• En Turquie, les jeunes diplômés de plus en plus tentés d’émigrer : « Moi aussi, je veux partir »
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/04/25/en-turquie-les-jeunes-diplomes-de-plus-en-plus-tentes-d-emigrer-moi-aussi-je

    En Turquie, les jeunes diplômés de plus en plus tentés d’émigrer : « Moi aussi, je veux partir »
    Par Nicolas Bourcier (Istanbul, correspondant)
    Ece fait une pause. Les travaux dans son foyer pour étudiants se poursuivent même le week-end. Le bruit ne la dérange pas, mais elle s’autorise quelques courtes balades dans ce quartier perdu d’Istanbul situé sur la rive asiatique, loin des sites touristiques et de sa faculté, histoire de penser à autre chose. A 22 ans, la jeune femme, qui n’a donné que son prénom, est en troisième année de médecine. Un établissement privé « plutôt bien coté, souffle-t-elle, même s’il n’a malheureusement pas le niveau des meilleures universités publiques ». Fille de parents médecins, originaire de Hatay, la région dévastée par le tremblement de terre du 6 février 2023, Ece fait partie d’une génération qui a appris à digérer ses désillusions. « Moi aussi, je veux partir à l’étranger, travailler et vivre ailleurs, comme toute ma classe d’âge », lâche-t-elle.
    Sur les dix étudiants de sa section, une seule refuse, pour l’heure, d’envisager un départ. Comme tous les autres, Ece doit encore poursuivre trois années d’études pour obtenir son diplôme et entreprendre les démarches dans le but de quitter la Turquie. « Personnellement, j’aimerais aller à Londres, mais j’hésite encore dans mon choix et ma spécialisation ; je me suis mise aussi à l’allemand, quasiment tous ceux que je connais disent opter pour une ville allemande. »
    Selon une étude de la Fondation Konrad Adenauer d’Ankara, réalisée sur l’ensemble du pays en 2023, les deux tiers des 18-25 ans se disent prêts à quitter la Turquie s’ils en avaient la possibilité – plus encore parmi ceux qui effectuent des études longues, comme les médecins ou les ingénieurs. L’Allemagne reste la destination la plus prisée.
    (...)
    Au cours des onze premiers mois de 2023, 2 785 médecins ont demandé à l’Association médicale turque les documents nécessaires pour pouvoir exercer à l’étranger, un record. Pour leur obtention, les praticiens ont besoin d’une sorte de certificat de bonne conduite. Le plus souvent, ils invoquent le manque de revenus, des conditions de travail difficiles et une augmentation de la violence de la part des patients pour justifier leur décision d’émigrer. Aujourd’hui, pour un peu plus de 85 millions d’habitants, le pays compte près de 150 000 médecins. « C’est beaucoup moins qu’en Allemagne, qui en manque déjà », affirme Ece. La goutte d’eau a été le séisme de 2023. « Je me trouvais à Hatay pour voir mes parents. Nous avons survécu et nous avons tous observé avec effroi l’immense incompétence des autorités, l’absence d’aide et de secours pendant des jours et des jours, signale-t-elle. C’est là que je me suis dit que je devais définitivement envisager mon départ. »
    Comme d’autres, Ece ira déposer son dossier auprès de la société privée choisie par les services consulaires du pays de son choix. Le groupe sous-traitant pour la France, le Canada et la Pologne est un bunker de béton et de verre appelé VFS Global et situé sur une voie rapide du quartier de Tarlabasi, à vingt minutes de la place centrale Taksim, de ses hôtels et de son avenue piétonnière Istiklal. Tous les jours de la semaine, il y a foule devant les barrières des agents de sécurité. Les retraits de passeport se font au rez-de-chaussée, le dépôt de documents et le relevé des empreintes, aux étages. Compter un à deux mois pour un rendez-vous, parfois un peu moins pour récupérer son passeport. Et 40 euros, juste pour l’enregistrement, visa non compris.
    Dans une petite rue adjacente, Ulas Yilmaz est assis derrière son écran et une pile de dossiers dans sa petite officine en sous-sol. « Visa bureau » fournit de l’aide pour les formulaires à ceux qui en ont besoin, contre 40 à 50 euros.(...) Depuis plusieurs mois, on remarque que les choses changent. Elles sont de plus en plus nombreuses à laisser entendre qu’elles se verraient bien rester sur place, une fois là-bas. » L’employé affirme refuser certains clients, ceux qui ne remplissent pas tous les critères, qui viennent avec des invitations d’entreprises polonaises, « des faux, pour la plupart », ou qui font mine de passer par la Serbie, un pays qui n’exige pas de visa pour les ressortissants turcs.
    Les demandeurs d’asile, eux, sont redirigés vers les autorités consulaires. « Le circuit est différent et passe par les ambassades, précise Ulas Yilmaz. Là, ce sont des personnes le plus souvent originaires de la région du Sud-Est, la région kurde. » En 2023, 56 673 Turcs ont ainsi demandé un statut de réfugié en Allemagne, un nouveau record. Pour la première fois, le pays est passé devant l’Afghanistan. Seule la Syrie fait mieux. « Tout le monde veut partir », insiste l’employé. Comme Ece, il pointe l’économie, la hausse vertigineuse des prix, le gouvernement aussi. « L’avenir ici est sombre, et les dernières élections municipales largement remportées par l’opposition n’y changent pas grand-chose. »
    Le fait que de nombreuses personnes, dont les plus qualifiées, tournent le dos à la Turquie n’a pas encore entraîné de problèmes structurels, a expliqué au quotidien Die Welt Caner Aver, du centre d’études turques et de recherche sur l’intégration de l’université de Duisburg-Essen. « Mais à long terme, ajoutait-il, le marché du travail ne pourra pas compenser l’émigration dans tous les secteurs, par exemple dans le domaine de la santé ou de l’agriculture. Des hôpitaux isolés signalent déjà qu’ils ont des difficultés à pourvoir les postes vacants. » Ece hausse les épaules : « Je n’hésiterai pas. » Elle rappelle cette phrase du président Recep Tayyip Erdogan, qui avait fustigé, déjà en 2022, les médecins quittant les hôpitaux publics. « Qu’ils s’en aillent s’ils le veulent, nous continuerons avec des jeunes diplômés », avait-il lancé lors d’une intervention télévisée. Aujourd’hui, elle compte les jours.

    #Covid-19#migrant#migration#turquie#allemagne#medecin#migrationqualifiee#sante#crise#economie#emigration

  • « Quand vous avez un nombre de médecins insuffisant, il ne faut pas s’étonner que des groupes financiers prennent l’initiative »
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/04/21/quand-vous-avez-un-nombre-de-medecins-insuffisant-il-ne-faut-pas-s-etonner-q

    Les #groupes_financiers ont bénéficié du désengagement de l’Etat dans les besoins de #santé pour s’engouffrer dans le secteur, explique l’économiste Nicolas Da Silva dans un entretien au « Monde ». Au risque d’imposer leurs normes.
    Propos recueillis par Véronique Julia, Publié le 21 avril

    Nicolas Da Silva est économiste, maître de conférences en sciences économiques à l’université Sorbonne-Paris-Nord. Il appelle l’Etat à faire preuve d’imagination pour améliorer l’organisation de l’offre de soins sur tout le territoire [ah ah ah].

    L’offensive de la finance dans le secteur de la santé résulte-t-elle en partie des défaillances de l’Etat ?

    La finance profite de l’absence d’une réponse publique organisée aux problèmes que connaît le secteur de la médecine libérale. Et elle propose de pallier ces défaillances, en effet. Quand vous avez des besoins de santé non couverts, avec un nombre insuffisant de #médecins, des #déserts_médicaux et des urgences saturées faute d’alternative, il ne faut pas s’étonner que des groupes financiers prennent l’initiative et trouvent leur place dans le parcours de soins, en réorganisant l’offre et en investissant massivement. Et cela dans tous les domaines : la biologie, la radiologie, mais aussi les soins de premier recours.

    Juridiquement, les pouvoirs publics ont même facilité les initiatives privées et l’entrée d’investisseurs au capital des structures médicales. D’ailleurs, on entend davantage ceux qui râlent, mais certains médecins s’y retrouvent et ne se plaignent pas : quand un groupe privé s’occupe de toutes les tâches administratives et vous dit de vous concentrer sur votre cœur de métier, ça répond aussi à une attente formulée par les professionnels qui n’est pas suffisamment entendue.

    Vous alertez sur les dangers de cette tendance…

    Les financiers cherchent à rémunérer leur capital et ils sont dans leur rôle. Mais les risques sont multiples. Les risques d’inégalité d’abord, car ils ne vont investir que là où c’est rentable, ce qui peut les conduire à délaisser des actes, des zones géographiques, des pathologies et des publics moins intéressants d’un point de vue lucratif. Dans le domaine de la santé, la rémunération de l’offre de soins provient de financements publics, qui ne sont pas extensibles, donc comment faire du profit sans que ce soit sur le dos des patients et des professionnels de santé ?

    J’ajoute le risque de déposséder ces mêmes professionnels de leur outil de travail, ce dont les médecins prennent conscience. S’ils ne possèdent plus le contrôle de leur outil, ils peuvent perdre leur liberté d’exercice, et la logique financière pourrait prendre le pas sur le choix médical et l’intérêt du patient.

    Comment peut-on limiter ces risques ?

    Déjà, il serait bénéfique de chercher à quantifier et à qualifier la tendance observée depuis plusieurs années. On manque de données, c’est un travail titanesque de construire une cartographie des financiers et des financements. Ensuite, il faut réguler les statuts juridiques des groupes constitués pour s’assurer de l’indépendance réelle des praticiens. Enfin, il faut que les pouvoirs publics réagissent et aient un peu d’imagination pour mieux organiser l’offre sur le territoire : investir massivement dans certaines régions sous-dotées, mieux rémunérer certaines démarches d’installation, penser une organisation pérenne qui ne peut pas être que libérale…

    Laisser la finance pallier les manques relève d’une vue de court terme : cela rend service dans un premier temps, mais, finalement, cela peut bousculer le rapport de force avec des mastodontes qui imposeront leurs exigences tarifaires. C’est un vrai risque à prendre en compte.

    Véronique Julia

  • Vaccins anticancéreux tiennent à la personnalisation pour chaque cas.
    http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article4598

    Cette réactivation ciblée de l’immunité est appropriée à chaque cas de malade. Elle consiste à reconnaître les "néoantigènes" uniques d’un patient, puis à détecter et à détruire les cellules cancéreuses. Les cellules cancéreuses sont couvertes de protéines mutées qui sont appelées « néoantigènes », que l’on ne trouve pas sur les cellules saines. Les vaccins personnalisés contre le cancer entraînent la mobilisation du système de défense que recèlent les êtres. Sports / Santé

    / Sciences & Savoir, #médecine,_sciences,_technologie,_ADN,_vaccin,_médicaments,_découvertes, #Data_-_Données, #IA_:_Intelligence_Artificielle

    #Sports_/_Santé #Sciences_&_Savoir

  • Radio Canada Des tests de paternité vendus au Canada qui identifiaient le mauvais père D’après des renseignements fournis par Jorge Barrera, de CBC News

    « [Nos tests de paternité prénataux] n’étaient pas si fiables », admet à la caméra cachée le propriétaire de la compagnie Viaguard Accu-Metrics, de Toronto, qui a vendu de tels tests d’ADN en ligne pour 800 $ à 1000 $ de 2014 à 2020, selon une enquête de CBC.

    Harvey Tenenbaum, qui dirige toujours le laboratoire de Toronto à l’âge de 91 ans, a confié à la caméra cachée d’un journaliste de CBC qui se faisait passer pour un client, qu’il se « méfie de ce test maintenant ».

    Grâce à un kit maison visant à prélever quelques gouttes de sang de la femme enceinte et un échantillon buccal d’ADN de l’homme, le test devait permettre de confirmer l’identité du père avant la naissance de l’enfant.


    À la caméra cachée, M. Tenenbaum admet toutefois que le test a produit des résultats erronés au fil des années.

    C’est arrivé. Un père blanc se fait tester et le bébé est noir.
    Une citation de Harvey Tenenbaum, propriétaire du laboratoire

    À la caméra cachée, M. Tenenbaum se dit conscient des conséquences possibles d’une erreur : “Si on identifie le mauvais père, la mère peut avoir un avortement.”

    Questionné par CBC, il assure publiquement que les tests étaient, au contraire, « précis » et « parfaits ». Il a cessé de les vendre, ajoute-t-il, parce que l’un des éléments était devenu trop coûteux.

    La vie chamboulée d’une mère
    “Je hais le nom Viaguard”, lance Corale Mayer, 22 ans, de North Bay, en Ontario.

    Lorsqu’elle est tombée enceinte en 2019, à l’âge de 19 ans, elle n’était pas sûre de qui était le père et a commandé un test de Viaguard, renvoyant ensuite les échantillons demandés par la poste.

    Un premier test erroné de la compagnie, raconte-t-elle, lui a fait croire que le père n’était pas l’homme avec qui elle était. Un deuxième test, lui aussi erroné a-t-elle appris après la naissance de sa fille, indiquait que le père était plutôt un autre homme, qui ne voulait rien savoir d’avoir un enfant.

    Ça a été extrêmement traumatisant.
    Une citation de Corale Mayer, mère

    Elle a lancé un groupe dans les médias sociaux qui compte des dizaines d’autres personnes qui soutiennent que leur vie a aussi été chamboulée par des tests de paternité erronés de Viaguard.

    La faute du test ?
    Sika Richot a travaillé comme réceptionniste pour Viaguard durant près de trois mois en 2019.

    Elle soutient que le laboratoire lui demandait de questionner les femmes qui commandaient un test de paternité sur leur cycle menstruel et sur les dates auxquelles elles avaient eu des relations sexuelles avec les différents pères possibles, des questions qui n’ont rien à voir avec un test d’ADN.

    Le personnel compilait ensuite ces renseignements dans un cycle d’ovulation pour réduire le nombre de pères potentiels, affirme Mme Richot. “[Tenenbaum] allait toujours dire : ’’Celui-ci est le père biologique, c’est certain’’”, soutient-elle.


    M. Tenenbaum laisse entendre, lui, que les clients sont responsables des résultats erronés, en raison d’une mauvaise collecte des échantillons. “On a fait des milliers de tests et la moitié des erreurs venaient de la collecte”, dit-il.

    Le Dr Mohammad Akbari, directeur de recherche au laboratoire de génétique moléculaire de l’Hôpital Women’s College, à Toronto, affirme que le genre de test que Viaguard disait utiliser est fiable normalement, mais qu’il faut plus que quelques gouttes de sang de la mère pour confirmer l’ADN du fœtus.

    Il faut au moins 10 ml de sang d’une veine de la mère pour un test adéquat.
    Une citation de Le Dr Mohammad Akbari, expert dans les tests d’ADN

    Dans certains cas, comme l’illustre une poursuite contre Viaguard en Californie, les clients devaient se rendre à un laboratoire pour le prélèvement de sang. Cette poursuite s’est conclue par un règlement à l’amiable.

    Santé Canada indique par courriel qu’elle ne réglemente pas les tests commerciaux d’ADN comme ceux de Viaguard.

    La compagnie n’offre plus de tests de paternité prénataux, mais continue à vendre des tests d’ADN postnataux, tout comme des tests pour déterminer la race des chiens, notamment.

    D’après des renseignements fournis par Jorge Barrera, de CBC News

    #ADN #Tests #identité #enfants #fœtus #laboratoires #maternité #paternité #femmes #hommes #famille #médecine #génétique

  • Le viol, un crime de l’intimité longtemps impensé
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/04/05/le-viol-un-crime-de-l-intimite-longtemps-impense_6226192_3232.html

    A partir du milieu du XIXe siècle, quelques rares médecins commencent cependant à écouter la parole des victimes, surtout quand elles sont encore enfants. Le psychiatre Auguste-Ambroise Tardieu (1818-1879) est ainsi le premier à prêter attention à la souffrance des petites filles violées de l’hôpital de Lourcine [à Paris, actuel hôpital Broca]. Mouvements fébriles, troubles nerveux, suicide : le fondateur de l’enseignement médico-légal comprend qu’un #viol engendre des tourments psychiques. « Ce crime qui offense les sentiments les plus intimes au moins autant qu’il blesse le corps détermine souvent une perturbation morale », écrit-il en 1857.

