• « L’#hypocrisie des #puces_électroniques#made_in_France” »

    Relocaliser l’industrie numérique, telle que la production de puces électroniques, est un #leurre. #Quartz, #silicium, #cobalt... viennent du Sud global. « Le #numérique est une #technologie_impériale », résume notre chroniqueuse.

    C’était un mot qui faisait souffler un vent d’idéalisme, un mot de contre-sommet plus que de journal télévisé : « relocaliser ». Dans les années 2000, les altermondialistes voulaient « relocaliser l’économie ». Défendre la menuiserie de bois local contre la production mondialisée d’Ikea, soutenir l’agriculture paysanne contre la monoculture d’exportation. Le monde entier était devenu la base logistique des multinationales. Relocalisation et coopération s’opposaient à ce libre-échange impérial qui permet d’obtenir de l’huile de palme d’Indonésie ou du soja d’Amazonie cultivé sur les terres ancestrales des peuples autochtones.

    Mais en vingt ans, et plus encore depuis le Covid, « relocaliser » est devenu un mantra du patronat. Ce sont désormais les #multinationales qui demandent à l’État de les aider à rapatrier certaines activités « stratégiques ». Entre-temps, le sens du mot a complètement changé. Le but est aujourd’hui de « sécuriser les #chaînes_d’approvisionnement » : aider l’industrie à avoir sous le coude #matières_premières et #composants.

    Imaginez qu’un missile tombe sur Taïwan où se trouvent les principales fonderies de semiconducteurs, ces puces électroniques présentes dans le moindre objet du quotidien (Il y en a 160 dans un téléphone, plus de 3 500 dans une voiture hybride [1]). Voilà qui mettrait à l’arrêt la production de voitures, de drones, de satellites, d’objets connectés et d’armement (la France étant le deuxième exportateur d’armes du globe).

    Les multinationales n’ont pas subitement décidé qu’un autre monde était possible et qu’elles devaient exploser en millions de coopératives locales. C’est plutôt que, pour elles, la planète n’est plus cette base logistique commodément aménagée par les politiques de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. L’hégémonie occidentale est terminée. Il y a plusieurs empires en concurrence pour les ressources et les marchés. Tous veulent des #métaux, des #semiconducteurs, etc. pour produire peu ou prou les mêmes objets.

    #Dépendance à un vaste tissu économique mondialisé

    C’est dans ce contexte que les députés européens ont voté en juillet 2023 le #Chips_Act. Objectif : produire sur le continent 20 % de la demande européenne de semiconducteurs. À #Crolles, près de #Grenoble, l’État va consacrer 2,9 milliards du #Plan_France_Relance pour augmenter les capacités de l’usine #STMicroelectronics, un groupe franco-italien dont le siège est en Suisse.

    Une usine de semiconducteurs est-elle relocalisable comme la production de chaussettes, qu’on peut approvisionner en laine de brebis du causse d’à côté ? En quoi consiste la production de puces électroniques ? À cette question, le #collectif_Stop_Micro a consacré toute une enquête (https://stopmicro38.noblogs.org/post/2024/11/01/ce-que-signifie-relocaliser), publiée en amont des rencontres organisées à Grenoble du 28 au 30 mars avec Les Soulèvements de la Terre.

    Décrivant les étapes de la production d’une puce électronique, ce document d’une quarantaine de pages illustre « le degré de dépendance de l’industrie de la #microélectronique à un vaste tissu économique mondialisé ». « Les produits made in France de ST sont en réalité de purs produits de la #mondialisation capitaliste, et ne pourraient exister sans elle », conclut-il.

    Fondé en 2022, #Stop_Micro s’oppose à l’agrandissement des usines de puces électroniques, deux sites industriels situés en Isère qui consommeront bientôt plus d’#eau et d’#électricité qu’une ville de 200 000 habitants. Ces besoins colossaux s’expliquent par le degré de #miniaturisation des composants. Sur la moindre puce de quelques millimètres sont gravés des dizaines de milliards de #transistors dont chacun est « 10 000 fois plus fin qu’un cheveu humain », précise l’Esia, l’association européenne des semiconducteurs, dans une brochure. De l’#eau_potable ultrapure est nécessaire pour laver les plaquettes de silicium et les débarrasser de contaminants présents à l’échelle nanométrique.

    Milliards de #subventions_publiques

    Pourtant, malgré leur consommation de ressources, les usines de STMicroelectronics à Crolles et de #Soitec à #Bernin « ne produisent formellement même pas “des puces” », selon le collectif. En résumant beaucoup, disons qu’une puce électronique commence avec l’extraction de quartz dans une carrière puis sa transformation en silicium métal dans de hauts fourneaux. Pour atteindre le niveau de pureté de 99,9999999 % requis pour les semiconducteurs, il faut y ajouter de nombreuses étapes impliquant produits chimiques et hautes températures pour obtenir des lingots de silicium monocristallin ultrapur qui sont ensuite découpés en galettes très fines (#wafers).

    Ce n’est qu’à ce stade qu’interviennent les usines grenobloises. Elles reçoivent ces galettes pour y graver « par photolithographie (dans l’esprit d’une photo argentique mais en autrement plus complexe), des milliards de transistors et circuits miniatures ». À la sortie de ces usines, la puce n’existe pas encore comme objet séparé, précise Stop Micro. C’est dans d’autres sites en Asie qu’elles sont découpées, testées et préparées individuellement de façon à pouvoir être intégrées à des circuits électroniques. Ces usines « relocalisées » en Isère au moyen de milliards de subventions publiques ne sont donc qu’une étape parmi des dizaines d’autres, réparties sur toute la planète.

    Autre exemple : une minuscule puce peut contenir des dizaines de métaux différents : arsenic, tantale, titane, antimoine, gallium…. #Intel, le plus grand vendeur de semiconducteurs au monde, a travaillé pendant six ans pour retracer la provenance du #cobalt qu’il utilise afin de comprendre s’il est extrait dans des zones de guerre en République démocratique du Congo. L’entreprise n’y est parvenue qu’en partie, alors que le cobalt n’est qu’un seul de tous les métaux utilisés.

    Le fait que STMicro, à Crolles, ait plus de 6 600 fournisseurs directs donne une idée de la complexité des process mis en œuvre sur ce gigantesque site. « La fabrication de semiconducteurs est l’activité de fabrication la plus complexe que l’on connaisse actuellement », résume l’Esia. « Avant d’atteindre le stade du produit final, une puce peut faire 2,5 fois le tour du monde et traverser 80 frontières ».

    Des chaînes d’approvisionnement d’une complexité inouïe

    Il y a des technologies emblématiques de certaines formes politiques. Le métier à tisser mécanique, par exemple, cristallise le capitalisme industriel anglais du XIXe : le coton produit en Inde, les usines textiles de Manchester alimentées au charbon, les cotonnades vendues aux marchands d’esclaves africains. La puce de silicium, elle, est emblématique de l’hégémonie néolibérale des puissances occidentales des années 2000.

    Elle nécessite de maîtriser des chaînes d’approvisionnement d’une complexité inouïe, réparties sur des dizaines de pays. C’est la pax americana qui a rendu possible la Silicon Valley. Si cette domination mondiale n’avait pas existé, naturelle au point de passer pour « la fin de l’Histoire », si le monde n’avait pas été cet espace de libre-échange commodément organisé pour achalander les multinationales, il ne serait venu à l’idée de personne de numériser toutes les activités humaines.

    Car au fond, est-il bien raisonnable de rendre une société entière dépendante, pour sa survie, d’un objet qui repose sur l’activité de centaines de mines aux quatre coins du monde, qui franchit en moyenne 80 frontières avant d’atteindre le stade du produit final ? Le numérique est une #technologie impériale. Que devient-il quand l’empire vole en éclats ?

    Pour promouvoir l’activité de ses entreprises, l’Esia souligne que les semiconducteurs sont indispensables « aux soins médicaux critiques », « aux infrastructures d’eau », « à l’agriculture durable qui nourrit le monde ». Faut-il en conclure que tout doit être mis en œuvre pour trouver des terres rares, des galettes de silicium ou du cobalt ? Ou, au contraire, que l’hôpital, la distribution d’eau et l’agriculture devraient absolument pouvoir fonctionner sans informatique ? Qu’il est follement inconséquent de laisser les services essentiels à la merci de la moindre cyberattaque ou rupture d’approvisionnement.

    C’est tout ce qui sépare la quête d’#autonomie et de #sobriété, dont nous avons besoin pour nous protéger autant que pour rendre le monde plus juste, des politiques actuelles de « #souveraineté_industrielle » qui, en augmentant notre dépendance à des technologies impériales, nous condamnent à la guerre des ressources.

    https://reporterre.net/L-hypocrisie-des-puces-electroniques-made-in-France
    #puces #relocalisation #industrie

  • Paradoxe des flux de capitaux: et si les pays riches étaient financés par les pays émergents [2021]
    https://www.swissinfo.ch/fre/politique/paradoxe-des-flux-de-capitaux-et-si-les-pays-riches-%c3%a9taient-financ%c3%a9s-par-les-pays-%c3%a9mergents/46991792

    La publication [de la CNUCED] montre que le montant total des #flux_financiers qui sortent des #pays_en_développement excède largement ceux qui y entrent depuis les pays riches (l’#aide_au_développement, mais aussi les #investissements_directs_étrangers ou encore les flux commerciaux).

    Ce phénomène « contredit les théories économiques néoclassiques, selon lesquelles les capitaux devraient naturellement circuler des pays riches vers les pays déficitaires en capital », explique Rachid Bouhia. « Il montre aussi que certains modèles de développement mis en avant ces dernières décennies, non seulement n’ont pas marché, mais ont créé beaucoup de vulnérabilité. »

    Les fuites de capitaux résultent de plusieurs facteurs, mais sont particulièrement liées à « la fragilité financière inhérente à l’#endettement extérieur des pays en développement », relève la publication.

    Incités à s’endetter envers l’étranger pour se développer, certains pays ont atteint des niveaux de dettes très élevés, qui les entraînent dans une spirale : les paiements d’intérêts et de transferts de bénéfices l’emportent sur les revenus.

    Les statistiques de l’ONG britannique Jubilee Debt Campaign, qui milite pour une annulation de la #dette des pays du Sud, montrent que la part de leur revenu consacrée au paiement de la dette extérieure est en hausse. Elle avoisine par exemple les 60% au Gabon et 46% en Angola, contre 3 à 4% dans la plupart des pays d’Europe occidentale et 0,4% en Suisse.

    Rachid Bouhia évoque aussi le déficit de la #balance_commerciale dans beaucoup de pays émergents – qui importent davantage qu’ils n’exportent, ou exportent des #matières_premières dont les cours fluctuent fortement.

    « De nombreux pays n’ont pas réussi à développer une industrie suffisante pour pouvoir exporter vers les pays développés et sont restés coincés dans des ‘trappes à pauvreté’ », explique l’économiste.

    Autre élément encore : « pour se prémunir des risques, les pays en développement se sont lancés dans une course à accumuler des monnaies étrangères, en particulier du dollar », ce qui correspond à une sortie de capitaux pour le pays qui achète, et à une entrée pour le pays qui fabrique la devise.

    Le déficit cumulé pour les pays en développement entre 2000 et 2017 serait ainsi proche des 11’000 milliards de dollars, 500 milliards de dollars pour la seule année 2017 (plus du triple de l’APD totale cette année-là).

    Et il ne s’agit que des chiffres officiels, qui ne prennent pas en compte les flux financiers illicites (#FFI, ajoutés à titre indicatif sur le graphique de la CNUCED). Ces derniers recouvrent en partie les transactions criminelles, le blanchiment d’argent, l’évasion fiscale, etc. mais, surtout, du commerce licite « qui n’est pas facturé correctement (…) dans une optique d’optimisation fiscale », explique le professeur à l’IHEID Gilles Carbonnier.

    #impérialisme

  • Le tour du monde de visionscarto.net (01)

    Cette année, pour passer de 2024 à 2025, nous vous proposons un voyage virtuel autour du monde en puisant dans nos archives, un jour un lieu, un jour une histoire.

    Jour 1 : Colombie

    « Un 6 décembre à Ciénaga » - Février 2022

    https://www.visionscarto.net/colombie-un-6-decembre-a-cienaga par Benjamin Levy avec des photos de Luis Enrique Montenegro

    « Chaque 6 décembre, à Ciénaga, une petite ville de la côte atlantique colombienne, des habitants, syndicalistes, et travailleurs agricoles se retrouvent pour commémorer une grève qui bouleversa la vie politique du pays en 1928. Au pied d’une statue de bronze et d’acier noir érigée sur la place des martyrs, est remémoré le soulèvement des travailleurs contre les conditions de vie et de travail dans l’enclave agricole dominée alors par la United Fruit Company (UFC) et sa violente répression par l’armée nationale. »

    #Colombie #accaparement_de_terres #plantation #révolte #résistance #matières_premières #terres #mémoire #Amérique_du_Sud

  • L’#extractivisme, des marges amazoniennes au militantisme anticapitaliste

    Créée pour décrire l’économie de #cueillette constitutive des marges amazoniennes, la notion d’extractivisme a beaucoup évolué en un siècle : elle est devenue un mot-clef du militantisme, un condensé de critiques et d’impensés. Synonyme d’appropriation, d’exploitation… elle finit par ne plus dire ce qu’elle dénonce exactement et n’est plus appréciée que pour sa charge critique. Il est temps d’interroger les limites d’un concept à la dérive.

    Le suffixe -isme, en français, revêt diverses significations. Il peut désigner un système de pensée, que ce soit le communisme ou le libéralisme, une religion, le christianisme comme le bouddhisme, une activité, comme le journalisme et l’alpinisme, un comportement, que ce soit l’égoïsme ou l’autisme, une situation, comme l’analphabétisme ou l’anachronisme… Cette présentation n’est pas exhaustive ; l’-isme est particulièrement labile.

    Néanmoins, d’un mot à l’autre, d’un contexte à l’autre, l’ambiguïté n’est pas de mise. À chaque fois, on en comprend le sens. Pourtant, lorsqu’on interroge la notion d’extractivisme, dont l’usage actuel va croissant, on peine un peu à en saisir la connotation. Faut-il y voir simplement une pratique, une économie qui serait fondée sur l’extraction ? Ou bien une pensée, une doctrine qui légitimerait l’industrie extractive, voire l’encouragerait ?

    Le mot, rappelons-le, est originaire du Brésil : extrativismo en portugais. Son usage semble remonter à la fin des années 1930 – peut-être est-il antérieur. Il s’appliquait alors aux marges amazoniennes, là où on récoltait le #caoutchouc (#borracha), la #gomme_de_Balata (#balata), le #baume_d’Amazonie (#copaíba), la #noix_du_Brésil (#castenha), la #fève_tonka (#cumaru), diverses espèces de #bois… C’était avant tout une #économie_de_cueillette.

    Le mot portugais dérive lui-même d’une #catégorisation économique qui remonte au XIXe siècle, et plus précisément d’une proposition avancée en 1842 par #Charles_Dunoyer dans le Journal des économistes : « On a voulu aussi les assimiler à l’#industrie_agricole ; mais encore le moyen de confondre avec l’art de la culture celui de la pêche, de la chasse ou de l’exploitation des mines ? Toutes les industries de la classe dont il s’agit ici remplissent une fonction qui leur est propre, et qui se distingue nettement de celles accomplies par les trois autres grandes classes : elles extraient mécaniquement du sein des eaux, des bois, de l’air, de la terre, sans leur faire subir d’ailleurs aucune façon déterminée, des matériaux innombrables, qui servent ensuite à l’exercice d’une multitude d’arts. Je demande la permission de les désigner par un nom pris de la fonction même qu’elles remplissent, et d’en former, sous le nom d’industries extractives, une classe tout à fait séparée »[1] – industrie étant ici à entendre au sens ancien et général d’activité économique. C’est ainsi que, dans les années 1930, le ministère de l’Agriculture brésilien comportait un département consacré spécialement aux « plantes extractives et industrielles » (Secção de Plantas Extrativas e Industriais).

    La question est donc légitime de savoir ce qui distinguerait l’extractivisme de l’#économie_extractive en général, ou de comprendre la connotation apportée par le mot extrativismo.

    Or peu d’auteurs, pour ne pas dire aucun, ont pris le temps, au milieu du XXe siècle, de définir ce qu’était l’extractivisme. Son usage s’est imposé comme une évidence lorsqu’il s’est agi de parler de l’activité de cueillette dans les provinces amazoniennes du #Brésil. De fait, on peut penser que le sens du mot était précisément là pour désigner une économie primaire, exclusivement extractive et non productive.

    En cela, le terme n’était peut-être pas dénué de connotation péjorative, soulignée parfois par l’ajout de l’adjectif « pur » : #puro_extrativismo, comme dans ce discours du président brésilien #Gaspar_Dutra en mars 1947 : « La nécessité d’une solution adéquate aux immenses problèmes de l’Amazonie me semble d’autant plus urgente qu’il est certain que ses conditions de vie difficiles s’aggravent de jour en jour. Les habitants travailleurs de cette région lointaine sont confrontés à des difficultés sans précédent, qui découlent d’une multitude de facteurs négatifs, tels que, entre autres, la pénurie démographique, l’immensité du territoire, l’éloignement des principaux centres de production et de consommation du pays, une économie primaire de pur extractivisme forestier [puro extrativismo florestal], une structure économique et sociale à la merci des fluctuations des prix de ses matières premières essentielles[2]. »

    L’extractivisme est, fondamentalement, une activité économique des #marges_forestières du Brésil. Il n’y a nulle idéologie dans le mot, mais un simple constat, une manière de désigner une forme de sous-développement économique, précaire et nomade, qu’on oppose à l’#agriculture, « seule manière de fixer l’homme à la terre », ou à la #sylviculture, qui permettrait une exploitation moins destructrice.

    En 1982, #Alfredo_Homma avait introduit une distinction entre « #extractivisme_de_collecte » (#extrativismo_de_coleta), qui préserve – plus ou moins – les ressources, et « extractivisme par #annihilation ou #déprédation » (extrativismo por aniquilamento ou depreção), qui les détruit, immédiatement ou à court terme[3]. L’extractivisme pouvait-il être une économie durable ? En un sens, cela a été le combat des #seringueiros durant les années 1980. Ils cherchaient à maintenir leur activité face à une #déforestation croissante. La figure la plus connue de cette résistance est #Chico_Mendes, qui a été assassiné en 1988. Il avait créé le #Conselho_Nacional_dos_Seringueiros dont la revendication principale était la création de zones forestières, pour des motifs à la fois environnementaux, économiques, sociaux et culturels. Ces #réserves_extractivistes (reservas extractivistas) devaient permettre de préserver un espace naturel et un mode d’exploitation considéré comme non prédateur.

    Quatre grandes réserves extractivistes furent créées en 1990 dans le cadre du programme national pour l’environnement, puis d’autres, de moindre importance, dans les années qui ont suivi. Cela correspondait parfaitement à la logique de développement durable qui venait d’être formulée dans le #rapport_Brundtland de 1987 et qui fut reprise par la #déclaration_de_Rio sur le développement et l’environnement en 1992. Ainsi, l’extractivisme amazonien était la version acceptable d’une #exploitation dont on commençait à dénoncer les excès, voire la solution à la déforestation. Pour Florence Pinton et Catherine Aubertin, « la réputation écologique de l’extractivisme s’est construite à partir du repoussoir que représentent les désastres enregistrés par les différents programmes d’occupation de l’Amazonie »[4].

    Mais depuis une vingtaine d’années, le terme a connu une évolution notable dans ses usages. Il s’est chargé d’une forte valeur critique, à la fois décoloniale et environnementale.

    Dès le départ, l’extractivisme implique que l’activité de transformation se fasse ailleurs. Il y a une logique spatiale, et coloniale. Les ressources sont collectées afin d’être acheminées vers des centres de production, au Brésil, en Amérique du Sud, voire dans les centres industriels d’Amérique du Nord ou d’Europe. C’est vrai pour le latex, mais aussi pour l’or ou d’autres ressources car l’extractivisme peut être végétal, animal ou bien minier. L’Amazonie est ainsi devenue un territoire menacé par l’#exploitation_pétrolière[5]. Mais les exemples sont multiples, au Niger, au Cameroun, au Groenland…

    Le dernier livre de Justine Augier, Personne morale, dans lequel elle fait le récit des errances de l’entreprise Lafarge, prête aux pires compromissions pour garantir l’extraction de pétrole en Syrie au moment de la montée en puissance de Daech, ne serait qu’un exemple parmi tant d’autres des errances d’un système où le profit semble pouvoir tout justifier, au détriment des populations locales. Les exactions commises par les soldats chargés de protéger le site gazier de Total au Mozambique montrent bien la violence d’un capitalisme dont les activités extractives constituent la base.

    L’extractivisme, en ce sens, est devenu synonyme d’#appropriation et a été employé dans des domaines pour le moins éloignés du contexte initial. Pascal Marichalar considère, par exemple, que l’installation de télescopes sur des montagnes du Chili ou de Hawaï, sur des terres prises aux populations locales dans des contextes coloniaux, justifie l’expression d’« #extractivisme_scientifique ». Stricto sensu, il n’y a évidemment aucune extraction, mais une #dépossession de #montagnes qui avaient souvent une valeur – non marchande – pour les populations autochtones. Autre exemple : sur la base du rapport rédigé par Felwine Sarr et Bénédicte Savoy, en 2018, sur la restitution du patrimoine culturel africain, Aksel Kozan n’hésite pas à parler d’« #extractivisme_patrimonial »[6].

    Que les #conquêtes_coloniales aient été l’occasion de multiples #spoliations patrimoniales ne fait pas question, qu’on parle d’extractivisme, en revanche, interroge car cela réduirait les objets pillés à de simples ressources, à des #matières_premières, alors que leur intérêt tient précisément à leur valeur culturelle.

    Parallèlement à cette évolution, le terme d’extractivisme a été pensé comme une forme d’extraction à outrance, une #exploitation_intensive. On pourrait presque se demander si certains auteurs, par extractivisme, n’entendent pas quelque chose comme #extractivissime, autrement dit, s’ils ne font pas du suffixe -isme une sorte de superlatif. Mais peut-être est-ce surinterpréter.

