• #Canicules_marines : pendant que l’océan se consume…

    Des « #mégafeux » aquatiques et invisibles sévissent notamment du sud de l’Islande jusqu’en Afrique en ce mois de juin. Ces phénomènes extrêmes, prévus dans tous les modèles qui avaient anticipé une hausse de la #température moyenne de l’océan, constituent une bombe à retardement du #réchauffement.

    L’océan brûle. Littéralement, ou presque. Depuis plusieurs semaines, une #canicule_marine inouïe frappe l’#Atlantique_nord, du sud de l’Islande jusqu’en Afrique. Au large de l’Irlande et de l’Ecosse, elle est catégorisée « au-delà de l’#extrême » (soit 5 sur une échelle de 5) par l’administration océanographique américaine (NOAA). Les cartes mondiales affichent aussi une effrayante couleur rouge sang, tendant vers le noir, dans le #Pacifique, le long de l’Amérique centrale et autour du Japon. Et les courbes s’affolent, atteignant de nouveaux sommets jour après jour et faisant craindre des ravages dus à des tempêtes tropicales précoces, telle Bret, qui a frôlé la Martinique ce vendredi.

    Mercredi, la #température des millions de km² de l’#océan_Atlantique nord s’est envolée à 23,3 °C (soit +1,32 °C d’#anomalie). Du jamais-vu pour un mois de juin, de très loin. L’ensemble de l’océan mondial, lui, a également enregistré un nouveau record ce jour-là, avec 20,9 °C de moyenne. Les #données de ce début d’année défient l’entendement : entre mars et mai, la température à la #surface_de_l’océan a atteint un record absolu en 174 ans de mesures, dépassant de 0,83 °C la moyenne du XXe siècle, d’après la NOAA.

    De quoi donner le tournis aux scientifiques. Cette #surchauffe générale émaillée de canicules localisées (là où la température de surface est plus élevée que 90 % du temps pendant plus de cinq jours) arrive « très tôt dans l’année, est très rapide et de très grande ampleur. Ce qui est surprenant, même si nous savons que la tendance est à la hausse de la température de l’océan », pointe Jean-Pierre Gattuso, chercheur du CNRS au laboratoire d’océanographie de Villefranche-sur-Mer (Alpes-Maritimes).

    « L’océan encaisse, encaisse, encaisse »

    Selon le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) sur les océans et la cryosphère paru en 2019, l’océan a absorbé plus de 90 % de la chaleur excédentaire émise par l’humanité depuis qu’elle embrase l’atmosphère en y envoyant des gaz à effet de serre (GES), essentiellement à cause de la combustion d’énergies fossiles. Car la capacité de l’eau à capter la chaleur est beaucoup plus forte que celle des continents. Et les climatologues estiment que, d’ici à 2100, l’océan absorbera deux à quatre fois plus de chaleur que pendant la période allant de 1970 à l’heure actuelle si le réchauffement planétaire est limité à 2°C (soit l’objectif affiché par l’accord de Paris de 2015), et jusqu’à cinq à sept fois plus si les émissions sont plus élevées.

    Résultat de cette surchauffe, la fréquence des #vagues_de_chaleur_marines a doublé depuis 1982 et leur intensité augmente. Dans le futur, prévient le Giec, elles seront vingt fois plus fréquentes avec un réchauffement de 2°C, et cinquante fois plus fréquentes si les émissions continuent d’augmenter fortement. Glaçant. « L’océan encaisse, encaisse, encaisse, et forcément les canicules marines s’intensifient, soupire Catherine Jeandel, chercheuse du CNRS au Laboratoire d’études en géophysique et océanographie spatiales. Ce qui est déprimant pour un chercheur, c’est de constater que tout ce qui est prévu dans les #modèles_climatiques depuis trente ans ou quarante ans se réalise. »

    Si les causes précises de la canicule marine inédite qui frappe l’Atlantique nord sont difficiles à établir, la raison de fond réside donc dans l’aggravation du #réchauffement_climatique dû aux activités humaines. Par ailleurs, « certaines conditions favorisent le développement de vagues de chaleur marines : une température de l’air élevée et l’absence de vent et de houle, qui empêche les eaux de surface de se mélanger avec les eaux profondes plus froides », indique Jean-Pierre Gattuso.

