonnes et des discussions sont en cours pour tenter de trouver une solution rapide. « On est sur de grosses négociations » explique une source gouvernementale. La solution serait peut être de passer par un autre pays et que Shanghai ne soit finalement qu’une escale.

      Cela éviterait aux pilotes de dormir en Chine et donc d’éviter un test à l’arrivée puisqu’ils resteraient tout simplement dans l’avion avant de repartir en France. Lundi 6 avril, ce sont 16 millions de masques qui devaient donc arrivés en France.

      Il n’y a aucun problème sur la marchandise, elle est actuellement sous haute protection à Shanghai mais il manque l’essentiel : l’avion pour les ramener en France. Chaque semaine, Air France a pourtant prévu 6 rotations entre les deux pays. Les négociations se poursuivent en ce moment pour faire redécoller les avions au plus vite et chargés de millions de masques.

    • l’article du monde en paywall
      https://www.lemonde.fr/international/article/2020/04/04/coronavirus-foire-d-empoigne-mondiale-pour-l-achat-de-masques-chinois_603556
      J’écoutais un texte sur yt qui demandait la levée des paywall des journaux nationaux (grassement subventionnés) en ce moment où l’information est nécessaire à tout le monde.
      Du coup, je dois comprendre par hypothèse que la france envoie des pilotes non testés en chine dont certains sont donc porteur du virus. #pas_de_tests = #pas_de_masques

    • Coronavirus : toute la planète cherche à acheter des masques de protection en Chine, 4 avril 2020

      https://www.lemonde.fr/international/article/2020/04/04/coronavirus-foire-d-empoigne-mondiale-pour-l-achat-de-masques-chinois_603556

      Cette foire d’empoigne se fait dans l’urgence, car chaque pays est confronté à la pénurie et à des opinions publiques abasourdies par le manque d’anticipation.

      L’avion d’une équipe de football américain déchargé de sa cargaison de masques en provenance de Chine, à Boston (Massachusetts), le 2 avril. JIM DAVIS / REUTERS

      C’est la grande cohue aux portes des ­usines chinoises, auprès desquelles toute la planète cherche à se procurer des masques de protection pour freiner la propagation du coronavirus. Dans cette foire d’empoigne se font concurrence les Etats entre eux, mais aussi les collectivités locales et les entreprises. Le tout dans l’urgence, car chacun est confronté à la pénurie et à des opinions publiques abasourdies par le manque d’anticipation de leurs dirigeants, et ce alors que l’essentiel du trafic aérien à destination de la Chine a été supprimé. « Il y a une course aux masques en Chine, il faut être prêt à dégainer tout de suite pour ­réussir à passer une commande », résume Alain Rousset, président de la région Nouvelle-Aquitaine.

      Le gouvernement français a lancé ce qu’il compare à un « pont aérien » avec la Chine – des vols cargos payés au prix fort pour importer 600 millions de masques. Ils doivent notamment approvisionner les hôpitaux. Mais les régions conservent la responsabilité de trouver des masques pour les établissements d’hébergement des personnes âgées dépendantes et les soignants à domicile. La Nouvelle-Aquitaine devait réceptionner une commande de 2,6 millions de masques ce week-end, à l’issue d’un parcours du combattant : la cargaison devait d’abord décoller de Shenzhen (sud), grand centre industriel qui jouxte Hongkong. Mais face à l’engorgement du terminal cargo de l’aéroport, elle a été envoyée par camion jusqu’à Shanghaï (est). Là, l’attente s’annonçait si longue que le tout a finalement été convoyé pour un décollage depuis Zhengzhou, 950 km à l’ouest.

      « Course contre la montre »

      L’Ile-de-France a connu pire déconvenue. Lorsque, le 20 mars, le gouvernement lève sa réquisition des masques sur le territoire, Valérie Pécresse, présidente de la région, se précipite car les besoins sont grands. Elle procède à une commande de plusieurs millions de masques auprès d’un fournisseur chinois. Mais très vite, sans nouvelles de la cargaison, la région se rend compte que le stock a été tout simplement vendu à une autre partie, plus offrante. « Nous ne savons même pas qui l’a acheté finalement, on parle d’Américains, mais en réalité, c’est difficile à dire », précise-t-on dans l’entourage de la présidente.

      Cette situation ubuesque est la conséquence d’une demande en flux hypertendu et d’une concurrence impitoyable. Il faut désormais payer rubis sur l’ongle dès l’ordre passé, parce que les producteurs peuvent se permettre de l’exiger, mais aussi en raison du coût de leurs matières premières. « Auparavant, il fallait un premier versement, d’environ 30 %, puis le reste après livraison. La nouveauté, c’est que les usines veulent 100 % comptant à la commande, sinon les autres passent avant », explique Melvin Gerard, consultant dans l’import-export avec la Chine.

      L’Ile-de-France a fait appel aux réseaux de ses entreprises, mais également à la communauté d’origine chinoise afin de trouver un producteur fiable. « Nous nous sommes battus car la recherche de masques est une course contre la montre pour identifier les producteurs et, surtout, faire décoller les cargaisons. Nous avons pu sécuriser une filière d’approvisionnement grâce à la communauté franco-chinoise en Ile-de-France », explique Valérie Pécresse.

      Dans un dépôt stockant des masques, à Marolles (Marne), le 30 mars. Photo fournie par l’armée. THOMAS PAUDELEUX / ECPAD VIA AP

      Les différents chefs d’Etat, Emmanuel Macron en tête, ont beau promettre de réfléchir à terme à cette dépendance à la Chine, dont ils prennent conscience avec la crise sanitaire, la République populaire se révèle plus incontournable que jamais. Dès janvier, alors que le virus faisait ses premiers ravages, sa propre demande et celle de ses voisins asiatiques l’ont poussée à augmenter ses capacités de production : 3 000 nouveaux fabricants se sont lancés sur un marché qui en comptait déjà 4 000. La Chine – qui, l’année dernière, livrait la moitié des masques sur la planète – aurait dopé sa capacité de production à 110 millions d’unités par jour fin février, selon les chiffres officiels, cinq fois plus qu’un mois plus tôt.

      Le constructeur automobile BYD se targue d’avoir lancé en deux semaines la plus grosse ligne de production mondiale, et assure au Monde qu’elle sort désormais 10 millions d’unités par jour. Le géant de l’assemblage des smartphones Foxconn s’est jeté dans la mêlée au même moment. Un producteur de serviettes de protection contre l’incontinence de la province rurale de l’Anhui, U-Play, explique s’être converti aux masques en trente-cinq jours car le gouvernement local peinait à en trouver, confronté à la demande des autres provinces.

      Dans cette bataille, la qualité laisse souvent à désirer. Les Pays-Bas ont rappelé 600 000 masques FFP2 défectueux, réceptionnés le 21 mars d’un fabricant chinois. Mais Pékin est soucieux de son image, et se pose désormais d’autant plus en position de sauveur qu’il a été accusé d’avoir étouffé la révélation, par des médecins de la ville de Wuhan, de l’existence d’un nouveau virus, fin décembre 2019. Depuis mardi 31 mars, les usines du pays ne peuvent plus exporter de matériel médical ou de protection si elles n’ont pas reçu la licence les autorisant à vendre sur le ­marché chinois. Selon une source au ministère français de la santé, aucun problème de qualité n’a été décelé sur les premiers arrivages en France, par deux avions affrétés lundi 30 mars et mercredi 1er avril par la société Geodis, qui ont ramené près de 20 millions de masques.

      L’amertume des pilotes

      L’autre défi est logistique. Outre Geodis, qui doit affréter une quinzaine de vols Antonov pendant ce mois d’avril dans le cadre du « pont aérien » avec la Chine, Air France prévoit six rotations par semaine. Les deux premiers vols de la compagnie française ont eu lieu dimanche 29 mars et mercredi 1er avril, acheminant chacun 80 tonnes de matériels – essentiellement des masques, près de 8 millions au total – à destination de la France. Une grande partie, le 29 mars, a été importée à l’initiative du groupe LVMH. Le prochain vol est prévu le 5 avril. En privé, le président Emmanuel Macron a critiqué la lenteur du ministère de la santé, qui s’est fait prendre de vitesse, pour des raisons administratives, dans la prise en charge des masques sur le terrain, en Chine.

      Les équipages qui participent à ces vols à vide dans le sens de la Chine sont soumis à un protocole sanitaire très strict. C’est dans ce cadre qu’un pilote d’Air France a été retenu sur place, selon nos informations, confirmées par Air France. A la suite d’un test positif au Covid-19, il a été « placé en observation dans un centre médicalisé » chinois le 31 mars, précise la compagnie, qui s’efforce d’obtenir son retour « le plus rapidement possible ».

      Du côté des syndicats de pilotes, une certaine amertume s’exprime en raison de l’écho donné aux vols affrétés par Geodis. « On aimerait que le travail d’Air France soit davantage mis en valeur par le ministère des affaires étrangères, dit une source syndicale. On s’offusque du fait que les vols d’Antonov soient tant évoqués, alors qu’ils sont à un tarif délirant de 1,5 million d’euros pièce. »

      La ruée mondiale sur le matériel de protection chinois est source de vives crispations diplomatiques. Le ministre de l’intérieur du Land de Berlin, Andreas Geisel, a ainsi accusé les Etats-Unis de « piraterie moderne » dans un article de vendredi du Tagesspiegel révélant qu’une cargaison de masques de type FFP2 de la marque américaine 3M, produits en Chine à destination des soignants de la capitale allemande, a été « confisquée » lors d’un transbordement à l’aéroport de Bangkok. L’entreprise du Minnesota résiste à une injonction de l’administration de Donald Trump d’expédier l’intégralité de sa production asiatique vers les Etats-Unis et de cesser de fournir le Canada et l’Amérique latine. Cet ordre, qui aurait des « implications humanitaires importantes », selon l’industriel, suscite l’ire du premier ministre canadien, Justin Trudeau.

      Les Etats américains eux-mêmes se plaignent de voir l’administration fédérale se montrer plus offrante à chaque fois qu’ils tentent de passer une commande aux Etats-Unis. Au point que le gouverneur du Massachusetts, Charlie Baker, a utilisé un avion de l’équipe de football des New England Patriots pour aller chercher une livraison en Chine pour sa région. Cette concurrence américaine nourrit la guerre au plus offrant. Un membre de l’état-major américain, l’amiral John Polowczyk, chargé de l’approvisionnement, a assumé avoir une équipe qui « parcourt le monde » pour prendre tous les équipements nécessaires que les Etats-Unis peuvent récupérer. Il a précisé que six avions-cargos avaient déjà ramené du matériel médical et que 28 autres avions étaient prévus dans les jours à venir. Il parle lui aussi de « pont aérien ».

    • Le 28 mars, je taggais ici même #engraissement_en_vue, ben voila, #Geodis (Mediapart ne relève même pas l’incongruité monstrueuse de ces spéculateurs opportunistes dans son article masques-les-preuves-d-un-mensonge-d-etat) bref, voila donc la preuve que Geodis se gave honteusement.
      J’ai du mal à comprendre qu’avec le fric de dingue qu’avale l’armée, pour une fois qu’elle pouvait servir à quelque chose avec ses avions, ben non, faut passer par des boites privées qui vont dealer avec l’industrie de l’armement russe …

      merci @colporteur pour l’article

      C’est dans ce cadre qu’un pilote d’Air France a été retenu sur place, selon nos informations, confirmées par Air France. A la suite d’un test positif au Covid-19, il a été « placé en observation dans un centre médicalisé » chinois le 31 mars, précise la compagnie, qui s’efforce d’obtenir son retour « le plus rapidement possible ».

      Du côté des syndicats de pilotes, une certaine amertume s’exprime en raison de l’écho donné aux vols affrétés par Geodis. « On aimerait que le travail d’Air France soit davantage mis en valeur par le ministère des affaires étrangères, dit une source syndicale. On s’offusque du fait que les vols d’Antonov soient tant évoqués, alors qu’ils sont à un tarif délirant de 1,5 million d’euros pièce. »

      Donc, des avions russes
      https://geodis.com/fr/newsroom/press-release/geodis-realise-un-pont-aerien-entre-la-chine-et-la-france-pour-acheminer


      Tu peux même lire l’url du site sur l’avion de Geodis …
      http://www.volga-dnepr.com/en
      le President de “Volga-Dnepr Group” est Anatoly Isaikin[1] que tu retrouves donc chez Rosoboronexport
      https://en.wikipedia.org/wiki/Rosoboronexport

      The Rosoboronexport Federal State Unitary Enterprise (FSUE) was set up in 2000 by a Decree of the President of Russia and is charged with implementation of the policy of the State in the area of military-technical cooperation between Russia and foreign countries.

      bisou poutine, bouark

    • L’Antonov 225 est tout simplement (et de loin) le plus gros porteur existant actuellement, il détient un monopole total sur le transport de très gros volume.

      Bon, là, c’est du gros volume, mais parfaitement fractionnable. Si on recourt à lui, c’est que c’est le seul moyen trouvé pour aller vite.

      Je ne suis pas sûr que le tarif soit délirant. L’Antonov transporte 250 tonnes, là où un Airbus A-310 en emmène 36 et un A-330, 70…

  • Coronavirus : l’urgence absolue de créer des structures de prise en charge des patients peu symptomatiques, Franck Nouchi
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/03/27/coronavirus-l-urgence-absolue-de-creer-des-structures-de-prise-en-charge-des

    Les spécialistes de santé publique s’alarment : le risque, en confinant chez eux les malades peu graves, est de transmettre le virus à leur famille, créant ainsi des milliers de « clusters » intrafamiliaux. Il faut, d’urgence, organiser leur accueil dans des centres d’hébergement ou des hôtels.

    C’est un patient parmi des milliers d’autres. Il se présente à l’hôpital. Fiévreux, il tousse, a mal à la gorge et une légère difficulté pour respirer. Le médecin qui le reçoit porte un masque. Il lui explique qu’on ne peut pas lui faire de test, les instructions étant qu’on les réserve aux malades graves et aux personnels de santé. Il ajoute : « Vous souffrez très probablement d’une infection à coronavirus. Votre état ne nécessitant pas d’hospitalisation, je vais vous prescrire du paracétamol et des masques de protection. Vous irez les retirer à la pharmacie près de chez vous. De retour à votre domicile, faites attention à bien respecter les mesures barrières. Mais, rassurez-vous, à votre âge, vous ne risquez rien. »
    A la pharmacie, la pharmacienne est désolée : « Pas de masque, je n’ai pas été livrée. Et on les réserve de toute façon aux personnels de santé. »

    De retour chez lui, le patient informe le reste de sa famille de la situation. Il est étiqueté « cas probable ». Vu ses symptômes, on doit se comporter avec lui comme s’il était atteint du #Covid-19. L’épouse, les deux enfants et la belle-mère du patient accusent le coup. Dans leur trois-pièces, la belle-mère dort sur le canapé-lit du salon. Vivant seule et pas très en forme, inquiète des mesures de confinement, elle s’était réfugiée près de sa fille et de ses enfants, qui l’ont accueillie sans problème, puisque ça ne « devait pas durer plus de quinze jours ».

    Plus de 42 000 confinés à domicile

    Anecdotique cette histoire ? Nullement. Des dizaines de milliers de personnes malades mais ne nécessitant pas d’hospitalisation immédiate sont aujourd’hui #confinées_à_domicile, où elles sont prises en charge par des médecins libéraux. Déjà 42 000 au 22 mars, selon l’estimation de Santé publique France dans son rapport hebdomadaire. Combien depuis ? Combien la semaine prochaine ? Il existe des situations de logement bien pires que celle-là, en Seine-Saint-Denis par exemple.
    Les spécialistes de santé publique sont unanimes : le risque en renvoyant chez eux ces malades peu graves, c’est qu’ils transmettent le virus à plusieurs membres de leur famille, créant ainsi des centaines, des milliers de « clusters » intrafamiliaux.

    C’est bien ce qui s’est passé en Chine, avant que les Chinois ne reprennent le contrôle de la situation. En ouvrant des #structures_intermédiaires permettant de mettre en #quarantaine ce type de patients, et en coupant du reste de la Chine et du monde la totalité de la province du Hubei. Le rapport de la mission d’experts de l’Organisation mondiale de la santé (#OMS) envoyée en Chine à la mi-février décrit parfaitement les mesures mises en œuvre. Les experts indépendants, américains et européens (aucun Français), étaient tellement impressionnés par les succès chinois que leur coordinateur, le Canadien Bruce Aylward, a tenu une conférence de presse dès son retour, le 24 février. Pour que tous les pays puissent comprendre à la fois les difficultés rencontrées par la Chine, et comment elle a su y faire face, le rapport intégral a été mis en ligne deux jours plus tard. Force est de constater que ce rapport a fait très peu d’émules, en particulier en Europe.

    Voir cette chronologie de l’émergence du corona virus
    https://seenthis.net/messages/834457

    Attention aux illusions d’optique

    Par rapport à d’autres pays européens qui recensent plus de cas (mais qui font plus de #tests), la situation de la France pourrait, à première vue, paraître légèrement plus favorable. Rien n’est moins sûr. Nous ne savons pas combien de personnes âgées sont mortes dans les établissements d’hébergement des personnes âgées dépendantes (Ehpad). Contrairement aux pays asiatiques, nous faisons face à une grave pénurie de #masques_de_protection. Attention donc aux illusions d’optique. Pour autant, serions-nous condamnés aux centaines de milliers de morts que prédisent les modélisateurs ?
    En France, disait-on dans les années soixante-dix, « on n’a pas de pétrole, mais on a des idées ». Aujourd’hui, des idées novatrices, originales, il n’est que temps d’en avoir. Et, pour ce faire, en regardant ce que font nos voisins, l’Espagne en particulier, qui ne cesse, pour désengorger des hôpitaux débordés, d’ouvrir des structures intermédiaires d’accueil.

    A Madrid, l’hôtel Gran Colon a été le premier à ouvrir une telle #structure_médicalisée. Initiative d’autant plus intéressante que cet établissement est situé à dix minutes à pied de l’hôpital Gregorio-Marañon, le plus grand de la capitale. D’autres établissements – une quarantaine pour l’heure – ont ouvert ou vont ouvrir dans la capitale espagnole. Au total, 9 000 lits devraient être mis à disposition.

    Parmi ces #hôtels reconvertis en centres médicalisés figurent même des établissements classés 5 étoiles. Ainsi du Cotton House Hotel, au centre de Barcelone, qui a décidé de mettre à disposition 83 chambres. Pour s’occuper des malades, il aura, selon la direction, « un personnel qui a reçu une formation spécifique pour la protection de la santé ». « Le personnel de nettoyage, de restauration et de blanchisserie qui travaillera dans cet hôtel a l’expérience du secteur sanitaire public et privé de Barcelone », ajoute-t-on, avant de conclure : « Ce virus, nous l’arrêterons unis. »

    Une question de justice sociale

    L’effort de « guerre » demandé aux Français et aux entreprises pourrait trouver dans cet exemple espagnol une source d’inspiration stimulante. Déjà, le groupe hôtelier Accor a mis à disposition des chambres pour les personnels soignants et un hôtel pour des personnes sans-abri. Il faut aller beaucoup plus loin. Les chambres et studios de pratiquement tous les hôtels des grandes villes sont assez grands pour accueillir ce type de patients. Ils sont équipées en réseaux Wifi et télévisions de manière à pratiquer la télémédecine.