    En tout cas, la notion semble comprise comme désignant une #idéologie qui justifierait l’extraction, « quelque chose comme un “goût pour l’extraction” », écrit Anna Bednik[7]. En ce sens, l’extractivisme serait l’envers du #productivisme. Sauf que les deux mots n’ont pas la même histoire ni la même connotation. Productivisme a été forgé en France par Ernest Solvay à la toute fin du XIXe siècle. Produire plus était un objectif souhaitable afin d’apporter la prospérité au plus grand nombre. Or, on l’a vu, ce n’est pas le cas de l’extractivisme, dont l’extraction n’est pas un but en soi. C’est même plutôt un contresens. Les activités extractives ne font qu’alimenter le système productif, elles en sont la conséquence, non la cause. Attaquer l’extractivisme ne détournerait-il pas la critique de sa cible principale : le productivisme, voire le capitalisme lui-même, si tant est que le productivisme serait le propre du capitalisme, ce qu’on pourrait discuter.

    Le mot est mobilisé pour désigner des situations extractives qui ne situent plus uniquement dans des territoires autrefois colonisés, mais qui seraient aussi dans des pays du Nord. Les récents projets miniers en France peuvent-ils être considérés comme de l’extractivisme ? Qu’en est-il des activités extractives menées par la Chine sur son propre territoire ? Il ne s’agit absolument pas de justifier les dégradations environnementales provoquées par nombre de ces exploitations, mais d’interroger les limites d’un concept qui semble parfois à la dérive. Quand passerait-on de l’extraction à l’extractivisme ? Existe-t-il une forme acceptable d’activité extractive ? À se focaliser uniquement sur les lieux d’extraction, le risque est non nul de céder à des logiques de NIMBY, « not in my back yard » [pas dans mon jardin, ndlr]. Peut-il y avoir production sans extraction ? Les questions sont multiples, et la prudence peut-être pas inutile.

    Personne ne peut se prétendre berger des mots, mais on peut parfois s’interroger sur certains effets de mode. En à peine un siècle, extractivisme a beaucoup évolué : il est devenu un mot-clé, un condensé de critiques et un raccourci d’impensés. Synonyme d’appropriation, d’exploitation, de déprédation, il finit par ne plus dire ce qu’il dénonce exactement et semble surtout être apprécié pour la charge dénonciatrice qu’il porterait, un mot neuf pour une critique ancienne. Le géographe allemand Ernst Friedrich, en 1904, avait un mot pour dire tout cela : die #Raubwirtschaft, l’#économie_de_pillage[8] !

    Car le constat d’une économie déprédatrice n’est pas nouveau. Qu’on m’excuse de terminer par une très longue citation, empruntée à Franz Schrader, géographe français, cousin d’Élisée Reclus. Elle est extraite de l’introduction à l’Atlas de géographie moderne, paru en 1889 chez Hachette, un livre a priori plutôt neutre, destiné à un public assez large. En une page, toute la violence de l’exploitation du système industriel européen à l’échelle de la planète y est décrite et dénoncée, avec ses conséquences en termes d’extraction. Mais Franz Schrader ne s’y trompe pas. C’est bien la question de la production à outrance qui est soulevée, d’une production considérée comme un objectif en soi et non comme un moyen.

    « Depuis le commencement de ce siècle, une partie de l’humanité a brusquement transformé ses rapports avec la planète. L’homme blanc, devenu pour ainsi dire un être nouveau, s’est créé une organisation factice qui bouleverse les conditions de sa vie traditionnelle, révolution dont il n’a pas encore mesuré toute l’importance et dont il nous est impossible de prévoir les résultats ultimes.

    « Depuis ce jour où, par l’invention du feu et des premiers outils, l’homme s’est nettement différencié des autres êtres vivants et a cessé d’être l’esclave de la Terre pour tendre à en devenir le maître, une élite intellectuelle a parcouru des étapes successives de culture, entraînant avec elle ou laissant en arrière diverses fractions de l’espèce humaine. À l’outil, qui complétait ou corrigeait les organes humains, a succédé la machine, qui les aide et leur prête sa force. Jusqu’au dix-neuvième siècle, l’homme a surtout demandé secours aux forces naturelles en pleine activité, au vent, à l’eau courante. Il se bornait à utiliser un mouvement déjà produit par le jeu de la vie planétaire. Au dix-neuvième, une fraction de l’humanité imagine de se faire non plus aider, mais remplacer. De substances inertes, houille, métaux, acides, eau surchauffée, etc., elle apprend à dégager des forces latentes, à les discipliner, à les obliger à l’action. Dès lors, tous les organes moteurs ou mécaniques de l’homme se transforment, se décuplent ou se centuplent. Sa puissance de locomotion s’accroît jusqu’aux vapeurs transocéaniques et jusqu’aux chemins de fer transcontinentaux. La portée de sa parole n’a plus de limites, le télégraphe la transporte autour du monde ; la vapeur, les substances explosibles donnent à son bras une force incalculable. Ce n’est plus l’homme des siècles passés, c’est un nouvel être, qui n’admet plus aucune résistance. Plus de limites à l’ambition de l’homme blanc, doublé de ses organes de métal, de sa vapeur, de son électricité. Ses télégraphes enserrent le globe, ses navires à vapeur raccourcissent les océans, ses rails veulent se poser partout ; qui n’en veut pas devra se soumettre, qui résiste sera brisé. Et l’Indien, le Nègre, l’Australien, le Chinois se voient avec terreur envahis, débordés par cette humanité nouvelle, avide, violente, inexorable, toujours plus pressée, haletante comme ses machines.

    « En effet, tandis que le moteur mécanique, sans cesse perfectionné, aide, déplace ou remplace le travailleur, change incessamment les conditions du travail, un appel se produit sur tous les points du globe, et la race blanche s’y précipite, transportant avec elle les mêmes besoins, la même activité, les mêmes machines, la même surexcitation cérébrale. […]

    « Un tel état de choses ne peut pas se développer indéfiniment. D’abord, la civilisation industrielle n’est pas un but, mais un moyen. Le jour où elle aura atteint le résultat qu’en attendent les esprits élevés, et donné à tout homme sa part de secours matériel, lui permettant ainsi de vivre d’une vie plus morale et plus intellectuelle, elle devra se borner, précisément pour ne pas détruire son œuvre. En outre, on ne fabrique que pour des besoins, et la capacité de consommation de l’humanité est forcément limitée. La force mécanique à l’œuvre sur le globe est déjà égale à celle d’un milliard d’hommes (1889), et elle ne cesse de s’accroitre. Amenât-on la population entière de la sphère terrestre à l’état de tributaire ou d’acheteur momentané, il est évident que cette force n’est pas appliquée dans des conditions normales. La civilisation industrielle dont nous admirons l’épanouissement n’est donc qu’une étape et devra prochainement se transformer.

    « Une loi inexorable, du reste, ne tardera pas à l’y obliger. Elle exploite trop avidement la terre, ne songe qu’à l’avenir immédiat, et arriverait à ruiner la planète elle-même.

    « Dans cette fièvre de fabrication ou d’utilisation à outrance, en effet, on demande de toutes parts au sol des produits rapides et immédiatement vendables, et on détruit sans réflexion toute production spontanée, naturelle, surtout la végétation forestière, trop lente à se renouveler.

    « C’est ainsi que presque toute la surface de la Terre va se dénudant avec une effrayante rapidité. Comme conséquence, le sol se délite, les montagnes se désagrègent, les sources tarissent, les fleuves s’appauvrissent ou débordent, le climat lui-même, privé des influences adoucissantes des vastes régions boisées, se détériore et se déséquilibre. En outre, les pays nouvellement ouverts à la culture tirent d’abord d’un sol vierge des récoltes abondantes, ruineuses par leur bon marché pour les pays de vieille culture. Mais bientôt ce sol auquel on a trop demandé s’appauvrit, tandis que des terres nouvelles se mettent en valeur à leur tour.

    « Chaque jour l’intensité du mouvement, l’activité de l’exploitation s’accroît ; par cela même approche le moment où l’homme, voyant son avidité le mener à des désastres irrémédiables, sera obligé de se rapprocher de la nature et de demander à la science, non plus la richesse immédiate, mais le salut. […]

    « Le remède, par bonheur, est à côté du mal. Les progrès de l’industrie ne sont que le résultat premier, matériel, du progrès général de la science ; ce progrès même doit amener une équilibration. L’homme use en ce moment de ses nouvelles forces comme un enfant qui dissipe son bien, le croyant inépuisable. L’âge de raison viendra, et l’humanité pensera alors à régler le présent de façon à sauvegarder l’avenir. Dans ce travail de régularisation, l’étude de la Terre aura la plus large place, car c’est de la Terre que tout vient, c’est à elle que tout retourne. Sans l’homme scientifiquement équilibré ne pourra pas lui rendre les alluvions descendues à la mer, ni ressusciter les peuples disparus, qui vraisemblablement leur place marquée dans l’harmonie de l’humanité ; et c’est un genre humain appauvri qui sera chargé de réparer sur une Terre appauvrie les fautes de notre imprévoyante génération[9]. »

    Où en sommes-nous aujourd’hui ? Nous ne sommes pas sortis de l’ère industrielle, la population humaine depuis la fin du XIXe siècle est passée d’environ 1,5 milliards d’habitants à plus de 8 milliards et nos besoins en matières premières ne cessent de croître. Le dernier rapport publié par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) sur les ressources planétaires dresse un tableau très cru. L’extraction mondiale annuelle de matériaux est passée de 30,9 milliards de tonnes en 1970 à 95,1 milliards de tonnes en 2020 et devrait atteindre 106,6 milliards de tonnes en 2024. On l’estime à 160 milliards de tonnes au milieu du siècle. La moyenne mondiale de la demande de matériaux était de 8,4 tonnes par habitant en 1970, de 13,2 tonnes en 2024.

    Les minéraux non métalliques (dont le sable, le gravier, l’argile) sont devenus la catégorie la plus importante, avec 48 %, en 2024, contre 31 % en 1970, « signe d’une transition d’un métabolisme agraire basé sur la biomasse vers un métabolisme industriel basé sur les minéraux »[10]. Or la solution scientiste et techniciste n’est sans doute qu’une illusion. La dénoncer, inversement, ne doit pas nourrir un discours antiscientifique qui nivellerait opinions et savoirs. L’objectif défini par le PNUE est le découplage du bien-être humain de l’utilisation de ressources. Cela passe aussi par une meilleure répartition de ces ressources. La question environnementale et la question sociale sont inextricablement liées, et ce à l’intérieur d’un cadre plus général qui est celui des rapports de pouvoir et de domination.

    https://aoc.media/opinion/2024/12/11/lextractivisme-des-marges-amazoniennes-au-militantisme-anticapitaliste
    #Amazonie

  • #Macron à la conquête du #lithium en #Amérique_latine

    #Emmanuel_Macron a profité de son séjour en Amérique du Sud suite au G20 pour négocier des #accords_commerciaux avec l’#Argentine et le #Chili, sur des matériaux stratégiques comme le lithium.

    Le Cône sud du continent américain regorge de #matières_premières indispensables à la #transition_énergétique, et Emmanuel Macron le sait très bien. En Argentine dimanche, le président français a affiché ses objectifs : « La promotion des intérêts commerciaux et de la défense de l’agriculture française. » Si ce dernier point fait une claire référence à l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur qui a, de nouveau, déclenché la colère des agriculteurs en France, le premier concerne avant tout les riches sous-sols du continent... Et les entreprises françaises qui les exploitent.

    Lors de sa rencontre avec le président argentin Javier Milei, qui a sommé la délégation de son pays de quitter la COP29, Emmanuel Macron a cherché à « s’imposer comme une figure représentative sur les questions environnementales », explique Alejandro Frenkel, docteur en relations internationales à l’Universidad Nacional de San Martín. Malgré ces désaccords de façade, les deux chefs d’État ont affiché leur volonté de renforcer les investissements français dans l’industrie du lithium argentin, alors que la compagnie minière française #Eramet vient d’inaugurer une mine dans le pays.

    #Uranium, #cuivre et lithium

    Au Chili, pays dont l’économie dépend énormément du commerce international (75 % du PIB), Emmanuel Macron a trouvé un allié pour développer sa stratégie d’« #économie_bleue_et_verte ». Premier producteur mondial de cuivre et deuxième de lithium, le Chili souhaite devenir le premier fournisseur d’#hydrogène dit vert. Le président français y a annoncé des #partenariats_stratégiques pour la production d’hydrogène dit vert, le stockage d’énergie, et le développement de la filière des #batteries_électriques.

    Emmanuel Macron a aussi souhaité que la France soit « un partenaire dans l’#extraction du lithium » et dans « l’exploitation du cuivre », en ajoutant que cela permettrait, « là aussi, de faire face à nos besoins en termes d’uranium ». Le Chili possèderait, en effet, de grandes #ressources d’uranium, jamais exploitées faute d’investissements de pays étrangers.

    Au Congrès national chilien à Valparaíso, lors d’un discours de politique générale en Amérique latine, Emmanuel Macron a salué l’#accord_de_libre-échange signé en décembre 2023 entre le Chili et l’Union européenne. Un accord qui facilitera l’accès aux #matériaux_stratégiques comme le lithium ou le cuivre.

    Le président français s’est également étonné qu’au Chili comme en France, « souvent, la lutte pour la biodiversité ou contre le dérèglement climatique a été opposée à la lutte pour le développement économique ». Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité de « bâtir la #croissance #en_même_temps que de lutter contre le dérèglement climatique », alors que de nombreux scientifiques s’évertuent à expliquer que la croissance est incompatible avec la préservation d’un climat vivable sur Terre.

    300 filiales d’entreprises françaises sont déjà présentes au Chili, et Emmanuel Macron a rappelé la volonté de grands groupes de son pays de continuer à investir dans l’exploitation des métaux et les #énergies_renouvelables. Il s’est aussi opposé aux « entreprises prédatrices » qui « imposent des clauses léonines pour mieux exploiter les ressources du continent, ne laissant derrière elles qu’une population appauvrie et une nature ravagée ». Ce alors que plusieurs entreprises françaises, comme #Engie et #Suez, sont impliquées dans la destruction d’écosystèmes aux conséquences sociales majeures au Chili.

    https://reporterre.net/Macron-a-la-conquete-du-lithium-en-Amerique-latine
    #extractivisme #minéraux #terres_rares

  • « Nous assistons à une escalade de la #prédation_minière »

    Une nouvelle #ruée_minière a commencé et touche aussi la #France. Au nom de la lutte contre la crise climatique, il faudrait extraire de plus en plus de #métaux. Celia Izoard dénonce l’impasse de cette « #transition » extractiviste. Entretien.

    Basta/Observatoire des multinationales : Il est beaucoup question aujourd’hui de renouveau minier en raison notamment des besoins de la transition énergétique, avec la perspective d’ouvrir de nouvelles mines en Europe et même en France. Vous défendez dans votre #livre qu’il ne s’agit pas du tout d’un renouveau, mais d’une trajectoire de continuité. Pourquoi ?

    #Celia_Izoard : Les volumes de #métaux extraits dans le monde aujourd’hui augmentent massivement, et n’ont jamais cessé d’augmenter. Ce qui est parfaitement logique puisqu’on ne cesse de produire de nouveaux objets et de nouveaux équipements dans nos pays riches, notamment avec la #numérisation et aujourd’hui l’#intelligence_artificielle, et qu’en plus de cela le reste du monde s’industrialise.

    En conséquence, on consomme de plus en plus de métaux, et des métaux de plus en plus variés – aussi bien des métaux de base comme le #cuivre et l’#aluminium que des métaux de spécialité comme les #terres_rares. Ces derniers sont utilisés en très petite quantité mais dans des objets qui sont partout, comme les #smartphones, et de façon trop dispersive pour permettre le #recyclage.

    Et la production de tous ces métaux devrait continuer à augmenter ?

    Oui, car rien ne freine cette production, d’autant plus qu’on y ajoute aujourd’hui une nouvelle demande qui est un véritable gouffre : celle de métaux pour le projet très technocratique de la transition. « Transition », dans l’esprit de nos élites, cela signifie le remplacement des #énergies_fossiles par l’#énergie_électrique – donc avec des #énergies_renouvelables et des #batteries – avec un modèle de société inchangé. Mais, par exemple, la batterie d’une #voiture_électrique représente souvent à elle seule 500 kg de métaux (contre moins de 3 kg pour un #vélo_électrique).

    Simon Michaux, professeur à l’Institut géologique de Finlande, a essayé d’évaluer le volume total de métaux à extraire si on voulait vraiment électrifier ne serait-ce que la #mobilité. Pour le #lithium ou le #cobalt, cela représenterait plusieurs décennies de la production métallique actuelle. On est dans un scénario complètement absurde où même pour électrifier la flotte automobile d’un seul pays, par exemple l’Angleterre ou la France, il faut déjà plus que la totalité de la production mondiale. Ce projet n’a aucun sens, même pour lutter contre le #réchauffement_climatique.

    Vous soulignez dans votre livre que l’#industrie_minière devient de plus en plus extrême à la fois dans ses techniques de plus en plus destructrices, et dans les #nouvelles_frontières qu’elle cherche à ouvrir, jusqu’au fond des #océans et dans l’#espace

    Oui, c’est le grand paradoxe. Les élites politiques et industrielles répètent que la mine n’a jamais été aussi propre, qu’elle a surmonté les problèmes qu’elle créait auparavant. Mais si l’on regarde comment fonctionne réellement le #secteur_minier, c’est exactement l’inverse que l’on constate. La mine n’a jamais été aussi énergivore, aussi polluante et aussi radicale dans ses pratiques, qui peuvent consister à décapiter des #montagnes ou à faire disparaître des #vallées sous des #déchets_toxiques.

    C’est lié au fait que les teneurs auxquelles on va chercher les métaux sont de plus en plus basses. Si on doit exploiter du cuivre avec un #filon à 0,4%, cela signifie que 99,6% de la matière extraite est du #déchet. Qui plus est, ce sont des #déchets_dangereux, qui vont le rester pour des siècles : des déchets qui peuvent acidifier les eaux, charrier des contaminants un peu partout.

    Les #résidus_miniers vont s’entasser derrière des #barrages qui peuvent provoquer de très graves #accidents, qui sont sources de #pollution, et qui sont difficilement contrôlables sur le long terme. Nous assistons aujourd’hui à une véritable #escalade_technologique qui est aussi une escalade de la #prédation_minière. La mine est aujourd’hui une des pointes avancées de ce qu’on a pu appeler le #capitalisme_par_dépossession.

    Comment expliquer, au regard de cette puissance destructrice, que les populations occidentales aient presque totalement oublié ce qu’est la mine ?

    Il y a un #déni spectaculaire, qui repose sur deux facteurs. Le premier est la religion de la #technologie, l’une des #idéologies dominantes du monde capitaliste. Nos dirigeants et certains intellectuels ont entretenu l’idée qu’on avait, à partir des années 1970, dépassé le #capitalisme_industriel, qui avait été tellement contesté pendant la décennie précédente, et qu’on était entré dans une nouvelle ère grâce à la technologie. Le #capitalisme_post-industriel était désormais avant tout une affaire de brevets, d’idées, d’innovations et de services.

    Les mines, comme le reste de la production d’ailleurs, avaient disparu de ce paysage idéologique. Le #mythe de l’#économie_immatérielle a permis de réenchanter le #capitalisme après l’ébranlement des mouvements de 1968. Le second facteur est #géopolitique. Aux grandes heures du #néo-libéralisme, le déni de la mine était un pur produit de notre mode de vie impérial. Les puissances occidentales avaient la possibilité de s’approvisionner à bas coût, que ce soit par l’#ingérence_politique, en soutenant des dictatures, ou par le chantage à la dette et les politiques d’#ajustement_structurel. Ce sont ces politiques qui ont permis d’avoir par exemple du cuivre du #Chili, de #Zambie ou d’#Indonésie si bon marché.

    Les besoins en métaux pour la #transition_climatique, si souvent invoqués aujourd’hui, ne sont-ils donc qu’une excuse commode ?

    Invoquer la nécessité de créer des mines « pour la transition » est en effet hypocrite : c’est l’ensemble des industries européennes qui a besoin de sécuriser ses approvisionnements en métaux. La récente loi européenne sur les métaux critiques répond aux besoins des grosses entreprises européennes, que ce soit pour l’#automobile, l’#aéronautique, l’#aérospatiale, les #drones, des #data_centers.

    L’argument d’une ruée minière pour produire des énergies renouvelables permet de verdir instantanément toute mine de cuivre, de cobalt, de lithium, de #nickel ou de terres rares. Il permet de justifier les #coûts_politiques de la #diplomatie des #matières_premières : c’est-à-dire les #conflits liés aux rivalités entre grandes puissances pour accéder aux #gisements. Mais par ailleurs, cette transition fondée sur la technologie et le maintien de la #croissance est bel et bien un gouffre pour la #production_minière.

    Ce discours de réenchantement et de relégitimation de la mine auprès des populations européennes vous semble-t-il efficace ?

    On est en train de créer un #régime_d’exception minier, avec un abaissement des garde-fous réglementaires et des formes d’extractivisme de plus en plus désinhibées, et en parallèle on culpabilise les gens. La #culpabilisation est un ressort psychologique très puissant, on l’a vu durant le Covid. On dit aux gens : « Si vous n’acceptez pas des mines sur notre territoire, alors on va les faire ailleurs, aux dépens d’autres populations, dans des conditions bien pires. » Or c’est faux. D’abord, la #mine_propre n’existe pas.

    Ensuite, la #loi européenne sur les #métaux_critiques elle prévoit qu’au mieux 10% de la production minière soit relocalisée en Europe. Aujourd’hui, on en est à 3%. Ce n’est rien du tout. On va de toute façon continuer à ouvrir des mines ailleurs, dans les pays pauvres, pour répondre aux besoins des industriels européens. Si l’on voulait vraiment relocaliser la production minière en Europe, il faudrait réduire drastiquement nos besoins et prioriser les usages les plus importants des métaux.

    Peut-on imaginer qu’un jour il existe une mine propre ?

