• #Emmanuel_Macron, 13.01.2022

    « Au-delà des questions des moyens, nous avons une question structurelle et on ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. »

    https://twitter.com/caissesdegreve/status/1481963876451340290

    Quand est-ce qu’on l’arrête celui-là ?

    #macronisme #ESR #université #discours #facs #France #destruction #précarité_étudiante #financement #enseignement_supérieur #budget #compétition #compétition_internationale #néo-libéralisme #privatisation #Macron

    La casse de l’université continue...

    Voici ce que j’écrivais en 2020, lors des luttes contre la fameuse LPR :

    Si je lutte ici et maintenant c’est parce que je suis fermement convaincue que si on gagne en France la victoire contre une université néolibérale, on peut faire tache d’huile bien au-delà des frontières nationales. Et si, en France, on ne cède pas au chant des sirènes du néolibéralisme universitaire, je suis aussi fermement convaincue que le supposé « retard » décrié par certain·es aujourd’hui se transformera en avance. Car la grogne grandit aussi dans les autres pays européens, qui se battent pour ce qu’en France, nous sommes en train de perdre, mais nous n’avons heureusement pas encore complètement perdu

    http://www.riurba.review/2020/03/comprendre-le-neoliberalisme-universitaire-francais-a-partir-de-la-suisse

    • La privatisation de l’écoles et de l’université représente une montagne de fric, à côté de laquelle la privation de la Française Des Jeux et des autoroutes sont des cacahuètes apéritives.

      Restera la montagne d’or amassée par les caisses de retraite complémentaires, ce sera pour la quinquennat suivant.

    • Emmanuel Macron expose une #réforme « systémique » de l’université

      Le chef de l’État a estimé que le système actuel d’#études_supérieures était « révolu » et que les universités devaient s’ancrer dans une dimension plus « professionnalisante ».

      À trois mois de la présidentielle, Emmanuel Macron a souhaité jeudi 13 janvier une réforme « systémique » des universités, qu’il veut plus « professionnalisantes », tout en jugeant intenable un système d’études supérieures « sans aucun #prix » pour les étudiants mais avec un #taux_d'échec massif. « Je le reconnais sans ambages, nous avons commencé à colmater les brèches, mais nous devons redoubler d’effort pour que, à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte », a-t-il déclaré, en clôturant en visioconférence le Congrès de la Conférence des présidents d’universités.

      Le chef de l’État a d’abord remis en cause le double système #grandes_écoles - universités. « Nous avons trop longtemps accepté un modèle à plusieurs vitesses, où les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de la formation des #élites et l’université de la #démocratisation de l’enseignement supérieur et la gestion des #masses. Ce système est révolu », a-t-il lancé. « Demain ce seront nos universités qui doivent être les piliers de l’#excellence ».

      « Garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi »

      Emmanuel Macron a aussi dénoncé l’« intolérable #gâchis » de l’#échec en première année, où « seuls 50% des étudiants se présentent aux examens », malgré l’injection de nouveaux moyens et la création de 84.000 places. Selon lui, il ne s’agit donc pas d’une question de #moyens. « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont considérés comme boursiers et où pourtant nous avons tant de précarité étudiante, et une difficulté à financer un modèle beaucoup plus financé par l’argent public que partout dans le monde », a-t-il argué.

      « Je dis les choses avec la clarté et la franchise que vous me connaissez » car « si nous ne réglons pas ces problèmes structurels, nous nous mentirions à nous-mêmes », a-t-il poursuivi. Et d’enchaîner : « Nous avons besoin d’une #transformation_systémique de nos universités ». Celles-ci doivent, selon lui, avoir d’avantage d’#autonomie mais l’État devra passer avec elles « de véritables #contrats_d'objectifs_et_de_moyens ». Notamment « les universités ne doivent plus seulement garantir l’accueil des étudiants dans une formation mais garantir l’orientation des jeunes vers l’#emploi ».

      « L’université doit devenir plus efficacement professionnalisante », a encore souhaité le chef de l’État : « la logique de l’#offre doit prendre le pas sur la logique de la #demande », ou encore, « l’orientation doit évoluer pour mieux correspondre aux besoins de la #nation ». « Quand on ouvre des filières sans #perspective derrière, nous conduisons un #investissement_à_perte », a-t-il dit, après avoir rappelé les nouveaux moyens - 25 milliards d’euros sur 5 ans - de la loi de programmation de la recherche, « un rattrapage » à ses yeux. Manuel Tunon de Lara, président de la Conférence des présidents d’universités, rebaptisée France Universités, a lui réclamé une plus grande autonomie des établissements mais aussi un financement de l’enseignement supérieur « à la hauteur de nos ambitions ».

      https://www.lefigaro.fr/demain/education/emmanuel-macron-expose-une-reforme-systemique-de-l-universite-20220113

      #professionnalisation

    • Le discours a été tenu devant le congrès de la CPU désormais appelée @FranceUniv

      qui représente « un nouvel élan, qui rappelle le rôle de partenaire essentiel des pouvoir publics / force de proposition et de transformation pour l’ESR » d’après M. Macron.

      https://www.youtube.com/watch?v=SwsAPNPyFU4&t=32750s

      –-

      Analyse de Julien Gossa sur twitter :

      Le discours commence par des banalités : « concurrence pour les talents », « décloisonner pour favoriser les synergies », « Shanghai / Saclay »...

      Mais surtout « conjurer notre histoire » avec « le vent de face en raison de la démographie ».
      C’est important pour la suite.

      Le discours se centre sur « repenser totalement le lien entre Lycée et Université » et « la séparation entre les études supérieures et le monde du travail ».
      Il fustige une « aristocratie égalitariste » avec la dichotomie Grandes Ecoles (« exellence ») et Université (« masse »).

      #debunk Il s’agit d’un classique diviser pour regner/l’herbe est plus verte ailleurs.
      Cette opposition (stérile ?) GE/Univ est systématiquement instrumentalisée pour réformer, mais seulement les universités.

      « ce n’est pas qu’une question de moyens » (?)

      D’après M. Macron « ce système est révolu » car « il ne correspond pas à la compétition internationale et crée des segmentations inefficaces ». C’est « le sens de l’Histoire ».

      Il faut donc « une nouvelle politique d’investissement ».

      #Point 1 : l’« intolérable gâchis » en Licence

      « Nous avons injecté 1 Md€ en plus dans le premier cycle / créé 84000 places / et 28000 oui-si... formidable ! et pourtant seulement 50% des étudiants se présentent aux examens de premières année »

      #debunk "Des efforts n’ont pas conduit à des résultats, donc il faut réformer plus en profondeur" est discutable.

      Par exemple, il y a en réalité une hausse des taux de réussite, que le discours doit ignorer volontairement pour atteindre son objectif.

      https://etudiant.lefigaro.fr/article/a-l-universite-un-taux-de-reussite-des-licences-en-pleine-croissan

      De plus, ces résultats ne sont pas évaluables en période de pandémie, parce que tout le système est perturbé, et que tirer des conclusions de mesures qui ont trois ans n’est pas intègre.
      https://www.franceculture.fr/societe/covid-19-la-detresse-croissante-des-etudiants

      Enfin, l’effort est en réalité factice, puisque la dépense par étudiant baisse, essentiellement à l’Université.

      Tout au contraire, si on en croit les indicateurs, l’Université a donc plutôt obtenu des résultats, sans moyen, et dans un contexte difficile.

      https://www.alternatives-economiques.fr/rentree-coutera-t-plus-cher-cette-annee/00100263

      #Discussion L’échec en Licence lui-même est peut-être un problème factice, instrumentalisé pour atteindre des objectifs pratiquement sans rapport, mais qui a le mérite de faire écho à un soucis très concret qu’on rencontre sur le terrain.

      #Point 2 : le financement public et la gratuité des études universitaires.

      Cela conduirait a un enseignement qui n’a « aucun prix » à cause d’« un modèle beaucoup plus financé par l’argent public que partout dans le monde »

      #Debunk Au delà du marqueur idéologique « ce qui n’a pas de prix n’a aucune valeur », l’affirmation sur le financement public de l’ESR en France est tout simplement fausse : nous sommes dans la moyenne, et en dessous des pays que nous admirons.

      https://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/FR/T165/la_depense_pour_l_enseignement_superieur_dans_les_pays_de_l_ocde

      Plus intéressant encore, si on prend le cas extrême de la Grande Bretagne (GB).

      D’abord l’évidence : moins de financement public, c’est plus de financement privé, donc plus d’endettement des familles.

      E. Macron propose donc de vous endetter plus.

      https://commonslibrary.parliament.uk/research-briefings/sn01079

      Ensuite, le financement "privé" est en réalité sur des prêts garantis par l’État, et qui sont en grande partie (52%) non remboursé, donc payés par le public.

      Ça a couté 12Md€ d’argent public l’an dernier (~50% du budget du MESRI).

      https://www.dailymail.co.uk/news/article-9753557/Almost-10-billion-paid-student-loans-2020-written-off.html

      Et enfin, ça n’a apporté aucun financement supplémentaire aux universités.

      La proposition est donc d’endetter les ménages, même si ça coute encore plus au contribuable, sans rien rapporter aux universités.

      Seuls gagnants : les usuriers.

      #Point 3 : la formation réduite à une forme d’insertion professionnelle

      « les universités [doivent] garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi » avec « de véritables contrats d’objectifs et de moyens ».

      En clair : l’emploi conditionne le financement des formations.

      « la logique de l’offre doit prendre le pas sur la logique de la demande » « l’orientation doit évoluer pour mieux correspondre aux besoins de la nation »

      En clair : ce n’est plus ni aux familles ni aux universitaires de décider de l’orientation et des formations, mais à l’Etat.

      D’après E. Macron,ces « besoins de la nation » sont seulement économiques, et tout le reste est un « investissement à perte ».

      C’est du bon sens, mais seulement avec une conception de la formation limitée à l’insertion professionnelle.

      #debunk Si on colle les trois points, on a une forme de logique :
      1. Les jeunes échouent en Licence
      2. Car ils se moquent d’études qui ne coutent rien
      3. Et qui de toutes façons ne mènent à aucun emploi.

      Faire payer les familles apparait alors comme une solution, non pas pour augmenter les financements (ils n’augmenteront pas, au contraire), mais seulement pour augmenter l’implication des familles, et restructurer « l’offre et la demande » de la formation.

      La réussite par l’augmentation de l’implication des familles repose sur la croyance « ce qui n’a pas de prix n’a aucune valeur ».

      Quand on regarde les indicateurs, c’est plutôt une question de moyens.


      https://twitter.com/anouchka/status/1481928533308022785

      La restructuration de « l’offre et la demande » imagine une vertu : si les études impliquent un endettement personnel, alors le choix d’orientation sera vers les formations qui permettent de rembourser, donc là où il y a des emplois.
      Et sinon c’est à la charge des familles.

      Julien Gossa
      @JulienGossa
      ·
      17h
      Les formations qui conduisent aux emplois bien payés peuvent augmenter leurs frais d’inscription, donc leur qualité. Les autres ferment ou de toutes façons ne coutent plus rien.

      Le marché comme solution à l’orientation et la formation, donc à la stratification sociale.

      C’est la vision qui a bien fonctionné au XXe siècle. Malheureusement, elle ne fonctionne plus. Tout simplement parce que « démographie » et « besoins [économiques] de la nation » sont désynchronisés.

      Il n’y a pas d’emplois non pourvus en France, il y a du chômage.

      Les emplois qui recrutent ne concernent pas les filières universitaires.

      Les formations universitaires montrent un léger chômage, qui indiquent qu’elles remplissent parfaitement leur rôle de fournisseur de main d’œuvre qualifiée.

      https://statistiques.pole-emploi.org/bmo/bmo?graph=1&in=1&le=0&tu=10&pp=2021&ss=1

      On revient à cette évidence, que le discours de M. Macron semble ignorer : diplômer quelqu’un ne crée pas un emploi.

      En terme d’emplois, la politique proposée est donc vouée à l’échec. Pire, elle enferme dans une sorte d’immobilisme économique.


      https://twitter.com/Taigasangare/status/1481897423437979649

      En toute logique, la politique proposée consiste donc non pas à augmenter le nombre de diplômés, puisque ça ne ferait que baisser le taux d’insertion professionnelle.

      Elle consiste forcément à baisser le nombre d’étudiants, seul moyen d’éviter un « investissement à perte ».

      Et ça nous mène à la question principale qui se pose pour l’avenir, même si on n’ose jamais l’affronter :

      Quel est le rôle des études supérieures ?

      Si c’est seulement économique, sans progrès futurs, alors Macron a raison : il faut endetter et réduire le nombre d’étudiants.

      Mais si c’est plus large que ça, que les études supérieures permettent de former des citoyens qui vont devoir gérer des crises graves... Alors il vaut mieux des chômeurs bien formés que des chômeurs mal formés.

      Et le projet proposé est très dangereux.

      Il est d’autant plus dangereux que la loi ORE a déjà posé des bases très solides pour sa réalisation :

      l’Etat contrôle désormais les places dans toutes les formations publiques. La réduction du nombre d’étudiants est donc techniquement possible.

      #Parcoursup est à la fois une sorte de concours national pour accéder aux places, et en plus une market-place pour les formations, incluant déjà des informations sur les "débouchés" et un module de paiement des frais.

      Toute la technique a été préparée pour ce projet politique.

      Reste que le projet politique de M. Macron, tout idéalisé et idéologisé qu’il soit, se confronte à une question toute simple : Que fait-on des jeunes surnuméraires par rapport aux besoin de l’emploi, si on ne les forme plus ?

      Ce fameux « vent de face de la démographie ».

      Julien Gossa
      @JulienGossa
      ·
      16h
      Pour conclure, le discours de M. Macron est bien rodé, puisqu’il a plus de 50 ans... Mais il est objectivement anachronique.

      Il faudrait un peu de courage, et attaquer vraiment la seule vraie question : Quel est le rôle des études supérieures au XXIe siècle ?

      Rappel qu’il y a une cohérence entre baisser le nombre d’étudiants et réduire le nombre de lycéens qui font des mathématiques.

      Si on n’a pas le courage d’aller jusqu’au bout, on aura donc autant d’étudiants, juste moins bien préparés à nos études.


      https://twitter.com/OlivierMusy/status/1481960693784092673

      NB : Si M. Macron souhaitait vraiment mettre en œuvre ce programme, il lui suffirait de donner une autonomie réelle aux universités, dont l’intérêt est effectivement de réduire le nombre d’étudiants et de les faire payer.

      Sauf que c’est impossible :
      https://blog.educpros.fr/julien-gossa/2021/10/17/selection-impossible-autonomie-fantome

      Ici le verbatim, qui termine sur cette blague « Et que fait-on ce soir, Cortex ? »
      https://t.co/9HYisOq789

      Et bien sûr la plus pathétiques des hypothèses : tout ce projet n’a en réalité aucun sens, complètement dépourvu de vision et d’ambition autre que séduire les présidents d’université dans une perspective tristement électoraliste.

      https://twitter.com/JulienGossa/status/1481996134042193925

    • Présidentielle 2022 : le programme d’Emmanuel Macron devant la CPU “#France_Universités

      Emmanuel Macron a prononcé un discours pour la clôture du 50e anniversaire de la Conférence des présidents d’université1. La vidéo et le verbatim sont disponibles ici2. Ce discours dresse le bilan de la politique du quinquennat en matière d’enseignement supérieur et de recherche, mais trace aussi un cap pour une nouvelle réforme — peut-être pour un nouveau mandat ?

      Le candidat-président Macron fixe dans tous les cas un certain nombre d’objectifs et de lignes directrices qu’il n’est pas inintéressant d’analyser.

      Cet article est tiré d’un fil Twitter (https://twitter.com/CathKikuchi/status/1481942125147312138) écrit à chaud et doit être complété avec d’autres analyses qui ont émergé à la suite de ce discours3. On citera en particulier :
      - Ce fil extrêmement complet de Julien Gossa : https://twitter.com/UnivOuverte/status/1481759141618139138
      - Cette réflexion de Marianne Blanchard sur la volonté de plus « professionnaliser l’université » : https://twitter.com/UnivOuverte/status/1481759141618139138
      - En complément, la reprise d’une intervention de l’économiste Elise Huillery au colloque de la Conférence des présidents d’université sur les ressources allouées à l’université française, un fil d’Ana Lutzky : https://twitter.com/anouchka/status/1481924369597308930

      Il est globalement beaucoup question de la politique universitaire, mais un article entier pourrait également être consacré à ce qu’Emmanuel Macron dit de la vie étudiante. Nous laissons ce point à analyser à d’autres.
      « Éclairer le monde tel qu’il va » ou l’abrutir

      « Faire pleinement de la France une avant-garde de la recherche de l’excellence du savoir » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Le discours commence bien sûr par brosser les présidents d’université dans le sens du poil. Beaucoup ont commenté la petite phrase des universités qui doivent « éclairer le monde ». Ce passage s’inscrit dans tout un segment sur l’importance de l’autorité académique, de la reconnaissance des pairs et du cadre scientifique : « Ne laissons personne le remettre en question ». Evidemment, ce n’est pas nous que le contredirons. Mais cette déclaration prend une saveur particulière, alors que Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation, cherche au contraire à dire aux universitaires ce qu’ils doivent chercher et comment en faisant l’ouverture d’un pseudo-colloque ((NDLR : Le président-candidat Macron évoque également la commission Bronner qui vient de rendre son “rapport” Des Lumières à l’ère du numérique.Il en retient la “nécessité d’empêcher la mise en avant ou le financement d’acteurs qui nuisent à l’information, à la cohésion sociale et in fine à la démocratie” — qui résone avec sa menace envers les “universitaires qui cassent la République en deux“.)). ou encore lorsqu’il prétend pouvoir dire quels universitaires constituent un « virus » de la pensée et donc, en creux, ceux qui pourraient en être le « vaccin ».

      « Tous ensemble, nous avons réussi à faire de notre jeunesse une priorité claire avec ces premiers résultats et également à faire de notre jeunesse et de nos étudiants une priorité. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Mais bien sûr, il s’agit d’abord de défendre un bilan. Emmanuel Macron se gargarise de milliers de places nouvelles ouvertes dans diverses filières pour accommoder la vague démographique. C’est bien rapide : ouvrir des places sans construction de bâtiment, sans recrutement de personnel, ne revient-il pas à faire du surbooking ? Changer un chiffre sur un tableur Excel, ne permet pas dans les faits d’accueillir correctement des milliers d’étudiants et d’étudiantes supplémentaires.

      Mais rassurons-nous : la loi de programmation a représenté un engagement financier sans précédent. Sauf que non : l’augmentation du budget de l’ESR stagne et sa légère augmentation, plus faible que par le passé, correspond à l’inflation. Un tour de passe-passe dénoncé par les politiques notamment au Sénat. L’effort budgétaire est principalement reporté sur la prochaine mandature :bel effort personnel pour le président Macron.

      « Justes hiérarchies » ? Parcoursup, reproduction sociale et démocratie

      Parmi les bons points qu’Emmanuel Macron se donne, le satisfecit sur Parcoursup est aussi d’un ridicule achevé. « Un système d’orientation avec des taux de satisfaction et de réponse incomparables, plus lisibles », alors que tous les acteurs du système, des élèves aux enseignants du secondaire, en passant bien sûr par les enseignants du supérieur disent le contraire. Mais peu importe : il s’agit de l’un des grands chantiers du quinquennat, il doit être un succès.

      « Des sociétés démocratiques comme la nôtre qui ont la passion de l’égalité que nous partageons toutes et tous doivent néanmoins défendre à nouveau les justes hiérarchies qu’il doit y avoir dans nos sociétés sans lesquelles tout se dissout » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Macron se lance ensuite dans un grand discours visant à intégrer les universités à la formation de l’élite, dans une optique implicite de démocratisation. Il cite les Idex en exemple. Sauf qu’en termes de démocratisation, les Idex contribuent plutôt à une reproduction de l’élite plutôt qu’à son renouvellement, comme l’on montré les travaux d’Audrey Harroche et ceux de Hugo Harari-Kermadec.

      Cette volonté de s’inscrire dans le cadre de grands établissements va de pair avec une volonté de professionnalisation accrue.colloque

      L.’université « doit devenir plus efficacement professionnalisante car on ne peut pas se satisfaire de l’échec de nos étudiants dans les premiers cycles ni du taux de chômage trop élevé des jeunes qui sortent de certaines filières universitaires. Pour vous y aider, nous devons poursuivre le travail d’amélioration de l’orientation qu’a initié Parcoursup ». (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Cet affichage ne peut être balayé d’un revers de main. Evidemment, aucun enseignant digne de ce nom ne peut vouloir que les universités forment des chômeurs. Mais cela passe sous silence que les universités sont déjà professionnalisantes : elles forment des professionnel·les de la recherche et de l’enseignement supérieur et des enseignant·es. Hors Master, , elles forment en licence en lien avec le monde du travail, y compris bien sûr celui hors de l’université et de l’enseignement : c’est vraiment n’avoir jamais regardé l’offre de formation universitaire ni les maquettes de premier cycle que de penser le contraire. S’il y a sûrement des améliorations à effectuer, il serait tout à fait faux de prétendre que les universitaires ne se préoccupent pas du devenir professionnel de leurs étudiant·es.

      « Les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de l’excellence et de la formation des élites, et les universités de la démocratisation de l’enseignement supérieur et de la gestion des masses. Ce système est révolu. Il est révolu d’abord parce qu’il ne correspond pas à la compétition internationale, parce que sa forme-même crée des barrières, des segmentations qui sont inefficaces. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Cependant, on peut être conscient des nécessités de professionnalisation à l’université tout en considérant que celle-ci a aussi un rôle intellectuel et émancipateur de transmission de savoir et de méthode scientifique. Mais cela, Macron n’en parle jamais pour l’enseignement. Enseigner à l’université est réduit à la formation en lien à des besoins identifiés de la nation. Et si les besoins de la nation, c’était aussi d’avoir des diplômés insérés dans le marché du travail ET capables de réfléchir par eux-mêmes ? Ce serait fou…

      De même la question de l’échec en première année de licence et de l’orientation est un vrai sujet. Mais ne serait-ce pas aussi parce que Parcoursup a accentué ce phénomène ? De nombreuses étudiantes et étudiants, à vue de nez encore plus nombreux qu’auparavant, s’inscrivent dans des formations sans réelle volonté de s’y investir. Alors quelle solution ? Emmanuel Macron évoque le développement de filières courtes et professionnalisantes, ce qui peut être une partie de la réponse. Mais est-ce que l’augmentation de leur capacité d’accueil va à nouveau se faire sans moyen supplémentaire ? Permettons-nous au moins de nous poser la question…

      « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      Malgré tous ces points ambigus, voire volontairement mensongers, le plus inquiétant de ce discours réside dans l’une de ses dernières parties. Cela a été déjà relevé : Emmanuel Macron dénonce un système où l’université n’a « aucun prix pour la grande majorité des étudiants », où on a un tiers de boursiers et où on a « un modèle beaucoup plus financé par l’argent public qu’ailleurs dans le monde ». D’abord, ce dernier point est tout bonnement faux : la France n’investit proportionnellement pas plus d’argent public dans l’université que, par exemple, l’Allemagne, la Norvège, le Danemark ou la Belgique, même si elle en investit d’avantage que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni. Elle se situe dans une moyenne légèrement supérieure à celle de l’OCDE.

      Ensuite, le changement systémique auquel il appelle revient bien à faire payer les étudiant·espour leur faire financer leurs propres études. Y compris via un endettement étudiant peut-être ? C’est en tout cas ce que de proches conseillers d’Emmanuel Macron suggéraient. Alors c’est une option bien sûr. Mais ça revient à poser franchement sur la table la nature du modèle universitaire que nous souhaitons et la manière dont l’université est encore un levier d’ascension sociale, ou a minima de formation de toutes les catégories économiques et sociales. Et ce débat-là, évidemment, Macron ne le pose pas clairement.

      Les systèmes de gouvernance [des universités], « il faut bien le dire par tradition, ont eu dans beaucoup de situations pour conséquence d’impuissanter trop souvent les équipes face aux défis qui leur étaient posés. Mais cette autonomie, soyons clairs et sincères entre nous doit aussi être synonyme d’une gouvernance renforcée de nos universités dans laquelle les équipes présidentielles pourront définir et incarner pleinement leur projet. (…) Notre système est très hypocrite – autonomie à moitié, on continue de contrôler ; ceux qui réussissent, on les aide un peu plus, ceux qui ne réussissent pas, on les compense. Et puis autonomie, mais au fond, même localement, on donne des responsabilités, mais on bloque ceux qui sont élus par nous-mêmes » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      De la même manière, on a un passage éminemment confus sur un contrat que les universités devront passer avec l’État, où il est question d’augmenter l’autonomie mais aussi la responsabilité. Selon quelles modalités ? Ce point n’est pas clair, mais il est un passage qui personnellement me fait froid dans le dos. Macron dénonce un système déresponsabilisant : « Notre système est très hypocrite — autonomie à moitié, on continue de contrôler ; ceux qui réussissent, on les aide un peu plus, ceux qui ne réussissent pas, on les compense ».

      Est-ce que cela signifie que l’État se désengagera des universités qui ne répondent pas aux critères d’excellence fixés par le gouvernement ? Que celles-ci ne feront plus partie du système de service public de l’enseignement supérieur ?

      On voit bien où cela peut mener : les grandes universités comme Saclay auront toujours plus, les petites universités au bassin de recrutement local toujours moins. Et si un tel système aide à la promotion de l’enseignement supérieur, à la formation des étudiant·es partout en France, je veux bien manger mon chapeau.

      « La France continuera de jouer son rôle de résistance en défense de l’esprit de connaissance, de recherche, d’un enseignement libre et d’une recherche libre. Parce que je crois que c’est la seule manière de continuer à véritablement conquérir le monde, c’est-à-dire à inventer des possibles nouveaux dans une humanité en paix. Les autres voies, nous les connaissons. Ce sont les obscurantismes, les totalitarismes, les nationalismes appuyés sur la discorde. » (Emmanuel Macron, 13 janvier 2022)

      https://academia.hypotheses.org/33766

    • Thread de Marianne Blanchard, 14.01.2022
      Pourquoi ça n’a pas de sens de vouloir plus « professionnaliser l’université » => un thread

      1/ pour Macron, "l’université doit devenir plus efficacement professionnalisante ". Derrière, deux présupposés : a) c’est nécessaire de professionnaliser b) l’université ne le fait pas

      2/voyons déjà le premier. Pour ça je m’appuie (notamment) sur ça : https://sms.hypotheses.org/24385
      On a interrogés des jeunes diplômés d’écoles (commerce/ingé) et d’université, en sciences et en gestion sur les "compétences" dont ils avaient besoin dans leur emploi actuel

      3/ on a distingué les "compétences spécifiques" (en gros tout ce qui est spécialisé, propre à un secteur d’emploi) et "transversales" (en gros, ce qui est général, et mobilisable dans plein de métiers).

      4/ résultat pour les 971 enquêtes : "Le niveau de compétences spécifiques considéré comme acquis est en moyenne supérieur ou égal à celui estimé requis dans leur emploi" => qu’ils viennent de l’université ou d’école, personne ne se trouve pas assez "professionnalisé"

      5/ les individus déclarent peu de lacunes en compétences spécifiques, car ils les mobilisent qd elles sont trop spécialisées. Qd des déficits sont mentionnés, ils concernent des compétences trop « pointues » ou dépendantes du contexte d’emploi pour être enseignées

      6/ Les jeunes interrogés insistent aussi sur le fait qu’il est possible de se former et se spécialiser en cours d’emploi. + les entretiens révèlent que les compétences spécifiques acquises en formation semblent surtout valorisées dans leur dimension transversale

      7/ ce ne serait pas tant leur caractère technique qui importerait, que les capacités à acquérir d’autres compétences qu’elles suscitent.
      En gros, en apprenant (des choses, plus ou moins "spécifiques"/professionnelles), on apprend aussi à apprendre, à se former.

      8/ il faut donc sortir de la vision « adéquationniste » à la française prônant une professionnalisation et une spécialisation sans cesse accrue des formations initiales. Bcp de diplômé·es n’exercent pas le métier correspondant à leur spécialité de formation,

      9/ C’est le sens de l’ "introuvable" relation formation-emploi dont parlait déjà L. Tanguy.
      Se former, c’est aussi acquérir une culture générale, apprendre à porter un regard critique sur les choses, comprendre le monde pour pouvoir y prendre part en tant que citoyen·ne

      https://twitter.com/MJ_Blanchard/status/1481971200100376577

    • Universités : le renforcement « systémique » promis par Macron cache mal un projet de privatisation

      Le quasi-candidat Macron a souhaité jeudi une réforme « systémique » des universités. Derrière la promesse de les rendre « plus fortes » et de casser la concurrence avec les « grandes écoles », il a posé, en creux, les jalons d’un projet de privatisation.

