• A #Menton, les arrivées de migrants augmentent, les #refoulements aussi

    De tous les points de passage entre la France et l’Italie, celui du pont Saint-Louis est sans doute le plus pittoresque. Imaginez une route suspendue à flanc de rocher entre Menton, ville des Alpes-Maritimes, et Grimaldi, la première localité transalpine : d’un côté la montagne, abrupte et creusée de grottes ; de l’autre, un paysage de cultures en terrasses dévalant jusqu’à la côte. Tout en bas, la Méditerranée luit d’un éclat mauve, en ce petit matin d’automne que le soleil n’éclaire pas encore.

    Un endroit sublime, donc, et pourtant parfaitement désespérant. Car ce bout de route, encadré par les postes de police des deux pays, accueille chaque jour un ballet tragique de migrants qui passent et repassent, long cortège de malheureux expulsés hors de l’Hexagone. Remis à la police italienne, ils tenteront leur chance une fois, dix fois, vingt fois, jusqu’à pouvoir franchir cette frontière sur laquelle la France a rétabli des contrôles depuis 2015. « A la fin, la plupart d’entre eux finissent par y arriver » , observe Loïc Le Dall, membre de l’antenne locale de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé). Y compris en empruntant les chemins les plus dangereux, comme le toit des trains ou ce sentier vertigineux que l’on appelle ici le « pas de la mort ». Mais dans l’intervalle, ils sont pris dans une étrange partie de ping-pong politico-policier, un casse-tête juridique et humanitaire.

    A quoi pense-t-elle, cette femme arrêtée le long du parapet, entre les deux postes-frontières ? Le visage appuyé contre le grillage, elle regarde la mer et au-delà, les lumières de Menton. Près d’elle, deux très jeunes enfants grelottent dans leurs vêtements de coton. Plus loin, son mari monte la pente en tirant une petite valise. Ils sont kurdes, fuyant la Turquie pour des raisons politiques, disent-ils.

    Grosses boîtes cubiques

    Dans leur groupe, formé au hasard des contacts avec un passeur, il y a une autre famille avec enfants et un adolescent accompagné de sa mère. Poyraz a 17 ans, des écouteurs autour du cou et il tient à préciser quelque chose en esquissant un signe de croix à toute vitesse, le dos tourné pour que ses compagnons ne le voient pas : « Nous sommes orthodoxes,confie-t-il. C’est très difficile pour nous, en Turquie. »

    A trois pas de là, deux Nigérians regardent en direction d’un panneau bleu planté sur le bas-côté : « Menton, perle de la France, est heureuse de vous accueillir. » Les bras ballants, ils ont l’air désemparés, perdus. Eux n’ont rien, ni valise, ni téléphone, ni écouteurs et pas l’ombre d’un sac, fût-il en papier – même dans la misère, il y a des hiérarchies. Surtout, comme beaucoup de migrants, ils disposent de très peu de mots pour expliquer leur situation. Le plus âgé réussit à formuler une question, en rassemblant quelques bribes d’anglais : « Pourquoi ne nous laissent-ils pas entrer ? »

    « Ils », ce sont les forces de l’ordre françaises qui viennent de les renvoyer vers l’Italie, après les avoir enfermés depuis la veille dans des « espaces de mise à l’abri » – en fait des préfabriqués agglutinés entre la route et la falaise, au droit des bâtiments de police. Les Français retiennent dans ces grosses boîtes cubiques ceux qu’ils n’ont pas eu le temps d’exfiltrer avant la nuit, les locaux de leurs homologues italiens, à 50 mètres de là, étant fermés entre 19 heures et 7 heures. Ces lieux sont « climatisés et pourvus de sanitaires, de la nourriture y est distribuée » , explique Emmanuelle Joubert, directrice départementale de la police aux frontières (PAF). Kadiatou, une Guinéenne de 22 ans rencontrée à Vintimille, y a déjà passé la nuit avec son fils Mohamed, 1 an et demi. « C’était très sale, nuance-t-elle, nous étions serrés les uns contre les autres et dormions par terre. »

    Le 29 septembre, plusieurs baraquements ont été ajoutés à ceux qui s’y trouvaient déjà, en prévision d’une recrudescence d’arrivées : sur les 10 000 migrants débarqués dans l’île italienne de Lampedusa, entre le 11 et le 13 septembre, certains devraient atteindre la frontière française ces jours-ci. Entre le 1er janvier et le 21 septembre, la PAF a procédé à 31 844 interpellations, dont 5 259 pour la seule période du 25 août au 21 septembre. D’après la préfecture, ce chiffre, déjà en hausse par rapport à 2022, devrait augmenter avec les afflux attendus en provenance de Lampedusa. Parmi les refoulés, beaucoup sont mineurs et un grand nombre vient d’Afrique subsaharienne.

