• Saviez-vous que le gel hydroalcoolique est un bien commun ?
    Au Bout du Jour : Didier Pittet et Peter Piot sur Auvio
    https://www.rtbf.be/auvio/detail_au-bout-du-jour?id=2735665

    Cette semaine, l’UCLouvain remettait le titre de docteur·e honoris causa à quatre personnalités. Ce soir, dans Au bout du jour, Eddy Caekelberghs vous propose de retrouver trois d’entre elles. Et tout d’abord, nous entendons #Didier_Pittet, médecin infectiologue et #épidémiologiste suisse et #inventeur du #gel_hydroalcoolique, et Peter Piot, médecin et microbiologiste belge, connu notamment pour sa lutte contre le sida

    #biens_communs #communs #brevets #open_source #coopération #santé #medecine #médicaments

  • Comment la France empêche le monde de produire plus de vaccins | korii.
    https://korii.slate.fr/et-caetera/france-production-vaccin-covid-19-omc-blocage-patent-waiver-suspension-b

    « Faire en sorte dès maintenant qu’un vaccin contre le Covid-19, lorsqu’il sera découvert, bénéficie à tous, parce qu’il sera un bien public mondial. » Ces mots sont ceux d’Emmanuel Macron, prononcés en mai 2020 lors du Sommet mondial sur la vaccination.

    Que s’est-il passé depuis ? Très largement subventionnés par la puissance publique et réalisant un exploit scientifique historique, des laboratoires pharmaceutiques ont mis au point et testé, en quelques mois seulement, des vaccins efficaces et sûrs, armes fatales contre une pandémie (euh ... admettons ...) qui, à ce jour, a tué plus de 2,6 millions de personnes dans le monde.

    Ces vaccins sont-ils devenus, pour répondre aux vœux du président de la République, un bien public mondial ? Pas vraiment. Voire pas du tout. La demande est planétaire, mais Pfizer, Johnson & Johnson, AstraZeneca ou Moderna, pour ne citer que les occidentaux, peinent à augmenter leurs capacités de production.

    Pressés par l’urgence sanitaire, les pays du Nord s’accaparent les doses disponibles, ne laissant pour l’instant que des miettes aux pays moins fortunés, où le virus ne sévit pourtant pas moins durement.

    Les choses auraient pourtant pu –et pourraient encore– être bien différentes. Un mécanisme juridique international nommé « patent waiver », consistant en une suspension temporaire des brevets pharmaceutiques, pourrait être enclenché pour permettre aux pays du Sud de mettre leurs capacités de production en branle.

    L’Afrique du Sud et l’Inde en ont officiellement fait la demande auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), où ces choses sont négociées, en octobre 2020. Elle est restée lettre morte : les pays du Nord, la France notamment, s’y sont opposés.

    #vaccins #médicaments #covid #brevets_pharmaceutiques #propriété_intellectuelle #patent_waiver

  • Les pénuries de médicaments s’aggravent au Liban
    https://www.lemonde.fr/international/article/2021/02/13/les-penuries-de-medicaments-s-aggravent-au-liban_6069844_3210.html

    Aller d’une pharmacie à une autre, s’entendre dire qu’antibiotiques ou sérums médicaux sont indisponibles, poursuivre avec opiniâtreté et inquiétude : Habib Battah passe souvent des journées entières avant de trouver les remèdes pour son père en fin de vie, soigné à domicile faute de place dans les hôpitaux, saturés par les malades du Covid-19. Au Liban, avec l’aggravation de la crise financière, les pénuries chroniques de médicaments se multiplient. « C’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin. C’est très angoissant, très chronophage aussi. Mais je n’ai pas d’alternative. On est contraints de s’adapter », dit le jeune quadragénaire, journaliste indépendant et fondateur du site Beirut Report.
    Dans une pharmacie située dans la banlieue est de Beyrouth, une cliente est invitée à revenir une semaine plus tard pour son médicament. « Ne pas pouvoir répondre aux besoins détruit la relation de confiance, se désole Joanna Francis, la pharmacienne. Que peut-on répondre à un parent qui demande “comment vais-je nourrir mon bébé ?”, parce qu’il n’y a pas de lait infantile disponible ? » Sur les étagères, seules quelques rares boîtes de lait sont disposées.
    Se procurer des médicaments, dont plus de 80 % sont importés, est devenu un casse-tête pour de nombreux Libanais. Même le sacro-saint Panadol, un antidouleur très utilisé, est difficile à trouver. Apparues à l’automne 2020, un an après l’éclatement de la crise financière, les pénuries s’aggravent. Face à l’effondrement des réserves en devises de la Banque centrale, ses subventions sur les produits de première nécessité comme les médicaments sont menacées à court terme. Les quantités distribuées aux pharmacies sont rationnées. Un marché noir s’est mis en place. Un cercle vicieux s’est en outre installé. Des fournisseurs ou des pharmacies sont accusés de cacher leurs stocks dans l’optique de réaliser de juteuses marges une fois les subventions levées. Des clients paniqués ont acheté en quantité, accentuant la pression sur le secteur pharmaceutique. Un trafic de contrebande s’est instauré, dont l’échelle est inconnue. « Mais le problème principal est d’ordre financier », assure une source au ministère de la santé.
    Cherchant à anticiper le scénario noir d’une fin ou d’une révision des subventions sans amortisseur, qui frapperait les plus pauvres, un comité a planché sur une rationalisation du système. Mais ses recommandations sont dans les tiroirs du Parlement. « Si les subventions prennent fin brutalement, ce sera un désastre », prédit le docteur Firas Abiad, qui dirige l’hôpital public Rafic-Hariri, à Beyrouth. Bien que celui-ci reçoive des donations internationales, notamment pour la lutte contre le Covid-19 – qui a fait plus de 3 800 morts dans le pays –, il est confronté aux pénuries intermittentes : « Quand un manque apparaît, on le colmate, puis un autre surgit. Il est très difficile de prévoir les pénuries. » Pour poursuivre leur traitement, des Libanais s’appuient sur la solidarité, leurs relations ou les réseaux sociaux. Shaden Fakih, jeune comédienne de stand-up, a ainsi rendu publiques ses difficultés d’approvisionnement sur son compte Instagram. Cela, et des boîtes rapportées d’Europe par un ami, lui a permis de sécuriser pour un temps les médicaments dont elle a besoin, souffrant d’une maladie auto-immune ainsi que de troubles obsessionnels compulsifs. « Trouver les anticoagulants est une priorité absolue. Mais je sais ce que signifie une crise d’angoisse, et j’ai besoin de l’autre médicament aussi. Je me sens toutefois privilégiée, j’appartiens à la classe moyenne, et je suis entourée. »
    D’autres se tournent vers le secteur associatif, qui doit répondre à des besoins grandissants : la société se paupérise à toute vitesse. « Le nombre de nos bénéficiaires a doublé, dit Malak Khiami, pharmacienne à l’ONG Amel, dédiée à la santé. Parmi eux, certains viennent dans nos centres faute de trouver des médicaments ailleurs. Nous avons sécurisé des stocks jusqu’à l’été, en mettant l’accent sur les maladies chroniques et la pédiatrie. Et nous sommes très attentifs à ce que nous prescrivons. »
    Le docteur Jamal Al-Husseini (à gauche) tend une ordonnance à son assistant dans sa clinique, dans le camp de Chatila, Beyrouth, le 9 février 2021.En périphérie de Beyrouth, dans le camp de Chatila, lieu historique des réfugiés palestiniens, où les Syriens sont devenus les plus nombreux, les visages sont fatigués. Pour ceux qui sont aux marges de la société, la crise économique est un rouleau compresseur. Imane, Syrienne, a compté : il ne reste plus que quelques comprimés du traitement de son fils épileptique de 13 ans. « Après, je n’ose imaginer ce qui se passera, dit-elle. Pourvu qu’un médecin puisse trouver un substitut ! » Elle aussi fait le tour des pharmacies, y compris loin du camp aux ruelles étroites.
    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Liban précipité dans l’abîme
    Des médicaments venus de Syrie, moins coûteux, y sont devenus plus nombreux. Ils parviennent au Liban hors du circuit officiel. « Si leur nombre augmente, et pas seulement dans les camps, c’est faute d’alternative », déplore le docteur palestinien Jamal Al-Husseini, en plaçant sous oxygène un malade du coronavirus. Ces bouteilles proviennent de dons de la diaspora palestinienne. « Jusqu’à présent, on arrive encore à soigner les gens. Mais cela va devenir de plus en plus difficile », redoute-t-il.

    #Covid-19#migrant#migration#liban#syrie#refugie#camp#chatila#palestien#sante#crise#medicament#circulationthérapeutique#diaspora

  • Quelle économie morale des produits pharmaceutiques voulons-nous ? | AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/opinion/2021/02/11/quelle-economie-morale-des-produits-pharmaceutiques-voulons-nous

    Ainsi, s’il est possible, en recoupant les informations transmises par les journaux, de savoir environ combien d’argent public a été donné à la recherche, à la production et à l’achat de médicaments, on ne peut pas savoir combien exactement est donné à chaque firme, ce que coûte en tout la recherche aux finances publiques, ce que les firmes investissent elles-mêmes, ce à quoi revient la production des vaccins, quels sont les prix fixés par les firmes, ou encore ce que montrent en détail les essais cliniques sur leurs effets.

    L’économie politique des produits pharmaceutiques est aussi prise dans une économie morale.

    Les produits pharmaceutiques s’inscrivent dans une économie politique : leur développement et leur usage sont régis par un système de lois et de règles, par les termes des contrats qui lient la puissance publique à l’industrie privée, ou les firmes entre elles, et déterminent la production, l’organisation et la circulation des ressources, des biens et des prestations. Mais cette économie politique des produits pharmaceutiques, et plus généralement notre rapport en tant que société à la santé et aux produits de santé, sont aussi pris dans une économie morale.

    Le système de lois et de règles qui gouvernent le développement, la production et l’usage des produits pharmaceutiques a été largement façonné par l’action collective de grandes firmes pharmaceutiques à partir des années 1980. Il s’agit en particulier des textes sur la protection de la « propriété intellectuelle » qui permettent aux firmes de contrôler le savoir sur les produits pharmaceutiques mais aussi l’ensemble des usages qui en sont faits (achat, vente, production, importation, exportation, etc.). Au travers des brevets accordés par les États, il est possible aux firmes de jouir de monopoles sur les médicaments, les vaccins ou les produits de diagnostic, ce qui leur donne une position privilégiée sur les marchés, étant la seule source possible des produits concernés, et ainsi en position de force pour fixer les prix.

    L’action collective conduite par de grandes firmes multinationales s’est appuyée sur des pratiques classiques de lobbying, mais aussi sur la construction d’un consensus social sur les rôles, les droits et les devoirs des différents acteurs. Ce consensus repose notamment sur l’idée que l’industrie pharmaceutique a pour aspiration et pour vocation d’amener de nouveaux remèdes aux populations, qu’elle est la seule à avoir les moyens de le faire, et qu’elle doit être soutenue pour le faire, à travers des monopoles ou tout autres moyens.

    Si la santé est souvent présentée comme un droit supérieur, les produits de santé sont avant tout traités comme des marchandises, parce qu’au fond est acceptée l’idée que leur développement et leur accès sont assurés par des mécanismes de marché. L’efficacité de l’industrie à influer sur l’économie politique du médicament tient en grande partie à l’adhésion généralisée à ces conceptions durant les trois dernières décennies.

    Au-delà de la perplexité que l’on peut ressentir, il faut sans doute garder un œil sur ce qui agite cette économie morale. Car, si l’avènement de vaccins contre le Covid-19 est aussi mis en récit comme un succès phénoménal pour « Big Pharma » et l’occasion de redorer son blason, les conditions de l’ébranlement de l’économie morale dominante pourraient ne plus être loin. Les difficultés d’accès aux produits de santé se multiplient rapidement ces dernières années dans les pays riches. En France, la difficulté à assurer le principe de « l’universalité de l’accès », au moins pour la plus grande majorité[2], est croissante. Les épisodes de tensions se succèdent : débats sur les prix et l’accès à des traitements contre l’hépatite C, contre certains cancers, pour les traitements contre des « maladies orphelines », et maintenant limitation de l’accès aux vaccins contre le Covid-19.

    L’État contemporain est censé protéger son peuple contre la maladie et la mort, la légitimité de son pouvoir est construite ainsi. Mais, alors que le poids donné aux composantes biomédicales est de plus en plus écrasant dans les politiques de santé (au point qu’on finit par confondre outil et politique), si l’érosion de l’accès aux produits se développe et que la réalité de l’égalité est de plus en plus difficile à soutenir, le gouvernement exercé au nom de la santé pourrait se trouver mis en question.