    Dans l’esprit des médecins, des magistrats et de la société tout entière, une révolution des sensibilités est en train de naître, même si elle est encore très embryonnaire. « Si quelques experts médicaux de la fin du XIXe siècle commencent effectivement à apercevoir la souffrance psychique des #femmes violées, ce sont encore des voix isolées au sein de la communauté médicale, observe l’historien Frédéric Chauvaud. Leurs rapports n’ont pas vraiment d’incidence sur le quotidien de la justice – d’autant qu’à l’époque les victimes, de manière générale, n’intéressent pas les juges : le procès pénal est centré autour de l’accusé. »

    Beaucoup de magistrats, au début du siècle suivant, restent en effet convaincus que la violence physique est consubstantielle au viol – et certains restent même imprégnés par la doctrine de l’Ancien Régime sur la « certitude du consentement ». En 1913, dans son Traité théorique et pratique du droit pénal français, le grand pénaliste René Garraud (1849-1930) affirme ainsi avoir « quelque scrupule à placer sur la même ligne la violence morale et la violence matérielle, et à admettre que la femme, consentant, sous la pression même des menaces les plus graves, à se livrer à un homme, puisse prétendre avoir été violée par celui-ci ».

    Une question politique

    Il faudra encore plusieurs décennies pour que le regard sur le viol se transforme vraiment. En s’affirmant peu à peu comme des disciplines à part entière, la psychiatrie, la psychologie et la #psychanalyse permettent de mesurer les ravages psychiques de la violence. « La connaissance de la subjectivité traumatique émerge, au XXe siècle, dans le sillage des conflits militaires, analyse Denis Salas. Les premiers travaux sur la névrose traumatique sont publiés après la première guerre mondiale, ceux sur le stress post-traumatique après la seconde guerre mondiale. Ils permettent de comprendre des souffrances qui, jusque-là, étaient restées invisibles. »

    https://justpaste.it/6kpmk

    #histoire #sensibilités #justice

    • Si la protection que le code pénal accorde aux femmes est à ce point fragile, c’est en grande partie en raison d’une croyance très ancienne que Georges Vigarello baptise la « certitude du consentement ». Aux yeux des hommes de loi de l’Ancien Régime, il était impossible qu’un homme seul viole une femme. « [Pour eux], la vigueur féminine suffit à la défense, écrit Georges Vigarello. Les juristes d’Ancien Régime y voient une quasi-vérité. » Les philosophes des Lumières adhèrent, eux aussi, à cette doctrine : « La nature a pourvu le plus faible d’autant de force qu’il en faut pour résister quand il lui plaît », estime, en 1762, Jean-Jacques Rousseau dans Emile ou De l’éducation.

      L’article souligne le fossé anachronique et s’appuie sur les juridictions. Sans dire que l’éducation sexuelle, des enfants, des hommes et des femmes a levé un tabou immense il y a à peine 50 ans sur l’inconnu du sexe et du désir, alors, imagine le viol et ses non-dits. Il faudrait demander aux femmes âgées de plus de 80 ans ce qu’elles savaient de la sexualité à 15 ou 20 ans.

  • Taxe « lapin » pour limiter les rendez-vous médicaux non honorés, une fausse bonne idée ?
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-biais-d-esther-duflo/taxe-lapin-pour-limiter-les-rendez-vous-medicaux-non-honores-une-fausse-

    Nous savons bien que les humains ne sont pas motivés exclusivement par l’argent. C’est d’ailleurs pour avoir démontré l’importance des limites de la rationalité économique que Daniel Kahneman, un psychologue, qui est décédé la semaine dernière, a reçu le prix Nobel en économie. Ses travaux ont ouvert la voie à un nouveau chant de l’économie, l’économie comportementale, qui montre comment prendre en compte la psychologie nous permet de mieux comprendre pourquoi les individus ne se comportent pas toujours d’une manière parfaitement rationnelle.

    Une des leçons de Kahneman, c’est que la manière dont une décision est présentée compte beaucoup dans les décisions que nous prenons, particulièrement quand nous devons décider rapidement (ses idées sont popularisées dans le livre Système 1, système 2, les deux vitesses de la pensée).

  • Faire payer les rendez-vous non honorés : l’avis des médecins
    https://www.slate.fr/story/235324/faire-payer-rendez-vous-manques-non-honores-avis-medecins-consultation-medical

    ... certaines personnes ne sont pas en mesure de venir à tous leurs rendez-vous médicaux et (...) se retrouvent souvent dans l’incapacité de prévenir. « Mes patients ont 75 ans de moyenne d’âge. Ils ont fait un AVC, plus de 30% ont des troubles de la planification, 25% ont des troubles moteurs séquellaires. Ils ont de multiples suivis parallèles. C’est très compliqué d’honorer des rendez-vous dans ces conditions. C’est d’autant plus compliqué que leur accès aux SMS de rappel peut être difficile, que les politiques de réduction des coûts en matière de secrétariat dans les hôpitaux et cliniques les rend quasi injoignables pour annuler ou déplacer des rendez-vous », assure sur Twitter R., neurologue.

    « Une partie de la patientèle, déjà marginalisée, a des difficultés –à cause par exemple d’addictions ou de troubles cognitifs– à honorer systématiquement les rendez-vous », atteste Yannick, médecin généraliste avec lequel nous avons échangé.

    Ces éléments vont dans le sens d’une étude irlandaise publiée en 2019, qui écrit dans sa conclusion : « Les patients souffrant d’un plus grand nombre d’affections de longue durée ont un risque accru de manquer des rendez-vous en médecine générale malgré le contrôle du nombre de rendez-vous pris. Ceci est particulièrement vrai chez les patients souffrant de troubles mentaux. » Elle indique également que ces patients « qui manquaient plus de deux rendez-vous par an ont un risque de mortalité toutes causes confondues plus de huit fois supérieur à ceux qui ne manquaient aucun rendez-vous. Ces patients sont décédés prématurément, généralement de facteurs externes non naturels tels que le suicide. »

    #Santé #médecine #rendez_vous_non_honorés #taxe-lapin #darwinisme_social

    • Il compte financer comment sa « punition 5 euros » le premier de la classe ? Comment il compte récupérer mes 5 euros si je n’ai pas honoré mon rdv ? J’ai beau réfléchir TOUT est payant !!! Tout système de récupération a un coût !

    • Il peuvent récupérer la thune comme ils le font déjà avec le forfait médicament où même des pauvres doivent contribuer à hauteur de 50 balles par an de leurs poches sur des médocs qui auraient pu leur être fournis sans frais (CSS) ou remboursés. Il suffit de modifier quelques critères Cpam, pas besoin de frais de recouvrement qui pourraient s’avérer supérieurs aux sommes en jeu.

    • « Une partie de la patientèle, déjà marginalisée, a des difficultés –à cause par exemple d’addictions ou de troubles cognitifs– à honorer systématiquement les rendez-vous. » === Et oui, la non observance des rendez-vous ou des traitements fait souvent partie du problème de santé d’où la nécessité de différents seuils d’accès aux soins !

    • Ce qui est rageant, c’est qu’en même temps, les médecins et personnels soignants sont en surbooking. Donc, en général, dans mon entourage, les lapins sont vus comme des soupapes qui permettent de souffler, de rattraper du retard ou de prendre plus de temps avec un autre patient.... Cette logique comptable est absurde et pose vraiment des problèmes aux plus précaires : 5€ c’est beaucoup d’argent. C’est pareil en effet @colporteur avec les médicaments. Ou comment faire porter sur les plus précaires la gabébie libérale, encore une fois et toujours.

    • « Taxe lapin » : le patron de Doctolib opposé à l’empreinte de carte bancaire obligatoire avant le rendez-vous
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/10/taxe-lapin-le-patron-de-doctolib-oppose-a-l-empreinte-de-carte-bancaire-obli

      « Il y a 15 % des patients qui sont en situation d’illectronisme » et « 5 % qui n’ont pas de carte bancaire. C’est impensable d’entraver l’accès aux soins pour eux », a justifié son PDG, pourtant favorable au principe d’une taxe pour rendez-vous médicaux non honorés.

      Sur le fond, Doctolib est favorable à la mise en place d’une « taxe lapin » de 5 euros, que le premier ministre, Gabriel Attal, a appelée de ses vœux samedi afin de limiter les rendez-vous médicaux non honorés. Mais, concrètement, comment faire payer cette somme au patient fautif ? Pour l’exécutif, la pénalité devrait être retenue grâce à l’empreinte de carte bancaire prise par les plates-formes de rendez-vous, et les médecins pourront l’appliquer, ou pas. Une solution à laquelle s’oppose Stanislas Niox-Chateau, président-directeur général de Doctolib.

      « Il ne faut pas créer un fardeau administratif nouveau pour les soignants et entraver l’accès aux soins », a jugé M. Niox-Chateau, interrogé par France Inter, mercredi 10 avril. « Il y a 15 % des patients qui sont en situation d’illectronisme [qui n’ont pas Internet ou qui ne savent pas l’utiliser] et 5 % qui n’ont pas de carte bancaire. C’est impensable d’entraver l’accès aux soins pour eux », a encore justifié le patron de Doctolib.

      M. Niox-Chateau pointe également le problème des rendez-vous qui ne sont pas pris en ligne. Selon lui, c’est à l’Assurance-maladie que revient la charge de gérer cette « taxe lapin », en prélevant les 5 euros sur le rendez-vous suivant du patient.

      Erreur lors de mon post précédent, donc. Je croyais que, comme pour les médicaments, le fric taxé aux patients le serait sous forme de non remboursement. Or il s’avère qu’il s’agirait de faire payer le rendez-vous raté, et ce, directement au praticien concerné.

    • C’est la suite de la grande in-quisi-fantilisation des problèmes sociaux et politiques. Les boucs émissaires sont désignés : les pauvres sont responsables du ralentissement de la rotation de la terre. De fait, ils ont le devoir de continuer à courber leur maigre échine pour faire peur aux bourgeois, et pour ce gouvernement, d’être reconnaissants à la nation de les maltraiter. Leur devoir est de mettre au service de la croissance nationale leur énergie, leurs ovaires, leurs spermes, leurs enfants (pour l’armée), leurs muscles et leur porte monnaie dont le contenu est à vider dans les hypersuperextramarchés, sans oublier de verser leur dîme mensuelle aux saigneurs propriétaires de l’eau, l’électricité, du gaz, des autoroutes et de leur logement.
      Bientôt le fouet en place publique pour 3 retards chez le dentiste. Tout ça pour que certains s’offrent une deuxième piscine.

    • « Une enquête de l’URPS datant de 2012 soulignait déjà que plus de la moitié (60%) de ces rendez-vous manqués sont le fait de malades en tiers payant, essentiellement titulaires de la #CMU [ancien nom de la Complémentaire santé solidaire, ndlr]. Mais on ne s’interroge jamais sur pourquoi ces patients manquent leurs rendez-vous. Alors, l’auteur de la thèse a appelé les patients qui n’étaient pas venus à leur rendez-vous sur deux semaines à la maison de santé. Ils étaient en tout 54. Sur les 22 avec lesquels il a été possible de mener un entretien téléphonique, aucun n’a dit qu’il se fichait d’honorer ou non un rendez-vous et tous ont accepté le nouveau rendez-vous qui leur a été proposé. En revanche, tous avaient une bonne raison qui touchait justement à leur statut précaire, comme un rendez-vous imprévu à la CAF, des changements d’horaire de travail à la dernière minute ou bien encore un enfant à garder. »

      un extrait de l’article initial

  • Blasenperforation durch intravesikale Knallgasexplosion
    https://link.springer.com/article/10.1007/s00120-008-1718-1
    Vous vous en doutiez. L’homme est un être explosif.

    Zusammenfassung

    Bei einem 74-jährigen Patienten kam es während der transurethralen Resektion (TUR) eines Blasentumors an der Vorderwand zur Knallgasexplosion in der Blase mit Zerreißung der Blasenvorderwand. Die Computertomographie (CT) zeigte zahlreiche verstreut liegende Gasbläschen im perivesikalen Bereich. Die Behandlung erfolgte konservativ.

    Intravesikale Explosionen entstehen, wenn der durch TUR freigesetzte Wasserstoff sich mit Außenluft vermischt und dann durch Funkenschlag gezündet wird. Zur Prophylaxe muss eine Elektroresektion mit Kontakt zur Luftblase vermieden werden.
    Abstract

    A 74-year-old patient underwent transurethral electroresection for a bladder tumor located at the anterior wall close to the air bubble. Intraoperatively, an explosion occurred. Computed tomography documented laceration of the anterior bladder wall with numerous small gas bubbles dispersed in the perivesical area. The etiology of intravesical explosions is based on formation of hydrogen during electroresection.

    Hydrogen by itself is not explosive; a blast will occur only when atmospheric oxygen is admixed and then ignited by sparks from electroresection. To prevent such a complication, care must be taken not to activate the resection loop within the air bubble of the bladder.

    Enfin c’est l’horreur totale. Pas seulement tu te coltines une tumeur de la prostate potentiellement mortelle, mais en plus tu te remplis avec du gaz qui te transforne en suicide bomber involontaire. Tout ça est complètement naturel jusqu’au moment quand le toubib arrive avec son robot d’opération qui provoque l’étincelle qui te fait exploser. Glauque. Je n’invente rien.

    #biologie #médecine #explosion #wtf

  • Medizinstudium in Berlin : „Also werde ich sterben ? Werde ich leiden ?“
    https://www.berliner-zeitung.de/mensch-metropole/medizinstudium-in-berlin-also-werde-ich-sterben-werde-ich-leiden-li

    22.3.2024 von Mascha Osang - Während des Medizinstudiums in Berlin üben Studenten, wie sie Patienten schlechte Diagnosen überbringen. Manchmal fühlt sich das allzu echt an. Eine Kolumne.

    „Wie geht’s Ihnen heute?“, fragte mich W. Ich seufzte. „Geht so, war ja alles ziemlich viel, die ganzen Untersuchungen und dann fünf Tage warten. Ich mache mir Sorgen.“

    W. ist mein Kommilitone. Wir saßen im Kurs Kommunikation, Interaktion und Teamwork (kurz KIT). In KIT übten wir normalerweise an Schauspielern, wie man mit schwierigen Situationen in der Klinik umgeht. Wir lernten, wie man Patienten motiviert, mit dem Rauchen aufzuhören und übten, einen psychiatrischen Patienten nach Suizidgedanken zu fragen.

    Im neunten Semester kam das Herausforderndste: Schwere Nachrichten überbringen. Die Woche zuvor hatte ich einem Kommilitonen mitgeteilt, dass er Multiple Sklerose hat. Mit jedem Rollenspiel wurden die Nachrichten gravierender.
    Er machte eine Pause, so wie wir es gelernt hatten

    Ich hätte ahnen müssen, was auf mich zukommt, als mein Kommilitone mir sagte, dass mein Hautkrebs in meine Lunge und Lymphknoten gestreut hat. Aber es fühlte sich an wie ein Schock, als hätte ich diese Diagnose tatsächlich gerade bekommen. Er machte eine Pause, mindestens 20 Sekunden, so wie wir es gelernt hatten.