    Mine résignée

    Au pont Saint-Louis, aucune demande d’asile n’est jamais enregistrée. Et même si la présence d’un membre de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Opfra) serait nécessaire, « il n’en vient jamais ici », assure un policier en faction.

    Pour faire face à cet afflux, il a fallu consolider les dispositifs, notamment depuis le mois de juillet, avec des drones, un avion de la brigade aéronautique de Marseille et des effectifs renforcés. Le 18 septembre, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé l’envoi de 132 personnes (policiers, gendarmes, militaires des sections « Sentinelle ») afin d’étoffer les « troupes » déjà présentes dans le département. Celles-ci comptent également dans leurs rangs des réservistes de la police qui se relaient pour assurer des contrôles à Menton-Garavan, la première gare en territoire français.

    Ces réservistes vont par petits groupes, équipés de gilets pare-balles. Tous les trains en provenance de Vintimille, ville italienne située à 9 kilomètres, sont inspectés. Et de presque tous, les forces de l’ordre font descendre des sans-papiers, repérables à leurs mains vides, à leurs vêtements informes, à leur mine résignée. De là, ils sont conduits au pont Saint-Louis, où la PAF leur remet un refus d’entrée. Sur ces deux pages remplies par la police figurent notamment le nom, la nationalité et une date de naissance.

    Parfois, ces indications sont fantaisistes (on les reconnaît parce qu’elles indiquent systématiquement comme date un 1er janvier) : la minorité revendiquée par les passagers, qui n’ont jamais de papiers d’identité sur eux et ne sont pas toujours capables de donner une date de naissance précise, n’a pas été considérée comme réelle par les policiers. Ceux-ci choisissent alors une année de naissance estimative, qui « déminorise » les interpellés. Interrogée à ce propos par Le Monde, Mme Joubert (PAF) répond qu’il s’agit « d’un processus technique interne, le plus précis possible au regard des éléments en notre possession ». Ces procédures, dit-elle, « ont été établies afin de ne pas faire échec aux droits » .

    Yacht show de Monaco

    Au chapitre « Vos droits », justement, le document propose deux options. Par la première, le requérant demande à bénéficier d’un délai de vingt-quatre heures. Par la seconde, il affirme : « Je veux repartir le plus rapidement possible. »Or, selon l’Anafé, la case correspondant à cette deuxième option est déjà précochée au moment où les expulsés reçoivent le papier. La décision est exécutoire immédiatement. Le 21 septembre, un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne a jugé illégale cette pratique de refoulement instantané aux frontières. Sans rien changer sur le terrain jusqu’ici.

    Il arrive aussi, en contravention totale avec le droit français, que des mineurs se voient infliger une obligation de quitter le territoire. Celles que montrent, par exemple, Saad, né au Darfour (Soudan) en juillet 2006 (la date figure sur le document établi par la police), et son copain guinéen, 17 ans également. Tous deux sont assis sur un banc, du côté français, la tête entre les mains, incapables de déchiffrer la sommation qui leur donne quarante-huit heures pour contester devant le tribunal administratif. « Une erreur », plaide la PAF. « Nous avons vu cela plusieurs fois », rétorque l’Anafé.

    En cas de doute sur l’âge, un fonctionnaire de l’Aide sociale à l’enfance, structure dépendant du département, doit donner son avis. Ceux qui sont reconnus comme mineurs non accompagnés (les enfants se déplaçant avec des adultes ne bénéficient d’aucune protection particulière) doivent être placés dans des foyers provisoires d’urgence, mais les lits manquent. Le 15 septembre, un hôtel Ibis Budget du centre de Menton a donc été réquisitionné, quoique encore jamais utilisé. Cette décision préfectorale a provoqué la colère d’Yves Juhel, maire (divers droite) de la ville, où les touristes se pressent encore à cette saison. L’édile s’est exprimé sur France 3, le 21 septembre, soit quatre jours avant l’inauguration du Monaco Yacht Show, grand raout dont les participants remplissent les chambres des environs. « Cela ne(…) se fera pas ! Sinon, je serai le premier à être devant l’hôtel pour éviter une telle occupation. (…) Vous n’allez pas faire sortir des gens qui ont payé leur chambre pour en mettre d’autres en situation irrégulière, non ? »

    Dans un courrier adressé à Emmanuel Macron, le 20 septembre, Charles-Ange Ginésy, président Les Républicains du département, réclamait, lui, une prise en charge, par l’Etat, de l’accueil et de l’orientation des mineurs non accompagnés, normalement assumée par sa collectivité. Celle-ci, écrit-il, « ne peut être la victime collatérale d’une frontière passoire qui embolise les personnels en charge de l’enfance » .