    Si l’on considère la réalité des mines aujourd’hui, les procédés utilisés, leur gigantisme, leur pouvoir de destruction, on voit bien qu’une mine est intrinsèquement problématique, intrinsèquement prédatrice : ce n’est pas qu’une question de décisions politiques ou d’#investissements. L’idée de « #mine_responsable » n’est autre qu’une tentative de faire accepter l’industrie minière à des populations en prétendant que « tout a changé.

    Ce qui m’a frappé dans les enquêtes que j’ai menées, c’est que les industriels et parfois les dirigeants politiques ne cessent d’invoquer certains concepts, par exemple la #mine_décarbonée ou le réemploi des #déchets_miniers pour produire du #ciment, comme de choses qui existent et qui sont déjà mises en pratique. À chaque fois que j’ai regardé de plus près, le constat était le même : cela n’existe pas encore. Ce ne sont que des #promesses.

    Sur le site de la nouvelle mine d’#Atalaya à #Rio_Tinto en #Espagne, on voir des panneaux publicitaires alignant des #panneaux_photovoltaïques avec des slogans du type « Rio Tinto, la première mine d’autoconsommation solaire ». Cela donne à penser que la mine est autonome énergétiquement, mais pas du tout. Il y a seulement une centrale photovoltaïque qui alimentera une fraction de ses besoins. Tout est comme ça.

    Le constat n’est-il pas le même en ce qui concerne le recyclage des métaux ?

    Il y a un effet purement incantatoire, qui consiste à se rassurer en se disant qu’un jour tout ira bien parce que l’on pourra simplement recycler les métaux dont on aura besoin. Déjà, il n’en est rien parce que les quantités colossales de métaux dont l’utilisation est planifiée pour les années à venir, ne serait-ce que pour produire des #batteries pour #véhicules_électriques, n’ont même pas encore été extraites.

    On ne peut donc pas les recycler. Il faut d’abord les produire, avec pour conséquence la #destruction de #nouveaux_territoires un peu partout sur la planète. Ensuite, le recyclage des métaux n’est pas une opération du saint-Esprit ; il repose sur la #métallurgie, il implique des usines, des besoins en énergie, et des pollutions assez semblables à celles des mines elles-mêmes.

    L’accent mis sur le besoin de métaux pour la transition ne reflète-t-il pas le fait que les #multinationales ont réussi à s’approprier ce terme même de « transition », pour lui faire signifier en réalité la poursuite du modèle actuel ?

    Le concept de transition n’a rien de nouveau, il était déjà employé au XIXe siècle. À cette époque, la transition sert à freiner les ardeurs révolutionnaires : on accepte qu’il faut des changements, mais on ajoute qu’il ne faut pas aller trop vite. Il y a donc une dimension un peu réactionnaire dans l’idée même de transition.

    Dans son dernier livre, l’historien des sciences #Jean-Baptiste_Fressoz [Sans transition - Une nouvelle histoire de l’énergie, Seuil, 2024] montre que la #transition_énergétique tel qu’on l’entend aujourd’hui est une invention des #pro-nucléaires des États-Unis dans les années 1950 pour justifier des #investissements publics colossaux dans l’#atome. Ils ont tracé des belles courbes qui montraient qu’après l’épuisement des énergies fossiles, il y aurait besoin d’une #solution_énergétique comme le #nucléaire, et qu’il fallait donc investir maintenant pour rendre le passage des unes à l’autre moins brutal.

    La transition aujourd’hui, c’est avant tout du temps gagné pour le capital et pour les grandes entreprises. Les rendez-vous qu’ils nous promettent pour 2050 et leurs promesses de #zéro_carbone sont évidemment intenables. Les technologies et l’#approvisionnement nécessaire en métaux n’existent pas, et s’ils existaient, cela nous maintiendrait sur la même trajectoire de réchauffement climatique.

    Ces promesses ne tiennent pas debout, mais elles permettent de repousser à 2050 l’heure de rendre des comptes. Ce sont plusieurs décennies de gagnées. Par ailleurs, le terme de transition est de plus en plus utilisé comme étendard pour justifier une #croisade, une politique de plus en plus agressive pour avoir accès aux gisements. Les pays européens et nord-américains ont signé un partenariat en ce sens en 2022, en prétendant que certes ils veulent des métaux, mais pour des raisons louables. La transition sert de figure de proue à ces politiques impériales.

    Vous avez mentionné que l’une des industries les plus intéressées par la sécurisation de l’#accès aux métaux est celle de l’#armement. Vous semblez suggérer que c’est l’une des dimensions négligées de la guerre en Ukraine…

    Peu de gens savent qu’en 2021, la Commission européenne a signé avec l’#Ukraine un accord de partenariat visant à faire de ce pays une sorte de paradis minier pour l’Europe. L’Ukraine possède de fait énormément de ressources convoitées par les industriels, qu’ils soient russes, européens et américains. Cela a joué un rôle dans le déclenchement de la #guerre. On voit bien que pour, pour accéder aux gisements, on va engendrer des conflits, militariser encore plus les #relations_internationales, ce qui va nécessiter de produire des #armes de plus en plus sophistiquées, et donc d’extraire de plus en plus de métaux, et donc sécuriser l’accès aux gisements, et ainsi de suite.

    C’est un #cercle_vicieux que l’on peut résumer ainsi : la ruée sur les métaux militarise les rapports entre les nations, alimentant la ruée sur les métaux pour produire des armes afin de disposer des moyens de s’emparer des métaux. Il y a un risque d’escalade dans les années à venir. On évoque trop peu la dimension matérialiste des conflits armés souvent dissimulés derrière des enjeux « ethniques ».

    Faut-il sortir des métaux tout comme il faut sortir des énergies fossiles ?

    On a besoin de sortir de l’extractivisme au sens large. Extraire du pétrole, du charbon, du gaz ou des métaux, c’est le même modèle. D’ailleurs, d’un point de vue administratif, tout ceci correspond strictement à de l’activité minière, encadrée par des #permis_miniers. Il faut cesser de traiter le #sous-sol comme un magasin, de faire primer l’exploitation du sous-sol sur tout le reste, et en particulier sur les territoires et le vivant.

    Concrètement, qu’est ce qu’on peut faire ? Pour commencer, les deux tiers des mines sur la planète devraient fermer – les #mines_métalliques comme les #mines_de_charbon. Ça paraît utopique de dire cela, mais cela répond à un problème urgent et vital : deux tiers des mines sont situées dans des zones menacées de #sécheresse, et on n’aura pas assez d’#eau pour les faire fonctionner à moins d’assoiffer les populations. En plus de cela, elles émettent du #CO2, elles détruisent des territoires, elles déplacent des populations, elles nuisent à la #démocratie. Il faut donc faire avec une quantité de métaux restreinte, et recycler ce que l’on peut recycler.

    Vous soulignez pourtant que nous n’avons pas cessé, ces dernières années, d’ajouter de nouvelles technologies et de nouveaux objets dans notre quotidien, notamment du fait de l’envahissement du numérique. Réduire notre consommation de métaux implique-t-il de renoncer à ces équipements ?

    Oui, mais au préalable, quand on dit que « nous n’avons pas cessé d’ajouter des nouvelles technologies polluantes », il faut analyser un peu ce « nous ». « Nous » n’avons pas choisi de déployer des #caméras_de_vidéosurveillance et des #écrans_publicitaires partout. Nous n’avons pas choisi le déploiement de la #5G, qui a été au contraire contesté à cause de sa consommation d’énergie.

    La plupart d’entre nous subit plutôt qu’elle ne choisit la #numérisation des #services_publics, instrument privilégié de leur démantèlement et de leur privatisation : l’usage de #Pronote à l’école, #Doctissimo et la télémédecine dont la popularité est due à l’absence de médecins, etc. Dans le secteur automobile, la responsabilité des industriels est écrasante. Depuis des décennies, ils ne cessent de bourrer les véhicules d’électronique pour augmenter leur valeur ajoutée.

    Ces dernières années, ils ont massivement vendu d’énormes voitures électriques parce qu’ils savaient que le premier marché de la voiture électrique, c’était d’abord la bourgeoisie, et que les bourgeois achèteraient des #SUV et des grosses berlines. Donc quand je dis que nous devons réduire notre #consommation de métaux, j’entends surtout par-là dénoncer les industries qui inondent le marché de produits insoutenables sur le plan des métaux (entre autres).

    Mais il est vrai que nous – et là c’est un vrai « nous » - devons réfléchir ensemble aux moyens de sortir de l’#emprise_numérique. Du point de vue des métaux, le #smartphone n’est pas viable : sa sophistication et son caractère ultra-mondialisé en font un concentré d’#exploitation et d’#intoxication, des mines aux usines d’assemblage chinoises ou indiennes.

    Et bien sûr il a des impacts socialement désastreux, des addictions à la #surveillance, en passant par la « #surmarchandisation » du quotidien qu’il induit, à chaque instant de la vie. Là-dessus, il faut agir rapidement, collectivement, ne serait-ce que pour se protéger.

    https://basta.media/nous-assistons-a-une-escalade-de-la-predation-miniere
    #extractivisme #minières #électrification #acidification #contamination #hypocrisie #relocalisation #prédation #guerre_en_Ukraine #militarisation #déplacement_de_populations #dématérialisation #industrie_automobile

  • Tunnel Lyon-Turin : le chantier coûtera finalement 11,1 milliards d’euros et sera livré avec un an de retard

    La société maître d’ouvrage a publié les nouveaux chiffres vendredi dernier. Les travaux coûteront 30% de plus que prévu.

    Le tunnel de base Lyon-Turin coûtera 2,5 milliards d’euros de plus que prévu, avec un #budget total de 11,1 milliards d’euros, soit une hausse de près de 30%, rapporte mardi 30 juillet France Bleu Pays de Savoie. Ces chiffres ont été annoncés vendredi dernier par la société #TELT, maître d’ouvrage, à l’issue de son dernier conseil d’administration.

    L’entreprise a publié le #coût_prévisionnel actualisé du chantier du #tunnel_de_base du Lyon-Turin en cours de construction entre Saint-Jean-de-Maurienne, en Savoie, et Suse, en Italie. Résultat : le tunnel coûtera 2,5 milliards d’euros de plus que prévu par rapport à une première expertise initiale TELT effectuée en 2015 qui estimait alors le chantier à 8,6 milliards d’euros. Avec cette hausse, les travaux du tunnel de base doivent coûter 11,1 milliards d’euros, soit une hausse de près de 30% en neuf ans.

    Hausse des coûts de certaines matières, nouvelles « contraintes »...

    Parmi les raisons avancées par TELT pour expliquer cette hausse, la pandémie de Covid-19 ou encore la guerre en Ukraine, qui a eu plusieurs conséquences comme des difficultés d’approvisionnement et la hausse des coûts de certaines #matières_premières. Autre raison avancée, la multiplication d’autres chantiers comme ceux des Jeux olympiques en France. Enfin, des « contraintes géologiques non prévisibles » ont aussi fait augmenter le coût du projet.

    Le tunnel de base, qui relie donc Saint-Jean-de-Maurienne à Suse, et qui devait être opérationnel en 2032 aura finalement un an de retard. La livraison est prévue pour fin 2033. Pour rappel, actuellement, 37,3 km ont déjà été creusés, dont 13,7 km du tunnel de base, sur les 164 km de #galeries prévues pour l’ouvrage.

    https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/tunnel-lyon-turin-le-chantier-coutera-finalement-11-1-milliards-d-euros
    #TAV #Turin-Lyon #Lyon-Turin #coût #retard #train #train_à_grande_vitesse #géologie #Val_de_Suse #Vallée_de_Suse #Maurienne #Savoie #infrastructure_ferroviaire

  • Alla ricerca di litio nei pozzi della #valle_di_Baccano

    I vecchi siti geotermici individuati da #Enel nel #Lazio potrebbero contenere importanti quantità del materiale critico fondamentale per la transizione. Due aziende australiane hanno già ottenuto i permessi di ricerca nonostante lo status di area protetta della zona. Promettendo un’estrazione a zero emissioni e impatti. Ma i dubbi sulla sostenibilità ambientale ed economica del progetto rimangono

    “Ecco, qui siamo al centro della valle. L’acqua non è presente, ma se facciamo una buca a neanche due metri troviamo la prima falda”, racconta Alessandro Mecali, geologo consulente del Parco di Bracciano-Martignano nel Lazio, facendo strada a piedi tra la vegetazione della valle di Baccano, chiusa a cerchio dalle colline.

    Siamo nel punto più basso di una conca che nasconde una potenziale miniera, un vecchio cratere vulcanico che fino al XIX secolo ospitava un lago, prosciugato dalla famiglia Chigi nel 1838. L’area è compresa nel Comune di Campagnano, 20 chilometri a Nord dal Grande Raccordo Anulare. L’intera valle è soggetta a vincolo paesaggistico ed è compresa tra due parchi regionali protetti: il Parco di Veio e quello di Bracciano-Martignano, appunto.

    Avanziamo tra le sterpaglie alla ricerca di qualche vecchio pozzo geotermico. Dopo un’ora di cammino, riusciamo a individuare quello che il ministero dell’Ambiente e sicurezza energetica denomina “Pozzo Cesano 8″. Mecali è raggiante: “Non avevo mai visto questi pozzi perché, quando sono stati realizzati, ero piccolissimo”. Un quadrato in cemento, quattro metri per quattro, immerso tra canne e arbusti secchi. Un pozzo anonimo, ma che potrebbe nascondere un tesoro.

    Negli anni Settanta del Novecento, l’Enel qui era impegnata con ricerche sull’energia geotermica. Gli studi rivelarono una forte concentrazione di litio in serbatoi d’acqua ad alte temperature sepolti nelle viscere della valle. Il progetto fu abbandonato, il litio geotermico ritenuto non troppo degno di nota e i vecchi pozzi furono cementati in attesa del domani. Quel domani è arrivato.

    Oggi il litio è chiamato “oro bianco”. È elencato tra le 34 materie critiche fondamentali alla transizione ed è uno dei materiali più ricercati al mondo poiché serve, tra altre cose, a immagazzinare energia nelle batterie delle auto elettriche. Basti pensare che nel 2022 è stato venduto per oltre 80mila dollari alla tonnellata.

    Proprio nel 2022 uno studio dell’Istituto di geoscienze e georisorse di Pisa (Igg) ha elencato le aree più promettenti per il litio geotermico in Italia. “Questo argomento è diventato molto attuale -spiega Andrea Dini, primo ricercatore dell’Igg-. Il nostro è un inventario. Non di miniere, perché quelle vengono aperte quando si sa che c’è un giacimento, ma delle zone più promettenti per il litio”.

    Il luogo che stiamo visitando, la caldera di Baccano, è appunto tra queste. “Siamo usciti con questo studio che ha smosso un po’ le acque. Ma l’argomento era già nell’aria”, commenta Dini. Tanto che questa valle ha attirato attenzione su di sé persino da oltreoceano.

    Due gruppi estrattivi australiani, la Vulcan Energy e l’Altamin, hanno ottenuto tra il 2021 e il 2022 permessi di ricerca di litio geotermico nella valle di Baccano. In particolare, la Vulcan ha già siglato contratti di fornitura con gruppi automobilistici e avviato una collaborazione con Enel green power, che detiene i dati delle vecchie ricerche ed è leader globale nella geotermia. Le società richiedenti stanno valutando i dati d’archivio senza esplorazioni geofisiche.

    Nel Lazio sono state approvate licenze di ricerca anche in altre località. “Nella richiesta presentata all’Ente parco, c’era una planimetria con una vasta area che andava da Sutri, Monterosi, Nepi, Campagnano, Formello e arrivava fino a Cesano”, racconta Marsilio Gregori, geometra del Parco di Veio. Lo incontriamo nella sede di Sacrofano, uno dei luoghi per i quali è stato chiesto un permesso di ricerca.

    Permessi che a volte suscitano dubbi. Nella valle di Baccano, in particolare, la Regione Lazio ha concesso due licenze contigue, stabilendo che non comportano interferenze con l’ambiente. Eppure, sono in molti a non fidarsi. “Non siamo per niente contenti di questa storia”. “Siamo contrari. Dovranno pur fare un sondaggio tra la popolazione”. “Da quanto ho capito, se vogliono espropriano”. “Io abito qui dietro. Non possiamo nemmeno collegarci alla rete del gas, perché siamo in area vincolata, e quelli pensano alla miniera di litio”. Sono gli umori raccolti tra i residenti della valle mentre, seduti al bar “Il Baccanale”, prendiamo un caffè prima di incamminarci. Ma il timore è fondato?

    Il sindaco di Campagnano, Alessio Nisi, dice che “per come viene descritto il modello di estrazione del litio in Italia e Germania, si tratta di una tecnica sostenibile che non impatta sull’ambiente”. Il progetto Zero carbon lithium si basa su una metodologia sperimentale, la Direct lithium extraction, e cioè la produzione di litio da acque geotermiche. Rispetto ai metodi tradizionali, ha un basso impatto ambientale e non produce emissioni. Quando si parla di estrazione di litio, viene in mente l’estensione delle cave australiane o le distese desertiche cilene. Un impatto inaccettabile in una zona come questa, con ampie aree protette.

    Per Dini, il ricercatore dell’Igg, non è così: “È un metodo molto meno impattante rispetto a quanto si vede nel deserto di Atacama, in Cile. Lì, l’impatto è enorme. Basta andare su Google Earth e ci si rende conto”. Qui si tratterebbe invece di individuare il giacimento in profondità e portare l’acqua ricca di litio in superficie con pozzi profondi a circuito chiuso. “L’acqua calda si fa passare attraverso un impianto industriale dove si estrae il litio in maniera selettiva. Rimane un fluido esausto che non viene rilasciato nell’ambiente, ma reimmesso in profondità nel giacimento per ricaricare il sistema”, conclude Dini.

    Il geologo Alessandro Mecali aggiunge una considerazione: “Quando si fa sperimentazione è fondamentale il monitoraggio continuo e verificare se ci sono abbassamenti del terreno. Altro discorso è l’impianto. Devono essere adottate tecniche innovative anche lì, visto che siamo dentro a un parco”. In teoria, la ricerca scientifica sembra escludere effetti negativi nell’uso di questa tecnica. Ma resta ancora tutto da vedere.

    “A oggi, si parla solo di ricerca, non di nuovi fori -riprende il geometra del Parco di Veio durante la nostra visita a Sacrofano-, c’è un vincolo di interesse paesistico nella valle di Baccano, ma con parere speciale delle autorità è aggirabile. In più, siamo tra due parchi. Secondo l’articolo 8, legge regionale 29/97, nelle aree protette è vietata l’estrazione”. Cerchiamo di capire che cosa potrebbe succedere se si dovesse passare a una fase estrattiva in zone protette. Per ragioni di pubblica utilità, la giunta regionale può autorizzare deroghe alle misure di salvaguardia, prescrivendo le modalità per tutelare i luoghi. La giunta potrebbe, cioè, approvare, a condizione che vengano rispettati limitazioni e controlli a spese del proponente. Ma il decreto legge sulle materie prime critiche del 25 giugno 2024, che adegua la normativa nazionale alle disposizioni europee, supera queste considerazioni: dalla data in cui la Commissione europea li riconosce come strategici, i progetti assumono la qualità di pubblico interesse nazionale e gli interventi necessari alla realizzazione sono “indifferibili e urgenti”.

    Il sindaco di Campagnano propone di individuare soluzioni a lungo termine, in un quadro di partenariato pubblico-privato, così da coinvolgere i Comuni interessati. “Che impatti positivi si vogliono immaginare per Campagnano? Se un’area ha una data risorsa, facciamo in modo di utilizzarla coinvolgendo il territorio in un percorso virtuoso”. Già perché la domanda latente sulla bocca di tutti è sempre la stessa: chi beneficerà di questa risorsa? Sarà equo il corrispettivo previsto a favore delle comunità locali? O forse le società minerarie dovranno ricorrere a incentivi pubblici per far fronte alla concorrenza globale? Ma, soprattutto, quanto litio si può estrarre da qui? Su questo risponde Alessandro Mecali di ritorno dall’escursione: “Dipende dalle dimensioni del serbatoio. Ci sono stratigrafie, i dati dell’Enel, si può calcolare”. Quindi occorre considerare costi-benefici e la durata operativa dell’impianto. “È quanto stanno valutando queste società”, conclude.

    Restano ancora molti nodi da sciogliere prima di vedere se l’oro della valle luccicherà davvero. Non ultima la questione del prezzo. Il formidabile crollo dei prezzi nel 2023 (circa -80%), e il protrarsi del ribasso nel 2024, è forse indicativo di una tendenza? L’offerta del minerale è stata così alta da aver superato la domanda. Si parlerà ancora di oro bianco?

    https://altreconomia.it/alla-ricerca-di-litio-nei-pozzi-della-valle-di-baccano
    #lithium #matières_premières #extractivisme #Italie #Baccano #Critical_raw_material_act (#Crma) #terres_rares #Latium #transition_énergétique #Parco_di_Veio #Parco_di_Bracciano-Martignano #Pozzo_Cesano_8 #caldera_di_Baccano #Vulcan_Energy #Altamin #Enel_green_power #licences #Alessio_Nisi #Campagnano #Direct_lithium_extraction #Zero_carbon_lithium #environnement #géothermie

  • Accordo UE-Serbia sul litio: tanta retorica, poche garanzie ambientali
    https://www.balcanicaucaso.org/aree/Serbia/Accordo-UE-Serbia-sul-litio-tanta-retorica-poche-garanzie-ambientali

    Il 19 luglio a Belgrado UE e la Serba hanno firmato un memorandum per un partenariato strategico sulle materie prime strategiche, soprattutto litio. Ambientalisti e analisti lamentano però l’assenza di garanzie per la salvaguardia dell’ambiente e della salute dei cittadini

    • Serbia, proteste contro lo sfruttamento di litio

      È passata poco più di una settimana dall’accordo sul litio firmato da Serbia e Unione europea, e i cittadini serbi hanno già iniziato a protestare in diverse città.

      Venerdì 19 luglio, durante un vertice “sulle materie prime critiche” organizzato con tanta fretta e altrettanta discrezione a Belgrado, il presidente serbo Aleksandar Vučić ha accolto il vicepresidente della Commissione europea Maroš Šefčovič (con delega al Green Deal europeo) e il cancelliere tedesco Olaf Scholz, oltre ai rappresentanti di Mercedes-Benz e Stellantis.

