Pour l’#agriculture_palestinienne, ce qui se passe depuis le 7 octobre est « un #désastre »
À #Gaza sous les bombes comme en #Cisjordanie occupée, l’#eau est devenue un enjeu crucial, et le conflit met en évidence une #injustice majeure dans l’accès à cette ressource vitale. Entretien avec l’hydrologue Julie Trottier, chercheuse au CNRS.
Des cultures gâchées, une population gazaouie sans eau potable… Et en toile de fond de la guerre à Gaza, une extrême dépendance des territoires palestiniens à l’eau fournie par #Israël. L’inégal accès à la ressource hydrique au Proche-Orient est aussi une histoire d’emprise sur les #ressources_naturelles.
Entretien avec l’hydrologue Julie Trottier, chercheuse au CNRS, qui a fait sa thèse sur les enjeux politiques de l’eau dans les territoires palestiniens et a contribué à l’initiative de Genève, plan de paix alternatif pour le conflit israélo-palestinien signé en 2003, pour laquelle elle avait fait, avec son collègue David Brooks, une proposition de gestion de l’eau entre Israéliens et Palestiniens.
Mediapart : L’#accès_à_l’eau est-il un enjeu dans le conflit qui oppose Israël au Hamas depuis le 7 octobre ?
Julie Trottier : Oui, l’accès à l’eau est complètement entravé à Gaza aujourd’hui. En Cisjordanie, la problématique est différente, mais le secteur agricole y est important et se trouve mal en point.
Il faut savoir que l’eau utilisée en Israël vient principalement du #dessalement d’eau de mer. C’est la société israélienne #Mekorot qui l’achemine, et elle alimente en principe la bande de Gaza en #eau_potable à travers trois points d’accès. Mais depuis le 7 octobre, deux d’entre eux ont été fermés, il n’y a plus qu’un point de livraison, au sud de la frontière est, à #Bani_Suhaila.
Cependant, 90 % de l’eau consommée à Gaza était prélevée dans des #puits. Il y a des milliers de puits à Gaza, c’est une #eau_souterraine saumâtre et polluée, car elle est contaminée côté est par les composés chimiques issus des produits utilisés en agriculture, et infiltrée côté ouest par l’eau de mer.
Comme l’#électricité a été coupée, cette eau ne peut plus être pompée ni désalinisée. En coupant l’électricité, Israël a supprimé l’accès à l’eau à une population civile. C’est d’une #violence extrême. On empêche 2,3 millions de personnes de boire et de cuisiner normalement, et de se laver.
Les #stations_d’épuration ne fonctionnent plus non plus, et les #eaux_usées non traitées se répandent ; le risque d’épidémie est considérable.
On parle moins de l’accès aux ressources vitales en Cisjordanie… Pourtant la situation s’aggrave également dans ces territoires.
En effet. Le conflit a éclaté peu avant la saison de cueillette des #olives en Cisjordanie. Pour des raisons de sécurité, craignant de supposés mouvements de terroristes, de nombreux colons ont empêché des agriculteurs palestiniens d’aller récolter leurs fruits.
La majorité des villages palestiniens se trouvent non loin d’une colonie. En raison des blocages sur les routes, les temps de trajet sont devenus extrêmement longs. Mais si l’on ne circule plus c’est aussi parce que la #peur domine. Des colons sont équipés de fusils automatiques, des témoignages ont fait état de menaces et de destruction d’arbres, de pillages de récoltes.
Résultat : aujourd’hui, de nombreux agriculteurs palestiniens n’ont plus accès à leurs terres. Pour eux, c’est un désastre. Quand on ne peut pas aller sur sa terre, on ne peut plus récolter, on ne peut pas non plus faire fonctionner son système d’#irrigation.
L’accès à l’eau n’est malheureusement pas un problème nouveau pour la Palestine.
C’est vrai. En Cisjordanie, où l’eau utilisée en agriculture vient principalement des sources et des puits, des #colonies ont confisqué de nombreux accès depuis des années. Pour comprendre, il faut revenir un peu en arrière...
Avant la création d’Israël, sur ces terres, l’accès à chaque source, à chaque puits, reposait sur des règles héritées de l’histoire locale et du droit musulman. Il y avait des « #tours_d’eau » : on distribuait l’abondance en temps d’abondance, la pénurie en temps de pénurie, chaque famille avait un moment dans la journée pendant lequel elle pouvait se servir. Il y avait certes des inégalités, la famille descendant de celui qui avait aménagé le premier conduit d’eau avait en général plus de droits, mais ce système avait localement sa légitimité.