    Ich unterbrach die Stille. „Ich weiß gar nicht, was ich dazu sagen soll.“ Er nickte verständnisvoll: „Ich kann mir vorstellen, dass es für Sie gerade nicht einfach ist.“ Empathie zeigen, auch das war Teil des Schemas, an das wir uns halten sollten. „Was heißt das jetzt? Was passiert jetzt?“, fragte ich. Mein Herz klopfte. „Die Lungenmetastasen, kann man die nicht einfach rausschneiden?“

    Er erklärte, dass die Zellen schon überall in meiner Lunge seien. „Und eine Lungentransplantation?“ Keine Option, sagte er. „Aber ich werde gesund, oder?“ Er schaute mich an. „Ähm, nein. Es gibt eine achtzigprozentige Wahrscheinlichkeit, dass Sie die nächsten fünf Jahre nicht überleben werden.“ Der zweite Schock, und er fühlte sich noch echter an. „Also werde ich sterben? Werde ich leiden?“
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    Er sagte etwas von Therapieformen, die Vor- und Nachteile hätten, von palliativen Gruppen. Ich nickte, wollte nur noch weg von hier, nach Hause. Wir verabschiedeten uns, drehten uns zurück zur Gruppe. Sie klopften auf die Tische. Ich atmete durch.

    Im Laufe des Semesters erlebte ich, wie ein Kommilitone einem „Patienten mit Hirntumor“ mitteilte, es würden „miese Zeiten“ auf ihn zukommen. Einer Frau wurde mitgeteilt, sie habe ein invasives duktales Mammakarzinom, ohne zu erklären, was das heißt. Fast alle versuchten, die Nachrichten zu beschönigen mit Sätzen wie: „Das ist ein bisschen nicht mit dem Leben vereinbar.“ Oder das Beste aus der Situation zu machen: „Ihr 27-jähriger Freund, der gerade mit Hirntod diagnostiziert wurde, wäre der perfekte Kandidat für eine Organspende.“ Klassische Fettnäpfchen. Als kritische Zuschauer nahmen wir sie wahr. Als Patienten fielen sie uns kaum auf.

    Eine Studentin fing an zu weinen, als ihr mitgeteilt wurde, dass ihr Freund nach einem Fahrradunfall als hirntot diagnostiziert wurde. Ein Freund von mir zitterte am ganzen Körper, als er seine Diagnose bekam. Viele hatten leere Blicke, hörten ihrem „Arzt“ nicht mehr zu. Manche wurden sauer, akzeptierten ihre Diagnose nicht.

    Ich war lange bedrückt nach meinem Auftritt. Und dabei erlebte ich wahrscheinlich nicht mal einen Bruchteil von dem, was ein Patient durchmacht. Zu Hause rief ich meinen Dermatologen an und machte einen Termin für eine Vorsorgeuntersuchung aus.

    Mascha Osang und Leon-Alexander Regin („Siemens“) berichten im Wechsel aus ihrem Alltag als Medizinstudenten in Berlin. Die Kolumnen erscheinen alle zwei Wochen.

    #iatrocratie #médecins #pédagogie

  • « J’ai mal, docteur »
    https://laviedesidees.fr/J-ai-mal-docteur

    Loin des centres dédiés à leur prise en charge spécifique, la douleur s’exprime d’abord dans le cabinet du médecin généraliste. Comment les plaintes y sont-elles déchiffrées et les douleurs catégorisées ?

    #Société #médecine
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240314_douleur1.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240314_douleur1.pdf

    • Selon lui, la moitié des habitants de ce quartier populaire arrive à la retraite invalide. « Ce sont des travailleurs qui ont des conditions de travail difficiles, explique Dominique Tribillac. Jusqu’à 45 ans, ils n’ont pas d’arrêt, et après ça commence.

      L’usure se déclare à cause de mouvements répétitifs qui sollicitent les mêmes membres ou muscles. « On arrive donc à une situation bancale en fin de carrière. Le patient peut-il encore travailler ou non, faire le même job… »

      Le médecin pointe aussi le manque de spécialistes dont les délais d’attente pour un rendez-vous sont de plus en plus élevés : « Les gens ne peuvent donc pas reprendre leur travail sans les avoir vus. »
      Un médecin dans l’illégalité

      Mais tous ces arguments n’ont pas convaincu l’Assurance maladie. Ainsi, le docteur Tribillac a été sanctionné malgré un avis favorable d’une commission consultative pour le laisser exercer sereinement. C’était sans compter sur la direction de la CPAM de Seine-Maritime qui en a décidé autrement. Cette dernière n’a d’ailleurs pas souhaité répondre à nos questions au sujet du médecin du Val-Druel.

    • Quand un membre de l’ordre médical se solidarise avec les patients il est systématiquement réprimandé puis annihilé s’il continue à lutter du côté des patients.

      Unit 731
      https://en.m.wikipedia.org/wiki/Unit_731


      L’exemple historique qui a défini cette logique de classe sont les aides soignants et médecins tués par leurs pairs dans les camps de la mort japonais parce qu’ils ne supportaient plus de participer aux vivisections et expérimentations quotidiennes. Ces médecins trop humains subissaient le même sort que les autres victimes des médecins japonais.


      Shirō Ishii / 石井 四郎, médecin chef et directeur du camp de recherche médicale l’unité 731
      https://en.m.wikipedia.org/wiki/Unit_731
      On traite le sujet des Mengele et Ishii dans le cadre de la documentation des crimes de guerre japonais et du génocide des juifs d’Europe par les nazis.

      https://en.m.wikipedia.org/wiki/Japanese_war_crimes
      https://en.m.wikipedia.org/wiki/German_war_crimes

      C’est faux car la shoa n’était pas un crime de guerre mais une politique d’extermination conçue indépendamment de la stratégie militaire. L’holocauste a été possible à cause du contexte de la guerre. La Endlösung était gérée par une administration indépendante de l’appareil militaire allemand.


      Berlin, Unter den Eichen 135, l’ancien SS-Wirtschafts- und Verwaltungshauptamt

      Elle. constituait un élément clé de l’organisation criminelle nazie sans aucune place dans les actions et stratégies militaires. Dans une logique administrative il faudrait la placer au niveau policier qui est différent du domaine militaire.

      La raison d’être des camps de la mort japonais était la recherche médicale et biologique dans un but et contexte militaire. A la différence des camps nazis ils faisaient partie de l’organisation militaire et les médecins y avaient des grades militaires japonais.

      Pourtant le rôle des médecins dans ces mécaniques meurtrières constitue un sujet particulier qu’on fait disparaître derrière le brouillard idéologique des discussions du racisme et nationalisme. Parfois on évoque même l’idéologie du surhomme nazi et de la race suprême japonaise.

      La vérité cachée du rôle central des médecins dans les organisations de la mort

      L’élément commun à toutes ces horreurs et à l’histoire du gentil médecin de famille qui paie de sa poche les indemnités de.ses patients est le pouvoir de sélection, de triage à la rampe d’Auschwitz comme dans le cabinet ou le médecin accepte ou refuse d’accorder un arrêt de travail pour cause de maladie.

      Les médecins participent à la rentabilisation des investissements dans le capital humain en limitant les arrêts maladie au minimum nécessaire. Ce triage concerne tous les assurés et condamne à la souffrance et la mort un plus grand nombre de travailleurs que celui des pauvres victimes du triage à la rampe d’Auschwitz. Au fond c’est la même chose.

      Il y a une différence remarquable entre les deux systèmes :

      L’extermination des juifs et opposants politiques n’était pas rentable immédiatement. On comptait sur l’effet à long terme dans un monde sans parasites et sous-hommes. La recherche des médecins japonais, plus « sérieuse » et efficace que les sordides expérimentations farfelues du côté allemand, misait sur sa rentabilisation par le succès des armes chimiques dans les guerres á venir. A partir de 1945 les me´decins japonais ont d’alleurs réussi à acheter leur impunité contre la communication de leurs données aux médecins proches du général MacArthur.

      Le médecin dans un pays démocratique par contre exerce un métier qui doit contribuer à la rentabilité immédiate de la coûteuse ressource humaine. Il doit réaliser l’équilibre entre les dépenses pour le bien aller des individus et le profit qu’ils sont censés produire pour la classe économique au pouvoir.

      Les expérimentations meurtrières des Mengele/Ishii ne font d’ailleurs que confirmer la véracité de la définition du médecin comme maître incontesté des décisions sur la vie et la mort des patients.

      #iatrocratie #mafia_médicale #médecine_de_classe
      #unit_731 #Auschwitz #médecine #crimes_de_guerre #armes_biologiques

  • Les femmes gagnent plus que les hommes des exercices physiques.
    http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article4581

    La norme est pour les deux ensembles, homme / femme, de lignes directrices recommandent un minimum de 150 minutes/semaine d’AP modérée ou 75 minutes/semaine d’AP vigoureuse, en plus d’au moins deux jours d’activités de renforcement musculaire par semaine. Les femmes pratiquent moins d’exercices physiques, leur nombre moindre cerne plus de meilleurs résultats. Sports / Santé

    / #Sport_et_compétitions_sportives, Sciences & Savoir, #médecine,_sciences,_technologie,_ADN,_vaccin,_médicaments,_découvertes, #Data_-_Données

    #Sports_/_Santé #Sciences_&_Savoir

  • Où va la #psychiatrie contemporaine ?
    https://laviedesidees.fr/Ou-va-la-psychiatrie-contemporaine

    Tout en affirmant la liberté des malades et la nécessité d’une conception non discriminante de la pathologie, la psychiatrie ne s’est pas pour autant émancipée de toute forme de contrainte et de normalisation.

    #médecine #Sciences #santé_mentale
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240220_psychiatrie.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240220_psychiatrie-2.docx

    • En tant qu’ils sont attachés à la quotidienneté, il n’est pas étonnant que ce soit du côté des #GEM et des réseaux sociaux de soin que, de nombreux problèmes et notions de la #psychothérapie_institutionnelle d’inspiration psychanalytique soient au travail, et ce malgré la place nouvelle que la liberté des patients a pu prendre et la fin des prises en charge asilaires au long cours. Des questions sont reformulées et des solutions nouvelles sont créées. Les GEM trouvent, tout à fait officiellement, leur modèle dans les #clubs_thérapeutiques qui furent expérimentés et élaborés dans certains asiles psychiatriques. Les formes possibles de l’accueil inconditionné des personnes en #souffrance_psychiques y sont aujourd’hui discutées, dans une reprise de la fonction de protection des asiles qu’il s’agit d’actualiser. De même, les dispositifs de pair-aidance, qui cherchent à institutionnaliser les soins que les personnes souffrantes peuvent se donner les unes aux autres reprennent et transforment les questions qui étaient liées au transfert et au contre-transfert dans les cures psychanalytiques et dans la psychothérapie institutionnelle.

      #subjectivités #soin #handicap

  • Chasse aux #arrêts_de_travail : des médecins dénoncent « une campagne d’#intimidation générale »

    L’#Assurance_maladie contrôle des centaines de #médecins_généralistes qui prescriraient, selon elle, trop d’arrêts de travail, et leur impose des #quotas au mépris de la situation des patients. Des médecins, « écœurés », contestent la démarche.

    « Ça m’a fait perdre confiance en ma pratique. Je me suis dit : où est le problème, qu’est-ce que je ne fais pas bien ? » Comme d’autres confrères et consœurs, Valérie* [1] fait partie des 1000 médecins généralistes ciblés par l’Assurance maladie, parmi 6000 préalablement identifiés. En cause : leur trop grande prescription d’arrêts de travail. En juin 2023, le ministre de l’Économie, #Bruno_Le_Maire, dénonçait l’« explosion » des arrêts de travail et disait vouloir lutter contre les « #dérives » et « #abus ».

    Selon le gouvernement, les arrêts maladie auraient augmenté de 7,9 % en un an, et de 30 % entre 2012 et 2022, passant de 6,4 millions arrêts prescrits en 2012 à 8,8 millions désormais. Les #indemnités_journalières, versées par l’Assurance maladie pour compenser le salaire lors d’un arrête maladie, coûteraient 16 milliards d’euros par an.

    D’où la #chasse_aux_arrêts_de_travail, initiée par le gouvernement, qui se poursuit avec le projet de loi de financement de la #Sécurité_sociale pour 2024, adopté le 4 décembre dernier. Parmi les mesures que la #loi prévoit : la limitation à trois jours des arrêts de travail prescrits lors d’une téléconsultation, sauf prescription par le médecin traitant ou incapacité de se rendre chez le médecin. « Il y a véritablement eu un changement de politique en 2023 », constate Théo Combes, vice-président du syndicat des médecins généralistes MG France. L’homme voit dans cette offensive « une campagne d’intimidation générale contre la profession ».

    La particularité des patients oubliée

    « Qu’on discute de nos pratiques oui, mais on est dans le #soin, pas dans l’abus », réagit Valérie. Installée en Vendée, elle a eu la surprise de recevoir en juin dernier un courrier recommandé de l’Assurance maladie l’informant de sa trop grande prescription d’indemnités journalières. « En six ans, il y a une personne de 36 ans qui m’a demandé de lui faire un arrêt pour un rhume, que j’ai refusé. Là je suis d’accord qu’il ne faut pas abuser, mais ça m’est arrivé une fois ! » met-elle en avant. Surtout, les critères de contrôles ne tiennent selon elle pas du tout compte des particularités des patientèles.

    Partagée entre son cabinet en libéral et l’hôpital, Valérie est spécialisée en addictologie. « Pour les patients avec des problématiques d’addiction, on sait que les arrêts de travail, pour virus ou autre, sont source de rechute. Donc après, la pente est plus longue à remonter, et les arrêts aussi par conséquent. Pareil pour des patients qui ont des troubles psychiatriques, pour qui c’est vraiment source de décompensation », explique-t-elle. La professionnelle de santé a en effet constaté que ses prescriptions d’indemnités journalières ne font qu’augmenter : « Mais parce que ma patientèle ciblée augmente », précise-t-elle.

    Médecin depuis 30 ans dans le troisième arrondissement de Lyon et membre du Syndicat des médecins libéraux (SML), Laurent Negrello fait le même constat : « Je suis dans un quartier un peu défavorisé, avec 50 % de logements sociaux et plus de difficultés, ce qui impacte probablement mes quotas d’arrêts de travail », appuie-t-il. Contrôlé pour la deuxième fois en cinq ans, il insiste aussi sur le contexte sanitaire global, qu’il a vu nettement évoluer ces dernières années. « L’inflation des arrêts est à mon avis aussi due à des #conditions_de_travail qui sont devenues très difficiles. Les gens sont en #burn-out, ont des #accidents, une pression de rentabilité… ». Les conditions de travail (contraintes posturales, exposition à des produits toxiques, risque d’accidents, etc.) ne se sont globalement pas améliorées depuis 30 ans selon le ministère du Travail.

    Crainte de dépasser le quota

    Et il devient de plus en plus compliqué d’obtenir un rendez-vous chez un spécialiste. « À Lyon, il faut trois mois pour voir un orthopédiste ou un rhumatologue, et je ne parle même pas des psys, avec qui c’est impossible… », explique le généraliste. Plus les délais de prise en charge s’allongent, plus l’état d’un patient peut se dégrader et nécessiter un arrêt de travail. La #Caisse_nationale_d’Assurance_maladie (#Cnam) assure de son côté à Basta ! que ses données sont « standardisées » : « On essaie d’avoir des patientèles comparables. » La limite d’arrêts à ne pas dépasser, c’est plus de deux fois la moyenne du département. « Une approche purement statistique », déplore Théo Combes de MG France, qui pointe une « méthodologie contestable à plusieurs niveaux ».

    Alors que Michel Chevalier, médecin depuis 36 ans à Ousse, près de Pau, se remémore d’anciens contrôles par « entretiens confraternels », il déplore aujourd’hui « une absence de dialogue ». Après la réception d’un courrier recommandé en juin, il a été convoqué avec deux jeunes consœurs : « L’une exerce dans un quartier très pauvre de Pau et une autre dans un désert médical. Elle a 34 ans et n’en dort plus depuis le mois de juin », rapporte ce membre du Syndicat de la médecine générale (SMG). Valérie confie elle aussi s’être sentie « stressée d’être pointée du doigt » à la réception de ce courrier : « Je trouve la procédure violente en elle-même. Sachant qu’on a des délégués médicaux qui viennent régulièrement nous voir, avec qui ça se passe très bien. Je pense que ça aurait pu être fait autrement », met-elle en avant.