      Dans un discours de clôture du congrès de la Conférence des présidents d’université (rebaptisée à cette occasion « France Universités »), Emmanuel Macron a fait le bilan de son quinquennat pour l’université et dessiné l’avenir qu’il imagine pour l’enseignement supérieur : une orientation universitaire dont la seule boussole serait le marché du travail, et une formation qu’il veut encore « plus efficacement professionnalisante ». Surtout, il a évoqué, sans prononcer les mots, une augmentation substantielle des frais de scolarité étudiante.

      Fier de son quinquennat, dont il a vanté la loi d’orientation et de réussite des étudiant·es, la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPPR), l’ouverture de places supplémentaires à l’université (sans plan d’ouvertures massives de postes d’enseignant·es-chercheurs et chercheuses ni réels moyens supplémentaires), les entrées et « bonds de géant » des universités françaises dans le classement de Shanghai (pourtant décrié), le président de la République a oublié de citer, par exemple, les déboires de Parcoursup depuis 2018, l’immolation d’un étudiant par le feu devant le Crous de La Madeleine à Lyon en 2019, l’apparition des étudiant·es en masse dans les files d’attente des distributions associatives d’aides alimentaires pendant la crise du Covid-19, et la baisse de la dépense publique par étudiant·e. Tout de même, Emmanuel Macron a reconnu qu’il faudrait « redoubler d’effort pour que, à l’horizon de dix ans, notre université soit plus forte ».

      Ainsi, ce discours face aux présidents d’université était plus celui d’un candidat que celui d’un président en exercice. Le projet dessiné ? Une augmentation des frais de scolarité, et un pas de plus vers la privatisation de l’université.
      Un raisonnement fondé sur des chiffres erronés

      Sans se prononcer explicitement pour une hausse des frais de scolarité, Emmanuel Macron l’a remise sur la table en prenant prétexte de la précarité étudiante et du pourcentage important d’étudiant·es qui abandonnent avant même les examens en première année de licence (50 % selon lui). « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale », a déclaré le chef de l’État.

      Si cette déclaration d’Emmanuel Macron n’est pas claire sur le prix que devront payer les étudiant·es pour accéder à l’université dans le système qu’il semble prôner, elle fait planer la possibilité de la création d’un accès réservé à celles et ceux qui en auront les moyens, ou qui auront accès à un prêt bancaire pour se le payer.

      Le quasi-candidat à la présidentielle semble vouloir calquer sa réforme « systémique » sur les systèmes anglo-saxons, où une bonne partie des étudiant·es s’endettent pour des années afin d’accéder aux études supérieures. Pourtant, aux États-Unis, la dette étudiante a atteint à la fin de l’année 2021 plus de 1 500 milliards de dollars, selon la FED, et représente désormais un véritable boulet pour l’économie.

      Mais cette déclaration présidentielle s’appuie sur des chiffres manifestement erronés. Il est d’abord mathématiquement impossible que « 50 % des étudiants seulement se présentent aux examens de première année », quand « le taux de passage en L2 des néo-bacheliers inscrits en L1 à la rentrée 2019 est de 53,5 % », d’après une note du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation publiée en novembre 2021 (https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/sites/default/files/2021-11/nf-sies-2021-24-15115.pdf).

      Ensuite, le financement du système de l’enseignement supérieur français n’est pas « beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde », puisque selon l’OCDE (tableau C2.2b : https://www.oecd-ilibrary.org/sites/455a2bcc-en/index.html?itemId=/content/component/455a2bcc-en), la France finançait en 2018 à 80 % son système par des fonds publics pendant que, par exemple, l’Allemagne affichait un taux de 84 %, la Suède de 87 % et la Norvège de 95 % ! La réforme « systémique » de l’université française voulue par Emmanuel Macron tient sur des raisonnements scientifiquement peu solides.
      Une orientation dirigée par le marché du travail

      Jeudi, il a également jugé indispensable de pousser les universités à proposer des formations en fonction du marché du travail : « [Elles] ne devront d’abord plus seulement garantir l’accueil des étudiants dans une formation, mais garantir l’orientation des jeunes vers l’emploi. » Si cette position pouvait avoir un sens il y a plusieurs décennies, cela fait longtemps que les universités se préoccupent de l’entrée dans la vie active de leurs étudiant·es.

      Les chiffres du ministère de l’enseignement supérieur donnent un taux d’insertion à 18 mois de 89 % pour les masters et de 92 % pour les licences professionnelles. Surtout, la question de l’adéquation entre études et marché du travail est particulièrement délicate : il est impossible de connaître l’avenir de l’emploi plusieurs années après l’entrée dans les études, dans un monde en perturbations permanentes. À titre d’exemple, le sacrifice de la filière informatique à l’université (raconté ici par Mediapart : https://www.mediapart.fr/journal/france/140921/universite-la-start-nation-sacrifie-la-filiere-informatique?onglet=full), à cause d’un manque de moyens, alors même que la demande industrielle est énorme, montre combien la volonté des établissements n’est pas forcément le problème principal.

      À entendre Emmanuel Macron, en tout cas, l’université devrait « devenir plus efficacement professionnalisante ». Elle ne le serait donc pas assez. Mais la sociologue Marianne Blanchard et ses collègues montrent que, lorsqu’on interroge de jeunes titulaires d’un diplôme de niveau bac+5 de master ou d’école, ils et elles considèrent que « le niveau de compétences spécifiques considéré comme acquis est en moyenne supérieur ou égal à celui estimé requis dans leur(s) emploi(s) ». En clair, ils et elles ne se considèrent pas comme « non professionnalisé·es ». Ces chercheuses et chercheurs expliquent aussi que les jeunes diplômé·es pensent « que leur capacité à acquérir ces nouvelles compétences, et donc à s’adapter à de nouveaux environnements de travail, est une compétence en soi que leur formation a contribué à développer ».
      Une remise en cause superficielle des grandes écoles

      Enfin, dans son discours de jeudi, Emmanuel Macron a semblé vouloir remettre en cause le système « grandes écoles-universités », en lançant : « Nous avons trop longtemps accepté un modèle à plusieurs vitesses, […] où les grandes écoles et organismes de recherche étaient supposés s’occuper de l’excellence et de la formation des élites, et les universités de la démocratisation de l’enseignement supérieur et de la gestion des masses. Ce système est révolu. [...] Demain, ce sont nos universités qui doivent être les piliers de l’excellence, le centre de gravité pour la recherche comme pour la formation. » Faut-il lire, en creux, une volonté de disparition pure et simple des grandes écoles ? Dès lors, l’ambition serait-elle de chasser des universités les pauvres dont les bourses « coûtent un pognon de dingue », pour y faire venir les étudiant·es plus fortuné·es des grandes écoles ?

      https://www.mediapart.fr/journal/france/150122/universites-le-renforcement-systemique-promis-par-macron-cache-mal-un-proj

      #bilan #frais_de_scolarité #LPPR #classement_de_Shanghai #parcoursup #chiffres #statistiques #financement #taux_d'insertion #moyens

    • Discours de Macron : une réforme « systémique » de l’université pas si nouvelle et fantasque que ça…

      Le congrès du 13 janvier 2022 célébrant les 50 ans de feu la Conférence des Présidents d’Université (CPU) — dorénavant #France_Universités (sic) — aura eu son petit effet médiatique. Cependant, ce n’est pas #FU qui est au centre de l’attention depuis près d’une semaine mais le président Emmanuel Macron, qui y est intervenu en visioconférence, dans un discours verbeux et ampoulé1.

      Une phrase du chef de l’État a en effet suscité des réactions nombreuses et indignées de la part des mondes universitaire [2], étudiant [3], médiatique [4] et politique [5] (dont on peut parfois douter de la sincérité… [6]) :

      « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants, où un tiers des étudiants sont boursiers et où, pourtant, nous avons tant de précarité étudiante et une difficulté à financer un modèle qui est beaucoup plus financé sur l’argent public que partout dans le monde pour répondre à la compétition internationale. » (p. 6)

      Malgré un flou artistique sur ce que voulait vraiment dire le Président, un consensus s’est formé autour de son probable projet pour l’enseignement supérieur : l’augmentation des frais d’inscription à l’université. En séances parlementaires, la ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (#MESRI), Frédérique Vidal, a été interpelée à ce sujet. Celle-ci y a catégoriquement démenti une telle interprétation des paroles de Macron [7]. Des macronistes se sont ensuite joint·es à elle pour dénoncer cette prétendue intox sur Twitter [8]. Ce SAV du discours du Président par la ministre culmine finalement avec un entretien dans Libération absolument lunaire [9].

      Au-delà de l’interprétation du discours, et du fait que le terme « évoquer » utilisé par Vidal (plutôt que « parler explicitement », cf. tweet de LCP) ne permet en rien de lever nos suspicions, existe-t-il des indications nous permettant de penser que Macron souhaiterait effectivement augmenter les frais d’inscription, en continuité avec sa politique depuis 2017 ? N’y aurait-il pas des précédents pendant son mandat ?

      Spoiler alert : oui, et oui à nouveau.

      Un précédent ?

      Alors que les macronistes égrainent dans leurs tweets une série de mesures qui démontrerait que, sous Macron, jamais les étudiant·es n’ont été aussi protégé·es (ce qui est de toute évidence faux), iels oublient systématiquement une mesure absolument honteuse : la hausse des frais d’inscription à l’université pour les étudiant·es extra-communautaires, passant de 170 à 2 770 euros en licence et de 243 à 3 770 euros en Master. Ce précédent, auquel le Conseil d’État n’a rien trouvé à redire [10], laisse penser qu’une telle hausse pourrait en principe être généralisée à tou·tes [11]. Mais est-ce dans le projet néo-libéral macroniste ?

      Un projet Macron-compatible ?

      Faisons d’abord un détour par l’#Institut_Montaigne, un think-tank néo-libéral. Ce dernier est consulté par le MESRI pour définir sa stratégie et sa politique ESR [12]. La collaboratrice de Vidal recrutée en juillet 2020, #Blanche_Leridon, est même passée par le think-tank de 2015 à 2018 [13]. Ce qui devient intéressant, c’est qu’en avril 2021, l’Institut faisait (à nouveau) des propositions sur une réforme de l’Université impliquant… une hausse des frais d’inscription, sans aucune ambiguïté ici ! [14]

      « [une] augmentation des droits de scolarité en licence à 900 € par an et à 1 200 € en master [qui] concernerait l’ensemble des universités, de manière uniforme » (p. 98–99)

      L’analogie ne s’arrête pas là puisque le think-tank propose, comme Macron (voir tableau en annexe) :

      – d’augmenter la part des #financements_privés dans les #fonds_universitaires ;
      - de résoudre la précarité étudiante par l’augmentation des frais d’inscription (ce que l’Institut Montaigne propose de faire en créant notamment des #prêts étudiants…) ;
      – de « remettre » la recherche au cœur des missions des universités au détriment des établissements de recherche, tels que le #CNRS, qui feraient office d’agences de moyens ;
      – de s’affranchir du « coût » que représente le tiers d’étudiant·es boursier·ères ;
      – la remise en cause du système historique Université–Grande école–EPST ;
      – le renforcement de la professionnalisation des formations universitaires ;
      – le renforcement de la #gouvernance des universités par leur #autonomisation.

      On remarquera tout de même quelques différences, notamment sur la précision de certains calculs puisqu’à l’inverse de Macron, l’Institut Montaigne montre que la France n’est pas la championne mondiale du financement public de ses universités ; le Président n’en étant pas à son premier raccourci grossier dans son discours [15]. Autre divergence notable, la transformation complète des EPST en agences de moyens n’est pas le scénario privilégié par le think-tank.

      Notons enfin que certain·es ont proposé à la suite du discours de Macron que l’augmentation des frais d’inscription serait inconstitutionnelle, sur la base d’une décision du Conseil constitutionnel en 2019 [16]. Cependant, ce dernier n’entérine pas la #gratuité de l’université mais sa « #modicité » ou #gratuité_payante. Un point que l’Institut Montaigne avait déjà bien pris soin de vérifier et qui serait selon lui compatible avec son projet de réforme, donc avec celui de Macron.

      « La question de la constitutionnalité d’une augmentation des droits de scolarité […] Il est donc possible de considérer que la proposition formulée [dans le rapport de l’Institut Montaigne] répond aux préoccupations du Conseil constitutionnel telles que précisées par le Conseil d’État. Des droits de scolarité annuels autour de 1 000 € apparaissent en effet modiques au regard du coût annuel moyen des formations dans l’enseignement supérieur (représentant autour de 10%).

      Ensuite, dans le cadre d’un prêt à remboursement contingent décrit ci-après, l’étudiant n’a à s’acquitter directement d’aucun droit sur la période de sa scolarité et le remboursement ultérieur de son emprunt sera fondé sur ses capacités financières. Un tel système, innovant et équitable, apparaît donc particulièrement adapté pour satisfaire aux obligations constitutionnelles pesant sur les droits de scolarité. » (p. 114–115)

      La comparaison entre le discours de Macron et celui du think tank est bluffante : il semblerait que l’un ait écrit l’autre, sans qu’on puisse savoir qui de la poule et l’œuf2 . L’ensemble des similarités entre le discours de Macron — et la politique ESR de son mandat — avec le rapport de l’Institut Montaigne montre le consensus libéral qui les unit sur la question de l’université. Une idéologie que l’un — l’Institut Montaigne — assume vis-à-vis de la question de l’augmentation des frais d’inscription, alors que l’autre — Macron et son gouvernement — la nie publiquement aussitôt l’avoir « évoquée ».

      Une difficulté à assumer qui en dit long sur l’absence de consensus dans la communauté académique et la société civile autour de ce projet de transformation de l’université.

      NB : au moment de l’écriture de ce billet, d’autres (ici le compte Twitter parodique @realUNIVFrance) ont aussi perçu le lien pour le moins troublant que nous décrivons. Le rapport de l’Institut Montaigne semble donc être une bonne grille de lecture pour comprendre le discours de Macron.

      Tableau annexe





      https://academia.hypotheses.org/33874

  • #conjoncture_covid : jeudi 13 janvier 2022
    • par rapport à l’extrapolation de référence, le léger décalage des hospitalisations et des entrées en réanimation se maintient, les décès décrochent un peu

    • en données cvh, les hospitalisations plafonnent, les entrées en réa aussi avec, peut-être l’amorce d’une petite baisse, les décès s’orientent à la baisse

  • Une personne de plus morte aux frontières de l’europe

    Le 2 janvier dernier, le prénom de #Zakaria s’est ajouté à cette liste déjà trop longue d’hommes et de femmes décédées ou disparues dans le Briançonnais en essayant de se rendre en France.

    Zakaria a été retrouvé mort dans les #Alpes, aux alentours de #Modane. Il avait 31 ans et était d’origine Marocaine. Il a certainement traversé la frontière franco-italienne à plus de 2000m d’altitude, de nuit, sous-équipé face à la neige ou les températures qui avoisinent régulièrement -10°C. Cette personne a payé les conséquences de la chasse à l’homme menée jour et nuit par la Police aux frontières, la Gendarmerie nationale et les militaires de l’opération Sentinelle dans cette région, traquant et refoulant des personnes, parfois des familles entières, venues demander l’asile en Europe. Cette militarisation morbide de la frontière pousse les exilé.es à s’aventurer toujours plus loin des sentiers praticables et à prendre des risques toujours plus grands.

    Quelques-lignes dans la presse locale, un appel à témoin de la gendarmerie de Modane sur twitter : Zakaria est mort dans l’indifférence la plus totale. Sa famille attend toujours le rapatriement de son corps, conservé à des fins d’enquête.

    https://cric-grenoble.info/infos-locales/article/une-personne-de-plus-assassinee-aux-frontieres-de-l-europe-2285

    #décès #mort #frontière_sud-alpine #migrations #asile #réfugiés #montagne #Freney #barrage_du_Freney #Fatallah

    –-

    Ajouté au fil de discussion sur les morts à la frontière des Hautes-Alpes :
    https://seenthis.net/messages/800822

    lui-même ajouté à la métaliste sur les morts aux frontières alpines :
    https://seenthis.net/messages/758646

    • Une personne de plus retrouvée morte près de la frontière franco-italienne

      #Fathallah_Belafhail, alias Zakaria, un nom qui s’ajoute à la longue liste des personnes tuées par le régime des frontières européennes. Son corps a été retrouvé le 2 janvier près de Modane, dans le bassin du Freney, après qu’il ait traversé une frontière de plus au péril de sa vie. Chaque jour des personnes meurent aux frontières, en mer, dans les forêts, les montagnes, dans une invisibilité quasi totale.

      https://blogs.mediapart.fr/clementine-seraut/blog/110122/une-personne-de-plus-retrouvee-morte-pres-de-la-frontiere-franco-ita

    • #Fathallah_Balafhail, 31 anni, è stato trovato morto il 2 gennaio 2022 al Barrage del Freney non lontano da Modane dopo aver cercato di varcare a piedi le Alpi. Veniva dal Marocco, anche lui aveva tentato il giro più lungo passando dalla Turchia e aveva attraversato i Balcani. Aveva vissuto per un certo tempo a Crescentino, paese vicino a Vercelli, poi la partenza, due tentativi falliti di arrivare in Francia, passando da Ventimiglia, e infine l’arrivo in Valle di Susa. L’ultimo suo messaggio alla famiglia risale alle 23.54 dalla stazione di Oulx. Forse aveva trovato un passeur per arrivare dall’altro lato del confine con una macchina. Il tentativo non è coronato da successo e forse matura lì la scelta del cammino in montagna, un percorso lungo e pericoloso, già sperimentato in anni passati e in seguito abbandonato per gli evidenti rischi. Rimane un buco di tre giorni prima del ritrovamento del cadavere. Molti particolari rimangono oscuri e inquietanti. I parenti non hanno avuto accesso ai risultati dell’autopsia. Anche il rimpatrio in Marocco è avvenuto frettolosamente senza attenzione alcuna alla sensibilità della famiglia e ai rituali funerari del paese d’origine. Si rimane invisibili anche dopo la morte. Poche righe su un giornale locale francese hanno liquidato il caso. Nonostante la presenza ricorrente di giornalisti in Alta Valle di Susa, il fatto è rimasto sotto silenzio.

      https://openmigration.org/analisi/ritorno-sulla-rotta-alpina-dove-il-confine-continua-a-uccidere

    • Si ritorna a morire alla frontiera Nord Ovest delle Alpi

      Oulx,4 febbraio 2022 – #Fathallah_Balafhail, 31 anni, è stato trovato morto il 2 gennaio 2022 al Barrage del Freney non lontano da Modane dopo aver cercato di varcare a piedi le Alpi. Veniva dal Marocco, anche lui aveva tentato il giro più lungo passando dalla Turchia e aveva attraversato i Balcani. Aveva vissuto per un certo tempo a Crescentino, paese vicino a Vercelli, poi la partenza, due tentativi falliti di arrivare in Francia, passando da Ventimiglia, e infine l’arrivo in Valle di Susa. L’ultimo suo messaggio alla famiglia risale alle 23.54 dalla stazione di Oulx. Forse aveva trovato un passeur per arrivare dall’altro lato del confine con una macchina. Il tentativo non è coronato da successo e forse matura lì la scelta del cammino in montagna, un percorso lungo e pericoloso, già sperimentato in anni passati e in seguito abbandonato per gli evidenti rischi. Rimane un buco di tre giorni prima del ritrovamento del cadavere. Molti particolari rimangono oscuri e inquietanti. I parenti non hanno avuto accesso ai risultati dell’autopsia. Anche il rimpatrio in Marocco è avvenuto frettolosamente senza attenzione alcuna alla sensibilità della famiglia e ai rituali funerari del paese d’origine. Si rimane invisibili anche dopo la morte. Poche righe su un giornale locale francese hanno liquidato il caso. Nonostante la presenza ricorrente di giornalisti in Alta Valle di Susa, il fatto è rimasto sotto silenzio.

      Ullah Rezwan Sheyzad, 15 anni, afgano: come molti aveva lasciato la sua terra prima della frettolosa ritirata occidentale. Anche per lui, bambino, c’è un cammino lungo che lo porta ad attraversare l’Iran, la Turchia e da lì la scelta, perlopiù effettuata dai giovani che viaggiano soli, di attraversare la Bulgaria, la Serbia, la Croazia e la Slovenia fino ad arrivare in Italia. Come nel caso precedente il percorso scelto è quello più veloce, ma anche viabile solo per giovani o per piccoli gruppi. In meno di un anno arriva in Italia, viene fermato e accolto a Cercivento nella comunità Bosco di Museis, indi riprende il cammino e transita per la Valle di Susa: la meta è il ricongiungimento con la sorella a Parigi. Viene trovato il 26 gennaio 2022, travolto da un treno, lungo le rotaie che collegano Salbertrand a Oulx. Un ragazzo di 15 anni è dunque morto sotto un treno anche se poteva per legge valicare il confine e chiedere legittimamente protezione.

      Non sono la montagna e neppure i treni responsabili di queste morti, ma la frontiera con le sue ramificazioni che non si scollano dalla pelle di chi è catalogato migrante e da chi non può più tornare indietro e non ha terra che lo accolga. Nel 2021 possiamo indicare 15.000 presenze a Oulx; senza contare le persone che sono state registrate più volte dopo i respingimenti in frontiera, possiamo azzardare il passaggio di più di 10.000 persone. Da dicembre dello stesso anno al primo mese di gennaio del nuovo sicuramente i flussi sono diminuiti. I confini si sono moltiplicati anche in relazione a una congiuntura complessa. Le temperature artiche e le tensioni politiche nei Balcani, le difficoltà nell’utilizzo dei trasporti e le norme anticovid hanno sicuramente rallentato momentaneamente l’esodo. Soprattutto hanno reso più difficoltosi gli spostamenti per le famiglie numerose. Tuttavia, la tragedia attuale trova ragione nella militarizzazione alla frontiera e nella caccia all’uomo che si scatena ogni giorno sulle nostre montagne. Una farsa tragica che non ferma i passaggi, ma obbliga le persone in cammino a scegliere vie e strategie che mettono a rischio la vita. I più deboli vengono perlopiù respinti: famiglie numerose, donne gravide, nuclei parentali con bambini piccoli o con anziani. Non bisogna però dimenticare la criticità costantemente presente di un’urgenza vitale delle persone di passare nonostante problemi di salute e vulnerabilità. Nel 2021 abbiamo potuto documentare donne incinte al nono mese, persone con una sola gamba e con stampelle, anziani con problemi sanitari pregressi, donne con neonati che non hanno esitato a sfidare ogni rischio pur di continuare il cammino (si vedano i report precedenti di Medu sulla frontiera alpina del Nord Ovest). È inoltre opportuno ricordare le reiterate volte in cui persone, ancora in attesa di referti e di analisi mediche, sono scappate dagli ospedali pur di non prolungare le permanenze.

      In questo primo mese del 2022, coloro che sono morti di frontiera sono però giovani, che proprio in ragione della loro età e della loro prestanza fisica, credono di poter superare le prove più pericolose. Con il dispiegamento militare sul versante francese e la collaborazione tra polizie di frontiera (accordi europei e tra Italia-Francia), il risultato è stato quello di sponsorizzare l’attività degli smugglers (trafficanti), che in questi mesi sono pericolosamente ricomparsi o, addirittura, hanno occupato la scena. Mentre al rifugio “Fraternità Massi” di Oulx diminuivano le presenze, si consolidava la constatazione di nuove vie che si aprivano. Non si fermano i flussi che, come acque sorgive, quando incontrano sbarramento, deviano e trovano nuovi canali. Così la stazione di servizio di Salbertrand sull’autostrada, a sette chilometri da Oulx, è divenuta luogo per imbarcarsi sui Tir che lì sostano. Con ugual prospettiva, vie impervie sulle montagne a partire da Bardonecchia si sono riaperte. Anche la morte del giovane Ullah racconta come in un luogo geograficamente insensato per passare la frontiera si possa morire. Forse dopo un tentativo fallimentare di trovare un passaggio nel non lontano autogrill di Salbertrand, forse per evitare possibili controlli o forse addirittura nascosto sotto un treno merci, così come è uso fare nei Balcani, è maturato il tragico incidente. Di fatto ci tocca prendere atto che la militarizzazione e il moltiplicarsi degli sbarramenti hanno prodotto illegalità e morte.

      Il caso di Ullah apre un’altra questione, forse non nuova, ma di certo poco analizzata. Scappare dalla guerra gettata addosso e sopravvivere alla guerra che poi l’Europa continua ad effettuare contro chi fugge producono disastri a catena. Abbiamo documentato come con i flussi provenienti dai Balcani dal 2020 ad oggi si siano verificati cambiamenti significativi nella composizione di questi popoli in viaggio: famiglie allargate e presenza plurigenerazionale dei nuclei domestici. Il dato trascurato riguarda però la polverizzazione delle reti familiari e la loro disseminazione in tante nazioni. La disaggregazione di questi nuclei durante il cammino è un elemento significativo e aggiunge apprensione e urgenza nelle persone. Per essere più chiari vale la pena riportare un esempio tra i tanti: un padre con il figlio arriva a Oulx e poi dice a una volontaria “Ti affido il mio bambino di 14 anni affinché possa continuare il viaggio come minore, (consegnandosi alla gendarmerie, n.d.r.), e io ritorno in Grecia a prendere l’altra parte della mia famiglia”. Il viaggio può costare ai singoli e ancor di più alle famiglie cifre ingenti. Per esemplificare 8.000 euro per persona dalla Turchia all’Italia in barcone, 4.000 euro dalla Bosnia a Trieste, dai 20.000 ai 50.000 euro per famiglia dall’Afghanistan al nostro paese (la famiglia di Ullah aveva investito 6.000 euro, dato a reti di trafficanti, per permettere la partenza del figlio anche se ancora tanto giovane). Così alcuni passano prima, altri aspettano e confidano nell’aiuto che proviene da chi è arrivato. A volte sono le donne e i più vulnerabili ad aprire il cammino, altre volte può essere un minore che viene mandato fin dalla terra d’origine a cercare un altro orizzonte di vita. Sempre più spesso raccogliamo memoria di persone che arrivano e che hanno lasciato indietro parenti e non sempre il nucleo che approda alle Alpi è composto solo da consanguinei o affini, ma da aggregazioni solidali. Chi parte ha il peso e la responsabilità di una famiglia e non può fermarsi: è un’Odissea senza che si sappia se davvero esista in qualche luogo una Itaca. Così si muore, invisibili al mondo, sotto le ruote di un treno o scivolando in un lago montano.

      Molti sono i minori non accompagnati che scelgono di non presentarsi alla Paf (Polices aux frontieres) con la conseguente protezione umanitaria che a loro spetta per legge e decidono di affrontare la traversata in modo clandestino pur di non perdere l’ausilio dei compagni di viaggio. L’esperienza insegna che non si deve rimanere mai soli. Quando i minori vengono “catturati” in montagna dalla gendarmerie, il respingimento è prassi. Non v’è spazio né volontà per accertamenti. La situazione si complica ancora, quando, così come abbiamo potuto documentare, il minore, nel porto italiano di entrata, viene indotto dalla polizia con maniere minacciose, a sottoscrivere la sua maggiore età, nonostante i suoi documenti provino il contrario. Il caso è stato vagliato anche dallo sportello legale della diaconia valdese in Oulx.

      Non è da sottovalutare il problema dei green pass e delle vaccinazioni. Istituzioni ed anche ONG spesso non affrontano con abbastanza decisione la questione. La mancanza di attestati che dimostrino il vaccino rende complicati i trasferimenti e, soprattutto, induce le persone in cammino ad accelerare il passo, accettando qualsiasi costo o rischio, pur di non rischiare di rimanere intrappolati e bloccati in tempi di attesa, vuoti quanto indefiniti. Rispetto al problema sostanziale dell’essere senza vaccino, tristemente s’afferma la prassi delle vite diseguali, anche quando in gioco non c’è solo la salute del “migrante” ma quella della collettività. Non ci dimentichiamo quando l’Italia era in fascia rossa e ogni assembramento era vietato per legge mentre in un container presso la stazione di Oulx di circa 18 metri quadrati si accalcavano più di 30 persone. Nessuno ha mai pensato di intervenire o di trovare soluzioni. Poi le persone tornavano al rifugio con rischi di contagio per tutti. Oggi vaccini e documentazione relativa sono una necessità inderogabile. Già solo il fatto che si obblighi a livello nazionale alla vaccinazione e ce ne si dimentichi per coloro che sono in cammino è indicativo di quanto con la categoria migrante pensiamo a “non persone”.