À l’issue de la guerre de 1948-1949, plus de 700 000 Palestiniens ont été expulsés de leurs terres. Celles et ceux qui sont arrivés à ce qui correspond aujourd’hui à la Cisjordanie n’avaient plus que le « #droit_de_la_soif » : ils pouvaient se servir en cruches d’eau, mais pas pour irriguer les champs. Les #droits_d’irrigation appartenaient aux familles palestiniennes qui étaient déjà là, et ce fut accepté comme tel. Plus tard, les autorités jordaniennes ont progressivement enregistré les différents droits d’accès à l’eau. Mais ce ne sera fait que pour la partie nord de la Cisjordanie.
À l’intérieur du nouvel État d’#Israël, en revanche, la population palestinienne partie, c’est l’État qui s’est mis à gérer l’ensemble de l’eau sur le territoire. Dans les années 1950 et 1960, il aménage la dérivation du #lac_de_Tibériade, ce qui contribuera à l’#assèchement de la #mer_Morte.
En 1967, après la guerre des Six Jours, l’État hébreu impose que tout nouveau forage de puits en Cisjordanie soit soumis à un permis accordé par l’administration israélienne. Les permis seront dès lors attribués au compte-gouttes.
Après la première Intifida, en 1987, les difficultés augmentent. Comme cela devient de plus en plus difficile pour la population palestinienne d’aller travailler en Israël, de nombreux travailleurs reviennent vers l’activité agricole, et les quotas associés aux puits ne correspondent plus à la demande.
Par la suite, les #accords_d’Oslo, en 1995, découpent la Cisjordanie, qui est un massif montagneux, en trois zones de ruissellement selon un partage quantitatif correspondant aux quantités prélevées en 1992 – lesquelles n’ont plus rien à voir avec aujourd’hui. La répartition est faite comme si l’eau ne coulait pas, comme si cette ressource était un simple gâteau à découper. 80 % des eaux souterraines sont alors attribuées aux Israéliens, et seulement 20 % aux Palestiniens.
L’accaparement des ressources s’est donc exacerbé à la faveur de la #colonisation. Au-delà de l’injustice causée aux populations paysannes, l’impact du changement climatique au Proche-Orient ne devrait-il pas imposer de fonctionner autrement, d’aller vers un meilleur partage de l’eau ?
Si, tout à fait. Avec le #changement_climatique, on va droit dans le mur dans cette région du monde où la pluviométrie va probablement continuer à baisser dans les prochaines années.
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’Israël a lancé le dessalement de l’eau de mer. Six stations de dessalement ont été construites. C’est le choix du #techno-solutionnisme, une perspective coûteuse en énergie. L’État hébreu a même créé une surcapacité de dessalement pour accompagner une politique démographique nataliste. Et pour rentabiliser, il cherche à vendre cette eau aux Palestiniens. De fait, l’Autorité palestinienne achète chaque année 59 % de l’eau distribuée par Mekorot. Elle a refusé toutefois une proposition d’exploitation d’une de ces usines de dessalement.
Il faut le souligner : il y a dans les territoires palestiniens une #dépendance complète à l’égard d’Israël pour la ressource en eau.
Quant à l’irrigation au goutte à goutte, telle qu’elle est pratiquée dans l’agriculture palestinienne, ce n’est pas non plus une solution d’avenir. Cela achemine toute l’eau vers les plantes cultivées, et transforme de ce fait le reste du sol en désert, alors qu’il faudrait un maximum de biodiversité sous nos pieds pour mieux entretenir la terre. Le secteur agricole est extrêmement consommateur d’eau : 70 à 80 % des #ressources_hydriques palestiniennes sont utilisées pour l’agriculture.
Tout cela ne date pas du 7 octobre. Mais les événements font qu’on va vers le contraire de ce que l’on devrait faire pour préserver les écosystèmes et l’accès aux ressources. L’offensive à Gaza, outre qu’elle empêche l’accès aux #terres_agricoles le long du mur, va laisser des traces de #pollution très graves dans le sol… En plus de la tragédie humaine, il y a là une #catastrophe_environnementale.
Cependant, c’est précisément la question de l’eau qui pourrait avoir un effet boomerang sur le pouvoir israélien et pousser à une sortie du conflit. Le reversement actuel des eaux usées, non traitées, dans la mer, va avoir un impact direct sur les plages israéliennes, car le courant marin va vers le nord. Cela ne pourra pas durer bien longtemps.