    À la réception du courrier, chaque médecin dispose d’un mois pour répondre et faire ses observations à l’Assurance maladie, qui décidera si les éléments apportés sont « suffisamment probants », nous détaille le service communication de la Cnam. Si ce n’est pas le cas, la procédure prévoit qu’il soit proposé au médecin ciblé une #mise_sous_objectif (#MSO) : pendant six mois, ce dernier doit réduire ses prescriptions d’arrêts de travail de 15 à 20 %. Ce que Valérie a refusé, comme de nombreux autres : « Heureusement, car au sein du cabinet médical où j’exerce, plus personne ne prend de nouveaux patients sauf moi quand ça touche des problématiques d’addiction. »

    Déjà contrôlé il y a cinq alors, Laurent Negrello avait alors accepté « la mise sous objectif » : « Pendant six mois, j’ai réduit mon temps de travail, donc les patients allaient voir ailleurs et j’ai atteint mes objectifs », relate-t-il avec ironie. Cette année, il a refusé ce procédé qu’il juge « très pesant et stressant » : « On travaille toujours dans la #crainte de dépasser le quota qui nous est imparti. Mais on est un peu dans le #flou parce qu’on ne sait pas vraiment quels sont les quotas exacts. On nous dit qu’il faut baisser de 20 %, mais c’est une zone grise, on ne sait pas comment baisser nos arrêts. Quels sont les critères ? On a face à nous des situations concrètes, donc baisser de 20 % c’est absurde », critique-t-il.

    En cas de refus de mise sous objectif, les médecins peuvent être « mis sous accord préalable », procédure pendant laquelle un médecin conseil de l’Assurance maladie doit valider tous les arrêts de travail prescrits par le médecin sous 48 heures. Valérie raconte avoir été convoquée à une commission ayant pour but de statuer sur sa soumission à ce dispositif en novembre.

    Convoqués à des « #commissions_des_pénalités »

    « Ça m’a occasionné beaucoup de stress et pris beaucoup de temps. J’ai préparé un argumentaire, fait des recherches. Sans compter les deux heures de route pour 30 minutes d’entretien prises sur ma journée de repos », relate-t-elle. La commission a voté à l’unanimité le refus de sa « #mise_sous_accord_préalable ». Mais la professionnelle de santé a dû attendre la réception d’un courrier de la CPAM, mi-décembre, pour avoir la confirmation de « l’abandon de la procédure ».

    Le 7 novembre dernier, Théo Combes a participé à l’une de ces « commissions des pénalités », notamment composées de représentants syndicaux et médecins d’un côté, et de représentants des employeurs et salariés de l’autre. « Des médecins sont venus s’expliquer. Ils étaient proches de la rupture d’un point de vue moral et psychologique, avec des risques suicidaires qui transparaissaient. J’aurais pensé que leurs récits auraient ému un mort, même si c’est peut-être un peu fort. Mais après quatre heures d’audition on s’est dit que c’était vraiment une #mascarade. C’est un système pour broyer les gens, les humilier », décrit le vice-président de MG France, écœuré.

    À l’issue des contrôles, des #pénalités_financières de plusieurs milliers d’euros peuvent s’appliquer s’il n’y a pas d’évolution du nombre de prescriptions d’arrêts de travail. « C’est très, très infantilisant. On a l’impression d’être dans la #punition plutôt que dans le dialogue, et de faire ça intelligemment », déplore Valérie, qui craint pour ses patients tout autant que pour sa profession. « On peut très bien imaginer maintenant que les médecins vont sélectionner les patients et ne plus s’occuper de ceux qui leur font faire trop d’arrêts », ajoute Michel Chevalier.

    L’Assurance maladie espère de son côté avoir un bilan chiffré de ces mesures « autour du deuxième trimestre 2024 ». Michel Chevalier, lui, ne sera plus là : « Le côté dramatique, c’est que j’ai décidé de prendre ma retraite à la suite de ces contrôles, ça a été la goutte d’eau. » Comme il n’a pas trouvé de successeur, ses patients n’ont plus de médecin depuis le 1er janvier.

    https://basta.media/chasse-aux-arrets-de-travail-medecins-denoncent-campagne-intimidation

    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/1041346
    #santé #France #humiliation #infantilisation #macronisme

    • Pourquoi ce médecin prescrit trois fois plus d’arrêts de travail que la moyenne à #Dieppe

      Le docteur Tribillac exerce au #Val-Druel, à Dieppe. Sanctionné pour avoir délivré trop d’arrêts de travail, il tente en vain d’expliquer la situation à l’Assurance maladie.

      « Je suis un lanceur d’alerte ! », commence #Dominique_Tribillac. Depuis 35 ans, ce médecin de famille exerce dans le quartier du Val-Druel, à Dieppe (Seine-Maritime). Âgé de 70 ans, il est ce que l’on appelle « un retraité actif ».

      Il devrait prendre bientôt sa retraite, avant l’été, mais un problème administratif l’occupe fortement depuis plusieurs mois : l’Assurance maladie l’a sanctionné car il donne trop d’arrêts de travail.

      La Sécurité sociale a fait les calculs, entre le 1er septembre 2022 et le 28 février 2023 : 4 911 journées indemnisées ont été prescrites.
      Trois fois plus d’arrêts de travail

      « Le nombre d’indemnités journalières versées, rapporté au nombre de patients a été de 16,7 », indique l’Assurance maladie. « En Normandie et au sein du groupe de communes semblables au sens de l’indice de défavorisation de l’Insee, l’institut national de la statistique et des études économiques, pour les praticiens exerçant une activité comparable, le nombre d’indemnités journalières versées par nombre de patients est de 5,90. »

      Le médecin du Val-Druel prescrit donc trois fois plus d’arrêts de travail.

      Une lettre aux médecins de France

      Mais le docteur Tribillac ne se laisse pas faire. Il conteste notamment l’indice de défavorisation mis en place par la Sécurité sociale. Selon lui, il ne reflète pas la réalité. « Il est très mal conçu, souligne-t-il. Il fait le contraire de ce qu’il est censé faire ». C’est-à-dire protéger et prendre en compte les populations les plus fragiles.

      « J’ai débusqué une véritable saloperie, ajoute Dominique Tribillac qui a le sentiment qu’on l’empêche d’aller au bout de sa démarche : « L’Assurance maladie essaie d’étouffer l’affaire. »

      Il va même envoyer une lettre ouverte à tous les médecins de France pour raconter son histoire et sa trouvaille concernant le référentiel sécu.
      Une population défavorisée

      Ce docteur, très apprécié de ses patients, ne cesse d’invoquer l’usure de ces derniers, dans un quartier prioritaire de la cité dieppoise. « Un quartier fermé avec une patientèle qui ne bouge pas, précise le professionnel. En tant que médecin de famille, j’ai vu les grands-parents, les parents, les enfants… Les gens qui vivent là y restent. »

      Au Val-Druel, « plus de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, indique-t-il. Les #polypathologies sont donc plus fréquentes, en moyenne deux fois plus élevées ». Le secteur dans lequel le médecin évolue est principalement touché par des problématiques psychologiques, de l’obésité, de chômage, de tabac, de cancers…

      Manque de spécialistes

      Selon lui, la moitié des habitants de ce quartier populaire arrive à la retraite invalide. « Ce sont des travailleurs qui ont des conditions de travail difficiles, explique Dominique Tribillac. Jusqu’à 45 ans, ils n’ont pas d’arrêt, et après ça commence.

      L’usure se déclare à cause de mouvements répétitifs qui sollicitent les mêmes membres ou muscles. « On arrive donc à une situation bancale en fin de carrière. Le patient peut-il encore travailler ou non, faire le même job… »

      Le médecin pointe aussi le manque de spécialistes dont les délais d’attente pour un rendez-vous sont de plus en plus élevés : « Les gens ne peuvent donc pas reprendre leur travail sans les avoir vus. »

      Un médecin dans l’#illégalité

      Mais tous ces arguments n’ont pas convaincu l’Assurance maladie. Ainsi, le docteur Tribillac a été sanctionné malgré un avis favorable d’une commission consultative pour le laisser exercer sereinement. C’était sans compter sur la direction de la CPAM de Seine-Maritime qui en a décidé autrement. Cette dernière n’a d’ailleurs pas souhaité répondre à nos questions au sujet du médecin du Val-Druel.

      Il exerce donc sa fonction dans l’illégalité depuis le 1er février 2024, refusant de remplir des papiers supplémentaires permettant à un médecin-conseil de vérifier les prescriptions d’arrêts maladie du docteur Tribillac. On appelle cette procédure une MSAP, une mise sur accord préalable.

      « Pas coupable »

      « Je ne suis pas coupable ! », argue-t-il. « Je ne remplirai pas ces dossiers. Ce médecin-conseil devrait plutôt voir ou appeler lui-même mes patients. »

      Conséquence pour ces derniers : ils ne peuvent plus toucher leurs indemnités journalières versées par la Sécu.

      https://actu.fr/normandie/dieppe_76217/pourquoi-ce-medecin-prescrit-trois-fois-plus-darrets-de-travail-que-la-moyenne-

  • La Suède prévoit de relever le salaire minimum exigé pour les visas de travail - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/55258/la-suede-prevoit-de-relever-le-salaire-minimum-exige-pour-les-visas-de

    La Suède prévoit de relever le salaire minimum exigé pour les visas de travail
    Par La rédaction Publié le : 16/02/2024
    En Suède, les travailleurs non-européens devront désormais démontrer qu’ils gagnent plus de 34 200 couronnes (3 000 euros) pour obtenir un visa de travail et rester dans le pays. Auparavant, le montant demandé était de 27 360 couronnes (2 400 euros). Les secteurs du nettoyage et de la restauration - qui emploient de nombreux étrangers - dénoncent une mesure qui pourrait nuire à l’économie nationale. La Suède « a avant tout besoin d’une main-d’œuvre étrangère qualifiée et hautement qualifiée », a déclaré jeudi 15 février la ministre suédoise des Migrations, Maria Malmer Stenergard, lors d’un point presse. Or, le pays connaît « une forte immigration vers des emplois » peu qualifiés et faiblement rémunérés a-t-elle ajouté. Pour tenter de renverser la tendance, Stockholm prend des mesures drastiques. Le gouvernement, soutenu par le parti d’extrême-droite des Démocrates de Suède, veut augmenter le salaire minimum exigé pour obtenir un visa de travail pour les migrants qui ne viennent pas de l’Union européenne (UE). Une commission d’enquête, nommée par l’exécutif, propose d’établir le plafond demandé aux étrangers à 34 200 couronnes (3 000 euros), soit l’équivalent du salaire médian. Le gouvernement compte sur une entrée en vigueur du texte au 1er juin 2025.
    La restauration et le nettoyage, deux secteurs les plus affectés
    En novembre 2023 déjà, le montant exigé des personnes hors espace Schengen ou UE avait été doublé, passant de 13 000 couronnes (1 150 euros) à 27 360 couronnes (2 400 euros) – soit 80% du salaire médian. Les confédérations syndicales et les organisations d’employeurs avaient alors dénoncé une mesure qui risque non seulement de nuire à l’économie suédoise, mais qui met aussi à mal l’un des principes fondateurs de ce pays.
    Les étrangers se retrouveront-ils écartés du marché du travail parce que son accès est trop cher  ? Les entreprises pourront-elles vraiment s’en passer  ? Les deux secteurs les plus affectés par cette hausse du salaire minimum sont la restauration et le nettoyage. « Dans beaucoup de cas, il s’agit d’emplois qui doivent être occupés par des personnes qui vivent déjà en Suède », a défendu la ministre : c’est-à-dire des citoyens suédois ou des personnes d’origine étrangère ayant obtenu l’asile ou arrivés en Suède grâce au rapprochement familial, entre autres.
    Mais dans ces domaines, qui manquent cruellement de main-d’œuvre, les étrangers sont indispensables pour faire tourner l’activité. Maria Malmer Stenergard veut permettre des exceptions à la règle dans les cas où il existerait une pénurie des compétences, sur la base d’une liste élaborée par l’Agence des migrations.
    Et pour promouvoir l’arrivée de travailleurs qualifiés, la commission d’enquête souhaite que les chercheurs ne soient pas tenus de remplir ce nouveau niveau de salaire. Idem pour les médecins, infirmières ou dentistes étrangers qui occupent un emploi faiblement rémunéré dans l’attente de la reconnaissance de leur diplôme.
    La Suède, longtemps considérée comme une terre d’accueil et d’intégration pour les réfugiés, notamment syriens, affiche depuis 2022, et l’arrivée du nouveau gouvernement allié de l’extrême-droite, sa volonté de réduire drastiquement l’immigration et la criminalité. En octobre, une autre mesure avait donné le ton de la nouvelle politique de Stockholm. Les autorités avaient annoncé leur volonté de restreindre l’accès aux prestations sociales aux migrants non originaires d’un pays de l’UE. Le gouvernement souhaitait également introduire un plafond pour le cumul des aides, et imposer un délai entre l’arrivée de ces migrants en Suède et le moment où ils pourront toucher les allocations.
    « Depuis 2012, plus de 770 000 personnes ont immigré en Suède de pays hors de l’Union européenne et de l’Espace économique européen », rappelaient alors le Premier ministre Ulf Kristersson et les trois autres dirigeants des partis de la coalition. « Avec une politique d’intégration qui n’a pratiquement aucune exigence [envers les migrants] et aucune incitation à s’intégrer à la société, cette forte immigration a créé une Suède divisée », avaient-ils estimé.
    Pour ces responsables politiques, le pays scandinave a « d’importants problèmes » avec les personnes nées à l’étranger qui vivent de prestations sociales, sans pour autant fournir de données officielles étayant leurs propos.

    #Covid-19#migrant#migration#suede#immigration#visas#salaire#economie#integration#competence#personnelmedical#infirmiere#medecin#migrationqualifiee#sante

  • Des médecins cubains à l’hôpital de Guingamp : « Oui, c’est possible » | Le Télégramme
    https://www.letelegramme.fr/cotes-d-armor/guingamp-22200/des-medecins-cubains-a-lhopital-de-guingamp-oui-cest-possible-6527565.p


    Vincent Le Meaux, président de Guingamp-Paimpol Agglo, et Otto Vaillant, ambassadeur de Cuba en France, ont évoqué, ce vendredi, la faisabilité d’un déploiement de médecins cubains en France. Guingamp serait alors candidat pour une expérimentation pilote.
    Photo Emmanuel Nen

    Ce vendredi 16 février, une délégation cubaine, conduite par Otto Vaillant, l’ambassadeur de Cuba en France, est venue à Guingamp pour échanger sur la faisabilité du déploiement de médecins cubains au centre hospitalier guingampais. Des renforts qui seraient les bienvenus, les services de maternité et de chirurgie H24 étant en sursis, quand les urgences commencent à tousser, faute de personnels suffisants.

    Selon le diplomate cubain, ce projet est tout à fait envisageable : « Le déploiement peut être rapide, de l’ordre de quelques mois. Nous voulons aider la France, l’un des pays les plus importants au monde. Nos médecins ont une capacité à apprendre la langue locale. Ils l’ont démontré au Pakistan en parlant l’ourdou après quelques mois ».

    Un décret du président de la République
    La condition, pour cela, est un décret du président de la République. « Nous allons lui formuler notre demande par écrit, afin que nous devenions le territoire pilote de cette expérimentation qui, ensuite, pourrait se développer sur la Bretagne et la France. Le Premier ministre, dans son discours de politique générale, a manifesté son accord. Le ministre de la Santé a affirmé faire confiance aux territoires. On peut supposer que les planètes sont alignées et que le président de la République ira dans ce sens-là », affirme Vincent Le Meaux, le président de Guingamp-Paimpol Agglomération. Un territoire pilote car « nous sommes le territoire le plus pauvre en Bretagne, celui où il y a le plus de détresse sociale ».

    Après le Venezuela, Cuba et ses médecins à la rescousse de la France…

    • « Nous voulons aider la France, l’un des pays les plus importants au monde. » [...] Un territoire pilote car « nous sommes le territoire le plus pauvre en Bretagne, celui où il y a le plus de détresse sociale ».