      In questo specchio di frontiera –e la valle di Susa ripropone logiche che si moltiplicano dal Mediterraneo al deserto, dai Balcani alla Libia,-scopriamo quanto valgono gli enunciati sui diritti umani, qui a casa nostra. Il reiterarsi di casi tragici lascia senza parole: arriva notizia di altra persona morta carbonizzata a seguito di folgorazione sul tetto di un treno a Ventimiglia: un’altra vittima che si aggiunge a quelle che hanno insanguinato la frontiera del Nord Ovest (https://www.ansa.it/liguria/notizie/2022/02/01/migrante-muore-folgorato-su-un-treno-per-la-francia_a16cb44f-ba45-4e7f-bff0-811; https://www.avvenire.it/attualita/pagine/migrante-muore-folgorato-su-treno-per-la-francia ).

      Medici per i Diritti umani:

      Chiede alle istituzioni e a tutti gli attori presenti in frontiera di intervenire affinché vengano rispettati i diritti umani delle persone in transito e garantita la loro incolumità e sicurezza.

      Auspica una collaborazione allargata per il monitoraggio dei diritti umani in frontiera.

      Denuncia che la condizione dei minori non accompagnati è affrontata non in base alla legge e alle convenzioni internazionali europee ma spesso con prassi tollerate che le violano.

      Chiede che i vaccini e i green pass siano garantiti alle persone migranti. Le istituzioni e tutti gli attori presenti sul territorio devono occuparsi della vaccinazione. La mancanza di questa non deve essere un’altra frontiera.

      https://mediciperidirittiumani.org/si-ritorna-a-morire-alla-frontiera-nord-ovest-delle-alpi

    • Modane, migrante marocchino muore dopo la marcia notturna in montagna per passare il confine

      Aveva 31 anni. Pochi giorni prima un afgano di 15 anni è stato travolto e ucciso da un treno a Salbertrand

      Fathallah Balafhail aveva 31 anni, arrivava dal Marocco. Cercava una nuova vita in Francia ma è stato trovato morto il 2 gennaio al Barrage del Freney, non lontano da Modane. È’ il secondo migrante, nel giro di pochi giorni, trovato cadavere dopo che aveva tentato di attraversare il confine. Fathallah come Ullah Rezwan Sheyzad, che di anni ne aveva 15, veniva dall’Aghanistan ed è morto travolto da un treno a Salbertrand senza che nessuno se ne accorgesse.

       

      Fathallah veniva dal Marocco, «anche lui aveva tentato il giro più lungo passando dalla Turchia e aveva attraversato i Balcani», racconta Medu, l’organizzazione umanitaria Medici per i diritti umani che ha denunciato il fatto. Il migrante aveva vissuto per un certo tempo a Crescentino, in provincia di Vercelli. Aveva provato già due volte ad arrivare in Francia, sempre passando da Ventimiglia, ma era andata male. Stavolta aveva scelto la strada della Valle di Susa, quella dei passi di montagna.

      Ha scritto un messaggio alla famiglia prima di incamminarsi, alle 23.54 del 31 dicembre. Era alla stazione di Oulx. «Forse aveva trovato un passeur per arrivare dall’altro lato del confine con una macchina - ipotizza Medu - Il tentativo non è coronato da successo e forse matura lì la scelta del cammino in montagna, un percorso lungo e pericoloso, già sperimentato in anni passati e in seguito abbandonato per gli evidenti rischi».

       

      C’è un buco di tre giorni prima che il suo cadavere venga ritrovato. «Molti particolari rimangono oscuri e inquietanti. I parenti non hanno avuto accesso ai risultati dell’autopsia. Anche il rimpatrio in Marocco è avvenuto frettolosamente, senza attenzione alcuna alla sensibilità della famiglia e ai rituali funerari del paese d’origine. Si rimane invisibili anche dopo la morte», denuncia Medu.

       

      «Non sono la montagna e neppure i treni responsabili di queste morti, ma la frontiera con le sue ramificazioni che non si scollano dalla pelle di chi è catalogato migrante e da chi non può più tornare indietro e non ha terra che lo accolga», dicono i membri dell’organizzazione. Nel 2021 sono passate 15mila persone a Oulx.

       

      «Abbiamo potuto documentare donne incinte al nono mese, persone con una sola gamba e con stampelle, anziani con problemi sanitari pregressi, donne con neonati che non hanno esitato a sfidare ogni rischio pur di continuare il cammino - dicono da Medu - In questo primo mese del 2022, coloro che sono morti di frontiera sono però giovani che, proprio in ragione della loro età e della loro prestanza fisica, credono di poter superare le prove più pericolose».

      L’associazione denuncia anche la presenza di trafficanti. Qualche mese fa la Polizia stradale aveva scoperto alcuni passeur che caricavano i migranti nei rimorchi dei tir all’area di servizio di Salbertrand e Rivoli. «La militarizzazione e il moltiplicarsi degli sbarramenti hanno prodotto illegalità e morte», dice l’associazione. Sono cambiati i flussi e la composizione dei gruppi che passano dalla valle di Susa, «famiglie allargate e presenza plurigenerazionale dei nuclei domestici. Il dato trascurato riguarda però la polverizzazione delle reti familiari e la loro disseminazione in tante nazioni. Per essere più chiari vale la pena riportare un esempio tra i tanti: un padre con il figlio arriva a Oulx e poi dice a una volontaria ’Ti affido il mio bambino di 14 anni affinché possa continuare il viaggio come minore, e io ritorno in Grecia a prendere l’altra parte della mia famiglia’».

      https://torino.repubblica.it/cronaca/2022/02/04/news/modane_migrante_marocchino_trovato_morto_voleva_entrare_in_francia

  • Kabelbelegungen - die Kabel FAQ !
    http://netware-server.de/download/tipps/kabelfaq.htm

    Quelques explications sur des câbles et connecteurs toujours d’actualité, surtout quand on doit connecter des appareils d’avant l’ère sans fil ;-)
    #auf_deutsch , désolé.

    Die Kabel-FAQ
    Version: $Id: faqkabel.htm,v 1.60 2000/10/02 17:29:40 hifi Exp $

    Da immer wieder Fragen zum Thema „Wie muss ich ein Kabel fuer xxx loeten?“ auftauchen, habe ich hier diverse Steckerbelegungen, Kabeldaten, Signalbezeichnungen, -spannungen und -stromstaerken sowie spezielle Schaltungen zusammengestellt.
    Soweit moeglich jeweils mit der Bedeutung der Signale, denn es kann fuer spezielle Zwecke noetig sein, Bruecken einzubauen oder Pins „falsch“ zu beschalten, um einen bestimmten Effekt zu erzielen. Das Ganze traegt weniger den Charakter eines klassischen FAQ mit Frage: Antwort. Das ist aufgrund der Komplexitaet mancher Sachverhalte nicht zweckmaessig, es schadet nie, etwas rechts und links des eigentlichen Themas zu finden.

    https://en.wikipedia.org/wiki/Registered_jack

    about the registered jack (RJ) wiring standard

    #vidéo
    #Modem
    #Nullmodem #Drucker
    #Adapter #Pruefstecker
    #seriell
    #Parallel
    #Parallel-Rechner-Rechner
    #Twisted_Pair #Arcnet #Ethernet
    #SCSI
    #PC-Keyboard #Monitor #Maus #Joystick #USB
    #Midi
    #Audio
    #Telefon
    #ISDN
    #ADSL
    #Kabellaengen

  • La #laine, #recyclage et #revalorisation

    Malgré l’impact du transport sur le climat et des conditions d’élevage souvent peu respectueuses des animaux, la laine de mouton vient souvent des antipodes, Nouvelle-Zélande et Australie en tête. Pourtant, des alternatives émergent en Europe : certains remettent la production locale au goût du jour, d’autres mettent au point des #fibres innovantes.

    https://www.arte.tv/fr/videos/100300-070-A/arte-regards-la-laine-recyclage-et-revalorisation

    #mode

    Où on voit notamment deux jeunes femmes qui ont commencé à tisser de la laine de... #chien !

    Yes yes, voici leur site web :

    #Modus_intarsia

    modus intarsia produziert aus der Unterwolle von Hunden luxuriöse und besonders weiche Wollgarne und -produkte in Deutschland. So retten die Strickdesignerin und Nachhaltigkeitwisssenschaftlerin Ann Catrin Schönrock und die Textilingeneurin Franziska Uhl eine bisher ungenutzte Ressource, die bei der täglichen Fellpflege von Hunden anfällt, vor dem Mülleimer und erschaffen daraus umfassend nachhaltig produzierte und weltweit einzigartige, innovative Produkte.
    Neben der Bewahrung handwerklicher Traditionen durch die Herstellung von Handstrickgarnen in Deutschland, haben die Gründerinnen mit #Chiengora ® das weltweit erste industriell gesponnene Garn am Markt aus Hundewolle entwickelt. Und weitere Innovationen, wie Garne aus Katzenwolle oder Pferdehaar sind schon in der Entwicklung.

    Alle Projekte des Unternehmens generieren direkt Spenden für Tierschutzprojekte. Dies geschieht durch ein einzigartiges Crowdsourcing Netzwerk, in dem Hundebesitzer*innen, Züchter*innen und Hundesalons die bei der Fellpflege anfallende Unterwolle an den gemeinnützig gegründeten Verein Rohstoffe retten e.V. spenden. Die aus dem Verkauf der Rohwolle an das eigene Label oder Industriepartner*innen entstandene Erlöse werden an Tierschutzprojekte, wie den Birkenhof e.V. gespendet, der Hunden aus schlechten Haltungsbedingungen ein artgerechtes Leben ermöglicht.

    https://modusintarsia.com

    • I progetti solidali che danno nuova vita alla lana italiana

      Solo una piccola parte delle 9mila tonnellate prodotte ogni anno finisce sul mercato, il resto diventa rifiuto speciale. Dalle Marche al Piemonte, allevatori e tessitori hanno creato inedite alleanze per valorizzare risorse e territori

      Recuperano la lana dai pastori e la trasformano in gomitoli e vestiti per la vendita. In Italia sono numerosi i progetti avviati per tutelare il vello proveniente dalla tosa delle pecore, altrimenti destinato all’abbandono. L’utilizzo della lana appena tosata e sporca, infatti, è cambiato e la materia naturale non finisce più nei vestiti, sostituita dalle fibre sintetiche. È considerata un rifiuto speciale e, fatta eccezione per una parte che arriva sui mercati esteri, è destinata alla discarica. Nel peggiore dei casi, viene sotterrata e bruciata dagli allevatori che non sempre riescono a sostenere i costi dello smaltimento. Per valorizzare un materiale prezioso rendendolo un’opportunità, sono nate filiere in cui chi alleva lavora insieme a chi tesse.

      “Negli anni abbiamo registrato un’attenzione crescente verso il tema, una fioritura. Ci si è chiesti da dove provengono i vestiti che indossiamo, come sono lavorati e che impatto hanno sull’ambiente”, spiega ad Altreconomia Annalisa De Luca, tra le fondatrici dell’associazione Le feltraie, una delle prime realtà in Italia ad avere recuperato la materia prima acquistandola dai pastori toscani. Dopo la sua chiusura De Luca ha continuato con l’autoproduzione, appassionandosi alla filatura e tessitura. “I progetti sono variegati e vanno dall’hobby a forme più sistematiche. Chi recuperava la lana ha iniziato a coinvolgere le sarte e si è arrivati a organizzare corsi e laboratori”. Il sito Le lanaiole li presenta uno dopo l’altro, dal Piemonte alle Marche. “Anche se il tema è di nicchia, si è creata una base di persone appassionate che partecipa in modo attivo. Per questo, con il Coordinamento tessitori ed Eva Basile –designer, esperta di tessitura a mano e direttrice artistica del festival Feltrosa, manifestazione annuale che unisce i feltrai italiani-, nel 2020 e nel 2021 abbiamo organizzato una scuola estiva”. Uno degli argomenti affrontati è stato come realizzare un tessuto o un oggetto di feltro partendo dalla fibra grezza attraverso la filatura e la tintura.

      Secondo l’Istat in Italia ogni anno si producono circa 9mila tonnellate di lana sucida, proveniente dalla tosa non utilizzata di sette milioni di pecore, che non trova spazio nell’attuale mercato tessile nazionale. Se fosse utilizzata, come indicato in uno studio del Consiglio nazionale delle ricerche pubblicato nel 2016, si ricaverebbero oltre 5mila tonnellate di fibra e 15 milioni di metri quadrati di tessuto. La lana nostrana, sottolinea l’Istituto superiore per la protezione ambientale (Ispra) in una ricerca del 2018, non è di qualità elevata. Inoltre le sue fibre sono spesse e grossolane, inadatte ai macchinari usati nell’industria tessile.

      Secondo la normativa europea la lana diventa un rifiuto speciale se non è immessa in una filiera produttiva in quanto sottoprodotto di origine animale. Per salvarla dalla discarica, a Montefortino (FM) nelle Marche, la filatrice Giulia Alberti e l’allevatrice Silvia Bonomi sono andate direttamente dai pastori e hanno creato una filiera che va dalla raccolta alla vendita del prodotto finito. Avviato nell’aprile 2021, il progetto “Sibillana” coinvolge 14 pastori oltre a chi si occupa di pulirla e farne matasse. “Ci rivolgiamo solo a chi ha piccoli numeri. I nostri pastori non possiedono più di 40 capi di bestiame”, spiega Alberti. Con loro si stipula un accordo iniziale: la lana è pagata fino a un massimo di cinque euro al chilogrammo, in base alla sua qualità, e il prezzo di vendita copre sempre le spese di tosatura. “Vogliamo portare avanti un lavoro di sensibilizzazione: spingere i pastori a porre attenzione alla qualità della lana che sarà poi pagata a un prezzo più alto”. In Abruzzo Valeria Gallese è stata una delle prime a farlo.

      Nel 2015 ha ideato il progetto “AquiLana”. Raccoglie la lana dai pastori del Parco nazionale del Gran Sasso: la materia prima è poi spedita al Nord e filata nel Biella The Wool Company, consorzio avviato con lo scopo di creare una rete nazionale per la gestione della lana in Italia cui aderiscono 600 allevatori. Una volta lavata, la lana torna in Abruzzo dove è tinta usando materiali naturali, venduta ad aziende tessili e in una bottega a Santo Stefano di Sessanio. Quando AquiLana era nelle sue fasi iniziali, la lana tessuta era stata pari a 50 chilogrammi. Nel 2021 sono stati 6.500.

      In provincia di Parma il recupero della lana è servito per rafforzare la comunità. “Lana di montagna alta Val Taro” riunisce raccoglitrici costituitesi come associazione: acquistano la lana dai pastori locali, poi pulita in uno stabilimento in Toscana che la rende un filato. Tornata in valle, tinta con erbe naturali e sottoprodotti dell’orto, è utilizzata per gomitoli e indumenti venduti nei mercatini. “Ci scambiamo suggerimenti e consigli. I nostri numeri sono piccoli ma le persone apprezzano la bellezza del progetto in sé -dice Elena Gabbi, pastora che fa parte del progetto-.Lavoriamo anche insieme all’associazione Io non ho paura del lupo, che si occupa di alimentare un dibattito sull’animale e su come affrontarlo tutelandolo. Abbiamo creato un progetto che rinsalda i legami”.

      https://altreconomia.it/i-progetti-solidali-che-danno-nuova-vita-alla-lana-italiana

  • ‘World of Warcraft’ Update Covers Up Obscure, Horny Paintings
    https://www.vice.com/en/article/4av95p/world-of-warcraft-update-covers-up-obscure-horny-paintings

    Like many video games, massively multiplayer online role playing game World of Warcraft features in-game paintings and artwork in order to build out the flavor of the game’s world. Some of them are references to real world paintings, some are landscapes, some are still lives. Additionally, some of them are horny, like a portrait of a woman wearing a really strange dress with a plunging neckline.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #activision_blizzard #jeu_video_world_of_waracraft #jeu_vidéo_wow #femme #représentation #sexisme #modification #mise_à_jour #harcèlement #jeu_vidéo_overwatch #jesse_mccree #victoria_s_secrets #syndicalisme

  • Borders bill, a new plan

    https://twitter.com/pritipatel/status/1468619562027528192

    #nouvelle_loi #loi #UK #Angleterre #asile #migrations #réfugiés #Priti_Patel #plan #nouveau_plan

    –-> un copier-coller du #modèle_australien

    –-

    Autour des « #offshore centres », voire :
    https://seenthis.net/messages/938880
    –-> et une métaliste sur les différentes tentatives de différentes pays européens d’#externalisation non seulement des contrôles frontaliers, mais aussi de la #procédure_d'asile dans des #pays_tiers :
    https://seenthis.net/messages/900122

    ping @karine4 @isskein

  • Le gouvernement américain réclame sa part dans l’invention du vaccin de Moderna
    https://www.rts.ch/info/sciences-tech/12644605-le-gouvernement-americain-reclame-sa-part-dans-linvention-du-vaccin-de-

    Aux Etats-Unis, Moderna et les Instituts nationaux de la santé (NIH) se disputent la paternité de la découverte du vaccin à ARN messager contre le Covid-19. Estimant avoir développé la solution tout seul, le laboratoire a exclu du brevet des chercheurs de ces instituts ayant collaboré à sa mise au point.
    Qui a vraiment inventé le vaccin contre le Covid-19 ? Si Moderna et Pfizer ont été les premières sociétés à mettre sur le marché ceux à ARN messager, c’est aussi grâce à la recherche universitaire et à des milliards de dollars de fonds publics, notamment américains, qu’elles ont pu courir le sprint contre la pandémie.


    La firme pharmaceutique de Boston, encore inconnue au bataillon il y a deux ans, a reçu près de 10 milliards d’aides publiques pour développer et tester le vaccin, puis en distribuer 500 millions de doses aux Etats-Unis.

    Mais l’histoire de ce partenariat public-privé n’est pas aussi belle qu’il n’y paraît. Aujourd’hui, Moderna et les NIH (National Institutes of Health, les Instituts nationaux de la santé américains) sont à couteaux tirés. Tous deux se disputent la paternité d’un élément central du vaccin. Au vu des sommes d’argent à la clé, les enjeux dépassent la simple querelle de paternité. Moderna s’attend ainsi à des revenus du vaccin qui avoisinent les 18 milliards de dollars cette année. Il y a aussi, au-delà des gros sous, la question du contrôle de la production et de la distribution future du vaccin.

    Une « trahison » de Moderna
    Les chercheurs de Moderna et les Instituts nationaux de la santé collaboraient autour des vaccins contre les divers coronavirus depuis plusieurs années déjà, notamment sur l’identification des séquences génétiques qui permettent ensuite de produire une réponse immunitaire.

    « Ils ont collaboré pendant quatre ans. Puis ils ont travaillé indépendamment, au tout début de la pandémie, pour trouver la solution technologique » adaptée à la lutte contre le SRAS-CoV-2, le coronavirus responsable de la crise actuelle, a détaillé le professeur à l’EPFL en économie de l’innovation et propriété intellectuelle Gaetan de Rassenfosse lundi dans l’émission Tout un monde de la RTS. C’est donc après l’émergence de la pandémie que la dispute a surgi.

    Tout en reconnaissant que les NIH l’avaient beaucoup aidée, Moderna a estimé dans un communiqué avoir trouvé indépendamment la solution pour contrer le Covid et exclu les chercheurs des Instituts nationaux de la santé de ce brevet. Un geste très moyennement apprécié par les NIH, et que de nombreux chercheurs universitaires considèrent d’ailleurs comme une trahison.

    Le gouvernement américain frustré
    Or, être intégré au brevet « leur donnerait très probablement une part sur le profit », explique Gaetan de Rassenfosse. « Et ça leur donne surtout le droit d’octroyer des licences du vaccin en question à d’autres producteurs ». De quoi permettre aux pouvoirs publics de reprendre un peu le contrôle de ce marché.

    Le gouvernement de Joe Biden a d’ailleurs montré des frustrations vis-à-vis des pharmas, notamment à propos de leur manque de transparence sur les prix, ou encore à cause de leur refus de transférer leur technologie vers d’autres producteurs. Joe Biden avait même évoqué vouloir suspendre temporairement les brevets sur les vaccins contre le Covid-19, un enjeu important.

    Affaire portée devant la justice
    « Si les Etats-Unis étaient considérés comme les co-inventeurs d’un élément central du vaccin, le reste du monde aurait plus de chances de l’obtenir », avance le directeur de l’ONG Public Citizen à Washington Peter Maybarduck. Il ne veut pas non plus laisser les entreprises privées écrire l’histoire toutes seules. « Il s’agit d’un des vaccins les plus efficaces contre le Covid-19. C’est donc important de savoir qui l’a inventé, quelle est son histoire, ce que l’on dira dans le futur ».

    Public Citizen a donc pressé les NIH de définir leur position. Ils ont finalement décidé la semaine dernière de porter l’affaire devant les tribunaux, quoi qu’il en coûte. La procédure risque de coûter très cher, sans garantie de succès, même si les NIH ont le gouvernement derrière eux.

    Sujet radio : Francesca Argiroffo
Adaptation web : Vincent Cherpillod

    #moderna #crise_sanitaire #sante #santé #coronavirus #sars-cov-2 #variant #covid #pandémie #vaccins #santé_publique #fric #argent #dividendes

  • Why Europe is a great place for digital nomads | The Economist
    https://www.economist.com/europe/2021/10/02/why-europe-is-a-great-place-for-digital-nomads

    Why Europe is a great place for digital nomads
    A varied continent with good WiFi and few internal borders
    AFTER MONTHS in lockdown in grey Berlin, Chris Bloom, a personal coach and blogger, planned his escape. Risking the ire of jealous Instagram followers, he took a covid-19 test, flew to Lisbon and settled into the Outsite co-working and co-living space, a pleasant blue-and-white tiled property with the essentials—stable internet and a coffee shop. Mr Bloom is part of a growing brigade of digital nomads in Europe, who work remotely while satisfying their wanderlust. This kind of itinerant lifestyle is as old as laptops and free internet. But covid-19 has given it a boost. A game of lockdown arbitrage began earlier this year as border controls eased and people fled congested cities like Berlin and London. Some headed for other cities, such as Lisbon and Madrid, which offered sunshine and looser lockdown rules. Others chose remote spots on the Mediterranean and in the Alps. Now covid-19 restrictions are easing but the trend continues as many Europeans reject a traditional office routine after a year and a half of remote work.

    #Covid-19#migration#migrant#europe#sante#digitalnomade#frontiere#confinement#modedevie#technologie#travail

  • Au Chili, des montagnes de vêtements usagés en plein désert
    https://www.novethic.fr/actualite/environnement/dechets/isr-rse/jeudi-photo-au-chili-des-montagnes-de-vetements-usages-en-plein-desert-1503

    Des dunes de vêtements en plein désert. Cette photo prise fin septembre par le photographe de l’Agence France Presse (AFP) Martin Bernetti a des allures surréalistes. Elle montre pourtant une réalité bien palpable, celle d’une décharge sauvage de textile située dans le désert d’Atacama près la commune d’Alto Hospicio au nord du Chili.

    Plusieurs décharges comme celle-ci existent dans la région, comptabilisant environ 39 000 tonnes de déchets. Le Chili s’est spécialisé depuis une quarantaine d’années dans le commerce de vêtements de seconde main. Mais la quantité croissante d’habits à bas coût provenant d’Asie engorge son circuit de revente et nourrit de manière exponentielle ces montagnes de textile.

    « Le problème est que ces vêtements ne sont pas biodégradables et contiennent des produits chimiques, ils ne sont donc pas acceptés dans les décharges municipales », explique Franklin Zepeda, qui a fondé en 2018 EcoFibra, une entreprise de recyclage en mesure de traiter jusqu’à 40 tonnes de vêtements par mois. Un effort bienvenu mais largement insuffisant pour résoudre l’ensemble du problème.

  • Les villes doivent être totalement dépourvues de voitures pour rester vivables
    http://carfree.fr/index.php/2021/10/26/les-villes-doivent-etre-totalement-depourvues-de-voitures-pour-rester-vivabl

    Une équipe d’experts dirigée par des chercheurs de l’University College London (UCL) a créé un modèle mathématique pour l’utilisation des voitures dans une #ville, qui a démontré que les villes Lire la suite...

    #Vie_sans_voiture #Ville_sans_voitures #angleterre #congestion #londres #péage_urbain #péages #recherche #science #trafic

  • #Liberté_académique et #justice_sociale

    On assiste en #Amérique_du_Nord à une recomposition du paysage académique, qui met l’exercice des #libertés_universitaires aux prises avec des questions de justice sociale, liées, mais pas seulement, au militantisme « #woke », souvent mal compris. Publication du premier volet d’un entretien au long cours avec #Isabelle_Arseneau et #Arnaud_Bernadet, professeurs à l’Université McGill de Montréal.

    Alors que se multiplient en France les prises de position sur les #libertés_académiques – voir par exemple cette « défense et illustration » -, un débat à la fois vif et très nourri se développe au #Canada depuis plus d’un an, après que des universitaires ont dû faire face à des plaintes pour #racisme, parfois à des suspensions de leur contrat, en raison de l’utilisation pédagogique qu’ils avaient faite des mots « #nègre » ou « #sauvages ». Significativement, un sondage récent auprès des professeurs d’université du Québec indique qu’une majorité d’entre eux pratiquent diverses formes d’#autocensure. C’est dans ce contexte qu’Isabelle Arseneau et Arnaud Bernadet, professeurs au Département des littératures de langue française, de traduction et de création de l’Université McGill de Montréal, ont été conduits à intervenir activement dans le débat, au sein de leur #université, mais aussi par des prises de position publiques dans la presse et surtout par la rédaction d’un mémoire, solidement argumenté et très remarqué, qui a été soumis et présenté devant la Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique dans le milieu universitaire.

    Initiée en février 2021 par le premier ministre du Québec, François Legault, cette commission a auditionné de nombreux acteurs, dont les contributions sont souvent de grande qualité. On peut télécharger ici le mémoire des deux universitaires et suivre leur audition grâce à ce lien (début à 5 :15 :00). La lecture du présent entretien peut éclairer et compléter aussi bien le mémoire que l’audition. En raison de sa longueur, je publie cet entretien en deux parties. La première partie est consacrée aux exemples concrets de remise en cause de la liberté de citer certains mots en contexte universitaire et traite des conséquences de ces pratiques sur les libertés académiques. Cette première partie intègre aussi une analyse critique de la tribune parue ce jour dans Le Devoir, co-signée par Blanquer et le ministre de l’Education du Québec, lesquels s’attaquent ensemble et de front à la cancel culture. La seconde partie, à paraître le vendredi 29 octobre, portera plus précisément sur le mouvement « woke », ses origines et ses implications politiques, mais aussi sur les rapports entre science et société. Je tiens à remercier chaleureusement Isabelle Arseneau et Arnaud Bernadet d’avoir accepté de répondre à mes questions et d’avoir pris le temps de construire des réponses précises et argumentées, dont la valeur tient tout autant à la prise critique de ces deux universitaires qu’aux disciplines qui sont les leurs et qui informent leur réflexion. Ils coordonnent actuellement un volume collectif interdisciplinaire, Libertés universitaires : un an de débat au Québec (2020-2021), à paraître prochainement.

    Entretien, première partie

    1. Pourriez-vous exposer le plus factuellement possible ce qui s’est passé au mois de septembre 2020 à l’université d’Ottawa et à l’université McGill de Montréal ?

    Isabelle Arseneau. À l’automne 2020 éclatait à l’Université d’Ottawa une affaire qui a passionné le Québec et a connu d’importantes suites politiques : à l’occasion d’une séance d’enseignement virtuel sur la représentation des identités en art, une chargée de cours, #Verushka_Lieutenant-Duval, expliquait à ses étudiants comment l’injure « #nigger » a été réutilisée par les communautés afro-américaines comme marqueur subversif dans les années 1960. Parce qu’elle a mentionné le mot lui-même en classe, l’enseignante est devenue aussitôt la cible de #plaintes pour racisme et, au terme d’une cabale dans les #réseaux_sociaux, elle a été suspendue temporairement par son administration. Au même moment, des incidents à peu près analogues se produisaient au Département des littératures de langue française, de traduction et de création de l’Université McGill, où nous sommes tous les deux professeurs. Dans un cours d’introduction à la littérature québécoise, une chargée de cours a mis à l’étude Forestiers et voyageurs de #Joseph-Charles_Taché, un recueil de contes folkloriques paru en 1863 et qui relate les aventures d’un « Père Michel » qui arpente le pays et documente ses « mœurs et légendes ». Des étudiants interrompent la séance d’enseignement virtuel et reprochent à l’enseignante de leur avoir fait lire sans avertissement préalable une œuvre contenant les mots « Nègres » et « Sauvages ». Quelques jours plus tard, des plaintes pour racisme sont déposées contre elle. Le dossier est alors immédiatement pris en charge par la Faculté des Arts, qui lui suggère de s’excuser auprès de sa classe et d’adapter son enseignement aux étudiants que pourrait offenser la lecture des six autres classiques de la littérature québécoise prévus au syllabus (dont L’Hiver de force de Réjean Ducharme et Les Fous de Bassan d’Anne Hébert). Parmi les mesures d’accommodement, on lui conseille de fournir des « avertissements de contenu » (« #trigger_warnings ») pour chacune des œuvres à l’étude ; de se garder de prononcer à voix haute les mots jugés sensibles et de leur préférer des expressions ou des lettres de remplacement (« n », « s », « mot en n » « mot en s »). Trois mois plus tard, nous apprendrons grâce au travail d’enquête de la journaliste Isabelle Hachey (1) que les plaignants ont pu obtenir, après la date limite d’abandon, un remboursement de leurs frais de scolarité et les trois crédits associés à ce cours qu’ils n’ont cependant jamais suivi et pour lequel ils n’ont validé qu’une partie du travail.