    Quelle est l’économie réelle des produits pharmaceutiques ? Pourquoi ne pourrait-on pas être transparent sur les contributions, les coûts et les prix ? Comment les ressources publiques sont-elles utilisées ? Au bénéfice de qui ? Le fait que l’épidémie de Covid-19 produise un destin commun à l’ensemble de l’humanité pourrait même donner à ces questions une résonance sans précédent et indisposer un nombre grandissant de gouvernements.

    #Médicaments #Vaccins #Covid_19 #Big_pharma #Communs #Santé_publique #Gaelle_Krikorian

  • Des #médicaments achetés au #Liban refont surface en RDC
    https://www.lorientlejour.com/article/1250375/des-medicaments-achetes-au-liban-refont-surface-en-rdc.html

    Médicaments subventionnés par l’état et dans un contexte de forte pénurie au Liban....

    La contrebande n’est certainement pas une nouveauté au Liban, mais cette affaire ouvre la voie à de nombreuses questions. Comment ces marchandises transitent-elles si facilement par l’aéroport de Beyrouth pour s’envoler vers des destinations aussi lointaines ( on peut facilement estimer que la RDC n’est pas la seule ) ? La #traçabilité de ces médicaments ne devrait-elle pas permettre de prévenir de telles fuites ? Une telle #contrebande est-elle le fait d’individus isolés ou de groupes organisés ? Dans tous les cas, les trafiquants sont soit négligents, soit trop convaincus de leur #impunité, puisqu’ils n’ont même pas jugé nécessaire de retirer les étiquettes libanaises…

  • La constance du jardinier de John Le Carré, 2001. Un #livre qui fait écho à l’actualité des brevets depuis des essais pharmaceutiques (souvent mortels) en Afrique
    https://www.lemonde.fr/archives/article/2001/10/05/la-constance-de-john-le-carre_4194045_1819218.html

    (..) Dans un entretien accordé en décembre à l’hebdomadaire britannique The Spectator, Le Carré explique qu’il souhaitait aborder le pillage et l’exploitation du tiers-monde au nom de la liberté et qu’il cherchait une intrigue pour étayer son argumentation. « Quand j’en ai entrouvert la porte, le milieu pharmaceutique m’a pris à la gorge et ne m’a plus lâché. Tout y est », avoue l’auteur, qui dit y avoir trouvé aussi bien « les espoirs et les rêves que l’on nourrit à son égard, son potentiel bénéfique infini » que les « coulisses obscures où règnent l’amoralité, l’hypocrisie, la corruption et l’avidité des laboratoires. »

    Dans le roman, un interlocuteur de Justin Quayle lui pose la question suivante : « A ton avis, quel est le secteur où évoluent les requins les plus dissimulateurs, menteurs, fourbes et hypocrites que j’aie jamais eu le douteux bonheur de rencontrer ? » La réponse est sans surprise. On reconnaît des échos de cette philippique dans les documents de Tessa que Justin retrouve et qui racontent par le menu les dons du laboratoire fabriquant le Dypraxa à un grand hôpital universitaire américain et la prise en charge des « salaires plus les frais de trois cliniciens réputés et de six assistants », qui viendront défendre le point de vue de la généreuse firme contre les médecins audacieux qui mettraient en cause ses produits.

    Avant que ce livre ne paraisse, John Le Carré avait signé au printemps dans The Guardian une tribune assassine, intitulée « Beaucoup de gens avares », dénonçant le procès intenté à l’Afrique du Sud par 39 laboratoires pharmaceutiques pour empêcher l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi sur les médicaments facilitant l’accès aux produits génériques. On voit que la prise de conscience du héros Justin Quayle suit le même chemin que celle de John Le Carré, son inventeur. De ce fait, le livre, même s’il relève de la fiction, ne manquera pas de soulever des controverses. L’#industrie_pharmaceutique se drapera dans sa dignité pour rejeter une image qu’elle qualifiera de trompeuse et d’inadmissible. D’autres, à commencer par certains milieux médicaux, y verront la transposition romanesque du rôle des multinationales à l’heure de la mondialisation.

    POSTCOLONIALISME

    C’est à la fois justifié et ambigu. Car La Constance du jardinier ne se résume pas à une intrigue d’amour et d’aventures plaquée sur un pamphlet anticapitaliste. Ce roman est oeuvre d’écrivain et non le énième produit formaté d’un auteur de best-sellers. Le faux rythme sur lequel il démarre suggère remarquablement bien les pesanteurs, la futilité et la mesquinerie de l’univers post-colonial britannique. Le protocole du haut commissariat, les codes sociaux des expatriés britanniques, les intrigues et luttes d’influence des fonctionnaires de Sa Majesté entre Londres et Nairobi sont dépeints avec plus de soins encore que l’univers des multinationales, laissé délibérément dans le clair-obscur. De même, mérite d’être soulignée la consistance des personnages secondaires, Sandy Woodrow ou Markus Lorbeer, évoluant pour leur propre compte et partie prenante du versant amoureux ou pharmaceutique de l’intrigue. Enfin, le personnage de Tessa se distingue dans la galaxie de Le Carré par son intensité et sa force, réservées le plus souvent aux personnage masculins.

    Le livre a été adapté au cinéma (pas vu)
    https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Constant_Gardener
    #médicaments #bigpharma #thriller

  • Bruno Canard : « Demander un médicament dès le lendemain d’une #épidémie n’a aucun sens »

    Bruno Canard est directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) à l’Université Aix-Marseille. Sa spécialité : les coronavirus. Alors que la course mondiale aux médicaments et aux vaccins contre le Covid-19 fait rage, il souhaite faire entendre la « colère légitime » des scientifiques de la recherche publique, dont le travail pour répondre à l’urgence sanitaire n’est pas, selon lui, suffisamment reconnu par les gouvernements. Trois questions à un chercheur engagé contre le désengagement des pouvoirs publics dans la recherche sur les virus émergents.

    Sciences Critiques − Comment expliquez-vous le désintérêt et le désengagement financier des pouvoirs publics européens et français pour vos recherches sur les coronavirus ? Et quelles en sont les conséquences, selon vous ?

    Bruno Canard − Le désintérêt n’est pas spécifiquement sur mes recherches sur les coronavirus, mais sur la recherche fondamentale en général, et la science fondamentale sur les virus émergents en particulier. Il y a plusieurs raisons à cela, qui prennent leur origine aux alentours de 2008-2009. La première, c’est la crise financière qui assèche les économies européennes. Il est décidé à ce moment-là qu’il est plus important de renflouer les banques immédiatement que n’importe quel autre secteur. Les budgets publics pour la recherche sont asséchés, le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) est en permanence menacé de démantèlement.

    La deuxième raison, c’est l’apparition − certainement liée − des réseaux sociaux et de l’imposition, dans les mentalités, de la réaction émotionnelle immédiate à la place de la réflexion : il est davantage payant pour les politiques de montrer que l’on met des millions d’euros sur la table en réaction à une épidémie − comme cela a été fait pour H1N1, Ebola, Zika, etc. − plutôt que de les anticiper sur le long terme. Entre les deux, il n’y a pas le même bénéfice politique vis-à vis-du contribuable européen... En France, cette tendance lourde n’a pas été infléchie par les présidents successifs, de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron, en passant par François Hollande, jusqu’à la crise due au Covid-19.

    Pour quelles raisons « la science ne marche pas dans l’urgence et la réponse immédiate », comme vous l’avez écrit ? Autrement dit, quelles sont les limites de la recherche scientifique face à une urgence sanitaire ?

    Dans les sciences de la vie, la recherche scientifique a pour vocation de découvrir les acteurs, les structures et le fonctionnement des éléments des cellules, des micro-organismes, des virus, et leurs interactions, leur implication dans les maladies, etc.

    En travaillant, entre autres, avec les chimistes médicinaux, les scientifiques fournissent les données qui permettent ensuite de faire des candidats-médicaments, dont l’industrie se charge enfin de la transformation en médicaments 1, en partenariat avec les cliniciens. L’unité de temps d’un cycle complet découverte-médicament est de l’ordre de 10 à 15 ans. Demander un médicament dès le lendemain d’une épidémie n’a aucun sens. Il y a, bien sûr, le repositionnement des médicaments existants. Mais, on l’a vu, rien de transcendant n’a été repositionné pour lutter contre le Covid-19, et probablement rien ne vaudra un médicament conçu spécifiquement pour un virus − et non pas recyclé d’une autre indication.

    En ce qui concerne les virus émergents, la seule possibilité raisonnable est un investissement sur le long terme dans la découverte du monde viral − ce qu’on appelle la « virosphère » − et la caractérisation scientifique à l’avance des membres les plus représentatifs des différentes familles. Car, à l’intérieur des familles virales, il y a des caractéristiques invariantes. Il est alors possible de transférer très rapidement les connaissances acquises sur un virus vers un autre.

    Un exemple : le virus de Zika émerge, c’est un frère jumeau du virus de la dengue. Une quantité impressionnante de données scientifiques accumulées sur la dengue se retrouvent alors tout à fait valables et utilisables. Il aura fallu 10 ans pour réaliser la structure tri-dimensionnelle de la machinerie de réplication − l’ARN polymérase − du virus de la dengue par cristallographie aux rayons-X alors que cette dernière a permis de faire celle du virus Zika en quelques mois. Ce n’est toutefois pas vrai pour les vaccins, car les éléments viraux produisant l’immunité ne sont souvent pas assez conservés dans la même famille virale. Ainsi, s’il y avait eu un vaccin contre le coronavirus de 2003, il est pratiquement certain qu’il n’aurait pas marché de manière satisfaisante contre le Covid-19.

    Comment la pandémie de Covid-19 a-t-elle, jusqu’à présent, et peut-elle, à l’avenir, transformer la recherche scientifique en France et en Europe ?

    Je ne vois aucun signe tangible de transformation. Or, il faut une volonté politique forte pour pouvoir anticiper les problèmes infectieux très en amont, en particulier via le soutien à la recherche fondamentale. En France, prenez la Loi de Programmation Pluriannuelle de la Recherche (LPPR), en cours d’élaboration. Cette loi ne s’attaque à aucune des faiblesses systémiques recensées depuis des années, en particulier concernant le soutien aux laboratoires et concernant les personnels Ingénieurs, Techniciens et Administratifs (ITA), qui font un travail absolument nécessaire pour que les chercheurs puissent travailler.
    Leur nombre a dramatiquement diminué ces dernières années. Ils sont remplacés par des précaires en contrats à durée déterminée. Ce qui fait qu’à chaque fin de contrat ou de projet de recherche, toute la mémoire, les protocoles, le savoir du laboratoire ne sont plus conservés ni transmis. Au lieu de cela, une augmentation de salaire est proposée aux chercheurs seulement. Or, il est très clair que les chercheurs « premiers de cordée » sont attirés d’abord par des conditions de travail satisfaisantes : ils deviennent alors productifs et compétitifs, et le salaire suit dans un second temps. Mais un premier de cordée ne viendra jamais s’installer dans un laboratoire qui n’a pas d’équipements ou de facilités techniques compétitives, même si vous lui doublez sa paie. Au bout de trois ans, il n’aura rien publié et il sera mort scientifiquement.

    En ce qui concerne les virus émergents, nous ne savons pas encore lequel apparaîtra après le Sars-Cov-2 et, donc, il est impératif de créer une agence de recherche sur les virus émergents dans laquelle les scientifiques soient mieux représentés. Ce sont eux, et non pas seulement les médecins et cliniciens, qui créent le terreau scientifique qui devient ensuite matière médicale et clinique. La France confond la recherche scientifique avec la recherche médicale. 3 Elle n’intègre pas assez les scientifiques en amont des décisions concernant la santé, alors que ces dernières dépendent beaucoup de champs disciplinaires comme la biodiversité, la chimie médicinale, la biophysique, etc., avant d’arriver au problème médical proprement dit.

    https://sciences-critiques.fr/bruno-canard-demander-un-medicament-des-le-lendemain-dune-epidemi
    #épidémie #médicament #covid-19 #coronavirus #vaccins #urgence_sanitaire

  • Patients cobayes dans une clinique psychiatrique argovienne jusqu’en 1990
    https://www.rts.ch/info/regions/autres-cantons/11848097-patients-cobayes-dans-une-clinique-psychiatrique-argovienne-jusquen-199

    Comme ailleurs en Suisse, la clinique psychiatrique de Königsfelden, à Windisch (AG), a testé des médicaments encore non autorisés sur des centaines de patients entre 1950 et 1990, regrettent mercredi les autorités.