    Distribution de repas sur un terrain vague

    En attendant, les personnes refoulées de France s’entassent à Vintimille, avec les primo-arrivants. Ils sont des dizaines sous l’autopont longeant le fleuve Roya, leurs vêtements suspendus aux grillages. « Pour nous laver, il y a la rivière et pour dormir, c’est par terre », racontent, l’air crâne, trois garçons soudanais, arrivés à Lampedusa par la Libye, puis la Tunisie. Ils se disent mineurs mais n’ont pas voulu le déclarer à leur arrivée en Sicile, afin de ne pas être enfermés dans des foyers spécialisés.

    Chaque soir, tout près de là, des associations humanitaires et la paroisse San Rocco de Vallecrosia distribuent, à tour de rôle, des repas sur un terrain vague, dans ce quartier de Roverino où une majorité d’habitants a voté pour la Ligue (extrême droite) aux dernières élections municipales. Mardi 3 octobre, ils étaient 200 à faire la queue, soit moitié moins que les 430 du mardi précédent. Cette baisse correspond-elle à un ralentissement des arrivées du sud du pays ? Ou bien au fait que plus de gens sont parvenus à passer entre les mailles du filet ? Nul ne le sait.

    « Nous sommes habitués à ces cycles, sans pouvoir les analyser » , constate Alessandra Zunino, « référente » chez Caritas. L’organisation catholique distribue des repas le matin et à midi, mais surtout, elle accueille des femmes et des enfants dans une annexe, le long de la voie ferrée. « Nous nous substituons aux services qui manquent, explique Maurizio Marmo, l’un des responsables locaux. A Vintimille, depuis trois ans, plus aucune structure institutionnelle ne fonctionne pour les migrants. Maintenant, tout de même, nous recevons un appui du ministère de l’intérieur pour les vingt places d’hébergement réservées aux femmes et aux enfants. »

    Dans le bâtiment principal, une maison crème aux volets bruns, on se contente de « tendre la main à ceux qui en ont besoin » , poursuit Alessandra Zunino. Quant aux parcours individuels, ils demeurent le plus souvent mystérieux. Même pour le docteur Pedro Casarin, qui soigne des blessures, des bronchites et annonce au moins une grossesse par semaine, sous une tente de Médecins sans frontières. Les gens vont et viennent, restent une heure ou un jour, puis ils repartent aussi soudainement qu’ils étaient arrivés, pour ne jamais revenir. Ils ont bravé le désert, les bandits, les violeurs, la Méditerranée : ce n’est pas une frontière de plus qui va les arrêter.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/10/07/a-menton-les-arrivees-de-migrants-augmentent-les-refoulements-aussi_6193012_

    #frontière_sud-alpine #asile #migrations #réfugiés #Alpes_Maritimes #frontières #Alpes #Vintimille #France #Italie #enfermement #interpellations #statistiques #chiffres #militarisation_des_frontières #contrôles_frontaliers #Menton-Garavan #forces_de_l'ordre #réservistes #trains #refus_d'entrée #refoulements_instantanés #OQTF #mineurs #MNA #mineurs_non_accompagnés #hôtel #Ibis #hôtel_Ibis #encampement

  • Une personne retrouvée morte sur le toit d’un train à #Menton, le trafic ferroviaire interrompu

    Une personne a été retrouvée morte sur le toit d’un train ce lundi soir, au niveau de la gare de #Menton-Garavan. Le trafic ferroviaire a été interrompu et ne devrait pas reprendre avant 21h.

    Ce sont les pompiers qui ont fait la macabre découverte après avoir été alertés pour "un incendie au niveau du pantographe (appareil monté sur le toit d’un train pour capter l’énergie électrique, ndlr) de la rame causée par la présence d’une personne sur le toit du train", sur la ligne Nice-Vintimille, en gare de Menton-Garavan.