    Lorsque j’ai imaginé notre doctorante en train de caviarder ses notes de cours et ses présentations Powerpoint, ça a fait tilt. Un an plus tôt, je travaillais à la Public Library de New York sur un manuscrit du XIIIe siècle dont la première image avait été grattée par un lecteur ou un possesseur offensé par le couple enlacé qu’elle donnait jusque-là à voir. La superposition de ces gestes de censure posés à plusieurs siècles d’intervalle témoignait d’un recul de la liberté universitaire que j’associais alors plus spontanément aux campus américains, sans pour autant nous imaginer à l’abri de cette vague venue du sud (2). Devant de tels dérapages, mon collègue Arnaud Bernadet et moi avons communiqué avec tous les étages de la hiérarchie mcgilloise. Las de nous heurter à des fins de non-recevoir, nous avons cosigné une série de trois lettres dans lesquelles nous avons dénoncé la gestion clientéliste de notre université (3). Malgré nos sorties répétées dans les médias traditionnels, McGill est demeurée silencieuse et elle l’est encore à ce jour.

    2. Pour être concret, qu’est-ce qui fait que l’emploi du mot « nègre » ou « sauvages » dans un cours est légitime ?

    Isabelle Arseneau. Vous évoquez l’emploi d’un mot dans un cadre pédagogique et il me semble que toute la question est là, dans le terme « emploi ». À première vue, le contexte de l’énonciation didactique ne se distingue pas des autres interactions sociales et ne justifie pas qu’on puisse déroger aux tabous linguistiques. Or il se joue dans la salle de classe autre chose que dans la conversation ordinaire : lorsque nous enseignons, nous n’employons pas les mots tabous, nous les citons, un peu comme s’il y avait entre nous et les textes lus ou la matière enseignée des guillemets. C’est de cette distinction capitale qu’ont voulu rendre compte les sciences du langage en opposant le signe en usage et le signe en mention. Citer le titre Nègres blancs d’Amérique ou le terme « Sauvages » dans Forestiers et Voyageurs ne revient pas à utiliser ces mêmes termes. De la même façon, il y a une différence entre traiter quelqu’un de « nègre » dans un bus et relever les occurrences du terme dans une archive, une traite commerciale de l’Ancien Régime ou un texte littéraire, même contemporain. Dans le premier cas, il s’agit d’un mot en usage, qui relève, à n’en pas douter, d’un discours violemment haineux et raciste ; dans l’autre, on n’emploie pas mais on mentionne des emplois, ce qui est différent. Bien plus, le mot indexe ici des représentations socialement et historiquement situées, que le professeur a la tâche de restituer (pour peu qu’on lui fournisse les conditions pour le faire). Si cette distinction entre l’usage et la mention s’applique à n’importe quel contexte d’énonciation, il va de soi qu’elle est très fréquente et pleinement justifiée — « légitime », oui — en contexte pédagogique. Il ne s’agit donc bien évidemment pas de remettre en circulation — en usage — des mots chargés de haine mais de pouvoir continuer à mentionner tous les mots, même les plus délicats, dans le contexte d’un exercice bien balisé, l’enseignement, dont on semble oublier qu’il suppose d’emblée un certain registre de langue.

    3. Ce qui étonne à partir de ces exemples – et il y en a d’autres du même type -, c’est que l’administration et la direction des universités soutiennent les demandes des étudiants, condamnent les enseignants et vont selon vous jusqu’à enfreindre des règles élémentaires de déontologie et d’éthique. Comment l’expliquez-vous ? L’institution universitaire a-t-elle renoncé à défendre ses personnels ?

    Arnaud Bernadet. Il faut naturellement conserver à l’esprit ici ce qui sépare les universités nord-américaines des institutions françaises. On soulignera deux différences majeures. D’une part, elles sont acquises depuis longtemps au principe d’autonomie. Elles se gèrent elles-mêmes, tout en restant imputables devant l’État, notamment au plan financier. Soulignons par ailleurs qu’au Canada les questions éducatives relèvent avant tout des compétences des provinces et non du pouvoir fédéral. D’autre part, ces universités obéissent à un modèle entrepreneurial. Encore convient-il là encore d’introduire des nuances assez fortes, notamment en ce qui concerne le réseau québécois, très hétérogène. Pour simplifier à l’extrême, les universités francophones sont plus proches du modèle européen, tandis que les universités anglophones, répliques immédiates de leurs voisines états-uniennes, semblent davantage inféodées aux pratiques néo-libérales.

    Quoi qu’il en soit, la situation décrite n’a rien d’inédit. Ce qui s’est passé à l’Université d’Ottawa ou à l’Université McGill s’observe depuis une dizaine d’années aux États-Unis. La question a été très bien documentée, au tournant de l’année 2014 sous la forme d’articles puis de livres, par deux sociologues, Bradley Campbell et Jason Manning (The Rise of Victimhood Culture) et deux psychologues, Jonathan Haidt et Greg Lukianoff (The Coddling of the American Mind). Au reste, on ne compte plus sur les campus, et parmi les plus progressistes, ceux de l’Ouest (Oregon, État de Washington, Californie) ou de la Nouvelle-Angleterre en particulier, les demandes de censure, les techniques de deplatforming ou de “désinvitation”, les calomnies sur les médias sociaux, les démissions du personnel - des phénomènes qu’on observe également dans d’autres milieux (culture, médias, politique). En mai dernier, Rima Azar, professeure en psychologie de la santé, a été suspendue par l’Université Mount Allison du Nouveau-Brunswick, pour avoir qualifié sur son blog Black Lives Matter d’organisation radicale…

    Il y a sans doute plusieurs raisons à l’attitude des administrateurs. En tout premier lieu : un modèle néo-libéral très avancé de l’enseignement et de la recherche, et ce qui lui est corrélé, une philosophie managériale orientée vers un consumérisme éducatif. Une autre explication serait la manière dont ces mêmes universités réagissent à la mouvance appelée “woke”. Le terme est sujet à de nombreux malentendus. Il fait désormais partie de l’arsenal polémique au même titre que “réac” ou “facho”. Intégré en 2017 dans l’Oxford English Dictionary, il a été à la même date récupéré et instrumentalisé par les droites conservatrices ou identitaires. Mais pas seulement : il a pu être ciblé par les gauches traditionnelles (marxistes, libertaires, sociales-démocrates) qui perçoivent dans l’émergence de ce nouveau courant un risque de déclassement. Pour ce qui regarde notre propos, l’illusion qu’il importe de dissiper, ce serait de ne le comprendre qu’à l’aune du militantisme et des associations, sur une base strictement horizontale. Ce qui n’enlève rien à la nécessité de leurs combats, et des causes qu’ils embrassent. Loin s’en faut. Mais justement, il s’agit avec le “wokism” et la “wokeness” d’un phénomène nettement plus composite qui, à ce titre, déborde ses origines liées aux luttes des communautés noires contre l’oppression qu’elles subissaient ou subissent encore. Ce phénomène, plus large mais absolument cohérent, n’est pas étranger à la sociologie élitaire des universités nord-américaines, on y reviendra dans la deuxième partie de cet entretien. Car ni l’un ni l’autre ne se sont si simplement inventés dans la rue. Leur univers est aussi la salle de classe.

    4. Au regard des événements dans ces deux universités, quelle analyse faites-vous de l’évolution des libertés académiques au Québec ?

    Arnaud Bernadet. Au moment où éclatait ce qu’il est convenu d’appeler désormais “l’affaire Verushka Lieutenant-Duval”, le Québec cultivait cette douce illusion de se croire à l’abri de ce genre d’événements. Mais les idées et les pratiques ne s’arrêtent pas à la frontière avec le Canada anglais ou avec les États-Unis. Le cas de censure survenu à McGill (et des incidents d’autre nature se sont produits dans cet établissement) a relocalisé la question en plein cœur de Montréal, et a montré combien les cultures et les sociétés sont poreuses les unes vis-à-vis des autres. Comme dans nombre de démocraties, on assiste au Québec à un recul des libertés publiques, la liberté académique étant l’une d’entre elles au même titre que la liberté d’expression. Encore faut-il nuancer, car le ministère de l’enseignement supérieur a su anticiper les problèmes. En septembre 2020, le scientifique en chef Rémi Quirion a remis un rapport qui portait plus largement sur L’université québécoise du futur, son évolution, les défis auxquels elle fait face, etc. Or en plus de formuler des recommandations, il y observe une “précarisation significative” de la liberté académique, un “accroissement de la rectitude politique”, imputée aux attentes ou aux convictions de “groupes particuliers”, agissant au nom de “valeurs extra-universitaires”, et pour finir, l’absence de “protection législative à large portée” entourant la liberté académique au Québec, une carence qui remonte à la Révolution tranquille. En février 2021, le premier ministre François Legault annonçait la création d’une Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique en contexte universitaire. Cette commission qui n’a pas fini de siéger a rendu une partie de ses résultats, notamment des sondages effectués auprès du corps professoral (ce qui inclut les chargés de cours) : 60 % d’entre eux affirment avoir évité d’utiliser certains mots, 35 % disent avoir même recouru à l’autocensure en sabrant certains sujets de cours. La recherche est également affectée. Ce tableau n’est guère rassurant, mais il répond à celles et ceux qui, depuis des mois, à commencer dans le milieu enseignant lui-même, doublent la censure par le déni et préfèrent ignorer les faits. À l’évidence, des mesures s’imposent aujourd’hui, proportionnées au diagnostic rendu.

    5. La liberté académique est habituellement conçue comme celle des universitaires, des enseignants-chercheurs, pour reprendre la catégorie administrative en usage en France. Vous l’étendez dans votre mémoire à l’ensemble de la communauté universitaire, en particulier aux jeunes chercheurs, mais aussi aux personnels administratifs et aux étudiants ? Pourriez-vous éclairer ce point ?

    Arnaud Bernadet. Ce qui est en jeu ici n’est autre que l’extension et les applications du concept de liberté académique. Bien sûr, un étudiant ne jouit pas des mêmes dispositions qu’un professeur, par exemple le droit à exercer l’évaluation de ses propres camarades de classe. Mais a priori nous considérons que n’importe quel membre de la communauté universitaire est titulaire de la liberté académique. Celle-ci n’a pas été inventée pour donner aux enseignants et chercheurs quelque “pouvoir” irréaliste et exorbitant, mais pour satisfaire aux deux missions fondamentales que leur a confiées la société : assurer la formation des esprits par l’avancement des connaissances. En ce domaine, l’écart est-il significatif entre le choix d’un thème ou d’un corpus par un professeur, et un exposé oral préparé par un étudiant ? Dans chaque cas, on présumera que l’accès aux sources, la production des connaissances, le recours à l’argumentation y poursuivent les mêmes objectifs de vérité. De même, les administrateurs, et notamment les plus haut placés, doivent pouvoir bénéficier de la liberté académique, dans l’éventualité où elle entrerait en conflit avec des objectifs de gouvernance, qui se révéleraient contraires à ce qu’ils estimeraient être les valeurs universitaires fondamentales.

    6. Entre ce que certains considèrent comme des recherches “militantes” et les orientations néolibérales et managériales du gouvernement des universités, qu’est-ce qui vous semble être le plus grand danger pour les libertés académiques ?

    Arnaud Bernadet. Ce sont des préoccupations d’ordre différent à première vue. Les unes semblent opérer à l’interne, en raison de l’évolution des disciplines. Les autres paraissent être plutôt impulsées à l’externe, en vertu d’une approche productiviste des universités. Toutes montrent que le monde de l’enseignement et de la recherche est soumis à de multiples pressions. Aussi surprenant que cela paraisse, il n’est pas exclu que ces deux aspects se rejoignent et se complètent. Dans un article récent de The Chronicle of Higher Education (03.10.2021), Justin Sider (professeur de littérature anglaise à l’Université d’Oklahoma) a bien montré que les préoccupations en matière de justice sociale sont en train de changer la nature même des enseignements. Loin de la vision désintéressée des savoirs, ceux-ci serviraient dorénavant les étudiants à leur entrée dans la vie active, pour changer l’ordre des choses, combattre les inégalités, etc. C’est une réponse à la conception utilitariste de l’université, imposée depuis plusieurs décennies par le modèle néolibéral. Et c’est ce qu’ont fort bien compris certains administrateurs qui, une main sur le cœur, l’autre près du portefeuille, aimeraient donc vendre désormais à leurs “clients” des programmes ou de nouveaux curricula portant sur la justice sociale.

    7. La défense des libertés académiques, en l’occurrence la liberté pédagogique et la liberté de recherche d’utiliser tous les mots comme objet de savoir, est-elle absolue, inconditionnelle ? Ne risque-t-elle pas de renforcer un effet d’exclusion pour les minorités ?

    Isabelle Arseneau. Elle est plutôt à notre avis non-négociable (aucun principe n’est absolu). Mais pour cela, il est impératif de désamalgamer des dossiers bien distincts : d’une part, le travail de terrain qu’il faut encore mener en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (qu’il est désormais commun de désigner par l’acronyme « ÉDI ») ; d’autre part, les fondements de la mission universitaire, c’est-à-dire créer et transmettre des savoirs. Les faux parallèles que l’on trace entre la liberté académique et les « ÉDI » desservent autant la première que les secondes et on remarque une nette tendance chez certaines universités plus clairement néolibérales à utiliser la liberté académique comme un vulgaire pansement pour régler des dossiers sur lesquels elles accusent parfois de regrettables retards. Bien ironiquement, ce militantisme d’apparat ne fait nullement progresser les différentes causes auxquelles il s’associe et a parfois l’effet inverse. Revenons à l’exemple concret qui s’est produit chez nous : recommander à une enseignante de s’excuser pour avoir prononcé et fait lire un mot jugé sensible et aller jusqu’à rembourser leurs frais de scolarité à des étudiants heurtés, voilà des gestes « spectaculaires » qui fleurent bon le langage de l’inclusion mais qui transpirent le clientélisme (« Satisfaction garantie ou argent remis ! »). Car une fois que l’on a censuré un mot, caviardé un passage, proscrit l’étude d’une œuvre, qu’a-t-on fait, vraiment, pour l’équité salariale hommes-femmes ; pour l’inclusion des minorités toujours aussi invisibles sur notre campus ; pour la diversification (culturelle, certes, mais également économique) des corps enseignant et étudiant, etc. ? Rien. Les accommodements offerts aux plaignants sont d’ailleurs loin d’avoir créé plus d’équité ; ils ont au contraire engendré une série d’inégalités : entre les étudiants d’abord, qui n’ont pas eu droit au même traitement dans le contexte difficile de la pandémie et de l’enseignement à distance ; entre les chargés de cours ensuite, qui n’ont pas eu à faire une même quantité de travail pour un même salaire ; et, enfin, entre les universités, toutes soumises au même système de financement public, dont le calcul repose en bonne partie sur l’unité-crédit. Les salles de classe ont bon dos : elles sont devenues les voies de sortie faciles pour des institutions qui s’achètent grâce à elles un vernis de justice sociale qui tarde à se traduire par des avancées concrètes sur les campus. Confondre les dossiers ne servira personne.

    8. Reste que ce qui est perçu par des acteurs de la défense de droits des minorités comme l’exercice d’une liberté d’expression est vécu et analysé par d’autres acteurs comme une atteinte à la liberté académique, en particulier la liberté pédagogique. La situation n’est-elle pas une impasse propre à aviver les tensions et créer une polémique permanente ? Comment sortir de cette impasse ?

    Isabelle Arseneau. En effet, on peut vite avoir l’impression d’un cul-de-sac ou d’un cercle vicieux difficile à briser, surtout au vu de la polarisation actuelle des discours, qu’aggravent les médias sociaux. Dans ce brouhaha de paroles et de réactions à vif, je ne sais pas si on s’entend et encore moins si on s’écoute. Chose certaine, il faudra dans un premier temps tenter de régler les problèmes qui atteignent aujourd’hui les établissements postsecondaires depuis l’intérieur de leurs murs. En effet, la responsabilité me semble revenir d’abord aux dirigeants de nos institutions, à la condition de réorienter les efforts vers les bonnes cibles et, comme je le disais à l’instant, de distinguer les dossiers. À partir du moment où l’on cessera de confondre les dossiers et où l’on résistera aux raccourcis faciles et tendancieux, des chantiers distincts s’ouvriront naturellement.

    Du côté des dossiers liés à l’équité et à la diversité, il me semble nécessaire de mener de vrais travaux d’enquête et d’analyse de terrain et de formuler des propositions concrètes qui s’appuient sur des données plutôt que des mesures cosmétiques qui suivent l’air du temps (il ne suffit pas, comme on a pu le faire chez nous, de recommander la censure d’un mot, de retirer une statue ou de renommer une équipe de football). Plus on tardera à s’y mettre vraiment et à joindre le geste à la parole, plus longtemps on échouera à réunir les conditions nécessaires au dialogue serein et décomplexé. Il nous reste d’ailleurs à débusquer les taches aveugles, par exemple celles liées à la diversité économique de nos campus (ou son absence), une donnée trop souvent exclue de la réflexion, qui préfère se fixer sur la seule dimension identitaire. Du côté de la liberté universitaire, il est nécessaire de la réaffirmer d’abord et de la protéger ensuite, en reprenant le travail depuis le début s’il le faut. C’est ce qu’a fait à date récente la Mission nommée par le recteur de l’Université de Montréal, Daniel Jutras. Les travaux de ce comité ont abouti à l’élaboration d’un énoncé de principes fort habile. Ce dernier, qui a été adopté à l’unanimité par l’assemblée universitaire, distingue très nettement les dossiers et les contextes : en même temps qu’il déclare qu’« aucun mot, aucun concept, aucune image, aucune œuvre ne sauraient être exclus a priori du débat et de l’examen critique dans le cadre de l’enseignement et de la recherche universitaires », le libellé rappelle que l’université « condamne les propos haineux et qu’en aucun cas, une personne tenant de tels propos ne peut se retrancher derrière ses libertés universitaires ou, de façon générale, sa liberté d’expression » (4). Il est également urgent de mettre en œuvre une pédagogie ciblant expressément les libertés publiques, la liberté académique et la liberté d’expression. C’est d’ailleurs une carence mise au jour par l’enquête de la Commission, qui révèle que 58% des professeurs interrogés « affirment ne pas savoir si leur établissement possède des documents officiels assurant la protection de la liberté universitaire » et que 85% des répondants étudiants « considèrent que les universités devraient déployer plus d’efforts pour faire connaître les dispositions sur la protection de la liberté universitaire ». Il reste donc beaucoup de travail à faire sur le plan de la diffusion de l’information intra muros. Heureusement, nos établissements ont déjà en leur possession les outils nécessaires à l’implantation de ce type d’apprentissage pratique (au moment de leur admission, nos étudiants doivent déjà compléter des tutoriels de sensibilisation au plagiat et aux violences sexuelles, par exemple).

    Enfin, il revient aux dirigeants de nos universités de s’assurer de mettre en place un climat propice à la réflexion et au dialogue sur des sujets parfois délicats, par exemple en se gardant d’insinuer que ceux qui défendent la liberté universitaire seraient de facto hostiles à la diversité et à l’équité, comme a pu le faire notre vice-recteur dans une lettre publiée dans La Presse en février dernier. Ça, déjà, ce serait un geste à la hauteur de la fonction.

    9. Quelle perception avez-vous de la forme qu’a pris la remise en cause des libertés académiques en France avec la polémique sur l’islamo-gauchisme initiée par deux membres du gouvernement – Blanquer et Vidal – et poursuivi avec le Manifeste des 100 ?

    Arnaud Bernadet. Un sentiment de profonde perplexité. La comparaison entre “l’islamo-gauchisme”, qui nous semble en grande partie un épouvantail agité par le pouvoir macroniste, et le “wokism” états-unien ou canadien - qui est une réalité complexe mais mesurable, dont on précisera les contours la semaine prochaine - se révèle aussi artificielle qu’infondée. Un tel rapprochement est même en soi très dangereux, et peut servir de nouveaux amalgames comme il apparaît nettement dans la lettre publiée hier par Jean-Michel Blanquer et Jean-François Roberge : “L’école pour la liberté, contre l’obscurantisme”. Déplions-la un instant. Les deux ministres de l’Éducation, de France et du Québec, ne sont pas officiellement en charge des dossiers universitaires (assurés par Frédérique Vidal et Danielle McCann). D’une même voix, Blanquer et Roberge condamnent - à juste titre - l’autodafé commis en 2019 dans plusieurs écoles du sud-ouest de l’Ontario sur des encyclopédies, des bandes-dessinées et des ouvrages de jeunesse qui portaient atteinte à l’image des premières nations. Or on a appris par la suite que l’instigatrice de cette purge littéraire, Suzie Kies, œuvrait comme conseillère au sein du Parti Libéral du Canada sur les questions autochtones. Elle révélait ainsi une évidente collusion avec le pouvoir fédéral. Inutile de dire par conséquent que l’intervention de nos deux ministres ressortit à une stratégie d’abord politique. En position fragile face à Ottawa, dont les mesures interventionnistes ne sont pas toujours compatibles avec son esprit d’indépendance, le Québec se cherche des appuis du côté de la France. Au nom de la “liberté d’expression”, la France tacle également Justin Trudeau, dont les positions modérées au moment de l’assassinat de Samuel Paty ont fortement déplu. Ce faisant, le Québec et la France se donnent aussi comme des sociétés alternatives, le Canada étant implicitement associé aux États-Unis dont il ne serait plus que la copie : un lieu où prospéreraient une “idéologie” et des “méthodes” - bannissement, censure, effacement de l’histoire - qui menaceraient le “respect” et l’esprit de “tolérance” auxquels s’adossent “nos démocraties”. Au lieu de quoi, non seulement “l’égalité” mais aussi la “laïcité” seraient garantes au Québec comme en France d’un “pacte” capable d’unir la “communauté” sur la base “de connaissances, de compétences et de principes fondés sur des valeurs universelles”, sans que celles-ci soient d’ailleurs clairement précisées. On ne peut s’empêcher toutefois de penser que les deux auteurs prennent le risque par ce biais de légitimer les guerres culturelles, issues au départ des universités états-uniennes, en les étendant aux rapports entre anglophones et francophones. Au reste, la cible déclarée du texte, qui privilégie plutôt l’allusion et se garde habilement de nommer, reste la “cancel culture” aux mains des “assassins de la mémoire”. On observera qu’il n’est nulle part question de “wokes”, de décolonialisme ou d’antiracisme par exemple. D’un “militantisme délétère” (mais lequel, exactement ?) on passe enfin aux dangers de la “radicalisation”, dans laquelle chacun mettra ce qu’il veut bien y entendre, des extrémismes politiques (national-populisme, alt-right, néo-nazisme, etc.) et des fondamentalismes religieux. Pour finir, la résistance aux formes actuelles de “l’obscurantisme” est l’occasion de revaloriser le rôle de l’éducation au sein des démocraties. Elle est aussi un moyen de renouer avec l’héritage rationaliste des Lumières. Mais les deux ministres retombent dans le piège civilisationniste, qui consiste à arrimer - sans sourciller devant la contradiction - les “valeurs universelles” à “nos sociétés occidentales”. Le marqueur identitaire “nos” est capital dans le texte. Il efface d’un même geste les peuples autochtones qui étaient mentionnés au début de l’article, comme s’ils ne faisaient pas partie, notamment pour le Québec, de cette “mémoire” que les deux auteurs appellent justement à défendre, ou comme s’ils étaient d’emblée assimilés et assimilables à cette vision occidentale ? De lui-même, l’article s’expose ici à la critique décoloniale, particulièrement répandue sur les campus nord-américains, celle-là même qu’il voudrait récuser. Qu’on en accepte ou non les prémisses, cette critique ne peut pas être non plus passée sous silence. Il faut s’y confronter. Car elle a au moins cette vertu de rappeler que l’héritage des Lumières ne va pas sans failles. On a le droit d’en rejeter les diverses formulations, mais il convient dans ce cas de les discuter. Car elles nous obligent à penser ensemble - et autrement - les termes du problème ici posé : universalité, communauté et diversité.

    10. La forme d’un « énoncé » encadrant la liberté académique et adopté par le parlement québécois vous semble-t-elle un bon compromis politique ? Pourquoi le soutenir plutôt qu’une loi ? Un énoncé national de référence, laissant chaque établissement en disposer librement, aura-t-il une véritable efficacité ?

    Isabelle Arseneau. Au moment de la rédaction de notre mémoire, les choses nous semblaient sans doute un peu moins urgentes que depuis la publication des résultats de la collecte d’informations réalisée par la Commission indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique en contexte universitaire. Les chiffres publiés en septembre dernier confirment ce que nous avons remarqué sur le terrain et ce que suggéraient déjà les mémoires, les témoignages et les avis d’experts récoltés dans le cadre des travaux des commissaires : nous avons affaire à un problème significatif plutôt qu’à un épiphénomène surmédiatisé (comme on a pu l’entendre dire). Les résultats colligés reflètent cependant un phénomène encore plus généralisé que ce que l’on imaginait et d’une ampleur que, pour ma part, je sous-estimais.

    Dans le contexte d’une situation sérieuse mais non encore critique, l’idée d’un énoncé m’a donc toujours semblé plus séduisante (et modérée !) que celle d’une politique nationale, qui ouvrirait la porte à l’ingérence de l’État dans les affaires universitaires. Or que faire des universités qui ne font plus leurs devoirs ? L’« énoncé sur la liberté universitaire » de l’Université McGill, qui protège les chercheurs des « contraintes de la rectitude politique », ne nous a été d’aucune utilité à l’automne 2020. Comment contraindre notre institution à respecter les règles du jeu dont elle s’est elle-même dotée ? Nous osons croire qu’un énoncé national, le plus ouvert et le plus généreux possible, pourrait aider les établissements comme le nôtre à surmonter certaines difficultés internes. Mais nous sommes de plus en plus conscients qu’il faudra sans doute se doter un jour de mécanismes plus concrets qu’un énoncé non contraignant.

    Arnaud Bernadet. Nous avons eu de longues discussions à ce sujet, et elles ne sont probablement pas terminées. C’est un point de divergence entre nous. Bien entendu, on peut se ranger derrière la solution modérée comme on l’a d’abord fait. Malgré tout, je persiste à croire qu’une loi aurait plus de poids et d’efficience qu’un énoncé. L’intervention de l’État est nécessaire dans le cas présent, et me semble ici le contraire même de l’ingérence. Une démocratie digne de ce nom doit veiller à garantir les libertés publiques qui en sont au fondement. Or, en ce domaine, la liberté académique est précieuse. Ce qui a lieu sur les campus est exceptionnel, cela ne se passe nulle part ailleurs dans la société : la quête de la vérité, la dynamique contradictoire des points de vue, l’expression critique et l’émancipation des esprits. Je rappellerai qu’inscrire le principe de la liberté académique dans la loi est aussi le vœu exprimé par la Fédération Québécoise des Professeures et Professeurs d’Université. Actuellement, un tel principe figure plutôt au titre du droit contractuel, c’est-à-dire dans les conventions collectives des établissements québécois (quand celles-ci existent !) Une loi remettrait donc à niveau les universités de la province, elle préviendrait toute espèce d’inégalité de traitement d’une institution à l’autre. Elle comblerait la carence dont on parlait tout à l’heure, qui remonte à la Révolution tranquille. Elle renforcerait finalement l’autonomie des universités au lieu de la fragiliser. Ce serait aussi l’occasion pour le Québec de réaffirmer clairement ses prérogatives en matière éducative contre les ingérences - bien réelles celles-là - du pouvoir fédéral qui tend de plus en plus à imposer sa vision pancanadienne au mépris des particularités francophones. Enfin, ne nous leurrons pas : il n’y a aucune raison objective pour que les incidents qui se sont multipliés en Amérique du Nord depuis une dizaine d’années, et qui nourrissent de tous bords - on vient de le voir - de nombreux combats voire dérives idéologiques, cessent tout à coup. La loi doit pouvoir protéger les fonctions et les missions des universités québécoises, à ce jour de plus en plus perturbées.