      Quell’incontro è stato l’occasione per firmare un “memorandum d’intesa” col quale l’UE e il Paese balcanico si sono impegnati a collaborare per creare una catena di approvvigionamento del litio reciprocamente vantaggiosa.

      “Sono orgoglioso di ciò che abbiamo iniziato oggi, 6 miliardi di euro di nuovi investimenti sono in arrivo”, ha commentato Vučić, secondo cui il litio serbo sarà esportato già a partire dal 2028 e principalmente sotto forma di batterie e componenti prodotti in Serbia, e sarà venduto solo a partner europei, “nonostante l’interesse dei produttori cinesi”.

      #Rio_Tinto torna in campo

      L’accordo segna un primo passo verso lo sfruttamento del litio nel Paese, una questione che ha profondamente scosso la società serba negli ultimi anni. Sono passati infatti 20 anni da quando il gruppo anglo-australiano Rio Tinto ha scoperto quello che sostiene essere il più grande giacimento di litio in Europa, nella valle di Jadar, nella Serbia occidentale: una miniera in grado di produrre fino a 58.000 tonnellate di litio all’anno, sufficienti ad alimentare più di un milione di veicoli elettrici.

      Secondo l’economista serbo Dragan Lončar, autore dello studio sull’impatto economico del progetto pubblicato nel 2021, il giacimento serbo sarebbe sufficiente a sostenere 30 anni di scavi su un’area di 300 ettari.

      La miniera darebbe lavoro a circa 1.200 persone e l’indotto ad altre 4.000, con un salario medio di circa 1.200 euro al mese, il 40% in più rispetto al salario medio del Paese. Negli ultimi giorni il governo serbo ha parlato addirittura di 20mila posti di lavoro nelle nuove fabbriche di batterie e componenti per auto elettriche.

      Non tutti però sono convinti da queste cifre. Sulle colonne di Radar , l’economista serbo Boško Mijatović nota che considerando il prezzo del litio di circa 11mila dollari alla tonnellata e la produzione annuale stimata di 58mila tonnellate, il valore del litio serbo si aggirerebbe attorno a 615 milioni di euro l’anno.

      “Non è una somma molto elevata, raggiunge il valore di una normale azienda”, commenta Mijatović, che aggiunge: “Cosa ancora più importante, dalla rendita mineraria la Serbia riceverebbe il 5%, che dà un reddito di 31 milioni di euro! Una cifra modesta, per non dire miserabile. Certamente non sufficiente a correre il minimo rischio perché la produzione di litio si faccia in Serbia”.

      I rischi sono un elemento fondamentale in questa storia. L’estrazione del litio è infatti un processo estremamente inquinante e per questo l’opposizione al progetto è stata feroce in Serbia, con tanto di iniziativa popolare, firmata da 38mila cittadini, che chiede il divieto dell’estrazione del litio (un’iniziativa che aspetta, per il momento invano , di essere messa all’ordine del giorno in parlamento).

      Nel gennaio 2022, dopo mesi di proteste di massa, l’esecutivo serbo ha ritirato “definitivamente” i permessi concessi a Rio Tinto. Un paio di settimane fa, però, la Corte costituzionale serba ha dichiarato illegittima quella decisione, permettendo al governo di Belgrado di far ripartire il cantiere. “Non ci sarà alcun progetto senza una protezione totale [dell’ambiente], e porteremo qui i migliori esperti d’Europa”, ha detto il presidente serbo Vučić il 19 luglio, ma senza riuscire a rassicurare la popolazione.
      Cittadini in piazza

      All’inizio della scorsa settimana, infatti, migliaia di persone hanno manifestato nella città di Valjevo, nella parte occidentale del Paese. Tra loro, c’era anche Ratko Ristić, professore presso la Facoltà di Scienze Forestali di Belgrado.

      “La popolarità dell’Unione europea è appena crollata nuovamente in Serbia. Bruxelles non vuole mettere in pericolo l’ecosistema e la salute dei suoi abitanti, ma non ha problemi a farlo qui da noi”, esclama Ratko Ristić. “La Germania ha riserve di litio molto più grandi delle nostre. La verità è che noi garantiamo bassi standard di protezione ambientale, nessun controllo e una manodopera a basso costo. Per Rio Tinto va bene, ma per noi è un disastro”, continua il professore.

      I detrattori del progetto temono l’inquinamento del fiume Jadar (affluente della Drina e quindi della Sava, che attraversa Belgrado), ma denunciano anche la distruzione di centinaia di ettari di terreni agricoli e lo sfollamento forzato delle persone che vi abitano.

      Anche la mancanza di trasparenza ha suscitato l’indignazione dell’opinione pubblica. Secondo Florian Bieber, specialista di Balcani presso l’Università di Graz in Austria, la mancanza di trasparenza è una strategia governativa deliberata.

      “È successo tutto molto rapidamente, nel bel mezzo dell’estate. È difficile per l’opposizione mobilitare le folle in questo periodo”. D’altra parte, Vučić è appena uscito vittorioso dalle elezioni parlamentari e locali, quindi ha campo libero per i prossimi quattro anni”, analizza il politologo.

      Quanto all’Unione Europea, “ha deciso di barattare la democrazia e lo Stato di diritto con il litio”, accusa Florian Bieber, secondo cui “questo accordo rafforza l’autoritarismo nei Balcani”.

      “Vučić ha falsificato le elezioni, non c’è libertà di stampa nel Paese, non ci sono più istituzioni indipendenti, eppure Bruxelles lo premia. Questo è un duro colpo per i politici e i cittadini serbi filo-europei”, conclude Florian Bieber.

      Dopo la manifestazione a Valjevo, delle proteste sono state organizzate la settimana scorsa anche a Loznica, Grocka, Preljina, Koceljeva e Negotin.

      Questa settimana, fa sapere N1 , una nuova ondata di sit-in si terrà invece a Kraljevo, Šabac, Aranđelovac, Ljig, Kosjerić i Mladenovac.

      Il cantiere di Rio Tinto nella valle dello Jadar è infatti solo la punta dell’iceberg. “Ci sono oggi una sessantina di località in Serbia in cui diverse imprese stanno cercando permessi per lo sfruttamento del litio”, prosegue la televisione regionale N1.

      Queste località sono concentrate lungo un asse che taglia la Serbia da nord-ovest, nei pressi di Loznica, fino a sud-est, nei dintorni di Bor. Forse è anche per questo che la società serba sembra così unita e reattiva sull’argomento.

      Sembra quasi che abbia ragione Srđan Mitrašinović, consigliere comunale a Šapac intervistato da N1, secondo cui sul litio “il popolo serbo è da un lato della barricata, Rio Tinto e il governo sono dall’altro”.

      https://www.balcanicaucaso.org/aree/Serbia/Serbia-proteste-contro-lo-sfruttamento-di-litio-232628
      #résistance

    • Serbie : « question de vie ou de mort », le projet de mine de lithium largement rejeté par la population

      La capitale serbe se prépare à une mobilisation ce samedi 10 août pour s’opposer à un projet de mine de lithium porté par le géant australien Rio Tinto dans l’ouest de la Serbie. Depuis sa relance mi-juillet, le projet fait face à une fronde inédite à travers tout le pays.

      Plusieurs dizaines de milliers de personnes sont attendues ce samedi à Belgrade avec un seul mot d’ordre : l’abandon pur et simple du projet controversé d’extraction de lithium.

      Pour Zlatko Kokanovic, vice-président d’une association écologiste et fer de lance du mouvement, cette bataille est une question de survie : « L’avenir du monde ce n’est pas le lithium ou les batteries électriques, ce qui compte c’est d’avoir une eau propre, un air pur et une terre capable de donner une nourriture saine y compris dans 1000 ans. Les mines laissent derrière elles des trous noirs, des plaies béantes sur notre planète. C’est donc une question de vie ou de mort », assène le militant au micro de Jelena Tomic du service international de RFI.
      « Nous allons radicaliser le mouvement partout en Serbie. »

      Un ultimatum, lancé au gouvernement par les organisations environnementales il y a 40 jours, arrive à expiration. L’agriculteur et père de cinq enfants qui vit à proximité du site d’extraction promet un durcissement du mouvement : « Nous allons radicaliser le mouvement partout en Serbie. Nous n’avons pas de pays de substitution. C’est pourquoi nous devons être tous ensemble, unis. C’est le seul moyen de nous protéger de ce fléau. »

      Un temps suspendu, l’exploitation de la mine par Rio Tinto a été relancée à la mi-juillet avec la signature d’un partenariat entre Belgrade et l’Union européenne (UE). Le militant exclut tout compromis : « Que ce soit Rio Tinto, les Chinois ou les Allemands, on s’en fiche. Il n’y a aucun compromis possible. Nous devrions être tous égaux et avoir les mêmes droits garantit par la Constitution. Les Chinois possèdent entre 90 et 96% des terres rares et détiennent le monopole dans ce commerce. On nous a même proposé que le lithium soit exploité chez nous et traité dans un autre endroit. Ce qui serait juste hypocrite et scandaleux de notre part, que d’accepter que ce lithium soit transporté ailleurs dans notre pays et que cet acide toxique détruise la santé de nos concitoyens. »
      L’UE se moque de la santé des enfants serbes selon Zlatko Kokanovic

      Le pari sera-t-il gagné dans cette bataille de David contre Goliath ? Le doute est permis au vu des énormes intérêts de l’UE qui souhaite réduire sa dépendance vis-à-vis des matières premières en provenance de Chine. D’où le ressentiment de Zlatko Kokanovic : « Il est clair pour tout le monde ici que les pays de l’Union européenne veulent avoir notre lithium, crucial pour sa transition écologique, et pour que leurs enfants respirent un air pur et soient en bonne santé, au détriment de notre santé, de celle de nos enfants et de notre environnement. Ils envisagent tout simplement de transformer les Balkans en une grande décharge. Et la deuxième raison qui les poussent à vouloir notre lithium est qu’ils souhaitent se libérer de leur dépendance vis à vis de la Chine, car les chinois possèdent entre 90 et 96% des terres rares et détiennent le monopole dans ce commerce. On nous a même proposé que le lithium soit exploité chez nous et traité dans un autre endroit. Ce qui serait juste hypocrite et scandaleux de notre part, que d’accepter que ce lithium soit transporté ailleurs dans notre pays et que cet acide toxique détruise la santé de nos concitoyens. »

      https://www.rfi.fr/fr/europe/20240810-serbie-question-de-vie-ou-de-mort-le-projet-de-mine-de-lithium-largemen

      #résistance

  • La guerre des métaux rares. La face cachée de la #transition_énergétique et numérique

    En nous émancipant des énergies fossiles, nous sombrons en réalité dans une nouvelle #dépendance : celle aux métaux rares. #Graphite, #cobalt, #indium, #platinoïdes, #tungstène, terres rares… ces ressources sont devenues indispensables à notre nouvelle société écologique (#voitures_électriques, éoliennes, #panneaux_solaires) et numérique (elles se nichent dans nos #smartphones, nos #ordinateurs, tablettes et autre objets connectés de notre quotidien). Or les coûts environnementaux, économiques et géopolitiques de cette dépendance pourraient se révéler encore plus dramatiques que ceux qui nous lient au pétrole.

    Dès lors, c’est une #contre-histoire de la transition énergétique que ce livre raconte – le récit clandestin d’une odyssée technologique qui a tant promis, et les coulisses d’une quête généreuse, ambitieuse, qui a jusqu’à maintenant charrié des périls aussi colossaux que ceux qu’elle s’était donné pour mission de résoudre.

    https://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-La_guerre_des_m%C3%A9taux_rares-531-1-1-0-1.html
    #métaux_rares #terres_rares #matières_premières #livre #transition_numérique #énergie #Guillaume_Pitron

  • Dove sono i metalli rari in Italia

    Se lo sta chiedendo il governo, che ha approvato un decreto per sfruttare vecchi giacimenti e aprire nuove miniere.

    Dopo le sollecitazioni ricevute negli ultimi anni dall’Unione Europea, lo scorso 20 giugno il governo italiano ha approvato un decreto per sostenere la ricerca delle cosiddette “materie prime critiche”, un gruppo di metalli particolarmente necessari per il settore tecnologico e per la transizione energetica. Le materie prime critiche servono soprattutto all’industria dei microchip e dei componenti elettronici o per la produzione di batterie dei veicoli elettrici. Alcune hanno nomi più conosciuti, come il rame, il litio, il silicio e il nichel, altre sono meno note come il bismuto, il boro, il cobalto, il gallio, il germanio, il magnesio e il manganese, la grafite naturale, il titanio e il tungsteno.

    Fino a qualche decennio fa in Italia c’erano diversi giacimenti di questi metalli, miniere via via abbandonate perché dai costi insostenibili soprattutto se paragonati a quelli delle importazioni. Tuttavia negli ultimi anni l’aumento della richiesta dei metalli rari ha invertito questo rapporto: ora comprarli all’estero e importarli è molto costoso, mentre è più vantaggioso e politicamente strategico sfruttare vecchi giacimenti o trovarne di nuovi.

    Con queste premesse il governo ha approvato una serie di misure: semplificare le procedure per consentire alle compagnie minerarie di cercare nuovi giacimenti, finanziare una mappatura più completa delle aree sulla base di studi geologici, realizzare un piano nazionale delle materie prime con una definizione più puntuale dei finanziamenti per questo settore. L’obiettivo è spingere le compagnie a investire nella ricerca di nuovi giacimenti.

    Il ministro dell’Ambiente e della Sicurezza energetica, Gilberto Pichetto Fratin, ha detto che il programma esplorativo dovrà essere pronto entro il 24 maggio 2025. Se ne occuperà l’ISPRA, l’istituto superiore per la protezione e la ricerca ambientale, a cui sono stati dati 3,5 milioni di euro per realizzare una mappa dei possibili giacimenti, la nuova carta mineraria dell’Italia. Grazie alla nuova carta potranno essere aggiornati e migliorati i censimenti fatti dall’ISPRA negli ultimi anni.

    Uno degli ultimi censimenti è stato pubblicato nell’atlante dei dati ambientali, aggiornato al 2023, e comprende i giacimenti sfruttati in passato e ora da rivalutare.

    Nel documento dell’ISPRA si legge che l’Italia è «totalmente dipendente» dai mercati esteri, ma anche che sul territorio esistono mille possibili giacimenti: i più interessanti sono nell’arco alpino, in Liguria, nella fascia tirrenica tra Toscana e Campania, in Calabria e in Sardegna. «La coltivazione di minerali metalliferi è stata progressivamente abbandonata a cavallo dei due secoli non per esaurimento delle risorse ma, nella quasi totalità, per le convenienti condizioni economiche dei mercati esteri delle materie prime e per la mancanza di lungimiranza della politica industriale mineraria», dice lo studio.

    Risultano attive soltanto due miniere di fluorite (a Bracciano, in provincia di Roma, e a Silius, in Sardegna) e una ventina di feldspato tra Piemonte, Toscana, Lazio, Calabria e Sardegna. C’è poi un giacimento di titanio in Liguria, uno di cobalto in Piemonte, di litio in Lazio. Negli ultimi anni sono stati dati permessi per cercare zinco, cobalto, titanio e nichel in particolare sull’arco alpino.

    Il decreto prevede anche che le compagnie minerarie titolari delle concessioni, già attive o future, dovranno dare allo Stato tra il 5 e il 7 per cento dei prodotti estratti. Questa sorta di tassa finanzierà il fondo nazionale del Made in Italy per sostenere nuovi investimenti e un’ulteriore ricerca di materie prime critiche.

    In merito all’impatto ambientale, su cui c’è una maggiore sensibilità rispetto al passato, il governo ha incaricato l’ISPRA di vigilare sui progetti di ricerca dei metalli insieme alle soprintendenze dei territori interessati. L’ISPRA potrà bloccare i permessi se verranno rilevate irregolarità, per esempio trivellazioni in punti non consentiti. L’istituto dovrà anche coinvolgere gli enti locali, in particolare i comuni, per spiegare in modo approfondito i lavori previsti, l’impatto delle ricerche e dell’eventuale apertura di nuove miniere.

    https://www.ilpost.it/2024/07/14/mappa-metalli-rari-italia
    #Italie #extractivisme #Alpes #permis #mines #minières #Italie #terres_rares #matières_premières_critiques #transition_énergétique #batteries #extractivisme #décret #matières_premières_critiques #microchip #électronique #lithium #cuivre #cobalt #tungstène #titan #mines #minières #ISPRA #Gilberto_Pichetto_Fratin #matières_premières #concessions #cartographie #visualisation #carte

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    #métaliste sur l’#extraction de #terres_rares dans les #Alpes :
    https://seenthis.net/messages/1013289

  • Des #mines pour sauver la planète ?

    Pour réaliser la #transition_énergétique, il faudrait extraire en vingt ans autant de métaux qu’au cours de toute l’histoire de l’humanité. C’est « l’un des grands #paradoxes de notre temps », constate #Celia_Izoard.

    Journaliste, traductrice et philosophe, Celia Izoard examine depuis plusieurs années les impacts sociaux et écologiques du développement des nouvelles technologies. Ce nouvel ouvrage s’intègre dans cette veine en explorant les effets délétères de la transition énergétique et numérique.

    La #transition verte nécessite d’extraire du #sous-sol des quantités colossales de #métaux. Ils seront ensuite destinés à la production des énergies bas carbone qui sauveront la planète. Cette course aux métaux supposée sauver la planète du dérèglement climatique n’aggrave-t-elle pas le chaos écologique, les dégâts environnementaux et les inégalités sociales ?

    Celia Izoard mène une vaste enquête sur ce phénomène mondial, inédit et invisible. Si d’autres ouvrages ont également mis en avant l’insoutenabilité physique d’une telle transition, la force de ce livre est d’élaborer un panorama de cette question grâce à des enquêtes de terrain et une analyse fournie sur les aspects culturels, politiques, économiques et sociaux des mines et des métaux.

    Le #mythe de la #mine_verte

    Au début du livre, Celia Izoard part à la recherche des mines du XXIe siècle, « responsables », « relocalisées », « 4.0 », ou encore « décarbonées, digitales et automatisées ». Par un argumentaire détaillé et une plongée dans des mines en #Espagne ou au #Maroc, l’autrice démontre que derrière ce discours promu par les institutions internationales, les dirigeants politiques et les milieux d’affaires se cache un autre visage. Celui de la mine prédatrice, énergivore et destructrice. Celui qui dévore l’habitat terrestre et le vivant.

    De façon locale, le processus de « radicalisation » de la mine industrielle est détaillé par le prisme de ses ravages sociaux. La mine est avant tout « une gigantesque machine de #déracinement » (p. 54), qui vide des espaces en expropriant les derniers peuples de la planète. En outre, la mine contemporaine expose les populations à diverses maladies et à l’intoxication. Dans la mine de #Bou-Azzer au Maroc, on extrait du « #cobalt_responsable » pour les #voitures_électriques ; mineurs et riverains souffrent de cancers et de maladies neurologiques et cardiovasculaires.

    L’ampleur globale de la #prédation du #secteur_minier au XXIe siècle est aussi esquissée à travers la production grandissante de #déchets et de #pollutions. Le secteur minier est l’industrie la plus polluante au monde. Par exemple, une mine industrielle de #cuivre produit 99,6% de déchets. Stockés à proximité des #fosses_minières, les stériles, de gigantesques volumes de roches extraits, génèrent des dégagements sulfurés qui drainent les #métaux_lourds contenus dans les roches et les font migrer vers les cours d’#eau. Les tuyaux des usines crachent en permanence les #résidus_toxiques qui peuvent, en fonction du #minerai traité, se composer de #cyanure, #acides, #hydrocarbures, #soude, ou des #poisons connus comme le #plomb, l’#arsenic, le #mercure, etc. Enfin, les #mines_zéro_carbone sont des #chimères car elles sont toutes très énergivores. La quantité nécessaire pour extraire, broyer, traiter et raffiner les métaux représentent environ 8 à 10% de l’#énergie totale consommée dans le monde, faisant de l’#industrie_minière un principal responsable du dérèglement climatique.

    La face sombre de la transition énergétique

    Dans la seconde partie, Celia Izoard montre que les élites sont « en train d’enfouir la crise climatique et énergétique au fond des mines » (p. 62). Cet impératif d’extraire des métaux pour la transition coïncide avec le retour de la question des #matières_premières sur la scène publique, dans un contexte où les puissances occidentales ont perdu leur hégémonie face à la Chine et la Russie.

    Depuis quand la transition implique-t-elle une relance minière et donc le passage des #énergies_fossiles aux métaux ? Cet argument se diffuse clairement à la suite de la publication d’un rapport de la Banque mondiale en 2017. En collaboration avec le plus gros lobby minier du monde (l’ICMM, International Council on Mining and Metals), le rapport stipule que l’industrie minière est appelée à jouer un rôle majeur dans la lutte contre le changement climatique – en fournissant des technologies bas carbones. #Batteries électriques, rotors d’éoliennes, électrolyseurs, cellules photovoltaïques, câbles pour la vague d’électrification mondiale, toutes ces infrastructures et technologies requièrent néanmoins des quantités faramineuses de métaux. La transition énergétique des sociétés nécessiterait d’avoir recours à de nombreux métaux de base (cuivre, #nickel, #chrome ou #zinc) mais aussi de #métaux_rares (#lithium, #cobalt, #lanthanide). L’#électrification du parc automobile français exige toute la production annuelle de cobalt dans le monde et deux fois plus que la production annuelle de lithium.

    Au XXIe siècle, la matière se rappelle donc brusquement aux puissances occidentales alors qu’elles s’en rêvaient affranchies dans les années 1980. Pourtant, les sociétés occidentales n’avaient évidemment jamais cessé de se fournir en matières premières en s’approvisionnant dans les mines et les industries délocalisées des pays du Sud. Ce processus de déplacement avait d’ailleurs contribué à rendre invisible la mine et ses pollutions du paysage et de l’imaginaire collectif.