    La personne était morte au moment de l’intervention des pompiers, qui a permis d’éteindre les flammes.

    Le trafic ferroviaire a été interrompu sur les TER entre Monaco et Vintimille dans les deux sens de circulation afin de permettre l’intervention des secours sur place.

    https://www.nicematin.com/faits-divers/une-personne-retrouvee-morte-sur-le-toit-dun-train-a-menton-le-trafic-fer

    #Italie #France #frontière_sud-alpine #migrations #réfugiés #frontières #décès #mort #mourir_aux_frontières #Vintimille
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    ajouté au fil de discussion sur les morts à la frontière de Vintimille :
    https://seenthis.net/messages/784767

    lui-même ajouté à la métaliste sur les morts aux frontières alpines :
    https://seenthis.net/messages/758646

    • 09.01.2023, Un migrant meurt électrocuté sur le toit d’un train à Menton

      Un homme est mort électrocuté sur le toit d’un train, lundi. Un incendie s’est déclaré sur le toit de la rame en raison de la présence de cette personne, « très vraisemblablement un migrant », selon la préfecture. Un tel drame s’est déjà produit plusieurs fois par le passé.

      « La fermeture des frontières a encore tué à Menton », a déclaré l’association Roya-citoyenne, lundi 9 janvier, interrogée par le journal Nice matin. Ce jour-là, un homme d’une trentaine d’années, « très vraisemblablement migrant », selon la préfecture, est mort électrocuté sur le toit d’un train dans cette gare du sud-est de la France. La victime n’a pas encore été identifiée.

      Une enquête a été ouverte et confiée à la sûreté départementale, a indiqué à Nice matin la Direction départementale de la sécurité publique (DDSP).

      Les pompiers sont intervenus dans la soirée après que l’alerte a été donnée « aux alentours de 18h10 », rapporte le site d’information 20 minutes. La circulation a été interrompue et les secouristes « ont découvert un début d’incendie au niveau du pantographe de la rame, [qui établit le contact électrique avec la caténaire], suite à la présence de [cette] personne », a précisé le Service départemental d’incendie et de secours (Sdis) des Alpes-Maritimes, interrogé par 20 minutes.

      « Sur le toit d’un train, un homme qui cherchait seulement une vie meilleure a été atrocement électrocuté, et porte ainsi à plus de 50 les décès à cette frontière meurtrière », a déclaré Roya citoyenne.
      Au moins trois morts

      Le TER, parti de Vintimille, en Italie, devait relier la ville de Nice. Des drames similaires à celui de lundi ont déjà eu lieu sur cet itinéraire fréquenté par les exilés qui cherchent à entrer en France. Au moins trois migrants sont déjà morts électrocutés en tentant de franchir la frontière franco-italienne.

      En septembre 2021, un jeune homme originaire du Bangladesh est mort électrocuté près de Vintimille. En novembre 2021, un Ivoirien de 31 ans avait été gravement brûlé par une électrocution alors qu’il se trouvait sur le toit d’un train en gare de Menton Garavan. Le jeune homme avait cherché à échapper à un contrôle policier. En février 2022 encore, le corps d’un jeune homme était retrouvé sur le toit d’un train reliant Vintimille à la France.

      Selon la presse italienne, il était caché dans le creux du pantographe – le dispositif qui abrite les fils à haute tension – situé sur le toit des wagons. Il serait entré en contact avec des câbles de 25 000 volts et serait mort sur le coup.

      https://www.infomigrants.net/fr/post/45999/un-migrant-meurt-electrocute-sur-le-toit-dun-train-a-menton

    • A #Menton, un migrant retrouvé mort sur le toit d’un train venant d’Italie

      Ce lundi 9 janvier en fin d’après-midi, les sapeurs-pompiers ont été appelés pour un début de feu dans sur le toit d’un wagon d’un train reliant Nice à Vintimille (Italie) en gare de #Menton-Garavan. Ils ont découvert le corps d’un homme sans vie. Il s’agit « très vraisemblablement d’un migrant ».

      Un homme d’une trentaine d’année a été retrouvé mort hier à l’arrivée des secours sur la rame d’un train régional reliant Vintimille en Italie à la France, dans la première gare, côté français, Menton-Garavan.

      Dans un premier temps, les services de secours avaient été alertés par un début de feu au niveau du pantographe de la rame du train, un système qui permet de fournir l’électricité au train.

      Le trafic a dû être interrompu le temps de l’intervention des secours.