    Entretien réalisé par écrit au mois d’octobre 2021

    Notes :

    1. Isabelle Hachey, « Le clientélisme, c’est ça » (La Presse, 22.02.2021)

    2. Jean-François Nadeau, « La censure contamine les milieux universitaires » (Le Devoir, 01.04.2017)

    3. Isabelle Arseneau et Arnaud Bernadet, « Universités : censure et liberté » (La Presse, 15.12.2020) ; « Les dérives éthiques de l’esprit gestionnaire » (La Presse, 29.02.2021) ; « Université McGill : une politique du déni » (La Presse, 26.02.2021).

    4. « Rapport de la Mission du recteur sur la liberté d’expression en contexte universitaire », juin 2021 : https://www.umontreal.ca/public/www/images/missiondurecteur/Rapport-Mission-juin2021.pdf

    https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/211021/liberte-academique-et-justice-sociale

    #ESR

    ping @karine4 @_kg_ @isskein

    –-

    ajouté à la métaliste autour du terme l’#islamo-gauchisme... mais aussi du #woke et du #wokisme, #cancel_culture, etc.
    https://seenthis.net/messages/943271

    • La liberté académique aux prises avec de nouvelles #menaces

      Colloques, séminaires, publications (Duclos et Fjeld, Frangville et alii) : depuis quelques années, et avec une accélération notoire ces derniers mois, le thème de la liberté académique est de plus en plus exploré comme objet scientifique. La liberté académique suscite d’autant plus l’intérêt des chercheurs qu’elle est aujourd’hui, en de nombreux endroits du monde, fragilisée.

      La création en 2021 par l’#Open_Society_University_Network (un partenariat entre la Central European University et le Bard College à New York) d’un #Observatoire_mondial_des_libertés_académiques atteste d’une inquiétante réalité. C’est en effet au moment où des libertés sont fragilisées qu’advient le besoin d’en analyser les fondements, d’en explorer les définitions, de les ériger en objets de recherche, mais aussi de mettre en œuvre un système de veille pour les protéger.

      S’il est évident que les #régimes_autoritaires sont par définition des ennemis des libertés académiques, ce qui arrive aujourd’hui dans des #pays_démocratiques témoigne de pratiques qui transcendent les frontières entre #régime_autoritaire et #régime_démocratique, frontières qui elles-mêmes tendent à se brouiller.

      La liberté académique menacée dans les pays autoritaires…

      S’appuyant sur une régulation par les pairs (la « communauté des compétents ») et une indépendance structurelle par rapport aux pouvoirs, la liberté de recherche, d’enseignement et d’opinion favorise la critique autant qu’elle en est l’expression et l’émanation. Elle est la condition d’une pensée féconde qui progresse par le débat, la confrontation d’idées, de paradigmes, d’axiomes, d’expériences.

      Cette liberté dérange en contextes autoritaires, où tout un répertoire d’actions s’offre aux gouvernements pour museler les académiques : outre l’emprisonnement pur et simple, dont sont victimes des collègues – on pense notamment à #Fariba_Adelkhah, prisonnière scientifique en #Iran ; à #Ahmadreza_Djalali, condamné à mort en Iran ; à #Ilham_Tohti, dont on est sans nouvelles depuis sa condamnation à perpétuité en# Chine, et à des dizaines d’autres académiques ouïghours disparus ou emprisonnés sans procès ; à #Iouri_Dmitriev, condamné à treize ans de détention en #Russie –, les régimes autoritaires mettent en œuvre #poursuites_judiciaires et #criminalisation, #licenciements_abusifs, #harcèlement, #surveillance et #intimidation.


      https://twitter.com/AnkyraWitch/status/1359630006993977348

      L’historien turc Candan Badem parlait en 2017 d’#académicide pour qualifier la vague de #répression qui s’abattait dans son pays sur les « universitaires pour la paix », criminalisés pour avoir signé une pétition pour la paix dans les régions kurdes. La notion de « #crime_contre_l’histoire », forgée par l’historien Antoon de Baets, a été reprise en 2021 par la FIDH et l’historien Grigori Vaïpan) pour qualifier les atteintes portées à l’histoire et aux historiens en Russie. Ce crime contre l’histoire en Russie s’amplifie avec les attaques récentes contre l’ONG #Memorial menacée de dissolution.

      En effet, loin d’être l’apanage des institutions académiques officielles, la liberté académique et de recherche, d’une grande rigueur, se déploie parfois de façon plus inventive et courageuse dans des structures de la #société_civile. En #Biélorussie, le sort de #Tatiana_Kuzina, comme celui d’#Artiom_Boyarski, jeune chimiste talentueux emprisonné pour avoir refusé publiquement une bourse du nom du président Loukachenko, ne sont que deux exemples parmi des dizaines et des dizaines de chercheurs menacés, dont une grande partie a déjà pris le chemin de l’exil depuis l’intensification des répressions après les élections d’août 2020 et la mobilisation qui s’en est suivie.

      La liste ci-dessus n’est bien sûr pas exhaustive, les cas étant nombreux dans bien des pays – on pense, par exemple, à celui de #Saïd_Djabelkhir en #Algérie.

      … mais aussi dans les #démocraties

      Les #régressions que l’on observe au sein même de l’Union européenne – le cas du déménagement forcé de la #Central_European_University de Budapest vers Vienne, sous la pression du gouvernement de Viktor Orban, en est un exemple criant – montrent que les dérives anti-démocratiques se déclinent dans le champ académique, après que d’autres libertés – liberté de la presse, autonomie de la société civile – ont été atteintes.

      Les pays considérés comme démocratiques ne sont pas épargnés non plus par les tentatives des autorités politiques de peser sur les recherches académiques. Récemment, en #France, les ministres de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur ont affirmé que le monde académique serait « ravagé par l’#islamo-gauchisme » et irrespectueux des « #valeurs_de_la_République » – des attaques qui ont provoqué un concert de protestations au sein de la communauté des chercheurs. En France toujours, de nombreux historiens se sont mobilisés en 2020 contre les modalités d’application d’une instruction interministérielle restreignant l’accès à des fonds d’#archives sur l’#histoire_coloniale, en contradiction avec une loi de 2008.


      https://twitter.com/VivementLundi/status/1355564397314387972

      Au #Danemark, en juin 2021, plus de 260 universitaires spécialistes des questions migratoires et de genre rapportaient quant à eux dans un communiqué public les intimidations croissantes subies pour leurs recherches qualifiées de « #gauchisme_identitaire » et de « #pseudo-science » par des députés les accusant de « déguiser la politique en science ».

      D’autres offensives peuvent être menées de façon plus sournoise, à la faveur de #politiques_néolibérales assumées et de mise en #concurrence des universités et donc du champ du savoir et de la pensée. La conjonction de #logiques_libérales sur le plan économique et autoritaires sur le plan politique conduit à la multiplication de politiques souvent largement assumées par les États eux-mêmes : accréditations sélectives, retrait de #financements à des universités ou à certains programmes – les objets plus récents et fragiles comme les #études_de_genre ou études sur les #migrations se trouvant souvent en première ligne.

      Ce brouillage entre régimes politiques, conjugué à la #marchandisation_du_savoir, trouve également à s’incarner dans la façon dont des acteurs issus de régimes autoritaires viennent s’installer au sein du monde démocratique : c’est le cas notamment de la Chine avec l’implantation d’#Instituts_Confucius au cœur même des universités, qui conduisent, dans certains cas, à des logiques d’#autocensure ; ou de l’afflux d’étudiants fortunés en provenance de pays autoritaires, qui par leurs frais d’inscriptions très élevés renflouent les caisses d’universités désargentées, comme en Australie.

      Ces logiques de #dépendance_financière obèrent l’essence et la condition même de la #recherche_académique : son #indépendance. Plus généralement, la #marchandisation de l’#enseignement_supérieur, conséquence de son #sous-financement public, menace l’#intégrité_scientifique de chercheurs et d’universités de plus en plus poussées à se tourner vers des fonds privés.

      La mobilisation de la communauté universitaire

      Il y a donc là une combinaison d’attaques protéiformes, à l’aune des changements politiques, technologiques, économiques et financiers qui modifient en profondeur les modalités du travail. La mise en place de programmes de solidarité à destination de chercheurs en danger (#PAUSE, #bourses_Philipp_Schwartz en Allemagne, #bourses de solidarité à l’Université libre de Bruxelles), l’existence d’organisations visant à documenter les attaques exercées sur des chercheurs #Scholars_at_Risk, #International_Rescue_Fund, #CARA et la création de ce tout nouvel observatoire mondial des libertés académiques évoqué plus haut montrent que la communauté académique a pris conscience du danger. Puissent du fond de sa prison résonner les mots de l’historien Iouri Dmitriev : « Les libertés académiques, jamais, ne deviendront une notion abstraite. »

      https://theconversation.com/la-liberte-academique-aux-prises-avec-de-nouvelles-menaces-171682

    • « #Wokisme » : un « #front_républicain » contre l’éveil aux #injustices

      CHRONIQUE DE LA #BATAILLE_CULTURELLE. L’usage du mot « wokisme » vise à disqualifier son adversaire, mais aussi à entretenir un #déni : l’absence de volonté politique à prendre au sérieux les demandes d’#égalité, de #justice, de respect des #droits_humains.

      Invoqué ad nauseam, le « wokisme » a fait irruption dans un débat public déjà singulièrement dégradé. Il a fait florès à l’ère du buzz et des clashs, rejoignant l’« #islamogauchisme » au registre de ces fameux mots fourre-tout dont la principale fonction est de dénigrer et disqualifier son adversaire, tout en réduisant les maux de la société à quelques syllabes magiques. Sur la scène politique et intellectuelle, le « wokisme » a même réussi là où la menace de l’#extrême_droite a échoué : la formation d’un « front républicain ». Mais pas n’importe quel front républicain…

      Formellement, les racines du « wokisme » renvoient à l’idée d’« #éveil » aux #injustices, aux #inégalités et autres #discriminations subies par les minorités, qu’elles soient sexuelles, ethniques ou religieuses. Comment cet « éveil » a-t-il mué en une sorte d’#injure_publique constitutive d’une #menace existentielle pour la République ?

      Si le terme « woke » est historiquement lié à la lutte des #Afro-Américains pour les #droits_civiques, il se trouve désormais au cœur de mobilisations d’une jeunesse militante animée par les causes féministes et antiracistes. Ces mobilisations traduisent en acte l’#intersectionnalité théorisée par #Kimberlé_Williams_Crenshaw*, mais le recours à certains procédés ou techniques est perçu comme une atteinte à la #liberté_d’expression (avec les appels à la #censure d’une œuvre, à l’annulation d’une exposition ou d’une représentation, au déboulonnage d’une statue, etc.) ou à l’égalité (avec les « réunions non mixtes choisies et temporaires » restreignant l’accès à celles-ci à certaines catégories de personnes partageant un même problème, une même discrimination). Le débat autour de ces pratiques est complexe et légitime. Mais parler en France du développement d’une « cancel culture » qu’elles sont censées symboliser est abusif, tant elles demeurent extrêmement marginales dans les sphères universitaires et artistiques. Leur nombre comme leur diffusion sont inversement proportionnels à leur écho politico-médiatique. D’où provient ce contraste ou décalage ?

      Une rupture du contrat social

      En réalité, au-delà de la critique/condamnation du phénomène « woke », la crispation radicale qu’il suscite dans l’hexagone puise ses racines dans une absence de volonté politique à prendre au sérieux les demandes d’égalité, de justice, de respect des droits humains. Un défaut d’écoute et de volonté qui se nourrit lui-même d’un mécanisme de déni, à savoir un mécanisme de défense face à une réalité insupportable, difficile à assumer intellectuellement et politiquement.

      D’un côté, une série de rapports publics et d’études universitaires** pointent la prégnance des inégalités et des discriminations à l’embauche, au logement, au contrôle policier ou même à l’école. Non seulement les discriminations sapent le sentiment d’appartenance à la communauté nationale, mais la reproduction des inégalités est en partie liée à la reproduction des discriminations.

      De l’autre, le déni et l’#inaction perdurent face à ces problèmes systémiques. Il n’existe pas de véritable politique publique de lutte contre les discriminations à l’échelle nationale. L’État n’a pas engagé de programme spécifique qui ciblerait des axes prioritaires et se déclinerait aux différents niveaux de l’action publique.

      L’appel à l’« éveil » est un appel à la prise de conscience d’une rupture consommée de notre contrat social. La réalité implacable d’inégalités et de discriminations criantes nourrit en effet une #citoyenneté à plusieurs vitesses qui contredit les termes du récit/#pacte_républicain, celui d’une promesse d’égalité et d’#émancipation.

      Que l’objet si mal identifié que représente le « wokisme » soit fustigé par la droite et l’extrême-droite n’a rien de surprenant : la lutte contre les #logiques_de_domination ne fait partie ni de leur corpus idéologique ni de leur agenda programmatique. En revanche, il est plus significatif qu’une large partie de la gauche se détourne des questions de l’égalité et de la #lutte_contre_les_discriminations, pour mieux se mobiliser contre tout ce qui peut apparaître comme une menace contre un « #universalisme_républicain » aussi abstrait que déconnecté des réalités vécues par cette jeunesse française engagée en faveur de ces causes.

      Les polémiques autour du « wokisme » contribuent ainsi à forger cet arc politique et intellectuel qui atteste la convergence, voire la jonction de deux blocs conservateurs, « de droite » et « de gauche », unis dans un même « front républicain », dans un même déni des maux d’une société d’inégaux.

      https://www.nouvelobs.com/idees/20210928.OBS49202/wokisme-un-front-republicain-contre-l-eveil-aux-injustices.html

      #récit_républicain

    • « Le mot “#woke” a été transformé en instrument d’occultation des discriminations raciales »

      Pour le sociologue #Alain_Policar, le « wokisme » désigne désormais péjorativement ceux qui sont engagés dans des courants politiques qui se réclament pourtant de l’approfondissement des principes démocratiques.

      Faut-il rompre avec le principe de « #color_blindness » (« indifférence à la couleur ») au fondement de l’#égalitarisme_libéral ? Ce principe, rappelons-le, accompagne la philosophie individualiste et contractualiste à laquelle adhèrent les #démocraties. Or, en prenant en considération des pratiques par lesquelles des catégories fondées sur des étiquettes « raciales » subsistent dans les sociétés postcolonialistes, on affirme l’existence d’un ordre politico-juridique au sein duquel la « #race » reste un principe de vision et de division du monde social.

      Comme l’écrit #Stéphane_Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, « la République a un problème avec le #corps des individus, elle ne sait que faire de ces #différences_physiques, de ces couleurs multiples, de ces #orientations diverses, parce qu’elle a affirmé que pour traiter chacun et chacune également elle devait être #aveugle » ( Le Monde du 7 avril).

      Dès lors, ignorer cette #réalité, rester indifférent à la #couleur, n’est-ce pas consentir à la perpétuation des injustices ? C’est ce consentement qui s’exprime dans l’opération idéologique d’appropriation d’un mot, « woke », pour le transformer en instrument d’occultation de la réalité des discriminations fondées sur la couleur de peau. Désormais le wokisme désigne péjorativement ceux qui sont engagés dans les luttes antiracistes, féministes, LGBT ou même écologistes. Il ne se caractérise pas par son contenu, mais par sa fonction, à savoir, selon un article récent de l’agrégé de philosophie Valentin Denis sur le site AOC , « stigmatiser des courants politiques souvent incommensurables tout en évitant de se demander ce qu’ils ont à dire . Ces courants politiques, pourtant, ne réclament-ils pas en définitive l’approfondissement des #principes_démocratiques ?

      Une #justice_corrective

      Parmi les moyens de cet approfondissement, l’ affirmative action (« #action_compensatoire »), en tant qu’expression d’une justice corrective fondée sur la #reconnaissance des #torts subis par le passé et, bien souvent, qui restent encore vifs dans le présent, est suspectée de substituer le #multiculturalisme_normatif au #modèle_républicain d’#intégration. Ces mesures correctives seraient, lit-on souvent, une remise en cause radicale du #mérite_individuel. Mais cet argument est extrêmement faible : est-il cohérent d’invoquer la #justice_sociale (dont les antiwokedisent se préoccuper) et, en même temps, de valoriser le #mérite ? L’appréciation de celui-ci n’est-elle pas liée à l’#utilité_sociale accordée à un ensemble de #performances dont la réalisation dépend d’#atouts (en particulier, un milieu familial favorable) distribués de façon moralement arbitraire ? La justice sociale exige, en réalité, que ce qui dépend des circonstances, et non des choix, soit compensé.

      Percevoir et dénoncer les mécanismes qui maintiennent les hiérarchies héritées de l’#ordre_colonial constitue l’étape nécessaire à la reconnaissance du lien entre cet ordre et la persistance d’un #racisme_quotidien. Il est important (même si le concept de « #racisme_systémique », appliqué à nos sociétés contemporaines, est décrit comme une « fable » par certains auteurs, égarés par les passions idéologiques qu’ils dénoncent chez leurs adversaires) d’admettre l’idée que, même si les agents sont dépourvus de #préjugés_racistes, la discrimination fonctionne. En quelque sorte, on peut avoir du #racisme_sans_racistes, comme l’a montré Eduardo Bonilla-Silva dans son livre de 2003, Racism without Racists [Rowman & Littlefield Publishers, non traduit] . Cet auteur avait, en 1997, publié un article canonique sur le #racisme_institutionnel dans lequel il rejetait, en se réclamant du psychiatre et essayiste Frantz Fanon [1925-1961], les approches du racisme « comme une #bizarrerie_mentale, comme une #faille_psychologique » .

      Le reflet de pratiques structurelles

      En fait, les institutions peuvent être racialement oppressives, même sans qu’aucun individu ou aucun groupe ne puisse être tenu pour responsable du tort subi. Cette importante idée avait déjà été exprimée par William E. B. Du Bois dans Pénombre de l’aube. Essai d’autobiographie d’un concept de race (1940, traduit chez Vendémiaire, 2020), ouvrage dans lequel il décrivait le racisme comme un #ordre_structurel, intériorisé par les individus et ne dépendant pas seulement de la mauvaise volonté de quelques-uns. On a pu reprocher à ces analyses d’essentialiser les Blancs, de leur attribuer une sorte de #racisme_ontologique, alors qu’elles mettent au jour les #préjugés produits par l’ignorance ou le déni historique.

      On comprend, par conséquent, qu’il est essentiel de ne pas confondre, d’une part, l’expression des #émotions, de la #colère, du #ressentiment, et, d’autre part, les discriminations, par exemple à l’embauche ou au logement, lesquelles sont le reflet de #pratiques_structurelles concrètes. Le racisme est avant tout un rapport social, un #système_de_domination qui s’exerce sur des groupes racisés par le groupe racisant. Il doit être appréhendé du point de vue de ses effets sur l’ensemble de la société, et non seulement à travers ses expressions les plus violentes.

      #Alexis_de_Tocqueville avait parfaitement décrit cette réalité [dans De la démocratie en Amérique, 1835 et 1840] en évoquant la nécessaire destruction, une fois l’esclavage aboli, de trois préjugés, qu’il disait être « bien plus insaisissables et plus tenaces que lui : le préjugé du maître, le préjugé de race, et enfin le préjugé du Blanc . Et il ajoutait : « J’aperçois l’#esclavage qui recule ; le préjugé qu’il a fait naître est immobile. » Ce #préjugé_de_race était, écrivait-il encore, « plus fort dans les Etats qui ont aboli l’esclavage que dans ceux où il existe encore, et nulle part il ne se montre aussi intolérant que dans les Etats où la servitude a toujours été inconnue . Tocqueville serait-il un militant woke ?

      Note(s) :

      Alain Policar est sociologue au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof). Dernier livre paru : « L’Universalisme en procès » (Le Bord de l’eau, 160p., 16 euros)

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/12/28/alain-policar-le-mot-woke-a-ete-transforme-en-instrument-d-occultation-des-d

      #WEB_Du_Bois

      signalé par @colporteur ici :
      https://seenthis.net/messages/941602

    • L’agitation de la chimère « wokisme » ou l’empêchement du débat

      Wokisme est un néologisme malin : employé comme nom, il suggère l’existence d’un mouvement homogène et cohérent, constitué autour d’une prétendue « idéologie woke ». Ou comment stigmatiser des courants politiques progressistes pour mieux détourner le regard des discriminations que ceux-ci dénoncent. D’un point de vue rhétorique, le terme produit une version totalement caricaturée d’un adversaire fantasmé.

      (#paywall)
      https://aoc.media/opinion/2021/11/25/lagitation-de-la-chimere-wokisme-ou-lempechement-du-debat

    • Europe’s War on Woke

      Why elites across the Atlantic are freaking out about the concept of structural racism.

      On my 32nd birthday, I agreed to appear on Répliques, a popular show on the France Culture radio channel hosted by the illustrious Alain Finkielkraut. Now 72 and a household name in France, Finkielkraut is a public intellectual of the variety that exists only on the Left Bank: a child of 1968 who now wears Loro Piana blazers and rails against “la cancel culture.” The other guest that day—January 9, less than 72 hours after the US Capitol insurrection—was Pascal Bruckner, 72, another well-known French writer who’d just published “The Almost Perfect Culprit: The Construction of the White Scapegoat,” his latest of many essays on this theme. Happy birthday to me.

      The topic of our discussion was the only one that interested the French elite in January 2021: not the raging pandemic but “the Franco-American divide,” the Huntington-esque clash of two apparently great civilizations and their respective social models—one “universalist,” one “communitarian”—on the question of race and identity politics. To Finkielkraut, Bruckner, and the establishment they still represent, American writers like me seek to impose a “woke” agenda on an otherwise harmonious, egalitarian society. Americans who argue for social justice are guilty of “cultural imperialism,” of ideological projection—even of bad faith.

      This has become a refrain not merely in France but across Europe. To be sure, the terms of this social-media-fueled debate are unmistakably American; “woke” and “cancel culture” could emerge from no other context. But in the United States, these terms have a particular valence that mostly has to do with the push for racial equality and against systemic racism. In Europe, what is labeled “woke” is often whatever social movement a particular country’s establishment fears the most. This turns out to be an ideal way of discrediting those movements: To call them “woke” is to call them American, and to call them American is to say they don’t apply to Europe.

      In France, “wokeism” came to the fore in response to a recent slew of terror attacks, most notably the gruesome beheading in October 2020 of the schoolteacher Samuel Paty. After years of similar Islamist attacks—notably the massacre at the offices of the newspaper Charlie Hebdo in January 2015 and the ISIS-inspired assaults on the Hypercacher kosher supermarket and the Bataclan concert hall in November 2015—the reaction in France reached a tipping point. Emmanuel Macron’s government had already launched a campaign against what it calls “Islamist separatism,” but Paty’s killing saw a conversation about understandable trauma degenerate into public hysteria. The government launched a full-scale culture war, fomenting its own American-style psychodrama while purporting to do the opposite. Soon its ministers began railing against “islamo-gauchisme” (Islamo-leftism) in universities, Muslim mothers in hijabs chaperoning school field trips, and halal meats in supermarkets.

      But most of all, they began railing against the ideas that, in their view, somehow augmented and abetted these divisions: American-inspired anti-racism and “wokeness.” Macron said it himself in a speech that was widely praised by the French establishment for its alleged nuance: “We have left the intellectual debate to others, to those outside of the Republic, by ideologizing it, sometimes yielding to other academic traditions…. I see certain social science theories entirely imported from the United States.” In October, the French government inaugurated a think tank, the Laboratoire de la République, designed to combat these “woke” theories, which, according to the think tank’s founder, Jean-Michel Blanquer, Macron’s education minister, “led to the rise of Donald Trump.”

      As the apparent emissaries of this pernicious “Anglo-Saxon” identitarian agenda, US journalists covering this moment in France have come under the spotlight, especially when we ask, for instance, what islamo-gauchisme actually means—if indeed it means anything at all. Macron himself has lashed out at foreign journalists, even sending a letter to the editor of the Financial Times rebutting what he saw as an error-ridden op-ed that took a stance he could not bear. “I will not allow anybody to claim that France, or its government, is fostering racism against Muslims,” he wrote. Hence my own invitation to appear on France Culture, a kind of voir dire before the entire nation.

      Finkielkraut began the segment with a tirade against The New York Times and then began discussing US “campus culture,” mentioning Yale’s Tim Barringer and an art history syllabus that no longer includes as many “dead white males.” Eventually I asked how, three days after January 6, we could discuss the United States without mentioning the violent insurrection that had just taken place at the seat of American democracy. Finkielkraut became agitated. “And for you also, [what about] the fact that in the American Congress, Emanuel Cleaver, representative of Missouri, presiding over a new inauguration ceremony, finished by saying the words ‘amen and a-women’?” he asked. “Ça vous dérangez pas?” I said it didn’t bother me in the least, and he got even more agitated. “I don’t understand what you say, James McAuley, because cancel culture exists! It exists!”

      The man knew what he was talking about: Three days after our conversation, Finkielkraut was dropped from a regular gig at France’s LCI television for defending his old pal Olivier Duhamel of Sciences Po, who was embroiled in a pedophilia scandal that had taken France by storm. Duhamel was accused by his stepdaughter, Camille Kouchener, of raping her twin brother when the two were in their early teens. Finkielkraut speculated that there may have been consent between the two parties, and, in any case, a 14-year-old was “not the same thing” as a child.

      I tell this story because it is a useful encapsulation of France’s—and Europe’s—war on woke, a conflict that has assumed various forms in different national contexts but that still grips the continent. On one level, there is a certain comedy to it: The self-professed classical liberal turns out to be an apologist for child molestation. In fact, the anti-woke comedy is now quite literally being written and directed by actual comedians who, on this one issue, seem incapable of anything but earnestness. John Cleese, 81, the face of Monty Python and a public supporter of Brexit, has announced that he will be directing a forthcoming documentary series on Britain’s Channel 4 titled Cancel Me, which will feature extensive interviews with people who have been “canceled”—although no one connected with the show has specified what exactly the word means.

      Indeed, the terms of this debate are an insult to collective intelligence. But if we must use them, we need to understand an important distinction between what is called “cancel culture” and what is called “woke.” The former has been around much longer and refers to tactics that are used across the political spectrum, but historically by those on the right. “Cancel culture” is not the result of an increased awareness of racial disparities or a greater commitment to social justice broadly conceived—both of which are more urgent than ever—but rather a terrible and inevitable consequence of life with the Internet. Hardly anyone can support “cancel culture” in good faith, and yet it is never sufficiently condemned, because people call out such tactics only when their political opponents use them, never when their allies do. “Woke,” on the other hand, does not necessarily imply public shaming; it merely signifies a shift in perspective and perhaps a change in behavior. Carelessly equating the two is a convenient way to brand social justice activism as inherently illiberal—and to silence long-overdue conversations about race and inequality that far too many otherwise reasonable people find personally threatening.

      But Europe is not America, and in Europe there have been far fewer incidents that could be construed as “cancellations”—again, I feel stupid even using the word—than in the United States. “Wokeism” is really a phenomenon of the Anglosphere, and with the exception of the United Kingdom, the social justice movement has gained far less traction in Europe than it has in US cultural institutions—newspapers, universities, museums, and foundations. In terms of race and identity, many European cultural institutions would have been seen as woefully behind the times by their US counterparts even before the so-called “great awokening.” Yet Europe has gone fully anti-woke, even without much wokeness to fight.

      So much of Europe’s anti-woke movement has focused on opposing and attempting to refute allegations of “institutional” or “structural” racism. Yet despite the 20th-century continental origins of structuralism (especially in France) as a mode of social analysis—not to mention the Francophone writers who have shaped the way American thinkers conceive of race—many European elites dismiss these critiques as unwelcome intrusions into the public discourse that project the preoccupations of a nation built on slavery (and thus understandably obsessed with race) onto societies that are vastly different. Europe, they insist, has a different history, one in which race—especially in the form of the simple binary opposition of Black and white—plays a less central role. There is, of course, some truth to this rejoinder: Different countries do indeed have different histories and different debates. But when Europeans accuse their American critics of projection, they do so not to point out the very real divergences in the US and European discussions and even conceptions of race and racism. Rather, the charge is typically meant to stifle the discussion altogether—even when that discussion is being led by European citizens describing their own lived experiences.

      France, where I reside, proudly sees itself as a “universalist” republic of equal citizens that officially recognizes no differences among them. Indeed, since 1978, it has been illegal to collect statistics on race, ethnicity, or religion—a policy that is largely a response to what happened during the Second World War, when authorities singled out Jewish citizens to be deported to Nazi concentration camps. The French view is that such categories should play no role in public life, that the only community that counts is the national community. To be anti-woke, then, is to be seen as a discerning thinker, one who can rise above crude, reductive identity categories.