    A priori, il n’y a aucune raison pour que la plupart des personnes symptomatiques, ou des patients guéris à l’hôpital mais devant respecter quinze jours de quarantaine, ne soient pas volontaires pour se rendre dans ce type d’établissement ; ne serait-ce que pour ne pas risquer de contaminer leurs proches (ce qui est inévitable, sauf pour les familles qui ont au moins une pièce par personne et deux salles de bains).
    C’est donc – aussi – une question de justice sociale. Tous les patients qui disposent de vastes logements où ils peuvent s’isoler facilement n’ont d’ailleurs pas besoin d’y aller et préféreront sûrement rester chez eux, ce qui ne pose pas de problème.

    Les 40 000 médecins et infirmières qui se sont portés volontaires pour la réserve sanitaire pourraient être affectés préférentiellement à la surveillance médicale de ces lieux d’accueil. Resterait à organiser la logistique, distribution de repas en particulier. Là encore, les hôtels et les municipalités espagnoles nous montrent la voie à suivre.

    660 000 chambres d’hôtel inoccupées

    Il y a là une urgence absolue. Si l’on ne fait rien, les hôpitaux des régions les plus touchées seront débordés au point qu’ils ne pourront même plus servir de lieux de consultation pour ces patients « suspects ». Un engrenage infernal s’ensuivra, avec la multiplication de ces contaminations intrafamiliales ou entre amis.
    Les pouvoirs publics, les grands groupes hôteliers, les groupes de services d’aide à la personne doivent se mobiliser sans tarder. Chaque journée de perdue, ce sont des milliers de contaminations qui auraient pu, qui auraient dû être évitées. Il y a aujourd’hui en France 660 000 chambres d’hôtel inoccupées.

    Il y a deux jours, en regardant la télévision, les Français ont certainement dû être frappés par une image : visitant le nouvel hôpital militaire de campagne de Mulhouse, le chef de l’Etat avait revêtu un masque de protection. Cette image insolite rappelait à chacun la #pénurie qui frappe le pays. Rien de plus normal évidemment que de voir le président de la République ainsi doté de matériel de protection. Mais, n’ergotons pas à l’infini : il n’y a, aujourd’hui, pas de masque pour tout le monde alors qu’il en faudrait. Il n’y en a même pas pour les personnes professionnellement les plus exposées au virus. Ces dernières n’ont pas le choix : médecins, infirmiers, aides-soignants, policiers, caissiers de supermarché, éboueurs, etc., leur présence est requise. En revanche, un patient suspect de coronavirus, non seulement sa présence n’est pas requise à son domicile s’il vit dans une relative promiscuité avec son entourage, mais elle est dangereuse.

    • La mise à l’isolement des malades atteints du Covid-19 dans des hôtels reste rare en France
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/09/la-mise-a-l-isolement-des-malades-atteints-du-covid-19-dans-des-hotels-reste

      DÉCRYPTAGES La Mairie de Paris souhaite la mise en place de solutions d’hébergement pour éviter que les personnes infectées contaminent leurs proches. Près de Perpignan, le recours à une structure hôtelière permet déjà de libérer des lits à l’hôpital.

      Pour contrôler l’épidémie de Covid-19, la France n’a jusqu’à présent pas fait le choix d’isoler les personnes contaminées dans des structures hôtelières. L’idée semble pourtant faire son chemin : dans un courrier adressé lundi 6 avril au premier ministre, Edouard Philippe, la Mairie de Paris a proposé de « faciliter la mobilisation de sites dédiés et d’hôtels » pour héberger les Parisiens touchés par le virus et qui « ne peuvent être confinés chez eux dans des conditions satisfaisantes pour protéger leur entourage d’une contamination ».

      A l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France, on ne ferme pas la porte à une telle solution, déjà mise en œuvre dans d’autres pays. Si le sujet n’est pas identifié comme prioritaire, on assure qu’une « réflexion active » est menée de manière à « être capable de répondre le jour J », si une telle décision devait être prise.

      Si des patients atteints du Covid-19 ont été mis à l’isolement dans des hôtels ces dernières semaines, à travers le pays, c’est d’abord pour soulager des hôpitaux sous forte tension. L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a ainsi annoncé le 5 avril l’ouverture de 38 places dans les locaux du centre national d’entraînement de la Fédération française de tennis, dans le 16e arrondissement de Paris, afin d’accueillir des patients « dont l’état de santé ne nécessite plus d’hospitalisation mais qui ne peuvent pas encore rentrer à domicile pour des raisons de contagiosité de leur entourage ».

      Objectif affiché : libérer des lits d’hospitalisation. « Ce n’est pas la mission de l’hôpital de contrôler l’épidémie, il n’a pas les moyens de mettre en œuvre un plan d’isolement des malades à grande échelle », souligne Bruno Riou, le directeur médical de crise de l’AP-HP, qui regrette qu’un tel concept, « essentiel », « n’ait pas été mis en place en France ».

      « Anticipation »

      Dans les Pyrénées-Orientales, depuis le 26 mars, c’est un hôtel de la périphérie de Perpignan qui accueille des malades atteints du Covid-19 ou des patients présentant les symptômes de la maladie. Ils sortent d’une hospitalisation ou ils sont envoyés par un des onze centres Covid du département des Pyrénées-Orientales. « L’initiative vient des médecins du centre hospitalier de Perpignan qui estimaient que de nombreux lits étaient occupés par des patients qui auraient pu les libérer. Ils invoquaient un besoin impératif d’avoir le plus grand nombre de lits disponibles en anticipation de la vague attendue », explique Philippe Chopin, le préfet du département.

      Les médecins libéraux, présents dans les centres Covid qui accueillent et diagnostiquent – sans toutefois toujours tester – la maladie, témoignaient aussi de la difficulté, et du risque, à laisser repartir des malades potentiels. « De nombreux malades expliquaient leurs difficultés à se confiner dans de bonnes conditions, trop nombreux dans des logements trop petits. Il fallait un lieu de confinement où ils puissent se reposer, se soigner sans risque pour eux et pour les autres », ajoute M. Chopin. D’autant plus que la ville de Perpignan a, un temps, représenté un cluster dynamique de la maladie, avec des risques de propagation rapide, notamment dans les quartiers populaires.

      La préfecture a alors cherché un hôtel avec une coursive extérieure qui permette aux malades de pouvoir s’aérer et discuter entre eux sans risque. Après avoir essuyé quelques refus, le choix s’est porté sur un établissement de 70 chambres de la chaîne Première Classe. Les malades y sont acheminés par ambulance. La grande majorité d’entre eux sortent d’hospitalisation et sont toujours porteurs du virus, les autres ayant été orientés là par les centres Covid.

      « Le dispositif, tout à la fois sanitaire et solidaire »

      Les employés de l’établissement, hormis le veilleur de nuit qui est resté à son poste, ont été remplacés par des bénévoles de la Fédération française de sauvetage et de secourisme (FFSS) qui assurent la logistique du dispositif. Deux membres de l’association sont présents en permanence pour apporter à manger aux malades, débarrasser, s’occuper d’eux. Médecins du monde s’assure de la partie médicale avec un médecin et une infirmière présents en permanence.

      « C’est une opération inédite qui a beaucoup intéressé le ministère. Un consul de Suisse est même venu voir comment cela fonctionnait. Le dispositif, tout à la fois sanitaire et solidaire, fonctionne grâce à un partenariat entre l’Etat, qui paye l’hôtel, le conseil départemental, qui fournit les repas, Médecins du monde et la FFSS », se félicite encore le préfet. Les coûts du dispositif, répartis entre différentes structures, devraient être limités, selon la préfecture, qui réglera la facture hôtelière, à 35 euros la nuit pour chaque chambre.

      Après avoir compté jusqu’à vingt-deux chambres occupées, l’hôtel accueillait, mardi, moins d’une dizaine de patients. « Ils ne sont pas là en vacances, mais, à part deux personnes qui ont quitté le dispositif [les malades sont volontaires], tous se félicitent de l’initiative. Ils sont bichonnés, ont la télévision dans la chambre. Mais les visites sont interdites, ils sont là quand même sur instruction médicale », précise M. Chopin.

  • Nettoyage, entrepôts, livraisons… les travailleurs étrangers en première ligne face au coronavirus
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/03/27/nettoyage-entrepots-livraisons-les-travailleurs-etrangers-en-premiere-ligne-
    Un livreur à Paris, le 18 mars, jour 2 du confinement. Plusieurs syndicats et collectifs de livreurs ont demandé leur « arrêt immédiat », avant que les livreurs ne tombent comme des mouches », disent-ils dans un communiqué, publié jeudi 26 mars PHILIPPE LOPEZ / AFP

    Les secteurs du nettoyage, de la sécurité ou de la livraison recourent beaucoup aux travailleurs issus de l’immigration, parfois sans papiers. Et souvent sans protections.

    Hamidou Sow prend le bus, le RER et le métro tous les matins. Depuis la Seine-Saint-Denis, où il habite, il rejoint le sud de Paris. Ce Sénégalais de 38 ans travaille dans le nettoyage et son employeur ne lui a pas donné congé. Au contraire. Sur un chantier géré par un grand groupe de BTP, il récure bungalows, toilettes et espaces de restauration au quotidien.

    « Mercredi, on nous a fourni des gants, des masques, du gel hydroalcoolique », énumère-t-il. Alors, il se sent « un peu protégé ». Hamidou Sow est en cours de régularisation. Comme de nombreux travailleurs étrangers, il évolue dans des secteurs aujourd’hui fortement sollicités, malgré les consignes de confinement. « Les travailleurs étrangers, avec ou sans titre de séjour, sont en première ligne dans les activités de nettoyage, de ramassage et de tri de déchets, d’aide à la personne, d’agriculture ou de commerce, indispensables aujourd’hui », considère Marilyne Poulain, chargée des questions liées aux travailleurs sans papiers à la CGT.

    Mahamadou Kebbe, Franco-Malien de 33 ans, est agent de sécurité. Il travaille le week-end à l’accueil des urgences d’un hôpital de Seine-Saint-Denis. « C’est très compliqué, reconnaît-il. Je vois beaucoup de monde avec des symptômes du virus. Je regarde deux ou trois fois par jour ma température et j’ai décidé de ne plus faire de ronde dans les services. » Malgré la situation, l’employeur de Mahamadou Kebbe ne lui a pas fourni d’équipement de protection, faute de disponibilité. « Si l’hôpital ne nous en avait pas donné, on serait en danger », souligne-t-il.

    « Ils sont environ 70 là-dedans »
    Daouda (le prénom a été modifié) fait, lui, sans masque. Ce jeune Malien sans papiers travaille comme éboueur pour une grande intercommunalité d’Ile-de-France. « Pour le moment, personne n’est malade, ça se passe bien, se rassure-t-il. On nous a donné des savons et on se lave les mains avant et après le service. » Chauffeur de poids lourds dans la collecte des ordures ménagères dans le Val-de-Marne, Ousmane Sissoko a quant à lui eu des masques « au début ». « Mais là, on n’en a plus », confie ce travailleur malien, régularisé en 2009. Pour plus de prudence, son équipe s’organise : « On évite d’être trois dans la cabine du camion, il y en a un qui peut rester derrière », explique-t-il.

    « Les salariés les plus précaires sont exposés et ce ne sont pas des professionnels de la santé. Il faut que l’employeur prenne des dispositions », rappelle Rémi Picaud, représentant de la CGT-Commerce, soucieux notamment des conditions de travail dans les entrepôts logistiques des plates-formes de commerce en ligne. Farid (le prénom a été modifié), franco-algérien, travaille dans l’un d’eux, dans les Hauts-de-Seine, comme agent de sécurité. Il a été arrêté il y a quelques jours par son médecin. « Le collègue qui me remplace la nuit m’avait appelé depuis l’hôpital. Sa femme est malade et lui a un arrêt de quinze jours », justifie-t-il.

    Farid ne veut pas prendre de risque : « Je suis diabétique et j’ai des enfants en bas âge. » Il s’inquiète de l’absence de précautions prises pour les travailleurs de l’entrepôt. « C’est catastrophique, dit-il. Ils sont environ 70 là-dedans. Et j’en ai vu un seul avec un masque. Ils prennent tous les transports en commun. Les produits arrivent en vrac et ils les emballent avant de les réexpédier. C’est tous des étrangers. La plupart sont autoentrepreneurs ou intérimaires. »

    Quelques jours avant d’être arrêté, Farid avait déclenché une procédure de droit d’alerte auprès de son employeur en raison des risques de propagation du Covid-19. « Il a envoyé quatre flacons de gel, des gants et un masque pour toute l’équipe », détaille l’agent de sécurité.

    « Virés »
    Jean-Albert Guidou, de la CGT de Seine-Saint-Denis, rapporte le cas de deux salariés d’un commerce alimentaire, sans papiers et atteints du Covid-19. « Ils ont travaillé alors qu’ils avaient des symptômes et qu’on était dans une situation qui pouvait faire craindre une contamination plus large, estime-t-il. L’employeur, qui ne les avait pas déclarés, les a finalement virés. »
    « Un grand nombre de travailleurs sans papiers sont indispensables à l’économie du pays et sont plus vulnérables, souligne Mme Poulain. Nous revendiquons plus que jamais leur régularisation. Il faut aussi garantir leur accès aux soins. Ils n’ont pas la sécurité sociale alors qu’ils cotisent, et beaucoup n’ont pas droit à l’aide médicale d’Etat car ils dépassent le seuil de ressources. »

    La responsable syndicale s’étonne par ailleurs du maintien de certaines activités comme la livraison de repas via les plates-formes comme Uber Eats ou Deliveroo. Plusieurs syndicats et collectifs ont demandé leur « arrêt immédiat », « avant que les livreurs ne tombent comme des mouches », disent-ils dans un communiqué, publié jeudi 26 mars. « On voudrait que les livreurs puissent se protéger mais les plates-formes ne les indemnisent que si un médecin justifie de leur mise en quarantaine ou de leur contamination, relate Jean-Daniel Zamor, président du Collectif des livreurs autonomes parisiens. Quant aux autres, soit ils ne gagnent plus d’argent, soit ils continuent de travailler. »

    Le gouvernement prône la livraison « sans contact » (avec le client, le repas…) mais la règle est impossible à respecter. Digicodes, portes d’immeuble, boutons d’ascenseur, rampes d’escalier… le risque est omniprésent.

    #travail #travailleurs_étrangers #premiers_de_corvée

    • Les salariés de la propreté aux avant-postes face au coronavirus
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/30/les-salaries-de-la-proprete-aux-avant-postes-face-au-coronavirus_6034904_323

      Dans ce secteur comme ailleurs, le manque de masques ou d’équipements de sécurité se fait cruellement sentir. Pourtant, très peu de salariés font valoir leur #droit_de_retrait.

      Anne-Marie n’est ni infirmière ni caissière, et personne ne l’applaudit le soir à 20 heures. Pourtant, elle aussi dit aller au travail le matin « la peur au ventre ». Comme son mari, elle est employée dans des entreprises de #nettoyage. « Chaque matin, on se demande si on va aller travailler. Nos deux enfants voudraient que nous restions à la maison. Mais on a les charges à payer, le réfrigérateur à remplir, alors, on y retourne. »

      Environ 550 000 personnes sont salariées dans le domaine de la propreté et du nettoyage en France, un secteur aujourd’hui soumis à deux mouvements antagonistes : d’une part, la fermeture des bureaux, commerces non alimentaires, écoles, crèches (ce qui entraîne une réduction d’environ 60 % de l’activité) ; d’autre part, la nécessité, pour les entreprises, de continuer à intervenir afin d’assurer le nettoyage des établissements de soins (hôpitaux, cliniques, Ehpad...), des transports en commun, des supermarchés et des commerces alimentaires ou encore des entrepôts logistiques. Sans oublier les copropriétés, où les prestataires viennent toujours évacuer les ordures ménagères, nettoyer halls d’entrée, ascenseurs et escaliers avec une attention toute particulière aux « points de contacts » : digicodes, poignées de porte, boutons d’ascenseur...

      « Nous avons aussi été appelés pour assurer la continuité sanitaire dans les copropriétés dont les gardiens ont été mis en congés par les syndics », témoigne Aurélie Boileau, présidente de l’entreprise Utile et Agréable, qui emploie 1 000 salariés pour entretenir 5 000 immeubles en Ile-de-France.

      Dans ce secteur comme ailleurs, le manque de masques ou d’équipements de sécurité se fait cruellement sentir. Selon Jean-Pierre Duquesne, président de la FEP (Fédération des entreprises de propreté et services associés) Ile-de-France et dirigeant de Netindus, « quelques entreprises on pu mettre des équipements de protection individuelle à disposition de leurs salariés ». Mais la grande majorité se « débrouille » avec les moyens du bord : des gants de ménage, « mais ni masques ni combinaisons jetables ».

      « Ils sont très courageux et savent se mobiliser »

      « Nos salariés ont tous du gel hydroalcoolique et des gants à usage unique, mais pas de #masques », confirme Aurélie Boileau. Pour de nombreux chefs d’entreprise, la situation est intenable. « Les employés sont pleins de bonne volonté, mais si on les envoie sur le terrain, il faut qu’ils soient en sécurité », insiste Laurent Ruh, directeur général de RH Propreté, une entreprise installée dans l’Est.

      Ainsi, Philippe Jouanny, le président de la FEP, a écrit une lettre ouverte au gouvernement pour « demander que les entreprises de propreté puissent être incluses dans les métiers dits essentiels au maintien de la salubrité civique et pouvoir ainsi bénéficier des équipements et des moyens de transport en priorité (...) Il est impératif que ces professionnels de l’hygiène et de la désinfection puissent poursuivre leurs activités indispensables à court et moyen termes dans les conditions optimales de protection des agents de service de propreté ».

      Malgré ces conditions difficiles sur le terrain, le secteur ne reçoit que très peu de demandes de droit de retrait de la part des salariés, qui continuent à aller travailler vaille que vaille. « Nos salariés ont des vies difficiles. Ils sont très courageux et savent se mobiliser », reconnaît Aurélie Boileau, qui a mis en place des échanges avec les partenaires sociaux au sein de son entreprise pour informer les équipes.

      Anne-Marie, déléguée syndicale CGT, avance une autre explication : « Le secteur compte beaucoup de #travailleurs_précaires, qui parlent mal le français et ne savent pas se défendre. » De fait, selon les statistiques diffusées par la profession, un salarié sur deux n’a aucun diplôme de formation initiale, un sur trois est de nationalité étrangère, et six sur dix sont à temps partiel. En outre, le quart des fonds de professionnalisation de la branche est consacré à la lutte contre l’illettrisme.

      #premiers_de_corvée

    • Coronavirus : avec la crise sanitaire, les travailleurs invisibles sortent de l’ombre, Par Laurence Girard , Alexandre Piquard , Camille Bordenet , Francine Aizicovici , Juliette Garnier , Cécile Prudhomme , Eric Béziat , Béatrice Madeline et Louisa Benchabane
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/01/avec-la-crise-les-travailleurs-invisibles-sortent-de-l-ombre_6035123_3234.ht

      TÉMOIGNAGES Alors que l’économie française connaît un arrêt brutal en raison de l’épidémie de Covid-19, caissières, livreurs, agents de nettoyage, ouvriers de chantier, conducteurs de métro, auxiliaires de vie, apparaissent enfin pour ce qu’ils sont : des rouages essentiels de la vie du pays.

      Le Covid-19 les a fait surgir au grand jour. Alors que l’économie du pays est clouée au sol, caissières, livreurs, agents de nettoyage, ouvriers de chantier, conducteurs de métro, auxiliaires de vie, ces #travailleurs_invisibles apparaissent enfin pour ce qu’ils sont : des rouages essentiels de la vie du pays, sans lesquels point de commerces, de transports ou de services aux personnes.