      Selon l’Agence France Presse, il pourrait s’agir d’un migrant « africain » expliquant que de nombreux migrants tentent par tous les moyens de passer de l’Italie vers la France, citant la préfecture des Alpes-Maritimes.

      Une enquête de police a été ouverte pour déterminer les causes du drame. Elle est diligentée par la direction de la sécurité publique de Menton. En pareil cas, nous a-t-on confié, la priorité va consister à réaliser des empreintes pour tenter d’identifier la personne puis une autopsie.

      « C’est le premier mort de l’année dans de telles circonstances », reconnaît attristé Christian Papini de l’association Caritas à Vintimille.

      « Pour moi, c’est l’énergie du désespoir, ils essaient tous les jours de passer la frontière et de façon de plus en plus dangereuse. » (Christian Papini de l’association Caritas à Vintimille.)

      L’association qui longe la voie-ferrée à deux pas de la gare de Vintimille accueille les migrants. « Nous en avons peu en ce moment, 70 », explique Christian Papini, « mais cela varie de jours en jours, on s’attend à en voir arriver beaucoup dans les prochaines semaines ».
      33 personnes sont mortes en cherchant à passer

      Les morts sur les trains sont hélas devenus la norme. « Depuis 2015, 33 personnes sont mortes en cherchant à passer » martèle le responsable de Caritas. Alors ce matin, ici, chez les personnes migrantes de Vintimille, pas de réaction particulière.

      Le paradoxe, si l’on peut dire, c’est que beaucoup de ceux qui sont ici, pour ne pas dire tous, ont pris tous les risques depuis leur pays pour voyager et pour certains mourir de façon tragique.
      Voyage suicidaire

      Selon nos informations, si certains tentent d’eux-mêmes ce voyage suicidaire, en montant sur le toit du train, d’autres le font après avoir payé auprès de passeurs qui leur enseignent la technique.

      Le plus souvent pourtant, les passeurs organisent les « voyages » plutôt à bord de camions via l’autoroute A8, précise Mireille Damiano, avocate au barreau de Nice, qui vient en aide aux migrants. La juriste donne le décompte du nombre de morts depuis 2015 qui selon elle approche la cinquantaine. Des chiffres non-officiels.

      Comment en arrive-t-on à de tels drames ?

      Pour Me Mireille Damiano cela est en lien direct avec le dispositif pris en 2015 précisément. « Depuis cette date, pour des raisons justifiées par l’Etat, par la crainte du terrorisme, le contrôle systématique aux frontières a été rétabli. Je pense que c’est abusif », estime l’avocate.

      « 
      De plus, cela s’accompagne de dysfonctionnements majeurs, notamment vis-à-vis des migrants mineurs qui sont refoulés sans d’évaluation légale de leur demande d’asile. Tout cela a été dénoncé auprès du Conseil de l’Europe » (Maître Mireille Damiano.)

      La juriste qui précise que du 1er au 30 avril prochain aura lieu le Printemps de l’immigration.

      De son côté, la préfecture des Alpes-Maritimes nous a précisé que, sur les 18 000 personnes interpelées sur le vecteur ferroviaire en 2022, ont été dénombrés deux blessés graves suite à électrocution, mais aucun décès pour cette période-là.

      https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/alpes-maritimes/menton/a-menton-un-homme-retrouve-mort-sur-le-toit-d-un-train-

  • A #Menton, la police aux frontières sous #inspection_parlementaire

    Deux élus EELV, #Guillaume_Gontard, sénateur de l’Isère, et #Michèle_Rivasi, eurodéputée du Grand Sud-Est, ont rendu samedi une visite surprise à la PAF de Menton.