    La destruction de la faune et de la flore marines

    Le phénomène naturel #El_Niño, lui, qui se produit en moyenne tous les deux à sept ans pendant neuf à douze mois et fait son retour dans le Pacifique depuis ce printemps, « ne peut pas avoir de lien direct avec ce qui se passe dans l’Atlantique nord, mais en a sans doute avec ce qui se passe dans le Pacifique équatorial », estime l’océanographe et climatologue au CNRS Jean-Baptiste Sallée.

    Impossible de prédire pendant combien de temps vont se prolonger les canicules marines de ces derniers jours. Mais certaines « peuvent durer plusieurs mois », prévient le chercheur, pour qui « cette longévité est ce qui les rend particulièrement inquiétantes et dévastatrices pour les écosystèmes ». A ses yeux, la conséquence « la plus importante et alarmante » de ce que l’on pourrait qualifier d’#incendies_sous-marins est la destruction de la faune et de la flore marines. Ces « mégafeux » aquatiques et invisibles à nos yeux provoquent des mortalités de masse de certaines espèces. Surtout parmi celles qui ne peuvent pas se déplacer, comme les coraux, les herbiers marins ou les forêts de grandes algues brunes accrochées à des supports rocheux.

    En Méditerranée, après chaque canicule marine, notamment celles de l’été 2022 qui y ont été spectaculaires, « on constate des mortalités importantes d’une cinquantaine d’espèces (coraux, gorgones, algues, mollusques, oursins, posidonies…) tandis que celles qui le peuvent fuient », observe Jean-Pierre Gattuso. Par exemple, dans l’Atlantique, les poissons et cétacés se déplacent de la zone équatoriale vers le nord dans l’hémisphère nord et vers le sud dans l’hémisphère sud. « Ce qui est très injuste d’un point de vue éthique et géopolitique, car cette zone équatoriale est bordée essentiellement par des pays en voie de développement qui n’ont pas ou peu de responsabilité dans le changement climatique et qui vont être très affectés sur le plan de la sécurité alimentaire, alors que l’Islande et la Norvège voient arriver une abondance de poissons », poursuit le scientifique. Qui souligne aussi l’impact des vagues de chaleur marines sur le déplacement d’#espèces_invasives, telles que le poisson lapin ou le poisson lion arrivés en Méditerranée depuis la mer Rouge.

    Outre les ravages sur la #biodiversité, les canicules marines ont aussi des conséquences sur les #événements_extrêmes. « Une mer très chaude, c’est de l’eau qui s’évapore davantage, donc des tempêtes, ouragans et cyclones plus probables et plus forts », note ainsi Catherine Jeandel, pour qui la surchauffe de l’océan est « la bombe à retardement du réchauffement climatique ». Ainsi, ce vendredi, deux tempêtes tropicales assez imposantes pour avoir reçu des petits noms charmants, Bret et Cindy, étaient actives sur l’Atlantique, faisant trembler les îles antillaises. Soit une première pour un mois de juin depuis le début des observations en 1968.

    La surchauffe favorise la fonte de la glace de mer

    Par ailleurs, la surchauffe de l’océan, « par exemple dans l’Arctique, favorise la fonte de la glace de mer, ajoute Jean-Pierre Gattuso. Idem en Antarctique, où l’eau chaude érode la #calotte_polaire par en-dessous, ce qui peut complètement la déstabiliser. » Elle perturbe aussi les #courants_marins, car « si l’eau est chaude, elle devient moins dense et a donc moins tendance à plonger en profondeur, ce qui limite les échanges entre la surface et les eaux profondes et réduit l’alimentation en oxygène de ces dernières », ajoute Jean-Pierre Gattuso. Au fur et à mesure qu’on réchauffe l’océan, qui capte un quart du CO2 émis par l’homme, « il perd aussi en efficacité comme puits naturel de carbone », avertit Jean-Baptiste Sallée.