      The reality of daily life in France is anything but universalist. The French state does indeed make racial distinctions among citizens, particularly in the realm of policing. The prevalence of police identity checks in France, which stem from a 1993 law intended to curb illegal immigration, is a perennial source of controversy. They disproportionately target Black and Arab men, which is one reason the killing of George Floyd resonated so strongly here. Last summer I spoke to Jacques Toubon, a former conservative politician who was then serving as the French government’s civil liberties ombudsman (he is now retired). Toubon was honest in his assessment: “Our thesis, our values, our rules—constitutional, etc.—they are universalist,” he said. “They do not recognize difference. But there is a tension between this and the reality.”

      One of the most jarring examples of this tension came in November 2020, when Sarah El Haïry, Macron’s youth minister, traveled to Poitiers to discuss the question of religion in society at a local high school. By and large, the students—many of whom were people of color—asked very thoughtful questions. One of them, Emilie, 16, said that she didn’t see the recognition of religious or ethnic differences as divisive. “Just because you are a Christian or a Muslim does not represent a threat to society,” she said. “For me, diversity is an opportunity.” These and similar remarks did not sit well with El Haïry, who nonetheless kept her cool until another student asked about police brutality. At that point, El Haïry got up from her chair and interrupted the student. “You have to love the police, because they are there to protect us on a daily basis,” she said. “They cannot be racist because they are republican!”

      For El Haïry, to question such assumptions would be to question something foundational and profound about the way France understands itself. The problem is that more and more French citizens are doing just that, especially young people like the students in Poitiers, and the government seems utterly incapable of responding.

      Although there is no official data to this effect—again, because of universalist ideology—France is estimated to be the most ethnically diverse society in Western Europe. It is home to large North African, West African, Southeast Asian, and Caribbean populations, and it has the largest Muslim and Jewish communities on the continent. By any objective measure, that makes France a multicultural society—but this reality apparently cannot be admitted or understood.

      Macron, who has done far more than any previous French president to recognize the lived experiences and historical traumas of various minority groups, seems to be aware of this blind spot, but he stops short of acknowledging it. Earlier this year, I attended a roundtable discussion with Macron and a small group of other Anglophone correspondents. One thing he said during that interview has stuck with me: “Universalism is not, in my eyes, a doctrine of assimilation—not at all. It is not the negation of differences…. I believe in plurality in universalism, but that is to say, whatever our differences, our citizenship makes us build a universal together.” This is simply the definition of a multicultural society, an outline of the Anglo-Saxon social model otherwise so despised in France.

      Europe’s reaction to the brutal killing of George Floyd in may 2020 was fascinating to observe. The initial shock at the terrifyingly mundane horrors of US life quickly gave way to protest movements that decried police brutality and the unaddressed legacy of Europe’s colonial past. This was when the question of structural racism entered the conversation. In Britain, Prime Minister Boris Johnson responded to the massive protests throughout the country by establishing the Commission on Race and Ethnic Disparities, an independent group charged with investigating the reality of discrimination and coming up with proposals for rectifying racial disparities in public institutions. The commission’s report, published in April 2021, heralded Britain as “a model for other White-majority countries” on racial issues and devoted three pages to the problems with the language of “structural racism.”

      One big problem with this language, the report implied, is that “structural racism” is a feeling, and feelings are not facts. “References to ‘systemic’, ‘institutional’ or ‘structural racism’ may relate to specific processes which can be identified, but they can also relate to the feeling described by many ethnic minorities of ‘not belonging,’” the report said. “There is certainly a class of actions, behaviours and incidents at the organisational level which cause ethnic minorities to lack a sense of belonging. This is often informally expressed as feeling ‘othered.’” But even that modest concession was immediately qualified. “However, as with hate incidents, this can have a highly subjective dimension for those tasked with investigating the claim.” Finally, the report concluded, the terms in question were inherently extreme. “Terms like ‘structural racism’ have roots in a critique of capitalism, which states that racism is inextricably linked to capitalism. So by that definition, until that system is abolished racism will flourish.”

      The effect of these language games is simply to limit the terms available to describe a phenomenon that indeed exists. Because structural racism is not some progressive shibboleth: It kills people, which need not be controversial or even political to admit. For one recent example in the UK, look no further than Covid-19 deaths. The nation’s Office for National Statistics concluded that Black citizens were more than four times as likely to die of Covid as white citizens, while British citizens of Bangladeshi and Pakistani heritage were more than three times as likely to die. These disparities were present even among health workers directly employed by the state: Of the National Health Service clinical staff who succumbed to the virus, a staggering 60 percent were “BAME”—Black, Asian, or minority ethnic, a term that the government’s report deemed “no longer helpful” and “demeaning.” Beyond Covid-19, reports show that Black British women are more than four times as likely to die in pregnancy or childbirth as their white counterparts; British women of an Asian ethnic background die at twice the rate of white women.

      In the countries of Europe as in the United States, the battle over “woke” ideas is also a battle over each nation’s history—how it is written, how it is taught, how it is understood.

      Perhaps nowhere is this more acutely felt than in Britain, where the inescapable legacy of empire has become the center of an increasingly acrimonious public debate. Of particular note has been the furor over how to think about Winston Churchill, who remains something of a national avatar. In September, the Winston Churchill Memorial Trust renamed itself the Churchill Fellowship, removed certain pictures of the former prime minister from its website, and seemed to distance itself from its namesake. “Many of his views on race are widely seen as unacceptable today, a view that we share,” the Churchill Fellowship declared. This followed the November 2020 decision by Britain’s beloved National Trust, which operates an extensive network of stately homes throughout the country, to demarcate about 100 properties with explicit ties to slavery and colonialism.

      These moves elicited the ire of many conservatives, including the prime minister. “We need to focus on addressing the present and not attempt to rewrite the past and get sucked into the never-ending debate about which well-known historical figures are sufficiently pure or politically correct to remain in public view,” Johnson’s spokesman said in response to the Churchill brouhaha. But for Hilary McGrady, the head of the National Trust, “the genie is out of the bottle in terms of people wanting to understand where wealth came from,” she told London’s Evening Standard. McGrady justified the trust’s decision by saying that as public sensibilities change, so too must institutions. “One thing that possibly has changed is there may be things people find offensive, and we have to be sensitive about that.”

      A fierce countermovement to these institutional changes has already emerged. In the words of David Abulafia, 71, an acclaimed historian of the Mediterranean at Cambridge University and one of the principal architects of this countermovement, “We can never surrender to the woke witch hunt against our island story.”

      This was the actual title of an op-ed by Abulafia that the Daily Mail published in early September, which attacked “today’s woke zealots” who “exploit history as an instrument of propaganda—and as a means of bullying the rest of us.” The piece also announced the History Reclaimed initiative, of which Abulafia is a cofounder: a new online platform run by a board of frustrated British historians who seek to “provide context, explanation and balance in a debate in which condemnation is too often preferred to understanding.” As a historian myself, I should say that I greatly admire Abulafia’s work, particularly its wide-ranging synthesis and its literary quality, neither of which is easy to achieve and both of which have been models for me in my own work. Which is why I was surprised to find a piece by him in the Daily Mail, a right-wing tabloid not exactly known for academic rigor. When I spoke with Abulafia about it, he seemed a little embarrassed. “It’s basically an interview that they turn into text and then send back to you,” he told me. “Some of the sentences have been generated by the Daily Mail.”

      As in the United States, the UK’s Black Lives Matter protests led to the toppling of statues, including the one in downtown Bristol of Edward Colston, a 17th-century merchant whose wealth derived in part from his active involvement in the slave trade. Abulafia told me he prefers a “retain and explain” approach, which means keeping such statues in place but adding context to them when necessary. I asked him about the public presentation of statues and whether by their very prominence they command an implicit honor and respect. He seemed unconvinced. “You look at statues and you’re not particularly aware of what they show,” he said.

      “What do you do about Simon de Montfort?” Abulafia continued. “He is commemorated at Parliament, and he did manage to rein in the power of monarchy. But he was also responsible for some horrific pogroms against the Jews. Everyone has a different perspective on these people. It seems to me that what we have to say is that human beings are complex; we often have contradictory ideas, mishmash that goes in any number of different directions. Churchill defeated the Nazis, but lower down the page one might mention that he held views on race that are not our own. Maintaining that sense of proportion is important.”

      All of these are reasonable points, but what I still don’t understand is why history as it was understood by a previous generation must be the history understood by future generations. Statues are not history; they are interpretations of history created at a certain moment in time. Historians rebuke previous interpretations of the past on the page all the time; we rewrite accounts of well-known events according to our own contemporary perspectives and biases. What is so sacred about a statue?

      I asked Abulafia why all of this felt so personal to him, because it doesn’t feel that way to me. He replied, “I think there’s an element of this: There is a feeling that younger scholars might be disadvantaged if they don’t support particular views of the past. I can think of examples of younger scholars who’ve been very careful on this issue, who are not really taking sides on that issue.” But I am exactly such a younger scholar, and no one has ever forced me to uphold a certain opinion, either at Harvard or at Oxford. For Abulafia, however, this is a terrifying moment. “One of the things that really worries me about this whole business is the lack of opportunities for debate.”

      Whatever one thinks of “woke” purity tests, it cannot be argued in good faith that the loudest European voices on the anti-woke side of the argument are really interested in “debate.” In France especially, the anti-woke moment has become particularly toxic because its culture warriors—on both the right and the left—have succeeded in associating “le wokeisme” with defenses of Islamist terrorism. Without question, France has faced the brunt of terrorist violence in Europe in recent years: Since 2015, more than 260 people have been killed in a series of attacks, shaking the confidence of all of us who live here. The worst year was 2015, flanked as it was by the Charlie Hebdo and Bataclan concert hall attacks. But something changed after Paty’s brutal murder in 2020. After a long, miserable year of Covid lockdowns, the French elite—politicians and press alike—began looking for something to blame. And so “wokeness” was denounced as an apology for terrorist violence; in the view of the French establishment, to emphasize identity politics was to sow the social fractures that led to Paty’s beheading. “Wokeness” became complicit in the crime, while freedom of expression was reserved for supporters of the French establishment.

      The irony is fairly clear: Those who purported to detest American psychodramas about race and social justice had to rely on—and, in fact, to import—the tools of an American culture war to battle what they felt threatened by in their own country. In the case of Paty’s murder and its aftermath, there was another glaring irony, this time about the values so allegedly dear to the anti-woke contingent. The middle school teacher, who was targeted by a Chechen asylum seeker because he had shown cartoons of the prophet Muhammad as part of a civics lesson about free speech, was immediately lionized as an avatar for the freedom of expression, which the French government quite rightly championed as a value it would always protect. “I will always defend in my country the freedom to speak, to write, to think, to draw,” Macron told Al Jazeera shortly after Paty’s killing. This would have been reassuring had it not been completely disingenuous: Shortly thereafter, Macron presided over a crackdown on “islamo-gauchisme” in French universities, a term his ministers used with an entirely straight face. If there is a single paradox that describes French cultural life in 2021, it is this: “Islamophobia” is a word one is supposed to avoid, but “Islamo-leftism” is a phenomenon one is expected to condemn.

      Hundreds of academics—including at the Centre National de la Recherche Scientifique, France’s most prestigious research body—attacked the government’s crusade against an undefined set of ideas that were somehow complicit in the Islamist terror attacks that had rocked the country. Newspapers like Le Monde came out against the targeting of “islamo-gauchisme,” and there were weeks of tedious newspaper polemics about whether the term harks back to the “Judeo-Bolshevism” of the 1930s (of course it does) or whether it describes a real phenomenon. In any case, the Macron government backtracked in the face of prolonged ridicule. But the trauma of the terror attacks and the emotional hysteria they unleashed will linger: France has also reconfigured its commitment to laïcité, the secularism that the French treat as an unknowable philosophical ideal but that is actually just the freedom to believe or not to believe as each citizen sees fit. Laïcité has become a weapon in the culture war, instrumentalized in the fight against an enemy that the French government assures its critics is radical Islamism but increasingly looks like ordinary Islam.

      The issue of the veil is infamously one of the most polarizing and violent in French public debate. The dominant French view is a function of universalist ideology, which holds that the veil is a symbol of religious oppression; it cannot be worn by choice. A law passed in 2004 prohibits the veil from being worn in high schools, and a separate 2010 law bans the face-covering niqab from being worn anywhere in public, on the grounds that “in free and democratic societies…o exchange between people, no social life is possible, in public space, without reciprocity of look and visibility: people meet and establish relationships with their faces uncovered.” (Needless to say, this republican value was more than slightly complicated by the imposition of a mask mandate during the 2020 pandemic.)

      In any case, when Muslim women wear the veil in public, which is their legal right and in no way a violation of laïcité, they come under attack. In 2019, for instance, then–Health Minister Agnès Buzyn—who is now being investigated for mismanaging the early days of the pandemic—decried the marketing of a runner’s hijab by the French sportswear brand Decathlon, because of the “communitarian” threat it apparently posed to universalism. “I would have preferred a French brand not to promote the veil,” Buzyn said. Likewise, Jean-Michel Blanquer, France’s education minister, conceded that although it was technically legal for mothers to wear head scarves, he wanted to avoid allowing them to chaperone school trips “as much as possible.”

      Nicolas Cadène, the former head of France’s national Observatory of Secularism—a laïcité watchdog, in other words—was constantly criticized by members of the French government for being too “soft” on Muslim communal organizations, with whose leaders he regularly met. Earlier this year, the observatory that Cadène ran was overhauled and replaced with a new commission that took a harder line. He remarked to me, “You have political elites and intellectuals who belong to a closed society—it’s very homogeneous—and who are not well-informed about the reality of society. These are people who in their daily lives are not in contact with those who come from diverse backgrounds. There is a lack of diversity in that elite. France is not the white man—there is a false vision [among] our elites about what France is—but they are afraid of this diversity. They see it as a threat to their reality.”

      As in the United States, there is a certain pathos in the European war on woke, especially in the battalion of crusaders who belong to Cleese and Finkielkraut’s generation. For them, “wokeism” —a term that has no clear meaning and that each would probably define differently—is a personal affront. They see the debate as being somehow about them. The British politician Enoch Powell famously said that all political lives end in failure. A corollary might be that all cultural careers end in irrelevance, a reality that so many of these characters refuse to accept, but that eventually comes for us all—if we are lucky. For many on both sides of the Atlantic, being aggressively anti-woke is a last-ditch attempt at mattering, which is the genuinely pathetic part. But it is difficult to feel pity for those in that camp, because their reflex is, inescapably, an outgrowth of entitlement: To resent new voices taking over is to believe that you always deserve a microphone. The truth is that no one does.

      https://www.thenation.com/article/world/woke-europe-structural-racism

  • Sandrine Josso, députée de Loire-Atlantique, endette sa collaboratrice Antton Rouget
    https://www.mediacites.fr/enquete/nantes/2021/10/11/sandrine-josso-deputee-de-loire-atlantique-endette-sa-collaboratrice

    Depuis maintenant trois ans, Leïla , 49 ans, n’a pas ménagé ses efforts pour essayer de retrouver son argent. Sans succès. « Elle m’a d’abord dit que l’argent allait arriver, peut-être en liquide, mais je ne l’ai pas reçu. Par contre, il faut que je rembourse tous les mois mon crédit », dénonce la quadragénaire, mère de famille. 

    En 2017, Sandrine Josso, nutritionniste de profession, avait été élue à la surprise générale profitant de la vague macroniste. Elle représentait une de ces fameuses « figures de la société civile », censée dépoussiérer la politique face au favori sur la circonscription, le candidat Les Républicains Franck Louvrier, ancien directeur de communication de Nicolas Sarkozy.


    Sandrine Josso à l’Assemblée Nationale, en mars 2018 / © Photo : CC 4.0 - Zembrocale975

    Leïla n’avait jusqu’ici jamais côtoyé le monde des élus ; titulaire d’un CAP, elle venait de se retrouver sans emploi après avoir enchaîné les boulots dans la coiffure et la restauration. Alors quand la nouvelle députée, une « bonne connaissance » à elle, lui propose un poste stable à l’Assemblée, elle n’hésite pas une seconde. Leïla devient collaboratrice parlementaire en circonscription pour gérer les affaires locales de la députée. « Je me suis occupée de tout pour elle », témoigne-t-elle auprès de Mediapart. Y compris de tâches bien éloignées du travail parlementaire : « Sa coiffure, ses enfants, son déménagement à Vannes, lui trouver un logement un Paris, etc. », énumère Leïla.

    Chèques en blanc
    En octobre 2018, la députée, qui est divorcée et avait peu de ressources avant d’entrer à l’Assemblée, lui explique qu’elle a des problèmes d’argent. « Elle avait des soucis pour payer le loyer de sa permanence parlementaire d’Herbignac et de son logement à Paris », a raconté sa collaboratrice aux policiers ayant recueilli sa plainte.

    Leïla accepte de l’aider en contractant, le 18 octobre, un crédit à la consommation de 9 000 euros. Elle donne en toute confiance deux chèques en blanc à sa députée pour que celle-ci puisse éponger ses dettes. Sandrine Josso les utilise les jours suivants pour régler l’agence immobilière chargée de la location de la permanence ainsi que le propriétaire de son logement parisien pour un montant total de 10 514,29 euros.

    Les semaines suivantes, la collaboratrice attend son remboursement, qui devait, selon elle, « intervenir en trois versements », mais n’arrivera jamais. Quelques jours plus tôt, Leïla avait vu son salaire de l’Assemblée augmenter, passant de 2 100 euros brut par mois à 2 365 euros brut. Sandrine Josso lui attribuera aussi deux primes – de 3 527 euros à chaque fois, fin octobre, puis en avril.

    Souhaitait-elle ainsi compenser, sur fonds publics, l’absence de remboursement d’un prêt privé ? Pas du tout, répond Sandrine Josso. « Elle avait besoin d’argent. La pauvre, elle se démenait pour m’aider tant qu’elle pouvait, c’était une amie, ce n’était pas du tout quelque chose de professionnel », indique la députée pour justifier le versement de ces primes.

    Mécontente de ne pas être remboursée en bonne et due forme, Leïla essaye de solliciter la déontologue de l’Assemblée pour une médiation, en vain. En mai 2019, elle est placée en arrêt maladie, ne « support[ant] plus cette situation, tant au niveau professionnel que personnel », comme elle l’a expliqué aux policiers.

    Loyer de la permanence parlementaire
    En août et septembre 2019, après de nouvelles relances, Sandrine Josso amorce un début de remboursement, en virant deux fois à sa collaboratrice la somme de 444,44 euros sur son compte personnel. Ce qui permet à l’élue d’expliquer à Mediapart, lors d’un premier échange sur le sujet en novembre 2019, qu’il n’y a aucun problème, juste un contretemps, mais qu’elle va bien rendre l’argent à Leïla.

    La parlementaire raconte ce jour-là qu’elle a mis en place un « échéancier de remboursement de 444,44 euros tous les mois ». « J’étais dans une situation difficile dans ma vie privée, s’épanche alors Sandrine Josso. Avant d’être députée, j’étais dans une profession libérale et j’avais eu des difficultés, j’ai dû avoir un plan d’apurement avec l’Urssaf. Dans cette situation-là, [Leïla] m’a dit : “Écoute, j’ai de l’argent, je te le file, tu me rembourseras quand tu le pourras.” C’est tout, moi j’ai dit, OK, c’est de l’ordre privé, moi je n’ai pas le temps d’aller à la banque, de refaire un prêt, etc. »

    « Leïla était ma collaboratrice mais c’était mon amie, ajoute la députée. Elle m’aidait moralement parce que je vivais des choses difficiles sur le plan personnel. » Y compris en lui faisant des couleurs le week-end ? « Quand je n’avais pas le choix, c’est elle qui me le proposait, moi je ne l’ai jamais forcée à ça. »

    Alors qu’une partie des fonds prêtés par sa collaboratrice a servi à payer des échéances de loyers de sa permanence parlementaire (6 614 euros sur les 10 514 euros), se pose une question : pourquoi Sandrine Josso n’a-t-elle pas tout simplement pioché dans son enveloppe avance sur frais de mandat (AFM), 5 373 euros par mois, prévue à cet effet ?
    . . . . .
    À l’issue du rendez-vous avec Mediapart de novembre 2019, Sandrine Josso est revenue sur sa promesse d’échéancier de remboursement, en cessant de verser de l’argent à Leïla. La députée ne lui donnera que 444,44 euros supplémentaires, le 19 novembre 2020, deux semaines avant une audience de conciliation devant les prud’hommes de Saint-Nazaire.

    À ce jour, la députée reste donc redevable de la somme de 9 181,41 euros. Le 30 juin 2021, le juge de l’exécution près le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a ainsi autorisé la collaboratrice à faire pratiquer sur le compte à la Banque postale de la députée une saisie conservatoire de 6 666,60 euros.
    . . . . .
    Déclarée inéligible pour un an à la suite des élections municipales
    D’une manière générale, plusieurs de ses anciens collaborateurs critiquent la « légèreté » de Sandrine Josso, une députée peu impliquée dans l’hémicycle. Avec à la clé quelques exemples surprenants. Leïla raconte, par exemple, qu’il lui est arrivé à plusieurs reprises de prendre le train pour Paris en utilisant, à sa demande, l’identité de sa députée pour bénéficier d’un tarif préférentiel de parlementaire.

    « Je voyageais sous son nom pour aller à Paris », précise-t-elle. Ce que raconte aussi une autre ancienne collaboratrice, également fâchée avec Sandrine Josso pour des motifs financiers, qui a utilisé le 8 juillet 2018 un billet au nom de la députée pour rentrer de La Baule à Paris, ainsi que Mediapart a pu le documenter. « Les billets en mon nom, c’est complètement illégal de faire ça ! », s’indigne la députée, expliquant être étrangère à cette pratique et ne pas savoir « comment [sa collaboratrice] a pu avoir un billet en [son] nom ».

    Cette seconde collaboratrice ajoute qu’elle a principalement travaillé, à l’été 2018, à la candidature à venir de Sandrine Josso aux élections municipales à La Baule – ce qui, là encore, ne fait pas partie des attributions des collaborateurs parlementaires. « Elle a travaillé pour ma com’, elle m’accompagnait dans des événements, pas sur les municipales, je n’étais pas encore déclarée [à la candidature] », conteste la députée.

    Sandrine Josso a finalement annoncé sa candidature officielle en août 2019, pour ne recueillir que 4,2 % des suffrages au premier tour des municipales de mars 2020.

    En février 2021, la députée, qui a rejoint le MoDem après avoir quitté LREM en 2019, a été condamnée par le tribunal administratif de Nantes à une peine d’inéligibilité d’un an pour avoir tardé à rendre ses comptes de campagne pour l’élection municipale. Elle n’a pas fait appel, histoire de laisser passer cette décision et de se donner la possibilité de se représenter aux législatives de 2022.
    . . . . .
    #Sandrine_Josso #AFM #députée #MoDem #LREM #France #assemblée_nationale #élections #fric

  • Les géants de l’habillement fragilisés par le confinement prolongé du Vietnam
    https://fr.fashionnetwork.com/news/Les-geants-de-l-habillement-fragilises-par-le-confinement-prolong

    Chaussures de sport, sweat-shirts, pantalons de survêtement : le confinement strict et prolongé du Vietnam en raison du coronavirus a provoqué des pénuries de produits chez des marques internationales telles que #Nike et #Gap, devenues de plus en plus dépendantes des fabricants de ce pays d’Asie du Sud-Est.

    Dans son usine de tissus à l’est de Hanoï, Claudia Anselmi, la directrice de Hung Yen Knitting & Dyeing, sous-traitant pour plusieurs géants européens et américains de l’habillement, se demande chaque jour si les machines vont devoir s’arrêter.

    Lorsque la dernière vague de #Covid-19 a frappé le pays au printemps, la production a chuté de 50%, et l’Italienne est confrontée à des problèmes d’approvisionnement.

    « Les restrictions de voyage ont mis en péril toute la logistique d’entrée et de sortie... cela a créé de longs, longs retards » dans la livraison du fil utilisé dans des maillots de bain et des vêtements de sport pour des clients tels que #Nike, #Adidas et Gap, a-t-elle déclaré à l’AFP.

"Nous ne survivons que si nous avons du #stock".

    Ajouter à cela des mesures de #confinement contrôlées de manière stricte qui ont empêché de nombreux vietnamiens de se rendre au travail ou de circuler pendant de longues périodes.

    

Plusieurs chauffeurs du delta du Mékong ont dû attendre trois jours et trois nuits dans leur véhicule avant d’entrer dans Can Tho (sud), a raconté Hamza Harti, le responsable de l’entreprise de logistique FM Logistic lors d’une table ronde à la chambre de commerce française de Hanoï. « Ils étaient sans nourriture, sans rien ».

 

    Accélérées par la guerre commerciale entre Washington et Pékin, les relocalisations d’usines de la #Chine vers l’Asie du Sud-Est se sont amplifiées ces dernières années, particulièrement au bénéfice du Vietnam.


    Risques de rupture d’approvisionnement
    Mais les mesures sanitaires exposent désormais les #multinationales à des risques de rupture d’#approvisionnement.



    L’équipementier Nike, qui produit la moitié de ses chaussures dans le pays communiste, a annoncé des pénuries et a revu ses prévisions de vente à la baisse, déclarant que 80% de ses usines dans le sud du pays ont dû fermer.



    Le japonais Fast Retailing, propriétaire de la marque #Uniqlo, a également mis sur le compte du blocage du Vietnam des retards dans la production de ses vêtements.

    #Adidas a de son côté estimé que la baisse de ses ventes pourrait atteindre jusqu’à 500 millions d’euros d’ici à la fin de l’année.

    

Plusieurs marques dont Nike et Adidas ont annoncé qu’elles envisageaient de produire temporairement ailleurs qu’au Vietnam.


    Dans une lettre adressée au Premier ministre Pham Minh Chinh, plusieurs associations d’entreprises américaines, européennes, sud-coréenne et du sud-est asiatique ont tiré la sonnette d’alarme, avertissant que 20% de leurs membres fabricants avaient déjà quitté le pays.

"Une fois la production déplacée, il est difficile d’y revenir", ont-ils écrit.

    Nguyen Thi Anh Tuyet, directrice générale adjointe de Maxport Vietnam, dont les 6.000 employés fabriquent des vêtements de sport pour des entreprises comme #Lululemon, #Asics et Nike, a déclaré à l’AFP que l’entreprise était « très inquiète » de voir ses clients retirer leurs commandes, même si elle est l’une des rares à avoir traversé ces derniers mois pratiquement indemne.



    Sans clients étrangers, « nos travailleurs se retrouveraient sans emploi », a-t-elle ajouté. La pandémie n’a pas seulement frappé l’industrie textile du pays, elle menace également le café, le Vietnam étant le premier producteur mondial de robusta.


    Les constructeurs automobiles n’y ont pas échappé non plus : #Toyota a réduit sa production pour septembre et octobre, en partie à cause du virus, et a déclaré à l’AFP que « l’impact a été important au Vietnam », ainsi qu’en Malaisie.

    

Les pénuries ont été aggravées par un regain de la demande en Occident, après un effondrement au plus fort de la crise du Covid-19.

Dans son usine textile près de Hanoï, Mme Anselmi pense que les entreprises resteront au Vietnam si le pays parvient à retrouver une certaine normalité en octobre :

    « Si nous pouvons permettre aux usines de travailler, je pense que la confiance (dans le Vietnam) est toujours là ».

    #Textile #Vietnam #Italie #café #vêtements #industrie_textile #conditions_de_travail #exploitation #mode #coronavirus #capitalisme #chaîne_d'approvisionnement #mondialisation #pénuries

  • La seconde main : un « axe stratégique » pour les grands magasins parisiens
    https://www.francetvinfo.fr/culture/mode/la-seconde-main-un-axe-strategique-pour-les-grands-magasins-parisiens_4


    1.300 m² au sommet du bâtiment mode femmes du Printemps Haussmann à Paris dédiés à la mode circulaire, au vintage et à la seconde main. (ROMAIN RICARD)

    « La seconde main est un axe stratégique important qui s’inscrit dans une stratégie plus globale pour retrouver de l’unicité et du wahou », a affirmé sur BFM Business le président du groupe, arrivé à l’automne 2020, évoquant le caractère « instagrammable » de la vue depuis la coupole choisie.

    (...) les Galeries Lafayette poursuivent eux aussi leur engagement en faveur des nouveaux modes de vie avec l’espace (Re)Store.

    Dédié à la mode circulaire associant vintage, marques responsables, il propose du luxe et de l’accessible avec les acteurs de la seconde main, des produits green ainsi ainsi que des services pour déposer ses anciens vêtements et les recycler.