    Un orage arrose le poste-frontière de Menton (Alpes-Maritimes). Des éclairs zèbrent l’obscurité. Au petit matin, samedi 31 mars, la circulation entre l’Italie et la #France est anecdotique.
    Quand Guillaume Gontard, sénateur EELV de l’Isère, se présente à la police aux frontières pour une visite surprise, la torpeur cède à des longues tractations. Un policier ose, face à l’élu : « Vous voulez un pied dans la réalité ? Passez une semaine avec nous, voyez les horaires qu’on fait. C’est bien que vous soyez venus, parce que les gens qui nous dirigent ne savent pas la réalité du terrain. » L’agent, sorti fumer, ajoute : « C’est compliqué tout ça, pour les migrants, pour nous. Le plus dur, c’est les enfants, ça fait mal. Je suis là depuis un an, le pire que j’ai vu, c’est un gamin de 13 ans, on ne peut pas imaginer comment il a pu traverser la Méditerranée tout seul. Au début, quand on arrive, on est humains. Après, qu’est-ce que vous voulez qu’on fasse, ils sont des millions en Afrique, ils ne vont pas tous venir en France. »
    Quarante minutes plus tard, Guillaume Gontard peut enfin entrer. A condition de laisser dehors la presse, pourtant autorisée depuis 2015 à accompagner les parlementaires dans les centres de rétention et les zones d’attente. Contacté, le cabinet du ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, justifie ce refus au motif qu’il ne s’agit pas d’un lieu de privation de liberté. « C’est clairement un lieu de rétention qu’on ne nomme pas, jugera Gontard à l’issue de sa venue. Il y a un endroit fermé à clé, grillagé, avec des cadenas, où les conditions sont plus que spartiates, qui font même un peu peur. Il y a des gens qui sont retenus pour une nuit, voire plus. On a pu constater que des mineurs y étaient retenus depuis la veille et mélangés à des majeurs. C’est contraire à la loi. »

    A #Menton-Garavan, la PAF expéditive

    Au même moment, une autre observation s’est déroulée à quelques kilomètres, à la gare de Menton-Garavan, menée par Michèle Rivasi, eurodéputée EELV du Grand Sud-Est. Chaque jour, les #CRS inspectent les trains en provenance de #Vintimille (Italie), à la recherche de migrants. Ils sont amenés sur le champ au poste de la PAF. De là, les policiers les renvoient en nombre de l’autre côté de la frontière, qu’ils franchissent à pied. Un modus operandi expéditif que dénonce l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé). Avant d’être refoulée, la personne bénéficie en théorie d’une « procédure qui doit lui être notifiée dans une langue qu’elle comprend ou avec l’aide d’un interprète, avec un examen approfondi de sa situation et des documents qu’elle peut présenter. Ses droits, comme la possibilité de déposer une demande d’asile, doivent également lui être notifiés », explique Emilie Pesselier, chargée de mission à l’Anafé.

    Ce samedi, la première rotation des CRS en provenance de Garavan livre un homme. Sans qu’il ne sorte de la fourgonnette banalisée, il lui est remis un « #refus_d’entrée » signé de la PAF, puis il est congédié vers l’Italie. « On voit bien qu’aucun entretien n’a été fait », commente Emilie Pesselier. Comme les Italiens n’acceptent plus de « retours » entre 19h et 8h, trois conteneurs ont été annexés aux locaux de la police pour « accueillir » les migrants la nuit. Une « boîte de conserve », dit Guillaume Gontard, en forme de U et agencée autour d’une cour dont le ciel a été couvert d’un grillage : « Les policiers nous ont dit que plus de 100 personnes ont pu se trouver là en même temps, hommes et femmes mélangés », explique le sénateur, entre-temps rejoint par Michèle Rivasi. Leur visite va durer près de trois heures.

    Manipulation des dates

    « Dans ces conteneurs, tout est métallique, il n’y a pas de banc, les fenêtres sont fermées et il n’y a même plus l’air conditionné, décrit la députée européenne. On voit bien que les gens amenés ici ne sont pas libres. » Parmi la vingtaine de personnes qui ont dormi au poste, un Malien explique avoir réclamé de l’eau, sans succès. Pas de couverture fournie, ni en-cas, ni informations légales : « On ne nous dit même pas pour la demande d’asile, c’est comme si on n’était jamais entrés. On prend juste notre nom et notre date de naissance. Mais je n’ai pas récupéré le bon papier, ce n’est pas mon nom et la bonne date, je l’ai signalé au policier, il m’a dit que c’est pas son problème. Ils donnent le même formulaire à tout le monde, où c’est coché que tu veux retourner en Italie. »

    Les #mineurs, qui ne devraient pas être expulsés mais placés sous une protection spécifique, font aussi les frais de ce renvoi express et d’une privation de liberté pendant la nuit. « Dans le poste, il y avait deux garçons qui paraissaient très jeunes, les policiers nous ont dit qu’ils étaient là depuis le matin. Les jeunes nous ont dit qu’ils étaient là depuis la veille. Les policiers ont fini par reconnaître qu’ils avaient passés la nuit là », raconte Michèle Rivasi. Elle poursuit : « On a eu accès à un fichier sur lequel, pour certains jeunes, les dates de naissance indiquées étaient les mêmes, le 1er janvier 2000. On a demandé pourquoi, les policiers nous ont dit que les jeunes ne connaissaient pas leur date de naissance. Deux d’entre eux nous ont dit qu’ils étaient de 2002. Les policiers ont répondu qu’ils s’étaient trompés. » Sous les yeux des parlementaires, les #années_de_naissance finissent par être modifiées. « On a assisté en direct à une manipulation des dates ! », s’insurge Rivasi.