    Comment stopper cette machine infernale ? Comment éteindre les flammes sous la marmite d’eau bouillante qu’est devenue la planète ? Les chercheurs interrogés par Libération sont unanimes : la seule solution « est connue, il s’agit de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre ». Donc d’« arrêter de subventionner l’extraction des énergies fossiles, de faire des sports d’hiver dans les Emirats, et au contraire d’enfourcher son vélo au lieu de prendre sa voiture…, énonce Catherine Jeandel. Si vous lisez les rapports du Giec, les solutions, vous les avez. Il faut nous écouter, c’est tout. »

    L’océan a « accumulé la chaleur, elle est là, sa température est déjà déterminée. Même si on n’émet plus de gaz à effet de serre en 2050, on ne reviendra pas aux niveaux de températures océaniques de 1850, c’est impossible, expose Jean-Pierre Gattuso. Mais on peut arrêter son réchauffement : en respectant un scénario d’émissions compatible avec le seuil fixé par l’accord de Paris, l’augmentation de la température est totalement stoppée et reste stable, constante. C’est quand même un message positif. » A condition que les opinions publiques et les responsables politiques sortent enfin du #déni.

    https://www.liberation.fr/environnement/climat/pendant-que-locean-se-consume-20230623_M2PIQOI535BPRCGPITA6THMD44
    #mer #océan #canicule #climat #changement_climatique

    via @isskein

  • La sociologue et l’ourson

    De septembre 2012 à mai 2013 la #France s’enflamme autour du projet de loi sur le mariage pour tous. Tout le pays en parle. Quoi ? Juste pour quelques unions ? Non, non, non, le débat s’avère complexe et ouvre de nombreuses questions. Durant ces neuf mois Etienne Chaillou et Mathias Théry ont enregistré les conversations téléphoniques entre la sociologue de la #famille #Irène_Théry et son fils Mathias. De ces enregistrements ils ont fait leur cinéma : un cinéma d’ours en peluches, de jouets, de bouts de cartons... et d’humains. Portrait intime et feuilleton national, ce film nous fait redécouvrir ce que nous pensions tous connaître parfaitement : la Famille.

    https://lcp.fr/programmes/la-sociologue-et-l-ourson-60971

    #famille #mariage_pour_tous #mariage #homosexualité #homoparentalité #manif_pour_tous #code_civil #lien_de_couple #insémination_artificielle #PMA #fécondation_in_vitro #gestation_pour_autrui #adoption #modèles_familiaux #modèle_familial #mystère_de_paternité #présomption_de_paternité #lien_de_sang
    #documentaire #film #film_documentaire (en partie #film_d'animation)

  • Les modèles déboussolés pour prédire l’évolution de l’épidémie due au coronavirus, Nathaniel Herzberg, Chloé Hecketsweiler
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/26/les-modeles-deboussoles-pour-predire-l-evolution-de-l-epidemie-de-covid-19_6

    Les indicateurs ne montrent pas pour l’heure de deuxième vague épidémique, mais leur interprétation est complexe pour les spécialistes, qui doivent analyser une situation « dynamique ».
    Jour après jour, l’épidémie de Covid-19 perd du terrain mais est-elle pour autant derrière nous ? Voilà toute la question, alors que le gouvernement s’apprête à annoncer, dans les prochains jours, de nouveaux arbitrages pour le « chapitre II » du déconfinement, qui doit commencer le 2 juin. Pour y répondre, les épidémiologistes disposent de différents indicateurs mais, deux semaines seulement après la levée du confinement, leur interprétation est encore incertaine.



    INFOGRAPHIE LE MONDE

    Premier baromètre, le nombre quotidien d’admissions en réanimation. Il s’élevait à plus de 700 au pic de l’épidémie début avril ; il n’était plus que de 45 le 25 mai. Ce point bas était anticipé par les modèles, compte tenu du délai entre les nouvelles infections et l’arrivée en réanimation des cas les plus graves. « C’est le reflet des contaminations qui ont eu lieu à la toute fin du confinement ou au début du déconfinement. On ne voit pas de rebond mais cela ne signifie pas qu’il ne va rien se passer » , souligne Daniel Lévy-Bruhl, épidémiologiste à l’organisme de sécurité sanitaire Santé publique France (SPF). « Il faut faire comme si le risque était devant nous » , prévient-il.