      Alors qu’une partie des salariés s’installent dans le télétravail, ils et elles n’ont pas d’autre choix que de continuer à aller travailler, parfois de nuit, souvent en horaires décalés, toujours au risque d’attraper la maladie. Quatre d’entre eux ont déjà perdu la vie, comme le rappelle la fédération CGT des commerces et services dans une lettre ouverte adressée à la ministre du travail Muriel Pénicaud, le 31 mars. Et des centaines d’autres sont contaminés. Une situation qui a incité la CGT Commerce a déposé plainte contre la ministre du travail devant la Cour de justice de la République, estimant que les salariés de la distribution manquaient de protection face au coronavirus. « Cette crise fait apparaître une forme de pénibilité que l’on n’imaginait plus : celle d’être exposé à un risque sanitaire létal dans le cadre de son activité professionnelle », souligne le sociologue Julien Damon, professeur associé à Sciences Po. « Cette exposition à des risques majeurs n’était plus tellement prise en compte dans l’évolution de notre droit du travail, on l’avait un peu oubliée. »

      Selon une note de l’OFCE publiée lundi 30 mars, 8,4 millions de personnes en France peuvent travailler à distance, de leur domicile : la moitié sont des cadres, les autres sont employés qualifiés ou appartiennent aux professions intermédiaires, comme les enseignants. Et, à l’inverse, 18,8 millions de salariés, ouvriers ou employés pour l’essentiel, ne peuvent effectuer leur travail à distance. Pour certaines personnes interrogées, il existe une certaine fierté à continuer à aller au travail, que ce soit pour ne pas laisser tomber les « copains » ou les personnes dont elles s’occupent, pour contribuer à assurer le service public. Mais c’est aussi un non-choix. Droit de retrait difficile à faire appliquer, nécessité de faire rentrer un salaire coûte que coûte. Beaucoup y vont la boule au ventre, avec la peur de tomber malade, de contaminer leur famille.

      « On est là pour la survie de l’entreprise »
      Samuel Dubelloy, 48 ans, ouvrier chez Arc à Arques (Pas-de-Calais)

      « Je travaille chez Arc depuis plus de quinze ans, pour un salaire de 1 944 euros, à raison de trente-deux à trente-trois heures par semaine. Le mois prochain, j’aurai 49 ans. Je n’ai jamais vu autant de gars ayant peur d’aller travailler, c’est énorme. Depuis lundi 23 mars, toute l’organisation du personnel a été revue [seuls 700 des 2 500 ouvriers y ont conservé leur poste sur les chaînes de production, à la suite de l’adoption d’un plan de crise réduisant de 70 % le tonnage pour se conformer aux mesures de distanciation sociale]. Certains sont en chômage partiel. D’autres sont en congés maladie pour garde d’enfants de moins de 16 ans.

      Je suis assistant à la fusion de l’un des cinq fours qui produit encore au sein du site. On y fabrique du verre pour des hublots de machines à laver et des assiettes de couleur noire, à raison de 440 tonnes par jour. Bien que l’Audomarois soit épargné et qu’il n’y ait pas eu de malades du coronavirus dans le coin, ni à l’usine, pour le moment, j’ai peur. Quand j’arrive, j’ai mal au ventre. Et puis ça passe. Au fond, le boulot, il n’a pas changé. Tout le monde est bien protégé. On est habitués à porter des masques, puisque la fusion du verre fait appel à des produits nocifs, du nickel, de la silice, du chrome ou de la chaux vive. Et puis je me dois d’être là au côté de mon fils, qui est conducteur de machines, et pour la survie de l’entreprise. Arc a traversé des situations très difficiles [en 2013, elle a frôlé le dépôt de bilan]. Cette crise ne va pas améliorer la situation, ça c’est sûr. Mais on ne peut pas arrêter des fours verriers. On ne peut pas tout mettre par terre. Il y a 680 personnes qui d’habitude travaillent sur ce four. Beaucoup ont plus de 50 ans. Ils retrouveraient difficilement un emploi si Arc s’arrêtait. »

      « La prime de 1 000 euros, je m’en fous »
      Olivier*, 49 ans, agent de nettoyage en gare TER (Bouches-du-Rhône) pour le compte de Sud Service, filiale du groupe Nicollin

      « La prime de 1 000 euros ? Je m’en fous pas mal. Ce n’est pas ça qui va me rassurer sur mes conditions de travail. J’ai peur, oui, je ne peux plus faire semblant. Nous sommes deux agents de nettoyage dans une camionnette. Mon collègue a des allergies. Il éternue, renifle, toute la journée. Et ni lui ni moi n’avons de masque. Pourquoi on ne me donne pas un autre véhicule ? L’entreprise en a plein d’autres. Au moins le temps que le pic d’épidémie passe. Je ferais ma tournée seul. Au volant, je ne peux pas être à moins de 1,50 m de mon collègue. De 8 heures à 16 heures, toute la journée, je ramasse des mouchoirs usagés, nettoie les trains, les toilettes. Et nous n’avons pas de gel hydroalcoolique.

      Partout, sur les réseaux sociaux, le Groupe Nicollin dit « prendre des mesures pour votre sécurité et celle de ses agents ! » Mais nos chefs ne savent rien de ce qui se passe sur le terrain. Dans les gares, comme les toilettes sont fermées, je ne peux plus me laver les mains. Et comme il n’y a plus d’agents de la SNCF, les voyageurs s’adressent à nous pour trouver leur train. Ils sont pressés. Ils parlent fort, postillonnent. Ils se tiennent trop près de nous. On ne peut pas continuer comme ça. »

      « Je contribue à la continuité du transport public »
      Cédric Gentil, 41 ans, conducteur RATP sur la ligne A du RER (Ile-de-France)

      « Pour aller travailler, je dispose d’un équipement de protection assez sommaire. Depuis la mi-mars, nous avons un kit personnel que nous emportons en permanence avec nous. Il contient des lingettes désinfectantes, des gants et deux masques chirurgicaux à utiliser uniquement si je dois porter assistance à un voyageur malade. L’un des masques est pour moi et l’autre est destiné à l’usager.

      A chaque prise de poste, l’entreprise me fournit six petites lingettes désinfectantes pour nettoyer mon poste de conduite. Mais cela ne suffit pas. Alors, comme mes collègues, j’arrive avec mes propres lingettes. Cette question du nettoyage, c’est le sujet qui suscite le plus de crainte, de colère même, chez les conducteurs. Avec parfois l’envie d’arrêter. Sachant que, dans mon centre d’attachement de Torcy (est de la ligne A du RER), on compte une dizaine de personnes positives au Covid-19. Les mesures d’assainissement prises avec retard ne sont toujours pas effectives. Par exemple, l’équipe de nettoyage en bout de ligne, à Saint-Germain-en-Laye, est présente une fois sur deux.

      A Boissy-Saint-Léger, un collègue a un jour signalé qu’une voiture avait été souillée par les vomissures d’une personne malade. La consigne a été d’en interdire l’accès parce qu’on n’avait pas les moyens de la nettoyer. Ce n’est déjà pas acceptable en temps normal mais alors, durant cette période… Cela me met d’autant plus en colère qu’au même moment Ile-de-France Mobilités [l’autorité organisatrice des transports dans la région parisienne] communique en disant que les trains sont désinfectés plusieurs fois par jour.

      Il y a quand même des mesures qui fonctionnent, comme la nouvelle organisation mise en place pour réduire le nombre de personnes présentes en même temps dans les centres d’attachement. Contrairement à certains de mes collègues, je n’ai pas d’appréhension majeure dans le fait d’aller travailler, je suis même plutôt satisfait de contribuer à la continuité du transport public. »

      « Nous avons besoin de considération »
      Cécilia*, 29 ans, auxiliaire de vie (Allier)

      « Je suis auxiliaire de vie, nous sommes auxiliaires de vie, celles qui permettent à des personnes âgées de maintenir leur vie à leur domicile, que ce soit par souhait, par manque de moyens, de places en structure… Je vais être encore plus directe, nous sommes celles qui empêchent certaines personnes de crever la bouche ouverte en silence, seules, parce qu’elles n’ont personne. C’est ce qui arriverait si toutes les aides à domicile se mettaient à faire la grève en même temps, et encore plus en ces temps de crise sanitaire. Si nous n’étions pas là, qui ferait les courses pour ces personnes fragiles, qui leur préparerait leurs repas, les laverait, les écouterait, et j’en passe ?

      On nous laisse sur le terrain avec pas ou peu de moyens de protection, notre profession n’étant pas considérée comme prioritaire. Certaines ont aussi de grandes difficultés à exercer leur droit de retrait. Et tout cela pour ne pas avoir la moindre reconnaissance de notre gouvernement : pas un mot gentil à notre égard ou une mesure. Je suis une maman de deux enfants en bas âge qui, en plein confinement à cause d’une épidémie, se lève et va travailler. J’aime mon métier et j’ai de l’affection pour ces personnes en situation de faiblesse, mais nous avons besoin qu’on nous donne les moyens d’exercer sans risque notre métier. Nous avons aussi besoin de considération. »

      « C’est le pot de terre contre le pot de fer »
      Tatiana Campagne, 30 ans, élue SUD-Solidaires et employée logistique chez Amazon à Lauwin-Planque (Nord)

      « Au début du coronavirus, parmi les employés d’Amazon de mon site, on a fait comme tout le monde, on a attendu de voir. Mais comme nous recevons beaucoup de marchandise de Chine, nous avons commencé à nous inquiéter. Nous avons évoqué l’idée d’utiliser des gants ou du gel hydroalcoolique mais ça faisait plutôt sourire. Pourtant, si on nous avait écoutés plus tôt…

      La peur s’est vraiment installée le jeudi 12 mars, quand Emmanuel Macron a annoncé la fermeture des écoles. Ça confirmait que le virus était bien dangereux. Avec les autres syndicats de notre entrepôt, nous avons cherché à répondre aux inquiétudes des salariés. Et avons commencé à dénoncer le manque de mesures de protection sur le site. Nous avons conseillé aux salariés d’arrêter le travail en exerçant leur droit de retrait. Mais Amazon estime la sécurité satisfaisante et refuse de payer les employés qui font jouer ce droit. En réponse à notre mobilisation, la direction a renforcé les mesures pour faire respecter la distanciation sociale, en poussant les meubles des salles de repos, en décalant les horaires de travail…

      Mais, avec 2 500 salariés sur le site, c’est très difficile d’éviter le risque de contagion. Il n’y a toujours pas de gel pour tout le monde, de masques, de gants… Pour nous, Amazon outrepasse ses droits. C’est le pot de terre contre le pot de fer. Donc, avec l’intersyndicale, nous allons porter les cas de droit de retrait devant les prud’hommes. Moi, j’aurais voulu faire jouer mon droit de retrait mais je ne me voyais pas rester à la maison, en sécurité, et laisser tomber les employés. »

      « Les collègues sont à fleur de peau à cause de la promiscuité »
      Laurence Gillet, 56 ans, responsable du rayon des produits frais, libre-service et découpe, au Super U d’Egletons (Corrèze), et élue du syndicat Force ouvrière

      « Ce métier, je l’ai choisi. J’aime ce que je fais. Ici, on est dans une petite ville, dans un magasin où l’on se sert les coudes. Les collègues me disent : “Je viens car je ne suis pas un tire-au-flanc, mais j’ai peur.” Et puis, on s’entend bien. Mais la fatigue commence à s’installer, physique, et surtout psychologique. Les premiers jours ont été très difficiles, avec beaucoup d’incivilités. C’était la razzia dans les rayons. Les protections pour les hôtesses de caisse, les gants, le gel, ont été mis en place un peu tard, et parfois dans la débrouille : une collègue a par exemple utilisé une toile cirée mise comme un rideau de douche.

      Avec la loi d’urgence sanitaire, on peut faire le remplissage du magasin la nuit et éviter de croiser du public. Le magasin a demandé qui était volontaire pour faire l’équipe de nuit. Depuis mardi 24 mars, au lieu de travailler de 6 heures à midi, je commence à 18 heures jusqu’à minuit, voire 1 heure du matin.

      La nuit, la fatigue est physique, mais, dans l’équipe de jour, les collègues sont à fleur de peau à cause de la promiscuité avec les clients… Jusque-là, personne n’a été touché, mais le jour où on aura un cas, j’ai peur que ça dérape. D’autant qu’il y a encore des clients qui n’ont rien compris, qui font leur sortie journalière pour acheter une bouteille de Coca ou un paquet de sucre. D’autres qui viennent en famille avec leurs enfants qui courent partout. Et au drive, c’est encore pire, car les gens ne supportent pas d’attendre. »

      « J’ai pensé arrêter de travailler. Mais je n’ai pas le choix »
      Thomas De Carvalho, 30 ans, artisan taxi pour sa société, Thomas TRC (Ile-de-France)

      « J’ai perdu 90 % de mon chiffre d’affaires en mars. Il n’y a presque pas de clients. J’ai ma clientèle privée, ça marche encore un peu, avec deux ou trois courses par jour. Pour rassurer les clients, j’ai mis un film alimentaire entre les sièges avant et arrière, des gants et du gel hydroalcoolique à disposition à l’arrière, c’est gratuit. J’ai commandé du Plexiglas pour remplacer ce rafistolage. Je nettoie ma voiture après chaque client. Si l’un d’eux ne met pas les gants, je le refuse. Je suis là pour servir, pas pour subir, ni mourir.

      Je n’ai pas peur du coronavirus pour moi-même. Mais j’ai peur pour ma famille, mes clients. J’ai pensé arrêter de travailler. Mais je n’ai pas le choix. J’ai 5 000 euros de charges par mois, dont 1 500 euros pour la licence et 565 euros pour la voiture. Vendredi 20 mars, j’ai appelé des grandes surfaces pour leur proposer mes services pour livrer. J’attends. »

      « Mon employeur a refusé mon droit de retrait »
      Antoine*, 34 ans, chef d’équipe logistique d’un sous-traitant d’EDF, dans la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly (Loiret)

      « Dans la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly, il aura fallu que les salariés de sous-traitants menacent d’arrêter de travailler pour qu’EDF prenne des précautions. Dans la zone contrôlée, on est tenu de mesurer sa radioactivité fréquemment, notamment en glissant ses mains pendant dix secondes dans un appareil. Mais celui-ci n’était pas désinfecté, malgré le passage de centaines de personnes par jour. De plus, dans le bâtiment du réacteur en cours de rechargement, les distances de sécurité n’étaient pas respectées et les poignées de porte n’étaient désinfectées que deux fois par jour. Mon employeur a refusé que je fasse usage de mon droit de retrait. Il l’a considéré abusif. De mon côté, je n’avais qu’une peur : contaminer ma famille en rentrant chez moi le soir.

      Mais à partir du mardi 17 mars, nous avons commencé à nous mobiliser en refusant d’entrer dans la zone contrôlée tant que des précautions n’étaient pas mises en place par EDF. Autour du 23 mars, EDF a adapté le dispositif : une distance d’un mètre est respectée dans la zone contrôlée, et on est autorisés à porter des gants pour mesurer notre radioactivité. Les chantiers sur les arrêts de tranche (période pendant laquelle un réacteur est arrêté) sont aussi suspendus le week-end. Mais ces mesures arrivent trop tard. Quelques collègues présentent des symptômes de la maladie. »

      « On vit au jour le jour »
      Amélie Huyn, 26 ans, assistante marketing de la société Alpina Savoie à Chambéry (Savoie)

      « Avec la fermeture des restaurants et des cantines, mon entreprise, connue pour ses marques de pâtes, de semoule et de crozets, a vu une partie de ses débouchés se fermer. La direction m’a proposé d’opter pour un chômage partiel ou de prêter main-forte à la production. Je n’ai pas hésité un instant.

      Depuis lundi 23 mars, après une courte période de formation, je travaille de 8 heures à 16 heures sur les lignes de conditionnement des crozets. C’est tout nouveau pour moi, cela me rapproche des coulisses, cela se passe bien, on se serre les coudes. Je ne suis pas du tout inquiète. Toutes les mesures sanitaires sont prises. Je porte masque, charlotte, blouse et chaussures de sécurité. A la pause du midi, chacun a une place numérotée, sans vis-à-vis et espacée. Je ne sais pas encore combien de temps durera l’expérience. On vit au jour le jour. »

      « Il faut assurer la propreté ! »
      Célestin, 64 ans, agent de service (Seine-Saint-Denis)

      « Je suis agent de service, je fais le nettoyage dans des immeubles et des locaux professionnels. Je fais ce travail depuis trente-six ans. On a des gants jetables et du gel hydroalcoolique, mais pas de masque, et cela ne m’empêche pas d’aller travailler. Il faut quand même assurer la propreté des lieux ! On nettoie les portes, les boîtes à lettres, les rampes d’escalier… On est tous inquiets. On évite les contacts directs avec les occupants, quand on croise quelqu’un, on garde nos distances. On ne se laisse pas postillonner dessus ! Mais les gens m’encouragent, ils sont contents de ce que je fais pour eux. Je me sens utile. »

      Coronavirus : dans toute la France, les caissières en première ligne, Par Raphaëlle Rérolle , Marie-Béatrice Baudet , Béatrice Gurrey et Annick Cojean
      Publié le 22 mars 2020
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/03/22/coronavirus-a-paris-comme-en-province-les-caissieres-de-france-en-premiere-l

      ENQUÊTE La plupart des « hôtesses de caisse » n’ont pas cessé le travail depuis le début de l’épidémie, obligées de rester fidèles au poste, malgré la peur d’être exposées au virus.
      Ces gants-là, ça ne vaut rien. Assise derrière la caisse, elle regarde sa main comme un objet étrange, dans un bref moment d’accalmie. Ces doigts en plastique transparent, beaucoup trop larges, la légère transpiration à l’intérieur… Elle l’agite comme une marionnette et on entend le froissement du plastique. Un peu plus tard, elle accepte de donner son numéro de téléphone pour raconter, à l’abri des oreilles indiscrètes, sa vie de caissière pendant l’épidémie.

      Maintenant on dit « hôtesse de caisse », mais il faudrait, en temps de guerre contre le coronavirus, parler de bons petits soldats, voire de chair à canon, tant elles ont subi – ce sont des femmes à 90 % – l’assaut d’une clientèle devenue folle, juste avant le confinement, décrété mardi 17 mars à midi.

      Elles sont de moins en moins nombreuses depuis dix ans dans les super et les hypermarchés, avec l’apparition des caisses automatiques. Une baisse d’environ 10 %, soit un bataillon de 150 000 équivalents temps plein, selon la Fédération du commerce et de la distribution. Mais il est chaque jour au front depuis que tous les commerces « non indispensables » ont fermé. On ne peut plus dire « l’intendance suivra ». Elle précède tout.

      Bénédicte, le prénom qu’elle a choisi pour ne pas être reconnue, a 30 ans et travaille en Normandie pour une chaîne de supermarchés de hard discount. « Ce sont des gants de boulangerie, on s’en sert pour mettre les viennoiseries en rayon, question d’hygiène. On se protège comme on peut mais ce n’est pas pratique pour rendre la monnaie. » La jeune femme travaille là depuis plusieurs années, payée au smic avec un contrat de 30 heures : « C’était ça ou rien. Quand il y a un rush on fait un avenant au contrat. »

      Du jamais vu

      Pour un rush, c’en était un, du jamais vu. Une heure et demie de queue devant le magasin, dès que les rumeurs de confinement ont commencé à courir, vendredi. Lundi, ce fut bien pire. « J’avais l’impression qu’on n’allait pas s’en sortir. Forcément, la contamination on y pense. On est en communication avec les microbes », dit cette mère de deux jeunes enfants.