▻https://www.mediapart.fr/journal/international/040124/pour-l-agriculture-palestinienne-ce-qui-se-passe-depuis-le-7-octobre-est-u
]]>Mer Morte : Julie Trottier directrice de recherche au CNRS. Spécialiste de l’eau en Israël et en Palestine
mercredi 2 octobre 2019
▻https://www.franceinter.fr/emissions/la-terre-au-carre/la-terre-au-carre-02-octobre-2019
à partir de 45:00
▻http://rf.proxycast.org/1622088401668808704/10212-02.10.2019-ITEMA_22164720-3.mp3
L’invité découverte : Julie Trottier, chercheuse entre sciences naturelles et sciences politiques
Julie Trottier est directrice de recherche au CNRS. Spécialiste de l’eau en Israël et en Palestine, elle a reçu une formation en chimie, en Sciences politiques et en études islamiques.
La Mer Morte, qui n’est en réalité qu’un lac d’eau salée, à cheval sur Israël, la Cisjordanie en territoire palestinien et la Jordanie, perd chaque année un mètre, à cause de l’évaporation et surtout à cause des activités humaines. Elle fait l’objet d’un reportage photo dans le magazine 6 Mois de Marco Zorzanello. 6 Moisest en kiosque jusqu’en mars 2020.
]]>L’artiste palestinien Khalil Rabah explore les « géographies vaincues »
India Stoughton, The National, le 26 février 2018
▻http://www.agencemediapalestine.fr/blog/2018/03/05/lartiste-palestinien-khalil-rabah-explore-les-geographies-vainc
Quatre cartes, chacune un patchwork de broderies complexes et colorées, accueillent les visiteurs à la Galerie Sfeir-Semler de Beyrouth pendant les six semaines à venir. Étendues sur le sol, on trouve : une carte de la Mer morte, capturée dans de riches nuances de bleu et de pourpre ; une carte de la Bande de Gaza dans des tons vifs de rouge et d’orange ; et une carte de la Cisjordanie dans des tons de terre, verts e bruns. Une quatrième carte est accrochée à une barre de métal dépassant du mur de la galerie.
Intitulées « Hide Geographies », un jeu de mots [intraduisible sur les deux sens en anglais de « hide »] évoquant à la fois les espaces cachés et la peau des animaux traqués, elles représentent des « géographies vaincues » comme l’artiste palestinien Khalil Rabah l’exprime poétiquement. Les quatre cartes font partie des œuvres exposées dans les « Nouveaux sites des départements du musée », ou « quatre lieux pour visiter le ciel », la dernière exposition de Rabah. Chaque carte correspond à l’un des « départements » dans lesquels son travail est disposé.
Les œuvres font toutes partie d’un ambitieux projet sur lequel Rabah travaille depuis plus de vingt ans, le Musée palestinien d’histoire naturelle et de l’humanité [The Palestinian Museum of Natural History and Humankind].
Exposition de Khalil Rabah à la Galerie Sfeir-Semler, #Beyrouth, jusqu’au 7 avril, et beaucoup plus de photos là :
▻http://www.sfeir-semler.com/beirut/current-exhibition.html
L’apocalypse du #Jourdain : le récit de notre photoreporter (Frank Vogel) - Geo
▻https://www.youtube.com/watch?v=vOJHmvKS_Wk
0 vue à ce jour, mis en ligne le 7/07/16
J’imagine que la vidéo est plutôt vue sur le site du magazine…
▻http://www.geo.fr/photos/reportages-geo/photos-l-apocalypse-du-fleuve-jourdain-161669?45
The Dead Sea is Shrinking at Alarming Rate, a Record Low-Point for Earth
▻http://ecowatch.com/2016/06/23/dead-sea-shrinking
No the Dead Sea is not dying; it’s drying. Well, more like shrinking, by 3 feet each year.
The Dead Sea—the lowest point on Earth at roughly 1,300 feet below sea level—is known for its high salt and mineral content and allowing swimmers to float effortlessly on the surface. The amount of space available for easy floating is shrinking.
The good news is it will probably never dry up completely, the BBC said. As the water level drops, the sea’s density and saltiness rise. Eventually the rate of evaporation will reach a kind of equilibrium and it will stop shrinking.
Just because the Dead Sea is not going to disappear entirely, though, doesn’t mean its shrinking isn’t a concern.