    Les autorités ne s’étaient pas émues de cette situation, déplore le Conseil d’Etat argovien. En Argovie, le scandale concerne principalement 31 préparations médicamenteuses non homologuées au moment des faits, révèle une enquête menée par l’Institut d’histoire de la médecine de l’Université de Berne sur mandat du gouvernement argovien. Les résultats de leurs recherches ont été présentés mercredi aux médias.

    Les historiens ont examiné 830 dossiers de patients datés de 1950 à 1990 dont 50 issus d’une station d’observation d’enfants à Rüfenach (AG). Les personnes qui se sont fait administrer des médicaments dans le cadre des essais incriminés ont souvent présenté des effets secondaires.

    Traitements parfois interrompus
    « Lorsque ces derniers étaient importants, les traitements à l’essai étaient généralement interrompus. Aucun décès lié directement aux tests médicamenteux n’est connu », écrivent les historiens dans leur rapport.

    Avant les années 1980, aucun document écrit ne prouve que les patients ont été largement informés au sujet des tests de médicaments pratiqués sur eux ni qu’on leur aurait laissé le choix de donner leur accord ou de refuser un tel traitement.

    Contrôles insuffisants
    Comme ailleurs en Suisse, les essais effectués en Argovie se sont d’abord déroulés sans véritable base légale. Ils n’ont été régulés qu’à partir des années 1970. On ne peut toutefois pas en conclure qu’ils n’ont posé aucun problème, écrit l’auteur de l’étude Urs Germann.

    Les essais de médicaments réalisés à la clinique de Königsfelden étaient connus des spécialistes, de l’administration et du monde politique. Le rapport d’enquête le démontre. Les instances cantonales n’ont toutefois joué leur rôle de contrôle que « de manière très légère et superficielle ». Elles ont accordé la plus grande autonomie à la direction de la clinique et ont fait confiance à sa compétence.

    ats/jpr

    #santé #Suisse #cobaye #cobayes #cobayes_humains #médicaments #médecine #pharma #industrie_pharmaceutique #médicament

  • India at heart of global efforts to produce Covid vaccine | World news | The Guardian
    https://www.theguardian.com/world/2020/oct/20/india-at-heart-of-global-efforts-to-produce-covid-vaccine
    https://i.guim.co.uk/img/media/a7616cb8e073c6996d51d879ed34a74eacbb3e8e/0_129_3500_2100/master/3500.jpg?width=1200&height=630&quality=85&auto=format&fit=crop&overlay-ali

    India at heart of global efforts to produce Covid vaccine. Country plays central role in development, manufacture – and possible distribution – of potential vaccine. A research scientist works in a laboratory at the Serum Institute of India. As the largest global supplier of drugs and producer of 60% of the world’s vaccines, India has long been known as the “pharmacy of the world”.Now, as the frenzied hunt for a Covid-19 vaccine gathers momentum, the country is playing an increasingly strategic and central role in the development, manufacturing – and, crucially, possible future distribution – of several possible Covid shots. With more than 7.5 million cases and about 115,000 deaths, India is also one of the worst affected countries by the virus, second only to the US.
    A deal has already been struck for the Serum Institute of India, based in the city of Pune, to produce 1bn doses of the the Oxford/AstraZeneca vaccine, seen as the forerunner in the vaccine race. In anticipation of its success, it has already begun production of almost 2m samples of the vaccine and is carrying out phase 3 human clinical trials on thousands of patients spread across 15 Covid-19 hotspots in India. This week, the Serum Institute of India said it was confident the AstraZeneca vaccine would be ready by December and would be licensed for distribution in India by March.Adar Poonawalla, the CEO of the Serum institute of India, said he was “very optimistic” that more than one successful vaccine was imminent. “A lot of the data that I have seen off-the-record in a lot of these vaccines is very promising and more than three to four vaccines will be successful very soon in the next year,” said Poonawalla.The Serum Institute, which this week also began human trials on an intranasal Covid vaccine, is just one of the dozens of Indian companies in the running to produce the much-coveted vaccine, of which there are almost 200 different types being developed across the world.

    #Covid-19#migrant#migration#inde#sante#circulationtherapeutique#vaccin#medicament#economie#santeglobale

  • 7/9/2020
    Crise : Déjà une pénurie de 50% des #médicaments
    https://libnanews.com/crise-deja-une-penurie-de-50-des-medicaments

    9/10/2020
    Des médicaments saisis à l’AIB [aéroport international de Beyrouth] remis au ministère de la Santé
    https://www.lorientlejour.com/article/1235774/des-medicaments-saisis-a-laib-remis-au-ministere-de-la-sante.html

    Les Forces de sécurité intérieure (FSI) ont annoncé vendredi que les médicaments qui avaient été saisis dimanche dernier à l’Aéroport international de Beyrouth, d’où ils devaient être envoyés illégalement vers l’#Egypte, avaient été remis au ministère de la Santé.…

    14/10/2020 :
    Des médicaments de contrebande à destination d’Égypte interceptés à l’aéroport de Beyrouth
    https://www.lorientlejour.com/article/1236379/des-medicaments-de-contrebande-a-destination-degypte-interceptes-a-la

    La brigade d’inspection des Forces de sécurité intérieure a de nouveau intercepté à l’aéroport international Rafic Hariri de Beyrouth une grosse quantité de médicaments transportée par un voyageur égyptien qui se rendait au Caire en passant par Istanbul, a rapporté mer…

    #Liban

    Des produits vitaux sont indisponibles ; il faut savoir que pour celui qui dispose de devises étrangères les prix sont extraordinairement bas, dans la mesure où, pour l’instant, les médicaments sont subventionnés.

  • « La course au vaccin peut compromettre toute réponse adéquate à la pandémie »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/09/23/la-course-au-vaccin-peut-compromettre-toute-reponse-adequate-a-la-pandemie_6

    Accélération des procédures, logique de concurrence favorisant l’opacité… Pour Pauline Londeix et Jérôme Martin, cofondateurs de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, et Els Torreele, bio-ingénieure, le modèle de la compétition fait courir le risque d’aboutir à des vaccins médiocres, analysent-ils, dans une tribune au « Monde ».

    Tribune. Compétition effrénée pour espérer juguler la pandémie de Covid-19 et retourner à nos vies quotidiennes au plus vite ? Ou bien course folle à la rentabilité à court terme aux dépens des produits de santé en développement, de la sécurité sanitaire, de l’adhésion à la vaccination ou encore de l’usage de l’argent public ? Dans la course aux vaccins contre le Covid-19, qui protégera la santé publique ?

    Ne pas confondre vitesse et précipitation

    La Chine a été le premier pays à annoncer, fin juin, sa décision d’autoriser le vaccin nommé Ad5-nCoV et développé par la firme chinoise CanSino pour un usage militaire, à peine six mois après l’identification du nouveau virus SARS-CoV-2. Mi-août, la Russie a surpris le monde entier en déployant son candidat vaccin « Spoutnik V », malgré les inquiétudes de la communauté internationale, tant cette autorisation semble prématurée. Aux Etats-Unis, le président Trump fait tout son possible pour que le candidat développé par la firme Moderna soit mis sur le marché avant l’élection présidentielle du 3 novembre. De son côté, le gouvernement britannique adapte son cadre légal pour être en mesure d’autoriser un vaccin avant la fin de l’année, alors que l’Agence européenne du médicament (EMA) a déjà fait passer les vaccins en développement en procédures accélérées.

    L’urgence est là, mais confondre vitesse et précipitation peut compromettre toute réponse adéquate à la pandémie. Le modèle qui s’est imposé pour répondre à la crise, celui de la compétition et de l’accélération des procédures, n’est pas le plus pertinent pour obtenir ces outils indispensables. Ils ne le seront que s’ils sont suffisamment efficaces. Car pour le moment, et encore loin de la ligne d’arrivée proche promise par de nombreux leaders internationaux, cette course semble bien plus satisfaire des stratégies de domination géopolitiques, des intérêts populistes ou encore ceux, financiers, des multinationales pharmaceutiques. L’idée semble acquise que tel pays, ou tel industriel, doit être le premier à remporter cette course, faisant presque oublier l’ampleur du défi médical que représente le développement de vaccins – un effort qui peut d’habitude représenter entre cinq et dix années de recherche et de développement.

    Compression des procédures

    Ici, les Etats, et d’autres, ont décidé de lancer simultanément toutes les phases de recherche habituellement distinctes et successives. Sont ainsi compressées des procédures pourtant indispensables à la sécurité et à l’évaluation de l’efficacité de tout produit de santé. Pour répondre à une demande mondiale, la production en masse de doses est même lancée en parallèle des phases d’essais cliniques, et ce sans garantie sur l’efficacité des candidats.

    Dans cette course folle, où gagner en vitesse semble plus important que développer les meilleurs outils pour répondre aux besoins des populations, les logiques de concurrence encouragent l’opacité et l’absence de concertation entre les différents acteurs. Ainsi, les développeurs des huit principaux candidats vaccins en phase 3 ont choisi de cibler la même protéine du virus, parce qu’elle semblait plus exploitable à court terme, négligeant d’autres pistes de recherche potentiellement plus prometteuses à plus long terme. Il n’est pas certain qu’une plus grande concertation et un échange des résultats intermédiaires aient nécessité plus de temps, mais il semble assuré que cela réduirait les risques d’obtenir des vaccins médiocres.

    S’appuyant sur une consultation d’experts internationaux, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié un « profil de produit cible ». Il présente les caractéristiques minimales qu’un vaccin utile à la santé publique doit remplir. Malheureusement, les développeurs ne sont pas tenus de les suivre. Et, comme les protocoles d’études cliniques sont tenus secrets, nous ne disposons pas des éléments précis permettant d’évaluer les objectifs des études en cours. Comment, par exemple, sont déterminées la bonne tolérance des produits en développement et même tout simplement leur efficacité ?

    Cette efficacité n’est pas binaire, elle ne s’évalue pas entre tout et rien, et prendre conscience des échelles est indispensable pour prévoir les politiques vaccinales. Un vaccin qui ne créerait pas d’immunité collective n’aurait un intérêt que très limité au niveau populationnel. Selon des études, ce serait le cas d’un vaccin dont l’efficacité de protection contre l’infection serait inférieure à 60 %, même si la totalité de la population était vaccinée, ce qui paraît peu probable. Or, les candidats vaccins en phase 3 risquent de présenter une efficacité bien inférieure à 60 % et pourraient seulement réduire la sévérité de l’infection.

    Logique de compétition

    Dès lors, on comprend aisément la tentation pour un développeur inscrit dans une logique de compétition : s’il souhaite que son essai soit le premier à fournir les apparences d’un succès, la question initiale posée dans le protocole doit être la plus large possible et celle à laquelle il est le plus simple possible de répondre. Il a, par exemple, intérêt à ce que la question soit « le vaccin est-il efficace ? », pour ne pas avoir trop de contraintes à définir a posteriori ce que l’étude a pu démontrer, ni devoir répondre publiquement à la question « efficace à quel taux ? ».

    C’est la raison pour laquelle il est essentiel qu’un comité indépendant puisse revoir les protocoles et leurs résultats une fois l’étude achevée, et que des experts sans lien d’intérêt puissent réfléchir à définir les caractéristiques idéales des produits recherchés. Ce comité, dont les discussions et travaux doivent être ouverts, publics et transparents, permettrait de réfléchir à une approche de développement d’outils complémentaires, et non mis en concurrence. Par exemple, un vaccin qui bloquerait la transmission pourrait être plus adapté au personnel soignant, alors qu’un autre, permettant de limiter la sévérité des symptômes, le serait plus aux personnes âgées ou aux personnes atteintes d’autres pathologies. Mais une telle approche ne semble pas à l’ordre du jour dans ce contexte international de concurrence effrénée.

    Chèques en blanc aux industriels

    Sommes-nous prêts à dépenser des milliards d’argent public pour un bénéfice limité sur le plan sanitaire ? Le rôle de la puissance publique est-il de signer des chèques en blanc aux industriels, de déréguler, puis de se retirer de l’évaluation du produit, des stratégies de recherche, de production et de commercialisation ?