      Ses journées durent dix heures. Après le paiement, les clients sont à touche-touche avec elle car les caisses n’ont pas de rebord, à dessein : « Faut que ça soit du tac au tac, que ça dégage vite. On doit passer 3 000 articles à l’heure, c’est l’objectif fixé. » Quand il y a moins de monde, Bénédicte fait le ménage ou de la mise en rayon. Pour la semaine du 23 mars, on leur a promis un bouclier de Plexiglas. Mais toujours pas de masques.

      Des masques, il n’en manque pas dans cet hypermarché d’Ille-et-Vilaine. Au rayon frais, charcuterie et fromage, les deux vendeuses articulent haut et fort pour être comprises des clients. Jeudi, la circulation des chariots est plutôt fluide dans les allées, où des hommes, masqués eux aussi, réapprovisionnent les rayons.

      Aux caisses, en revanche, le visage de Manon se montre à découvert. « J’ai essayé le masque mais ça me gêne, ça m’oppresse. Je n’en ai jamais porté, je n’ai pas l’habitude, c’est pas comme les soignants », explique la jeune femme, en apparence guère affolée.

      Au sol, des lignes bleues marquent l’espacement obligatoire entre chaque chariot, « 1 mètre », répète une voix au micro. Nathalie, qui officie à la caisse prioritaire pour femmes enceintes et handicapées, apprécie cette précaution mais a renoncé au masque : « J’ai essayé, mais très vite je ne vois plus rien, tellement j’ai de buée sur mes lunettes. »

      Petit salaire et horaires de fou

      Ce sont les invisibles, les discrètes, les modestes. Les fragiles, souvent. Celles qui se perdent dans le décor, confondues avec la caisse qui semble faire le seul travail incontestable : compter. Celles à qui l’on ne reconnaît aucune expertise – et pourtant. « Les hôtesses de caisse, on passe pour des nulles, tranche Déborath, 38 ans. Mais s’il fallait que les clients prennent notre place, ils ne tiendraient pas cinq minutes. »

      Elle travaille dans un hypermarché du Var, très saisonnier, la première ville est à 5 km. Elle aime bien rire, Déborath, mais il était temps qu’un peu de reconnaissance arrive, enfin, avec le virus : « Pour une fois, la roue tourne. Ils ont besoin de nous pour manger. C’est con hein, mais un merci et un bravo, c’est la première fois et ça fait du bien. » Elle raconte le petit salaire, les horaires de fou, les gens qui les prennent pour des idiotes « alors qu’il faut gérer les clients, les problèmes de prix, les conflits entre personnes ».

      Déborath, caissière : « On aurait dit qu’on allait tous mourir. Les gens se battaient pour des produits d’entretien et du papier toilette »
      Le jour de la grande ruée l’a mise en colère : « C’était genre fin du monde. On aurait dit qu’on allait tous mourir. Les gens se battaient pour des produits d’entretien et du papier toilette. S’il y en avait un de contaminé, on le sera tous. » Les trois agents de sécurité étaient débordés, les clients se servaient sur les palettes : « J’étais du soir, on est partis à 21 heures au lieu de 20 h 30. Il a fallu ramasser la cinquantaine de chariots abandonnés dans le magasin. » Puis tout remettre en rayon, sauf le frais et le surgelé, partis à la poubelle. Combien de manipulations ? Cela fait quelques jours maintenant, et cela semble une éternité : « On était très en colère contre l’humain ce jour-là. » Déborath se demande encore comment des clients ont pu faire, qui 650 euros de courses, qui 900 euros : « D’où ils les sortent ? »

      « Ce que j’ai ressenti, c’est de la peur, de l’angoisse, du stress, malgré toutes les précautions prises ici », dit-elle. Peur de contaminer sa mère de 70 ans, avec laquelle elle vit. Angoisse de voir resurgir une crise de polyarthrite, dont elle-même est atteinte. Stress de journées qui ne ressembleront plus à celles d’avant. Que faire aujourd’hui de ces deux heures de pause qui lui permettaient d’aller à la plage ou d’aller se balader dans le centre commercial ?

      C’est un sujet de discussion avec le directeur du magasin, qui s’est montré exemplaire, assure la trentenaire : « Ça va être un moment compliqué à vivre ensemble et il n’a pas envie qu’on tombe malade. Sa femme travaille dans la santé. » Une entrée au lieu de trois habituellement, un système de barrières, des intérimaires embauchés, travail nocturne pour les manutentionnaires, « qui ont énormément apprécié, parce qu’ils ne sont plus en présence des gens », gants obligatoires, gel hydroalcoolique à disposition et conseils d’hygiène. Aux caisses, elles ne sont plus qu’une sur deux et les clients ne passent plus devant elles. Ils récupèrent leur marchandise au bout du comptoir, en passant par-derrière.

      « Malade ou pas ? On se croirait dans un film mais ce n’est pas un film »
      « L’ambiance est bizarre. Un client qui porte un masque, on se pose la question à chaque fois. Malade ou pas ? On se croirait dans un film mais ce n’est pas un film. » Cette atmosphère irréelle, presque de science-fiction, tient aussi aux confinements individuels improvisés dans les magasins, telles ces caissières de Chamalières (Puy-de-Dôme) entourées d’un habillage en cellophane, comme une sorte de cloche, ou les vitres de protection en Plexiglas, apparues ici ou là.

      Ce n’est pas le cas partout. Aucun masque, aucune explication, aucune réunion, par exemple, dans ce grand magasin de proximité parisien. Une chaîne pourtant « branchée » qui s’est adaptée à son public de bobos. Une de ces femmes-troncs remarque, sans perdre son sourire, qu’on ne les a pas averties non plus du changement d’horaire, survenu du jour au lendemain pour avancer la fermeture du magasin, habituellement nocturne. Aucune instruction sur l’hygiène et les comportements à observer avec la clientèle. Les gants jetables que l’on a mis à leur disposition se trouent à la première occasion.

      « La trouille au ventre »

      Le directeur, lui, est parti en vacances et la chef du secteur caisses aussi. « Nous sommes livrées à nous-mêmes. Et j’ai la trouille au ventre, conclut une brune dynamique. On sait que la maladie circule parmi nos clients et qu’on finira par l’avoir. Comment faire autrement ? Ils sont proches de nous, on sent souvent leur souffle… »

      Un client de ce quartier cossu lui a confié l’autre jour que sa fille, restée à la maison, avait le Covid-19. Il attendait peut-être du réconfort, mais il lui parlait à moins de 1 mètre, sans penser un instant qu’il la mettait en danger. Elle, elle l’avait bien en tête. « J’étais glacée d’angoisse mais je n’ai rien montré. C’est la règle. Et quand ils sont agressifs on serre les dents. Sinon, nous serions dans notre tort. »

      Un droit de retrait ? Bien sûr que non ! Elles ont trop peur de perdre leur job, ces femmes, ces mères de famille, parfois célibataires ou divorcées. « Avec un loyer qui prend plus de la moitié de mon salaire net, 1 200 euros, je n’ai aucune marge de manœuvre », explique l’une d’elles.

      Seules quelques mamans de très jeunes enfants ont demandé à ne pas venir pendant quelques jours. Une autre hôtesse nuance : « Ce n’est pas qu’une histoire d’argent. Les caissières ont aussi une conscience professionnelle ! On est là en temps de crise. On assure un service public. On ne flanche pas. »

      « Si seulement Macron avait mentionné les caissières ! Vous n’imaginez pas comme on aurait été fières ! »
      Elles ont noté – et approuvé – l’hommage appuyé du président de la République, Emmanuel Macron, aux personnels soignants, l’autre soir, à la télévision. Mais elles auraient aimé un mot, rien qu’un mot, pour les « obscurs », les « petites mains », les « chevilles ouvrières », qui contribuent à l’effort pour que le pays continue à manger, à boire, à vivre. « Si seulement il avait mentionné les caissières ! Vous n’imaginez pas comme on aurait été fières ! »

      Dans ce magasin bio de Haute-Loire, situé dans une ville de 6 800 habitants, Maxime, le gérant, a reçu, lui, une avalanche d’instructions de sa chaîne, réactualisées plusieurs fois par jour, comme le lavage des mains tous les quarts d’heure. « Nous ne portons pas de gants, c’est un faux ami qui donne une impression de sécurité alors qu’on peut avoir les mains sales », détaille-t-il. Deux gros bidons de gel hydroalcoolique, fabriqué par une entreprise locale, attendent les clients à l’entrée. « Je ne suis pas angoissé du tout, assure Thomas, un caissier de 32 ans. Ce n’est pas dans ma nature et nos clients sont respectueux. »

      Mercredi 18 mars, Maxime, dépité de s’être vu refuser des masques à la pharmacie, s’est approvisionné en visières transparentes, celles dont on se sert pour éviter les projections dans les opérations de tronçonnage. Au petit supermarché voisin, les caissières portent toutes ces masques tant convoités et réservés aux soignants. « Ce sont des réserves de la dernière épidémie de grippe. Mais on en a peu, alors on les garde toute la journée », précise l’une d’elles. Il ne faut pourtant pas les conserver plus de quatre heures pour s’assurer de leur efficacité…

      « Quand on voit des gens venir acheter une bouteille de bière toutes les deux heures, une par une, on se dit qu’ils n’ont rien compris »
      Dans une moyenne surface du même département, les caissières s’ennuient un peu derrière leur vitre de Plexiglas, maintenant que l’heure du reflux a sonné. Se sentent-elles rassurées dans ce magasin dépeuplé ? « Bah, quand on voit des gens venir acheter une bouteille de bière toutes les deux heures, une par une, on se dit qu’ils n’ont rien compris », se désole Sylvie.

      Au moins, se sentent-elles un peu mieux protégées que leurs collègues, à 15 km de là. De vagues morceaux de carton, de moins d’un mètre de côté, taillés dans de vieux emballages, ont été placés devant les caisses. « C’est tout ce que le gérant a trouvé pour nous protéger », déplore Monique.

      La foule s’est évanouie et un aspirateur vrombit. Les caissières montent la garde derrière leur illusoire bouclier de carton. Angoissées mais étonnamment stoïques, quand des clients, âgés pour la plupart, passent leur tête sur les côtés pour mieux les entendre. Comme si le carton n’existait pas. Comme si l’épidémie n’existait pas. Comme si de rien n’était.

  • #Préavis_de_grève du 1er au 30 avril 2020

    Madame et Messieurs les Ministres,

    Profitant de la pandémie #COVID-19, le gouvernement, au travers de la loi dite d’#urgence_sanitaire, fait le choix des #mesures_antisociales au détriment de la #solidarité et de la vie des #salariés, de ceux qui se battent avec courage contre l’#épidémie.

    Par les #dérogations_antidémocratiques qu’elle impose, par les attaques au statut et au #droit_du_travail qu’elle soutient, par l’effort qu’elle fait peser toujours sur les mêmes, la #loi_d’urgence_sanitaire nous inquiète pour aujourd’hui et pour la suite.

    Le gouvernement découvre que les agents de la #Fonction_publique, mise à mal par vos politiques d’#austérité dénoncées par la Fédération CGT des Services publics depuis des années, sont essentiels.
    Ce sont aux agents dans les #écoles, les #crèches, aux #égoutiers, aux #agents_du_traitement_des_eaux, aux agents auprès de plus fragiles, des personnes âgées, aux agents de la fonction publique territoriale en charge de la continuité des services, à qui il est demandé toujours plus de sacrifice, eux qui sont en première ligne, tous exposés aux mêmes risques, alors même que vous avez remis en cause, notamment, les #CHSCT par la #Loi_de_Transformation_de_la_Fonction_publique, instance aujourd’hui incontournable pour la protection, la sécurité et la santé des agents. Eux, dont votre gouvernement, a enfin, et seulement du bout des lèvres, suspendu la #journée_de_carence alors que son abrogation pure et simple devrait être prononcée, et qui ne met pas à leur disposition les moyens nécessaires à leurs protections immédiates.

    La Fédération CGT des Services publics dénonce les choix du gouvernement qui font que ce sont les #masques de protection, #gel_hydroalcoolique et #tests médicaux qui manquent alors que jamais les armes de guerre militaire ou anti-manifestant (LBD, gaz…) ne sont en rupture de stock. Terrible traduction des préoccupations et intérêts de l’état et des Capitalistes.

    Les agents de la Fonction publique et les salariés relevant de la partie privée de notre champ fédéral (entreprises de l’eau et de l’assainissement, thanatologie, secteur privé du logement social), sur l’ensemble du territoire, ne mettent pas en suspens leurs revendications et ne se satisfont pas de la suspension des réformes en cours.

    La Fédération CGT des Services publics reste déterminée dans la période actuelle et avec les agents et salariés du champ fédéral, nous portons les revendications suivantes :
    – L’arrêt de tous les services non-essentiels à la continuité de la nation et la mise en autorisation spéciale d’absence des agents avec maintien intégral de traitement et des primes ;
    – La mise à disposition immédiate de moyens de protection des agents en première ligne dans les collectivités, assurant les services essentiels et indispensables envers la population ;
    – La sauvegarde et le développement de notre système de protection sociale et de retraite, et le retrait du projet de système par points voulu par le gouvernement ;
    – L’abrogation de la loi dite de « transformation de la Fonction publique » ;
    – Le maintien et le développement des libertés syndicales et démocratiques, dont le droit constitutionnel de grève ;
    – Le dégel immédiat du point d’indice de la Fonction publique et l’augmentation des salaires du public et du privé sur la base du SMIC à 1 800 €, des pensions et des minimas sociaux ;
    – L’arrêt des suppressions de postes et fermetures des services publics, la réouverture de services publics et sociaux de proximité pour répondre aux besoins des populations dans une organisation équilibrée et écologiquement responsable des territoires, le réengagement financier de l’État dans le financement des services publics ;
    – Le recrutement massif d’emplois statutaires et l’ouverture des postes nécessaires ;
    – L’arrêt de tout processus d’augmentation du temps de travail et sa réduction à 32h par semaine ;
    – Le rétablissement de l’Impôt Sur la Fortune et une contribution accrue du capital au financement des services publics ;
    – Le respect plein et entier de la démocratie sociale, du syndicalisme, de son rôle de représentation des agents et de ses moyens de fonctionnement et d’intervention (Comité Technique et CHSCT).

    Dans la période actuelle, afin de permettre aux personnels du champ fédéral, le cas échéant après extinction de toutes les autres voies possibles, de se mettre en grève, pour défendre les intérêts des salariés et des agents, porter leurs revendications et de prendre des décisions d’action, la Fédération CGT des Services publics dépose des préavis de grève de 0 h à 24 h pour les journées suivantes : 1er avril 2020, 2 avril 2020, 3 avril 2020, 4 avril 2020, 5 avril 2020, 6 avril 2020, 7 avril 2020, 8 avril 2020, 9 avril 2020, 10 avril 2020, 11 avril 2020, 12 avril 2020, 13 avril 2020, 14 avril 2020, 15 avril 2020, 16 avril 2020, 17 avril 2020, 18 avril 2020, 19 avril 2020, 20 avril 2020, 21 avril 2020, 22 avril 2020, 23 avril 2020, 24 avril 2020, 25 avril 2020, 26 avril 2020, 27 avril 2020, 28 avril 2020, 29 avril 2020 et 30 avril 2020 pour l’ensemble des agents de la Fonction publique territoriale et pour les salariés relevant de la partie privée de notre champ fédéral (entreprises de l’eau et de l’assainissement, thanatologie, secteur privé du logement social).

    Notre organisation reste disponible pour toute négociation sur les revendications des personnels.

    Nous vous adressons, Madame et Messieurs les Ministres, nos sincères salutations.

    Préavis de grève adressé le 24 mars 2020 à :
    Mme Muriel PENICAUD, Ministre du Travail
    M. Gérald DARMANIN, Ministre de l’Action et des Comptes publics
    M. Olivier DUSSOPT, Secrétaire d’État chargé de la Fonction publique

    #grève

    Reçu via mail, le 26.03.2020

  • Dépister et fabriquer des masques, sinon le confinement n’aura servi à rien
    https://reporterre.net/Depister-et-fabriquer-des-masques-sinon-le-confinement-n-aura-servi-a-ri

    Pour sortir efficacement de la pandémie du Covid-19, le confinement seul ne suffira pas, explique l’auteur de cette tribune. Qui rappelle la priorité dans un contexte d’hôpital public martyrisé par des décennies de #politiques_néolibérales : permettre le dépistage et distribuer des #masques de protection.

    Ce dont nous sommes en train de faire l’expérience, au prix d’une souffrance inouïe pour des pans significatifs de la population, c’est que l’Occident vit au Moyen Âge, et pas seulement sanitaire. Comment sortir du Moyen Âge sanitaire très vite et entrer au XXIe siècle ? C’est cet apprentissage que les Occidentaux doivent faire, en quelques semaines. Voyons pourquoi et comment.

    Il faut commencer par le redire, au risque de choquer aujourd’hui, la #pandémie du #Covid-19 aurait dû rester ce qu’elle est : une pandémie un peu plus virale et létale que la grippe saisonnière, dont les effets sont bénins sur une vaste majorité de la population mais très graves sur une petite fraction. Au lieu de cela, le démantèlement du système de #santé européen et nord-américain commencé depuis plus de dix ans a transformé ce virus en catastrophe inédite de l’histoire de l’humanité qui menace l’entièreté de nos #systèmes_économiques.

    #Gaël_Giraud #dépistage #test #quarantaine #système_de_santé_public #service_public #capitalisme #État-providence #individualisme

  • Coronavirus : le sommet de l’Etat redoute de devoir « rendre des comptes »
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/03/25/coronavirus-le-sommet-de-l-etat-redoute-de-devoir-rendre-des-comptes_6034430

    Par Jean-Baptiste Jacquin, Cédric Pietralunga, Alexandre Lemarié et Olivier Faye

    Accusant l’exécutif d’« impréparation » ou de « manque de réaction » face à la crise, responsables de l’opposition et membres du milieu sanitaire annoncent le lancement d’enquêtes parlementaires ou de procédures pénales.

    C’est un sujet tabou, qui représente pourtant une source d’inquiétude majeure au sommet de l’Etat : la peur d’éventuelles poursuites judiciaires contre des membres du gouvernement suite à la gestion de la crise du coronavirus. Selon nos informations, le premier ministre, Edouard Philippe, a évoqué le sujet pour la première fois, mardi 24 mars, lors du petit déjeuner de la majorité, qui se déroulait en visioconférence.

    Le locataire de Matignon a notamment regretté, selon un participant à la réunion, que les oppositions, Les Républicains (LR) en tête, aient annoncé leur volonté de lancer plusieurs commissions d’enquêtes parlementaires. En parallèle, des médecins et des malades menacent le gouvernement d’éventuelles poursuites pénales. Une véritable épée de Damoclès pour le pouvoir.

    Ces derniers jours, plusieurs responsables de l’opposition et une partie des milieux sanitaires ont ainsi accusé l’exécutif d’« impréparation » face à la crise du coronavirus ou de « manque de réaction », pointant notamment du doigt le déficit de masques, de tests ou de lits dans les services de réanimation. Avec un mot d’ordre : le sommet de l’Etat devra « rendre des comptes ».