    La croissance de Vinted fait des envieux. Au moins un des leaders de la vente en ligne (zalando) s’est également lancé dans le seconde main, pour de l’ordinaire.

    #greenwashing #mode #luxe #textile #mode_circulaire

  • La « ville de demain » : vers une « déspécialisation » des bâtiments pour s’adapter aux nouveaux modes de vie ?
    https://www.banquedesterritoires.fr/la-ville-de-demain-vers-une-despecialisation-des-batiments-pour

    La crise du Covid-19 est venue accélérer les changements en cours dans les #modes_de_vie et de travail, avec l’essor du #télétravail, des #espaces_partagés... Lors de la quatrième table-ronde « Travailler, se déplacer, consommer, habiter », organisée le 21 septembre 2021 dans le cadre de la réflexion « Habiter la France de demain », sociologues, architectes, acteurs du bâtiment, partenaires publics et privés, ont esquissé les évolutions nécessaires pour s’adapter à ces mutations profondes. L’un des leitmotiv : la « #déspécialisation » des bâtiments.

    #urbanisme

  • #Salaire des #fonctionnaires : « On entre dans une logique de #contractualisation et de #liberté »

    Selon le spécialiste de la réforme de l’Etat #Luc_Rouban, la #conférence_sur_les_perspectives_salariales des fonctionnaires qui s’ouvre mardi pourrait acter la mise en place d’une nouvelle architecture de la fonction publique.

    Alors que la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, ouvre, mardi 21 septembre, une conférence sur les #perspectives_salariales des fonctionnaires, le spécialiste de la réforme de l’Etat Luc Rouban, directeur de recherches au CNRS, chercheur au Centre d’études de la vie politique française de Sciences Po (Cevipof), montre que cela sous-tend une transformation profonde de la #fonction-publique.

    A six mois de la présidentielle, ouvrir une conférence de six mois sur la rémunération des fonctionnaires, est-ce un gadget politique ou le début d’un vrai travail de fond ?

    C’est le début d’un vrai travail de fond. S’il s’agissait d’un gadget politique, le calendrier serait particulièrement mal choisi. Des promesses faites aujourd’hui n’engagent à rien… Ce serait même plutôt un mauvais calcul politique.

    Là, il s’agit de régler un problème de fond. La disparition d’un certain nombre de #corps (celui des préfets, des inspections, etc.) amorce une réforme plus large de la fonction publique française. Celle-ci sort d’un #modèle_corporatif et se dirige vers un #modèle_d’emploi, comme dans la plupart des pays européens.

    C’est-à-dire ?

    L’existence de corps fait que le parcours des fonctionnaires est prévu à l’avance. Là, on fait sauter le #verrou_corporatif, et une nouvelle architecture de la fonction publique se met en place, avec une relation plus individualisée entre l’agent et l’employeur. Cela permet une plus grande #mobilité pour les fonctionnaires. Mais cela remet aussi en cause tout le système de #rémunération et de #progression. Il faut donc d’autres règles générales pour encadrer cette nouvelle situation, situation dans laquelle le jeu stratégique entre les #syndicats et le #gouvernement est brouillé.

    Car on sort également de l’habitude du grand rendez-vous salarial annuel tournant autour de la question de l’augmentation générale du #point_d’indice, avec une application corps par corps. On entre dans une logique de #contractualisation et de #liberté. Le poids de l’#avancement pèse sur le fonctionnaire à titre individuel beaucoup plus qu’avant : ce sera à lui de se préparer, de chercher des formations, de rédiger un bon CV, de solliciter un autre ministère ou un autre établissement public, d’accepter d’être mis en #concurrence avec d’autres agents ou des candidats venant du privé.

    On se rapproche de la logique du privé. C’est plus compliqué pour le fonctionnaire, mais les corps conduisent aussi à ce qu’après quelques années, on se retrouve bloqué dans son avancement. Vous arrivez à 45, 50 ans et vous n’avez plus beaucoup d’avenir. Il est souvent impossible d’accéder à l’#indice_salarial le plus élevé, et cela nourrit de la #frustration et du #mécontentement.

    Le système est donc bien à bout de souffle, comme le dit #Amélie_de_Montchalin ?

    Jusqu’à Nicolas Sarkozy, on faisait des augmentations générales, et on s’arrangeait avec les #primes. C’est une fausse #individualisation. Le système est bloqué et s’auto-reproduit : la #hiérarchie, des grands corps au sommet jusqu’aux fonctionnaires de catégorie C, est figée. Pourtant, la crise sanitaire a mis en lumière le caractère essentiel des #emplois_d’exécution. On commence donc à s’interroger sur la #hiérarchie_sociale et l’#utilité relative des uns et des autres dans la fonction publique.

    Dans la perspective de la présidentielle, tout cela représente-t-il un atout pour Emmanuel Macron afin de séduire les 5,6 millions de fonctionnaires, quand la socialiste Anne Hidalgo propose de doubler le salaire des enseignants ?

    Il peut se démarquer face à la proposition d’Anne Hidalgo, qui reste quantitative et très spécifique, en proposant une refonte qualitative concernant l’ensemble des fonctionnaires qui associe la question des #rémunérations à celle du déroulement des #carrières, des #qualifications et des #conditions_de_travail. Cela lui permet de faire du « en même temps » puisqu’il peut aussi se présenter comme quelqu’un de responsable qui cherche à préserver les équilibres budgétaires ou, du moins, à limiter les déséquilibres.

    En mécontentant donc l’électorat de droite, essentiel pour le candidat Macron, qui souhaite diminuer la dépense publique ?

    L’électorat de droite n’est pas totalement néolibéral… Même à droite, on défend le service public et l’Etat-providence. Le patronat a applaudi les mesures exceptionnelles qui ont protégé les entreprises et les salariés. Les Français ont conscience que le #service_public assure un minimum de #cohésion_sociale, ne serait-ce que par les forces de sécurité. Il existe une demande très forte de protection et d’intervention publique. La droite parlementaire fait une erreur stratégique en reprenant la logique néolibérale de 2017. Elle dit qu’il faut diminuer les dépenses, et donc, le nombre de fonctionnaires, mais sans proposer de réflexion sur l’architecture interne de la fonction publique et sur ses métiers. C’est donc un moyen pour Emmanuel Macron de se démarquer, ici aussi.

    https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/09/20/salaire-des-fonctionnaires-on-entre-dans-une-logique-de-contractualisation-e
    #fonctionnariat #néo-libéralisme

  • Le Monde selon #Modi, la nouvelle #puissance indienne

    « Aucune puissance au monde ne peut arrêter un pays de 1,3 milliard d’habitants. Le 21e siècle sera le siècle de l’Inde ».
    #Narendra_Modi, nationaliste de droite, à la tête de l’Inde depuis 2014, est le nouvel homme fort de la planète. 3ème personnalité la plus suivie sur Twitter, au centre de « l’Indopacifique », une nouvelle alliance contre la Chine. C’est l’histoire d’un tournant pour l’Inde et pour le monde.

    http://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/62159_1

    #film #film_documentaire #documentaire
    #Inde #Savarki #culte_de_la_personnalité #nationalisme #cachemire_indien #purge #militarisation #couvre-feu #RSS #patriotisme #religion #propagande_hindoue #colonialisme #impérialisme #BJP #parti_nationaliste_hindou #pogrom #islamophobie #Amit_Shah #Vibrant_Gujarat #hologramme #réseaux_sociaux #journée_internationale_du_yoga #yoga #soft_power #fierté_nationale #Alliance_indo-pacifique #Indo-Pacifique #armée #Routes_de_la_soie #route_de_la_soie #collier_de_perles #Chine #armes #commerce_d'armes #Ladakh #frontières #zones_disputées #disputes_frontalières #différends_frontaliers #litige_frontalier #zones_frontalières #zone-tampon #Israël #revanche_nationaliste #temple_Ajodhya #hindouisme #déchéance_de_nationalité #citizenship_amendment_act #citoyenneté #primauté_des_Hindous #résistance #milices_privées

  • AfD-nahe #Erasmus-Stiftung : Steuergeld für politische Unbildung
    https://taz.de/AfD-nahe-Erasmus-Stiftung/!5799973
    Comment faire pour empêcher l’extrême driote allemande de s’emparer de plusieurs millions de subventions.

    13.9.2021 von Gareth Joswig - Nach der Wahl könnte die Stiftung der AfD Millionen vom Staat erhalten. Das Personal in Vorstand und Kuratorium zeigt, wie antidemokratisch sie ist.
    Erika Steinbach spricht in ein Mikro vor einer AFD Wand

    Die Vorsitzende der Desiderius-Erasmus-Stiftung, Erika Steinbach Foto: Sven Simon/picture alliance

    BERLIN taz | Ihr Steuergeld könnte künftig der AfD gehören. Das ist die Kernaussage der Kampagne „Kein Geld für die AfD“. Sie fragt derzeit in den sozialen Medien die Spit­zen­kan­di­da­t*in­nen der Bundestagswahl, wie sie es finden, dass Steuergeld bald der AfD zukommt und was sie dagegen tun wollen. Geantwortet haben die jeweils mit dem Vornamen angesprochenen Olaf, Annalena und Armin bisher allerdings nicht.

    Klar spitzt die Kampagne etwas zu, aber im Kern stimmt es: Wenn die AfD nach der Wahl ein zweites Mal in den Bundestag einzieht, steht ihrer parteinahen Des­­iderius­-Erasmus-Stiftung nach bestehender Praxis eine staatliche Förderung zu – ebenso wie sie andere parteinahe Stiftungen wie die Friedrich-Ebert-Stiftung der SPD oder die Konrad-Adenauer-Stiftung der CDU in Anspruch nehmen.

    Die parteilose Vorsitzende der Erasmus-Stiftung, Erika Steinbach, rechnet im ersten Jahr nach der Wahl mit rund acht Millionen Euro Förderung, im zweiten Jahr gar mit 14 Millionen, wie sie der taz sagte. Die genauer Förderungshöhe ergebe sich aus dem Wahlergebnis der AfD. Zum Vergleich: Die der AfD zustehende Parteienförderung lag 2020 bei 11,8 Millionen Euro.

    Fließen soll das Geld in den Aufbau eines AfD-nahen Bildungswerks: Die Stiftung will Politikberatung für AfDle­r*in­nen organisieren, Stipendien vergeben und Auslandskontakte pflegen. Steinbach sagt, man habe bereits begonnen, in allen Teilen des Landes Personal für den Aufbau zu suchen.
    Steuergeld für einen Rechtsruck in der politischen Bildung

    Steinbach ist bemüht, einen handzahmen Eindruck zu vermitteln. „Die Themenpalette ist breit gestreut“, wie sie sagt, „uns geht es um Schulbildung, Hochschulbildung sowie um Demokratie, Rechtsstaatlichkeit und Meinungsfreiheit, aber auch eine Zukunft Deutschlands als Nation.“ Ab dem zweiten Jahr wolle man auch ein Stipendienprogramm aufsetzen, so Steinbach. Man wolle für eine „Erweiterung des Diskurses“ sorgen, weil die Meinungsfreiheit in Deutschland bedroht sei, wie sie behauptet.

    Die Stiftung könnte mit dem Staatsgeld Personal einstellen, rechte Karrieren ermöglichen und dabei helfen, extrem rechte Positionen gesellschaftsfähig zu machen und so die AfD weiter zu normalisieren. Steuergeld würde einen Rechtsruck in der politischen Bildung finanzieren, sagen Kritiker*innen. Geld, das der Stärkung demokratischer Parteien und politischer Bildung dienen soll, würde in antidemokratische Strukturen fließen – und dafür sorgen, dass rechtsextreme Inhalte in Hochglanzbroschüren mit intellektuellem Anstrich verpackt würden.

    Die Liste problematischer Personen in der Stiftung ist lang

    Davon jedenfalls ist ein breites Bündnis von mittlerweile über 80 Organisationen und Initiativen überzeugt, das in einem zivilgesellschaftlichen Manifest vor dem „Stiftungstrick der AfD“ warnt. Beteiligt sind der Zentralrat der Juden, der Deutsche Gewerkschaftsbund, Fridays for Future und viele mehr. Sie fordern ein Stiftungsgesetz für die Förderung parteinaher Bildungsinstitutionen – Geld soll es künftig demnach nur geben, wenn klar sei, dass die Einrichtung sich demokratischen Grundwerten verpflichtet fühlt. Steinbach sagt, sie habe nichts zu befürchten: Ihre Stiftung stünde mit beiden Beinen fest auf dem Grundgesetz.
    Hetze, Antisemitismus, Geschichtsrevisionismus

    Meron Mendel von der Bildungsstätte Anne Frank in Frankfurt am Main ist da anderer Meinung. Er ist Initiator des Protests und beschäftigt sich seit drei Jahren intensiv mit der Stiftung. Er sagt: „Diejenigen, die in der Erasmus-Stiftung sitzen, haben nachweislich keine Qualifikation, um politische Bildung zu machen.“ Inhaltlich erschöpften sich viele Äußerungen von Mitgliedern des Vorstands und des Kuratoriums in Hetze gegen Geflüchtete, Antisemitismus, Sex­ismus, Homophobie oder Geschichtsrevisionismus. „Es ist in der Verantwortung der neuen Koalition, eine gesetzliche Regelung zu treffen.“

    Kritik an mangelnder Transparenz bei der Finanzierung der parteinahen Stiftungen gibt es schon länger. Jährlich werden an diese rund eine halbe Milliarde Euro ausgeschüttet. „Das ist keine Parteienfinanzierung, sondern zweckgebundenes Geld für politische Bildung. Es kann nicht sein, dass Organisationen nicht nachweisen müssen, dass sie den Zweck erfüllen“, sagt Mendel.

    Dass die Steuergelder für die Erasmus-Stiftung tatsächlich demokratieförderlich wären, erscheint besonders fraglich, wenn man sich mit den Köpfen in Vorstand und Kuratorium auseinandersetzt. Die Liste problematischer Personen ist lang.

    Kurzer, unvollständiger Auszug: Marc Jongen, AfD-Bundestagsabgeordneter, sprach mit Blick auf Geflüchtete von einer „Migranteninvasion“. Vorstand Sebastian Wippel darf laut Landgericht Görlitz als Faschist bezeichnet werden und wünschte Angela Merkel den Tod durch Terror. Das Kuratoriumsmitglied Angelika Barbe beteiligte sich an „Querdenken“-Demos und Kuratoriumsmitglied Karl Albrecht Schachtschneider gehört dem inneren Kreis der extrem rechten Initiative „Ein Prozent“ an.
    Verbindungen zum Institut für Staatspolitik

    Auffällig sind zudem personelle Kontinuitäten zum geheimdienstlichen Beobachtungsobjekt Institut für Staatspolitik (IfS). Dessen Geschäftsführer Erik Lehnert war bis Mai 2020 auch Vorstand in der Erasmus-Stiftung. Er musste gehen, als der Verfassungsschutz den neurechten Thinktank als rechtsextremen Verdachtsfall einstufte. Inhaltliche Differenzen waren nicht der Grund für seinen Abgang. Das aktuelle Vorstandsmitglied Jan Moldenhauer ist als Referent und Autor auch im Umfeld des IfS zu verorten.

    Auch ein mittlerweile ausgetretenes Gründungsmitglied des IfS ist für die Erasmus-Stiftung eine wichtige Personalie: Karlheinz Weißmann dürfte im Kuratorium mitverantwortlich sein für die inhaltliche Ausrichtung. Steinbach sagt der taz, dass Weißmann „durch und durch Demokrat“ sei.

    Deutlich anders sieht das Armin Pfahl-Traughber, Ex­tremismusforscher und ehemaliger Referatsleiter für Rechtsextremismus beim Verfassungsschutz. In einem WDR-Feature sagte er: „Weißmann beruft sich auf Jungkonservative der Weimarer Republik. Das ist eine erklärte Strömung des antidemokratischen Denkens.“ Sie orientiere sich an „einer ethnischen Homogenität der Gesellschaft“, die gegen zentrale Prinzipien des Pluralismus verstießen, wozu auch Vielfalt und die Menschenrechte gehörten. „Wenn solche Grundprinzipien geistig abgelehnt werden, sprechen wir von Rechtsextremismus“, so Pfahl-Traughber.

    Trotz der Problempersonalien haben SPD und CDU in dieser Legislatur kein Stiftungsgesetz vorgelegt. Wie eine Ausgestaltung aussehen könnte und ob sie im neuen Bundestag konsensfähig wäre, wird sich nach der Wahl zeigen. Grüne und Linke fordern jedenfalls schon länger, dass die Erasmus-Stiftung keine Staatsmittel bekommen soll. Die Grünen haben am Freitag eine parlamentarische Anfrage eingereicht, die der taz vorliegt, und unter anderem nach Erkenntnissen der Bundesregierung zum Personal der AfD-Stiftung und ihrer rechtsextremen Verstrickungen fragt.
    Steinbach hetzte gegen Lübcke

    Fündig würde die Bundesregierung nicht zuletzt bei der Stiftungschefin Steinbach selbst, die häufig in sozialen Medien rassistische Ressentiments schürt, gegen Minderheiten hetzt oder geschichtsrevisio­nistische Positionen bezieht. Als das Kind eines AfD-Politikers von einer Waldorfschule abgelehnt wurde, twitterte sie: „Die Kinder von AfD-Mitgliedern sind die neuen ‚Judenkinder.‘“ Für Mendel ist das Holocaust­relativierung.

    Steinbach, die 2017 aus der CDU austrat, wurde zudem für den Mord am CDU-Politiker Walter Lübcke mitverantwortlich gemacht, nachdem sie Hass gegen Lübcke anstachelte. Steinbach weist die Verantwortung von sich und verurteile Extremismus jeglicher Art. Nur wie ein Lippenbekenntnis wirkt die Distanzierung allerdings, wenn man sich Steinbachs Konflikt mit Mendel vergegenwärtigt. Im Zuge ihrer teilweise auch rechtlichen Auseinandersetzung veröffentlichte sie 2019 Gerichtsunterlagen inklusive der Privatadresse von Mendel.

    „In dieser Zeitspanne habe ich sehr viele Drohbriefe und Einschüchterungsversuche bekommen. Ich stand im regelmäßigen Austausch mit der Polizei“, beschreibt Mendel die Folgen der Veröffentlichung. Steinbach sagt dazu, dass sie Mendel nicht persönlich habe schaden wollen. Zudem sei auch ihre eigene Adresse auf dem Schreiben gewesen. „Auch ich stand schon mehrfach unter Polizeischutz, die Antifa liebt mich heiß und inniglich“, sagt sie – als wäre das eine Entschuldigung für ihr Verhalten.

    Die Kampagne „Kein Geld für die AfD“ hat dazu aufgefordert, Po­li­ti­ke­r*in­nen anzuschreiben – damit diese sich gegen eine Förderung der Erasmus-Stiftung einsetzen. Einen Standardbrief hat die Kampagne bereits vorbereitet. Wer weiß – vielleicht überlegen sich Olaf, Armin und Annalena ja doch noch eine passende Antwort.

    Korrektur, 14.9.2021: In der ursprünglichen Version des Artikels haben wir Armin Pfahl-Traughber mit einem falschen Begriff zitiert. Er hatte im zitierten WDR-Feature „Pluralismus“ als Merkmal von moderner Demokratie und damit als Abgrenzungskriterium zum Extremismus benannt, nicht „Globalismus“, wie es zunächst in diesem Artikel hieß.

    #extrême_droite #modèle_d_affaires #Allemagne #politique

  • From Form‑Trans‑Inform to Atelier d’Architecture Autogérée. A Discussion with Doina Petrescu and Constantin Petcou
    Zeppelin
    https://e-zeppelin.ro/en/from-form%e2%80%91trans%e2%80%91inform-to-atelier-darchitecture-autogeree

    Summer 2021

    Interview: Alex Axinte

    Co-founded by Constan­tin Petcou and Doina Petrescu, atelier d’architecture autogérée (aaa) is “a collective platform of research and action around urban change and emerging cultural, social and political practices in the contemporary city. aaa initiates and supports strategies of ecological transition involving citizen locally and internationally. aaa acts against global crisis (ecological, economic, political, social, etc) by creating the conditions for citizen to participate in the ecological transition and adopting resilient ways of living. aaa functions within an open interdisciplinary network, where different viewpoints cross each other: architects, artists, students, researchers, pensioners, politicians, activists, residents, etc.

    aaa is an international reference in the field of participative architecture and urban resilience, aaa’s projects have been exhibited at Venise Biennale 2012 and 2016, MoMA New York, Berlin Biennale, Pavilion d’Arsenal Paris, Untied Nation Pavilion Geneva, etc. For its activity, aaa has received international recogni­tion and numerous awards across the years including the International Resilient Award Building for Humanity (2018), The Innovation in Politics Award for Ecology (2017) being one of the “100 projects for the climate” selected by the public at COP21 (2015). (Alex Axinte)

    The passages bellow are extracted from a series of conversations I had during several days with Doina Petrescu and Constantin Petcou. At their studio, at home, in cafes and metros or visiting their projects located in different Paris suburbs, we spoke about their beginnings in Romania, about their current practice atelier d’architecture autogérée (aaa) and about future plans. While still in school, within the social and political context of 1980’s Romania, they were involved in initiating groups and networks, they engaged in experiment and innovation, building after graduation an alternative practice through a critically approach of architecture.

    Visiting aaa. Drawing by Alex Axinte

    Alex Axinte: Let’s start from the time when you were professionally and humanly trained in Romania within the socialist education system of that time. Has this contributed to what your practice became?

    Doina Petrescu: Certainly it was a seed there, which wasn’t enough by itself, but it was important because this prepared us to face practical situations, knowing everything that a traditional architect should know. And this thing was a solid base, for knowing how to build, knowing about materials, knowing about structure, knowing history, you can see now that this is not taught in schools anymore, that these became specializations, you specialize in such things. We learned them all. And somehow this general formation counted a solid base, as a foundation. On top of this you can add other more sophisticated things, you may try to position yourself, you can take a stand, and you can develop certain interests. So this was one of the good things. Other good thing from the school, not necessarily different from the school, but one that we took or created in the school, was some sort of parallel school, of which Constantin can say more because he initiated it, adding the fact that the school allowed us the freedom to do other things.

    Constantin Petcou: I did two interesting things in school: first is that I walked a lot through Bucharest and I took the street as a teacher. I had also good teachers, but I studied a lot vernacular architecture. And second is that I initiated a group, a sort of school in school, which was called Form-Trans-Inform and which was based on knowledge theory, and other theories as well. [Stratford H, Petrescu D & Petcou C (2008) Form-Trans-Inform: the ‘poetic’ resistance in architecture. arq: Architectural Research Quarterly, 12(02)] Basically it was a transdisciplinary group: there were students from scenography, we had interactions with others too, we also organized some events in Club A, we invited philosophes, art critiques, until they spotted me and wanted me to enrol in the party…

    “Inner Gesture“ – happening, Baneasa 1982, team: Constantin Petcou, Constantin Gorcea, Florin Neagoe, Lavinia Marșu, Doru Deacu, Sorin Vatamaniuc, Constantin Fagețean ©Form-Trans-Inform

    AA: What vernacular Bucharest meant?

    CP: It meant some fabulous neighbourhoods, because many they were self-constructed, this being usual in mahalas (ie. popular neighbourhoods). The inhabitants were partly self-sufficient: they were already controlling the household climate, having a lot of courtyards covered with vine, they were trying to produce energy, and there were quite a lot of wind mills, they were trying to produce food by raising pigeons in big cages , which were flying all around… It was like in Garcia Marquez. If you were really sensitive to space and wind and light, you were blown away by how much you could see and feel…

    AA: Is this something that you were looking for also in Paris, or you rather came with this type of looking from Bucharest?

    CP: In Paris you don’t have such a thing. I think it was a root that we came from there.

    DP: Yes, and we applied this later in projects like R-Urban and other projects which we developed later. It was a lesson we have learned, we have understood from those conditions. Also, we still kept having this sensibility to “read” spaces’ potentiality. For example you see a square and some trees: you realise that there is a place there with a certain urban quality and in Bucharest there were many such places with very special qualities due to the urban typologies and ways of living. This mahala type of living was actually a sensitive urban typology.

    Constantin rises on his tops and waters the plants hanging from the studio’s ceiling. We flip through black and white magazines in which there were published some of their projects receiving prizes in paper architecture competitions. They tell me about how they became involved in organizing exhibitions, about working with clothing, about publications which didn’t make it past the 1st issue and where many articles finished with ‘to be continued’. Than, they continued with their architect’s life in Romania before ’89: Doina working in sistematizare (state planning) and Constantin as ‘mister Design’ in a factory of clothing and shoes. Here, with found materials, they worked together for redesigning an office space as a sort of ‘participative deconstructivist’ manifesto, quite provocative at the time. Doina goes out in the courtyard and ransacks bended over some compost containers. Here are their pets, some big earthworms which just received banana peels as their favourite meal. After ’90 they left for Paris guided by the idea to continue their postgraduate studies and than to come back.

    “Catarg towards Ithaca“ –“Honorable mention“ at Shinkenchiku Residential Competition, Japan, 1986. Echipa de proiect/Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu, Mircea Stefan, Victor Badea

    *The Design section atelier – Valceana Leather Factory, 1988. Project team : Constantin Petcou, Doina Petrescu ©ConstantinPetcou

    AA: It is a fairly quite spread perception, that architecture is architecture and politics is politics. We are doing our job, we design, we build. If this supports an ideology or not, this is not architecture’s business. How architecture became for you a political acting?

    DP: I think that in a way it was the context that forced us when we started. We started from scratch. And we had to invent ways of negotiating to gain access to space, to gain access to ways of practicing architecture, and we quickly realized that such a negotiation is political and that actually you need to learn to speak with people caring political responsibilities. But at the same time, we realized that the very fact of asking, of doing the practice differently is a political act. There were some things we refused to do, such as the conventional capitalist practice. We wanted to facilitate the inhabitants’ access to space, for any city inhabitant, we wanted to open urban spaces that are closed and that are controlled either by the municipalities or other institutions, and this is already a political act. We managed to ensure access to space, and afterwards, slowly, the self-management of the space, which was also a process, by persuading people that they have to become responsible if they want to use the space, that they need to learn how to manage it, to get along, to organize. This is in fact what Deleuze and Guatarri are calling micro-politics, meaning politics at the level of the subject, transformations at the subjective level. [Deleuze, G. and F. Guattari (2004), Anti-Oedipus, London: Continuum] We always worked with people. Our architecture always included this subjective and social architecture into the project. The fact that we formed a social group around the project, that people have changed, that they changed their interest, all these are for us part of architecture.

    AA: Do you tend towards consensus in your projects?

    CP: We don’t really use the word consensus. It is about temporary equilibrium. In any such a project, as there are many people involved, and here we speak about governance, co-management and self-management, there are various interests, there are people with different cultural backgrounds – some are employed, others not -­ and people with more or less time. So they cannot have the same vision over the use of space, over the type of activities, and then you need to reach some agreements, some temporary, partial deals, which should not suffocate the others and allow others to emerge. What we do is to give the inhabitants the opportunity to appropriate a space, an equipment, a way of organising time together, of organising the neighbourhood’s life, which are ecological, solidary, all this obviously with some guidance. Because the majority of inhabitants of the banlieue are very much excluded. And we are offering them an emancipatory space, or, in Guatarri’s language, a re-subjectivation capacity, very useful in today’s society which excludes many. [F. Guattari (1977), La révolution Moléculaire, Paris: ed. Recherches] In such spaces they gain new qualities; someone is a gardener, someone else takes care of the chickens, somebody else of the compost, one of the kitchen…

    DP: This is actualy the micro-politics.

    CP: Including until the kids’ level. I remember when we were at the Ecobox I had a lot of keys and a kid asked me, mais Constantin, you have keys from every space in the neighbourhood?! Can you open any space? And obviously that I answered yes, because, for his imaginary it was very important to know that you can open spaces, that you can make this urban space to evolve, which has become now more and more expensive, inaccessible and segregated. Such imaginary is fundamental for the “right to the city”, it is to know that, even for a kid, space could be negotiable, accessible and welcoming, that there are no barriers and walls. Actually, we don’t make walls: we make doors, windows, bridges… this is the kind of things we are building.

    Steering to the passers-by, Doina recollects her diploma project for which she collaborated with an ethnologist to design something which today could be called an ethnological cultural hub. Once arrived in Paris, after a master, they began teaching, being among others the co-founders of Paris-Malaquais architecture school. Step by step, they began to act as citizens, teachers and architects in the neighbourhood where they were living: La Chapelle. This is how aaa started. In the same time, they kept on teaching and initiating projects also in Romania, in Brezoi, but which got stuck. Constantin starts the fire in a small godin in the Agrocite, located in southern Paris, at Bagneux, which is a sort of ecological prototype spatializing aaa’s concepts: short circuits, popular ecology, urban resilience.