    La moindre inflexion serait vite problématique là où l’épidémie a été la plus forte. En Ile-de-France, plus de 600 personnes sont toujours hospitalisées en réanimation, pour une capacité en routine de 1 200 lits. La marge de manœuvre est limitée alors que les hôpitaux ont commencé à réaffecter une partie des lits de réanimation aux services de chirurgie, dont l’activité avait été déprogrammée en urgence au mois de mars. « Les indicateurs sont au vert, mais les hôpitaux sont toujours sous tension , insiste Aurélien Rousseau, directeur de l’agence régionale (ARS) d’Ile-de-France. Nous sommes loin d’un retour à la normale. »

    Mise en place d’un second baromètre

    Pour être au plus près de la réalité, un second baromètre est en train d’être mis en place à partir des données de tests afin de comptabiliser tous les nouveaux cas. Depuis le 13 mai, toutes les personnes présentant des symptômes « évocateurs » de Covid-19 sont invitées à réaliser un test de dépistage RT-PCR, alors que ce test était jusque-là réservé aux patients graves. Les résultats sont enregistrés dans un fichier baptisé « SI-DEP » (système d’information de dépistage).

    L’analyse d’un second fichier, Contact Covid, doit permettre d’identifier et de suivre des chaînes de transmission jusqu’à ce qu’elles soient sous contrôle. Renseigné par les médecins et les enquêteurs de l’Assurance-maladie, il comprend l’identité des « patients zéro » − toutes les personnes dont le diagnostic a été confirmé par un test − ainsi que celle de leurs contacts familiaux, amicaux et professionnels.

    Ce traçage des contacts a pour objectif de repérer au plus vite les personnes contagieuses et de les isoler afin de ralentir la circulation du virus. « Si cette stratégie fonctionne, les nouveaux cas doivent faire parti des contacts connus » , souligne Daniel Lévy-Bruhl.

    Seule inconnue : la part des asymptomatiques, qui brouille le baromètre. « Jusqu’à ce qu’une personne dans la chaîne de transmission soit symptomatique, cette chaîne ne peut pas être identifiée, indique l’épidémiologiste. Même si seulement un cas sur trois est asymptomatique, cela complique le tracing. » Des foyers épidémiques, composés en majorité de personnes peu ou pas symptomatiques, pourraient ainsi passer sous le radar.

    Dispositif de dépistage renforcé

    Pour y remédier, dans plusieurs communes d’Ile-de-France, là où l’épidémie a frappé le plus durement − Clichy-sous-Bois, Saint-Denis, Gennevilliers, Sarcelles, Villiers-le-Bel et dans les 18e et 19e arrondissements de Paris −, un dispositif de dépistage renforcé a été mis en place.

    Toutes les personnes ayant des symptômes, même vagues, se voient proposer une consultation et un test. « Il y avait la crainte que cette approche soit stigmatisante, mais si on ne fait rien de différencié, on accepte les inégalités » , souligne Aurélien Rousseau, rappelant que la surmortalité liée au Covid-19 est très étroitement liée à des indicateurs socio-économiques défavorables.

    Les premiers résultats de ces campagnes ne seront publiés qu’en milieu de semaine, « mais la part des résultats positifs est au-dessus des 2 % à 3 % observés dans SI-DEP, indique Aurélien Rousseau. Même si la situation s’améliore, nous devons rester vigilants et nous assurer que nous ne ratons rien. »

    Dernier baromètre de l’épidémie, les modèles mathématiques utilisés pour évaluer la dynamique épidémique et l’efficacité des mesures de contrôle sont aussi dans un entre-deux. « Nous ne repartons pas de zéro mais les questions, comme les données dont nous disposons, changent » , estime Simon Cauchemez, modélisateur à l’Institut Pasteur et membre du conseil scientifique qui délivre ses expertises au gouvernement.

    Pour établir leur prévision, les épidémiologistes ont d’abord travaillé sur les données du Diamond Princess , ce navire de croisière immobilisé au large du Japon dont tous les passagers avaient été testés. Ils vont progressivement intégrer à leurs modèles d’autres jeux de données comme les résultats d’enquêtes de séroprévalence ou d’investigations épidémiologiques comme celle faite sur le Charles-de-Gaulle , où plus de 1 000 militaires sur les 1 700 que compte l’équipage ont été testés et étaient positifs. L’accès aux données de SI-DEP changera encore la donne, « en permettant d’obtenir un signal plus précoce s’il y a une reprise épidémique » , estime l’épidémiologiste, coauteur d’un article publié dans la revue Science, qui estime à 4,4 % la part de la population française déjà infectée.