      La France leader des pays en voie de dé-développement, sans doute, mais pourquoi « un des plus importants au monde » ?

    • Bah, faut pas non plus être trop pessimiste : en milieu rural, on manque de médecins mais on a des producteurs/dealers. Ça fera sûrement « patienter » les gueux.

      Trafic de cocaïne à Saint-Étienne-de-Mer-Morte, culture de cannabis dans une maison de Villeneuve-en-Retz, commerce de crack dans la campagne pornicaise… Les gendarmes de la compagnie de Pornic ont démantelé quatorze réseaux de stupéfiants en 2023.

      (Fouette Rance du 17/02/2024)

    • Des médecins venus de Cuba au chevet des hôpitaux de Calabre
      https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2023/05/28/des-medecins-venus-de-cuba-au-chevet-des-hopitaux-de-calabre_6175153_4500055

      (...) l’Etat cubain conserve dans ses caisses 75 % des 4 700 euros versés par l’Italie pour chaque médecin. (...) L’expatriation de médecins est ainsi devenue la première source de devises de la nation cubaine (entre 6 et 8 milliards de dollars par an).

      https://justpaste.it/ftemt

      #médecine #déserts_médicaux #hôpital #intérimaires

    • Les médecins cubains ont des qualités professionnelles avec une formation exceptionnelle, et ils sont une denrée exportable précieuse. A Toulouse, ce sont des cabinets d’ophtalmologie de médecins espagnols qui font maintenant relais au grand vide fabriqué par la politique de destructions des postes de soins qui a été menée en france. Oui, parce que tout cela était parfaitement prévisible, il y a 15 ans il suffisait de regarder les courbes d’âge des médecins (toutes professions confondues) et le numérus closus de celleux qui entraient dans la profession. C’est une vraie honte de dépouiller les autres pays de leurs médecins.

      Une arme diplomatique, mais aussi une véritable source de revenus pour un pays aujourd’hui confronté à l’une de ses pires crises économiques.

      L’expatriation de médecins est ainsi devenue la première source de devises de la nation cubaine (entre 6 et 8 milliards de dollars par an). Malgré un manque criant de ressources et un embargo économique qui étouffe le pays depuis plus de soixante ans, la petite île communiste continue tant bien que mal à financer une couverture sociale universelle et gratuite. Pour ce faire, elle compte sur la plus forte densité de médecins par habitant au monde (8 pour 1 000) pour exporter son savoir-faire, notamment à destination des pays du Sud. Actuellement, cinquante-huit pays reçoivent l’aide de ces brigades.

  • « Aller chercher les médecins à l’étranger est un manque de respect pour les pays où ils sont formés »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/08/aller-chercher-les-medecins-a-l-etranger-est-un-manque-de-respect-pour-les-p

    « Aller chercher les médecins à l’étranger est un manque de respect pour les pays où ils sont formés »
    Jean-Luc Dumas, Directeur général de la Cidmef
    Le recrutement de médecins formés en dehors de l’Union européenne ne saurait compenser le besoin urgent d’augmenter les capacités de formation en France, estime Jean-Luc Dumas, directeur général de la Conférence internationale des doyens et des
facultés de médecine d’expression française, dans une tribune au « Monde ».
    La mesure sidérante d’aller chercher les médecins des pays étrangers a été officialisée. Que le premier ministre français en fasse la déclaration devant le Parlement national est une décision lourde de sens ; que cette volonté soit portée en solution aux insuffisances de notre formation médicale est l’aveu d’un manque de respect pour le développement des systèmes de santé dans l’espace francophone.
    Car il ne faut pas s’y tromper : ce ne sont pas nos confrères formés dans les grandes universités anglophones qui sont attendus, mais bien des futurs médecins de locution française provenant de pays historiquement liés à notre culture médicale. Ces médecins sont formés majoritairement dans des facultés qui, depuis des décennies, font l’effort de se structurer au niveau des standards internationaux, avec le soutien public d’Etats souvent démunis, dans le contexte de besoins en santé immenses des populations de ces territoires. Et ce sont bien ces praticiens venant de pays que l’on nommait autrefois « en voie de développement » que la France semble vouloir mettre à son service.
    Quelle confirmation du renoncement et de la négation des politiques de coopération médicale que notre pays a conduites depuis plus de cinquante ans ; quel affront pour ceux qui les ont déployées et, plus largement, pour nos universités ! Dans le contexte apparent de suspicion, si ce n’est de rejet, vis-à-vis de l’héritage de notre culture dans les pays marqués par la colonisation, cette annonce ne peut que renforcer le sentiment de défiance, y compris à l’échelle politique, tant l’enjeu de la santé est un déterminant sociétal.
    L’année 2024 sera marquée par la tenue en France du sommet de l’Organisation internationale de la francophonie. Plus de quatre-vingts Etats et gouvernements y sont représentés, mais, malgré ce contexte, la préservation des relations indispensables pour ces partenariats n’a visiblement pas incité à retenir la parole officielle et la négation dont elle fait preuve à l’encontre des besoins en santé de ces pays. Quelles sont donc les valeurs que la langue française véhicule dans son espace de diffusion ? Solidarité, respect, humanisme ? Aucun argument ne peut tenir face à la gravité de l’image qui est présentée. Certes, beaucoup de ces médecins formés à l’étranger demandent à venir exercer, et même s’installer, en France. Mais la régulation d’un système global de formation et d’échanges doit être la considération supérieure pour préparer l’avenir de tous. Et c’est justement la considération des besoins de nos partenaires qui doit guider les initiatives de cet ordre. La mobilité internationale doit être une source de formation à l’identité professionnelle et non pas l’objet d’une préemption de ressources humaines.
    Certes, nos politiques et nos facultés se sont longtemps contentés de former trop peu de médecins, avec un manque de prévision, mais c’est précisément un effort significatif d’augmentation des capacités de formation et donc de moyens appropriés qui doit être mis en place immédiatement. Certes, les difficultés d’accès aux soins de premier recours en France sont pressantes, mais ce n’est pas en désespérant les étudiants et en culpabilisant les professionnels que les solutions seront créées : l’accès équitable aux études de santé peut être revu, tout comme la reconnaissance de la diversité des nouvelles compétences des professionnels de soins.
    Gageons que le bon sens reviendra au premier plan et que nos administrations de haut rang sauront se mobiliser pour pondérer des annonces détachées d’un contexte de faisabilité. Gageons que ce qui apparaît comme une faute de communication déclenchera une prise de conscience salvatrice et un sursaut constructif.
    Jean-Luc Dumas est directeur général de la Conférence internationale des doyens et des facultés de médecine d’expression française (Cidmef), ancien doyen de la faculté de médecine de Bobigny, université Sorbonne-Paris-Nord.

    #Covid-19#migrant#migration#sante#medecin#francophonie#formation#PADHUE#emigration#systemesante#accessante#politiquemigratoire#france

  • Un médecin du travail jugé trop conciliant avec des salariés a été sanctionné
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/080224/un-medecin-du-travail-juge-trop-conciliant-avec-des-salaries-ete-sanctionn

    Jean-Louis Zylberberg a été lourdement sanctionné par l’Ordre pour avoir délivré des certificats d’inaptitude à six salariés de la même entreprise. Leur patron jugeait qu’il s’agissait d’avis « de complaisance ». L’affaire repose le débat autour du secret médical dans le monde du travail.
    [...]
    Pour la CGT, syndicat auquel appartient le médecin sanctionné, c’est au contraire une « attaque inconcevable à l’encontre de l’autonomie d’exercice des médecins et, à terme, dangereuse pour la santé des salarié·es ». Dans un communiqué de soutien, l’organisation insiste : « Les intérêts des salarié·es et la protection de leur santé ne peuvent pas être bafoués par les intérêts économiques du patronat. » Sollicité par Mediapart, le conseil de l’ordre des médecins n’a pas donné suite.

    Depuis 2007, tout employeur peut attaquer un médecin auprès de l’Ordre « dès lors qu’il est lésé de manière suffisamment directe et certaine par un certificat ou une attestation établie ». Avant cette date, seuls les patient·es, assurances, la Sécurité sociale ou des associations de malades pouvaient introduire une plainte disciplinaire. Mais un mot, ajouté dans un article du Code de la santé publique, a tout changé. L’adverbe « notamment » a été accolé à la liste des plaignant·es potentiel·les.

    « Les employeurs se sont engouffrés dans la brèche », déplore le député insoumis François Ruffin, qui a adressé une question écrite fin décembre 2023 au ministre du travail, à la suite de la convocation du docteur Zylberberg. « De plus en plus de médecins doivent faire face à des sanctions disciplinaires pour avoir simplement fait leur travail : tenter de protéger la santé des salariés », ajoute l’élu LFI dans son texte. La CGT abonde et demande, dans son communiqué, que « l’État prenne ses pleines responsabilités, en retirant le terme “notamment” […] du Code de la santé publique » afin de garantir « l’indépendance et la protection de la médecine du travail ».

    Les certificats et attestations faisant le lien entre la santé physique ou mentale et le travail sont dans la ligne de mire des employeurs. L’association Santé et médecine du travail (a-SMT), présidée par Jean-Louis Zylberberg, estime que deux cent plaintes sont ainsi portées chaque année contre des praticien·nes, dont la moitié concernerait les médecins du travail.
    [...]
    Le secret médical est ici une question centrale. « Il est inadmissible qu’un·e médecin ait à choisir entre violer le secret médical en divulguant des informations sur le/la patient·e ou renoncer à se défendre et à avoir un procès équitable », tempête la CGT. Dominique Huez, de l’association Santé et médecine du travail, abonde : « Dans le cas du docteur Zylberberg, des avis d’inaptitude sont pointés. Or, il nous est interdit de parler de la santé du patient sur ces certificats car ils sont transmis à l’employeur et cela briserait le secret médical ! »
    [...]
    Le docteur Zylberberg ajoute : « La parole des salariés est gommée. Personne ne les entend alors que ce sont les seuls qui peuvent parler. Mais le principe du contradictoire ne fait pas partie de la procédure », ironise-t-il.

    #santé #travail #santé_au_travail #médecine_du_travail

  • Cadences, sous-traitance, pression… quand le travail tue

    « Morts au travail : l’hécatombe. » Deux personnes meurent chaque jour, en moyenne, dans un accident dans le cadre de leur emploi. Ce chiffre, sous estimé, qui n’intègre pas les suicides ou les maladies, illustre un problème systémique

    « J’ai appris la mort de mon frère sur Facebook : la radio locale avait publié un article disant qu’un homme d’une trentaine d’années était décédé près de la carrière, raconte Candice Carton. J’ai eu un mauvais pressentiment, j’ai appelé la gendarmerie, c’était bien lui… L’entreprise a attendu le lendemain pour joindre notre mère. » Son frère Cédric aurait été frappé par une pierre à la suite d’un tir de mine le 28 juillet 2021, dans une carrière à Wallers-en-Fagne (Nord). Il travaillait depuis dix-sept ans pour le Comptoir des calcaires et matériaux, filiale du groupe Colas.

    Deux ans et demi plus tard, rien ne permet de certifier les causes de la mort du mécanicien-soudeur de 41 ans. D’abord close, l’enquête de gendarmerie a été rouverte en septembre 2023 à la suite des conclusions de l’inspection du travail, qui a pointé la dizaine d’infractions dont est responsable l’entreprise. Cédric Carton n’avait pas le boîtier pour les travailleurs isolés, qui déclenche une alarme en cas de chute. « Ils l’ont retrouvé deux heures après, se souvient sa sœur. Le directeur de la carrière m’a dit que mon frère était en sécurité, et qu’il avait fait un malaise… alors qu’il avait un trou béant de 20 centimètres de profondeur de la gorge au thorax. » En quête de réponses, elle a voulu déposer plainte deux fois, chacune des deux refusée, multiplié les courriers au procureur, pris deux avocats… Sans avoir le fin mot de cette triste histoire.

    Que s’est-il passé ? Est-ce la « faute à pas de chance », les « risques du métier » ? Qui est responsable ? Chaque année, des centaines de familles sont confrontées à ces questions après la mort d’un proche dans un accident du travail (AT), c’est-à-dire survenu « par le fait ou à l’occasion du travail, quelle qu’en soit la cause ».

    « Un chauffeur routier a été retrouvé mort dans son camion », « Un ouvrier de 44 ans a été électrocuté », « Un homme meurt écrasé par une branche d’arbre », « Deux ouvriers roumains, un père et son fils, trouvent la mort sur un chantier à Istres [Bouches-du-Rhône] »… Le compte X de Matthieu Lépine, un professeur d’histoire-géographie, qui recense depuis 2019 les accidents dramatiques à partir des coupures de presse locale, illustre l’ampleur du phénomène. Vingt-huit ont été comptabilisés depuis janvier.

    En 2022, selon les derniers chiffres connus, 738 décès ont été recensés parmi les AT reconnus. Soit deux morts par jour. Un chiffre en hausse de 14 % sur un an, mais stable par rapport à 2019. Et, depuis une quinzaine d’années, il ne baisse plus. A cela s’ajoutent 286 accidents de trajet mortels (survenus entre le domicile et le lieu de travail) et 203 décès consécutifs à une maladie professionnelle.

    Et encore, ces statistiques sont loin de cerner l’ampleur du problème. La Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) ne couvre que les salariés du régime général et n’intègre donc ni la fonction publique, ni les agriculteurs, ni les marins-pêcheurs, la majorité des chefs d’entreprise ou les autoentrepreneurs. C’est ainsi qu’en 2022 la Mutualité sociale agricole (MSA) a dénombré 151 accidents mortels dans le secteur des travaux agricoles, 20 % de plus qu’en 2019.

    Pour disposer de chiffres plus complets, il faut se tourner vers la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail (Dares). Problème : sa dernière étude porte sur 2019… A cette époque, elle dénombrait 790 AT mortels chez les salariés affiliés au régime général ou à la MSA et les agents des fonctions publiques territoriale et hospitalière.

    Le secteur de la construction est celui où la fréquence des accidents mortels est la plus importante (le triple de la moyenne). Arrivent ensuite l’agriculture, la sylviculture et la pêche, le travail du bois et les transports-entreposage. Quatre-vingt-dix pour cent des victimes sont des hommes, et les ouvriers ont cinq fois plus de risques de perdre la vie que les cadres.

    Les accidents mortels sont deux fois plus fréquents chez les intérimaires. (...)
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/06/cadences-sous-traitance-pression-quand-le-travail-tue_6214988_3234.html

    https://justpaste.it/2ozrb

    #travail #accidents_du_travail #le_travail_tue

    • Accidents du travail : la lenteur de la justice pour faire reconnaître la responsabilité de l’employeur
      https://www.lemonde.fr/emploi/article/2024/02/06/morts-au-travail-la-douloureuse-lenteur-de-la-justice_6215011_1698637.html

      Les familles de victimes d’accidents mortels doivent parfois attendre des années avant de voir le bout de procédures judiciaires complexes.

      Pour ceux qui ont perdu un proche à la suite d’un accident du travail, la reconnaissance de la responsabilité de l’employeur est essentielle. Mais les procédures, d’ordre pénal ou civil, tournent parfois au parcours du combattant, voire s’étirent sur des années, ajoutant à la douleur des familles. Fabienne Bérard, du collectif Familles : stop à la mort au travail, cite l’exemple de Fanny Maquin, qui a perdu son mari cordiste, Vincent, il y a douze ans. Et qui n’est toujours pas passée en justice pour être indemnisée. « Comme souvent, il y a eu un grand nombre de renvois d’audience, explique-t-elle. L’avocat adverse met en avant que, depuis ce temps, elle a reconstruit une cellule familiale et que le préjudice ne peut pas être établi de la même manière… »

      Tout accident du travail mortel est suivi d’une enquête de l’inspection du travail (qui doit intervenir dans les douze heures), et de la gendarmerie ou de la police. Depuis 2019, les deux institutions peuvent mener une enquête en commun, mais c’est encore rare. Et souvent, l’enquête de l’inspection dure plusieurs mois, parce que les effectifs manquent pour mener à bien les constats immédiats, les auditions des témoins ou encore solliciter des documents auprès de l’entreprise.