    « Le mal-être est palpable »

    Mais la députée préfère fustiger « les défaillances du système » plutôt que de charger les agents de la PAF. « Ils travaillent avec des moyens a minima, souligne-t-elle. Les policiers nous ont montré où ils se changent, où ils peuvent se doucher, c’est en mauvais état. Et ils ont surtout l’impression que ce qu’il font ne sert à rien. Ils font repartir des gens qu’ils retrouvent quelques jours plus tard au même endroit, ça n’a pas de fin, c’est inutile, le mal-être est palpable. » Guillaume Gontard abonde : « Je suis choqué par cette #absurdité totale. Les personnes qui entrent en France sont "libres" de retourner en Italie, mais on les enferme pour être sûrs qu’ils y retournent bien. Quel délit ont-ils commis ? Ils ont juste eu le tort de frapper à la porte de notre pays. »


    http://www.liberation.fr/france/2018/04/01/a-menton-la-police-aux-frontieres-sous-inspection-parlementaire_1640389
    #frontières #asile #migrations #réfugiés #PAF #police_aux_frontières #rétention
    cc @isskein

    • A la frontière franco-italienne, l’accueil des migrants est « indigne » et « irrespectueuse de leurs droits »

      Locaux insalubres, non-respect du droit d’asile, violences… Un rapport du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) dresse un portrait au vitriol de la police aux frontières (PAF) à Menton, à la frontière italienne.

      La prise en charge des migrants à la frontière franco-italienne par la police de Menton est lourdement épinglée dans un rapport du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL).

      D’après le document, les migrants sont non seulement mal-informés sur leurs droits mais ils en sont surtout privés : ils restent en général moins d’une heure dans les locaux de la police aux frontières avant d’être renvoyés en Italie. Ils n’ont pas accès à une consultation médicale, à l’assistance d’un avocat, à un interprète professionnel. Certains d’entre eux ont également été soumis à des actes de violence.

      InfoMigrants a dressé la liste des principaux points sensibles du rapport.

      Acte de violence :

      Lors de leur enquête réalisée en septembre 2017, les contrôleurs du CGLPL ont assisté, à une scène de violence à l’encontre d’un jeune migrant, qui se disait mineur. Ce dernier a été interpellé à la gare de Menton-Garavan, le 5 septembre 2017 vers 20h, puis conduit dans les locaux de la PAF. Le fonctionnaire de police est accusé de l’avoir giflé.

      Extrait du rapport : « Le chef de poste s’est alors tourné vers le jeune en l’interpellant : ‘Tu es mineur, toi ?’ et l’a aussitôt giflé. L’étranger s’est alors laissé glisser au sol en vue de se protéger, tout en se tenant la joue et en pleurant, manifestement choqué et effrayé par le comportement du policier. »

      Droit d’asile non respecté :

      Les personnes en situation irrégulière ont le droit de demander l’asile aux frontières. Elles n’en sont pas informées.

      Extrait du rapport : « Les personnes interpellées à la frontière franco-italienne sont en droit de solliciter spontanément l’entrée sur le territoire au titre de l’asile. Les services de la police aux frontières ont indiqué aux contrôleurs que personne n’en faisait cependant la demande. »

      Les personnes qui demandent l’asile en arrivant sur le territoire français n’ont pas le droit d’être renvoyés avant examen de leur dossier.

      Pire, les personnes souhaitant demander l’asile ne sont pas entendues. Elles n’ont pas la possibilité d’entamer la procédure.

      Extrait du rapport : « Ces demandes ne sont ni traitées ni enregistrées au motif qu’elles sont irrecevables selon les services de la police aux frontières. »

      Formulaires pré-remplis :

      Les migrants interpellés à la frontière doivent remplir un formulaire de trois pages sur le « refus d’entrée » sur le sol français. Ils y donnent leur identité et y expliquent leur situation administrative. Plusieurs cases sont à cocher, notamment sur ce qu’un migrant envisage de faire : « avertir la personne chez qui vous souhaitez vous rendre », « disposer d’un jour franc (c’est-à-dire du droit à ne pas être renvoyé avant l’expiration d’un délai de 24h) », ou encore « repartir tout de suite »…

      Extrait du rapport : « Dans la quasi-totalité des procédures consultées, la case ’je veux repartir le plus vite possible’ était pré cochée informatiquement avant impression du formulaire. Les quelques formulaires pour lesquels ce n’était pas le cas étaient simplement non renseignés. »

      À aucun moment, un interprète n’est proposé pour aider les personnes en situation irrégulière à comprendre les documents des autorités ou à leur expliquer les démarches.