    Sous l’étendard de la transition qui permet d’anticiper les contestations environnementales et de faire adhérer les populations à cette inédite course mondiale aux métaux se cache le projet d’une poursuite de la croissance et des modes de vie aux besoins énergétiques et métalliques démesurés. Cette nouvelle légende de l’Occident capitaliste justifie une extraction de métaux qui seront également destinés aux entreprises européennes du numérique, de l’automobile, l’aérospatial, l’armement, la chimie, le nucléaire et toutes les technologies de pointe.

    « Déminer le #capitalisme »

    Ce #livre explore ensuite dans une troisième partie l’histoire du capitalisme à travers celle de la mine et des métaux. Elle montre comment s’est fondé un modèle extractiviste reposant sur des idéologies : le Salut, le Progrès, le Développement – et désormais la Transition ? L’extractivisme est permis par l’élaboration et le développement d’un ensemble de croyances et d’imaginaires qui lui donnent une toute puissance. C’est ce que Celia Izoard nomme : la « #cosmologie_extractiviste » (p. 211). Accompagnée par une législation favorable et des politiques coloniales menées par l’État et la bourgeoisie, puis par l’industrialisation au XIXe siècle, cette matrice a favorisé notre dépendance à un régime minier. Aux yeux du peuple amazonien des Yanomamis, les Blancs sont des « mangeurs de terre » (p. 215).

    Comment sortir de cette vision du monde occidental structuré autour de la mine dont l’objectif est l’accumulation de capital et de puissance. La solution minière, comme technologique, à la crise climatique est un piège, affirme Celia Izoard. Le mouvement climat doit passer par la #décroissance_minérale, par un « sevrage métallique autant qu’un sevrage énergétique » (p. 291). La réduction des consommations énergétiques et matérielles est une solution réaliste. Le quotidien des occidentaux est surminéralisé à l’instar de l’objet emblématique de notre surconsommation quotidienne de métaux : le smartphone. Il contient à lui seul, sous la forme d’alliage complexe, plus de 50 métaux. Les métaux ne devraient-ils pas être réservés aux usages déterminés comme essentiels à la vie humaine ?

    Pour sortir du #régime_minier, il est d’abord urgent de rendre visible la surconsommation de métaux dans le débat public. D’une part, cela doit passer par des mesures politiques. Instaurer un bilan métaux au même titre que le bilan carbone car l’idéologie de la transition a créé une séparation illusoire entre les ressources fossiles toxiques (charbon, pétrole et gaz) et l’extraction métallique, considérée comme salutaire et indispensable. Ou encore cibler la surconsommation minérale des plus riches en distinguant émissions de luxe et émissions de subsistance, comme le propose déjà Andreas Malm. D’autre part, pour « déminer le capitalisme » (p. 281), cela devra passer par un processus de réflexions et de débats collectifs et démocratiques, de mouvements sociaux et de prises de consciences individuelles, en particulier dans les pays hyperindustrialisés dont la surconsommation de métaux est aberrante.

    Non content de contourner l’obstacle de la « transition énergétique », l’extractivisme pousse les frontières toujours plus loin, justifiant la conquête de nouveaux eldorados : le Groenland, les fonds océaniques, voire les minerais extraterrestres. Face au processus de contamination et de dégradation de la planète mené par le secteur minier et industriel, les luttes contre les projets s’intensifient. Récemment, ce sont les Collas, peuple indigène du Chili, qui s’opposent aux géants miniers. Ces derniers ont pour projet d’extraire du lithium dans le salar de Maricunga ; cela entraînera le pompage de millions de mètres cubes d’eau dans les profondeurs des déserts de sel, ces emblèmes de la cordillère des Andes. La communauté colla en sera d’autant plus affaiblie d’autant plus qu’elle souffre déjà de l’exode urbain et de l’assèchement de la région. Les éleveurs devront aussi abandonner leurs élevages et s’engager vers les immenses cités minières de la région. En outre, la transhumance, la biodiversité, une quarantaine d’espèces sauvages locales (le flamant rose chilien, les vigognes ou les guanacos, etc.), sont menacées. Appuyés par leur porte-parole Elena Rivera, ils ne comptent pas se laisser faire et ont fait un recours au Tribunal environnemental de Santiago, qui traite des nombreuses controverses écologiques dans le pays. Au XXIe siècle, les débats et luttes organisés autour de l’extraction au Chili, deuxième pays concentrant le plus de lithium sur la planète, prouvent que les pauvres et les derniers peuples de la planète sont en première ligne face aux effets délétères sous-jacents à la « transition verte ».

    https://laviedesidees.fr/Des-mines-pour-sauver-la-planete
    #changement_climatique #climat #extractivisme

  • Sans #transition. Une nouvelle #histoire de l’#énergie

    Voici une histoire radicalement nouvelle de l’énergie qui montre l’étrangeté fondamentale de la notion de transition. Elle explique comment matières et énergies sont reliées entre elles, croissent ensemble, s’accumulent et s’empilent les unes sur les autres.
    Pourquoi la notion de transition énergétique s’est-elle alors imposée ? Comment ce futur sans passé est-il devenu, à partir des années 1970, celui des gouvernements, des entreprises et des experts, bref, le futur des gens raisonnables ?
    L’enjeu est fondamental car les liens entre énergies expliquent à la fois leur permanence sur le très long terme, ainsi que les obstacles titanesques qui se dressent sur le chemin de la #décarbonation.

    https://www.seuil.com/ouvrage/sans-transition-jean-baptiste-fressoz/9782021538557
    #livre #Jean-Baptiste_Fressoz

    • « #Transition_énergétique » : un #mythe qui nous mène dans le mur

      Transition énergétique, ce mot est partout aujourd’hui. Dans les discours du gouvernement, la communication des entreprises fossiles, des multinationales, dans les rapports scientifiques.. Le message est clair, face à l’urgence climatique, il nous faut opérer une transition énergétique pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre et décarboner les économies d’ici à 2050. La notion de de #transition part de l’idée que nous devrions répéter les transition du passé, du bois au charbon puis du charbon au pétrole pour désormais aller vers le nucléaire et les renouvelables et ainsi échapper au chaos climatique. Pour Jean-Baptiste Fressoz, chercheur au CNRS, la transition énergétique n’est qu’une #fable créée de toute pièce par le capital et que toute l’histoire déconstruit. Dans son livre “ Sans transition” il écrit “Rien de plus consensuelle que la transition énergétique, rien de plus urgent que de ne pas y croire” L’historien des sciences le rappelle “après deux siècles de “transitions énergétiques”, l’humanité n’a jamais brûlé autant de pétrole et de gaz, autant de charbon et même de bois”. À l’échelle mondiale, il faut dire que la transition énergétique est invisible. Depuis le début du XXème siècle, les énergies et les ressources que l’on utilise se sont accumulées sans se remplacer. L’histoire de l’énergie est donc une histoire d’accumulation et de symbiose. Même la consommation de charbon, considéré comme l’énergie de la révolution industrielle, a battu un nouveau record en 2023. Les énergies renouvelables ne remplacent pas les fossiles, elles s’ y additionnent. Et les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter Alors la transition énergétique n’est-elle qu’une illusion ? Pour Jean Baptiste Fressoz, en se basant sur une lecture fausse du passé selon laquelle chaque énergie serait venue en remplacer une autre, nous nous empêchons de construire une politique climatique rigoureuse. Pourquoi la transition énergétique nous empêche de penser convenablement le défi climatique ? Comment cette notion s’est-elle imposée ? Et en quoi est-il urgent de ne pas y croire et de penser autrement nos réponses au plus grand défi du siècle ? Réponses dans cet entretien de Paloma Moritz avec Jean Baptiste Fressoz.

      https://www.blast-info.fr/emissions/2024/transition-energetique-un-mythe-qui-nous-mene-dans-le-mur-Inu5q1eWT0WwT7X

      #audio #podcast

    • Énergies : le #mythe de la #transition

      La notion de « transition énergétique » a été dévoyée, estime l’historien des sciences #Jean-Baptiste_Fressoz. Il explique pourquoi #charbon et #pétrole n’ont jamais remplacé le #bois. Et que la lutte contre le #changement_climatique doit se fonder sur des techniques disponibles et bon marché.

      Qu’est-ce qui a motivé l’écriture de votre livre Sans transition – Une nouvelle histoire de l’énergie, qui vient d’être traduit en anglais et a obtenu le prix d’histoire du Sénat ?
      Jean-Baptiste Fressoz1 La nécessité de mettre l’histoire de l’énergie à la hauteur du défi climatique. Il y a un genre dominant, dans ce domaine : celui de la grande fresque énergétique de l’humanité, qui narre les transitions successives que l’on aurait accomplies par le passé – du bois au charbon, puis du charbon au pétrole – et qui préluderaient à la transition à venir en dehors des #énergies_fossiles. Le problème de cette approche, que je qualifie de « phasiste », est qu’elle minore la nouveauté radicale de ce qu’il faut accomplir maintenant, face au changement climatique.

      On dispose aussi d’une riche historiographie mono-énergétique sur le bois à l’époque préindustrielle, sur le charbon au XIXe siècle et sur le pétrole au XXe. Mais ces histoires des énergies et des matières ne peuvent se comprendre les unes sans les autres, elles sont interdépendantes, se complètent et se cumulent. En outre, 95 % du charbon a été extrait après 1900. Et le bois-énergie a énormément cru au XXe siècle, et plus fortement encore depuis les années 2000.

      Il faut donc arrêter de se focaliser sur les transitions et les basculements, de penser les énergies comme étant en compétition. Cela peut être le cas dans certains domaines (par exemple, les moteurs Diesel remplacent les machines à vapeur dans l’entre-deux-guerres), mais, globalement, aux XIXe et XXe siècles, l’histoire de l’énergie est celle de l’expansion.

      Il y a pourtant bien eu des ruptures – entre la bougie et l’électricité, par exemple ?
      J.-B. F. Tout à fait, mais ce sont des ruptures technologiques qui masquent la permanence des matières et des énergies. Donc, oui, l’#électrification représente une vraie révolution, qui rend obsolètes les lampes à pétrole. Mais, paradoxalement, elle entraîne une énorme croissance de la consommation de pétrole pour l’éclairage ! Dans les années 2000, les seuls phares des automobiles (le parc mondial est de 1,5 milliard de voitures) consomment bien plus de pétrole que le monde entier en 1900 quand tout le monde ou presque s’éclairait au pétrole. Et nos ampoules LED, aussi efficaces soient-elles, envoient presque 1 milliard de tonnes de CO2 dans l’atmosphère – des milliers de fois plus qu’à l’époque du gaz d’éclairage et des lampes à pétrole…

      Quelles que soient les #innovations_technologiques, les #matières_premières n’ont pour le moment jamais été obsolètes. Les exceptions à cette règle sont rarissimes. L’#huile_de_baleine est un exemple unique de disparition d’une source d’énergie. Il y a aussi la laine de mouton, qui a reculé d’un tiers depuis les années 1950 face aux fibres synthétiques. Ou l’amiante, qui a diminué grâce à des interdictions. Mais, au bout du compte, l’éventail des matières consommées s’élargit et chacune est consommée en quantité croissante. On estime que le poids total des matières premières utilisées par l’économie au XXe siècle (l’extraction de biomasse, d’énergies fossiles, de minerais et de granulats ; on ne compte pas l’eau et l’air) a été multiplié par 12 !

      Mais si on prend le cas de la #révolution_industrielle, le charbon a bien remplacé le bois ?
      J.-B. F. Eh bien, non, pour une raison simple : pour exploiter des mines de charbon, il était indispensable d’étayer les galeries avec énormément de bois. Sous la pression des roches, les étais pliaient et devaient être remplacés régulièrement. Au début du XXe siècle, les mines britanniques engloutissent chaque année entre 3 et 4,5 millions de mètres cubes d’étais, alors qu’un siècle auparavant, les habitants ne brûlaient « que » 3,6 millions de mètres cubes de bois de feu. Comme la production de bois d’œuvre (c’est-à-dire de construction) requiert 4 fois plus de surface que celle du bois de feu (il faut attendre que les arbres grandissent), on peut estimer que l’Angleterre utilisait 6 à 7 fois plus d’espace forestier pour produire son énergie en 1900 qu’un siècle et demi auparavant.

      En Chine, le manque de bois sera pendant longtemps un obstacle majeur à l’extraction du charbon. Et les « chemins de fer » auraient dû être appelés « chemins de bois », car ils consommaient bien plus de bois que de fer, du fait des traverses qui devaient être fréquemment remplacées.

      Aujourd’hui encore, le bois est source d’énergie ?
      J.-B. F. Effectivement, cette utilisation du bois-énergie n’a fait que croître dans les pays riches au XIXe et aussi au XXe siècle. À cause de la production de papier et de carton d’emballage, et aussi parce qu’on produit de plus en plus d’électricité à partir de bois. De nos jours, la centrale thermique à bois de Drax, au Royaume-Uni, consomme à elle seule au moins quatre fois plus de bois que le pays tout entier deux siècles plus tôt. Un beau résultat, après deux siècles de transition énergétique…

      En France, l’entreprise Vallourec (fabricant de tubes en acier pour l’industrie du pétrole et du gaz) possède d’immenses plantations d’eucalyptus au Brésil. Cette seule entreprise consomme 1,2 million de mètres cubes de bois (transformés en granulés) par an, soit trois fois ce que la sidérurgie française tout entière consommait à son pic de consommation de charbon de bois, en 1860 ! Dans ce cas, on a du bois qui sert à faire de l’acier pour extraire… du pétrole.

      Enfin, le charbon de bois a l’image d’une énergie pré-industrielle. Pourtant, on n’en a jamais autant produit qu’aujourd’hui, notamment pour cuisiner, dans les pays en voie de développement. Depuis 1960, dans le monde, la quantité de bois de feu est passée de 1 à 2 milliards de mètres cubes. En Afrique, des mégalopoles de 10 millions d’habitants (Lagos, au Nigeria, Kinshasa, en République démocratique du Congo, Dakar, au Sénégal, Dar es-Salaam, en Tanzanie) consomment à elles seules plus de bois que des pays européens entiers un siècle plus tôt !

      Comment expliquer que l’on a ainsi présenté de façon erronée l’histoire des énergies ?
      J.-B. F. La raison est simple : les historiens se sont intéressés à l’énergie du point de vue économique, pour comprendre les racines de l’industrialisation et de la croissance. Pour ce faire, ils convertissent les tonnes de bois, de charbon, de pétrole en unités énergétiques, et considèrent l’évolution du mix en relatif. Et, effectivement, en 1900, dans les pays industrialisés, l’apport énergétique du bois, par exemple, devient négligeable par rapport à celui du charbon.

      Mais, du point de vue des arbres, de la biodiversité et du climat, ce sont les valeurs absolues qui importent. Or le nombre d’arbres abattus ne fait que croître. En outre, ils n’ont pas étudié les inter-relations entre les énergies – par exemple, tout le bois nécessaire à extraire le charbon ou tout le charbon nécessaire pour extraire et utiliser le pétrole.

      Malgré tout, dans les pays riches, la surface des forêts augmente. Elles ne semblent pas menacées ?
      J.-B. F. Oui, certains géographes parlent d’ailleurs de « transition forestière » pour décrire ce phénomène encourageant. Le problème, c’est qu’une bonne part de cette reforestation repose sur une déforestation dans les pays tropicaux, sur des transferts de biomasse (soja, pâte à papier…) vers les pays du Nord. En outre, la foresterie a été révolutionnée par le pétrole. C’est grâce à cette énergie qu’à partir des années 1950 de nouvelles tronçonneuses, légères, et des véhicules dotés de bras hydrauliques remplacent la force musculaire des bûcherons. Dans les années 1970, des engins capables d’abattre, d’ébrancher et de tronçonner un arbre en moins d’une minute rendent l’industrie forestière hyper productive. Reste à développer des milliers de kilomètres de routes forestières, avec des bulldozers roulant au diesel, et à accroître la productivité, grâce à des engrais de synthèse parfois épandus sur les forêts par avions…

      La sylviculture est devenue une branche de l’agriculture intensive. Avec une essence clé : l’eucalyptus, dont les rendements en climat tropical et dopés aux engrais sont faramineux. En ce sens, la transition forestière, n’est forcément pas une bonne nouvelle pour le climat.

      Le pétrole ne remplace pas plus le charbon que ce dernier n’a remplacé le bois ?
      J.-B. F. Non, car le pétrole sert avant tout à faire avancer des voitures qui consomment énormément de charbon pour leur fabrication. En outre, les carburants des années 1930 incorporent beaucoup de benzol, issu de la distillation de la houille. Les automobiles ont besoin de routes, donc de ciment, et d’acier, donc de charbon. Enfin, grâce au pétrole, utiliser le ciment est plus aisé (pensons au camion toupie) et le charbon devient moins cher, car plus facile à transporter grâce au camion à benne levante.

      Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il y a une symbiose entre toutes ces énergies. C’est avec des engins en acier, fabriqués avec l’énergie du charbon et mus par celle du pétrole, que la plupart des matières premières (bois, produits agricoles, métaux) sont produites, extraites, transportées. En 2020, les trois quarts de l’acier mondial sont produits avec… 1 milliard de tonnes de charbon.

      Le charbon a donc toujours de beaux jours devant lui ?
      J.-B. F. Je ne suis pas prospectiviste. Mais la production de charbon s’est effectivement beaucoup modernisée depuis les années 1980. Il s’exporte maintenant massivement. Il est probable que sa plus forte croissance historique soit passée. Mais rappelons que la Chine brûle à elle seule autant de charbon que le monde entier en 1980, et que la part des énergies fossiles dans le mix énergétique mondial demeure supérieure à 80 % aujourd’hui.

      Alors, d’où vient cette notion de transition énergétique ? Quand est-elle lancée ?
      J.-B. F. Elle vient de la futurologie atomique américaine des années 1950-1970. Elle est inventée par un petit groupe de savants qui sont passés par le projet Manhattan et sont persuadés que le surgénérateur nucléaire2 est la clef de survie de l’humanité pour faire face à la fin des ressources fossiles. Ils sont très minoritaires, et n’imaginent pas une telle transition avant trois ou quatre siècles. Mais l’idée de transition se diffusera dans le sillage de la crise pétrolière.

      Un discours de Jimmy Carter va jouer un grand rôle dans la fortune de cette expression. Le 18 avril 1977, devant les caméras de télévision, il commente trois courbes représentant trois systèmes énergétiques se succédant harmonieusement, et explique en substance que la première transition a eu lieu il y a 200 ans, quand nous sommes passés du pétrole au charbon, la deuxième avec l’utilisation du pétrole et du gaz naturel, et que, face à la raréfaction du pétrole, il est temps d’accomplir une troisième transition, vers le solaire et les économies d’énergie. Le Président ancre ce récit dans une histoire fausse.

      Pourquoi ce concept de transition, infondé, a-t-il connu un tel succès ?
      J.-B. F. C’est une expression simple et très inclusive. Dans la décennie 1970, tout le monde peut s’y retrouver : partisans du nucléaire, défenseurs du solaire, mais aussi promoteurs du charbon. Le scandale est que cette notion a été recyclée pour penser le défi climatique. Rappelons que les atomistes américains des années 1960 imaginaient une transition en trois ou quatre siècles. Or, face au réchauffement, il faut accomplir cette transition en trois ou quatre décennies, alors que les énergies fossiles sont abondantes.

      La raison de ce transfert est facile à comprendre : à partir de la fin des années 1970, ce sont des économistes – William Nordhaus étant le plus célèbre – qui ont fait leur classe pendant la crise énergétique qui s’emparent de la question climatique. Ils vont utiliser les mêmes raisonnements pour penser des problèmes qui étaient pourtant très différents. Le réchauffement climatique est une tragédie de l’abondance, et non de la rareté.

      Les énergies renouvelables ont-elles un rôle à jouer ?
      J.-B. F. Oui, bien évidemment. Les énergies renouvelables, surtout le solaire, coûtent de moins en moins chères et ont la capacité d’être déployables rapidement. Bien sûr, elles dépendent des ressources fossiles (acier, ciment, silicium), mais cela représente relativement peu de dioxyde de carbone (CO2). La vraie question est : que fait-on ensuite de cette électricité décarbonée ? Si on l’utilise pour faire rouler des voitures de 2 tonnes qui ont besoin de ponts en acier et de routes en ciment, on réduit l’intensité carbone de l’économie, certes, mais on ne règle pas le problème des émissions de CO2 !

      Et quid des véhicules électriques ?
      J.-B. F. La voiture électrique est avant tout une affaire de souveraineté énergétique. La moitié du parc mondial roule en Chine, où les deux tiers de l’électricité sont produits à partir du charbon. Pour l’instant, la voiture électrique a eu pour effet de renforcer la part du charbon face au pétrole dans la mobilité mondiale.

      Les experts du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) ont-ils proposé des solutions technologiques ?
      J.-B. F. Quand on se plonge dans leurs rapports, on est surpris par la technophilie incroyable qui y règne. Dans leur dernier document, il est fait référence au train hyperloop d’Elon Musk, l’hydrogène est partout, on y parle bitcoin et intelligence artificielle, mais le sujet de la sobriété est tout à fait marginal.

      Les experts du groupe III3 ont imaginé des solutions éminemment contestables à propos de la capture et du stockage du CO2 (CCS)4, poussés par l’industrie fossile, les cimentiers et la sidérurgie. Après avoir souligné, en 2001, que l’électricité au charbon avec capture du carbone reviendrait plus cher que l’électricité nucléaire, ils présentent en 2005 les capacités de stockage (dans les sous-sols ou au fond des océans) comme gigantesques et finalement pas si onéreuses !

      Surgit ensuite une idée encore plus extravagante : pomper du CO2 de l’atmosphère grâce à la bioénergie avec capture et stockage du carbone (BECSC)5. Concrètement, on brûle du bois pour faire de l’électricité, puis on récupère le CO2 à la sortie des cheminées pour l’enfouir dans le sol. Dans le rapport de 2014, le Giec prévoit ainsi (dans ses scénarios médians) des émissions négatives à hauteur de 10 milliards de tonnes de CO2 par an grâce à la BECSC ! Pourtant, il faut savoir que la production mondiale de bois, c’est 4 milliards de mètres cubes seulement. Donc, il faudrait au moins tripler ou quadrupler la production mondiale pour produire le bois qui serait ensuite brûlé dans ces centrales électriques équipées de dispositifs de CCS !