      Ces investigations permettent de déterminer si la responsabilité pénale de l’employeur est engagée. Si les règles de santé et sécurité n’ont pas été respectées, l’inspection du travail en avise le procureur, qui est le seul à pouvoir ouvrir une procédure. « Dès lors, le parquet a trois possibilités, explique l’avocat Ralph Blindauer, qui accompagne souvent des familles. Soit l’affaire est classée sans suite, soit une information judiciaire avec juge d’instruction est ouverte, car le cas est jugé complexe, soit, le plus couramment, une ou plusieurs personnes sont citées à comparaître devant le tribunal correctionnel. »

      Un montant négligeable

      En cas de poursuite au pénal, l’employeur est fréquemment condamné pour homicide involontaire en tant que personne morale – ce qui est peu satisfaisant pour les victimes, et peu dissuasif. L’amende est en effet de 375 000 euros maximum, un montant négligeable pour un grand groupe. L’employeur est plus rarement condamné en tant que personne physique, car il est difficile d’identifier le responsable de la sécurité – la peine encourue est alors l’emprisonnement.

      Dans le cas d’une procédure au civil, la reconnaissance d’une « faute inexcusable » de l’employeur permet aux ayants droit (conjoints, enfants ou ascendants) d’obtenir la majoration de leur rente, ainsi que l’indemnisation de leur préjudice moral. La faute est caractérisée lorsque l’entreprise a exposé son salarié à un danger dont il avait, ou aurait dû, avoir conscience et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

      « Le nœud du sujet, c’est la conscience du danger, en particulier lors d’un malaise mortel, explique Morane Keim-Bagot, professeure de droit à l’université de Strasbourg. Les employeurs remettent en question le caractère professionnel de l’accident, en démontrant qu’il y a une cause étrangère exclusive. » Certains prétendent ainsi que la victime souffrait d’un problème cardiaque décelé au moment de l’autopsie, de surpoids, de stress ou de tabagisme.

      « Si vous tombez sur un inspecteur surchargé, un parquet qui s’y attelle moyennement, des gendarmes non spécialisés et débordés, les procédures durent facilement des années, sans compter les renvois d’audience fréquents, conclut Me Blindauer. La longueur très variable de ces affaires illustre aussi le manque de moyens de la #justice. »

      #responsabilité_de_l’employeur #inspection_du_travail #responsabilité_pénale

    • Entre déni des entreprises et manque de données, l’invisibilisation des suicides liés au travail

      https://www.lemonde.fr/emploi/article/2024/02/06/entre-deni-des-entreprises-et-manque-de-donnees-l-invisibilisation-des-suici

      Le manque de prise en compte du mal-être au travail renforce les risques d’accidents dramatiques.
      Par Anne Rodier

      « La dernière conversation que j’ai eue avec mon mari [Jean-Lou Cordelle] samedi 4 juin [2022] vers 22 heures concernait les dossiers en cours à son travail. Le lendemain matin, mon fils découvrait son père au bout d’une corde pendu dans le jardin », témoigne Christelle Cordelle dans la lettre adressée aux représentants du personnel d’Orange pour leur donner des précisions sur l’état psychologique de son mari avant son suicide, à l’âge de 51 ans, après des mois de surcharge de travail, d’alertes vaines à la hiérarchie et à la médecine du travail.

      Son acte, finalement reconnu comme « accident de service » – c’est ainsi que sont nommés les accidents du travail (#AT) des fonctionnaires –, n’est pas recensé dans le bilan annuel de la Sécurité sociale. Celui-ci ne tient pas, en effet, compte de la fonction publique, invisibilisant les actes désespérés des infirmières, des professeurs ou encore des policiers.

      L’Assurance-maladie parle d’une quarantaine de suicides-accidents du travail par an. Un chiffre stable, représentant 5 % du total des accidents du travail mortels, mais qui serait nettement sous-évalué. C’est entre vingt et trente fois plus, affirme l’Association d’aide aux victimes et aux organismes confrontés aux suicides et dépressions professionnelles (ASD-pro), qui l’évalue plutôt entre 800 et 1 300 chaque année, sur la base d’une étude épidémiologique sur les causes du suicide au travail réalisée fin 2021 par Santé publique France. https://www.santepubliquefrance.fr/recherche/#search=Suicide%20et%20activité%20professionnelle%20en%20France

      L’explosion des risques psychosociaux (RPS) en entreprise constatée étude après étude et par la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM : https://assurance-maladie.ameli.fr/etudes-et-donnees/2018-sante-travail-affections-psychiques) apporte de l’eau au moulin de l’ASD-pro : 1 814 maladies professionnelles relèvent de maladies psychiques, en augmentation régulière, note le rapport 2022. Quant au dernier baromètre du cabinet Empreinte humaine, publié en novembre 2023, il est sans équivoque : près d’un salarié sur deux (48 %) était en détresse psychologique en 2023.

      « Passage à l’acte brutal »

      La mécanique mortifère de la souffrance au travail est connue. « Les mécanismes à l’œuvre semblent être toujours liés : atteintes à la professionnalité et à l’identité professionnelle, perte de l’estime de soi, apparition d’un sentiment d’impuissance », explique Philippe Zawieja, psychosociologue au cabinet Almagora.
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      Tous les RPS ne conduisent pas au geste fatal. « Il y a moins de suicidés chez les #salariés que parmi les #chômeurs, et 90 % des suicides interviennent sur fond de problème psychiatrique antérieur », souligne M. Zawieja. Mais « il existe des actes suicidaires qui ne sont pas la conséquence d’un état dépressif antérieur, qui marquent un passage à l’acte brutal [raptus], lié à un élément déclencheur conjoncturel », indique l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) https://www.inrs.fr/risques/suicide-travail/ce-qu-il-faut-retenir.html. Comme ce fut le cas du management toxique institutionnel à France Télécom. C’est alors que survient l’accident.

      « Pour Jean-Lou, tout s’est passé insidieusement, témoigne sa veuve. Il était en surcharge de travail depuis octobre-novembre 2021, avec des salariés non remplacés, des départs en retraite. Un jour de janvier, je l’ai vu buguer devant son ordinateur. A partir de là, j’ai été plus attentive. En mars [2022], ils ont allégé sa charge de travail mais insuffisamment. En avril, il a craqué. La médecine du travail a été prévenue. Il a finalement été mis en arrêt, sauf qu’il continuait à recevoir des mails. Ils lui avaient laissé son portable professionnel et il n’y avait pas de message de gestion d’absence renvoyant vers un autre contact. Jusqu’au bout, Orange n’a pas pris la mesure ».

      Le plus souvent, les suicides au travail sont invisibilisés, au niveau de l’entreprise d’abord, puis des statistiques. « Classiquement, l’entreprise, quand elle n’est pas tout simplement dans le déni, considère que c’est une affaire privée et que le travail n’en est pas la cause », explique le juriste Loïc Lerouge, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et spécialiste du sujet.

      Un déni qui a valu à Renault la première condamnation pour « faute inexcusable de l’employeur pour n’avoir pas pris les mesures nécessaires alors qu’il avait conscience du danger » concernant les salariés du Technocentre de Guyancourt (Yvelines) qui ont mis fin à leurs jours dans les années 2000. [en 2012 https://www.lemonde.fr/societe/article/2012/05/12/suicide-au-technocentre-renault-condamne-pour-faute-inexcusable_1700400_3224 « On reconnaît pleinement la responsabilité de la personne morale de l’entreprise depuis l’affaire #France_Télécom », précise M. Lerouge.

      Caractérisation délicate

      L’#invisibilisation des suicides commence par le non-dit. En réaction aux deux suicides de juin 2023 à la Banque de France, où l’une des victimes avait laissé une lettre incriminant clairement ses conditions de travail, la direction a déclaré avoir « fait ce qui s’impose » après un tel drame https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/10/10/a-la-banque-de-france-le-suicide-de-deux-salaries-empoisonne-le-dialogue-soc . Puis, lors des vœux 2024 adressés au personnel le 2 janvier, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, n’a pas prononcé le mot « suicide », évoquant les « décès dramatiques de certains collègues ». Et s’il a déclaré « prendre au sérieux les résultats et les suggestions » de l’enquête qui acte le problème de #surcharge_de_travail, présentée au comité social et économique extraordinaire du 18 janvier, il n’a pas mis sur pause le plan de réduction des effectifs dans la filière fiduciaire. Celle-là même où travaillaient les deux salariés qui ont mis fin à leurs jours. « Beaucoup de gens n’ont pas les moyens de faire correctement leur travail et sont en souffrance. Il existe à la Banque de France une forme de maltraitance généralisée », affirme Emmanuel Kern, un élu CGT de l’institution.

      La caractérisation des suicides en accidents du travail est un exercice délicat, au cœur de la reconnaissance de la responsabilité de l’employeur. Pour Santé publique France, la définition est assez simple (« Surveillance des suicides en lien potentiel avec le travail », 2021). Il s’agit de tout suicide pour lequel au moins une des situations suivantes était présente : la survenue du décès sur le lieu du travail ; une lettre laissée par la victime mettant en cause ses conditions de travail ; le décès en tenue de travail alors que la victime ne travaillait pas ; le témoignage de proches mettant en cause les conditions de travail de la victime ; des difficultés connues liées au travail recueillies auprès des proches ou auprès des enquêteurs.

      Mais pour l’administration, le champ est beaucoup plus restreint : l’Assurance-maladie prend en compte « l’acte intervenu au temps et au lieu de travail ». Et la reconnaissance n’aura pas lieu si des éléments au cours de l’enquête permettent d’établir que « le travail n’est en rien à l’origine du décès », précise la charte sur les accidents du travail rédigée à destination des enquêteurs de la Sécurité sociale https://www.atousante.com/wp-content/uploads/2011/05/Charte-des-AT-MP-acte-suicidaire-et-accident-du-travail.pdf. « En dehors du lieu de travail, c’est à la famille de faire la preuve du lien avec l’activité professionnelle », explique Michel Lallier, président de l’ASD-pro. Une vision nettement plus restrictive, qui explique cet écart entre les bilans des suicides au travail.

      #suicide_au_travail #risques_psychosociaux #médecine_du_travail #conditions_de_travail #management #cadences #pression #surcharge_de_travail

    • Manque de sécurité sur les chantiers : « Notre fils est mort pour 6 000 euros », Aline Leclerc
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/07/manque-de-securite-sur-les-chantiers-notre-fils-est-mort-pour-6-000-euros_62

      Pour réduire les coûts et tenir les délais, certaines entreprises du bâtiment accumulent les négligences et infractions au code du travail, susceptibles d’engendrer de graves accidents du travail

      Alban Millot avait trouvé l’offre d’emploi sur Leboncoin. Touche-à-tout débrouillard enchaînant les petits boulots, il n’avait aucune expérience dans la pose de panneaux photovoltaïques ni dans le travail en hauteur. Trois semaines après son embauche, il est passé à travers la toiture d’un hangar, le 10 mars 2021. Une chute mortelle de plus de 5 mètres. Le jour de ses 25 ans.

      « Quand le gendarme vous l’annonce, il parle d’un “accident”, comme on dit quand quelqu’un meurt sur la route », se rappelle douloureusement Laurent Millot, son père. La chute renvoie toujours d’abord l’idée d’une erreur d’attention, d’un déséquilibre. La faute à pas de chance. Et à la victime surtout – Alban n’a-t-il pas marché sur une plaque translucide qu’il savait fragile ?

      Ce n’est que quelque temps après que reviennent en mémoire ces petites phrases qui donnent à l’« accident » un autre sens. « J’avais eu Alban au téléphone une semaine avant. Il m’a dit que son travail était hyperdangereux, et qu’il allait s’acheter son propre harnais parce que celui fourni par la boîte était bas de gamme », raconte Véronique Millot, sa mère. Quand pour la rassurer il lui a dit : « Je fais ça seulement jusqu’à l’été », elle a répondu : « Te tue pas pour un boulot… »

      Inexpérimentés

      L’enquête, étoffée dans ce dossier, a mis en évidence une effarante liste de dysfonctionnements et d’infractions au code du travail de la PME qui l’employait, dont l’activité officiellement enregistrée (son code NAF ou APE) était « commerce de détail en quincaillerie, peintures ». Le seul technicien dûment diplômé avait quitté la société deux mois avant l’embauche d’Alban. Sur les vingt-cinq salariés, une dizaine de commerciaux et seulement trois équipes de deux poseurs, lesquels étaient en conséquence soumis à un rythme intense pour honorer les commandes.

      Avant sa mort, Alban et son collègue de 20 ans, et trois mois d’ancienneté seulement, étaient partis le lundi de Narbonne (Aude) pour un premier chantier en Charente, puis un autre en Ille-et-Vilaine, avant un troisième, le lendemain, dans les Côtes-d’Armor, et un ultime, le mercredi, en Ille-et-Villaine, où a eu lieu l’accident. Alban, seul à avoir le permis, avait conduit toute la route.

      Inexpérimentés, les deux hommes n’avaient reçu qu’une formation sommaire à la sécurité. Et, surtout, ne disposaient pas de harnais complets pour s’attacher, comme l’a constaté l’inspectrice du travail le jour du drame.

      « Méconnaissance totale » et « déconcertante » du dirigeant

      Sans matériel, ils ont loué sur place une échelle chez Kiloutou. « Combien pèse une plaque photovoltaïque ? », a demandé le président du tribunal correctionnel de Rennes, lors du procès en première instance. « Dix-huit kilos », a répondu le chef d’entreprise. « Il faut monter l’échelle avec le panneau sous le bras ? », s’est étonné le président. « Cela dépend du chantier. »

      Il sera démontré pendant l’enquête, puis à l’audience, la « méconnaissance totale » et « déconcertante » du dirigeant, commercial de formation, de la réglementation en vigueur sur le travail en hauteur comme sur les habilitations électriques. Il n’avait entrepris aucune démarche d’évaluation des risques. Et ce, alors que deux autres accidents non mortels avaient eu lieu peu de temps avant sur ses chantiers.

      Dans son jugement du 6 juin 2023, le tribunal a reconnu l’employeur – et non l’entreprise, déjà liquidée – coupable d’homicide involontaire, retenant la circonstance aggravante de « violation manifestement délibérée » d’une obligation de sécurité ou de prudence, « tant l’inobservation était inscrite dans ses habitudes ».

      Enjeux financiers

      Car ces négligences tragiques cachent aussi des enjeux financiers. Monter un échafaudage, c’est plusieurs heures perdues dans un planning serré, et un surcoût de 6 000 euros, qui aurait doublé le devis, a chiffré un ouvrier à l’audience. « En somme, notre fils est mort pour 6 000 euros », souligne Mme Millot.

      L’affaire résonne avec une autre, dans laquelle Eiffage Construction Gard et un sous-traitant ont été condamnés en première instance comme en appel lors des procès qui se sont tenus en mai 2021 et avril 2022, à Nîmes. Mickaël Beccavin, cordiste de 39 ans, a fait une chute mortelle le 6 mars 2018, alors qu’il assemblait des balcons sur les logements d’un chantier d’envergure. Pour une raison restée inexpliquée, une corde sur laquelle il était suspendu a été retrouvée sectionnée, trop courte de plusieurs mètres. Quand la défense de l’entreprise a plaidé la seule responsabilité de la victime, qui aurait mal vérifié son matériel, l’inspecteur du travail a proposé une autre analyse.