    « Pression supplémentaire »
    Le 22 mars, le président des députés LR, Damien Abad, a été le premier à lancer l’offensive, en annonçant au Journal du dimanche (JDD) que son groupe allait créer à l’automne une commission d’enquête parlementaire afin de « tirer toutes les leçons de l’épidémie ». Avec l’objectif « d’identifier les éventuelles défaillances et dysfonctionnements » de la part du gouvernement « pour les corriger et en tirer des leçons ».

    Les sénateurs LR prévoient également une commission d’enquête au Palais du Luxembourg, « quand le moment sera venu », a indiqué le même jour leur chef de file, Bruno Retailleau. Mardi, enfin, le vice-président du groupe socialiste au Sénat, Rachid Temal, a annoncé à son tour « avoir demandé », au nom de son groupe, la création d’une commission d’enquête sur la gestion de la pandémie, « une fois la crise passée ». « La transparence devra être faite car des questions se posent », a-t-il expliqué au JDD.

    Autant de déclarations qui agacent dans les coulisses du pouvoir. « Sous le vernis de l’unité nationale affichée, ces annonces sont ressenties clairement comme des menaces – elles en sont d’ailleurs – et nuisent au bon fonctionnement de l’Etat dans la lutte contre la crise, en mettant aux ministres et aux services une pression supplémentaire en plus de celle, déjà lourde, qu’ils supportent », explique un responsable de la majorité. Avant de souligner : « Les menaces sont évidentes. Une commission d’enquête peut déboucher sur des sanctions pénales. »

    • Coronavirus : le sommet de l’Etat redoute de devoir « rendre des comptes », Jean-Baptiste Jacquin, Cédric Pietralunga, Alexandre Lemarié et Olivier Faye
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/03/25/coronavirus-le-sommet-de-l-etat-redoute-de-devoir-rendre-des-comptes_6034430

      Accusant l’exécutif d’« impréparation » ou de « manque de réaction » face à la crise, responsables de l’opposition et membres du milieu sanitaire annoncent le lancement d’enquêtes parlementaires ou de procédures pénales.

      C’est un sujet tabou, qui représente pourtant une source d’inquiétude majeure au sommet de l’Etat : la peur d’éventuelles poursuites judiciaires contre des membres du gouvernement suite à la gestion de la crise du #coronavirus. Selon nos informations, le premier ministre, Edouard Philippe, a évoqué le sujet pour la première fois, mardi 24 mars, lors du petit déjeuner de la majorité, qui se déroulait en visioconférence.

      Le locataire de Matignon a notamment regretté, selon un participant à la réunion, que les oppositions, Les Républicains (LR) en tête, aient annoncé leur volonté de lancer plusieurs #commissions_d’enquêtes parlementaires. En parallèle, des médecins et des malades menacent le gouvernement d’éventuelles #poursuites_pénales. Une véritable épée de Damoclès pour le pouvoir.
      Ces derniers jours, plusieurs responsables de l’opposition et une partie des milieux sanitaires ont ainsi accusé l’exécutif d’« impréparation » face à la crise du coronavirus ou de « manque de réaction », pointant notamment du doigt le déficit de #masques, de #tests ou de lits dans les services de #réanimation. Avec un mot d’ordre : le sommet de l’Etat devra « rendre des comptes ».

      « Pression supplémentaire »
      Le 22 mars, le président des députés LR, Damien Abad, a été le premier à lancer l’offensive, en annonçant au Journal du dimanche (JDD) que son groupe allait créer à l’automne une commission d’enquête parlementaire afin de « tirer toutes les leçons de l’épidémie ». Avec l’objectif « d’identifier les éventuelles défaillances et dysfonctionnements » de la part du gouvernement « pour les corriger et en tirer des leçons ».
      Les sénateurs LR prévoient également une commission d’enquête au Palais du Luxembourg, « quand le moment sera venu » , a indiqué le même jour leur chef de file, Bruno Retailleau. Mardi, enfin, le vice-président du groupe socialiste au Sénat, Rachid Temal, a annoncé à son tour « avoir demandé », au nom de son groupe, la création d’une commission d’enquête sur la gestion de la pandémie, « une fois la crise passée » . « La transparence devra être faite car des questions se posent », a-t-il expliqué au JDD.

      Autant de déclarations qui agacent dans les coulisses du pouvoir. « Sous le vernis de l’unité nationale affichée, ces annonces sont ressenties clairement comme des menaces – elles en sont d’ailleurs – et nuisent au bon fonctionnement de l’Etat dans la lutte contre la crise, en mettant aux ministres et aux services une pression supplémentaire en plus de celle, déjà lourde, qu’ils supportent », explique un responsable de la majorité. Avant de souligner : « Les menaces sont évidentes. Une commission d’enquête peut déboucher sur des sanctions pénales. »
      Pour cadrer les différentes enquêtes parlementaires annoncées, l’Assemblée nationale a annoncé, mardi 24 mars, la création d’une #mission_d’information sur la gestion de l’épidémie, qui devrait être présidée par le président de l’institution, Richard Ferrand, proche d’Emmanuel Macron. Cette mission, qui va contrôler chaque semaine les mesures prises par le gouvernement, pourrait se doter des prérogatives d’une commission d’enquête. Ce travail ne se fera pas « dans une optique à charge, ni contre cette majorité ni contre la précédente », a prévenu le patron des députés La République en marche (LRM), Gilles Le Gendre. Une manière de couper l’herbe sous le pied à l’offensive des oppositions.

      Plusieurs plaintes envoyées à la CJR
      Déjà, les premières poursuites se profilent. Mardi 24 mars, un patient atteint du Covid-19 a porté plainte contre X pour « entrave aux mesures d’assistance » devant la #Cour_de_justice_de_la_République (CJR), seule instance habilitée à juger des actes commis par des membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions, a révélé BFM-TV. En cause : la supposée « inaction » du gouvernement à mesure que les avertissements de la communauté scientifique se multipliaient.
      En fin de semaine dernière, un collectif de médecins appelé C19 a également annoncé son intention de porter plainte contre l’ex-ministre de la santé, Agnès Buzyn, et le premier ministre, Edouard Philippe, devant la CJR, estimant que ces derniers « avaient conscience du péril et disposaient des moyens d’action, qu’ils ont toutefois choisi de ne pas exercer » . Leur initiative est appuyée par une pétition en ligne, qui a déjà recueilli près de 200 000 signatures en quatre jours.

      Selon une source judiciaire, la CJR a déjà reçu cinq plaintes – quatre contre Edouard Philippe et Agnès Buzyn, et une contre le premier ministre et l’actuel ministre de la santé, Olivier Véran. Les motifs ? Blessures involontaires, homicides involontaires ou mise en danger de la vie d’autrui. La commission des requêtes de la CJR doit désormais se prononcer sur leur recevabilité.
      Ces différents plaignants s’appuient notamment sur les déclarations d’Agnès Buzyn au Monde, qui a affirmé avoir alerté dès janvier le premier ministre sur la gravité de l’épidémie. Au sein de l’appareil d’Etat, certains voient d’ailleurs dans les confidences de l’ex-ministre de la santé une volonté de se couvrir en amont. « L’interview de Buzyn est une bombe atomique car elle prépare l’étape d’après sur les commissions d’enquête à venir et les éventuels procès », analyse un haut fonctionnaire, au fait de ces sujets.

      « Rendez-vous au procès »
      La présidente du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, a tenté d’instrumentaliser cette polémique en estimant que « Mme Buzyn sera probablement amenée à donner des explications à la Cour de justice ». « Se rend-elle compte qu’elle engage sa responsabilité pénale et celle des autres personnes qu’elle dit avoir prévenues ? », a commenté pour sa part le chef de file des « insoumis », Jean-Luc Mélenchon.

      D’autres plaignants préfèrent se tourner vers le #Conseil_d’Etat, qui a été saisi à plusieurs reprises par des soignants pour obliger l’exécutif à prendre certaines décisions. Lundi, le juge des référés de l’institution a donné 48 heures au gouvernement pour durcir les conditions de confinement, ce qui a poussé Edouard Philippe à annoncer la fermeture des marchés ouverts ou à limiter les sorties à une heure par jour. Jeudi, le Conseil d’Etat devait de nouveau examiner une demande de syndicats d’infirmiers et de médecins sur l’approvisionnement en masques et en matériel pour les soignants, ainsi que la mise en place d’un dépistage massif.

      Sur les réseaux sociaux, les menaces de poursuites se multiplient également, de la part de particuliers mais pas seulement. « Rendez-vous au procès », a ainsi tweeté le 24 mars Jérôme Marty, président du syndicat de médecins UFML, en exergue d’un article où la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, disait ne pas craindre de rendre des comptes sur l’épidémie. « L’imprévoyance du gouvernement et de l’administration française a été totale » et les autorités « auront des comptes à rendre », avait déclaré deux jours plus tôt Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France (FMF).
      « Il faut s’attendre à une déferlante de #plaintes contre l’Etat », reconnaît un membre du Conseil national des barreaux. « Etant donné les polémiques sur l’absence de protection des personnels soignants et l’impréparation de l’Etat et des hôpitaux, les familles de victime voudront demander des comptes », poursuit-il. De fait, un site Internet proposant des modèles de plainte pour les particuliers a déjà vu le jour. Selon que l’on est personnel soignant, personne malade ou non malade, trois types de plaintes contre X à adresser au procureur de la République peuvent être téléchargées. Il s’agit de plainte pour homicide volontaire, violences volontaires, mise en danger de la vie d’autrui, etc.

      « Prêts à répondre »
      Pour l’heure, aucune plainte de ce type n’est arrivée au parquet de Paris, explique Rémy Heitz, le procureur de la République. Au ministère de la justice, la direction des affaires criminelles et des grâces n’a pas non plus fait remonter d’information sur de telles procédures. Elle en serait immédiatement informée car derrière ces plaintes contre X, ce sont des ministres et des responsables d’administrations qui seraient visés.
      Face à ces menaces, la sérénité est officiellement de mise au sein de l’exécutif. Le gouvernement « a pris ses responsabilités » et ne craint pas de « rendre des comptes » sur sa gestion de la crise du coronavirus devant une commission d’enquête parlementaire, a assuré, le 23 mars, sa porte-parole, Sibeth NDiaye. « Cela ne m’inquiète pas parce que je crois que nous avons, avec beaucoup de professionnalisme, de détermination et de gravité regardé cette crise en face (…) et nous avons pris nos responsabilités », a-t-elle estimé sur CNews. Avant d’ajouter : « C’est normal qu’on puisse rendre des comptes et c’est normal qu’une commission parlementaire interroge le processus de cette crise. » « Nous serons évidemment prêts à y répondre, ça fait partie du jeu démocratique », a poursuivi la secrétaire d’Etat.
      A l’Elysée, on réfute également par avance le procès en inaction. « Le président a été le premier à mobiliser nos partenaires étrangers, il a été le premier dirigeant au monde à appeler à la mobilisation internationale, c’est lui qui a provoqué le sursaut européen, énumère l’entourage d’Emmanuel Macron. Dès janvier, on a rapatrié nos compatriotes. Dès janvier, on a mis en place des instances de suivi de l’épidémie. Les faits et la chronologie sont là, il n’y a pas de polémique à avoir. »

      Sur le fond, l’exécutif appelle néanmoins à une forme d’indulgence, pointant les nombreuses inconnues autour du virus. « Le président n’a jamais dit qu’il avait toutes les solutions, au contraire. Cette crise nous met dans une position de grande humilité », reconnaît un proche du chef de l’Etat. Mais, ajoute cette source, « le président met tout en œuvre pour répondre à la crise. Il est transparent, réactif, sur tous les fronts. L’heure des comptes viendra mais plus tard. Le temps est aujourd’hui à l’action. Certains veulent nous punir alors que nous devons agir. Ce n’est pas responsable. »
      En attendant, pas question de se défiler. Le moment venu, l’exécutif assumera ses choix, dit-on au sommet de l’Etat. « Les décisions ne sont pas prises par le conseil scientifique mais par le gouvernement, qui par nature est responsable », estime un proche d’Edouard Philippe. « Le comité scientifique va être responsable des avis qu’il émet. Ceux qui prennent des décisions, c’est le gouvernement, à la lumière des avis du comité scientifique », abonde la députée LRM Marie Guévenoux, rapporteuse du projet de loi sur les mesures d’urgence.

      Au sein de l’exécutif, on assure d’ailleurs que la perspective de devoir rendre des comptes est présente dans les esprits depuis le départ. « Sang contaminé, amiante : le grand public a reproché le manque de transparence à chaque fois. Nous, nous avons ouvert le capot, vantait une ministre, début mars. Nous donnons à voir comment se passe la gestion d’une crise épidémiologique. » Il y a dix jours, une secrétaire d’Etat soupirait, plus sceptique : « C’est sûr qu’on se fera engueuler sur la gestion de la crise, quoiqu’on fasse. Ça finira par arriver. »

      Rémy Heitz, procureur de Paris, explique au « Monde » avoir relevé en une semaine près de 10 000 infractions au confinement et une quinzaine de trafics de masques.

      Rémy Heitz : « Je réfléchis à des peines de travail d’intérêt général en milieu hospitalier après la fin de l’état d’urgence sanitaire »
      https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2020/03/25/remy-heitz-je-reflechis-a-des-peines-de-travail-d-interet-general-en-milieu-

      Le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, songe à des alternatives aux amendes pour les personnes, souvent jeunes, qui violent les règles du confinement, notamment des #travaux_d’intérêt_général. Il détaille la politique du parquet pendant l’état d’urgence sanitaire.

      Quelle réponse pénale apportez-vous aux violations des règles du confinement ?
      Mardi 24 mars, nous étions à Paris juste en dessous de 10 000 #infractions constatées depuis le début du confinement. Jusqu’ici, il s’agissait d’une amende forfaitaire de catégorie 4, de 135 euros. Mais depuis la promulgation de la loi d’urgence, les peines sont alourdies en cas de #récidive. Je vais donner des directives pour adapter les mesures pénales, notamment en privilégiant le travail d’intérêt général (#TIG). Ces infractions concernent souvent une population jeune pour qui une amende de 3 750 euros est sans doute trop élevée, et une peine de prison n’est pas vraiment d’actualité [la troisième récidive en trente jours est punissable de six mois de prison et 3 750 euros d’amende]. Une peine de TIG, même si elle ne sera exécutée qu’après la sortie de l’état d’urgence sanitaire, aura plus de sens. Je réfléchis d’ailleurs à la possibilité de les faire exécuter en milieu hospitalier. De même, plutôt qu’une amende de cinquième catégorie [1 500 euros pour la première récidive], je compte privilégier la sanction de travail non rémunéré [qui est aux contraventions ce que le TIG est aux délits].

      Quelle évolution de la délinquance observez-vous dans la capitale en lien avec la crise sanitaire ?
      Nous avons une quinzaine d’affaires de trafics de masques. Souvent, il s’agit de petits trafics, faits par des pharmacies ou parapharmacies qui n’ont pas répondu aux demandes de réquisition de masques par le gouvernement et en vendaient sous le manteau. Il y a quelques trafics plus importants. Au total, nous avons déjà saisi plusieurs dizaines de milliers de masques, que nous faisons porter aux hôpitaux. Par ailleurs, nous commençons à voir des dossiers de violences conjugales ou intrafamiliales. Le fait nouveau est qu’il y a des auteurs primo-itérants, inconnus jusqu’ici. Mais soyons prudents dans l’interprétation de ce phénomène plus visible alors que le reste de la délinquance baisse et que, contrairement à certaines atteintes aux biens dont nous retardons les procédures, les violences conjugales font partie des infractions que nous continuons de traiter en priorité.

      Comment le parquet de Paris est-il organisé pour travailler ?
      Nous sommes en dessous du plan de continuité d’activité, qui prévoit de tourner à près de trente magistrats. Nous sommes à moins de vingt [sur 125 magistrats au parquet de Paris]. L’activité en comparutions immédiates est fortement réduite et tient beaucoup aux conséquences de la grève des avocats du début d’année. Cet après-midi, par exemple, sur les sept dossiers de l’audience des comparutions immédiates où je vais requérir, six sont des renvois qui avaient été demandés lors de la grève, un seul est nouveau. Il s’agit d’une affaire de violences conjugales.
      Jean-Baptiste Jacquin

    • Sous le vernis de l’unité nationale affichée, ces annonces sont ressenties clairement comme des menaces – elles en sont d’ailleurs – et nuisent au bon fonctionnement de l’Etat dans la lutte contre la crise, en mettant aux ministres et aux services une pression supplémentaire en plus de celle, déjà lourde, qu’ils supportent », explique un responsable de la majorité.

      A propos du « vernis de l’unité nationale » que penser de l’attitude d’Édouard Philippe qui est rappelée ici :
      https://seenthis.net/messages/834069

      Le 28 février est publié le rapport crucial de l’OMS sur ce qui a été fait en Chine. Il montre que seule une mobilisation de « tout le gouvernement » (all-of-government) et « toute la société » (all-of-society) permet de vaincre l’épidémie. On se souviendra sans doute longtemps du fait que le lendemain, le samedi 29 février d’une année bissextile, le premier ministre Édouard Philippe a décidé de détourner un conseil des ministres « exceptionnel dédié au Covid-19 » pour annoncer l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution afin d’adopter sans vote la réforme des retraites. Alors que l’OMS démontrait l’urgence de l’action collective et solidaire face à une pandémie bientôt incontrôlable, le gouvernement s’est dit que le plus urgent était de profiter de la dernière fenêtre de tir pour faire passer son projet de loi tant décrié.

      Le « vernis » est abondamment étalé par le gouvernement lui-même.

    • Du vernis sur une belle grosse merde !

      « Je réfléchis à des peines de travail d’intérêt général en milieu hospitalier après la fin de l’état d’urgence sanitaire »

      Il faudrait confiner ce con fini ! J’espère qu’on va pas attendre 150 ans pour les mettre dans nos indulgentes prisons et sans masques (illes ne savent pas s’en servir de toute façon).

    • Pour cacher les défaillance, à l’instar de Mme Buzyn, l’ensemble du gouvernement a préféré la dissimulation à la planification. Selon les prises de paroles officielles, les masques étaient inutiles, difficiles d’utilisation, ou réservés aux seuls soignants. Tout cela à l’encontre des recommandations du Haut Conseil de la Santé Publique qui recommandait en 2013 des masques pour toutes les professions de contact. Tout a été dit ou presque pour minimiser le virus du Covid-19 et rassurer les Français, pendant que la Chine et la Corée prenaient des mesures drastiques.

      Un guide sur mesure, sans masques, sans confinement

      Le gouvernement a édité dès le 20 janvier 2020 un guide méthodologique Covid-19. Ce plan a été déroulé au mot près par Jérôme Salomon et le gouvernement. Ne figure pas dans ce guide les termes de confinement, de quarantaine et le stade 2 renforcé n’existe pas. Les masques ne sont destinés qu’aux malades et personnels de santé.

      Il a été dit que ce plan était une déclinaison du plan 2011 contre la grippe H1N1

      On peut se demander pourquoi le gouvernement a crée un mini plan COVD 19 plutôt qu’une mise à jour du plan pandémie grippal 2011 est particulièrement complet. Contrairement au guide méthodologique de 2020, le plan pandémie grippale prévoit à chaque phase de l’épidémie l’utilisation des Masque FFP, notamment FFP2, en phase avec la doctrine de 2013 sur la protection des travailleurs.