    Car à force d’admirer la success story de la petite start-up Moderna, qui développe l’un des candidats vaccins les plus avancés, on en oublie que sa principale force est bien d’avoir comme partenaire intellectuel et logistique de recherche, et comme financeur, l’immense National Institutes of Health (NIH), financé par l’argent public américain. En France, en juin, le laboratoire Sanofi, qui a reçu de nombreuses aides publiques pour le développement d’un vaccin contre le SARS-CoV-2, a même menacé d’approvisionner en priorité les Etats-Unis, afin d’obtenir davantage d’aides publiques auprès de l’Union européenne et de la France. Le laboratoire a eu gain de cause le 31 juillet, lorsque la Commission européenne a annoncé un accord avec la firme et avec GSK leur garantissant l’achat de 300 millions de doses. Si les investissements des firmes sont constamment mis en avant pour justifier ce type d’accords, l’ampleur des risques pris par le public dans le financement de ces candidats vaccins et dans l’achat de doses semble constamment occultée, alors que l’efficacité et l’innocuité ne sont pas garanties.
    Le simple fait que les pouvoirs publics n’aient pas accès aux protocoles de recherches d’essais alors qu’ils les financent par des milliards d’euros publics devrait susciter l’indignation

    La place des Etats dans cette « course » est donc paradoxale. A voir l’industrie pharmaceutique s’autoréguler, on croirait presque qu’ils sont portés disparus, alors qu’ils n’ont jamais été aussi présents comme financeurs et à travers leurs infrastructures de recherche publique.
    Le simple fait que les pouvoirs publics n’aient pas accès aux protocoles de recherches d’essais alors qu’ils les financent par des milliards d’euros publics devrait susciter l’indignation. En mai 2019, les Etats membres de l’OMS se sont engagés à mettre en place la transparence, notamment sur les essais cliniques, les prix, les financements de la recherche et du développement et les brevets. Depuis le début de la crise due au Covid-19, nombreux ont été les exemples des conséquences dramatiques de l’opacité. Si la résolution de l’OMS ne dispose pas de pouvoir contraignant, sa mise en œuvre est plus que jamais cruciale, pour aiguiller les politiques publiques en santé et pour juguler la pandémie mondiale que nous traversons.

    En matière de vaccin comme pour tous les produits de santé, la transparence sur les protocoles de recherche et les données cliniques ainsi qu’une revue indépendante et systématique de ceux-ci par la communauté scientifique constituent une nécessité, une exigence éthique et une urgence absolue. Les Etats doivent également publier les contrats signés avec les firmes pharmaceutiques et exiger d’elles qu’elles publient sans délai les protocoles d’études des essais en cours, et les résultats détaillés dès que les études ont abouti.

    Le modèle de la compétition n’est donc pas adapté. Il fait courir un grand risque d’aboutir à des vaccins médiocres, sans réel impact sur la pandémie à l’échelle globale, notamment au regard de l’engagement financier et logistique de la puissance publique. Celle-ci devrait au contraire promouvoir un modèle de coopération, avec des études transparentes sur les objectifs, la méthode, les financements et les conditionnalités d’accès. Cette voie, qui ne confond pas urgence et rentabilité à court terme, ne garantit pas un succès rapide, mais elle ne l’exclut pas et réduit les risques d’obtenir des produits sans intérêt. Cette solution réinscrirait la recherche et le développement dans des logiques d’intérêt public, ce qui doit aussi se prolonger dans la production et la commercialisation pour garantir des prix justes et un accès à tous. D’autres modèles existent donc, encore faut-il que les Etats cessent de réduire leur rôle à celui de prestataire de service des entreprises du médicament et se rappellent que la santé est une affaire publique.

    #santé_publique

  • La virologie est un sport de combat

    Je suis #Bruno_Canard, directeur de recherche CNRS à l’université d’Aix-Marseille. Mon équipe travaille sur les #virus_à_ARN (#acide_ribonucléique), dont font partie les #coronavirus.

    Mme la Ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation m’ayant cité, et mentionné mes travaux dans son intervention sur les Matins de France Culture le 22 juin 2020 (https://www.franceculture.fr/emissions/les-matins/les-matins-de-france-culture-emission-du-lundi-22-juin-2020

    ), il m’a semblé important de préciser les #conditions_de_travail de mon équipe de #recherche sur le #SARS-CoV-2 et sa projection dans la future #Loi_de_Programmation_de_la_Recherche (dite #LPPR), qui est en cours d’examen à l’Assemblée Nationale.
    Cela permet d’illustrer, à partir d’un cas concret, et peut-être de faire comprendre au grand public le #sous-financement récurrent de la #recherche_publique en #France en général dans les 20 dernières années ; la #précarité grandissante des #personnels de ces laboratoires ; le #sous-équipement dramatique en grands #instruments_scientifiques essentiels aux développements de thérapies antivirales ; le faible niveau des #salaires des chercheur·ses, très éloignés de ceux des haut·es fonctionnaires ; et finalement, le peu de #considération dont ils font l’objet par les femmes et les hommes politiques français. Elles et ils prétendent parler au nom de la #science, souvent confondue avec la #technologie, mais sans écouter les scientifiques.

    Chère Mme la Ministre, chère Frédérique, je me permets de vous appeler par votre prénom en souvenir des cafés et bavardages créatifs que nous avons partagés lorsque, en 1992, j’étais fraîchement recruté comme chercheur au #CNRS à Nice dans le laboratoire dirigé par Patrick Gaudray, et vous, doctorante dans le laboratoire de François Cuzin à l’Université de Nice. C’était une époque formidable, j’y ai fait mes plus belles ascensions dans ces extraordinaires Alpes-Maritimes, pendant que la France commençait sa dégringolade dans le classement scientifique, dans une remarquable trajectoire parallèle au nombre de postes statutaires de chercheur·ses et de manière plus générale, à la performance de la recherche française.

    Nous nous retrouvons donc environ 25 ans plus tard.

    Chère Frédérique, vous êtes désormais Ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, et soutenez que cette loi permettra un réarmement de la #recherche_française inégalé depuis 1945. Je suis un chercheur « de base » et je me suis exprimé à titre personnel, comme la majorité de mes collègues, pour formuler mes craintes d’un #budget concentré sur des projets à court terme, synthétisées dans la tribune « La science ne marche pas dans l’urgence » (https://universiteouverte.org/2020/03/04/coronavirus-la-science-ne-marche-pas-dans-lurgence/;%20Le%20Monde,%2029%20f%C3%A9vrier%202020;%20https:/lejournal.cnrs.fr/articles/la-science-fondamentale-est-notre-meilleure-assurance-contre-les-). Dans un entretien à France Culture en juillet (https://www.franceculture.fr/emissions/les-matins/les-matins-de-france-culture-emission-du-lundi-22-juin-2020

    ), vous avez déclaré à mon sujet : « Mr Canard a obtenu plusieurs financements sur projets… Je connais par cœur les financements qu’a eu ce laboratoire ».

    Justifier les « plusieurs financements sur projets » pour mon laboratoire sous-doté

    Je m’étais étonné de recevoir en juin la demande urgente de la part mon employeur (le CNRS), de fournir le montant de tous les contrats dont mon équipe a bénéficié, de l’#Agence_National_de_Recherche (#ANR) en particulier. Malheureusement, force a été de constater que le ministère et ses contrats ANR n’y a pas occupé une place proéminente. Encore moins sur les coronavirus (2 projets ANR coordonnés en 18 ans), sur lesquels aucun soutien financier spécifique n’a été accordé depuis plusieurs années, sauf en 2019 par la #Fondation_de_la_Recherche_Médicale, dont la vision scientifique tient heureusement peu cas des modes. Nous nous échinions, en effet depuis 2003, mes collègues d’équipe et moi, à étudier la réplication des coronavirus et comment ces derniers mutent, ce qui est d’une importance capitale pour la conception de #vaccins ou de #médicaments. Tous les dossiers de projet ANR inlassablement déposés depuis 2015 ont été jugés indignes d’être financés et/ou inintéressants. Cinq fois, pour être précis. Dans la dernière édition (dépôt du projet en octobre 2019 – réponse pas encore arrivée à ce jour, 19 septembre 2020), j’ai failli renoncer à apporter encore des résultats expérimentaux préliminaires, pour ne pas les divulguer gratuitement à mes concurrent·es : l’évaluation des projets ANR se faisant par des expert·es internationaux forcément pris parmi les spécialistes qui connaissent le sujet, donc presque tout le temps, des concurrent·es… J’ai fourni le même dossier, mais amputé de la recherche sur le virus #Ebola. Oui, Ebola produit actuellement une épidémie en République Démocratique du Congo, mais la loi mort-kilomètre nous dit que le sujet est défavorable pour éveiller un quelconque intérêt en ce moment. La recherche sur Ebola n’intéresse que quand le virus sonne à notre porte, comme en 2014.

    Le SARS-CoV-2 aura donc eu un effet magique : ma recherche inintéressante sur la #variabilité_génétique de ce virus a subitement reçu, en juin 2020, les commentaires les plus positifs, dithyrambiques, qu’il m’a été possible de recevoir en 30 ans de carrière1. Ni mon projet ni ma recherche n’ont pourtant changé : seule leur perception a changé dans le contexte COVID19, renforçant cette constatation que j’ai maintes fois faite : la science ne marche pas dans l’#urgence 2 et la virologie, ce n’est pas que les coronavirus.

    Pour les « plusieurs financements sur projets », vous voulez donc probablement parler des deux projets européens dont mon équipe a récemment bénéficié. La France étant une grosse contributrice financière à l’espace européen de la recherche, il me semblait donc presque « patriotique », en quelque sorte, de me lancer corps-et-âme dans la lutte anti-COVID19 en rapatriant des fonds européens pour pouvoir employer des personnes motivées, et continuer à décrypter comment ces fichues bestioles virales arrivent à se reproduire au prix d’un tel bazar dans une cellule, un organisme, une société. Le premier projet européen appelé #SCORE, a été écrit en 10 jours (et nuits) en février 2020 grâce au réseau de collaborateur·trices corona-virologistes que la disette financière des années précédentes n’a pas réussi à effilocher. L’autre appelé #IMI-CARE a été écrit immédiatement après en mars 2020, en 3 semaines au lieu des plutôt 6 mois habituels, avec un consortium international de 36 laboratoires, dont 12 industriels majeurs. Peut-être auriez-vous préféré que je m’abstienne dans cette quête inlassable de financements ? Impossible, car c’est la condition sine qua non pour pouvoir avancer dans nos recherches, répondre à l’urgence de la situation et recruter immédiatement quelques personnes en CDD.

    S’appuyer sur des contractuel·les pour assurer la survie de notre laboratoire

    Je me suis posé la question lorsque j’ai embauché Camille, Adrien, et Pierre : trois jeunes diplômés d’un Master en quête de leur première expérience professionnelle, qui n’ont pas hésité en plein confinement à s’entasser dans une voiture depuis Toulouse pour venir s’installer à Marseille, avec comme horizon un #CDD de 15 mois, un statut inexistant et une paie royale de 1600 euros mensuels. Je ne pense pas qu’elle et ils espèrent quoi que ce soit de la LPPR, qui ne propose aucune amélioration pour les contractuel·les de la recherche. On leur a trouvé un appartement, sinon, iels seraient encore peut être à la rue : avec un CDD, il n’est pas facile de convaincre un·e bailleur·se.

    Je me suis également posé la question quand il a fallu que j’embauche un #lab_manager (en CDD, évidemment) pour que Véronique, Barbara et Cécilia, trois ingénieures de recherche totalement saturées de travail dans l’équipe #COVIDemment désorganisée, soient déchargées des corvées administratives routinières qui les empêchent de faire leur métier, c’est-à-dire de la recherche. La fonction principale de ce lab manager ? Nous aider à gérer les stupides « #feuilles_de_temps-projet » qui compartimentent notre cerveau pour les bureaucrates européens. Car dans un projet européen, le CNRS « loue » contre facture le temps de cerveau disponible de ses chercheur·ses (9h-18h, nous ne réfléchissons que les jours ouvrables) et il nous faut donc déclarer, heure par heure, comment nous nous occupons.

    Je me suis encore posé la question quand les équipes de notre laboratoire, entité conjointe entre le CNRS et l’Université Aix Marseille, ont dû mutualiser leurs ressources pour pouvoir embaucher un autre CDD, technicien·ne qui prépare les réactifs dont nous avons besoin, lance la vaisselle et les autoclaves, et tout cela pour environ 1200 nets par mois. C’est un poste nécessaire au laboratoire, mais que nous devons auto-financer, malgré les 26 % du montant de nos contrats qui partent en frais de gestion et provision pour la maintenance des appareillages du laboratoire.