    INFOGRAPHIE LE MONDE

    Changement de périmètre de la population testée

    L’une des difficultés réside dans le changement de périmètre de la population testée. « Ces données ne sont pas exhaustives car la population testée n’a cessé et ne cesse de changer à mesure que le dispositif monte en puissance. Impossible dans ces conditions de construire un modèle réactif » , souligne Samuel Alizon, modélisateur au CNRS.

    Passer d’un modèle s’appuyant sur des données « historiques » à un modèle « dynamique » est « une première » pour les épidémiologistes. « Habituellement, nos modèles servent à analyser la dynamique d’épidémies terminées. Là, c’est l’inverse, nous devons suivre une pandémie en cours. En sommes-nous capables et à quel horizon ? C’est une vraie question. Avec des enjeux sanitaires, bien sûr, mais aussi pour nous, chercheurs, des questions méthodologiques importantes » , explique l’épidémiologiste Pierre-Yves Boëlle, dont l’équipe collabore depuis le début de la pandémie avec l’Institut Pasteur pour offrir à Santé publique France un modèle optimal.

    Comment, par exemple, discerner un signal significatif d’un bruit (terme scientifique qui désigne une perturbation de l’information) ? « Il ne faut pas surréagir à un écart soudain, qui peut n’être que du bruit. Mais, à l’inverse, il faut détecter le plus vite possible un changement du signal qui marquerait l’inflexion de la courbe épidémique. »

    Avec toujours le même problème : la fiabilité des données. « En épidémiologie, les signaux ne sont pas toujours très bons. Tous les médecins ne fournissent pas les données demandées et elles ne sont pas toujours justes, mais au bout d’un certain temps, on sait les interpréter. Là, ce temps, nous ne l’avons pas, on doit construire les signaux tout en les interprétant. Et sans antériorité. »

    Autre question : saura t-on remonter les chaînes de contamination et tester les bonnes personnes ? « Nous poussions pour l’application StopCovid car elle offrait une information à la fois plus rapide et plus stable sur les contacts. Là, je ne sais pas ce que la solution retenue va donner , s’interroge Pierre-Yves Boëlle. Cela implique des moyens humains vraiment conséquents et des personnes formées. Mais on n’a pas beaucoup de temps pour tester cette organisation, voir si elle sait retrouver les cas, notamment asymptomatiques, être suffisamment réactive, et suffisamment fiable. Ce n’est plus du laboratoire, c’est de la vie réelle. »

    #épidémiologie #modèles_épidémiologiques #prévision

  • Quelle #résilience pour quels modèles de société ?

    Après l’épreuve du #confinement vient celle de l’incertitude de l’avenir. Le terme « résilience », cette capacité d’un individu, d’un groupe ou d’une communauté à rebondir après un traumatisme, apparaît alors dans les discours politiques en France et ailleurs. L’opinion découvre une réalité qui a été perçue pendant longtemps comme l’apanage des « autres » : les pauvres, les marginaux, les mal-lotis des sociétés occidentales et non occidentales.

    La résilience serait-elle davantage liée aux #classes_sociales ou à l’existence de moyens humains et matériels ? Dépendrait-elle des #modèles_de_société, selon qu’ils privilégient le culte de l’individu ou la culture groupale, communautaire face aux tragédies qui les frappent ?

    Cette épreuve inédite nous incite à trouver des #stratégies non seulement pour maintenir nos équilibres internes mais aussi pour garantir des relations internationales sereines dans la durée. Cet exercice est d’autant plus crucial que les différences de stratégies utilisées par des populations à travers le monde continuent d’alimenter la littérature scientifique sur la résilience.

    Si, en tant que concept, la résilience doit s’appuyer sur des critères scientifiques objectifs pour être mise en évidence, en tant que phénomène socioculturel, elle peut être l’objet d’idéologies ou de fantasmes, voire de politiques qui tentent de réguler ou de contrôler la perception des uns et des autres face à l’adversité.
    Le rôle du lien social et des ressources culturelles

    L’intérêt pour la résilience varie selon les contextes sociopolitiques et culturels. Elle est davantage évoquée et étudiée dans les sociétés où les conditions sanitaires et sociales sont difficiles, notamment pour les populations vivant dans des contextes de guerre, de crise politique, de catastrophes naturelles, de précarité économique, que dans celles habituées à un contexte sociopolitique et économique plutôt stable. Ainsi, plus les populations vivent dans des environnements sécurisés, moins la résilience est mise en avant pour penser leurs stratégies mobilisées en cas de grandes difficultés. Plus le contexte est précaire, plus la résilience est mise en relief.