      Ces « solutions » sont donc irréalistes ?
      J.-B. F. On pourrait s’en amuser si elles n’influençaient pas les décisions politiques internationales et ne détournaient pas l’attention des véritables mesures à prendre. Les états ont adopté en 2015 l’Accord de Paris, qui reposait sur des promesses technologiques intenables inscrites dans le rapport du Giec de 2014.

      Aucun scientifique ne met en doute ces fausses solutions ?
      J.-B. F. Si, bien sûr. En 2017, une association des académies des sciences européennes les critique explicitement, soulignant qu’elles risquent d’aboutir à l’attentisme. Alors, dans le rapport de 2022, les experts du Giec les limitent un peu et ne parlent plus « que », selon les scénarios, de 170 à 900 gigatonnes6 de CO2 qu’il faut stocker d’ici à 2100. Mais ça reste énorme !

      La technologie ne nous permettra pas de lutter contre le réchauffement ?
      J.-B. F. Mon livre n’est pas technophobe. Le progrès technologique existe et il a même été gigantesque au XXe siècle. Par exemple, le passage de la machine à vapeur au moteur électrique divise par 10 l’intensité carbone de la force mécanique dans l’entre-deux-guerres. De nos jours, les renouvelables divisent par 12 l’intensité carbone de l’électricité par rapport au gaz. Ce que l’on fait avec les renouvelables, c’est diminuer l’intensité carbone de l’économie. Ni plus ni moins.

      La politique climatique doit être fondée sur des techniques disponibles, bon marché – peu importe qu’elles soient anciennes ou récentes. Par exemple, il ne sert probablement à rien de rêver d’avions à hydrogène ou de fusion nucléaire à l’horizon 2050. En revanche, on sait déjà décarboner l’électricité et, dans ce domaine, on peut sans doute parler de transition énergétique. Mais l’électricité ne représente que 40 % des émissions.

      Quelles solutions proposez-vous ?
      J.-B. F. C’est la question clé à laquelle mon livre ne répond absolument pas. Quelle politique climatique mener une fois que l’on comprend que la neutralité carbone est en grande partie illusoire et qu’on peut ralentir le changement, mais sans doute pas l’arrêter ? Si l’on veut réduire les émissions de secteurs comme l’aviation, le ciment, l’acier, le plastique, l’agriculture, autant de secteurs très difficiles à décarboner, il faut parler de niveau de production et donc de répartition. Il faut distinguer entre le CO2 utile et le CO2 inutile. Il faut transformer les comportements, et il faut sans doute plus d’égalité pour que ces transformations très profondes soient socialement acceptables. ♦

      https://lejournal.cnrs.fr/articles/energies-le-mythe-de-la-transition
      #transition_énergétique #énergie #histoire

  • Terre : aux racines du capitalisme

    L’élément terre, dans son acception économique peut s’entendre de deux manières : la terre à exploiter, dont on peut tirer des ressources et du profit, et la Terre à préserver et à “sauver” d’un #capitalisme_prédateur qui l’épuise. L’idée de parler de capital Terre reprend deux notions incluses dans le terme Terre, à savoir comprendre la Terre à la fois comme notre planète et à la fois comme une ressource foncière. On ressent bien l’ambivalence dans l’expression capital Terre : la Terre est à la fois notre espace de vie, un espace commun et un bien précieux à préserver, mais elle est aussi une ressource dans laquelle puiser des richesses et dont on peut retirer des profits.
    Du 12ème au 19ème siècle : comment la croissance se fonde-t-elle sur le travail de la terre ?

    Selon Alessandro Stanziani, l’histoire économique de la terre comme capital commence au 12ème siècle, il précise "selon Fernand Braudel et Werner Sombart le capitalisme commence au 12ème siècle. Le capitalisme selon Braudel est identifié par le monopole, plutôt que la concurrence, et par la finance. Je complète cette définition avec la notion que les ressources sont uniquement à exploiter et non pas à préserver pour le futur et surtout que le travail doit être soumis à des contraintes sévères au long de plusieurs siècles. De ce point de vue-là, je n’associe pas, comme Marx, le travail et le capitalisme au travail salarié et au prolétaires, au contraire, j’associe les formes multiples du capitalisme aux formes différentes du travail contraint. D’où la possibilité d’inclure les régimes qui commencent au 12ème siècle sous le nom de capitalisme". Par ailleurs, du 12e au 19e, la hausse de la production agricole correspond à une augmentation des surfaces cultivées, en effet les déforestations n’ont cessé d’être présentes du néolithique au haut Moyen-Âge et elles s’accélèrent fortement entre le 8e et le 13e siècle. Cependant, même au 12ème siècle des contestations contre le déboisement et l’exploitation de la terre à des fins productives agraires existaient déjà, Alessandro Stanziani ajoute "les résistances sont importantes, plusieurs acteurs se rendent compte de la nécessité de préserver les forêts afin d’avoir de bonnes récoltes à côté, mais aussi pour des intérêts économiques, politiques et sociaux. Cette résistance est celle d’un capitalisme que j’appelle foncier, agraire et quasi industriel, qui va du 12ème au 19ème siècle".
    De 1870 à 1970 : vers un modèle productiviste et une surexploitation de l’élément terre

    Pendant ces décennies, l’exploitation des ressources de la terre et le système capitaliste connaissent des changements majeurs, marqués par une intensification remarquable. Alessandro Stanziani précise "dans l’agriculture et dans le pays du Nord, la mécanisation est très lente, mais on constate un changement significatif avec les semences. Après la crise de 29, aux Etats-Unis, on s’intéresse aux semences hybrides. Il y a des investissements massifs, on donne des semences hybrides aux fermiers américains et ensuite, on vend ces mêmes semences à l’Europe avec l’aide du plan Marshal et on impose aux agriculteurs européens d’avoir recours aux semences hybrides. L’avantage des semences hybrides, ce sont des rendements faramineux, ça commence par le maïs, la plante des plaines américaines, et de fait on arrive à nourrir de plus en plus de population à l’échelle mondiale. L’inconvénient c’est que les semences hybrides ont une durée de vie très courte, de un ou deux ans, pour qu’elles soient rentables il faut beaucoup de fertilisants chimiques. Les producteurs de semences produisent aussi le fertilisants chimiques, ils sont gagnants des deux côtés. Par ailleurs, ces producteurs ont le monopole et l’exclusivité de ce marché. Enfin, les rendements des hybrides commencent à décroître après 20 ans".
    De 1970 à 2050 : spéculer sur le capital Terre : la terre face à la libéralisation des marchés

    Les bouleversements majeurs ont lieu pendant les années 1970 : la fin du système de Bretton Woods, les chocs pétroliers, le déclin du keynésianisme et de l’État social en Occident et le début des réformes en Chine.
    Par ailleurs, la spéculation sur les produits agricoles s’élargit aux terres elles-mêmes : il ne s’agit pas seulement d’échanger des produits virtuels dont la plupart ne verront jamais le jour, mais de contrôler ces flux hypothétiques à l’échelle mondiale. Selon Alessandro Stanziani "avec le néolibéralisme des années 80 et surtout dans les années 1990, on assiste à la libéralisation totale des Bourses de marchandises, avec les spéculations sur les matières premières et sur le blé, et on arrive jusqu’aux crises de 2008/2010 et jusqu’au crise de nos jours sur la vie chère. C’est-à-dire que c’est une pénurie qui est provoquée, non pas par de mauvaises récoltes, mais surtout par les spéculations".

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/terre-aux-racines-du-capitalisme-8719942

    #capitalisme #terre #agriculture #histoire #économie_capitaliste #terres #Alessandro_Stanziani #capital_terre #spéculation #exploitation #foncier #ressource_foncière #à_écouter #ressources_pédagogiques #croissance #déforestation #forêts #déboisement #mécanisation #semences #semences_hybrides #plan_Marshal #maïs #rendements #industrie_agro-alimentaire #fertilisants #néolibéralisme #blé #matières_premières #pénurie #podcast #audio

    • Capital Terre. Une histoire longue du monde d’après (XIIe-XXIe siècle)

      Et si le cœur du problème de la faim dans le monde n’était pas la hausse de la population mais plutôt les modalités de la production agricole et surtout de la distribution au profit des plus riches ? Dans cet essai engagé pour des sociétés plus solidaires et plus justes, qui retrace l’histoire longue du capitalisme, Alessandro Stanziani propose de renouer avec le contrat social cher à J.-J. Rousseau et de faire de la démocratie, de l’égalité sociale et de l’environnement les trois piliers du monde d’après. Défenseur d’une politique publique conciliant croissance économique et démographique, droits du travail, lutte contre les inégalités et protection de la planète, il plaide pour la fin des spéculations sur les denrées alimentaires, de l’accaparement des terres et de la propriété industrielle, en particulier sur les semences, véritable « patrimoine de l’humanité », et prône une refonte plus égalitaire de la fiscalité et des finances publiques.
      Une pensée économique globale, qui se préoccupe autant de l’avenir de l’Asie et de l’Afrique que de celui de l’Europe, par un brillant historien reconnu à l’international et fort de décennies de recherches sur le terrain dans le monde entier.

      https://www.payot-rivages.fr/payot/livre/capital-terre-9782228929257
      #livre

  • Permessi in mano straniera : il vero #business è rivenderli

    La crescita della domanda delle materie prime critiche ha rimesso le miniere al centro dell’agenda politica italiana. Ma sono compagnie extra-UE a fare da protagoniste in questa rinascita perché la chiusura delle miniere negli anni ’80 ha spento l’imprenditoria mineraria italiana.

    “Nelle #Valli_di_Lanzo l’attività mineraria risale al XVIII secolo, quando il cobalto era utilizzato per colorare di blu tessuti e ceramiche. Poi l’estrazione non era più conveniente e le miniere sono state chiuse negli anni ‘20” dice a IE Domenico Bertino, fondatore del museo minerario di Usseglio, Piemonte. Adesso, grazie a una società australiana, i minatori potrebbero tornare a ripopolare le vette alpine.

    Secondo Ispra quasi tutti i 3015 siti attivi in Italia dal 1870 sono dismessi o abbandonati. Ma la crescita della domanda di materie prime critiche (CRM) ha fatto tornare le miniere al centro dell’agenda politica.

    “Abbiamo 16 materie critiche in miniere che sono state chiuse oltre trent’anni fa. Era più facile far fare l’estrazione di cobalto in Congo, farlo lavorare in Cina e portarlo in Italia” ha detto a luglio il ministro delle imprese e del made in Italy Adolfo Urso, ribadendo la volontà del governo di riaprire le miniere. Oltre al cobalto in Piemonte, ci sono progetti per la ricerca di piombo e zinco in Lombardia, di litio nel Lazio e di antimonio in Toscana.

    I protagonisti di questa “rinascita mineraria”, che dovrebbe rendere l’Italia meno dipendente da paesi terzi, sono compagnie canadesi e australiane. Dei 20 permessi di esplorazione attivi, solo uno è intestato a una società italiana (Enel Green Power).

    La ragione è che “le scelte politiche fatte negli anni ‘80 hanno portato alla chiusura delle miniere. E così la nostra imprenditoria mineraria si è spenta e la nuova generazione ha perso il know how” spiega Andrea Dini, ricercatore del CNR.

    La maggior parte sono junior miner, società quotate in borsa il cui obiettivo è ottenere i permessi e vendere l’eventuale scoperta del giacimento a una compagnia mineraria più grande. “Spesso quando la società mineraria dichiara di aver scoperto il deposito più grande del mondo, il più ricco, il più puro, cerca solo di attrarre investitori e far decollare il valore del titolo” spiega Alberto Valz Gris, geografo ed esperto di CRM del Politecnico di Torino, promotore di una carta interattiva (http://frontieredellatransizione.it) che raccoglie i permessi di ricerca mineraria per CRM in Italia.

    Tra le junior miner presenti in Italia spicca Altamin, società mineraria australiana che nel 2018 ha ottenuto i primi permessi di esplorazione (https://va.mite.gov.it/it-IT/Oggetti/Info/1760) per riaprire le miniere di cobalto di Usseglio e Balme, in Piemonte. “Finora sono state effettuate solo analisi in laboratorio per capire la qualità e quantità del cobalto” spiega Claudio Balagna, appassionato di mineralogia che ha accompagnato in alta quota gli esperti di Altamin. “Ma da allora non abbiamo saputo più nulla", dice a IE Giuseppe Bona, assessore all’ambiente di Usseglio, favorevole a una riapertura delle miniere che potrebbe creare lavoro e attirare giovani in una comunità sempre più spopolata.

    A Balme, invece, si teme che l’estrazione possa inquinare le falde acquifere. “Non c’è stato alcun dialogo con Altamin, quindi è difficile valutare quali possano essere i risvolti eventualmente positivi" lamenta Giovanni Castagneri, sindaco di Balme, comune che nel 2020 ha ribadito l’opposizione “a qualsiasi ricerca mineraria che interessi il suolo e il sottosuolo”.

    “Le comunità locali sono prive delle risorse tecniche ed economiche per far sentire la propria voce” spiega Alberto Valz Gris.

    Per il governo Meloni la corsa alla riapertura delle miniere è una priorità, con la produzione industriale italiana che dipende per €564 miliardi di euro (un terzo del PIL nel 2021) dall’importazione di materie critiche extra-UE. Tuttavia, a oggi, non c’è una sola miniera di CRM operativa in Italia.

    Nel riciclo dei rifiuti le aziende italiane sono già molto forti. L’idea è proprio di puntare sull’urban mining, l’estrazione di materie critiche dai rifiuti, soprattutto elettronici, ricchi di cobalto, rame e terra rare. Ma, in molti casi, la raccolta e il riciclo di queste materie è oggi ben al di sotto dell’1%. “Un tasso di raccolta molto basso, volumi ridotti e mancanza di tecnologie appropriate non hanno permesso lo sviluppo di una filiera del riciclaggio delle materie critiche”, dice Claudia Brunori, vicedirettrice per l’economia circolare di ENEA, l’Agenzia nazionale per le nuove tecnologie, l’energia e lo sviluppo economico sostenibile. Oltre alla mancanza di fondi: nel PNRR non sono previsti investimenti per le materie prime critiche.

    Un’altra strategia è estrarre CRM dalle discariche minerarie. Il Dlgs 117/08 fornisce indicazioni sulla gestione dei rifiuti delle miniere attive, ma non fornisce riferimenti per gli scarti estrattivi abbandonati. Così “tali depositi sono ancora ritenuti rifiuti e non possono essere considerati nuovi giacimenti da cui riciclare le materie” denuncia l’ISPRA (Istituto superiore per la protezione e la ricerca ambientale), che chiede una modifica normativa che consenta il recupero delle risorse minerarie.

    https://www.investigate-europe.eu/it/posts/permessi-in-mano-straniera-il-vero-business-rivenderli
    #extractivisme #Alpes #permis #mines #minières #Italie #terres_rares #matières_premières_critiques #transition_énergétique #Alberto_Valz_Gris #permis_d'exploration #Usseglio #Piémont #Adolfo_Urso #plomb #zinc #Lombardie #Latium #Toscane #antimoine #Enel_Green_Power #junior_miner #Altamin #Australie #Balme #urban_mining #recyclage #économie_circulaire #déchets

    –—

    ajouté à la métaliste sur l’#extraction de #terres_rares dans les #Alpes :
    https://seenthis.net/messages/1013289

  • Mine games

    Rare earths are to the 21st century what coal was to the 19th and oil to the 20th. Our everyday electronics - and Europe’s climate goals - depend on them. But China controls almost all supply chains. Can Europe free itself from this dependence?

    Your mobile has them. Your laptop as well. They are likely in the toothbrush you used this morning. E-scooters are full of them. So are electric cars.

    Rare earths and other minerals are essential for wind and solar power installations, defence, and for the gadgets that we now rely upon in our daily lives. The demand for critical raw materials is going to skyrocket in the years ahead, far beyond current supply.

    There is no “climate neutrality” ahead without them. This implies more mining than ever before. “We, eight billion of us, will use more metal than the 108 billion people who lived before us,” according to Guillaume Pitrón, author of the book Rare Metals War.

    The political headache is that Europe depends heavily on imports of these critical raw materials, primarily from China.

    China controls EU supply of critical raw materials
    The trade in rare earths and other materials is controlled by the Chinese. Russia and Chile are significant suppliers as are some European nations.

    European dependency on Russian gas was a wake-up call last year, when Russia invaded Ukraine. Now the EU urgently wants to reduce the similar dependency on Chinese supplies of rare earth elements, lithium, bismuth, magnesium and a series of other critical minerals.

    European consumers have for decades not had to be much concerned with the environmental destruction and pollution that often comes with mining. Now, governments haste to revive mining across the continent – and to fast-track processes that otherwise may take a decade or more.

    https://www.youtube.com/watch?v=qzw9-1G9Sok

    Investigate Europe reporters have unearthed what lies beneath these “green mining” ambitions. We have broken into a mountain of dilemmas, challenges and questions that come with Europe’s pressing need for minerals.

    To what extent will Europe be practically able to revive a mining industry that it has long abandoned? How can governments secure social acceptance for new mines if they are to fast-track permit processes? What kind of autonomy can come in an industry dominated by global companies?

    https://www.investigate-europe.eu/themes/investigations/critical-raw-materials-mining-europe
    #minières #mines #extractivisme #Europe #Chine #dépendance #indépendance #terres_rares #neutralité_climatique #transition_énergétique #importation #lithium #bismuth #magnésium #green_mining #industrie_minière #autonomie

    disponible en plusieurs langues, français notamment :
    https://www.investigate-europe.eu/fr/themes/investigations/critical-raw-materials-mining-europe

    • Écocides et #paradis_fiscaux : révélations sur les dérives du soutien européen à l’industrie minière

      Pour développer l’industrie des #batteries_électriques ou des éoliennes, l’Union européenne finance des entreprises minières au travers du programme #Horizon. Une partie de ces fonds soutient des sociétés impliquées dans des catastrophes environnementales, voire, pour l’une d’entre elles, domiciliée dans un paradis fiscal.

      C’est une immense tâche blanche, un entrelacs de tuyaux et de cuves, au milieu d’un écrin vert-bleu, à l’embouchure du fleuve Amazone, au #Brésil. Ici, l’usine de la société minière française #Imerys a laissé un souvenir amer aux communautés autochtones. En 2007, plusieurs dizaines de familles ont été contraintes à l’exil lorsque le leader mondial de la production de minéraux industriels a déversé 200 000 m3 de #déchets_toxiques dans les rivières alentour. #Cadmium, #baryum et autres #métaux_lourds cancérigènes se sont déposés au fond des cours d’eau dans lesquels puisent les populations, aux confins de la plus grande forêt pluviale du monde.

      De l’autre côté du globe, dans le #désert_de_Gobi, en #Mongolie, #Orano, (ex-#Areva), exploite des gisements d’#uranium. Cette fois, le géant français du combustible nucléaire est suspecté d’avoir injecté dans le sol « d’énormes quantités d’#acide_sulfurique », contaminant les #eaux_souterraines au #strontium — mortel à très haute dose — et à l’#arsenic, selon une enquête judiciaire mongole. « Moutons, chèvres, chevaux qui naissent handicapés, eau souterraine polluée, femmes qui font des fausses couches… » : l’association locale #Eviin_huch_eh_nutgiin_toloo, interrogée récemment par Reporterre, énumère les conséquences sanitaires potentiellement désastreuses de l’exploitation d’Orano.

      Plus loin au sud, près de l’équateur, l’île d’#Halmahera, en #Indonésie, fait face aux effets dévastateurs de l’exploitation récente de #nickel, à #Weda_Bay, en partie détenue par le groupe métallurgique et minier français, #Eramet. Là aussi, les terres sont détruites, et les populations autochtones déplacées. Sa filiale calédonienne, la société #Le_Nickel, est à l’origine d’une importante #pollution au #fuel constatée en avril 2023. Environ 6 000 litres de combustible se seraient échappés d’une conduite percée.

      Ces trois sociétés françaises n’ont pas pour seul point commun d’être impliquées dans des scandales environnementaux : elles bénéficient des largesses du programme européen Horizon. D’après notre enquête, la société française Eramet a touché 1,9 million d’euros, entre 2019 et 2022. Quant à Orano et Imerys, elles ont reçu respectivement 2,3 millions d’euros et 312 637 euros du programme européen. Parmi les prérequis indispensables à l’obtention de ces #subventions, figurait celui de « ne pas nuire à l’un des six objectifs environnementaux » présent au cœur du “#green_deal” européen, le #pacte_vert, en français. À commencer par la prévention contre les #risques_de_pollution ou la protection des écosystèmes. Sollicitée, la Commission européenne se contente de déclarer qu’elle accorde « une attention approfondie » aux enjeux environnementaux.

      Quinze sociétés impliquées dans des crimes environnementaux

      Doté d’un budget de 95 milliards d’euros sur sept ans (2021-2027), le programme européen Horizon, initié en 2014, et financé en grande partie sur fonds publics, a pour mission de soutenir la #recherche et l’innovation au sein de l’Union européenne. Avec l’émergence des besoins en batteries électriques, en #éoliennes et autres industries liées au secteur de la #transition_énergétique, ce soutien se dirige en grande partie vers le secteur minier, d’après notre analyse des données mises en ligne par l’UE. Avec une nette accélération ces dernières années : sur les 667 millions d’euros réservés à ce type de projets, entre 2014 et 2023, près de la moitié ont été attribués à partir de 2020.

      Projets financés par le programme de l’UE Horizon, en lien avec la loi sur les #matières_premières_critiques

      Depuis 2014, Horizon a financé 95 projets de ce type. Ceux-ci ont reçu 667 millions d’euros distribués entre 1 043 organisations. Les 67 présentés dans le graphique ont reçu plus de 2 millions d’euros.

      En plus des trois entreprises françaises ayant bénéficié du fonds Horizon malgré leur lien avec des pollutions environnementales, Disclose et Investigate Europe ont identifié douze autres sociétés problématiques. À chaque fois, celles-ci ont été impliquées dans des catastrophes environnementales. Leurs liens avec lesdites catastrophes sont accessibles en quelques clics sur Internet.