    Je me suis posé ces questions car ces efforts financiers et ces CDD étaient, il n’y a pas si longtemps, assurés par un soutien de base au laboratoire de la part de nos deux tutelles, le CNRS et l’#université. Et surtout par des postes statutaires, essentiels pour la survie de nos laboratoires, qui ne sont mentionnés dans aucun article de la LPPR et dont le nombre s’est effondré depuis 2008. Vous dites donc sur France Culture que mon « laboratoire (est) financé tous les ans de manière récurrente ». Quel humour par omission ! Vous savez très bien que le #financement_récurrent ne permet pas de financer nos programmes de recherche. Dans tous les laboratoires de sciences expérimentales, les chercheur·ses ponctionnent elleux-mêmes leur projet d’une contribution « volontaire » qu’iels mutualisent pour assurer les carences des employeur·ses publics. Chez nous, on fait la plonge du labo à tour de rôle pour laver nos éprouvettes, et le soutien récurrent constitue moins de 5% du budget de fonctionnement : pas assez pour acheter suffisamment de mouchoirs pour pleurer.

    Votre petite phrase prononcée sur le ton « je dis ça, je dis rien » n’avait donc certainement aucunement l’intention de décrédibiliser votre administré que je suis. La grande majorité de la communauté scientifique vous a exprimé depuis des mois ses craintes envers la LPPR : entre autres, le ras-le-bol des titulaires d’être transformé·es en bureaucrates expert·es dans la gestion du personnel précaire, et la crainte des contractuel·les de le rester « à vie », ou après avoir fait leurs preuves pendant des années d’être considéré·es comme dignes d’être titularisé·es (pour les « professeur·es junior »). Pour mémoire, les quelques 200 premièr·es signataires de la pétition (qui a fait pschitt) de soutien à la LPPR, sont à la retraite et ont bénéficié de ce statut de fonctionnaire pendant toute leur carrière. Il est vrai que la connivence augmentée que vous préconisez dans la LPPR avec le secteur privé n’a pas besoin de s’encombrer de chercheur·ses indépendant·es et libres de penser. Ainsi, il n’y aura plus de scandale type Mediator, SDHI, glyphosate, perturbateurs endocriniens, … puisque personne ne mord la main qui nourrit.

    Espérer arriver au niveau de 2ème division en biologie structurale

    Pourtant, cette « abondance » que la LPPR nous promet pourrait trouver une meilleure destination. Je me suis alors rappelé le plan « #France_Cryo-EM », un #Equipex (Equipement d’excellence), qui nécessite 36 millions d’euros pour pouvoir observer le SARS-CoV-2 et ses protéines avec des #cryo-microscopes_électroniques (#Cryo-EM) à haute résolution et concevoir intelligemment les vaccins et #traitements requis. Créé officiellement en 2016, il reste pourtant aux biologistes structuraux Français 16 millions d’euros à trouver pour pouvoir pour amener la France au niveau de 2ème division en #biologie_structurale 3. Ayant déploré l’absence de ce grand équipement, vous m’avez proposé de venir collecter des données sur le microscope de Nice, je ne reviendrai pas sur cette confusion microscopique. Au 23 juillet 2020, des laboratoires Chinois et Allemands ont publié dans les journaux internationaux les plus réputés, Nature, Science, Cell, pas moins de 9 structures de l’ARN polymerase de ce virus, en utilisant une information clé de nos travaux réalisés en 2014. En l’absence de Cryo-EM haute résolution, nous avons regardé passer les balles au-dessus de nos têtes… Ironie du sort et humiliation supplémentaire, ces #revues_scientifiques m’ont souvent sollicité pour évaluer ces publications que j’aurais dû faire. A titre de comparaison, l’Allemagne, notre voisin européen que l’on peut considérer être en première division, avait 25 Cryo-EM en 2018.

    Ces 16 millions manquants pour que les chercheur·ses puissent exercer leur métier dans des conditions décentes sont à mettre en perspective avec le milliard d’euros accordé en moins d’un an au groupe français #Sanofi sur un pari vaccinal, certes en majorité via leurs ami·es du #BARDA américain, qui seront les premièr·es servi·es. Enfin, qui devraient : ce sont les mêmes qui ont donné 43 millions à Sanofi en août 2016 pour un vaccin contre le virus #Zika, mais tous deux ont jeté l’éponge en septembre 2017. Cela ressemble beaucoup à 2003 et l’émergence du SARS pour laquelle Sanofi a été copieusement financée pour un vaccin, lui aussi abandonné.

    Ces 16 millions manquants sont également à mettre en perspective avec le #Crédit_Impôt_Recherche 5, passé de 2,5 milliards en 2008 à 6 milliards aujourd’hui. Avantage fiscal généreux destiné à renforcer l’attractivité de Sanofi, pour prendre un exemple concernant directement la COVID19… Ou bien est-ce plutôt pour éviter que ce groupe continue à réduire ses activités de #R&D en France ? Cette générosité est si bien remerciée qu’elle s’est immédiatement traduite, pour l’instant, par 4 milliards à reverser aux actionnaires en 2020, et par le licenciement de 1 700 personnes dans le monde, dont 1 000 en France. En tant que chercheur rompu à la complexité des demandes de financement ANR, j’ai regardé avec émotion et envie le mini-dossier à rapporter dans le formulaire Cerfa 2069-A-SD pour que cette entreprise s’exonère de 130 millions d’euros annuels…

    Arrêter la sensation de chute libre pour la recherche publique française

    Dans Le Monde du 24 juillet, je lis entre les lignes une synthèse indirecte de cette sensation de chute libre : la France est passée en 20 ans de la 5e à la 8e place des contributeurs aux #publications_scientifiques, ce qui est à mettre en relation avec un financement insuffisant de la recherche équivalent à 2,2 % du PIB (0,8 % recherche publique, 1,4 % privée). Vous visez à porter l’effort de recherche de la nation à 3% du PIB (1% public, 2% privé) d’ici 2030. Je constate que l’effort de financement de la #recherche_privée est donc plus du double de celui de la recherche publique. Il me semble hasardeux de compter sur la recherche privée pour rattraper l’écart de publications, ou bien peut-être faudra-t-il que l’utilisation de l’argent public investi dans cette dernière subisse des évaluations aussi invasives, constantes et publiquement disponibles que celle que nous subissons dans les laboratoires académiques ?

    Finalement, chère Frédérique, depuis une dizaine d’année, trois présidents de la république Nicolas Sarkozy, François Hollande, et Emmanuel Macron n’ont-ils pas eu raison de prendre les chercheur·ses et les universitaires pour des imbéciles ? Pourquoi en serait-il autrement ? Cela fait plusieurs décennies qu’elles et ils sont les seuls haut·es fonctionnaires de catégorie A+ à qui on demande de trouver les moyens financiers de faire leur travail et les derniers en termes de niveau de #rémunération, gagnant en moyenne 3200 euros nets par mois – pour celles et ceux qui ont la « chance » d’être titulaires.

    Je note d’ailleurs que l’oreille d’Angela Merkel, titulaire d’un doctorat en chimie, semble plus réceptive au financement de la science en Allemagne, pays où la crise due au coronavirus semble avoir été mieux gérée que chez nous. Est-ce aussi à mettre en rapport avec la constatation que, par exemple, la ville d’Heidelberg à elle seule a autant de Cryo-EM que la France entière ?

    Peut-être, alors, après avoir travaillé comme des forcené·es pendant cette période difficile avec mes collègues fonctionnaires Etienne, François, Karine, Jean-Claude Nadia, et tou·tes les précaires dont je vous épargnerai la liste7, nous devrions, en prélevant encore sur nos contrats, constituer une cagnotte supplémentaire. Car la LPPR ne prévoit pas grand-chose dans ses premières années tandis qu’elle nous promet « l’abondance » au nom de vos successeur·ses. Mais surtout, nous pourrions ainsi soulager votre budget ministériel, économiser 16 millions d’euros et pouvoir trouver cette goutte d’eau microscopique qui nous permettrait, outre de ne pas se sentir humilié·es face à une concurrence internationale féroce, de travailler à rattraper le temps perdu.

    J’espère avoir correctement éclairé votre petite phrase, dans le respect de votre fonction ministérielle, respect qui finira bien un jour par être réciproque, et que in fine, mes « plusieurs financements sur projets » que vous « connaissez par cœur » continueront à soutenir nos efforts intenses contre le SARS-CoV-2 et le COVID19.

    Références et notes

    1J’ai établi un résumé de ces demandes, à la demande de l’ANR, du CNRS, et de plusieurs journalistes. Pour la dernière demande (la même faite depuis 2016), devenue subitement intéressante après le déclenchement de la pandémie COVID19, voici la première phrase de l’avis général de chacun des trois évaluateurs internationaux :Reviewer n°1 : « The project is a must fund project. The highly multi-disciplinary research project very nicely combines cutting edge techniques ». Reviewer n°2 : « This is an excellent proposal that is recommended to be considered for funding with highest priority ». Reviewer n°3 : « This is a very interesting research proposal. The project is highly relevant for two reasons. First the obvious pandemic outbreak and second the role of epi-transcriptomics and RNA biology in health and disease. »

    2Le Monde, 29 février 2020

    3La France dispose de 3 Cryo-Electro-Microscopes à haute résolution (type Titan Krios) nécessaires pour les études sur les virus et les conceptions de vaccins et médicaments. L’Angleterre et l’Allemagne (que l’on peut considérer être en première division, j’en passe au sujet de la Chine ou des USA) en avaient 22 et 25, en 2018, respectivement. Le plan « France Cryo-EM EquipeX » prévoit d’en acquérir 3 de plus, mais beaucoup de régions (Paris-Sud, Paris-Centre, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Rennes, Montpellier ont dû abandonner tout projet de ce type de microscope pour se rabattre sur des microscopes moins puissants, et mutualisés pour que l’ensemble des chercheur·ses d’une régions puisse travailler.

    4L’ARN polymérase, moteur de la réplication du SARS-CoV-2, devient active lorsque qu’elle est associée à deux autres protéines virales, ce qui ouvre la voie à son étude structurale et fonctionnelle. Subissi L, et al. Proc Natl Acad Sci U S A. 2014 Sep 16 ;111(37):E3900-9.

    5Cette mesure fiscale (art. L244 Quater B du CGI) permet de financer des activités de Recherche et Développement (R&D), sous forme de remboursement ou de réduction d’impôt sur les sociétés. Malgré la possibilité évidente d’évasion fiscale, elle n’a jamais été évaluée de manière transparente.

    6La demande de CIR se fait par le formulaire cerfa 2069-A-SD disponible ici On notera : 1) la simplicité de la description demandée du programme de R&D, à comparer avec l’extrême détail qui est demandé aux chercheur·ses pour leur demande de projet ANR ; 2) l’absence du descriptif du processus de revue ou d’évaluation de ces demandes. Je me porte candidat avec enthousiasme pour évaluer ces dossiers de demande CIR dans le domaine des virus émergents ; 3) l’absence de données publiques sur le taux de réussite de ces demandes.

    7L’ensemble de l’équipe et de ses membres est consultable là.

    Remerciements : Je remercie Thomas Boulin, Samuel Hayat et Sophie Pochic pour la relecture critique et les suggestions.

    https://universiteouverte.org/2020/09/19/la-virologie-est-un-sport-de-combat

    #Frédérique_Vidal #MESRI

  • Eric “Masks + Ventilation” Feigl-Ding sur Twitter :

    “📍HIGHWAY ROBBERY: #Remdesivir, made by GileadSciences, has now set the price ➡️ $2,300 to $3,100 per patient.

    So how much does it cost to produce each vial? ➡️ Just $1.

    US taxpayers also had paid for the drug’s NIH trial.

    Borderline criminal drug pricing. #COVID19” / Twitter
    https://twitter.com/DrEricDing/status/1291320467895320576

    #barons_voleurs #système #légal #médicaments #profits #intérêts_privés #pharma #sans_vergogne #états-unis

  • « Construire une santé en commun devient un impératif moral, éthique et démocratique »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/07/29/construire-une-sante-en-commun-devient-un-imperatif-moral-ethique-et-democra

    « Construire une santé en commun devient un impératif moral, éthique et démocratique »
    Tribune

    Jean-Francois Alesandrini - ancien directeur des affaires publiques à DNDi

    Benjamin Coriat - professeur émérite de sciences économiques

    Stéphanie Leyronas - chargée de recherche à l’Agence française de développement

    Le coronavirus oblige à repenser les problématiques de la marchandisation de la santé. Et à permettre ainsi aux plus démunis d’accéder aux traitements et à un futur vaccin, soulignent trois chercheurs.