      « On peut vous expliquer que le cordiste doit faire attention, mais la question n’est pas que là. La question est : est-ce qu’on devait faire appel à des cordistes pour ce chantier ? », a expliqué Roland Migliore à la barre, en mai 2021. Car la législation n’autorise les travaux sur cordes, particulièrement accidentogènes, qu’en dernier recours : cette pratique n’est possible que si aucun autre dispositif de protection dite « collective » (échafaudage, nacelle…) n’est envisageable. « La protection collective protège le salarié indépendamment de ce qu’il peut faire lui. S’il s’attache mal, il est protégé, rappelle l’inspecteur du travail. Au contraire, si l’on choisit la protection individuelle, on fait tout reposer sur le salarié. »

      « Précipitation »

      Le recours à la corde était apparu à l’audience comme un choix de dernière minute, sur un chantier où « tout le monde était pressé ». L’inspecteur du travail avait alors souligné cet aspect : « Malheureusement, dans le BTP, les contraintes sur les délais de livraison poussent à la précipitation : on improvise, quitte à ne pas respecter le plan général de coordination. »

      Secrétaire CGT-Construction, bois et ameublement de Nouvelle-Aquitaine, Denis Boutineau n’en peut plus de compter les morts. « Très souvent, c’est lié à un manque de sécurité. Quand vous êtes en ville, regardez les gens qui travaillent sur les toits, il n’y a aucune protection ! Pourquoi ? Pour des raisons économiques ! » Il cite ainsi le cas d’un jeune couvreur passé à travers un toit Everite. « L’employeur avait fait deux devis ! Un avec la mise en sécurité, un sans ! Bien sûr, le second était moins cher. Lequel croyez-vous qu’a accepté le client ? »

      Caroline Dilly reste, elle aussi, hantée par un échange avec son fils Benjamin, 23 ans, quelque temps avant sa mort, le 28 février 2022. Couvreur lui aussi, il aurait chuté en revenant dans la nacelle après avoir remis une ardoise en place sur un toit. Il n’était pas titulaire du certificat d’aptitude à la conduite d’engins en sécurité (Caces), nécessaire à l’utilisation de cet engin. Et la nacelle était-elle adaptée pour réaliser ce chantier ? C’est ce que devra établir la procédure judiciaire, encore en cours.

      Mais avant de rejoindre cette entreprise, Benjamin avait été renvoyé par une autre, au bout de quinze jours. « Il avait refusé de monter sur un échafaudage qui n’était pas aux normes », raconte sa mère, qui s’entend encore lui faire la leçon : « Y a ce que t’apprends à l’école et y a la réalité du monde du travail ! » « Je m’en veux tellement d’avoir dit ça… J’ai pris conscience alors à quel point prendre des risques au travail était entré dans nos mœurs. Tout ça pour aller plus vite. Comment en est-on arrivés à ce que la rentabilité prime sur le travail bien fait, en sécurité ? », se désole-t-elle.

      « Quand on commence, on est prêt à tout accepter »

      Depuis qu’elle a rejoint le Collectif familles : stop à la mort au travail, elle est frappée par la jeunesse des victimes : « Quand on commence dans le métier, on n’ose pas toujours dire qu’on a peur. Au contraire, pour s’intégrer, on est prêt à tout accepter. »

      Alexis Prélat avait 22 ans quand il est mort électrocuté sur un chantier, le 5 juin 2020. Son père, Fabien, bout aujourd’hui d’une colère qui lui fait soulever des montagnes. Sans avocat, il a réussi à faire reconnaître par le pôle social du tribunal judiciaire de Périgueux la « faute inexcusable » de l’employeur.

      C’est-à-dire à démontrer que ce dernier avait connaissance du danger auquel Alexis a été exposé et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. Le jeune homme est descendu dans une tranchée où était clairement identifiée, par un filet rouge, la présence d’un câble électrique. « Le préposé de l’employeur sous les ordres duquel travaillait la victime ce jour-là aurait dû avoir connaissance du danger », dit le jugement rendu le 11 mai 2023, qui liste des infractions relevées par l’inspecteur du travail, notamment l’« absence d’habilitation électrique » et l’« absence de transcription de l’ensemble des risques dans le document unique d’évaluation des risques ».

      Fabien Prélat relève également que, comme pour Alban Millot, le code APE de l’entreprise ne correspond pas à son activité réelle. Elle est identifiée comme « distribution de produits informatiques, bureautique et papeterie ». Il estime par ailleurs que le gérant, « de fait », n’est pas celui qui apparaît sur les documents officiels. « Bien sûr, ce n’est pas ça qui a directement causé la mort de mon fils. Mais si l’Etat contrôlait mieux les choses, ces gens-là n’auraient jamais pu s’installer », s’emporte-t-il.

      « Pas assez de contrôles de l’inspection du travail »

      Cheffe du pôle santé et sécurité à la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), syndicat patronal, et elle-même gestionnaire d’une PME de charpente et couverture dans le Puy-de-Dôme, Cécile Beaudonnat s’indigne de ces pratiques. « Ce sont des gens contre qui on lutte, explique-t-elle. On les repère quand leurs clients nous contactent, dépités, quand ils comprennent que l’entreprise qui leur a mal installé des panneaux solaires n’avait ni les techniciens qualifiés, ni l’assurance professionnelle décennale », explique-t-elle.

      Normalement, pour s’installer, il y a l’obligation d’avoir une formation professionnelle qualifiante homologuée (au moins un CAP ou un BEP) ou de faire valider une expérience de trois ans sous la supervision d’un professionnel. « Malheureusement, il n’y a pas assez de contrôles de l’inspection du travail », déplore-t-elle. Avant d’ajouter : « Pour nous, c’est avant tout au chef d’entreprise d’être exemplaire, sur le port des équipements de protection, en faisant ce qu’il faut pour former ses salariés et en attaquant chaque chantier par une démarche de prévention des risques. Nous sommes une entreprise familiale, on n’a aucune envie d’avoir un jour un décès à annoncer à une famille. »

      « Il y a une bataille à mener pour faire changer les mentalités. Y compris chez les ouvriers, pour qu’ils ne se mettent pas en danger pour faire gagner plus d’argent à l’entreprise ! Quand on voit les dégâts que ça fait sur les familles… », s’attriste Denis Boutineau.

      Les deux parents d’Alexis Prélat ont obtenu, chacun, 32 000 euros en réparation de leur préjudice moral, sa sœur 18 000 euros. Ils espèrent maintenant un procès en correctionnelle. « La meilleure façon de changer les choses, c’est d’obtenir des condamnations exemplaires », estime Fabien Prélat.

      Fait rare, l’employeur d’Alban Millot a, lui, été condamné en correctionnelle à trente-six mois de prison dont dix-huit ferme. Il a fait appel du jugement. « Avant le procès, j’avais la haine contre ce type, confie Laurent Millot. L’audience et, surtout, une sanction telle que celle-là m’ont fait redescendre. »

    • Accidents du travail : quand les machines mettent en péril la vie des salariés
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/08/accidents-du-travail-quand-les-machines-tuent_6215360_3234.html

      Dans l’industrie, le BTP ou l’agriculture, les accidents liés à l’utilisation de machines comptent parmi les plus graves et les plus mortels. Employeurs, fabricants et responsables de la maintenance se renvoient la faute.

      Lorsqu’il prend son poste, ce lundi 27 décembre 2021, cela fait déjà plusieurs mois que Pierrick Duchêne, 51 ans, peste contre la machine qu’il utilise. Après deux décennies dans l’agroalimentaire, il est, depuis cinq ans, conducteur de presse automatisée dans une agence Point P. de fabrication de parpaings, à Geneston (Loire-Atlantique). Depuis un an et demi, la bonne ambiance au boulot, cette fraternité du travail en équipe qu’il chérit tant, s’est peu à peu délitée. L’atmosphère est devenue plus pesante. La cadence, toujours plus infernale. Les objectifs de #productivité sont en hausse. Et ces #machines, donc, « toujours en panne », fulmine-t-il souvent auprès de sa femme, Claudine.

      Ce jour-là, il ne devait même pas travailler. Mais parce qu’il était du genre à « toujours aider et dépanner », dit Claudine, il a accepté de rogner un peu sur ses vacances pour participer à la journée de maintenance et de nettoyage des machines. Pierrick Duchêne a demandé à son fils qu’il se tienne prêt. Dès la fin de sa journée, à 15 heures, ils devaient aller à la déchetterie. Mais, vers 11 h 30, il est retrouvé inconscient, en arrêt cardiorespiratoire, écrasé sous une rectifieuse à parpaing. Dépêché sur place, le service mobile d’urgence et de réanimation fait repartir son cœur, qui s’arrête à nouveau dans l’ambulance. Pierrick Duchêne meurt à l’hôpital, le 2 janvier 2022.

      Son histoire fait tragiquement écho à des centaines d’autres, se produisant chaque année en France. En 2022, la Caisse nationale d’assurance-maladie a recensé 738 accidents du travail mortels dans le secteur privé, selon son rapport annuel publié en décembre 2023. 1 % d’entre eux sont liés au « risque machine » – auquel on peut ajouter les accidents liés à la « manutention mécanique », de l’ordre de 1 % également. Selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), qui répertorie plus précisément les incidents de ce type, les machines sont mises en cause dans 10 % à 15 % des accidents du travail ayant entraîné un arrêt supérieur ou égal à quatre jours, ce qui représente environ 55 000 accidents. Dont une vingtaine sont mortels chaque année.

      « La peur suppure de l’usine parce que l’usine au niveau le plus élémentaire, le plus perceptible, menace en permanence les hommes qu’elle utilise (…), ce sont nos propres outils qui nous menacent à la moindre inattention, ce sont les engrenages de la chaîne qui nous rappellent brutalement à l’ordre », écrivait Robert Linhart, dans L’Etabli (Editions de Minuit), en 1978. L’industrie, et notamment la métallurgie, est un secteur d’activité dans lequel les risques pour la santé des ouvriers sont amplifiés par l’utilisation d’outils et de machines. Les employés agricoles, les salariés de la chimie ou les travailleurs du BTP sont aussi très exposés. Sur le terrain, les services de l’inspection du travail font régulièrement état de la présence de machines dangereuses.

      « Aveuglement dysfonctionnel »

      Si leur fréquence baisse depuis les années 1990, ces accidents sont souvent les plus graves, avec des blessures importantes, et les procédures qui s’ensuivent sont extrêmement longues. La responsabilité peut être difficile à établir, car plusieurs acteurs sont en jeu : l’employeur, le fabricant de la machine, l’installateur, la maintenance. La plupart du temps, chacun se renvoie la faute. Comme si la machine permettait à tous de se dédouaner.

      « Le risque zéro n’existe pas », entend-on régulièrement au sujet des accidents du travail, qui plus est quand une machine est en cause. Pourtant, le dysfonctionnement brutal que personne ne pouvait anticiper, qui accréditerait la thèse d’une infortune létale, n’est quasiment jamais à l’œuvre. Au contraire, les défaillances des machines sont souvent connues de tous. « Il peut s’installer une sorte d’aveuglement dysfonctionnel, analyse Jorge Munoz, maître de conférences en sociologie à l’université de Bretagne occidentale. Le problème est tellement récurrent qu’il en devient normal. »

      Une situation qui hante encore les jours et les nuits de Delphine et de Franck Marais, les parents de Ludovic. Personne ne pouvait soupçonner que ce jeune apprenti barman de 19 ans mettait sa vie en péril en servant pintes et cafés derrière le comptoir d’une brasserie réputée de Tours. Mais, le 16 décembre 2019, quelques minutes avant de rentrer chez lui, à 23 h 45, sa tête est percutée par le monte-charge des poubelles.

      La machine fonctionnait depuis des mois, voire plusieurs années, avec les grilles de protection ouvertes. « Quelqu’un a désactivé la sécurité qui empêchait le monte-charge de démarrer ainsi, grilles ouvertes », raconte Franck, le père. Qui ? Un salarié, pour gagner du temps ? L’employeur, pour que ses salariés aillent plus vite ? Le responsable de la maintenance, à la demande de l’employeur ? Un oubli du technicien ? « On ne saura probablement jamais, mais, finalement, là n’est pas la question, estime l’avocate des parents, Marion Ménage. Ce qui compte, c’est que l’entreprise savait qu’il fonctionnait grilles ouvertes et qu’elle n’a rien fait. »

      « Il se sentait en danger »

      Sécurité désactivée, maintenance non assurée, prévention déconsidérée… Les mêmes logiques, les mêmes légèretés face à des machines dangereuses reviennent méthodiquement dans les récits, soulignant le caractère systémique de ces événements dramatiques. « Les dispositifs de sécurité ralentissent parfois le processus de travail et empêchent de tenir la cadence, analyse Jorge Munoz. On peut être tenté de défaire le mécanisme et, donc, de mettre en péril l’utilisateur. » C’est cette logique mortifère qui a été fatale à Flavien Bérard. Le jeune homme de 27 ans était sondeur pour la Société de maintenance pétrolière (SMP), une entreprise de forage et d’entretien de puits pétroliers, gaziers et de géothermie.

      D’abord employé sur un site dans le Gard, où il s’épanouit malgré les conditions de travail difficiles, Flavien Bérard est transféré après une semaine à Villemareuil, en Seine-et-Marne. Il se retrouve sur un chantier de forage pétrolier dont est propriétaire SMP, « les puits du patron », comme on surnomme le lieu. Industrie lourde, à l’ancienne, rythme en trois-huit, rendements à tout prix… Flavien est confronté à un milieu dur et peu accueillant. « Il nous a vite dit que c’était difficile, se souvient sa mère, Fabienne. Le gaillard de 1,84 mètre, plus de 80 kilos, corps de rugbyman, est pourtant du genre à tenir physiquement.

      « Il nous a surtout dit qu’il se sentait en danger, que les machines étaient dangereuses et qu’il avait des doutes sur la sécurité », déplore aujourd’hui Fabienne Bérard. Ses inquiétudes s’avèrent prémonitoires. Alors qu’il avait décidé de ne pas poursuivre sur le site une fois sa mission arrivée à son terme, le 5 mars 2022, vers 4 heures, une pièce métallique d’une trentaine de kilos se détache d’une machine de forage et percute Flavien à la tête, une quinzaine de mètres plus bas. Il meurt le lendemain, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.

      « On nous a tout de suite parlé d’une erreur humaine, avec une sécurité désactivée », explique le père de la victime, Laurent Bérard. Selon l’avocat des parents, Lionel Béthune de Moro, le rapport machine de l’expert judiciaire ferait état de « 373 non-conformités », dont 3 concerneraient le système responsable de l’accident. « Une sécurité essentielle a été désactivée, pour le rendement », ajoute-t-il. « On nous a même dit que ce n’était pas la première fois qu’il y avait un problème avec cette machine », renchérit Fabienne Bérard.

      Complexité des procédures

      Ces exemples posent la question de la #prévention et de la maintenance. « L’objectif, c’est que les entreprises voient celles-ci comme un profit et non comme un coût », affirme Jean-Christophe Blaise, expert de l’INRS. L’institut a justement pour mission de développer et de promouvoir une culture de prévention des accidents du travail au sein des entreprises. « Dans certains cas, elle peut être perçue comme quelque chose qui alourdit les processus, qui coûte plus cher, complète Jorge Munoz. Mais l’utilisation d’une machine nécessite une organisation spécifique. »

      D’autant qu’une politique de prévention se déploie sur le long terme et nécessite des actions régulières dans le temps. Les agents de l’INRS travaillent sur trois aspects pour éviter les drames autour des machines : les solutions techniques, l’organisation du travail et le levier humain (formation, compétences, etc.). « Un accident du travail est toujours multifactoriel et il faut agir sur tout à la fois, souligne M. Blaise. La clé, c’est la maintenance préventive : anticiper, prévoir plutôt que subir. »

      Les accidents du travail liés aux machines ont un autre point commun : la complexité des procédures qui s’ensuivent. Plus de deux ans après les faits, Claudine Duchêne ne connaît toujours pas les circonstances exactes de la mort de son mari. « Je sais juste que la machine n’aurait pas dû fonctionner en ce jour de maintenance, qu’il n’aurait pas dû y avoir d’électricité », assure-t-elle. L’enquête de la gendarmerie a été close en juillet 2022, celle de l’inspection du travail a été remise à la justice en juin 2023. Celle-ci révélerait « une faute accablante sur l’organisation de la journée de maintenance », précise Claudine Duchêne. Depuis, elle attend la décision du parquet de Nantes.