    À titre d’exemples, suite au tremblement de terre du 12 janvier 2010 en Haïti, des études ont montré un fort taux de résilience – nettement supérieur comparativement à d’autres pays comme le Japon, la Chine.

    Au sein même de la société haïtienne, les populations les plus fragilisées comme les enfants des rues et les jeunes déscolarisés présentent une résilience plus importante que les autres selon de nombreuses recherches. Avec leur sens du collectif, ils ont été au secours de la population qui s’est retrouvée à la rue, les aidant par exemple à retrouver des survivants sous les décombres.

    Ce même constat est fait dans des contextes de guerre ou de crise politique comme au Liban, en Palestine, en Syrie, ou au Rwanda où la résilience se construit sur des systèmes spontanés de solidarité et d’identité collective.

    En France, dans un contexte marqué ces dernières années par les attentats et le malaise social (notamment avec les « gilets jaunes »), l’isolement, le manque de soutien familial et social renforcent les effets traumatiques et affectent les capacités de résilience bien qu’il s’agisse d’un environnement politique et social structuré et en mesure d’organiser des réponses politiques et sanitaires face à de tels évènements.
    Un besoin de réponse des États

    La crise sanitaire actuelle témoigne d’ailleurs de l’importance de la réponse des États, si attendue dans certaines sociétés occidentales comme la France, pour répondre à la panique générale et structurer un processus de résilience collective.

    Dans d’autres pays, la vie communautaire prend souvent le relais face à la faiblesse des structures de l’État. Nous assistons à des organisations spontanées, mobilisant, parfois paradoxalement, symboles et ressources culturels, religieux ou spirituels pour faire face à la pandémie.

    En Égypte, une chroniqueuse relate les regroupements au Caire, autour du Mausolée de Sayda Zainab, la petite fille du Prophète, par crainte du virus et pour chercher la bénédiction et la protection. En Tunisie, la presse montre des tenues de prières collectives dans certaines régions du pays, en face de mosquées qui ont pourtant fermé leurs portes suite aux mesures prises par l’État.

    En Haïti, la population, habituée aux catastrophes, s’en remet notamment à Dieu, et l’Église se prépare à affronter le Covid-19. En Inde, des enfants des rues sont persuadés que le coronavirus ne pourra même pas arriver jusqu’à eux.

    https://www.youtube.com/watch?v=0h79fVMrL1w&feature=emb_logo

    La force des rituels collectifs

    Ici et là les rituels collectifs, qui habituellement permettent de tenir ensemble, sont considérés comme protecteurs et sécurisants. Et dans les pays les plus précaires, où la crise sanitaire risque d’avoir les conséquences les plus graves, ce type d’organisation presse le pas et s’érige comme principal organisateur de la résilience collective là où la réponse de l’État tarde à venir, ou que celui-ci n’est pas perçu par les citoyens comme suffisamment crédible.

    Malgré ce qu’elles présentent comme stabilité des droits et des conditions de vie et de la démocratie, les sociétés « occidentales » sont particulièrement déstabilisées par des événements traumatiques de grande ampleur. Les effets de ces évènements sont souvent rapidement pris en charge, ou au moins pris en compte par le système politique, judiciaire, sanitaire, médiatique. Mais l’individu doté de droits, et de reconnaissance, est aussi livré à lui-même et à ses propres ressources pour s’en sortir.
    Interroger la nature de la résilience

    La résilience peut-elle alors être un signe de ce qui reste dans une société fondée sur le lien social ? Cette idée est confortée par les études qui montrent le lien étroit entre le soutien social, la cohésion sociale et la résilience notamment dans les sociétés où la culture du groupe est extrêmement forte.

    Dans un modèle écosystémique basé sur la communauté, la résilience est :

    « la capacité des individus à naviguer à travers leur trajectoire vers des ressources qui soutiennent leur bien-être ; la capacité des systèmes physiques et sociaux, et des individus à fournir des ressources, et la capacité des individus, de leurs familles et de leurs communautés à négocier des façons culturellement significatives de partager les ressources ».