    Publié le 29 juillet 2020 à 02h51 -
    Une volontaire reçoit une injection contre le Covid-19 produite par la société chinoise Sinovac Biotech, à Sao Paulo (Brésil), le 21 juillet.
    Une volontaire reçoit une injection contre le Covid-19 produite par la société chinoise Sinovac Biotech, à Sao Paulo (Brésil), le 21 juillet. HANDOUT / AFP

    Tribune. La crise sanitaire mondiale a révélé, fin janvier, les défaillances du système de l’innovation médicale et de l’accès aux produits de santé pour tous : ni vaccins développés, ni traitements validés, ni diagnostics disponibles pour lutter contre une pandémie dont les scénarios les plus sombres annonçaient plusieurs millions de morts. Devant des opinions inquiètes, la plupart des gouvernements européens et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont fixé un nouveau cap : un accès équitable aux futurs traitements.

    Bien que désordonnée, la discussion actuelle revitalise des idées débattues par quelques experts depuis des années sur tout un ensemble de problématiques liées à l’accès aux produits de santé : la marchandisation du domaine de la santé, les brevets, les prix pratiqués, l’opacité des coûts de la recherche, la générosité de l’industrie pharmaceutique auprès de ses actionnaires, ou encore les capacités limitées d’innovation et l’accès restreint aux produits de la science des pays à bas revenus.
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    L’idée sur laquelle reposent les déclarations universalistes et progressistes, faites depuis le début de la crise, est celle de prix abordables des produits développés, voire de leur gratuité pour les plus vulnérables. Assistons-nous ainsi à une révolution dans le domaine de la santé, tirée par les milliards d’argent public, mais aussi philanthropique, mobilisés en urgence pour la recherche et le développement ? Le lancement de la Garantie de marché Gavi, lors du sommet mondial sur la vaccination, le 4 juin 2020, et les 3,8 milliards de dollars (3,3 milliards d’euros) levés en quelques jours pour la recherche sur les vaccins contre le Covid-19 (AMC Covax) pourraient le laisser croire.

    Fortes divergences

    La concrétisation de ces intentions révèle toutefois de fortes divergences. Dans leur communiqué en date du 26 mars, les dirigeants du G20 évoquent des « prix abordables » pour les médicaments, les vaccins et les diagnostics développés.

    Les dirigeants d’Unitaid précisent que les entreprises doivent renoncer à leurs licences en faveur d’une structure qui garantirait la production de traitements à des prix abordables. Les organisations non gouvernementales en général, comme Médecins sans frontières (MSF), plaident pour qu’aucun brevet ne soit déposé ni qu’aucun profit ne soit réalisé par les industriels. D’autres exigent, à l’instar de Wellcome Trust, aujourd’hui un financeur incontournable en faveur de la santé publique mondiale, que le vaccin soit considéré comme un bien public mondial et mis à disposition gratuitement.
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    Ainsi, à situation exceptionnelle, mesures extraordinaires. Mais derrière les intentions affichées, il est à craindre des lendemains moins solidaires et décevants pour les tenants d’un monde sans brevets et de l’accès aux produits de santé pour tous. Les industriels restent réticents à faire des concessions sur les droits que leur confèrent leurs brevets, qu’ils considèrent comme « un puissant incitatif au développement de la recherche », et les gouvernements ne semblent guère enclins à définir de nouvelles règles du jeu.

    L’Europe et les Etats-Unis ont déjà préempté des volumes conséquents de vaccins avec les industriels, faisant poindre l’émergence d’un « nationalisme vaccinal »

    Prenons l’initiative Covax : elle offre des caractéristiques intéressantes sur les questions de distribution et d’accès. Le dispositif prévoit, en 2021, une production de 2,5 milliards de doses à travers un système s’apparentant à une centrale d’achat auquel les pays contribueront. Toutefois, si des quotas de vaccins seront réservés pour le personnel soignant, pouvant aller jusqu’à 20 % de couverture vaccinale pour les pays contributeurs, les petits Etats risquent de passer à la trappe. Avec la garantie d’achat d’un certain volume de nouveaux vaccins avant même leur homologation, les fabricants sont ainsi incités à investir sans tarder dans leurs capacités de production.

    Cette incitation est nécessaire, car si un médicament possède en général une durée de vie longue du fait de consommations répétées dans le temps, le vaccin n’est administré qu’un nombre de fois limité. Dès lors, le coût de la recherche ne peut être couvert que sur l’administration d’un très grand nombre de doses.

    On peut penser que cette économie particulière offre la garantie d’un accès plus équitable aux vaccins développés. Mais l’Europe et les Etats-Unis ont déjà préempté des volumes conséquents pour leur marché à travers des accords bilatéraux avec les industriels, faisant poindre l’émergence d’un « nationalisme vaccinal ». Si un ou des produits venaient sur le marché dans quelques mois, il sera important de regarder, dans les faits, la réalité des promesses faites.
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    Le statu quo qui banalise le médicament et le vaccin comme des marchandises ordinaires ne peut plus être de mise. La crise du Covid-19 a certes ouvert des brèches mais, pour l’heure, le débat se cristallise entre les défenseurs de la propriété intellectuelle et ceux qui plaident en faveur d’une économie de la santé sans brevets. Entre ces deux pôles, des initiatives diverses nous montrent un autre chemin.
    Propriété intellectuelle

    Portées directement par des scientifiques, des médecins ou des experts de la santé publique, elles innovent sur le champ de la propriété intellectuelle, qui n’est plus traitée comme « absolue » et « exclusive », mais comme partagée et inclusive. Elles s’inscrivent dans la lignée des travaux sur les communs dont la politiste américaine Elinor Ostrom, prix Nobel d’économie en 2009, a formulé les fondamentaux. La propriété est conçue comme un « faisceau de droits » dont les attributs peuvent être distribués et partagés. Dans cette conception, le titulaire du droit d’aliéner un bien ou d’en faire commerce peut être contraint par le respect des droits d’accès et d’usage définis et protégés.

    Ce principe transposé au cas des médicaments – et notamment ceux qui ont trait aux traitements des épidémies et pandémies – bouleverse la donne en permettant de dépasser une forme binaire de la pensée et de l’action (pour ou contre le brevet).

    La question qui se pose alors est celle des droits à protéger et des accords à passer en ce sens entre les acteurs, du patient au producteur, en passant par les médecins prescripteurs. Sans le revendiquer, plusieurs pratiques dans le champ de la santé amorcent des approches tournées vers l’accès et pourraient, sous certaines conditions, être renforcées dans une logique de communs.
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    Il s’agit par exemple du recours à la licence obligatoire, principe qui s’impose aux signataires de l’accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Adpic). Voie encore sous-utilisée, elle installe un droit d’accès aux traitements, par-delà les droits conférés au détenteur du brevet. Le 17 mars, le Chili a déclaré que la pandémie de Covid-19 justifiait l’application d’une telle mesure. D’autres pays ont suivi : Israël (19 mars), l’Equateur (20 mars), le Canada (25 mars) et l’Allemagne (27 mars).

    Un système plus vertueux

    La pratique de prix différenciés, voire de commercialisation à prix coûtants, est une autre piste. Dans les années 2000, la stratégie « no profit, no loss » (« aucun profit, aucune perte ») de Sanofi a ainsi permis la mise sur le marché d’un antipaludéen à moins de 1 dollar pour les adultes. Autre exemple : le laboratoire Abbott fait varier les prix du Liponavir/Ritonavir, médicament contre le VIH-sida et aujourd’hui testé dans les essais cliniques contre le Covid-19, d’une échelle de 1 à 10 selon plusieurs critères tels que la pression des Etats et de la société civile, l’existence de centrales d’achat ou la présence de compétiteurs potentiels.

    Si, dans l’état actuel des choses, les laboratoires restent « maîtres des rabais » qu’ils proposent et qu’ils utilisent finalement comme des armes marketing, un système plus vertueux pourrait objectiver et codifier ces différenciations de prix sur la base des besoins des patients et des systèmes de santé en place.
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    C’est ce que permettent, par exemple, des accords de licences conclus par des organisations comme la fondation Drugs for Neglected Diseases Initiative (DNDi) avec les grands laboratoires pharmaceutiques. Aux termes de ces accords, l’industriel détenteur d’une molécule potentiellement intéressante contre telle ou telle maladie accorde des droits non exclusifs sur une molécule à DNDi pour toutes les applications qui résulteraient de la recherche conduite pour cette maladie.

    Ces modèles reposent sur le partage des connaissances, la diminution des coûts de la recherche et la mise sur le marché de produits sans brevet, accessibles à tous. Ils restent expérimentaux et fragiles mais, après quinze ans d’existence, ces initiatives ne peuvent plus être ignorées. C’est fort de cette expérience que DNDi a impulsé, le 3 avril, la formation d’une Coalition pour la recherche clinique sur le Covid-19 en vue de développer une recherche sur le virus dédiée aux pays du Sud.

    Revoir les règles

    On pourrait citer aussi les plates-formes de brevets, qui offrent la possibilité aux industriels de partager, sur une base volontaire, tout ou partie de la propriété intellectuelle : en témoigne la mise en place récente par l’OMS de l’accélérateur technologique Covid- Technology Access Pool (C-TAP), plate-forme pour laquelle huit produits pour le traitement du Covid-19 sont sous essais cliniques.

    Révélatrice des inégalités sociales à travers le monde et des insuffisances des structures publiques de soins, le Covid-19 bouscule l’ordonnancement de la recherche en matière de santé publique. Elle appelle à des outils appropriés, au bénéfice du plus grand nombre, et d’abord des plus fragiles.

    Revoir les règles du jeu pour construire une santé en commun devient un impératif moral, éthique, et même démocratique. En sortant du diktat de la propriété intellectuelle exclusive, des initiatives nous montrent la voie.

    Jean-Francois Alesandrini, ancien directeur des affaires publiques à DNDi (Initiative médicaments pour les maladies négligées). Benjamin Coriat, professeur émérite de sciences économiques à l’université Sorbonne Paris-Nord. Stéphanie Leyronas, chargée de recherche à l’Agence française de développement

    #Communs #Médicament #Santé_publique

    PS : Tiens, tiens, Jean-François Alessandrini était un des auteurs du premier livre publié par C&F éditions ( Pouvoir savoir , en 2005) et Benjamin Coriat dans une des dernières publications ( Discours de Stockholm par Elinor Ostrom, 2020, dont il a rédigé la préface).

  • COVID-19 : Sommes-nous à nouveau induits en erreur par les entreprises pharmaceutiques ?
    https://www.investigaction.net/fr/covid-19-sommes-nous-a-nouveau-induits-en-erreur-par-big-pharma

    En mars 2020, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré que l’épidémie de COVID-19 était une pandémie. Ce n’est pas une première foi. Dans un passé récent, l’OMS avait annoncé en juin 2009 que le H1N1 – connu aussi sous le nom de grippe porcine – était aussi une pandémie. Entre ces deux pandémies, de nombreux faits ont été négligés et il convient d’y revenir.


     
    Après l’épidémie de H5N1 (la grippe aviaire) et au début de celle de H1N1, les entreprises pharmaceutiques transnationales se sont lancées dans une compétition féroce pour fournir des traitements en l’absence de vaccins.

    Entre 2005 et 2009, l’antiviral oseltamivir, commercialisé par Roche sous le nom de Tamiflu, a réussi à être reconnu comme le médicament de choix pour la prévention et le traitement par plusieurs organismes internationaux tels que l’OMS, le Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis d’Amérique et l’Agence européenne des médicaments.

    A cette époque, afin de préparer une “éventuelle opération de confinement”, l’OMS a reçu de Roche un don de trois millions de traitements d’oseltamivir destinés à constituer une réserve, selon le rapport du Comité d’examen du fonctionnement du Règlement sanitaire international (2005) en relation avec la pandémie de 2009 (H1N1) 2009, publié par l’OMS.

    L’OMS a encouragé les pays à introduire des plans de confinement rapide dans leurs mécanismes nationaux de préparation aux pandémies de grippe, selon le même rapport. En outre, l’OMS a élaboré dans le même but un “protocole de confinement rapide” reposant essentiellement sur l’oseltamivir.

    Comme il fallait s’y attendre, sous l’effet d’une panique globale de grande ampleur, Roche a reçu des commandes venues de pays du monde entier, notamment de l’Égypte. Des recherches ultérieures et la littérature révèlent que les décisions d’achat reposaient sur des essais cliniques financés par Roche, dont les résultats, selon les experts, étaient limités et incomplets, surtout en ce qui concerne l’efficacité et les effets secondaires du Tamiflu, dont certains se sont par la suite révélés dangereux.