      Un exemple : l’entreprise minière suédoise #Boliden. Elle a perçu près de 2,7 millions d’euros dans le cadre de huit appels à projets Horizon. La dernière fois, c’était en novembre 2019. Or, cette société spécialisée dans la production de #zinc et de #cuivre a un lourd passif en matière de dégradation des écosystèmes. En 1998, près de Séville, en Espagne, le barrage d’un bassin de décantation d’une mine de #pyrite lui appartenant s’est rompu, déversant des eaux polluées sur plus de 40 km de terres agricoles. Dans les années 1980, Boliden a également été épinglé pour avoir exporté des milliers de tonnes de #déchets_miniers depuis la Suède vers #Arica, au nord du #Chili. Les #boues_toxiques d’arsenic liées au stockage sont pointées par des locaux pour être vraisemblablement à l’origine de #cancers et #maladies chez des milliers de résidents, lui valant d’être un cas d’étude dans un document du Parlement européen.

      Défaillances en chaîne

      Les données analysées réservent d’autres surprises. Alors que l’Union européenne ne cesse de défendre la nécessité de réduire sa dépendance vis-à-vis de la Chine et de la Russie, surtout depuis la pandémie et le conflit russo-ukrainien, le #programme_Horizon semble souffrir de quelques défaillances. Et pour cause, selon l’examen détaillé des entreprises bénéficiaires, il est arrivé à au moins trois reprises que les fonds versés par l’UE terminent soit sur le compte en banque d’un acteur étatique chinois, soit sur celui d’oligarques russes.

      Dans le premier cas, il s’agit du dossier déposé par la #Soil_Machine_Dynamics, une entreprise britannique leader dans le domaine de la robotique sous-marine. Celle-ci a reçu 3,53 millions d’euros du budget d’Horizon pour un projet baptisé #Vamos. Il visait à développer une technique permettant d’extraire des minéraux à des profondeurs jusque-là inaccessibles. Le projet a démarré le 1er février 2015. Mais, cinq jours plus tard, le fonds d’investissement privé Inflexion a cédé l’entreprise à #Zhuzhou_CSR_Times_Electric, dont l’actionnaire majoritaire est l’État chinois. Le projet Vamos, passé sous pavillon chinois, est resté actif jusqu’au 31 janvier 2019.

      Le second cas fait référence à la société #Aughinish_Alumina. L’entreprise basée en Irlande raffine la #bauxite, la roche dont est extraite l’#alumine utilisée pour produire l’#aluminium. En 2018, elle a reçu 563 500 euros en provenance de l’Union européenne pour sa participation à un projet visant à étudier la réutilisation des résidus de bauxite. Or, cette entreprise minière appartient depuis 2007 à #Rusal, un groupe russe qui domine le secteur et dont l’un des principaux actionnaires n’est autre qu’#Oleg_Deripaska. Réputé proche de Vladimir Poutine, ce dernier figure sur la liste des oligarques russes sanctionnés par le Royaume-Uni et les États-Unis… et l’Europe.

      Des fonds publics européens atterrissent dans un paradis fiscal

      Un autre cas intrigue, celui de la société #Lancaster_Exploration_Limited, spécialisée dans l’exploration de terres rares. L’entreprise a participé à un projet Horizon qui promettait de développer de nouveaux « modèles d’exploration pour les provinces alcalines et de carbonatite » destinés à l’industrie européenne de haute technologie. Pour ce projet, elle a perçu plus de 168 000 euros de la part de l’Europe, alors que son siège social est situé dans les #îles_Vierges britanniques, paradis fiscal notoirement connu. Interrogé sur ce cas précis, un porte-parole de la Commission européenne explique que l’institution peut mettre fin à un contrat la liant avec une société qui se serait rendue coupable d’infractions avec ses « obligations fiscales » ou qui aurait été « créé sous une juridiction différente, avec l’intention de contourner les obligations fiscales, sociales ou autres obligations légales dans le pays d’origine. »

      Reste à savoir si l’Union européenne prendra des mesures contre des sociétés ne respectant manifestement pas leurs obligations. D’autant plus que l’acquisition d’une souveraineté dans le secteur des #matières_premières critiques et des terres rares est l’une des priorités affichées par l’exécutif européen. La Commission a d’ailleurs présenté, en mars dernier, le #Critical_Raw_Materials_Act, consistant à relancer l’activité minière sur le continent. Grâce, notamment, aux centaines de millions d’euros que le programme Horizon destine aux professionnels du secteur.

      https://www.investigate-europe.eu/fr/posts/eu-horizon-scheme-millions-funding-mining-companies-environmental
      #paradis_fiscal #fisc #évasion_fiscale #écocide

  • Le climat, la gauche et l’histoire | #Jean-Baptiste_Fressoz
    https://legrandcontinent.eu/fr/2023/11/03/le-climat-la-gauche-et-lhistoire

    Plusieurs auteurs, cités par Paul Magnette ont cru discerner dans l’histoire de l’énergie le capitalisme dans ses basses œuvres : la machine à vapeur aurait simplement servi à échapper à la contrainte de localisation et à exploiter une main d’oeuvre urbaine et abondante (Andreas Malm) ; le pétrole aurait eu pour effet, voire fonction, de contourner les mineurs et leurs syndicats grâce à sa fluidité (Timothy Mitchell). Ces récits séduisants ne résistent pas à l’analyse : le charbon sert surtout à produire de la chaleur. En Angleterre son extraction commence quand le prix du bois de feu augmente, tirée par la croissance urbaine — la machine à vapeur est davantage un symbole que la cause de l’Anthropocène. Quant au pétrole, il ne contourne pas les mineurs, tout simplement parce qu’il ne remplace pas le charbon ; il sert avant tout à faire avancer des voitures qui pour leur fabrication consomment énormément de charbon ; en outre, la baisse du nombre des mineurs n’est pas causée par le pétrole mais par le progrès technologique dans les mines. L’attrait de l’histoire « politique » de l’énergie qui est aussi son défaut, est qu’elle tend à présenter le changement climatique comme l’effet secondaire d’une entreprise de domination capitaliste. Cette historiographie, apparemment radicale mais rassurante pour la gauche anti-capitaliste, sous-estime l’énormité du défi climatique : sortir du carbone sera autrement plus difficile que sortir du capitalisme, une condition tout aussi nécessaire qu’insuffisante.

    [...]

    Le réchauffement est un phénomène historique, mais comme il fait la somme de l’ensemble de l’agir humain sur la planète il échappe largement à l’histoire. S’il est assez facile pour un historien d’expliquer le réchauffement, identifier ce qui pourrait l’arrêter dépasse l’imagination historique.

    Face au titan climatique, les sciences sociales proposent souvent des « solutions » sans avoir jaugé la profondeur du problème. Les verrous techniques sont écartés, laissés à l’expertise du groupe III du GIEC. On fait comme si la décarbonation était un simple problème d’investissements, un problème d’ingénierie sociale, un problème de volonté politique. [...]

    Dans les années 1990-2000, beaucoup d’énergie a été dépensée pour débattre des avantages respectifs de la taxe carbone ou des droits à polluer, alors qu’il aurait fallu expliquer qu’on ne saurait décarboner l’acier, le ciment, l’aviation etc. et donc convenir des moyens démocratiques et équitables d’en réduire drastiquement la consommation. Il en découlerait une redéfinition du débat climatique centré sur la répartition juste et efficace des biens matériels à l’échelle mondiale : la grande question de la gauche depuis son origine et le trait d’union qui relie le socialisme à l’éco-socialisme.

    • Contrairement à l’expression de « crise environnementale » qui sous-entendait une épreuve brève dont l’issue serait imminente, l’Anthropocène désigne un point de non-retour. Ce que nous vivons n’est pas une simple crise mais une bifurcation à l’échelle de l’histoire géologique de la Terre. Le développement économique des derniers siècles modifiera l’environnement de ceux à avenir. Nous ne nous sortirons pas de l’Anthropocène et nous ne connaîtrons plus les climats de l’Holocène. Ce qui a été moins compris — et la faute en revient à une vision aberrante de l’histoire matérielle — est que cette irréversibilité s’appliquait presque autant à l’anthropos qu’à la planète. L’Anthropocène désigne une double irréversibilité, une double accumulation, un cumul de cumuls : non seulement les flux de matière s’empilent dans les différents compartiments du système-terre, mais les flux matériels anthropogéniques suivent eux-aussi une logique additive.

      Toute discussion sérieuse sur les questions environnementales devrait partir du constat historique quelque peu inquiétant que les innovations technologiques n’ont, jusqu’à présent, jamais fait disparaître un flux de consommation matérielle. Au cours du XXe siècle, dans le monde, l’éventail des matières premières s’est élargi et chacune a été consommée en quantité croissante [3]. Les processus de substitution technologiques ont donc pour l’instant toujours été compensés par l’élargissement des marchés, par les effets rebonds et par les réorientations d’usage.

      [3] Sur les soixante-dix matières premières principales, Christopher L. Magee et Tessaleno C. Devezas ne recensent que six qui ont décru depuis 1960 : l’amiante, le mercure, le beryllium, le tellurium, le thallium et la laine de mouton, auxquels on pourrait ajouter l’huile de baleine.

  • #Titane, #lithium : l’#Europe ouvre « un open bar pour l’#industrie_minière »

    Plutôt que l’instrument d’une transition « verte », la future législation européenne sur les #matières_premières_critiques est une offrande aux industries polluantes, dénonce Laura Verheecke de l’Observatoire des multinationales.

    Reporterre — En quoi consiste la législation européenne sur les matières premières critiques, actuellement discutée ?

    Lora Verheecke — Cette #loi est pensée par la #Commission_européenne pour permettre à l’#Union_européenne (#UE) un approvisionnement plus conséquent et plus sûr en #minerais indispensables pour la transition « verte ». Ces minerais serviront à fabriquer les #capteurs, les #moteurs ou encore les #batteries des #voitures_électroniques, des rotors d’#éoliennes, des #panneaux_photovoltaïques

    En pratique, le texte prévoit un #soutien_financier pour ouvrir des mines hors de l’UE, avec très peu de contraintes pour les entreprises en termes de respect de l’environnement et des populations locales. Il permet aussi d’ouvrir plus de mines en Europe à travers le principe d’« #intérêt_stratégique_supérieur », c’est-à-dire en limitant les motifs d’objection juridique des populations, en reléguant les lois environnementales et démocratiques. Par conséquent, on consultera moins, plus vite et on pourra plus difficilement remettre en cause l’ouverture d’une mine.

    Le processus législatif en cours est très rapide — « le plus rapide de l’histoire » selon certains journalistes — et le brouillon de loi publié en mars par la Commission est aujourd’hui au stade final de discussions et compromis entre le Parlement européen et le Conseil, c’est-à-dire les États membres. Les deux institutions ont déjà arrêté leurs positions.

    Une fois leurs discussions achevées, la loi n’aura plus qu’à être votée par les États membres et le Parlement et elle deviendra loi partout dans l’Union européenne. Si le processus est si rapide, c’est qu’il y a encore peu d’attention publique et médiatique sur ce projet de loi et le soutien est large — mais pas entier — du côté des capitales européennes et des députés européens.

    Dans le rapport Du sang sur le Green Deal publié avec Corporate Europe Observatory (https://multinationales.org/fr/enquetes/du-sang-sur-le-pacte-vert/du-sang-sur-le-green-deal-comment-l-ue-sous-pretexte-d-action-clima), vous montrez comment cette loi, présentée comme favorable au climat, profite largement à l’industrie minière, pourtant « intrinsèquement sale ».

    On peut même affirmer que cette loi s’est transformée en un #open_bar pour l’industrie minière, sale, et celle de l’#armement, mortifère. Elle est le fruit d’un #lobbying soutenu et de longue date, notamment au sein d’un groupe de travail de la Commission, actif depuis les années 80 et qui compte comme membres de nombreuses entreprises telles que #Volkswagen, #Umicore — spécialisé dans la technologie des matériaux —, #Nokia et #Boliden, une entreprise minière suédoise.

    Sous couvert de garantir la #transition_écologique, les conséquences de cette loi seront donc potentiellement désastreuses : une mine est et sera toujours sale. En ouvrir une requiert de grandes quantités de terres, peut entraîner le déplacement de communautés.

    L’extraction des minerais de la terre implique une grande #pollution de l’#eau, des #sols et de l’#air, car cette extraction utilise de nombreux produits chimiques. C’est un réel #danger pour la #biodiversité : en 2019, 79 % de l’extraction mondiale de minerais métalliques provenait de cinq des six biomes les plus riches en espèces, dont les écosystèmes tropicaux forestiers.

    En #France, l’ouverture de la plus grande mine de lithium est prévue pour 2028, dans l’#Allier. Des organisations locales s’y opposent déjà pour éviter la pollution de leurs terres et leurs rivières et le secteur de la mine a été placé sous surveillance comme « site avec une contestation susceptible de se radicaliser à court terme » par les services du ministère de l’Intérieur.

    Parmi les groupes de pression, on retrouve des secteurs de la défense et de l’aéronautique, comme #Airbus ou #Safran. Comment ont-ils influé sur le processus de décision ?

    Airbus et Safran, mais aussi #Dassault, ont rencontré de nombreux décideurs politiques européens. Ils sont également membres de nombreuses associations d’entreprises et paient des agences de lobbying comme #Avisa_Partners pour supplémenter leur lobbying.

    De plus, les portes tournent [1] entre les entreprises de l’armement et l’Union européenne. En 2020, par exemple, l’ex-président de l’Agence européenne de défense est devenu lobbyiste en chef d’Airbus.

    Ces rencontres, études et événements et ces aller-retours leur ont permis de se faire des alliés au sein même de la Commission, au Parlement européen et dans de nombreux États membres. La Commission a même cofinancé une alliance sur les #matériaux_rares — dont #France_Industrie est membre — et créé un groupe d’experts dans lesquels les industriels de l’armement ont voix au chapitre.

    Tout ceci a mené à deux victoires majeures : premièrement, on ouvrira des mines dans le futur à la fois pour les #voitures_électriques, mais aussi pour des #missiles ; et deuxièmement l’extraction de certains minerais sera aidée financièrement et politiquement pour l’industrie de la défense, comme le titane.

    Ce #minerai est aujourd’hui classé stratégique, d’après l’UE, suite au lobbying de l’industrie de la #défense et de l’#aérospatial. Alors même qu’il n’est pas utile à la transition « verte ». Cette catégorisation était une des demandes du PDG de Safran auprès du vice-président de la Commission lors de leur rencontre en mai 2023.

    Pour résumer, la #défense et l’#aéronautique ont tout fait, donc, pour s’assurer que les métaux qui les intéressaient bénéficieraient du même soutien public et des mêmes déréglementations environnementales que ceux qui sont réellement utiles aux transitions climatique et numérique.

    Quel rôle a joué la France et le commissaire français #Thierry_Breton dans ce processus ?

    Les deux ont été des alliés très importants des industriels. M. Breton n’a pas hésité à se faire la voix de l’industrie de l’armement, en clamant notamment en mars 2023, lorsque la Commission européenne dévoilait le projet de loi : « Pas de batteries sans lithium, pas d’éoliennes sans terres rares, pas de munitions sans #tungstène… » Le #lobby européen des entreprises de la défense dira de M. Breton, en novembre 2021 : « Nous sommes très fiers et heureux de vous considérer comme "notre commissaire" ».

    C’est de ce même lobby que la France copiera d’ailleurs une partie de ses positions au Conseil — l’institution au sein de laquelle les États membres débattent. La France a d’ailleurs créé en novembre 2022 un #Observatoire_français_des_ressources_minérales_pour_les_filières_industrielles (#Ofremi), qui a d’ailleurs placé, dès son lancement, les difficultés d’approvisionnement du secteur de la défense au rang de ses priorités. L’Ofremi tient par exemple un discours similaire au PDG de Safran sur le titane.

    Est-il encore possible de sauver ce texte ?

    Ce texte est principalement débattu aujourd’hui dans la bulle européenne d’experts, avec des discussions qui se limitent à des considérations techniques. Il est temps d’avoir une discussion politique pour savoir sous quelles conditions ouvrir des mines et quelle doit être l’utilisation des minerais et terres rares. Nous devons nous poser la question des priorités d’usage. Ouvre-t-on des mines pour des 4x4 électriques lourds, pour des bus électriques ou pour des drones ?

    Il est nécessaire d’avoir une discussion politique sur les conséquences environnementales de notre transition dite verte. Aujourd’hui, ces discussions sont trop absentes du débat public européen. La loi ne mentionne pas la question de notre boulimie de consommation, d’une limite à notre demande en matériaux rares. Sous couvert de #Green_Deal et de transition « verte », on met de côté les nouvelles pollutions, émissions et atteintes aux droits de l’homme à venir.

    Notre chance, ce sont les élections européennes qui approchent : les députés seront de plus en plus réceptifs aux demandes des citoyens européens sur leur position sur ce texte. Certains États membres posent timidement la question de la réduction de notre consommation en minerais et terres rares, comme la Belgique, qui prend la présidence du Conseil en janvier. On peut pousser nos gouvernements à avoir cette position : plutôt qu’ouvrir des mines, ouvrons le débat sur la consommation de minerais.

    https://reporterre.net/Titane-lithium-l-Union-europeenne-ouvre-un-open-bar-pour-l-industrie-min
    #terres_rares #transition_énergétique #énergie #mines #extractivisme

  • Écocides et paradis fiscaux : révélations sur les dérives du soutien européen à l’industrie minière
    https://disclose.ngo/fr/article/ecocides-et-paradis-fiscaux-revelations-sur-les-derives-du-soutien-europee

    Pour développer l’industrie des batteries électriques ou des éoliennes, l’Union européenne finance des entreprises minières au travers du programme Horizon. Une partie de ces fonds soutient des sociétés impliquées dans des catastrophes environnementales, voire, pour l’une d’entre elles, domiciliée dans un paradis fiscal. Lire l’article

  • Ukraine : Airbus et Safran participent indirectement à l’effort de guerre de la Russie
    https://disclose.ngo/fr/article/ukraine-airbus-et-safran-participent-indirectement-a-leffort-de-guerre-rus

    Malgré l’invasion de l’Ukraine, les entreprises européennes sont autorisées à acheter à la Russie des matériaux « critiques » comme le titane, l’aluminium ou le nickel. Des géants de l’aéronautique comme Airbus et Safran en profitent, au risque d’alimenter la machine de guerre du Kremlin et d’enrichir des oligarques pourtant sous sanctions financières. Lire l’article

  • Au Niger, un putsch de brut

    En juillet 2023, le #Niger a vécu son cinquième #coup_d’État depuis son indépendance en 1960. En cause, une importante #manne_pétrolière qui attise le jeu de chaises musicales au sommet.

    Comme il est de coutume au cœur de l’été, les chaînes d’info en continu n’avaient pas grand-chose de croustillant à se mettre sous la dent. Résultat : on a beaucoup glosé sur le coup d’État au Niger, perpétré le 26 juillet par une partie de l’armée contre le président Mohamed Bazoum.

    On a logiquement entendu beaucoup de bêtises. Et à ce jeu, il faut reconnaître à Emmanuel Macron un vrai talent. À plusieurs reprises, le boss de l’Élysée a fait le lien entre le renversement de Bazoum et son « ethnie minoritaire » (28 août). Selon lui, il aurait été victime « de règlements de comptes largement ethniques » (24 septembre). C’est vrai, Bazoum est un Arabe et cette communauté ne pèse pas lourd dans ce pays, ni sur le plan démographique, ni sur le plan politique. Ça ne l’a pas empêché d’être (mal) élu en février 2021, à l’issue d’un scrutin entaché de nombreuses irrégularités et contesté par l’opposition. Et ce n’est certainement pas ça qui explique pourquoi le général Abdourahamane Tchiani, qui avait la charge de sa sécurité en tant que chef de la garde présidentielle, l’a trahi.

    En réalité, il y a d’autres raisons qui expliquent ce putsch, le sixième en trois ans en Afrique de l’Ouest. La junte au pouvoir a évoqué la dégradation de la situation sécuritaire dans la « région des trois frontières1 » et la multiplication des scandales politico-financiers. Mais ce n’est pas ça non plus qui a fait sortir les militaires de leurs casernes : les attaques des groupes djihadistes étaient de moins en moins nombreuses depuis le début de l’année. Bazoum avait entrepris ces derniers mois de s’attaquer, certes lentement, à la corruption d’un système clientéliste, appelé au Niger le « #Guri_System », mis en place par son prédécesseur et néanmoins ami – du moins le croyait-il – Mahamadou Issoufou.

    Trahison, mode d’emploi

    De nombreux éléments semblent démontrer que c’est pour préserver ce #système_clientéliste que Tchiani, un fidèle d’Issoufou depuis plus de dix ans, a pris le pouvoir. Et notamment pour garder la main sur une montagne de cash : la manne pétrolière. L’entourage de Bazoum en est aujourd’hui persuadé, et ils sont nombreux parmi ses conseillers en exil mais aussi dans l’opposition à pointer du doigt la complicité de l’ancien président. Leur version, très plausible selon des journalistes d’investigation nigériens, est la suivante : depuis plusieurs mois, Bazoum et son ministre du Pétrole, Mahamane Sani Mahamadou, dit « Abba » – qui n’est autre que le fils d’Issoufou – étaient à couteaux tirés au sujet de la gestion des fonds issus de l’extraction du pétrole2

    Le Niger produit du #pétrole depuis 2011. Il reste un « petit » dans le domaine, avec à peine 20 000 barils par jour produits par la #China_National_Petroleum_Corp (#CNPC). Un chiffre qui pourrait bientôt être multiplié par cinq ou six avec la mise en service d’un #pipeline reliant le Niger au Bénin. De quoi tirer pas mal de plans sur la comète pour ceux qui ont la main sur ce trésor. Or pendant longtemps, c’étaient les proches d’Issoufou qui avaient la main. Durant ses deux mandats (de 2011 à 2021), ce dernier avait pris soin de placer ses hommes à la tête de la #Société_nigérienne_de_pétrole (#Sonidep), la société d’État qui gère tout ce qui concerne l’or noir. Une boîte « phagocytée par le clan Issoufou », selon un ancien conseiller de Bazoum ayant requis l’anonymat, et « pas très regardante sur les dépenses », puisqu’elle accumule les dettes. Selon Jeune Afrique, un audit aurait estimé que les pertes dues à la #fraude s’élèveraient pour l’État entre 50 et 70 millions de dollars par an. Bazoum, qui a été ministre des Affaires étrangères puis ministre de l’Intérieur d’Issoufou, savait tout cela.