      Extrait du rapport : « Il n’est jamais recouru à un interprétariat professionnel. Quand les personnes étrangères ne sont pas francophones, les agents se débrouillent pour communiquer en anglais (voire en italien ou en arabe selon les informations recueillies). »

      Mineurs isolés étrangers :

      Selon le rapport, les mineurs sont traités comme des adultes. Ils ne sont pas signalés à l’Aide sociale à l’enfance. Ils ne bénéficient d’aucune protection particulière – contrairement à ce que prévoit la loi.

      Extrait du rapport : « La prise en charge des mineurs isolés qui représentent près d’un tiers des personnes non admises à la frontière franco-italienne dans les Alpes-Maritimes, n’est pas […] différenciée des adultes.

      Les contrôleurs ont relevé que des mineurs isolés interpellés sur le territoire ont été réadmis vers l’Italie alors qu’ils ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une mesure d’éloignement. »

      Expulsion :

      En moyenne, les migrants interpellés à la frontière passent moins de 5 heures dans les locaux de la PAF. Ils sont ensuite exhortés à retourner en Italie, par leurs propres moyens, à pieds, munis de leur décision de refus d’entrée en France.

      Extrait du rapport : « En journée, les personnes non admises ne passent en général que quelques minutes au poste de police, installées sur une rangée de quatre sièges située dans le hall d’entrée. Leur identité, leur âge et leur nationalité leur est de nouveau demandée et les échanges s’en tiennent à cela. »

      Pour le CGLPL, les forces de police sont sans doute soumises à la pression de leur hiérarchie.

      Extrait du rapport : « L’objectif de réacheminement des migrants interpellés à la frontière franco-italienne par la police aux frontières s’apparente à une obligation de résultat : garantir l’étanchéité de la frontière dans le déni des règles de droit. Dans ce contexte de pression politique, les fonctionnaires de police accomplissent leurs missions ’à la chaîne’ ».

      Détention dans les locaux de la PAF dans des conditions difficiles :

      Il apparaît dans le rapport que les locaux de la PAF sont exigus, qu’ils ne sont pas adaptés pour accueillir les personnes en situation irrégulière. Il n’y a pas de douches, pas de chauffage, pas de lits ou de matelas, pas de repas non plus. L’électricité fonctionne partiellement.

      Extrait du rapport : « De nuit, les étrangers sont maintenus dans des locaux indignes. Les mineurs et les femmes restent jusqu’au matin dans une ’salle d’attente’ pouvant accueillir jusqu’à trente personnes, dépourvue de tout confort minimal (quelques bancs ne permettant pas de s’allonger, un WC à la turque sans verrou).

      La nuit, les mineurs placés dans cette salle se plaignaient d’avoir froid : ils ne disposaient pas de couvertures et n’avaient pas accès à leurs effets personnels ; ils portaient les mêmes vêtements qu’au moment de leur interpellation, souvent en tenue d’été.

      Les points d’eau installés dans la salle d’attente et dans la cour ne permettent pas d’assurer l’hygiène corporelle des personnes en attente. Aucun équipement (matelas, couverture…) n’est fourni pour dormir ou se protéger de la fraîcheur de la nuit. De plus, les étrangers qui passent plusieurs heures de jour comme de nuit dans ces locaux ne bénéficient d’aucun repas. Seuls quelques madeleines et des bouteilles d’eau sont distribuées à la demande, voire selon la bonne volonté des fonctionnaires de police. »

      http://www.infomigrants.net/fr/post/9695/a-la-frontiere-franco-italienne-l-accueil-des-migrants-est-indigne-et-

      Pour télécharger le #rapport :
      Rapport de visite des locaux de la #police_aux_frontières de #Menton
      http://www.cglpl.fr/wp-content/uploads/2018/06/Rapport-de-la-deuxi%C3%A8me-visite-des-services-de-la-police-aux-fronti%C3%A8r
      #PAF