    En outre, certaines informations fausses laissaient prévoir une flambée incontrôlable de l’infection. Une étude Cochrane a révélé que les bénéfices de l’oseltamivir étaient faibles en ce qui concerne la diminution des symptômes, car ce médicament ne réduisait leur durée que d’une demi-journée tout au plus.

    Les auteurs de cette étude, qui se sont arrangés pour obtenir les rapports complets des recherches cliniques originales, ont également pu se faire une idée plus claire des effets secondaires de l’oseltamivir. A la fin, l’étude Cochrane a posé la question de savoir si la constitution de réserves d’oseltamivir était justifiée.

    On peut voir ce qui précède sous un autre angle.
    Les entreprises pharmaceutiques font en général pression sur les gouvernements lors de telles crises. Durant la pandémie de H1N1, la méthode adoptée par Roche a consisté essentiellement à persuader les gouvernements de signer des conventions d’achat de Tamiflu car, à l’époque, les premiers arrivés étaient les premiers servis.

    Il est à relever que ces négociations ont eu lieu dans un contexte de tension mondiale et de compétition inavouée entre les pays pour se procurer le traitement le plus vite possible à une même et unique source.

    Une telle situation démontre la gravité des pratiques monopolistiques du marché pharmaceutique mondial. La probabilité de voir se répéter ce scénario est d’autant plus grande que les pays continuent à négocier l’accès aux médicaments sur un marché monopolistique, comme le prouve l’achat par les États-Unis à Gilead Sciences de tout le stock existant de remdesivir et les conventions d’achat préalables de vaccins potentiels par plusieurs pays européens.

    A l’époque, les ventes d’oseltamivir avaient dépassé les 18 milliards de dollars étasuniens, payés pour moitié par les gouvernements. Les États-Unis ont par exemple dépensé plus de 1,5 milliard de dollars pour constituer des stocks d’oseltamivir, en se fondant sur les recommandations du CDC, alors que le Royaume-Uni a dépensé pour sa part 770 millions de dollars étasuniens pour ce même médicament entre 2006 et 2014.

    Aucune donnée officielle n’est disponible concernant la somme totale dépensée par l’Égypte pour acheter de l’oseltamivir. Quelques informations ont cependant fait état d’un accord entre le ministère de la santé et Roche pour la livraison de 2 500 kg de l’ingrédient pharmaceutique actif de ce médicament, à fabriquer par une succursale de la faîtière pharmaceutique, dont le président a estimé la valeur à environ 100 millions de livres égyptiennes.

    L’OMS est une organisation intergouvernementale qui doit, à ce titre, rendre des comptes à ses États membres. En 2010, ces États membres ont évalué les performances de l’OMS qui avait déclaré que la grippe H1N1 était une pandémie. Cette décision avait suscité les réserves de la communauté scientifique internationale et des milieux politiques, qui estimaient qu’elle avait été prématurée, provoquant une confusion mondiale et coûtant des millions de dollars aux budgets des pays.

    Ce qu’il est important de relever à propos de la lutte contre la COVID-19 est qu’il n’y a pas de “nouveau” médicament qui ait été expérimenté contre le virus. Ceux qui font l’objet d’études sont connus ou sont déjà sur le marché. Les essais auxquels ils sont soumis visent à démontrer qu’ils ont un effet spécifique contre le virus SARS-CoV-2 qui provoque la COVID-19.

    Ce repositionnement ou cette réorientation de médicaments existants constitue une pratique courante dans la recherche en cas de flambées épidémiques soudaines. En outre, qui plus est, la recherche et le développement pharmaceutiques ne produisent plus de substances pharmaceutiques “nouvelles”, se contentant le plus souvent d’améliorer des produits existants ou de leur ouvrir des indications supplémentaires.

    Les essais cliniques menés par l’OMS ont débuté avec quatre propositions de traitement, pour la plupart fort coûteux. Trois mois après le début déclaré de la pandémie, la compétition s’est réduite à deux médicaments : le remdesivir, produit par Gilead Sciences, et le favipiravir, produit par FUJIFILM Toyama Chemical, sous le nom commercial d’Avigan, dont il a été rapporté plus tard qu’il n’avait pas montré d’effet convaincant dans certains essais contre le coronavirus, ce qui a repoussé son approbation jusqu’à la fin des essais.

    En mars dernier, avec l’épidémie de COVID-19, la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis a décidé d’accorder au remdesivir le “statut de médicament orphelin”, qui assure normalement à l’entreprise productrice toute une série de droits exclusifs en plus des droits de propriété intellectuelle.
    Cette décision a été accueillie avec surprise et scepticisme dans les milieux spécialisés du monde entier, en raison de sa teneur et de son calendrier.

    Selon les définitions qu’en donnent tant l’OMS que le droit étasunien, les maladies orphelines sont celles qui affectent un petit nombre d’individus d’une manière qui n’incite pas à la mise au point de médicaments pour les traiter, ce qui justifie aussi le prix potentiellement élevé de leur traitement.

    La COVID-19, déclarée pandémie, est tout le contraire d’une maladie orpheline et la désignation comme “médicament orphelin” révèle l’intention de l’entreprise de maximaliser les ventes et les bénéfices du remdesivir une fois que la FDA l’a approuvé.
    Avec l’augmentation du nombre de cas diagnostiqués aux États-Unis d’Amérique, des pressions croissantes ont conduit Gilead Sciences à retirer sa désignation de médicament orphelin. Quelques semaines plus tard, le remdesivir a été approuvé par la FDA pour utilisation en cas d’urgence sur des patients atteints de COVID-19, à la suite de quoi l’entreprise a fait un don de 1,5 millions de traitements au gouvernement étasunien.

    A la mi-avril, les médias ont rapporté que le gouvernement égyptien avait convenu avec FUJIFILM Toyama Chemical d’utiliser le favipiravir (Avigan) pour le traitement de la COVID-19 en Égypte. Cet accord ne s’est jamais matérialisé, car quelques semaines plus tard le ministre de la santé a annoncé que l’Égypte participerait à l’essai clinique du remdesivir coordonné par l’OMS.

    Entretemps, l’entreprise égyptienne Eva Pharma a signé un accord de licence volontaire non-exclusif avec Gilead pour la fabrication de remdesivir destiné à être distribué dans 127 pays. Actuellement, l’approvisionnement en Égypte et limité à l’aide aux patients hospitalisés en quarantaine.
    Une préoccupation croissante a commencé à se manifester sur le plan mondial face à la précipitation avec laquelle on a compté sur le remdesivir avant que son efficacité soit démontrée, d’autant plus que les résultats des essais publiés montrent qu’il n’y a aucun bénéfice thérapeutique ayant la moindre signification statistique.

    Des demandes de brevet ont été déposées pour le remdesivir dans de nombreux pays et certaines ont déjà été accordées. Le bureau des brevets égyptien a rejeté la demande pour le remdesivir en 2017 pour des raisons techniques, mais la décision finale reste en suspens car le demandeur a fait appel.

    Gilead a récemment fixé le prix du traitement par le remdesivir (6 flacons) à 3 120 dollars étasuniens pour les privés et à 2 340 dollars pour les régimes d’assurance nationaux aux États-Unis d’Amérique. Le prix de ce médicament est exorbitant et ne peut être justifié ni par les coûts de recherche et de développement, car il ne s’agit pas d’un nouveau composé, qui n’a donc pas été breveté dans plusieurs pays.

    Par ailleurs, la recherche a démontré que le coût de production du remdesivir pourrait ne pas dépasser 5,58 dollars par traitement. D’ailleurs, l’entreprise pharmaceutique indienne Cipla a annoncé qu’elle produirait une version générique du remdesivir au prix d’environ 400 dollars étasuniens.

    A la lumière des taux élevés d’incidence et de mortalité de la COVID-19, ainsi que des pressions exercées sur les gouvernements pour qu’ils prennent des mesures destinées à protéger leurs peuples, on assiste à une compétition entre les entreprises pharmaceutiques pour préserver leurs parts d’un marché mondial lucratif.

    Cette compétition se manifeste par des tentatives d’enrôler de grandes quantités de patients dans des essais cliniques hâtivement menés pour faire la démonstration de résultats favorables, ou défavorables, à un médicament donné, pour signer des conventions d’achat préalables avec des gouvernements, comme c’est le cas actuellement entre Gilead et le gouvernement étasunien, et pour chercher à faire enregistrer les brevets dans le plus grand nombre de pays possible afin d’y obtenir des droits exclusifs, notamment la possibilité de vendre le médicament au prix le plus élevé possible.

    Au milieu de la crise actuelle, dont les répercussions économiques et sociales au niveau mondial sont sans précédent, il est préoccupant d’assister au retour du scénario H1N1. Les gouvernements se lancent une fois de plus dans des “achats de panique” et accumulent de manière irrationnelle des stocks de médicaments, dont aucun n’a fait la preuve de son efficacité contre la COVID-19. Ne tire-t-on vraiment aucun enseignement du passé récent ?
    #H5N1 #grippe_aviaire #H1N1 #vaccins #oseltamivir #argent #santé #gros_sous #capitalisme #big_pharma #laboratoires_pharmacetiques #Roche #Tamiflu #OMS #CDC #Egypte #experts #monopole #Gilead #Agence_européenne_des_médicaments #confinement #pandémies #pandémie #grippe #remdesivir #SARS-CoV-2 #covid-19 #coronavirus #favipiravir #FUJIFILM #Avigan #FDA #médicament_orphelin #maladie_orpheline #Eva_Pharma #thérapie #brevets #recherche #Cipla #marché #panique

  • VIH & #Banque_mondiale

    Les exigences du #FMI, imposant la restriction des dépenses publiques dans le but de relancer les économies, ont des conséquences graves sur la propagation des épidémies et l’accès aux traitements, tandis que le monopole des firmes pharmaceutiques est rarement remis en question, occasionnant des dépenses absurdes et parfaitement évitables. Malgré les échecs répétés des mesures d’austérité néolibérales et le succès du Portugal, qui a pris la voie opposée, les institutions internationales continuent d’imposer leur carcan, au mépris de la vie des personnes.


    https://vacarme.org/article3193.html

    #VIH #HIV #sida #santé #ViiV_Healthcare #big-pharma #industrie_pharmaceutique #licences_volontaires #médicaments #ajustements_structurels #Argentine #austérité #Roche #La_Roche #Grèce #Portugal #Pfizer #système_de_santé #brevets #médicaments_génériques #sofsbuvir #licence_d'office #évasion_fiscale #pandémie

    • Les effets des politiques d’austérité sur les dépenses et services publics de santé en Europe

      Cet article analyse l’évolution des politiques et des dépenses de santé depuis la grande récession (2008-2009) dans les pays européens. Dans un premier temps, l’article analyse les modalités des réformes et des mesures prises dans le secteur de la santé, en particulier depuis le tournant de l’austérité débuté en 2010, qu’il s’agisse de mesures visant à diminuer directement le volume et le prix des soins au moyen d’une limitation des emplois et des rémunérations dans le secteur de la santé ou à travers des réformes plus « structurelles ». La compression des dépenses publiques de santé a été d’autant plus forte que les mesures ont porté sur le facteur travail. Dans un second temps, l’article documente et analyse l’évolution des dépenses de santé. Si la croissance des dépenses (totales et publiques) de santé a été très peu altérée durant la récession de 2008-2009, une rupture est intervenue dans tous les pays après 2009 (l’Allemagne faisant exception). Certains pays « périphériques » ont connu une baisse des dépenses de santé sans équivalent dans l’histoire contemporaine. L’article conclut sur les limites des politiques d’austérité appliquées au champ de la santé, non pas tant au regard de leurs effets sur le soin ou la situation sanitaire, mais au regard même de leur objectif de réduction des déficits publics. Les travaux montrent que les restrictions opérées dans les dépenses publiques de santé, mais aussi celles en matière d’éducation et de protection sociale, ont des effets récessifs désastreux et s’avèrent inefficaces, ou moins efficaces que des réductions d’autres dépenses publiques.

      https://www.cairn.info/revue-de-l-ires-2017-1-page-17.htm

  • HCR - Les réfugiés syriens profondément affectés par le ralentissement économique dû à la pandémie de Covid-19
    https://www.unhcr.org/fr/news/briefing/2020/6/5ee8a72fa/refugies-syriens-profondement-affectes-ralentissement-economique-da-pandemie.