    En novembre 2021, il avait remplacé le patron de la Sonidep, un proche d’Issoufou, par un « gars sûr », Ibrahim Mamane. Mais ça n’a pas suffi. « Il aurait fallu virer tout le monde pour reprendre la main, tant les fidèles d’Issoufou étaient nombreux », indique une source qui connaît bien le secteur.

    Au lieu de ça, Bazoum a eu une autre idée, vieille comme le capitalisme : créer une nouvelle boîte pour siphonner l’ancienne. La bien nommée #PétroNiger devait ainsi hériter des principales missions de la Sonidep et gérer le pactole promis. Après plusieurs reports liés à l’opposition de « Abba » notamment, cette création devait être validée en Conseil des ministres le… 27 juillet. Tout était prêt. Mais c’était sans compter sur l’intrusion de Tchiani et de ses hommes dans la résidence de Bazoum, le 26 juillet à l’aube. Depuis, on ne parle plus de PétroNiger, Bazoum et sa famille sont toujours séquestrés dans leur résidence, Ibrahim Mamane a été démis de ses fonctions et « Abba » a été incarcéré. La preuve, selon l’entourage d’Issoufou, qu’il n’a rien à voir avec ce putsch. Ou, comme le pensent les fidèles de Bazoum, qu’il s’est fait doubler par les galonnés…

    https://cqfd-journal.org/Au-Niger-un-putsch-de-brut

    #pétrole #ressources #matières_premières #Chinafrique

  • The Congo Tribunal

    En plus de 20 ans, la #guerre du #Congo a déjà fait plus de 6 millions de victimes. La population souffre de cet état d’#impunité totale, les #crimes_de_guerre n’ayant jamais fait l’objet de poursuites judiciaires. Cette région recèle les gisements les plus importants de #matières_premières nécessitées par les technologies de pointe. Dans son « #Tribunal_sur_le_Congo », Milo Rau parvient à réunir les victimes, les bourreaux, les témoins et les experts de cette guerre et à instituer un #tribunal d’exception du peuple du Congo de l’Est. Un portrait bouleversant de la guerre économique la plus vaste et la plus sanglante de l’histoire humaine.

    https://vimeo.com/234124116

    https://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/53668_0


    http://www.the-congo-tribunal.com

    #film #documentaire #film_documentaire #extractivisme #tribunal_des_peuples #justice_transformatrice #justice #vérité_et_justice #multinationales #responsabilité #Banro #RDC #massacres #témoignage #Twangiza #massacre_de_Mutarule #mine #extractivisme #Sud-Kivu #or #Banro_Corporation #impunité #crimes #douleur #tribunal #engagement #viols #vérité_et_justice #multinationales #guerre #concessions_minières #ressources_naturelles #pillage #minerai #Mining_and_Processing_Congo (#MPC) #Walikale #Bisie #droits_humains #MCP_Alptamin #Mukungwe #milices #Cheka_Group #groupes_armés #diamants #cassiterite #marché_noir #loi_Dodd_Frank #minerai_critique #Mutarule #MONUSCO #ONU #Nations_Unies

    • La production du réel sur scène est ce qui m’intéresse
      Entretien avec #Milo_Rau

      Né à Berne, en Suisse en 1977, Milo Rau étudie la sociologie auprès de Pierre Bourdieu et Tzvetan Todorov, ainsi que les littératures allemandes et romanes à Paris, Zurich et Berlin. Tout d’abord journaliste, ses premiers voyages et reportages se déroulent au Chiapas ainsi qu’à Cuba en 1997. À partir de 2000, Rau travaille comme auteur au sein de la Neue Zürcher Zeitung, un groupe de presse suisse qui édite le journal du même nom puis il entame en 2003 sa carrière de metteur en scène en Suisse tout d’abord et, par la suite, à l’étranger.

      https://www.cairn.info/la-video-en-scene--9782379243431-page-329.htm

    • #IIPM#International_Institute_of_Political_Murder

      Produktionsgesellschaft für Theater, Film und Soziale Plastik


      Das IIPM – International Institute of Political Murder wurde vom Regisseur und Autor Milo Rau im Jahr 2007 mit Sitz in der Schweiz und in Deutschland gegründet zur Produktion und internationalen Verwertung seiner Theaterinszenierungen, Aktionen und Filme.

      Die bisherigen Produktionen des IIPM stießen international auf große Resonanz und stehen für eine neue, dokumentarisch und ästhetisch verdichtete Form politischer Kunst – „Real-Theater“, wie Alexander Kluge Milo Raus Ästhetik einmal nannte. Seit 2007 hat das IIPM mehr als 50 Theaterinszenierungen, Filme, Bücher, Ausstellungen und Aktionen realisiert. Die Stücke des IIPM tourten durch bisher über 30 Länder und wurden an alle bedeutenden internationalen Festivals eingeladen. Wiederkehrende Kooperationspartner sind u. a. die Schaubühne am Lehniner Platz, das Théâtre Nanterre-Amandiers, das Theaterspektakel Zürich, das Kunstenfestival Brüssel, das Goethe Institut, die Prohelvetia, ARTE, das Schweizerische und das Deutsche Fernsehen, der Berliner Senat oder die Kulturstiftung des Bundes. Bisherige Projekt- und Essaybände des IIPM wurden mehrfach aufgelegt („Die letzten Tage der Ceausescus“, 2010), von der Bundeszentrale für Politische Bildung als Schulbücher nachgedruckt („Hate Radio“, 2014) und von der taz zum „Buch des Jahres“ gewählt („Was tun? Kritik der postmodernen Vernunft“, 2013). Für 2017 entstehen der ästhetiktheoretische Band „Wiederholung und Ekstase“ (Diaphanes Verlag, Abschlussband zu einem Forschungsprojekt, das das IIPM an der Zürcher Hochschule der Künste zum Realismus in den Künsten durchführte), die beiden Projektbände „Das Kongo Tribunal“ und „1917“ (beide Verbrecher Verlag) sowie das Manifest „Die Rückeroberung der Zukunft“ (Rowohlt Verlag).

      Seit der Gründung konzentriert sich das IIPM auf die multimediale Bearbeitung historischer oder gesellschaftspolitischer Konflikte: Unter anderem holte die Produktionsgesellschaft die Erschießung des Ehepaars Ceausescu („Die letzten Tage der Ceausescus“), den ruandischen Völkermord („Hate Radio“) und den norwegischen Terroristen Anders B. Breivik („Breiviks Erklärung“) auf die Bühne, boxte per Theaterperformance das Ausländerstimmrecht ins Parlament einer Schweizer Stadt („City of Change“), hob im Frühjahr 2013 mit zwei mehrtägigen Justiz-Spektakeln („Die Moskauer Prozesse“ und „Die Zürcher Prozesse“) ein völlig neues Theaterformat aus der Taufe und eröffnete mit „The Civil Wars“ (2014) das Großprojekt „Die Europa-Trilogie“, die mit „The Dark Ages“ (2015) fortgeführt wurde und 2016 mit „Empire“ ihren Abschluss fand. Mit „Five Easy Pieces“ (2016) und „Die 120 Tage von Sodom“ (2017) unterzogen Rau und das IIPM das Einfühlungs- und Darstellungsinstrumentarium des Theaters einer eingehenden Prüfung – das eine Mal mit minderjährigen, das andere mal mit behinderten Darstellern.

      Von Debatten weit über die Kunstwelt hinaus begleitet, wurden die vom IIPM produzierten Filme, Video-installationen, Peformances und Inszenierungen mit zahllosen Preisen weltweit ausgezeichnet. Die „zutiefst berührende“ (La Libre Belgique) Inszenierung „The Civil Wars“, von Publikum und Kritik euphorisch gefeiert, etwa wurde mit dem Jury-Preis der Theatertriennale „Politik im Freien Theater“ ausgezeichnet und von der Experten-Jury des Schweizer Fernsehens in die Liste der „5 besten Theaterstücke 2014“ gewählt. Außerdem wurde „The Civil Wars“ unter die „besten Stücke der Niederlande und Flanderns 2014/15″ ausgewählt. Die Inszenierung „Five Easy Pieces“ (2016) wurde mit dem Hauptpreis des belgischen „Prix de la Critique Théâtre et Danse“ ausgezeichnet. Zu den weiteren Auszeichnungen gehören Einladungen zum Berliner Theatertreffen oder ans Festival d’Avignon, der Schweizer Theaterpreis oder der Preis des Internationalen Theaterinstituts (ITI).

      „Mehr Wirkung kann Theater kaum provozieren“, urteilte die Basler Zeitung über die Lecture-Performance „Breiviks Erklärung“, die 2014 nach zahlreichen Stationen im EU-Parlament Brüssel zu sehen war. Die Produktion „Die Moskauer Prozesse“, zu der in Kooperation mit Fruitmarket Kultur und Medien GmbH eine Kinofassung und mit dem Verbrecher Verlag Berlin eine Buchfassung entstand, führte zu einer internationalen Debatte über Kunstfreiheit und Zensur. Die Kinofassung lief international in den Kinos und auf Festivals und wurde mit einer „Besonderen Auszeichnung“ am Festival des Deutschen Films 2014 geehrt.

      Zu den „Zürcher Prozessen“ entstand – wie auch zu den Produktionen „Die letzten Tage der Ceausescus“ und „Hate Radio“ – eine abendfüllende Filmfassung, die auf 3sat und im Schweizer Fernsehen ausgestrahlt wurde und in ausgewählten Kinos zu sehen war. Die Hörspielfassung von „Hate Radio“ wurde mit dem renommierten „Hörspielpreis der Kriegsblinden 2014“ ausgezeichnet.

      In der Spielzeit 2013/14 fand in den Sophiensaelen (Berlin) unter dem Titel „Die Enthüllung des Realen“ eine Retrospektive zur Arbeit des IIPM statt. Anlässlich der Ausstellung erschien im Verlag „Theater der Zeit“ eine gleichnamige Monographie mit Beiträgen von u. a. Elisabeth Bronfen, Heinz Bude, Alexander Kluge, Sandra Umathum, Michail Ryklin und Christine Wahl, die das Werk des IIPM aus verschiedenster Perspektive beleuchteten. Nach Einzelausstellungen in Österreich (Kunsthaus Bregenz 2011, Akademie der Bildenden Künste Wien, 2013) und der Schweiz (migrosmuseum für gegenwartskunst Zürich 2011, KonzertTheaterBern, 2013) handelte es sich dabei um die erste Retrospektive zur Arbeit Milo Raus und des IIPM in Deutschland, die in der Presse heiß diskutiert wurde.

      In der Saison 2014/15 folgten Werkschauen in Genf (Festival La Batie) und Paris (Théatre Nanterre-Amandiers), in der Saison 2015/16 in Gent (CAMPO). Die Live-Talkshowreihe „Die Berliner Gespräche“ (in Kooperation mit den Sophiensaelen und der Schweizerischen Botschaft Berlin) 2013/14 war der Startpunkt der Produktionsphase von Milo Raus Theaterinszenierung “The Civil Wars” (2014), dem ersten Teiler seiner „Europa Trilogie“. Die mit „The Dark Ages“ im Jahr 2015 weitergeführte und 2016 mit „Empire“ abgeschlossene, monumentale „Europa Trilogie“ – in der 13 Schauspieler aus 11 Ländern den Kontinent einer „politischen Psychoanalyse“ (Libération) unterziehen – führte zu euphorischen Reaktionen bei Presse und Publikum: „von der Intimität eines Kammerspiels und der Wucht einer griechischen Tragödie“, urteilte etwa das ORF über „Empire“.

      Zu einem weltweiten Medienecho führte auch das insgesamt 30stündige „Kongo Tribunal“, das Milo Rau und sein Team im Sommer 2015 in Bukavu und Berlin durchführten: ein Volkstribunal zur Verwicklung der internationalen Minenfirmen, der kongolesischen Regierung, der UNO, der EU und der Weltbank in den Bürgerkrieg im Ostkongo, der in 20 Jahren mehr als 5 Millionen Tote gefordert hat. Presse und Publikum verfolgten die „ungeheuerlich spannenden“ (taz) Verhöre atemlos. „Das ambitionierteste politische Theaterprojekt, das je inszeniert wurde“, urteilte die Zeitung THE GUARDIAN, und fügte hinzu: „Ein Meilenstein.“ „Ein Wahnsinnsprojekt“, schrieb die ZEIT: „Wo die Politik versagt, hilft nur die Kunst.“ Die belgische Zeitung LE SOIR schrieb: „Makellos. Milo Rau ist einer der freiesten und kontroversesten Geister unserer Zeit.“ Und die taz brachte es auf den Punkt: „Zum ersten Mal in der Geschichte wird hier die Frage nach der Verantwortung für Verbrechen gestellt.“ Mehr als hundert Journalisten aus der ganzen Welt nahmen an den Tribunalen in Ostafrika und Europa teil, um über das „größenwahnsinnigste Kunstprojekt unserer Zeit“ (Radio France Internationale – RFI) zu berichten.

      Als „ein Meisterwerk, brennend vor Aktualität“ (24 heures) und „atemraubend“ (NZZ) feierten Kritik und Publikum gleichermaßen Milo Raus Stück „Mitleid. Die Geschichte des Maschinengewehrs“ (Uraufführung Januar 2016, Schaubühne am Lehniner Platz Berlin), das seit seiner Uraufführung durch die Welt tourt und u. a. zum „Friedrich-Luft-Preis“ als bestes Stück der Saison in Berlin nominiert und in der Kategorie „Beste Schauspielerin“ (Hauptrolle: Ursina Lardi) in der Kritikerumfrage der Zeitschrift „Theater Heute“ auf den zweiten Platz gewählt wurde.

      Das im Frühjahr 2016 in Kooperation mit CAMPO Gent entstandne Stück „Five Easy Pieces“ war das erste IIPM-Projekt mit Kindern und Jugendlichen. Als „ganz großes Theater, menschlich, sensibel, intelligent und politisch“ beschrieb das belgische Fernsehen (RTBF) das Stück, das bereits durch halb Europa und bis Singapur tourte: „Ein Theaterstück jenseits aller bekannten Maßstäbe.“

      http://international-institute.de

      #art_et_politique

  • Nouvelles controverses dans l’importation d’or en Suisse

    Accusée de #pollution aux #métaux_lourds, une #mine du #Liberia vend tout son or au genevois #MKS_Pamp tandis que le tessinois #Argor-Heraeus est critiqué en #Colombie. Des ONG dénoncent des contrôles lacunaires aux douanes

    https://www.letemps.ch/economie/nouvelles-controverses-dans-l-importation-d-or-en-suisse

    Article complet disponible ici :
    https://konzernverantwortung.ch/wp-content/uploads/2023/10/20231021_Le-Temps.pdf

    #Suisse #or #matières_premières #multinationales #mines #extractivisme

  • A mine in the middle of paradise

    The Tebboune government is brutally suppressing any protest against a lead-and-zinc mine being built in a RAMSAR protected area.

    The region surrounding the #Soummam river has long been renowned for its #agriculture. It is home to centuries’ old olive trees and a diverse and rich flora and fauna with several protected species. It is the core of a major agro food center, which supplies the country and produces several brands of mineral water as well as a local beer, Albrau.

    But a government project launched in July is about to radically disturb its ecosystem and landscape. Algiers is speeding up the exploitation of a lead and #zinc mine which had been planned – and feared – for almost two decades. It will be developed by the joint venture company #Western_Mediterranean_Zinc (#WMZ), a partnership between state-owned mining firm, #Sonarem, which has majority shareholding, and the Australian mining firm, Terramin, in compliance with the 51/49 rule of the finance law, which requires the Algerian side to hold the majority of shares.

    The government insists that the project is national, and consistent with its ambitions to become a major actor in the mining industry. Meanwhile, there have been calls from scientists and activists to investigate Terramin, the Australian miner’s lack of international expertise and scarce information about the agreement with Algerian authorities being issues of concern.

    Many local residents worry the mine’s development could destroy their livelihoods and even push them out. Two villages, Amizour and Tala Hamza, with respectively 45 000 and 15000 inhabitants, will bear the brunt of this decision. If the mine project moves forward, dozens of families will be forced to leave their homes. The region’s historical and intangible heritage will be threatened as well, as martyrs of the Algerian revolution are buried there. So are the loved ones of many inhabitants.

    “This is a mine in the middle of paradise,” a native of the region laments. “The inhabitants are not only afraid of harmful effects on the environment and their health but they do not want to be relocated. They have a special attachment to their land. It is a beautiful region where they lead a quiet life and many of them live from mountain agriculture. Their parents, grandparents and great grandparents are buried there. If the area is destroyed, they will lose everything.”

    In July, Algerian authorities released an executive decree concerning the downgrading of a plot of agricultural land which will be used as a logistical base to access the mine Unsurprisingly, the debate over the exploitation and its environmental consequences has been stifled by local authorities and more importantly, decision-makers in Algiers. The project has been pushed forward as a presidential priority, which makes it more opaque and difficult to oppose, especially given the current repressive context. Regrettably, the local population hasn’t been officially consulted prior to the July announcement, even though their health and that of future generations is at stake.

    What civil society actors and experts are requesting is a transparent and open debate with government officials. According to activists, local residents, especially in #Ait_Bouzid and #Ibazghichen, two neighboring villages in the exploitation area, are largely opposed to the project and expressed their concerns through several petitions sent to the government. They remain unanswered and the government hasn’t reached out to local associations or political actors.

    On May 13, 2022, a group of associations from #Amizour and #Tala_Hamza organised a hike on the site of the mine to raise awareness about the dangers of the extraction of minerals and to call for the preservation of the region. It drew over 200 people although it took place during a wave of repression aimed at silencing the Hirak protest movement and other forms of dissent. According to several people who attended the event, the participants were held at a roadblock and had their personal details and that of their vehicles registered by security forces. A team from Radio M, which was known for its independent coverage and was shut down in December 2022 after the jailing of its editor, Ihsane El Kadi, was stopped for an hour and interrogated. In an interview, an activist claimed several people had been intimidated and even threatened by not only security forces but also local representatives of political parties close to the regime.

    Kamel Aissat, a scientist, university professor and activist of the Socialist Workers’ Party (PST), an opposition party banned in 2022, who lives in the area, has been vocal in his opposition to the project. In July, he was arrested as he was about to travel outside Algeria. He was later summoned and interrogated only to be placed under judicial supervision a few days later by court decision, which means his movements and encounters will be closely monitored and consequently hampered. He’s been charged with harming national unity and publication of information which could harm the national interest. His prosecution redoubles the pressure on local activists. Several people I contacted refused to speak on the record for fear of retribution or due to ongoing judicial procedures due to their involvement in the Hirak.

    “The pouvoir [powers-that-be] has sown a climate of terror,” a local inhabitant told me.

    “[The project] will impact the entire Soummam valley. Everyone and all the neighboring towns will be affected, [all the way to] the Mediterranean sea,” warns Samir Larbi, a PST activist from the neighbouring city of El Kseur.

    Other civil society actors share his concerns over the propagation of heavy metals in the groundwater and the air. “It will have a disastrous impact on agriculture, especially since the region is known for its fertile land. The water table will be contaminated, which in turn, will contaminate all the region of Bejaia,” stresses an activist.

    Critics say the environmental damage outweighs the economic and social benefits. There’s already a great mistrust in the ability of authorities to tackle environmental issues. A recent example is their poor response in 2021 and this summer to the deadly fires in the Bejaia region. Another has been concerns about poor waste management treatment which raises fears over the handling of the toxic waste from the mine.

    The plan, they argue, is in contradiction with the mining legislation passed in 2014, which states that mines in protected areas shouldn’t be developed. The Soummam valley has been classified as a wetland protected by the international Ramsar convention, which Algeria ratified in 1984. Moreover, they point out that there hasn’t been any in-depth public impact study. Furthermore, they mistrust the evaluation of the environmental feasibility of the extraction put forward by the government, which they say should have been performed by an independent organisation. Among the few political actors to speak up against the opacity surrounding the project, members of the opposition party Rally of Culture and Democracy (RCD) in Tala Hamza as well as the party’s regional bureau demanded a genuine and publicly accessible impact study.

    “The expanding of the extraction of underground resources to other natural resources than hydrocarbons does not hide the economic breakdown that is taking hold in the country and must never be done on the sly and by prohibiting debate and advice from experts in the field,” declared the RCD bureau.

    In an interview to the state agency Algeria Press Service in July, the Director General of Mines at the Ministry of Energy and Mines, Nadjiba Bourenane claimed that “all the studies necessary for the realization of this strategic project have been carried out, in particular the detailed feasibility study comprising several technical components, namely exploration, exploitation, treatment, mining planning, environmental impact, as well as the technical-economic study with economic modeling, in addition to the development of a market study to be able to prove the profitability of this investment.”

    According to the government, the mine is expected to last about 20 years and directly employ 700 people and 4000 overall. However, in a region where the state has generally been absent, opponents to the project believe it will not lead to sustainable development but is merely a short-term financial opportunity for Terramin and their Algerian counterparts. They stress that the jobs that will be created are non-specialist ones and that the extraction of the mine cannot improve the local economy. The recent history of the country supports their scepticism. Over the last decades, the Algerian population hasn’t generally reaped the benefits of its immense oil and gas resources. The economic policy of the state, which relied on their export, hasn’t led to the development of the regions concerned, only favouring the southern part of the country, perpetuating a rentier economy.

    As the PST activist Larabi argues, these are old government orientations that have accelerated under President Tebboune. “The current policy is based on extractivism and the unbridled use of resources,” he said.

    https://africanarguments.org/2023/09/a-mine-in-the-middle-of-paradise

    #extractivisme #matières_premières #mines #Algérie #plomb #Terramin #résistance