      Aux enquêtes de police et de l’inspection du travail peut s’ajouter une expertise judiciaire, ralentissant encore un peu plus la procédure, comme dans le cas de Flavien Bérard. « L’attente est longue et douloureuse pour les familles, souligne Me Béthune de Moro. Plus il y a d’intervenants, plus cela alourdit les choses, mais c’est toujours pour éclairer la situation, dans un souci de manifestation de la vérité. » La famille attend désormais d’éventuelles mises en examen et une ordonnance de renvoi dans l’année pour un procès en 2025.

      Après l’accident de Ludovic Marais, le monte-charge a été mis sous scellé jusqu’en mars 2023, une procédure indispensable mais qui allonge encore les délais. Cela a empêché l’intervention d’un expert judiciaire pendant plus de trois ans. « Le nouveau juge d’instruction a décidé de lever les scellés et une nouvelle expertise est en cours », confie Me Ménage. Le rapport pourrait arriver d’ici à l’été. Sachant que les avocats de la défense pourront éventuellement demander une contre-expertise. La brasserie, le patron, la tutrice du jeune apprenti, Otis (la société ayant installé le monte-charge) et un de ses techniciens chargé de la maintenance sont mis en examen pour « homicide involontaire par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité et de prudence dans le cadre du travail ». Un procès pourrait avoir lieu fin 2024 ou en 2025. La fin d’un chemin de croix judiciaire pour qu’enfin le deuil soit possible.

    • Accidents du travail : les jeunes paient un lourd tribut
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/09/accidents-du-travail-les-jeunes-paient-un-lourd-tribut_6215566_3234.html

      Entre les entreprises peu scrupuleuses et la nécessité pour les jeunes de faire leurs preuves dans un monde du travail concurrentiel, les stagiaires, élèves de lycées professionnels ou apprentis sont les plus exposés aux risques professionnels.

      Quatre jours. L’unique expérience professionnelle de Jérémy Wasson n’aura pas duré plus longtemps. Le #stage d’observation de cet étudiant en première année à l’Ecole spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie (ESTP) devait durer deux mois, dans l’entreprise Urbaine de travaux (filiale du géant du BTP Fayat). Le 28 mai 2020, il est envoyé seul sur le toit du chantier du centre de commandement unifié des lignes SNCF de l’Est parisien, à Pantin (Seine-Saint-Denis). A 13 h 30, il fait une chute en passant à travers une trémie de désenfumage – un trou laissé dans le sol en attente d’aménagement – mal protégée. Il meurt deux jours plus tard, à 21 ans.

      L’accident de Jérémy a laissé la grande école du bâtiment en état de choc. « C’est ce qui m’est arrivé de pire en trente ans d’enseignement supérieur », exprime Joël Cuny, directeur général de l’ESTP, directeur des formations à l’époque. La stupeur a laissé la place à de vibrants hommages. Un peu courts, toutefois… L’ESTP ne s’est pas portée partie civile au procès, regrette Frédéric Wasson, le père de Jérémy, qui souligne que « Fayat est l’entreprise marraine de la promo de [s]on fils… », ou que, dès 2021, Urbaine de travaux reprenait des dizaines de stagiaires issus de l’école.

      #Stagiaires, élèves de lycées professionnels en période de formation en milieu professionnel, #apprentis… Les jeunes paient un lourd tribut parmi les morts au travail : trente-six travailleurs de moins de 25 ans n’ont pas survécu à un accident du travail en 2022, selon le dernier bilan de la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM). C’est 29 % de plus qu’en 2019. Et encore cela ne porte que sur les salariés du régime général. La CNAM souligne aussi que, par rapport aux autres accidents du travail, il s’agit davantage d’accidents « classiques, c’est-à-dire hors malaises et suicides », et d’accidents routiers.

      « Irresponsabilité totale »

      L’inexpérience de ces jeunes, quand elle n’est pas compensée par un accompagnement renforcé, explique en partie cette surmortalité. Quelque 15 % des accidents graves et mortels surviennent au cours des trois premiers mois suivant l’embauche, et plus de la moitié des salariés de moins de 25 ans morts au travail avaient moins d’un an d’ancienneté dans le poste.

      Tom Le Duault a, lui, perdu la vie le lundi 25 octobre 2021. Cet étudiant en BTS technico-commercial entame alors son quatrième contrat court dans l’abattoir de LDC Bretagne, à Lanfains (Côtes-d’Armor). Sa mère y travaille depuis vingt-neuf ans, et il espère ainsi mettre un peu d’argent de côté. Comme lors de ses premières expériences, il est « à la découpe », où il s’occupe de mettre en boîte les volailles. Ce matin-là, un salarié est absent. Tom doit le remplacer dans le réfrigérateur où sont stockées les caisses de viande. Il est censé y empiler les boîtes avec un gerbeur, un appareil de levage.

      « Sur les dernières images de vidéosurveillance, on le voit entrer à 9 h 53. Il n’est jamais ressorti, et personne ne s’est inquiété de son absence », regrette Isabelle Le Duault, sa mère. Il est découvert à 10 h 45, asphyxié sous deux caisses de cuisses de volaille. Elle apprend la mort de son fils par hasard. « J’ai vu qu’il y avait plein de monde dehors. Une fille m’a dit qu’il y avait un accident grave, elle m’a dit de demander si ce n’était pas mon fils au responsable. Il m’a demandé : “C’est Tom comment ?” C’était bien lui… »

      Les conclusions des enquêtes de gendarmerie et de l’inspection du travail ont vite écarté une éventuelle responsabilité du jeune homme. Jean-Claude Le Duault, son père, en veut à l’entreprise. « Tom n’a pas voulu les décevoir, vu que sa mère travaillait là. Mais on ne met pas un gamin de 18 ans seul dans un atelier, une heure, sans vérifier, sur un gerbeur. Il ne connaît pas les dangers, les règles de sécurité. C’est une irresponsabilité totale, à tous les étages. »

      Manquements

      Dans un monde du travail concurrentiel, les jeunes se doivent de faire leurs preuves. A quel prix ? Selon une enquête du Centre d’études et de recherches sur les qualifications publiée en 2020, 59 % des jeunes sortant de la voie professionnelle sont exposés à des risques de blessures ou d’accidents. Or, dans le même temps, ils n’ont pas la même connaissance de leurs droits. Toujours dans cette étude, 42 % déclaraient ne pas avoir reçu de formation ou d’informationsur la santé et la sécurité à l’arrivée sur leur poste. C’est le cas de Tom Le Duault, qui n’avait même pas de fiche de poste. Comme son utilisation du gerbeur n’était pas prévue, il avait été formé sur le tas.

      « Il avait déjà travaillé avec un appareil de levage lors de son précédent contrat, et il s’était déjà blessé à la cheville, ce qui avait causé trois semaines d’arrêt, fulmine Ralph Blindauer, avocat de la famille. Il a été formé par un autre intérimaire. C’était une formation à l’utilisation, pas à la sécurité ! »

      A l’absence d’encadrement et de formation s’ajoutent d’autres manquements, détaillés lors du procès de l’entreprise au pénal : l’appareil était défaillant, ce qui a vraisemblablement causé l’accident, et les salariés de LDC avaient l’habitude d’empiler les caisses sur trois niveaux au lieu de deux, faute de place dans la chambre froide, ce qui est contraire aux règles de sécurité.

      Le rôle du tuteur est crucial

      LDC Bretagne a été condamné, en mai 2023, à une amende de 300 000 euros, tandis que l’ancien directeur de l’#usine – devenu, entre-temps, « chargé de mission » au sein de l’entreprise – a été condamné à deux ans de prison avec sursis. Reconnaissant ses manquements, l’entreprise n’a pas fait appel, chose rare. La direction de cette grosse PME déclare que des mesures complémentaires ont été prises à la suite du décès de Tom, notamment un « plan de formation renforcé à la sécurité, des habilitations, une évaluation complète et approfondie des risques sur les différents postes, des audits par des cabinets indépendants ou le suivi d’indicateurs ».

      Un badge est désormais nécessaire pour se servir d’un gerbeur, ajoute Isabelle Le Duault. Elle a choisi de rester dans l’entreprise, mais à mi-temps. « Moi, je ne peux plus passer devant cette usine, ou même dans cette ville », renchérit son mari.

      En stage ou en apprentissage, le rôle du tuteur est crucial. Sur le chantier d’Urbaine de travaux, à Pantin, l’arrivée de Jérémy Wasson n’avait pas été anticipée. Le lundi matin, personne ne s’occupe de lui, car le chantier est en retard. Il ne reçoit rien d’autre qu’un livret d’accueil et un rendez-vous de quinze minutes pendant lequel on lui parle surtout des gestes barrières. « Jérémy s’est très vite interrogé sur la nature de son stage. Dès le premier jour, on lui a fait faire du marteau-piqueur, le mercredi soir, il trouvait ça fatigant et inintéressant. Ce soir-là, on a hésité à prévenir l’école… », raconte son père.

      Renforcer la formation à la sécurité

      La société Urbaine de travaux a été condamnée, en 2022, à 240 000 euros d’amende pour « homicide involontaire », et l’ingénieure en chef du chantier à 10 000 euros et deux ans de prison avec sursis. Cette décision du tribunal de Bobigny a confirmé les lourdes conclusions de l’inspection du travail, notamment la violation délibérée d’une obligation de #sécurité, l’absence d’encadrement et de formation de Jérémy et l’absence de #sécurisation de la trémie. L’entreprise a fait appel.

      Face à la violence de ces récits, qui concernent parfois des mineurs, le sujet a été érigé en axe prioritaire dans le plan santé au travail du gouvernement. Mais le choix du ministère du travail de publier deux mémentos qui mettent jeunes et entreprises sur le même plan, les invitant à « respecter toutes les consignes », peut étonner.

      Les écoles et centres de formation ont aussi un rôle à jouer pour renforcer la formation à la sécurité. En 2022, la CNAM a recensé plus de 1 million d’élèves et apprentis (CAP et bac professionnel) ayant reçu un enseignement spécifique en santé et sécurité au travail.

      Faciliter la mise en situation des adolescents

      A la suite du décès de Jérémy, l’ESTP a renforcé les enseignements – déjà obligatoires – sur la sécurité. Un élève ne peut se rendre en stage sans avoir obtenu une certification. « En cas de signalement, on fait un point avec les RH de l’entreprise, et si ça ne se résout pas, nous n’avons pas de scrupules à arrêter le stage. Mais je ne remets pas en cause la volonté des entreprises de créer un environnement de sécurité pour accueillir nos élèves », déclare Joël Cuny.

      Un argument difficile à entendre pour la famille de Jérémy Wasson… Car les #entreprises restent les premières responsables de la santé des jeunes sous leur responsabilité, comme du reste de leurs salariés. Le nombre d’apprentis a explosé ces dernières années, la réforme du lycée professionnel souhaite faciliter la mise en situation des adolescents.

      Par ailleurs, le gouvernement a annoncé l’obligation pour les élèves de 2de générale et technologique, dès 2024, d’effectuer un stage en entreprise ou en association de deux semaines, semblable au stage de 3e. La question ne s’est jamais autant posée : les employeurs mettront-ils les moyens pour protéger tous ces jeunes ?

      #apprentissage

    • Avec la sous-traitance, des accidents du travail en cascade, Anne Rodier
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/10/avec-la-sous-traitance-des-accidents-du-travail-en-cascade_6215798_3234.html

      Pression économique des donneurs d’ordre, délais resserrés, manque de prévention… Les salariés des entreprises en sous-traitance, en particulier sur les chantiers et dans le nettoyage, sont plus exposés aux accidents du travail. Surtout lorsqu’ils sont #sans-papiers.

      https://justpaste.it/axscq

      #sous-traitance

  • Une IA a aidé à déceler que les empreintes digitales ne sont pas uniques.
    http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article4571

    Pour que ce résultat du travail ait été obtenu, comme nous le notons dans l’article, c’est à partir de 60 000 empreintes digitales. Il faut donc comprendre d’emblée, qu’il y a possibilité à plus de performance ainsi que des conclusions plus approfondies et affinées, une fois que cet outil aura été entraîné sur des millions de cas. En croisant et recoupant plus de datas, de bien de similitudes seront plausible aux doigts humains. #Insolites

    / #IA_:_Intelligence_Artificielle, #Data_-_Données, Sciences & Savoir, #médecine,_sciences,_technologie,_ADN,_vaccin,_médicaments,_découvertes, Internet, Web, cyber-démocratie, communication, société, (...)

    #Sciences_&_Savoir #Internet,_Web,_cyber-démocratie,_communication,_société,_médias

  • L’exercice physique maintent l’état du cerveau et de son volume.
    http://www.argotheme.com/organecyberpresse/spip.php?article4569

    En résumé, il est question de faire de l’exercice 25 minutes par semaine. C’est l’équivalent de moins de quatre minutes par jour, en calculant la répartition des étirements et autres efforts physiques qui réchauffent le corps. Ce pourrait aider à renforcer notre cerveau et à améliorer notre capacité de réflexion en vieillissant. Une étude l’indique, après avoir observé 10500 cas... Sports / Santé

    / Sciences & Savoir, #Sport_et_compétitions_sportives, #médecine,_sciences,_technologie,_ADN,_vaccin,_médicaments,_découvertes, #Data_-_Données

    #Sports_/_Santé #Sciences_&_Savoir

  • « À travers ma vape, j’aperçois une table « Montez là-dessus », des placard muraux ripolinés, un lavabo avec le cube marseillais et le torchon ; non, c’est pas vrai !… On ne va pas me passer au spéculum, comme ça, au sortir d’une autre taule et sans me laisser le temps de me laver… La dame ajoute à ma perplexité en m’ordonnant de me déshabiller, et comme je la regarde, assommée :
    « Déshabillez-vous, répète-t-elle, je vais vous fouiller. On dirait que vous n’êtes pas au courant ! On ne vous a pas fouillée, là-bas ?
    -- Si, justement, alors pourquoi recommencer ? »

    La Cavale Chapitre I Partie II

    #fouille #violence #médecin #corps

  • ’The NHS sold out its staff’: Doctors whose lives were devastated by long COVID to sue health service | UK News | Sky News
    https://news.sky.com/story/the-nhs-sold-out-its-staff-doctors-whose-lives-were-devastated-by-long-cov

    A British Medical Association study of 600 doctors with long COVID last year revealed that 60% had suffered persistent ill health since contracting COVID, and around half (48%) had lost earnings.

    Dr Fearnley co-founded Long COVID Doctors for Action (LCD4A), which is today pledging legal action against the NHS for negligent workplace exposure to coronavirus, resulting in injury and financial loss.

    The group, which is being represented by the legal firm Bond Turner, claims the NHS decided to downgrade guidance as the virus took hold in March 2020, only requiring staff to wear blue surgical face masks, plastic aprons, and gloves when dealing with suspected or confirmed COVID cases.

    This is in line with World Health Organisation (WHO) guidance, which says there is only strong evidence for more restrictive masks such as FFP3s, FFP2s, and N95s, being worn for “aerosol-generating procedures” - not general care of COVID patients.

    #grande_bretagne #oms #médecins #masques #covid_long #post_covid

  • « Que faut-il pour tromper un expert médical ?
    D’abord, la mauvaise mine. Indispensable. Plus question de se faire des frisettes, ni de se frotter la bouche au papier rouge : les cheveux doivent être ternes et cassants, et disposés de façon austère ; sur la paupière, un soupçon de crayon à papier, un peu plus sur le tracé des cernes, assez pour faire moribonde, pas assez pour faire aguicheuse.
    Les experts sont incorruptibles et invampables.
    Ensuite ?
    Les signes de l’anémie caractérisée : la maigreur, la sous-tension, les étourdissements.
    Pour être reconnue « inapte à supporter la détention », il n’y a guère que l’anémie, pensons-nous, nous qui n’avons pas la chance d’avoir les éponges en passoires ni la maladie bleue.
    Moi, j’ai : quelques malheureuses séquelles de fractures, une myopie bien compensée par de belles lunettes, et deux tabourets déjà aux trois quarts plombés.
    Et vous voudriez que je bouffe encore ? »

    La Cavale, Partie I chapitre VI

    #corps #médecin #manuelcarcéral