    Cela pourrait-il expliquer pourquoi, dans les sociétés occidentales, l’on peine parfois à faire émerger les mécanismes de résilience « spontanée » ou « naturelle » ?
    La résilience à trouver dans d’autres espaces

    Cependant le risque est grand, dans cette réflexion, de considérer la résilience comme un phénomène exotique pour les autres, ou, dans les sociétés occidentales, uniquement comme un résultat à atteindre, une performance de plus.

    Or la résilience est peut-être ailleurs, dans d’autres espaces que ceux des résultats à atteindre. Elle peut être dans l’acceptation du #changement, la libération de la #créativité ou la #réinvention du #lien_social.

    À observer des élans de #solidarité et d’#entraide spontanées depuis les fenêtres, nous sommes tentés de penser que quelque chose dans le modèle de la société est en train de s’effondrer pour laisser émerger de nouvelles modalités, au plus près des fragilités et des ressources actuelles.

    « On se découvre soudain semblables, solidaires, tous dans le même bateau pour affronter le virus. C’était un peu moins le cas pour combattre la misère, on était moins unis pour accueillir l’Aquarius. »

    Le slam de Grand Corps Malade le 13 avril 2020 pointait aussi les frontières de ces nouvelles ressources solidaires.
    S’inspirer des uns et des autres

    La résilience est plus que jamais à considérer comme un processus complexe, long, discret et dynamique qui lie le sujet à son environnement.

    Elle ne peut se programmer de façon standardisée, mais s’appuie d’abord sur le lien humain et social, réel et symbolique, sur le sentiment intime d’appartenir à une même communauté humaine et de compter comme personne, et non uniquement comme un nom sur un fichier.

    Le défi de la résilience dans les sociétés contemporaines repose sur la réinvention du lien social. Il nécessite d’articuler « résilience naturelle », spontanée et « résilience assistée » (thérapeutique) ainsi que les ressources disponibles dans toutes nos sociétés mondialisées, étant donné que nous sommes tous, à des degrés divers et certainement de manière inégale, traversés par les conflits, tragédies et catastrophes de ce monde.

    La crise sanitaire que nous vivons actuellement réinterroge les figures du lien social et celles des structures de l’État, particulièrement au vu du paradoxe inédit que cette crise impose, soit de s’isoler (ou se confiner) solidairement.

    Elle incite chacun à redéfinir en son intimité le rapport à l’identité collective, à la citoyenneté et à l’altérité. À un moment où nous sommes encore confinés dans nos domiciles respectifs et où le lien social est mis à rude épreuve, le Covid-19 ouvre un nouveau chantier pour l’Humanité avec ce « petit » virus invisible et silencieux, qui nous met face à notre fragilité humaine fondamentale et à nos ressources communes. Il nous invite à l’introspection en vue de notre résilience collective.

    https://theconversation-com.cdn.ampproject.org/c/s/theconversation.com/amp/quelle-resilience-pour-quels-modeles-de-societe-

  • Les mutations récentes du #foncier et des agricultures en #Europe

    L’ouvrage propose un tour d’horizon des évolutions les plus récentes du foncier et de l’agriculture en Europe. Une première partie caractérise les évolutions et les révolutions des #politiques_agricoles, étudiées du point de vue du droit, de la science politique, de l’agronomie et de la géographie, en mettant l’accent sur la fin d’une phase protectionniste, et avec deux éclairages régionaux, en #Méditerranée et dans l’#Europe_médiane. Une seconde partie interroge les #modèles_agricoles et fonciers : l’#agriculture_familiale, l’agriculture de firme, le #travail_saisonnier, les mutations de la #propriété et l’évolution vers le #portage_foncier.

    http://www.lcdpu.fr/livre/?GCOI=27000100076500
    #agriculture #terres #livre
    ping @odilon

  • Après la #croissance. Déclin urbain et #modèles_alternatifs

    Souvent dépeintes comme le terreau du populisme, les villes en déclin sont également des espaces d’#expérimentation d’alternatives au néolibéralisme. Dans ces villes, les politiques de développement renouvellent l’action publique en rompant avec le dogme de la croissance.


    https://laviedesidees.fr/Apres-la-croissance.html
    #décroissance #alternatives #villes #urban_matter #post-growth #Youngstown #agriculture_urbaine #Cleveland #USA #Etats-Unis #décroissance_territoriale

  • Comment fonctionnent ces quiz qui vous font gagner de l’argent ?
    https://abonnes.lemonde.fr/pixels/article/2018/08/15/comment-fonctionnent-ces-quiz-qui-vous-font-gagner-de-l-argent_53425 ?