      D’ailleurs on peut constater la cohérence de tous les acteurs publics concernant la protection de la population en cas de pandémie grippale ainsi par exemple on trouvera nombre d’information sur les port des masques avec les liens suivant :

      https://gouvernement.fr/risques/pandemie-grippale

      https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/Que_faire_si_je_pense_avoir_la_grippe_030210.pdf

      https://ansm.sante.fr/Dossiers/Pandemie-grippale/Les-masques-medicaux/(offset)/7

      Les mesures et les explications de port de masques sont donc nombreuses dans la réponse à une pandémie, mais devant la pénurie et l’absence de préparation, le gouvernement a préféré mentir aux populations concernant la réel protection des masques.

      Ceci est d’autant plus grave que le gouvernement a encouragé à la continuité économique du pays, sans organiser ou superviser la protection des salariés, notamment dans les métiers de contacts.

      https://www.lemondemoderne.media/labsence-de-masques-met-en-danger-les-travailleurs

      https://reflets.info/articles/il-faut-une-enquete-penale-sur-la-gestion-de-la-pandemie-covid19

    • Coronavirus : l’impossible communication de crise d’Emmanuel Macron

      « La gestion des masques et des tests , on dirait Coluche qui disait : “dites-moi quel est votre besoin, je vous expliquerai comment vous en passer”_
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/03/29/coronavirus-l-impossible-communication-de-crise-d-emmanuel-macron_6034796_82


      Le président Emmanuel Macron porte un masque lors de sa visite de l’hôpital militaire à Mulhouse (Haut-Rhin), le 25 mars. MATHIEU CUGNOT / AFP

      Pour répondre à la crise sanitaire, le chef de l’Etat doit à la fois rassurer et effrayer. Un paradoxe qu’il tente de résoudre en saturant l’espace et en adoptant un ton martial.

      C’est le cauchemar de tous les conseillers en communication : vivre une crise où chaque événement du jour peut remettre en cause ce que vous aviez décidé la veille.
      C’est pourtant ce qu’affronte Emmanuel Macron depuis l’apparition du SARS-CoV-2, un virus qui oblige l’exécutif à adapter sa #communication tout autant à l’avancée de l’#épidémie qu’à celle des connaissances scientifiques. « Cette crise est inédite, il est normal de tâtonner », estime Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande.

      Pour affronter la #crise_sanitaire, « la plus grave qu’ait connue la France depuis un siècle », comme l’a qualifiée le chef de l’Etat dès le 12 mars, l’exécutif avait au départ fait le pari de placer en première ligne le ministre de la santé, Olivier Véran, fraîchement nommé à ce poste après le départ d’Agnès Buzyn, et le directeur général de la santé, l’infectiologue Jérôme Salomon. « Ils doivent devenir les “François Molins” du coronavirus », entendait-on alors dans les rangs de la majorité, en référence à l’ancien procureur de la République de Paris, qui avait incarné la lutte contre le terrorisme après les attentats de 2015.

      Hyperprésence d’Emmanuel Macron

      Las ! Depuis son premier déplacement lié au Covid-19, le 27 février, à l’hôpital parisien de la Pitié-Salpétrière, le chef de l’Etat s’impose par son hyperprésence.
      Un jour dans une maison de retraite, un autre dans un centre de régulation du SAMU, le suivant dans un laboratoire de l’Institut Pasteur ou dans un hôtel réquisitionné pour les SDF… En un mois, Emmanuel Macron s’est déplacé ou s’est exprimé une dizaine de fois sur le Covid-19. Sans parler de ses trois allocutions solennelles, les 12 et 16 mars depuis l’Elysée et le 25 mars à Mulhouse (Haut-Rhin). Des interventions suivies massivement : le 16 mars, son annonce du confinement a été regardée par 35 millions de Français, du jamais vu.

      « Emmanuel Macron n’a pas le choix. Dans une période comme celle que nous vivons, le président doit se déplacer, aller sur le terrain, comme les généraux vont sur le front , approuve Gaspard Gantzer. Il faut remettre de l’humain, montrer une forme de courage physique, ça fait du bien aux gens. »
      C’est cette ligne qu’avait choisie François Hollande après l’attaque de Charlie Hebdo en janvier 2015 ou les attentats de novembre 2015. « En période de crise, le pouvoir politique doit parler très souvent à son peuple, il doit s’exprimer », abonde Arnaud Dupui-Castérès, directeur général du cabinet Vae Solis et spécialiste de la communication de crise.

      « Prendre de la hauteur »
      « A partir du moment où le pouvoir fait le choix de la pédagogie et de la transparence, il doit prendre la parole quotidiennement. Dans une crise comme celle que nous vivons, il n’y a jamais assez de communication » , confirme Clément Léonarduzzi, président de Publicis Consultants. Pour l’ex-bras droit de Marie-France Lavarini, ancienne communicante de Lionel Jospin à Matignon, le gouvernement devrait d’ailleurs instaurer un point quotidien sur la situation économique du pays, comme il le fait pour la situation sanitaire avec Jérôme Salomon. « Quand il y a des questionnements, il faut y répondre », estime le consultant.

      A l’Elysée, on assume en tout cas cette posture jupitérienne retrouvée du chef de l’Etat, alors qu’Emmanuel Macron avait tenté de la gommer après la crise des « gilets jaunes ». « Le président est transparent, réactif et sur tous les fronts », résume son entourage.
      Au point d’inquiéter certains soutiens, qui le trouvent exagérément exposé. « Macron est trop seul. A part [Olivier] Véran et [Jérôme] Salomon, qui s’occupent du sanitaire, personne n’imprime. Ce devrait être le rôle du premier ministre [Edouard Philippe] ou du [ministre de l’intérieur Christophe] Castaner de gérer l’opérationnel, mais ils n’y arrivent pas, il manque un échelon », estime un communicant réputé proche de l’Elysée.

      « Dans une crise, on est souvent obsédé par la gestion opérationnelle. C’est une erreur. Un président ou un premier ministre doivent prendre de la hauteur et de la distance, pas s’occuper de la fermeture des marchés », abonde Arnaud Dupui-Castérès.
      Sur la forme, l’exécutif a fait le choix d’une communication au ton très martial. « Nous sommes en guerre », a répété à six reprises Emmanuel Macron lors de son allocution télévisée du 16 mars, évoquant un « ennemi (…) invisible, insaisissable » contre lequel il faut sonner « la mobilisation générale ».

      « Le président s’inspire beaucoup de Clemenceau »
      Le 25 mars, le chef de l’Etat s’est volontairement mis en scène devant l’hôpital de campagne installé par l’armée sur le parking du centre hospitalier de Mulhouse, y annonçant même le lancement d’une opération militaire baptisée « Résilience ». « Le président s’inspire beaucoup de Clemenceau, qui fait partie de son panthéon personnel. Son appel à la mobilisation vient de là » , explique un proche.
      Mais certains s’interrogent sur la durabilité de ce ton martial. S’il a permis de mobiliser les Français et d’obtenir une forme d’union nationale contre le virus, poursuivre sur la même tonalité comporte aussi des risques, estiment les professionnels de la communication.

      « Le vocabulaire guerrier peut s’user très vite , met en garde Gaspard Gantzer. Les gens voient bien qu’il ne s’agit pas d’une guerre au sens classique. » « C’est une sémantique qui met immédiatement dans une position de #chef_de_guerre. Cela provoque un choc utile et nécessaire. Mais comme dans une guerre, il faut ensuite donner une perspective sur les batailles et la victoire à venir », abonde Clément Léonarduzzi.

      D’autres se montrent aussi sceptiques sur le choix de médiatiser les #experts du conseil scientifique ou du comité analyse, recherche et expertise (CARE), deux instances installées ces dernières semaines par l’exécutif pour le conseiller sur la crise sanitaire.

      « Cela donne un sentiment de fébrilité, que le pouvoir cherche à s’abriter derrière les scientifiques. C’est une ligne Maginot illusoire » , tance un conseiller de l’ombre. Des réserves balayées par l’Elysée. « Le président a mis en place ces conseils pour créer un lien de confiance avec les Français, pas pour se défausser », explique un membre du cabinet de M. Macron. « Le président s’entoure beaucoup mais il n’est pas prisonnier. Il ne veut pas d’un gouvernement d’experts. C’est lui qui prend les décisions et il l’assume », ajoute un autre conseiller.

      Trouver un chemin de crête

      N’empêche, l’exécutif a donné le sentiment de ne pas toujours savoir quelle stratégie tenir, notamment en matière de #masques ou de #tests, ce qui a provoqué le trouble.
      « Ce type de crise nécessite des décisions quotidiennes, mais il faut choisir une ligne et éviter de se dédire. On ne peut pas être sur la face nord et sur la face sud en même temps, sinon plus personne n’y comprend rien », met en garde M. Dupui-Castérès. « La gestion des masques et des tests , on dirait Coluche qui disait : “dites-moi quel est votre besoin, je vous expliquerai comment vous en passer”. Cela va revenir comme un boomerang pour l’exécutif » , craint un communicant ayant ses entrées à l’Elysée.
      « Nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter, les scientifiques eux-mêmes changent d’avis ! Il y a encore quinze jours, l’OMS [l’Organisation mondiale de la santé] disait que généraliser les tests ne servait à rien ! », se défend-on à Matignon.

      Reste à savoir combien de temps Emmanuel Macron pourra tenir ce rythme et maintenir ce ton. Depuis le début de la crise, l’exécutif est confronté à deux écueils, entre lesquels il tente de trouver un chemin de crête : celui d’en faire trop et celui de ne pas en faire assez.
      « La plus grosse difficulté est ce paradoxe à gérer : il faut faire #peur pour que les gens se confinent, mais aussi rassurer pour qu’ils gardent le moral. Cela n’a rien d’évident sur le long terme » , reconnaît M. Gantzer.

      « Montrer le bout du tunnel »

      Pour éviter de tomber de ce fil d’équilibriste, tous les communicants s’accordent à dire que le chef de l’Etat n’a qu’une solution : ouvrir rapidement la séquence de #l’après. « Pour garder la confiance de ses troupes, un chef de guerre doit aussi se projeter dans la victoire , estime Mayada Boulos, directrice générale adjointe de Havas Paris et ancienne conseillère de Marisol Touraine au ministère de la santé. Le temps est aujourd’hui comme suspendu, il faut montrer le bout du tunnel. Expliquer qu’il y aura un stade 4 après le stade 3 de l’épidémie. »

      Un changement de discours qui passe aussi par des symboles, estiment d’autres conseillers. « Pour donner le moral aux Français, on pourrait imaginer que la patrouille de France passe au-dessus de l’Arc de triomphe comme la patrouille italienne est passée au-dessus de la Péninsule au son de Pavarotti. Ou annoncer dès maintenant que des soignants de l’AP-HP [Assistance publique-Hôpitaux de Paris] défileront sur les Champs-Elysées le 14 juillet, propose M. Gantzer, qui avait été de ceux à imaginer le grand défilé parisien après l’attaque contre Charlie Hebdo, qui avait réuni 1,5 million de personnes en janvier 2015. Les Français vivent des moments difficiles, ils ont aussi besoin d’être flattés, d’être considérés, de se sentir comme des résistants… »

      #communication_de_crise

    • L’article du Monde est vraiment mauvais. La vérité, c’est que l’ensemble de nos gouvernants est franchement mauvais, mauvais et incompétents et même pas capables d’une bonne communication.

      La seule bonne option, violemment rejetée par Macron, serait de reconnaitre qu’ils (il…) se sont (s’est) trompé(s) au lieu de ramer derrière les pitoyables justifications sur le manque de masques, de tests, d’organisation a minima de l’outil industriel pour le réorganiser en urgence sur ces manques,…

      Dans leur bulle, ils ne perçoivent pas le discrédit profond qui les atteint, sans parler de l’immense colère qu’ils déclenchent. Pour museler toute critique, Monsieur le Premier ministre, il faudrait commencer par reconnaître qu’il y a eu lacune (grave !) et agir avec détermination et non pas le nez fixé sur la (mauvaise) comm’. Annoncer 15 jours de prolongation du confinement pour, le lendemain, laisser entendre que c’est (très) grave et donc, que ça sera certainement nettement plus, un seul mot, c’est minable.

      Ouvrir la séquence de l’après, non mais c’est quoi ces communicants de m… ! On n’y est pas !
      Pour garder la confiance de ses troupes, un chef de guerre doit être à la hauteur de la situation. On n’y est pas !

    • Même Léa Salamé, relayée par Gala, exprime ses doutes. et suggère de reconnaître l’erreur (voilà où on en est, Léa Salamé est meilleure conseillère que la batterie d’experts en comm’ de crise…)

      VIDEO – Olivier Véran “challengé” par Léa Salamé : tension sur le plateau de France 2 - Gala
      https://www.gala.fr/l_actu/news_de_stars/video-olivier-veran-challenge-par-lea-salame-tension-sur-le-plateau-de-france-2

      UN ÉCHANGE TENDU
      Olivier Véran fait partie des ministres en première ligne dans la lutte contre le coronavirus. Alors qu’il multiplie les interventions télévisées depuis des semaines et sa nomination au ministère de la Santé, il était une nouvelle fois présent sur France 2, dans l’émission Vous avez la parole, présentée par Thomas Sotto et Léa Salamé. Lors de sa prise de parole, le ministre de la Santé a évoqué plusieurs sujets, notamment les tests, en s’appuyant sur des chiffres. « Nous étions à 4.000 tests, nous sommes ensuite montés à 5.000 tests, nous sommes aujourd’hui à 10.000 tests. Il y a dix plateformes haut-débit qui sont capables chacune de réaliser 2.000 tests par jour qui sont en train d’arriver en France », a-t-il déclaré en préambule. Avant de se faire interrompre par Thomas Sotto : « Mais l’Allemagne est à 500 000 tests par semaine », a noté le journaliste de _France 2. Un brin agacé, Olivier Véran a alors rétorqué : « Vous voyez, j’essaie de vous donner un certain nombre d’informations et vous êtes déjà en train de me challenger par rapport à la situation de l’Allemagne », a-t-il réagi.

      La passe d’armes ne s’est pas arrêtée là. Le ministre de la Santé a tenté de poursuivre son raisonnement et de conclure : « Ces tests, ils peuvent venir de Corée, d’Europe, de France ou des Etats-Unis, à mesure qu’ils arrivent, nous les achetons et nous les mettons en disponibilité pour les Français. Plus de 2 millions de tests le mois prochain, si vous faites le calcul avec l’Allemagne, vous aurez votre réponse », a-t-il déclaré. Léa Salamé a alors pris à son tour la parole afin de faire une mise au point qu’elle jugeait nécessaire : « Monsieur le ministre, on n’essaie pas de vous challenger, on essaie de comprendre et de vous faire passer les questions des Français », a-t-elle précisé. Et d’ajouter : « Au début de la crise, il y a trois semaines encore, les messages du gouvernement, c’était de dire : ’n’achetez pas forcément des masques, c’est inutile » ou ’les tests, ce n’est pas l’alpha et l’oméga’. Vous nous avez dit ça dans un premier temps (...) Est-ce qu’au fond, il ne fallait pas dire la vérité plus simplement ?", s’est-elle interrogée.

    • A mon avis il n’y a pas d’experts en communication à l’Elysée (à moins que Sibeth puisse etre considéré comme telle !), Jupiter n’écoute que lui, et peut être Brigitte à la limite, mais c’est tout. Les autres sont simplement des exécutant·es minables et viles qui se sont rabaisser au service d’un pur dictateur pour se faire du fric. Et c’est pas un problème de communication, choisir le conseil des ministres spécial coronavirus pour imposer le 49.3 c’est pas un problème de conseillés en marketing. Choisir de contracté 45 millliards d’euros de dettes sur notre dos pour les patrons du cac40 et dire aux soignants « la meilleur prime pour les soignants c’est de respecté les gestes sanitaires » c’est pas non plus une erreur c’est de la provocation. Dire que les soignant·es contractent le virus non sur leur lieu de travail mais dans les transports c’est pas une erreur non plus c’est juste pour que les soignant·es sachent qu’illes vont crevé sans que ca soit considéré comme relavant du code du travail.
      Quelle urgence y a-t il à supprimer le code du travail, les droits des prévenu·es à une défense, les droits à une retraite.... En fait Macron utilise la stratégie du choc, et il se venge sur les soignant·es, avocat·es et toutes celles et ceux qui ne sont rien.
      Il promet une prime aux soignant·es pour après mais il donne de suite une prime au cac40. Pourquoi ne pas donné immédiatement cette prime plutot que de parler d’un après qui n’adviendra pas... Il a peur d’avoir à rendre des comptes mais si on est en guerre comme il dit, alors il doit être arrêté pour haute trahison et fraternité avec le virus.

    • « Pour donner le moral aux Français, on pourrait imaginer que la patrouille de France passe au-dessus de l’Arc de triomphe comme la patrouille italienne est passée au-dessus de la Péninsule au son de Pavarotti. Ou annoncer dès maintenant que des soignants de l’AP-HP [Assistance publique-Hôpitaux de Paris] défileront sur les Champs-Elysées le 14 juillet, propose M. #Gantzer, qui avait été de ceux à imaginer le grand défilé parisien après l’attaque contre Charlie Hebdo …

      #sérieux ?
      Ben quand tu vois qu’ils en sont là face à une pandémie prévisible où ils sont au mieux des criminels, au pire des criminels, il faut se dépêcher de mettre nos masques, dès aujourd’hui. Et de les recycler pour les manifs qui viendront. Puisque la loi devrait changer maintenant sur les masques auparavant interdits pour cause d’identification biométrique. (je dis ça, je dis rien)

    • Oui, @simplicissimus l’article est mauvais. L’ai publié pour la formule Coluche utilisé par un conseiller (ils savent qu’on sait), et pour mémoire quant aux circonvolutions empapaoutées de L’imMonde, voix de la France. Non @mad_meg il y a évidemment des conseillers en communication ! Et ils sont géniaux. Voir un autre article du Monde avec le même Gantzer (ex PS-CAC40 et Ville de Paris)

      https://seenthis.net/messages/835629#message835632

      « S’il veut garder le soutien de l’opinion, Emmanuel Macron ne pourra pas se contenter d’appeler à la mobilisation générale. Il faut aussi qu’il donne de l’espoir, qu’il montre le bout du tunnel, qu’il réintroduise de la joie de vivre » , estime Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande, qui suggère par exemple d’ « annoncer dès maintenant que des soignants défileront sur les Champs-Elysées le 14 juillet » . Où ils pourront crier : « On l’a eu ! » (fuckin’ sic, ndc)_

    • Brio et inventivité, probité, libre arbitre, efficacité, faut peut-être pas se faire une trop haute idée de ce que sont les communicants ou les journalistes, ou les avocats ou les professeurs, et tous les professionnels de la profession du monde.
      "Plus le mensonge est gros, plus il passe" était le mot d’un #communicant nommé Goebbels, et il a fait école, y compris banalement dans la pub.
      Sibeth Ndiaye assure : « J’assume parfaitement de mentir pour protéger le président ». De là à inventer des mensonges qui soient beaux, fassent envie, donnent confiance, agrège, des mensonges qui fonctionnent vraiment....
      Parce que ce qui structure tout le champ, le souci actuel des militants de l’économie, c’est qu’ils n’ont rigoureusement aucune #perspective à offrir, à part le transhumanisme, mais c’est une promesse de niche qui largue tout le monde, au lieu d’intégrer. Un capitalisme vert ou moralisé ? On rigole (ou bien on est à EELV, Attac et d’autres). C’est ce qui rend difficile l’exercice, au de-là du déni actif. "Il n’y pas de violences policières" nous dit-on depuis 4 ans. "L’épidémie ne passera pas par la France car nous sommes prêts à la combattre efficacement", façon Buzyn en janvier. Certes, on continue à nous dire "enrichissez-vous" et avec le chômage de masse on y a ajouté "intégrez-vous" à la société ("mieux vaut être Uber que cassos", etc), sans avoir rien à proposer qui soit réellement partageable. D’où "la guerre" : nous partageons au moins une chose, un ennemi. Mais est ce que ces ennemis de notre ennemi - ici la mort en masse et dépit du possible - sont bien nos amis ?