Dead Sea drying: A new low-point for Earth
▻http://www.bbc.com/news/world-middle-east-36477284
The Dead Sea is so rich in salt and other minerals that humans float naturally on the surface
La mer Morte, panorama lunaire menacé par les cratères | France info
▻http://www.franceinfo.fr/actu/monde/article/la-mer-morte-panorama-lunaire-menace-par-les-crateres-672677
▻http://www.franceinfo.fr/sites/default/files/asset/images/2015/04/img_2612.jpeg
La #mer_Morte est en train de disparaitre, remplacée par des cratères. Il y en a de plus en plus. La baisse du niveau de la mer Morte laisse en effet apparaître des trous béants dans le sol. Très dangereux. Parfois de plusieurs dizaines de mètres de profondeur. Il existe des milliers de cratères tout autour de cette mer fermée. Un fléau menaçant le tourisme, l’agriculture et les habitants.
« Attention cratères à ciel ouvert », peut-on lire sur les panneaux bordant la mer Morte. A moins 500 mètres sous le niveau de la mer. A nos pieds, de gigantesques crevasses. Il en existe 5.000 de ce type tout autour de la Mer Morte. Un panorama lunaire.
Ces trous, ces dolines, comme on les appelle en géologie, sont le résultat direct de la baisse du niveau de la mer morte. Elle perd 1,20 mètre de profondeur chaque année. A cause du climat et des usines de minéraux.
]]>« La #mer_d_Aral, en Asie centrale, est sur le point de totalement disparaître. Et ce n’est pas la seule étendue d’eau en danger [...] Le #lac_Tchad, le #lac_d_Ourmia, la #mer_Morte ... »
▻http://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/en-images-quatre-gigantesques-plans-d-eau-menaces-de-disparition_708841
]]>Jordan’s desalination project advances | Environment | Jordan | Oxford Business Group
▻http://www.oxfordbusinessgroup.com/economic_updates/jordan%E2%80%99s-desalination-project-advances
Notons comment la crise syrienne et la pression créée par l’accueil des réfugiés syriens en Jordanie deviennent l’un des arguments légitimant un projet techniquement et financièrement controversé.
Advocates of the plan say they have nothing against conservation but that Jordan is in no position to either impose it on the Israelis – or, as the fourth-driest country on the plant, to wait any longer for more water. Years of talks with both Israel and the Palestinian National Authority have already brought lengthy delays, and the influx of refugees fleeing Syria’s civil war is putting added pressure on water resources, making the need for action more urgent.
]]>Red Sea water desalination project moving ahead | The Jordan Times
▻http://jordantimes.com/red-sea-water-desalination-project-moving-ahead
The Cabinet on Sunday announced it has decided to move ahead with the first phase of a project to desalinate Red Sea water and save the shrinking Dead Sea.
]]>Red Sea project to be scaled down | The Jordan Times
►http://jordantimes.com/red-sea-project-to-be-scaled-down
Under the first phase of the JRSP, the ministry was planning to convey water from the Red Sea through pipelines to a desalination facility in Aqaba. Water generated from the plant was going to be distributed to the port city and surrounding development projects.
En raison du contexte budgétaire jordanien, le mégaprojet de canal Mer Rouge-Mer Morte, destiné à limiter la baisse du niveau de cette dernière, est pour l’instant limité à un premier volet visant seulement à alimenter la ville d’Aqaba et ses mégaprojets touristiques.
#canal
#Mer_rouge
#Mer_morte
#Jordanie
Présentation du mégaprojet jordanien Mer Rouge-Mer Morte pour compenser la baisse de niveau de la mer Morte et alimenter le pays en eau potable
Developers to present plans for Jordan Red Sea Project next month | The Jordan Times
►http://jordantimes.com/developers-to-present-plans-for-jordan-red-sea-project-next-month
Under the first phase of the JRSP, water will be conveyed from the Red Sea through pipelines to a desalination facility that will be built in Aqaba. Water generated from the plant will be distributed to the port city and surrounding development projects.
The project entails extracting 2,150 million cubic metres (mcm) of water from the Red Sea every year; 930mcm will be desalinated and 1,220mcm will be channelled into the shrinking Dead Sea. In addition, 180 megawatts of electricity will be generated by projected hydropower stations.
A noter, une intéressante carte :
►http://static1.dot.jo/uploads/repository/5ab19158627f5773be6e6c9c00dcb061b536bd3c.jpg
#eau
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