    Le principe est simple : une ou plusieurs sessions de quiz par jour à des heures fixes, entre neuf et douze questions, et un animateur. La plupart du temps, une somme de quelques centaines d’euros est partagée entre les candidats ayant répondu juste à l’intégralité des questions. Un fonctionnement hérité de HQ Trivia, une application américaine développée par les créateurs de Vine. HQ a connu un succès fulgurant, à tel point qu’elle a été nommée « Application de l’année » par le magazine Times en 2017. Elle culmine aujourd’hui à plus d’un million de téléchargements sur Android. Pas étonnant de voir qu’elle déclenche des vocations partout ailleurs.

    La télévision, cible ou alliée ?

    Pourtant, il y a aussi chez certains l’ambition d’enterrer le média phare du XXe siècle. « D’ici à quelques années, il y aura des dizaines de plates-formes comme la nôtre qui diffuseront des programmes sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre sur smartphone, affirme Thomas Reemer. Il y aura toujours du quiz, mais aussi de l’information, du divertissement, du sport… Tous basés sur des formats d’une quinzaine de minutes et diffusés en direct à un public qui pourra interagir avec le show en temps réel. » Là encore, tous sont d’accord : la « durabilité » passera par la multiplication des formats, qui viendront alimenter de véritables chaînes mobiles.

    #Télévision #Jeux_en_ligne #Modèles_économiques #Economie_numérique

  • Les #modèles_prédictifs peuvent-il être justes ? | Freakonometrics

    https://freakonometrics.hypotheses.org/51926

    Dans Nosedive (traduit par le titre Chute Libre en France), le premier épisode de la saison 3 de la série télévisée Black Mirror, on découvre la dystopie d’une une société régie par une « cote personnelle », une note, un score allant de 0 à 5. Dans ce monde, chaque personne note les autres, les mieux notés ayant accès à de meilleurs services (priorité dans les services, meilleurs taux, meilleurs prix, etc). Cette tendance à construire des scores dans toutes sortes de domaines (historiquement sur les crédits mais aujourd’hui sur des aspects criminels, voire civiques dans certains pays) ne va-t-elle pas déboucher sur un monde qui serait un concours de popularité sans fin ? Et comment serait-elle conciliable avec une justice sociale, a priori souhaitable ?

    #prévisions

  • Les villes africaines en quête de nouveaux modèles urbanistiques
    http://www.metropolitiques.eu/Les-villes-africaines-en-quete-de.html

    Loin du modèle colonial et du modèle vernaculaire, la fabrication des villes africaines repose aujourd’hui essentiellement sur des logiques néolibérales, qui comportent de nombreux écueils. Afin de les éviter, Jérôme Chenal montre tout l’intérêt de repenser le processus de fabrication de la ville, et notamment d’en comprendre les mécanismes.

    #Géographie #Villes #Villes_Africaines #Géographie_Urbaine #Géographie_de_l_Afrique #Afrique #Modèles_Urbanistiques #Urbanisme #Aménagement_du_Territoire #Jérôme_Chenal #Métropolitiques #Revue_Métropolitiques

  • Le #choc #numérique
    http://www.lechocnumerique.fr

    Rédigé par #Jean-Pierre_Corniou et 10 #consultants du cabinet de conseil #Sia_Partners, #Le_Choc_Numérique est un #récit concret et documenté de l’#impact du numérique sur le #travail, la #relation_client, la #citoyenneté, la #santé, le fonctionnement des #entreprises, les #modèles_d’affaires …. S’adressant aux dirigeants d’entreprise, l’équipe de Sia Partners a choisi la collection « Economie et #Prospective Numériques », issue d’une collaboration entre le #CIGREF et l’éditeur #Nuvis. Au fil des nombreux exemples, le monde du numérique y laisse entrevoir des constantes autour du #partage, de la #confiance, de la #rapidité, de la #simplicité, de la #collaboration, de la #désintermédiation, du #plaisir et de l’#innovation par l’#expérimentation.