      À cette limite, l’absence totale d’horizon impliquée par leur propre position, ils sont bien adaptés. Le regard braqué sur des "perspectives" et indicateurs de profit, d’une part, l’audimat, les sondages, et ce qui reste d’électeurs d’autre part, il sont devenus incapables d’incarner le capitaliste collectif, l’État. Ce dernier étant d’ailleurs devenu nébuleux en prenant une dimension transnationale et globale, entre multinationales, organisations et instances internationales, tou en étant arrimé à des institutions vues comme infra étatiques (villes, régions, syndicats, institutions diverses).
      Ils communiquent sans cesse, mais ils ont perdu la consistance (Hollande n’aime pas la littérature, un autre dira que la sociologie sert d’excuse sans arriver à rien en tirer pour son compte) et l’intelligence nécessaires pour faire une job devenue infaisable. Ça ne veut pas dire que ça va tomber de soi même (façon Lundi matin).

      Si leur communication est en crise au point qu’une communication de crise soit difficile à mettre au point, c’est aussi sur un fond de montée exponentielle du contrôle dans un contexte de crise de la société de contrôle.
      Là dessous, il y le désir, qui reste n’importe quoi, puissant. L’histoire Raoult me semble en témoigner. Porté par divers appuis et le buzz des réseaux sociaux, il s’est imposé à un gouvernement qui n’a rien pour l’instant rien trouvé d’autre pour répondre à une demande, à des affects de masse qui se sont cristallisés sur cette "solution", dans la peur et la méfiance des institutions (ça manière de jouer l’outsider).

      Voilà, je résiste pas à citer pour finir ce que tu risques je le crains de prendre comme un argument d’autorité, pris dans

      Gilles Deleuze : « L’information, c’est la société de contrôle »
      https://iphilo.fr/2018/01/12/gilles-deleuze-linformation-cest-la-societe-de-controle

      Les déclarations de police sont dites, à juste titre, des communiqués. On nous communique de l’information, c’est-à-dire on nous dit ce que nous sommes tenus de croire, ou même pas de croire mais de faire comme si l’on croyait. On ne nous demande pas de croire, on nous demande de nous comporter comme si l’on croyait. C’est cela l’information, la communication – et indépendamment de ces mots d’ordre et de la transmission de ces mots d’ordre, il n’y a pas de communication, il n’y a pas d’information.

      Indulgence pour le vrac, svp. Ça manque de points d’interrogation et de développement. Rien n’est trop clair dans le changement épocal en cours. Avec ces semaines confinées je trouverais peut-être moyen de scriber autrement et ailleurs.

      #horizon

    • Ne t’inquiète pas @colporteur l’autorité de Deleuze ne vaut pas tripette à mes yeux et le vrac ne me dérange pas. J’ai été un peu vite aussi , car il est vrai que je ne sais pas bien distingué les communiquants des politiques. Heureusement qu’à ce niveau d’incompétence illes (les communiquant·es) ne peuvent pas rattraper le coup. Il serait temps qu’on contemple enfin la grosse dégueulasserie capitaliste en face.

  • Pour sortir du #confinement, un plan d’urgence anticapitaliste

    Par bien des aspects, la #crise_sanitaire en cours est un révélateur de l’incapacité du #capitalisme européen à résoudre les grands problèmes de l’humanité. L’#Italie, la #France et l’#Espagne sont les pays où le virus frappe le plus fort car le #système_sanitaire a été ravagé par les politiques austéritaires depuis au moins une décennie. En France, ce sont 69.000 lits qui ont été supprimés à l’hôpital entre 2003 et 2017, 4.000 en 2018. Par souci d’économie, les réserves stratégiques de masques et de respirateurs ont été supprimées (près d’un milliard de masques dans les années 2000 - supprimé par Xavier Bertrand en 2011). Toujours par souci d’économie, la recherche publique sur les coronavirus n’a pas été soutenue et un temps précieux a été perdu dans la possibilité de trouver des traitements efficaces. La rigueur budgétaire et la recherche du profit sont les principaux responsables de la situation dans laquelle nous nous trouvons.

    Confinement ou immunité collective ?

    Face à la pandémie, les gouvernements hésitent entre deux solutions. La première, minoritaire, défendue par les gouvernement britanniques et néerlandais est l’acquisition d’une immunité de groupe. Cette immunité à l’avantage d’éviter les nouvelles épidémies. Selon les connaissances que nous avons du virus (R0 ~ 2.5), cela nécessite que 60% de la population entre en contact avec le virus et en soit immunisée. Ce processus est très bien décrit par le groupe de modélisation de l’équipe ETE (Laboratoire MIVEGEC, CNRS, IRD, Université de Montpellier) (http://alizon.ouvaton.org/Rapport2_Immunisation.html). Une fois ce taux atteint, la population dans son ensemble (y compris les personnes non immunisées) est protégée contre une nouvelle épidémie.

    Cependant, sans mesure de contrôle, les projections montrent qu’entre 81 et 89% de la population pourrait être infectée. Soit entre 20% et 30% de plus que le seuil pour atteindre l’immunité collective. Cela représente potentiellement 20 millions de personnes infectées en plus dans un pays comme la France.

    Nous ne connaissons pas précisément le taux de létalité du virus. Les chiffres dont nous disposons sont tous biaisés, et a priori largement surestimés, par l’absence de tests systématiques dans la population. Plus on dépiste, plus on détecte des personnes contaminées présentant peu ou pas de symptômes, plus ce taux est bas. Mais aussi bas soit ce taux, lorsqu’il est multiplié par des dizaines de millions de personnes, les morts se compteraient très probablement en centaines de milliers. Par ailleurs, l’austérité budgétaire et l’affaiblissement des systèmes de santé doivent être intégrés dans l’équation. La létalité du Covid-19 est visiblement provoquée par un choc cytokinique qui nécessite une prise en charge en soin intensifs avec respirateurs. Plus la pénurie de respirateurs est grande, plus la mortalité est haute, plus les équipes médicales doivent choisir qui maintenir en vie et qui sacrifier par manque de moyens. C’est sûrement ce qui explique les taux de mortalité très élevés par rapport à d’autres pays en Italie, en Espagne et dans une moindre mesure en France (bien que cela pourrait s’aggraver au pic de l’épidémie) qui sont mal équipés en nombre de lits en « soins aigus ».

    Dans la plupart des pays, ces chiffres ne sont pas assumables par les gouvernements en place. Et ce sont ces projections qui ont poussé partout le pouvoir à confiner les populations malgré la crise économique majeure et les conséquences sociales dramatiques que cela entraine.

    En effet, la distanciation sociale permet de ralentir la progression du virus, d’aplatir le pic, et donc de diminuer l’afflux de malades en détresse à l’hôpital. Ce processus est décrit de façon très intuitive dans le Washington Post (https://www.washingtonpost.com/graphics/2020/world/corona-simulator). La distanciation sociale peut recourir à plusieurs mécanismes, de la fermeture des écoles jusqu’au confinement total. L’étude publiée le 16 mars par l’Imperial College COVID-19 Response Team (https://www.imperial.ac.uk/media/imperial-college/medicine/sph/ide/gida-fellowships/Imperial-College-COVID19-NPI-modelling-16-03-2020.pdf) réalise des projections du nombre de lits occupés en soins intensifs en fonction de plusieurs scénarios de confinements. Si cette étude est forcément incomplète, notamment car les courbes dépendent du moment où les mesures sont mises en œuvre, cela nous montre que les mesures de confinement, dans le cas où aucun traitement ne serait trouvé, devraient s’étaler jusqu’à la fin de l’année 2021 pour que la population atteigne les 60% d’immunisés. Dans le cas contraire, tout relâchement du confinement pourrait correspondre à un nouveau développement incontrôlé de l’épidémie dans la population.

    Mais comment imaginer que la situation que nous vivons depuis une semaine en France se poursuivent pendant des mois ? Ce n’est tenable ni économiquement, ni socialement. Ce n’est pas le propos de cet article (pour cela voir le texte de Mimosa Effe : https://npa2009.org/idees/societe/le-confinement-la-destruction-du-lien-social-et-ses-consequences), mais le #confinement_de_classe que nous vivons actuellement doit s’arrêter. Toute vie sociale est stoppée alors qu’il faut continuer à travailler. Même si nous arrêtions toutes les productions non indispensables, ce serait tout de même des millions de travailleurs.euses qui devraient continuer à faire tourner l’hôpital, l’électricité, l’eau, le traitement des ordures ou l’alimentation – mais aussi tous les autres métiers qui permettent à ces secteurs de fonctionner ! Et cela dans un contexte d’atomisation total de notre camp avec tous les reculs sociaux et l’Etat policier total qui vont avec. A cela s’ajoute les dégâts psychologiques, les violences domestiques faites aux femmes ou la situation criminelle que sont en train de vivre les migrant.e.s, les prisonniers.ères et les sans-abris.

    Nous l’avons vu, le confinement est d’abord imposé par la faillite de notre système de santé et l’impréparation au risque de pandémie qui sont dues à l’austérité imposée par les gouvernements successifs en France et en Europe. Dans la forme qu’il prend, généralisé dans la vie sociale mais pas au travail, de classe, policier, il est la solution que les capitalistes pensent avoir trouvé pour limiter la casse et maintenir au maximum leur place dans la concurrence internationale. Mais la gestion capitaliste de cette épidémie est marquée par l’impossibilité de planifier une quelconque sortie de crise. Un gouvernement anticapitaliste, au service de la population, motivé par la santé plutôt que par les profits, pourrait mettre en place une toute autre politique.

    Existe-t-il une troisième voie ? De toute urgence prendre des mesures anticapitalistes pour sortir du confinement !

    Il ne s’agit pas ici de dire que le confinement pourrait être levé du jour au lendemain. Nous l’avons vu, étant donné les conditions d’impréparation des gouvernements et la dégradation des capacités de l’hôpital public à supporter une telle épidémie, le confinement était la seule solution pour éviter une mortalité élevée. En ce sens, toutes les initiatives syndicales ou de travailleurs.euses pour stopper le travail - et se protéger - dans les productions non-essentielles sont fondamentales. Le slogan « nos vies valent plus que leurs profits » prend ici tout son sens. Il est également fondamental de dénoncer le gouvernement qui nous explique qu’il faut renforcer le confinement mais continuer à travailler, bien au-delà des secteurs essentiels à la lutte contre l’épidémie. Pénicaud, Macron, Philippe sont plus préoccupé.e.s par le maintien des profits que par notre santé. Les scandaleuses mesures contre le droit du travail, les 35h, nos congés, articulées au renforcement de l’Etat policier, ont été prise au moment où la sidération était la plus haute dans la population.

    Mais il est indispensable maintenant de déterminer quelles sont les conditions qui permettraient d’envisager la levée du confinement à très court terme :

    – Il faut de tout urgence pratiquer le dépistage de masse. D’ailleurs, entre les lignes, le Ministre Olivier Veran reconnait lors de sa dernière conférence de presse (https://www.youtube.com/watch?v=wpGjmCkLDHs

    ) que le confinement ne pourra être levé que lorsqu’il sera possible d’effectuer plus de dépistages revenant sur la communication gouvernementale qui affirmait que le dépistage n’était plus un outil en phase 3. Le dépistage de masse permet de n’isoler que les malades et leur entourage. Il permet également une prise en charge précoce des patients considérés comme « à risque » et ainsi de diminuer la létalité du virus. Le problème, c’est que le fournisseur n’arrive pas à suivre la demande en kit de dépistage (https://www.thermofisher.com/order/catalog/product/11732088#/11732088). Il faut donc de toute urgence organiser la production de kits de dépistages en réquisitionnant les entreprises du secteur et en passant outre les brevets.

    – De toute urgence également, il faut injecter des moyens dans la santé et l’hôpital public pour augmenter les capacités de prise en charge des patients en détresse respiratoire. C’est l’inverse des politiques menées jusqu’alors qui font fonctionner l’hôpital comme une entreprise, en flux tendu, incapable de s’adapter à des situations d’urgence. Pour l’instant, le gouvernement a débloqué 2 milliards d’euros pour l’hôpital. Dans le même temps, il injecte 43 milliards dans l’économie et garantit 350 milliards d’euros aux entreprises privées !

    – Pour augmenter le nombre de lits en soins intensifs et protéger celles et ceux qui travaillent il faut réorganiser en profondeur l’appareil industriel pour planifier les productions utiles à résoudre la crise sanitaire : masques, respirateurs, oxygène… En ce sens, il faut soutenir l’action de la CGT qui demande la réouverture et la nationalisation de Luxfer, seule usine d’Europe à produire des bouteilles d’oxygène médical fermées. C’est un bon exemple qui pourrait se poser pour d’autres productions.

    Enfin, l’attention est captée à une échelle assez large sur la mise en place d’un traitement. Le plus prometteur, la chloroquine (ou son dérive l’hydroxy chloroquine) est testée dans plusieurs pays et de nombreux services hospitaliers, y compris en France, ont commencé à l’utiliser sur des malades. Ce médicament semble réduire la charge virale et la durée du portage du virus. Si ce traitement s’avère efficace, la question de la nationalisation de l’industrie pharmaceutique va devenir compréhensible à une échelle très large.C’est peut-être la peur de cette évidence qui motive les grands groupes du secteur à anticiper en proposant de fournir ce traitement gratuitement, que ce soit #Sanofi (https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-sanofi-pret-a-offrir-aux-autorites-francaises-des-millions-) ou #Novartis (https://www.lefigaro.fr/flash-eco/coronavirus-novartis-offre-130-millions-de-doses-de-chloroquine-20200320) !

    Ainsi, nous pouvons affirmer que le confinement aurait pu être largement réduit, voire évité, en généralisant les dépistages, en développant les capacités d’accueil de l’hôpital public et en accélérant les tests sur des traitements antiviraux.

    Ce plan d’urgence n’est possible à court terme que si l’on s’affronte au capitalisme. Il faut reprendre le contrôle, sans indemnité ni rachat, sur l’appareil productif, notamment dans le domaine de la santé, des protections pour les salariés, de l’industrie pharmaceutique et biochimique.

    Macron et son gouvernement, LR et le PS avant lui, portent une lourde responsabilité dans la situation actuelle. L’heure de solder les comptes arrivent. Les réponses anticapitalistes pourraient alors apparaître comme une solution à une échelle inédite jusqu’alors. Pour cela, sans attendre la fin du confinement, il nous faut renforcer les réseaux de solidarité, les réseaux militants pour recommencer à agir dans la situation.

    https://npa2009.org/idees/sante/pour-sortir-du-confinement-un-plan-durgence-anticapitaliste
    #anticapitalisme #anti-capitalisme #austérité #hôpitaux #lits #masques #réserves_stratégiques #stock #respirateurs #recherche #rigueur_budgétaire #immunité_collective #immunité_de_groupe #létalité #taux_de_létalité #tests #dépistage #choc_cytokinique #distanciation_sociale #flattening_the_curve #aplatir_la_courbe #vie_sociale #travail #atomisation #Etat_policier #impréparation #troisième_voie #droit_du_travail #dépistage_de_masse #soins_intensifs #industrie #nationalisation #Luxfer #chloroquine #industrie_pharmaceutique #responsabilité

    ping @simplicissimus @fil @reka

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    Citation sélectionnée pour @davduf :

    Le confinement de classe que nous vivons actuellement doit s’arrêter. Toute vie sociale est stoppée alors qu’il faut continuer à travailler. Même si nous arrêtions toutes les productions non indispensables, ce serait tout de même des millions de travailleurs.euses qui devraient continuer à faire tourner l’hôpital, l’électricité, l’eau, le traitement des ordures ou l’alimentation – mais aussi tous les autres métiers qui permettent à ces secteurs de fonctionner ! Et cela dans un contexte d’atomisation total de notre camp avec tous les reculs sociaux et l’Etat policier total qui vont avec. A cela s’ajoute les dégâts psychologiques, les violences domestiques faites aux femmes ou la situation criminelle que sont en train de vivre les migrant.e.s, les prisonniers.ères et les sans-abris.

    • Le confinement, la destruction du #lien_social et ses conséquences

      Le 19 mars l’Assemblée rejetait l’amendement visant à prolonger le délai d’#avortement pendant la crise sanitaire. Si ce n’est finalement que peu étonnant de la part des députés LREM, ce rejet est révélateur de quelque chose de plus profond. Le confinement de la population va mettre en danger massivement les #femmes et les #classes_populaires de manière générale.

      Quelle que soit la façon dont certains ont essayé de le tourner, le confinement est profondément inégalitaire. Il y a ceux et celles qui ont un logement pour se confiner et les autres qui n’en ont pas, celles et ceux qui ont un logement décent et les autres qui ont un logement insalubre, celles et ceux qui ont une maison avec un jardin et celles et ceux qui doivent se pencher à la fenêtre pour respirer de l’air frais.

      Le message du gouvernement à l’aide de mesures coercitives violentes (oui les amendes sont effectives et en Seine-Saint-Denis elles ont conduit à des arrestations et des garde-à-vue) fait croire à la portée individuelle du confinement sans prise en charge collective de ses répercussions. Face à cela, certainEs ont essayé de mettre en place des réseaux de solidarité dans les immeubles, dans les quartiers, ... Si ces réseaux sont nécessaires et même indispensables, ils ne contrebalancent pas les problèmes qui se posent avec le confinement et qui vont forcément causer là aussi des morts, et parfois ils confortent même dans l’idée qu’il faut nécessairement rester chez soi : promener son chien, faire du jogging serait dangereux. Le propos de cet article n’est pas de dire que le confinement est inutile pour contrer le Covid-19 mais que le confinement n’est pas viable à moyen terme, c’est pourquoi la sortie de crise ne peut venir que de la mise en place d’un plan d’urgence visant à dépister et à soigner ce qui veut dire concrètement donner des moyens aux personnels de santé et des moyens de protection à la population.

      Le confinement face à l’organisation sociale de la dernière phase du capitalisme

      Le confinement dans l’histoire n’a jamais été une partie de plaisir, mais elle pose question dans le capitalisme tel qu’il s’organise aujourd’hui. Depuis les trente dernières années : on peut dire que la tendance à détruire les structures familiales est plutôt lourde. Les foyers composés de personnes seules s’élèvent à 35% des foyers (20% des femmes et 15% des hommes) auxquels se rajoutent presque 9% de familles monoparentales (dont le gros du contingent est composé de femmes). La grande majorité des foyers composés d’une personne seule ont plus de 65 ans (plus de 70%)1. Le problème c’est qu’avec cette épidémie ce sont ces mêmes personnes considérées comme vulnérables qui vont donc se retrouver complètement isolées.