    des difficultés similaires. De nombreux réfugiés ont perdu ce qui était déjà de maigres revenus, les obligeant à réduire leurs besoins les plus élémentaires, y compris la nourriture et les médicaments. Les ménages réfugiés s’endettent encore davantage et ne peuvent plus payer leur loyer. Les risques graves en matière de protection augmentent, y compris les risques de travail des enfants, de violence sexiste, de mariage précoce et d’autres formes d’exploitation. Depuis le début de la pandémie, le HCR a fourni un soutien financier d’urgence en espèces à près de 200 000 réfugiés supplémentaires, et qui n’avaient pas reçu d’aide financière auparavant, en Égypte, en Irak, en Jordanie, au Liban et en Turquie, ainsi que d’autres efforts pour atténuer l’impact de la pandémie. Les cinq pays accueillent à eux seuls plus de 5,5 millions de Syriens, le plus important groupe de réfugiés au monde. L’agence tente d’aider au moins 100 000 réfugiés de plus en leur versant des paiements ponctuels. Cependant, de nombreux réfugiés ne savent toujours pas comment ils vont faire face. En Jordanie, par exemple, seulement 17 000 des 49 000 familles vulnérables nouvellement identifiées ont reçu une aide financière d’urgence, car le HCR n’a pas les fonds nécessaires pour étendre ses programmes. Nous travaillons avec des partenaires qui apportent un appui aux communautés locales accueillant des réfugiés. Neuf réfugiés syriens sur dix dans la région vivent dans des villes ou des villages et non dans des camps. La majorité d’entre eux vit dans des régions à faible revenu. Les communautés d’accueil ont fait preuve d’une grande solidarité, mais elles ont également subi des pertes de moyens d’existence du fait de la pandémie de Covid-19. Au-delà de l’urgence immédiate, le soutien continu aux systèmes nationaux est une priorité. Des mesures cruciales ont été prises pour veiller à ce que les réfugiés soient inclus dans les interventions nationales de santé publique des pays pour la prévention et la lutte contre le Covid-19, en plus de l’accès de longue date des réfugiés à d’autres services tels que l’éducation

    #Covid-19#migrant#migration#refugies#syrie#unhcr#sante#médicament#santepublique#prevention

  • En Algérie, la fermeture des frontières empêche la revente des produits de marques ramenés de Paris ou Dubaï
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/06/04/coronavirus-en-algerie-le-commerce-du-cabas-mis-a-mal-par-la-fermeture-des-f

    Habituellement, Ahmed se rend en Europe chaque week-end. Pour ce salarié de banque, le « cabas » est un complément de revenu. Sur ses différents comptes Facebook, il propose des soins pour les cheveux, des parfums, des compléments alimentaires, de l’homéopathie pour les enfants… « Depuis le début de l’épidémie, j’ai perdu douze billets d’avion. On est vraiment bloqués », explique-t-il, déplorant un réel « manque à gagner ». Cette activité, dans laquelle il s’est lancé en 2018, lui permettait également de rapporter des médicaments pour sa grand-mère, atteinte de la maladie de Parkinson. A ses yeux, « la conséquence la plus terrible de l’arrêt des vols, c’est que les gens ne trouvent plus les médicaments dont ils ont besoin ». Ainsi, Farida a dû trouver tant bien que mal des équivalents aux huit pilules quotidiennes que prend sa mère.

    #Covid-19#migrant#migration#circulations#médicaments#commerce#santé#Algérie#France#Dubai#fermeture-frontières

  • HCR - Le HCR vient en aide à des milliers de personnes en Libye, malgré les difficultés accrues dues à la poursuite du conflit et à la pandémie de Covid-19
    https://www.unhcr.org/fr/news/briefing/2020/5/5ebe6f14a/hcr-vient-aide-milliers-personnes-libye-malgre-difficultes-accrues-dues.html

    Les réfugiés ont déclaré au personnel du HCR qu’ils ont désespérément besoin d’aide. Beaucoup subvenaient auparavant à leurs besoins en tant que journaliers, mais ces emplois ont dû être interrompus en raison du couvre-feu et d’autres restrictions liées à la pandémie de Covid-19. Selon une enquête menée par le Centre des migrations mixtes, environ 75% des réfugiés et des migrants ont perdu leur emploi en mars et avril. Avant le Ramadan, certains ont déclaré qu’ils ne pouvaient se permettre qu’un seul repas par jour. D’autres recevaient auparavant une aide supplémentaire de la part de leurs proches par le biais de transferts internationaux de devises, mais ils se trouvent désormais dans une situation difficile car cette aide avait cessé ces dernières semaines. Certains sont menacés d’expulsion par leur propriétaire, car ils ont pris du retard dans le paiement de leur loyer.

    Les prix des denrées alimentaires ont flambé dans la plupart des villes en Libye, peu après la mise en œuvre des mesures de prévention et de lutte contre le Covid-19. (...) Les prix des articles d’hygiène ont augmenté de près de 60% au moins, et le prix des gants et des masques faciaux de protection ont plus que triplé.Pendant ce temps, le HCR continue de fournir un appui aux autorités libyennes et aux Libyens déplacés, alors que sévit la pandémie de Covid-19. Le conflit en cours et la poursuite des bombardements, malgré les appels à une pause humanitaire, affectent gravement le système de santé et les services médicaux déjà précaires, et qui disposent de ressources limitées et sont confrontés à des pénuries d’équipements et de médicaments de base.De nombreux hôpitaux ou établissements de santé, situés dans des zones proches du conflit, ont également été endommagés ou fermés. Le HCR et ses partenaires continuent de mener des campagnes de sensibilisation sur la santé publique auprès des réfugiés, des demandeurs d’asile et les Libyens, par le biais d’affiches, de SMS et sur les médias sociaux, dans l’objectif d’atténuer les risques d’exposition au Covid-19.

    #covid-19#migrant#migration#personnes-déplacées#Libye#hygiène#accès-santé#ressources#pénurie#système-santé#médicaments

  • Face aux multinationales pharmaceutiques, « il faut arrêter le robinet à monopole » - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie/020520/face-aux-multinationales-pharmaceutiques-il-faut-arreter-le-robinet-monopo

    Alors que l’accessibilité des futurs vaccins et traitements se pose déjà, Gaëlle Krikorian, de Médecins sans frontières, estime qu’« on donne des brevets avec une extrême facilité dans la plupart des pays » alors qu’il faudrait « partager la connaissance, le savoir, les données ».

    Chercheuse en sciences sociales, spécialiste des brevets et accords commerciaux en matière de santé, Gaëlle Krikorian dirige la « campagne d’accès aux médicaments essentiels » de Médecins sans frontières (MSF) depuis 2018, après avoir également milité chez Act Up. Entretien.

    Tout cela pose la question de la transparence mais aussi des conditions associées aux investissements publics dans la santé, pour être sûr que ça donne les outils de santé dont on a besoin, d’une part ; qu’ils soient accessibles à tous ceux qui en ont besoin, d’autre part.

    Ces dernières années, dans l’univers de l’accès aux outils de santé, beaucoup d’acteurs ont réalisé qu’il y a énormément de ressources publiques engagées sous diverses formes dans la recherche médicale. En fait, jusqu’à présent, c’était assez invisibilisé. On était bercé par la petite musique des multinationales, selon laquelle ils font l’essentiel du travail, investissent des sommes énormes, etc. On s’est rendu compte que ce n’est pas exactement ça. Et la crise du Covid-19 vient jeter une lumière un peu plus crue encore sur ces réalités.

    Si on veut promouvoir la recherche, il faut aussi tenir compte des PME et savoir comment on passe des contrats avec elles, comment on les soutient au moment où elles font de la recherche, pour payer les chercheurs, les machines, pour pouvoir mener des essais cliniques avec les structures publiques.

    Ça nous interroge sur la forme d’économie mise en place autour des produits de santé, contrôlée par une quinzaine de multinationales. C’est une économie de fonctionnement où il y a énormément de déperdition en termes de coûts pour le secteur public, pour la société, mais aussi pour les citoyens avec leurs impôts.

    C’est inquiétant ce qui est en train de se passer. Tout le monde dit : « On va se battre tous ensemble contre ce virus qui n’a pas de frontières »… Sauf qu’on n’a aucune garantie. Ce serait vraiment extrêmement naïf de s’imaginer que tout d’un coup l’industrie ne va pas chercher à s’enrichir. Ce sont des multinationales pharmaceutiques, pas des sociétés philanthropiques.

    C’est ce qui nous fait dire aujourd’hui dans le cadre du Covid, qu’on a besoin de partage, de la mise en commun de savoirs, mais aussi des technologies, pour ne pas répéter une production globalisée qui s’appuie sur un nombre très limité de sites. Au contraire, il faut permettre une production multicentrique sur les différents continents, réduire les effets de dépendance.

    La mise en commun permet d’avancer sur tous ces fronts. Sauf que ça ne va pas se faire volontairement. Aujourd’hui, compte tenu de la gravité de la situation, on rappelle que les États ont des outils : ne pas donner de monopoles, et donc permettre la mise en commun ; ou donner des monopoles mais utiliser des dispositifs comme les licences obligatoires, quitte à les accélérer. Il faut utiliser ces outils pour obliger le partage.

    Aujourd’hui, ces structures comme la GAVI ou la CEPI disent : « On est là, on sait faire, il suffit d’envoyer l’argent dans les bons canaux. » Il y a des gens de très bonne volonté, mais toujours avec cette logique de vouloir façonner la santé comme un marché au lieu de la penser autrement.

    Que les firmes soient motivées par le profit, ça ne me choque pas. Mais que les responsables des institutions publiques, des agences internationales soient complètement soumis à cette logique et continuent de prétendre qu’elle va permettre de nous en sortir collectivement, c’est une impasse.

    On veut que les contrats avec l’industrie soient transparents.

    #Santé_publique #Brevets #Médicaments #Big_Pharma #Gaelle_Krikorian

  • Médicaments : la planification sanitaire que nous voulons - Libération
    https://www.liberation.fr/debats/2020/04/20/medicaments-la-planification-sanitaire-que-nous-voulons_1785700

    La solution n’est donc plus du ressort des industriels, elle relève de la responsabilité du gouvernement. L’Observatoire et de nombreux experts internationnaux ont depuis des semaines fournie des données factuelles, précises, documentées pour construire ces chaines de production en France et en Europe, notamment à travers la mise en œuvre de la transparence sur tous les aspects de la chaine de production et de développement du médicament. Le gouvernement français s’est même engagé en ce sens en mai 2019 devant l’Organisation Mondiale de la santé. Cette transparence est essentielle pour guider les politiques publiques en santé et pour permettre une meilleure réactivité dans une crise mondiale. Pour construire une réponse internationale et dépasser les altermoiements quant aux tensions sur les approvisionnements. Et pour faire face à cette crise sanitaire majeure, elle nous aurait grandement aidés.

    #médicament #covid_19 #planification_sanitaire #observatoire_de_la_transparence_dans_les_politiques_du_médicament
    #jérôme_martin #pauline_londeix #hugues_charbonneau

  • Israel and Turkey, first signs of warming up? - Al Monitor

    The recent publication over Turkey selling to Israel medical equipment to fight the coronavirus could signal a small, yet significant warming up of relations.

    The recent publication over Turkey selling to Israel medical equipment to fight the coronavirus could signal a small, yet significant warming up of relations.
    #Covid19#Israel#Turquie#Santé#Politique#Aide#médicament#migrant#Diplomatie#réfugiés#migration

    https://www.al-monitor.com/pulse/originals/2020/04/israel-turkey-greece-cyprus-us-palestinians-coronavirus.html

  • Covid : pour des traitements accessibles à tous, casser les monopoles, socialiser la production
    https://www.bastamag.net/Covid-traitement-vaccin-industrie-pharmaceutique-monopole-brevets-chloroqu

    Les futurs traitements et vaccins contre le coronavirus seront-ils accessibles à tous, dans tous les pays ? Les entreprises pharmaceutiques qui les produiront, avec l’aide financières des pouvoirs publics, seront-elles prêtes à renoncer à leurs profits ? Des solutions existent pour mutualiser ces médicaments, pour le bien de toutes et tous. Sanofi, Novartis, Bayer… Ces #Multinationales pharmaceutiques promettent d’offrir des millions de doses de chloroquine, l’un des traitements à l’étude contre le (...) #Inventer

    / #Menaces_sur_la_santé_publique, #Solidarités_internationales, Multinationales, Santé , A la (...)

    #Santé_