      De l’autre côté, l’on sait aussi qu’un ménage sur douze vit dans un logement surpeuplé, 18% des logements sont considérés comme trop bruyant (donc mal isolés), 22% n’ont pas de système de chauffage efficient et près de 13% ont des problèmes d’humidité.2

      Le confinement produit aussi des rapports au travail qui accentuent ce qui existait auparavant : d’une part il y a ceux qui télétravaillent et ceux qui continuent de travailler dans des conditions de sécurité face au virus alarmantes et avec l’idée que le travail s’accompagne de toute une série de mesures restrictives.3 Mais à cela, il faut encore ajouter que le télétravail n’est pas le même pour tout le monde (que l’on soit cadre ou que l’on fasse un travail administratif) surtout quand l’on se retrouve face à un travail qui s’accompagne de plus en plus d’une perte de sens, d’autant plus qu’il envahit la sphère privée et que les loisirs sont considérablement réduits. Quant aux précaires, aux étudiantEs, à celles et ceux qui travaillaient sans contrat de travail, c’est une situation dramatique qui s’ouvre sans qu’aucune aide ne soit prévue si ce n’est un chômage auxquels ils n’ont pas tous droit.

      De plus, le système capitaliste entraîne une détresse psychologique : la dépression, le suicide ou les tentatives de suicides vont s’accentuer avec la perte de lien social, la perte d’activités émancipatrices et une vie tournée autour du travail.

      Toute la prise en charge associative, comme du service public de ses éléments là, comme de la prise en charge de l’extrême pauvreté va être ou drastiquement réduite voire inexistante.

      Dans le confinement, les femmes trinquent (et meurent !)

      Outre la question de l’avortement dont nous avons parlé plus haut, les femmes vont subir une répercussion violente du confinement. Elles assumeront plus de tâches ménagères qu’à l’ordinaire et de tâches de soin, et on le sait ce sont elles qui dans la plupart des foyers assumeront le suivi de « l’école à la maison » et d’occuper les enfants, sans compter les familles monoparentales ou les mères se retrouveront seules face à l’éducation de leurs enfants.

      Le confinement va augmenter les violences intra-familiales et en particulier les violences conjugales, c’est déjà ce qu’a révélé l’expérience du Wuhan4. Là encore, ces violences seront encore moins prises en charge qu’avant puisque le 3919 ne fonctionne plus pendant cette crise contrairement à ce qu’avait annoncé Marlène Schiappa.5 Au sixième jour du confinement, cette tendance est d’ailleurs aussi relatée par la FCPE ce dimanche.6

      Le manque d’accès à l’avortement pourra provoquer des recherches de solutions mettant en danger les femmes subissant des grossesses non-désirées quand celles-ci ne provoqueront tout simplement pas le suicide.

      Dans le même temps, on pourra noter que les adolescents LGBT confrontés en permanence à l’homophobie pourraient là aussi augmenter les tentatives de suicides et les suicides, alors même que c’est déjà une cause importante de suicides chez les adolescentEs.

      Ajoutons à cela que des secteurs largement féminisés se trouve en première ligne de la gestion de la maladie : infirmières, caissières, ...

      L’isolement des individus entraîne une baisse de la conscience de classe

      Le confinement produit un rapport de force dégradé de manière objective. En ce moment, des lois d’exception sont en train de passer à l’Assemblée diminuant nos droits, sans possibilité de riposte et si la légitimité du gouvernement reste affaiblie, les mesures prises rencontrent au moins une part de consentement. Si c’est le cas, c’est bien parce que la crise que l’on rencontre, a de grosses difficultés à être résolue par le système sans faire des milliers de morts.

      Individuellement, les gens ne peuvent pas se protéger et pour une grande majorité restent donc chez eux de peur (et cette peur est fondée) de devenir malade ou de l’être déjà et de contaminer d’autres personnes. Le problème c’est que sans dépistage massif et traitement le confinement risque de durer longtemps.

      Or, isolément, les gens ne peuvent d’une part pas s’organiser (ce qui dégrade le rapport de force) et de l’autre entraîne une baisse de la conscience de classe dans ce qu’elle a de plus simple car c’est l’organisation du travail qui fonde objectivement cette conscience. De plus, le confinement, repose sur le consentement d’une population à être confinée : c’est d’ailleurs par les réseaux sociaux, mais aussi dans la presse ou dans son entourage une pression sociale à « Restez chez vous », mais aussi à prendre le temps de lire ou de se cultiver.

      De fait cette pression sociale, construit alors le modèle de ceux qui y arriveraient en étant forts, en ayant accès à de la culture ou à des habitudes culturelles. Les vieux qui vivent seuls, les dépressifs, les pauvres, ceux qui n’ont pas accès à la culture se retrouveraient alors mis à l’amende.

      Pour l’instant, cette idéologie ne se fait que sous forme de pression, mais elle pourrait produire autre chose, elle passerait alors du consentement à la collaboration : elle est déjà en partie à l’œuvre de manière minoritaire, elle passe par la délation de celles et ceux qui sortent et la volonté d’un durcissement des mesures coercitives.

      Le confinement ne peut qu’être une mesure à court terme, sinon les effets violents décrits auront des effets durables, surtout si, comme c’est le cas aujourd’hui le mouvement ouvrier ne riposte pas.

      https://npa2009.org/idees/societe/le-confinement-la-destruction-du-lien-social-et-ses-consequences
      #confinés #non-confinés #inégalités #logement #mesures_coercitives #amendes #Seine-Saint-Denis #arrestations #garde_à_vue #rester_chez_soi #isolement #télétravail #chômage #détresse_psychologique #santé_mentale #école_à_la_maison #soins #care #tâches_ménagères #conscience_de_classe #lois_d’exception

  • La France en pénurie de masques : aux origines des décisions d’État
    https://theconversation.com/la-france-en-penurie-de-masques-aux-origines-des-decisions-detat-13

    Nous focaliserons notre attention uniquement sur la question de l’équipement de l’État en masques, à la fois en masques chirurgicaux réputés être suffisants pour les malades qui ne postillonnent pas ainsi à la face des autres, mais aussi en masques dits FFP2, qui garantissent une véritable barrière de protection faciale pour toutes les personnes exposées aux projections de gouttelettes porteuses de virus, à commencer par l’ensemble du corps médical.

    Pour retracer cette généalogie d’une suite de décisions qui ont désarmé la France en masques face à une pandémie pourtant annoncée comme certaine dans le futur par de nombreux experts, nous suivrons un strict récit chronologique qui commence en 2005 avec un rapport parlementaire d’alerte sur les risques épidémiques présents et à venir qui oblige l’État français à s’organiser en conséquence, pour anticiper le pire, selon le célèbre adage : « gouverner c’est prévoir ».

    Le récit sera forcément un peu long, mais comprendre la généalogie de faits aussi graves exige un peu de temps, surtout si on veut ajouter des citations concrètes.

    Tous les experts prédisent que des pandémies ne manqueront pas de survenir, et ce de plus en plus souvent. Une des plus récentes mises en garde officielles provient des États-Unis. Le Directeur du National Intelligence Service, Dan Coats, avertit dans son bilan sur les menaces dans le monde, le 29 janvier 2019 :

    « Nous estimons que les États-Unis et le monde resteront vulnérables à la prochaine pandémie de grippe ou à une épidémie à grande échelle d’une maladie contagieuse qui pourrait entraîner des taux massifs de décès et d’invalidité, affecter gravement l’économie mondiale, mettre à rude épreuve les ressources internationales. »

    Il parle du

    « défi de ce que nous prévoyons être des épidémies plus fréquentes de maladies infectieuses, en raison de l’urbanisation rapide et non planifiée, des crises humanitaires prolongées, de l’incursion humaine dans des terres auparavant non encore exploitées, l’expansion des voyages et du commerce internationaux et le changement climatique régional ».

    Ce rapport parlementaire est suivi d’un autre, moins d’un an après, à propos de la grippe aviaire. Le corps de doctrine préconisé reste le même : les mesures barrières, plus les masques, dont on précise que des études conduites sur la grippe en Asie ont montré l’efficacité : « Une étude scientifique a démontré que le port de masques à Hongkong, pendant l’épidémie de SRAS en 2003, a entraîné une diminution significative du nombre d’affections respiratoires ». Et là aussi le rapporteur rappelle que « la catégorie recommandée pour se protéger contre la grippe est celle FFP2 ».

    Il y a 14 ans, deux documents parlementaires écrivaient donc noir sur blanc que les masques font partie de la panoplie indispensable contre la propagation d’un virus très contagieux de type coronavirus.

    Mais ce jugement a posteriori ignore que sous le feu de la lutte sanitaire personne ne peut prédire quand la pandémie finira. Les arguments qu’il mobilise visent l’EPRUS (établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires). Cet établissement public assure la gestion des moyens de lutte contre les menaces sanitaires graves, tant du point de vue humain (la réserve sanitaire) que du point de vue matériel (achat et stockage de produits sanitaires d’urgence). Selon le sénateur,

    « Si le rôle de l’EPRUS est réduit à celui de logisticien, il convient d’approfondir la piste d’une mutualisation des stocks gérés par l’EPRUS avec ceux du ministère de la Défense. »

    Résumons : cet organisme a contribué à gérer logistiquement une crise sanitaire potentiellement grave en faisant en sorte que personne n’ait jamais manqué de masques de protection. Mais il est appelé à se fondre dans une « mutualisation », un des mots-clés de la gestion managériale contemporaine des services publics, où tout est fait pour « rationaliser », comprendre pour faire des économies.

    Le masque FFP2 ne serait plus utile ?

    Le 16 mai 2013, le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale édite sa « Doctrine de protection des travailleurs face aux maladies hautement pathogènes à transmission respiratoire ».

    Dès l’introduction, il explicite que l’aspect gestionnaire est un fil conducteur de ses choix : « La présente doctrine est le fruit d’un travail interministériel mené dans un souci d’efficacité et d’économie globale, s’appuyant notamment sur le retour d’expérience acquis lors des pandémies de la décennie écoulée », comprendre notamment le H1N1. Il prend appui sur l’avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP) du 1er juillet 2011.

    Le SGDSN en retient que

    « Le HCSP propose, pour les salariés régulièrement exposés à des contacts étroits avec le public du fait de leur profession (comme les métiers de guichet), l’utilisation du masque chirurgical sur la base des arguments suivants : – observance potentiellement supérieure pour le port du masque anti-projection ; pas d’efficacité inférieure démontrée chez les professionnels de santé du masque anti-projection versus l’appareil de protection respiratoire (APR) dans le contexte de la circulation d’un agent pathogène “courant” ; cohérence avec les dispositifs préconisés pour le grand public. »

    Ainsi, le 1er juillet 2011, le consensus de septembre 2009 a disparu. L’INRS, l’Afssaps, la DGS, le Conseil supérieur d’hygiène publique de France et l’OMS, mobilisés pour défendre un masque FFP2 pour tous les salariés exposés, voient leurs recommandations évacuées et le port du masque chirurgical doit suffire désormais.

    La campagne victorieuse contre le H1N1 a été (trop) massive et aurait généré du « gâchis » à concurrence de plusieurs dizaines de millions d’euros. Par souci de se montrer plus respectueux de l’argent public, les gouvernements suivants et les parlementaires ont justifié de limiter les dépenses à l’avenir, y compris pour les structures de prévention des épidémies, le tout dans un contexte de dénonciation permanente de la supposée gabegie au sein des hôpitaux et donc de forte restriction de leurs capacités budgétaires.

    Les trois opérateurs de la prévention (l’EPRUS, l’Institut de veille sanitaire, et L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé) ont tous vu baisser leurs recettes entre 2010 et 2014, la restriction totale avoisinant les 54 millions d’euros, soit une baisse de 24 %.

    On a commencé alors à poser la question des stocks de masques (entre autres) pour finalement se convaincre que les masques FFP2 n’étaient pas si indispensables que cela pour le public. Donc on en vient à considérer que la mission de protection régalienne à l’égard des populations repose prioritairement sur le stockage de masques chirurgicaux.

    Et puisque les masques FFP2 sont à destination des personnels de santé, alors pourquoi ne pas transférer la responsabilité de leur acquisition à chaque pôle de santé ?

    Certains produits ne seront plus stockés « en raison de la plus grande disponibilité de certains produits et de leur commercialisation en officine de ville » ou en raison « du transfert de la responsabilité de constituer certains stocks vers d’autres acteurs (par exemple, les établissements de santé et les établissements médico-sociaux pour les masques de protection FFP2 de leurs personnels) », précise encore le rapport du sénateur.

    Les choses sont dites : si d’autres acteurs peuvent les vendre ou peuvent les acheter, à quoi bon obliger l’État à faire des stocks préventifs ? ! La chaîne de déresponsabilisation s’achève alors.

    Au principe de précaution : stocker pour être sûr d’avoir en cas de crise, car c’est vital, se substitue la logique : être sûr de ne pas trop stocker car c’est essentiel de ne pas dépenser plus qu’il ne faut.

    Raisonnement critiqué aujourd’hui par nombre d’experts, quand par une approche bureaucratico-comptable, s’éloignant de toute vision politique anticipatrice, on a oublié, étape par étape, les alertes sanitaires majeures qui prévalaient à ces choix de stocks préventifs de masse.

    L’État s’est donc désarmé peu à peu, au risque de mettre en danger les citoyens, à commencer par les professionnels de santé non hospitaliers, tout aussi directement en contact avec les malades que leurs collègues des hôpitaux.

    Tout ceci s’est fait avec la parfaite bonne conscience de hauts fonctionnaires et d’un personnel politique de droite et de gauche qui avaient à cœur de participer à un « bonne gestion des deniers publics », oubliant peu à peu les finalités premières, engagés qu’ils étaient sur un chemin (les politistes parlent de « path dependancy ») qui les font aller toujours plus loin vers un nouvel objectif dans lequel ils sont entrés, en perdant de vue le point de départ.

    #Santé_publique #Masques #Principe_de_précaution

  • Les migrants de #Calais abandonnés face au #coronavirus

    Une semaine après l’entrée en vigueur des mesures de #confinement, aucune mise à l’abri n’a été décidée pour protéger les deux mille réfugiés qui vivent dans les #campements du littoral nord de la France. Sur le terrain, les associations sont très inquiètes du fait des #conditions_sanitaires désastreuses.

    « Comment #rester_chez_soi quand on n’a pas de maison », s’interroge Samuel, un jeune Éthiopien, devant la tente qu’il partage avec trois autres personnes en périphérie de Calais. Autour de lui, des centaines de #tentes identiques sont plantées les unes à côté des autres dans des sous-bois jonchés de détritus. Certaines sont couvertes de bâches. Des petits groupes se réchauffent autour de feux de camp, d’autres le font à la bougie, sous les toiles de tente. Les gens se plaignent du froid, mais aussi des rats, nombreux et peu farouches.

    Samuel a effectivement entendu parler du coronavirus et des #gestes_barrière, mais il reste dubitatif : « Les #consignes qu’on nous a données ne sont pas applicables, dit-il en désignant les environs. Nous partageons tout : les tentes, les cigarettes, tout. » Quant au savon qui a été distribué, il le trouve de bien peu d’aide devant l’absence de points d’#eau en nombre suffisant : un robinet est disponible pour plusieurs centaines de personnes, il n’y a pas de douche. « Pourtant, pour le bien de tous, il est important que tout le monde soit protégé », souligne-t-il.

    « Je voudrais partir d’ici mais il n’y a pas d’alternative »

    Dans ce camp d’exilés, mardi 17 mars, le sentiment d’#abandon prévalait. Abi, originaire d’Éthiopie, expliquait avoir obtenu des informations sur l’#épidémie sur internet : « Mais je n’ai reçu aucune information de la part du gouvernement, dit-il. Ce que je vois aujourd’hui, c’est qu’on est entourés de #CRS, qui portent tous des #masques. Donc, je comprends que le coronavirus est un danger. S’il y a un danger, il est réciproque. Pourquoi ne portons-nous pas de masque ? Parce qu’on est perçus comme les personnes porteuses de maladies. Je me sens discriminé. »

    Aucun cas de coronavirus n’a été dépisté, mais au milieu de cette situation anxiogène, Ali, un jeune Iranien, n’était cependant pas tranquille : « Je voudrais partir d’ici mais il n’y a pas d’alternative. J’ai 17 ans, j’ai appelé le 115 [l’aide sociale d’urgence] mais j’attends encore. Je voudrais aller dans un centre d’hébergement, parce que vivre ici, c’est vraiment dur. »

    Des mesures de « #distanciation » ont bien été mises en place lors de la distribution des repas. Les réfugiés pénètrent maintenant au compte-goutte sur l’esplanade grillagée où se tient la distribution, assurée par l’association La Vie active, mandatée par l’État. Ils doivent y respecter une distance de sécurité. Mais, devant le portail, ils sont des centaines à attendre leur tour, les uns sur les autres, sans mesure de sécurité.

    Pourtant, les associations alertent depuis le 5 mars sur le sort de ces personnes fragiles et particulièrement exposées aux maladies. Antoine Nehr, coordinateur au sein de l’Utopia 56, est très inquiet :

    La situation est dramatique depuis longtemps, depuis le démantèlement de la grande jungle en 2016 : les politiques migratoires ont été durcies, avec pour objectif d’empêcher les exilés de s’installer et de rester à Calais. Les gens sont maintenus dans une grande #précarité. Ils sont épuisés, stressés, fatigués, ils vivent à plusieurs dans des tentes, dans des conditions sanitaires déplorables. On estime à plus d’un millier, peut-être 1.400 personnes le nombre de gens dehors ici, à Calais. Il y a aussi beaucoup de monde à Grande-Synthe (Nord). Cette crise est révélatrice d’un manque de prise en charge générale, et dans un contexte comme celui-ci, si aucune mesure n’est prise rapidement, si le virus vient à se développer dans les campements, cela va être grave. »

    « Lors de cette réunion, nous avions avancé plusieurs propositions : une #mise_à_l’abri dans des hébergements à taille humaine, une #clinique_mobile qui interviendrait sur les différents campements. Comment diagnostique-t-on un virus, nous, en tant que bénévoles ? On n’est pas formés à ça. Nous avons vraiment besoin que l’État prenne ses responsabilités. S’il n’y a pas de prise en charge, je pense qu’il aura du sang sur les mains. »

    « Même dans un contexte de crise, les autorités continuent d’appliquer cette politique extrêmement hostile »

    Mercredi dernier, la préfecture des Hauts-de-France a annoncé la mise en place « dans les prochains jours » d’une procédure de détection et d’orientation des cas suspects vers des centres de « desserrement », mais uniquement chez les personnes présentant déjà des symptômes. Lors d’une réunion à distance, jeudi 19 mars, la sous-préfecture a confirmé ce choix. Une mise à l’abri préventive pour les personnes vivant dans ces camps insalubres n’est donc pas envisagée.

    Alors que le confinement contraint les exilés à ne pas s’éloigner du campement, Antoine Nehr dénonce la poursuite de la politique répressive du gouvernement. « Les #évictions du terrain continuent. Depuis plusieurs jours, les gens n’ont plus accès à l’électricité, car elle a été coupée. Le seul accès actuellement reste les générateurs apportés par les associations. C’est d’autant plus inquiétant que les téléphones portables sont plus nécessaires que jamais : pour obtenir des informations, appeler le Samu et rester en contact avec ses proches. »

    « Même dans un contexte de crise, les autorités continuent d’appliquer cette politique extrêmement hostile qui met en danger la vie de plusieurs centaines de personnes. La situation empire au moment où il est urgent de demander un hébergement digne pour ces personnes, déplore Antoine Nehr. C’est incompréhensible. »

    https://reporterre.net/Les-migrants-de-Calais-abandonnes-face-au-coronavirus
    #migrations #asile #réfugiés #campement #répression

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