    Mobile modules – EcoBox project, 2003. Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu, Denis Favret, Giovanni Piovene ©aaa

    *Eco interstice “Passage 56“ – street view, 2007, Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu, Raimund Binder, Sandra Pauquet, Nolwenn Marchand ©aaa

    AA: 100 years after Bauhaus, 50 years after the May ’68 revolt and 30 years after the fall of the Berlin wall, within the current global capitalism crisis, all Bauhaus’ principles of how to live and work together are becoming again relevant. In this context, how legitimate is still Bauhaus’s questions if design can change society, and what it means to be modern today?

    DP: So all these ideas are reaching some sort of anniversary and one needs to take them together, one cannot take only Bauhaus ideas, but also other ideas which came after in order to understand what can design do today: participation, global democracy, ecology. Design need to remain open, as Ezio Manzini was saying: ‘design when everybody designs’. There is an acknowledgement of the fact that we are all designing, in our own way, we design our life, we design our decisions. How can you put all those things together in a strategic way, at a moment when the society and the humanity need to take some decisions, need to be prepared for a civilizational change, otherwise we become extinct? I think design has a role in this, by helping, by mediating, by formulating questions, decisions, or solutions together. And how to do design together is the big question, and there is not only one way of doing it, there are many ways. We also need to imagine what are these places where ways of designing together are possible. Which are the new institutions, the new mediating agents? – all these seem to me to be the questions of our times.

    Constantin confesses that Bauhaus changed his life, when, after an exhibition, improbable for that time, where 1:1 modernist furniture was exhibited, he quits the arts high school in Iași and joined the architecture school.

    CP: I am sure that design has an immense capacity to change society until even distorting it (see the tablet, the iPhone…). As architects, we are working a lot in a broader sense of design, and that’s why we are trying to launch not just projects, but also movements like One Planet Site or R-Urban which can be adopted also by others, because we have the capacity and the responsibility, so you have the capacity, but you have also the responsibility to act. It’s like a doctor. If you are in a plane and someone is sick, you have the capacity and responsibility to act. This is the case for us architects: we acted here in the neighbourhood we are living because there were many difficulties. The planet is now in great difficulty and you need to act. We know how to design, to project into the future, to find money, to create a horizon of hope, a model which becomes interesting for others too, so we have this capacity to design, in a broader sense, complex, temporal and functional. All these including re-balancing how much technology, how many resources, how much mutualisation, how much governance, all these are in fact design.

    DP: For example, with R-Urban we proposed a resilience strategy as designers. We have used design and the organization and shaping of space, of making visible specific practices, as a catalyst. We succeed in a way to organize a social group around the project, by giving it also a political dimension, again, by using architecture’s capacity to make visible, to make real the idea of short circuits for example. People could finally see what happens if you collect rain water, where it goes, that you have to think differently about space to make passive heating, and that you need to think differently about the heating system if you want to reduce the fuel consumption. That by using space in a certain way, in 1 year time you will have this amount of reduction of carbon emissions, which is much better than the national rate. So, all these things can be made visible through the way you design their experience. We didn’t just design a building, or a site, but we designed a usage and a way of creating an activity there.

    “ R-Urban “ – Diagrams on the ecological transition principles 2008. Echipa de proiect/Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu cu Nolwenn Marchand, Sara Carlini, Clémence Kempnich ©aaa

    ““Agrocité”—micro-farm for urban agriculture and ecological training, Colombes, 2013-2014

    “Recyclab”—social economy hub, urban waste recycling and eco-design, Colombes, 2013. Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu, Clémence Kempnich

    “Agrocité”—micro-farm for urban agriculture and ecological training, Bagneux, 2019. Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu, Anna Laura Bourguignon, Alex Gaiser, Rémi Buscot, Juliette Hennequin

    AA: So you could say that this means modernity now?

    DP: The concept of modernity is very much contested in fact, but in a way you could say that this means a hope for the future.

    CP: Modernity I think it had the quality of promoting progress, a democratic progress for all, through small prices, standardization, through in fact what they knew back then. And I think that these ideals remain somehow valid. Such as fablabs are in a way a continuity of this progressive modernist ideal of making accessible and democratic the use to technology. And it’s good. But the problem is the excess. When standardization becomes excessive and exploitative. I think modernity needs to be revisited, keeping what is good, like democracy, ethics, progress and others, and readapting it. Because modernity couldn’t address at that time the problems of limited resources issues, climate change, extractive capitalism, or extinction of species; those problems weren’t visible back than.

    AA: What is the relation with technology in your projects?

    DP: We document and present all our technological devices with an interface accessible to the users and we make them with means that makes them transferable and reproducible. I think we need to take into account the democratization of technology and the fact that the reproduction is not made by the industry, but by the masses, everyone being able to take part. What is important is to keep a degree of creativity, of appropriateness, of participative innovation possible at all levels. All these technological devices were conceived together with experts. The grey water filtration system was made together with a specialist in phyto-remediation. What we brought new is that we designed the first prototype used in urban contexts. This approach is also situated, is specific for a certain situation, you work with the specialist to find the solution there, and afterwards you integrate also local and traditional knowledge. For example, for the phyto-remediation device it was very cool that we built it with a team of Romanians having a construction company in France. Due to the fact we were in a flooding area, we needed to raise the device above the ground by 1 meter and we didn’t know how to build it. And then, the team of Romanians which knew how to make… barrels, manage with what we had, with found boards that were boarded like for barrels… and this is how we made the phyto-remediation device. This shows that all skills and ways of knowledge are useful in a certain situation.

    They choose together the tomatoes, than Doina the aubergines and Constantin the potatoes from a temporary market installed in the Paris former mortuary house. This is now a cultural centre, open to everyone and full of life. Recently they participated in the biggest architectural competition organized by the city of Paris which offered some difficult sites for development – “Reinventer Pars”. The brief was very close to the R-Urban model. They haven’t officially won, but their proposal was very good and this is how they were able to develop it in a different location. The project is called Wiki Village Factory (VWF) and is a cluster of technological and social innovation of 7000 sqm which aims to become a sort of central node in the R-Urban network towards developing the city 2.0 (ecological and collaborative).

    “Wiki-Village-Factory” – cluster of social and ecological innovation, Paris, 2016. Project team: Constantin Petcou, Doina Petrescu, Benjamin Poignon, Pierre Marie Cornin, Grégoire Beaumont © aaa-REI-Deswarte

    AA: With WVF for example, how important is for you the materiality and the aesthetics? Or is the program more important?

    CP: Aesthetics for as is a result. You need to take care for the building to be well integrated in the context, you need to express well what’s going on. For example, the coop spaces are trying to make you to wish to collaborate with others; it’s not just like any other office. The ground floor, we try to have it open towards the neighbourhood, despite it is a difficult neighbourhood.

    DP: I would say that aesthetics are trying to express not necessary the programme, but what is important in the program and beyond the program. We are using architecture tactically if you want, as a way of exposing and communicating principles of functioning, of governance, of construction and the ethics of using a building today.

    CP: We are exposing the ecology of the building in fact, and this is beyond function. In order to become more ecologic. This is to make you use fewer materials, less insulation, but count on the passive insulation of the building’ skin. We also succeeded in convincing them to have dry toilets. This will be the largest building with dry toilets in Europe. We will build a special device, like a large scale prototype, which doesn’t exist right now. In fact, although they are on a tight budget, they will put more money into this than into usual toilets, because also the developer and everybody want this aspect to be exemplary. And it will be quite vegetal, with urban agriculture; we will try to remediate the grey waters. All the principles that we are using in R-Urban hubs will be implementing as much as we can also here.

    AA: So, the city 2.0 should look differently because it values and creates hierarchies in a different way?

    DP: Yes, it is important to create a new discourse, but also governance is important, social and ecological governance, that is what we try to express through architecture. There are many layers which add up to the modernist functional layer. And there is also the idea of being reversible, the fact that a building needs to evolve, to adapt, to disappear if necessary after a while, so it is not built to last hundreds of years. Because we need to leave room for future generations to build the architecture they need, don’t we?

    #ville #écologie #participation #auto_gestion #urban_planning

  • #Belgique : Des cadeaux pour les assurances, de l’eau pour les sinistrés Claude Semal
    https://www.asymptomatique.be/des-cadeaux-aux-assurances-de-leau-aux-sinistres/?shared=email&msg=fail

    _ Les inondations de la mi-juillet dans la région liégeoise et la vallée de la Vesdre ont mobilisé des milliers de bénévoles pour porter secours aux sinistrés. Parmi eux, des centaines de membres et de sympathisants du PTB. Un échevin du P.S. verviétois vient de lancer une sombre polémique dans la presse sur ce “délit de solidarité”.

    Alors que les responsabilités de cette catastrophe seront bientôt discutées en commission au Parlement, rencontre avec Raoul Hedebouw, un des porte-paroles nationaux du PTB.
     
Entre deux séances parlementaires, j’ai rendez-vous avec lui “entre l’heure du midi”, Place de la Liberté, à deux pas du Parlement. J’ai deux minutes de retard, car dans cette capitale en perpétuels travaux, “ma” ligne 92 a été provisoirement interrompue. Mais j’étais en avance, donc je suis presqu’à l’heure ;-).
    
Grand, souriant, cordial, Raoul Hedebouw a le tutoiement facile des Liégeois, la répartie directe des militants rodés à la polémique, et l’humour de ceux qui savent qu’on ne combat pas nécessairement la misère en se vautrant dans la morosité.


    Cet éco-biologiste de formation, dont le travail de fin d’étude portait sur le pourrissement des feuilles de sept espèces d’arbres en Wallonie, en connait aussi un brin en matière de décomposition / recomposition du champ politique.
Comme il revenait tout juste de l’Université d’Été de la France Insoumise, alias la nouvelle Union Populaire, j’en ai profité pour conclure l’interview sur le devenir de la “gauche de la gauche” européenne.
Scoop : je peux déjà vous dire que Raoul boit du café au lait, qu’il transmet bien le bonjour à Irène, et qu’il a une autre réunion dans une demi-heure. Vous pouvez également saupoudrer son interview d’un léger fond d’accent herstalien, cela fera plus vrai que nature.

    Claude  : Six semaines après les inondations, as-tu une idée du nombre de gens qui ont été touchés par la catastrophe, et de ceux qui restent encore sans logis aujourd’hui ?

    Raoul  : Les chiffres vont encore certainement beaucoup fluctuer, parce qu’on ne sait toujours pas combien de maisons seront définitivement déclassées. Il y a au moins quinze mille ménages qui sont en très grande précarité.
Mais comme les gens logent toujours dans leur famille, il est impossible à l’heure actuelle de faire un décompte précis. Ce qui fait aussi partie du problème.
    
J’ai reçu des témoignages de gens qui sont “officiellement” encore dans leur maison, mais comme la “déshumidification” ne se passe pas bien, ils ne peuvent pas retourner y loger. Tous les problèmes liés à cette “déshumidification” sont d’ailleurs un des gros enjeux actuels pour les sinistrés. Et là, je parle uniquement de la détresse immobilière.

    Claude  : Il a y aussi toute la question des assurances, puisque la plupart des contrats “habitation” ont un volet “incendie” et “inondation”. A ce sujet, on a appris qu’Elio Di Rupo avait conclu un “accord” avec les compagnies d’assurances. A quel titre, avec quelle casquette et quel était son mandat pour faire cela ?

    Raoul  : C’est assez grave, en fait, et assez illustratif de la proximité entre le monde de la politique et celui de la finance. D’une part, il s’agit ici d’un accord “secret”, selon les dires mêmes de Di Rupo, dont nous ne pouvons donc pas connaître le contenu. Dans les grandes lignes, il s’agit d’une “approbation” de la loi de 2014 qui “limite” la responsabilité des assureurs à 590 millions d’euros pour des coûts estimés, jusqu’à présent, à 1,7 milliard. Je parle uniquement ici de ceux couverts par une assurance. Ceux qui sont “non assurés” dépendent d’un autre budget, le “fonds des calamités”.
Donc, il y a une sorte de “ristourne” d’un milliard d’euros rétrocédée au secteur de la finance. On va me dire : “c’est en vertu des accords conclus en 2014 et 2007”. C’est vrai que le problème date de là. Mais on retrouvait déjà les mêmes aux postes de commande. Car qui dirigeait le gouvernement fédéral à cette époque ? Elio Di Rupo !
Donc, c’est un peu facile. Nous, on paye tous nos primes d’assurance “volle pot”, comme on dit, et puis après, on se retrouve avec des assurances qui ne prennent en charge qu’un tiers des coûts. Alors que selon le propre bilan d’Assuralia, qui représente le secteur des assureurs, ces sociétés ont fait quinze milliards de bénéfices cumulés ces huit dernières années !
Donc c’est à nouveau nous qui allons devoir payer, alors que ce milliard aurait pu être investi dans le logement public. Les quartiers détruits de Pepinster, Angleur, Trooz, Verviers, … ne vont pas pouvoir être reconstruits par la loi du marché. Or ce milliard va filer dans la poche des actionnaires. On a donc un très gros problème autour de ce “deal” secret avec des entreprises de la finance. Et je suis étonné à quel point, dans les médias, on parle assez peu de cette affaire-là.

    Claude  : Je suppose que c’est une des raisons pour laquelle vous demandez une Commission Parlementaire à ce sujet. Une autre raison étant évidemment les causes mêmes de ces catastrophes, comme les permis de bâtir en zones inondables.

    Raoul  : Tout ce qui concerne l’aménagement du territoire sera débattu au niveau wallon, ça c’est déjà acquis. Toute la question des barrages, des bassins d’orage, des logements. Et il y aura probablement une autre commission d’enquête au niveau fédéral.
Là, on parlera des conséquences de la réforme de la protection civile, imposée par le MR et la NVa, qui je le rappelle, ont quand même supprimé 800 des 1200 postes de la protection civile. C’est pas de l’austérité, c’est carrément du rouleau compresseur anti services publics. On a amputé les deux tiers de notre force de frappe en cas de catastrophe !
L’autre problème fédéral, c’est la réforme des zones de pompiers et leur manque criant de moyens. On a beaucoup de témoignages de pompiers qui nous disent : “Nos petits bateaux ne résistaient pas au courant”, etc, etc….
Et puis les problèmes qu’on a rencontré en Belgique au niveau de la coordination et de la gestion de la crise. On a déjà vécu la même chose avec le COVID.
On ne sait pas qui décide quoi. Régional, fédéral, communal, provincial, international,… il n’y a pas eu un centre de coordination unifié. A notre avis c’est au niveau fédéral qu’on aurait dû le faire, alors que tout le volet fédéral du plan a été stoppé dès le 26 juillet. Ce qui a conduit à une cacophonie totale sur le terrain.
Enfin, il y a évidemment le débat autour de la question climatique. Sur la responsabilité de ces sociétés consuméristes qui produisent tout ce CO2, tout ce carbone. Car une de ses conséquences statistique, c’est l’augmentation des phénomènes extrêmes. Comme les sécheresses et les incendies, d’un côté, comme on le voit en Grèce, aux Etats-Unis et au Canada, et puis dans d’autres pays, les inondations. On n’échappera pas à ce débat-là aussi.

    Claude  : Sur la question du relogement des sinistrés, un certain nombre d’entre eux étaient relogés à l’hôtel, et avec toute cette tartufferie autour des 24 heures de Francorchamps, ils ont été mis dehors pour loger les spectateurs qui, eux mêmes se sont fait avoir, parce qu’ils ont payé 150 boules pour voir les voitures faire trois petits tours dans l’eau. Tu es au courant de ce dossier-là ?

    Raoul  : Il y a deux choses. La principale raison pour laquelle beaucoup de sinistrés ont été éjectés des hôtels, c’est parce les assureurs commencent à refuser de payer. En gros, la plupart des assurances comptaient quelque chose comme 21 jours de relogement.
On a reçu plusieurs témoignages comme quoi les assureurs ne communiquent même pas avec les sinistrés, mais s’adressent directement à la direction des hôtels pour les prévenir de l’interruption de leur intervention. C’est la première des raisons, et à mon avis la plus grave. Vient se greffer là-dessus effectivement l’événement de Francorchamps, qui est assez ironique, puisqu’il a été annulé à nouveau à cause de pluies particulièrement fortes. Et là, on a effectivement fait passer le commercial avant la gestion des sinistrés.

    Claude  : Puisque Di Rupo veut absolument payer les deux tiers de la dette des assurances, est-ce qu’on ne peut pas lui demander de prendre le relais ? Ce serait assez logique, non.

    Raoul  : Bien sûr. C’est tout le débat sur la façon dont le politique se désarme lui-même et laisse tout le pouvoir, sur plein de dossiers, au monde du privé. Ce n’est pas une maxime marxiste, c’est quelque chose qu’on peut constater tous les jours.
Ici, quatre compagnies d’assurances contrôlent presque l’ensemble du marché. Le logement, par exemple, est complètement laissé aux mains du marché. Le pourcentage de logements sociaux diminue d’année en année, même s’il doit en principe atteindre 10% par commune. Dans une commune comme Liège, qui se dit pourtant socialiste, de gauche et tout et tout, on doit flirter avec du 7,5 %.
Ce qui est grave pour les sinistrés, et cela montre combien le capital est cynique, c’est qu’actuellement le prix des loyers flambe – puisqu’il y a soudain une forte demande que le marché ne peut assurer ! Ca c’est le capitalisme : plus tu as besoin de quelque chose, plus tu payes ! Plus tu as de la misère, plus les loyers augmentent !
La seule manière de contrer cela, c’est d’une part de bloquer les loyers, pour maîtriser un peu le secteur, mais aussi de développer un secteur de logement public. Or je constate, au delà du blabla, qu’on n’investi pas dans la construction de nouveaux logements sociaux. Or ici, certainement dans la vallée de la Vesdre, et à Liège, il va pourtant falloir un plan ambitieux de construction massive de nouveaux logements. Et cela, il n’y a que le secteur public qui peut le faire.
Utilisons le fameux milliard qui est donné aujourd’hui aux assurances pour financer des logements sociaux de qualité. Une ville comme Vienne, “Vienne-la-rouge”, comme on l’appelait à l’époque, elle le fait massivement. En Belgique, c’est plutôt la tradition “libérale” et “privée” qui prévaut partout.

    Claude  : Cela dépend quand même où. La social-démocratie a parfois eu une politique de logement. Dans ma commune de Saint-Gilles, par exemple, il y a une régie foncière communale assez développée, qui gère un millier de logements.

    Raoul  : Tout à fait, il y a quelques communes qui font ici et là exception.

    Claude  : Face aux manque de moyens des services publics, face à l’incurie locale de certaines autorités politiques, il y a eu par contre très rapidement une énorme mobilisation citoyenne, et de très nombreux actes de solidarité. Des militants et sympathisants du PTB y ont notamment participé. Un échevin PS de Verviers a lancé une sombre polémique dans la presse en parlant de “récupération politique sur la détresse des sinistrés”.

    Raoul  : C’est dégoûtant à plusieurs niveaux. D’abord, c’est un peu ironique d’avoir un échevin d’une Ville qui était aux abonnés absents pour gérer la crise à Verviers (je ne parle pas des fonctionnaires, mais des autorités politiques). Notamment, de ne pas avoir assez rapidement donné l’alerte d’évacuation, et d’avoir par contre très rapidement arrêté la récolte des déchets. Je trouve ça dingue, plutôt que d’aller regarder dans sa propre assiette, d’aller pointer du doigt un parti qui, justement, a essayé d’organiser la solidarité concrète.
    
C’est stratégique pour nous. On veut s’inspirer de ce qui avait été fait à l’époque en France avec le Secours Populaire (1). Cela fait deux ou trois ans qu’on réfléchit à de telles formes concrètes de solidarité. Pour les inondations, ce sont finalement plus de 2.000 bénévoles qui sont venus à l’appel du PTB, à côté des milliers d’autres qui ont spontanément donné un coup de main. Cette auto-organisation de la population, c’est aussi un fait politique très important. A Liège, des milliers de bénévoles sont venus des quatre coins du pays, dont de nombreux flamands, il y en a même qui ont pris trois ou quatre semaines de congés, et cela montre que la Belgique de la solidarité, cela existe vraiment.

    Pour revenir aux déclarations de cet échevin PS, politiquement, c’est donc complètement à côté de la plaque. Nous avons voulu poser des actes concrets de solidarité, et pas lancer des paroles en l’air.
Il nous a accusé d’avoir pris les coordonnées des gens. Mais c’est absurde. Comment veux-tu coordonner et dispatcher les équipes, et savoir où les envoyer, où vider les caves et charger les détritus, si tu n’as pas les contacts des volontaires et des sinistrés ? C’est pas en trois heures qu’on nettoie ces affaires-là. A l’Ecole Don Bosco, on a envoyé des dizaines de personnes pendant des dizaines de jours pour vider et nettoyer les locaux.
    
Je peux même ici te donner un scoop.
Pendant deux jours, le centre de crise de Verviers a même renvoyé les bénévoles qui arrivaient vers le centre de bénévoles du PTB, parce qu’on était les seuls à avoir mis sur pied ces outils de coordination. Je le dis ici : les 21 et 22 juillet, on était sur le terrain, et on a envoyé 350 bénévoles à Verviers. L’autorité publique était complètement dépassée.

    Claude  : Je te crois, et ce n’est pas moi qu’il faut convaincre (rires).
Tu as gentiment pris sur ton temps de midi pour participer à cette interview, entre deux séances au Parlement, et le temps nous est donc un peu compté. Mais j’ai vu que tu avais participé comme orateur invité à l’Université d’Été de la France Insoumise, à Valence. Tu peux nous dire un mot à ce sujet ?

    Raoul  : C’était très sympa. J’ai été étonné de voir combien les militants français étaient informés de ce qu’on faisait, via les réseaux sociaux. Cela me faisait du bien de me plonger un peu dans la réalité compliquée française, avec les présidentielles qui arrivent, un vrai danger avec une extrême-droite qui est aussi forte que chez nous en Flandre, mais à l’échelle de toute la nation française. C’était chouette d’aller faire un clin d’oeil là-bas, mais j’irai aussi à la fête de l’Huma la semaine prochaine, parce que la “gauche de gauche” française est ce qu’elle est, elle est plurielle, et ce n’est pas à nous d’aller nous mêler des “affaires intérieures” françaises (rire de Claude).
    
J’ai rencontré beaucoup de jeunes de la France Insoumise, avec beaucoup de questions stratégiques assez pareilles aux nôtres. Comme créer une hégémonie culturelle à gauche ? C’est quoi le marxisme au XXIème siècle ? Les liens entre les luttes sociales et la politique. Plein de questions passionnantes, et on se pose les mêmes en France, en Grèce, en Espagne et en Belgique. Trop longtemps, au PTB, on a cru qu’on allait régler ça à l’échelle belge, avec notre vérité à nous, et on n’avait pas trop de contacts avec les autres gauches plurielles, qui sont très différentes en Europe. Mais là, on a décidé de prendre plus de contacts, et c’était vraiment chouette d’être là.

    Claude  : Justement, par rapport à ces questions stratégiques, la France Insoumise vient de se transformer en “Union Populaire”, qui semble moins spécifiquement marquée “à gauche” que le Parti de Gauche ou la France Insoumise elle-même. Tu as pu discuter de ce tournant politique, ou tu as toi-même une opinion à ce sujet ?

    Raoul  : Je vais parler pour nous. Nous, on reste dans des marqueurs “de classe”. Je sais qu’il y a des débats qui traversent “la gauche de gauche” mais moi, je crois en une analyse marxiste de la société, dans l’existence des classes sociales, même si elles se diversifient et si le prolétariat d’aujourd’hui n’est pas forcément le même que celui d’hier. Mais que le monde du travail, en tant que classe, se retrouve opposé à une grande bourgeoisie nationale et internationale financière, cela reste pour moi un fait, et je reste dans cette grille d’analyse là. Donc, personnellement, je ne me revendique pas du “populisme de gauche”, qui met plutôt en avant une opposition entre “peuple” et “élite”.
    
C’est un débat que nous avons aussi avec nos camarades de la France Insoumise, mais ce qui compte, c’est aussi la pratique de terrain, et c’est important de pouvoir mener ce type de débats sans anathèmes et dans le respect l’un de l’autre et de nos réalités spécifiques. Nous on reste plutôt sur cette alliance ouvriers, employés, petits indépendants, paysans, ce “front de classe” anti-monopolistique, et cette analyse-là nous semble toujours pertinente.

    Claude  : En plus de ça, on ne sait pas encore vraiment quel sera le contenu précis de cette Union Populaire. Là, on est plutôt dans “l’effet d’annonce”.

    Raoul  : Exactement . Nous n’en dirons donc pas plus (rires).

    Claude  : Pour conclure peut-être,… (Raoul regarde sa montre, mais il reste très disponible : on est “dans les temps”) …les inondations et la crise climatique sont entrées chez nous en collision avec une autre crise nationale majeure, celle du COVID. Comment as-tu le sentiment que l’État fédéral et les régions gèrent ce problème chez nous, et le PTB a-t-il une position sur le sujet ?

    Raoul  : Moi, ce qui m’inquiète, c’est la stratégie du “tout au vaccin”, qui a complètement zappé la première ligne de soins, toute cette médecine de proximité qui existe trop peu en Belgique, avec un renvoi systématique vers les spécialistes et les hôpitaux. Je crois qu’on risque de se mettre le doigt dans l’oeil. Même chose pour la vaccination. Je ne crois pas qu’avec l’obligation vaccinale, la répression, on va y arriver. Il y a une vrai méfiance d’une partie de la population vis-à-vis des autorités publiques, mais aussi vis-à-vis des multinationales pharmaceutiques, qui se cristallise peut-être malheureusement autour de la question du vaccin, mais la seule façon de combler ce fossé, c’est de construire un réseau médical proche de la population, et tu sais que nous mettons en avant le modèle coopératif des “maisons médicales”, qui sont une alternative concrète à la “médecine libérale” et du chacun pour soi.
    
Et l’autre versant du débat, ce sont les conséquences économiques de cette crise. Pour le moment, on a maintenu, et tant mieux, un certain nombre d’aides pour maintenir un certain nombre d’acteurs économiques en activité. Mais on parle bientôt de retirer la prise, et cela va provoquer des dégâts terribles d’un point vue social. Et là, va se poser à nouveau la question : qui va payer les conséquences de la crise ? Or toujours sous le capitalisme, et Noémie Klein l’a bien expliqué dans son livre “la Stratégie du Choc”, au moment du “choc”, et la crise du COVID en est un fameux, les gros et puissants vont en profiter pour s’accaparer à nouveau des pans entiers de notre société. Ces grand groupes industriels, qui ont les reins très solides, sont déjà en train de relancer leur production, comme Ryanair qui vient de renouveler sa flotte de Boeing, et ce sont les petits, qui ont des fonds propres beaucoup plus faibles, qui vont mourir.

    Claude  : L’année passée, en France, les principale entreprises du CAC40 ont très sensiblement augmenté leurs bénéfices…

    Raoul  : Là, il y a aussi un vrai enjeu socio-économique : qui va payer les pots cassés de cette crise ? Et on revient alors sur des débats fiscaux comme un impôt sur la fortune, un impôt exceptionnel sur les bénéfices bancaires, sur la grande distribution qui a réalisé des surprofits,… Ce n’est pas qu’une question philosophique. C’est une question très pratique pour le budget 2022. Car on va voir qu’on va à nouveau nous proposer de serrer la ceinture, au nom des dogmes de l’austérité, au lieu d’aller chercher l’argent là où il se trouve.

    Claude  : … sans parler du secteur pharmaceutique, qui a lui-même fait des profits incroyables !

    Raoul  : C’est scandaleux. Ca, c’est un hold-up des Pfizer et Cie, quand on parle de 4 ou 5 milliards de bénéfices en plus. Et en plus, #Pfizer et #Moderna viennent encore d’augmenter le prix des vaccins, alors que le prix de revient est le même !
C’est pour ça qu’on vient de lancer une campagne européenne, avec d’ailleurs tous nos camarades de la gauche radicale européenne, “Pas de Profits sur la Pandémie”, qui est un appel à la signature d’une initiative citoyenne pour exiger de la Commission Européenne une transparence totale et une remise en cause de ces contrats.

    Claude  : Sans compter que de nombreux pays pauvres n’ont pas accès à ces vaccins, à cause de ce coût prohibitif protégé par des brevets, alors qu’une épidémie mondiale, par définition, doit se traiter mondialement. Car les virus ne connaissent pas de frontières, et il est impossible de s’en débarrasser dans un seul pays sans le faire aussi dans tous les autres.

    Raoul  : Cela, il faut le faire comprendre aussi au monde du travail : tant que les trois-quarts de l’humanité n’auront pas accès à ces soins, les virus continueront à muter, et on ne sera jamais tranquille. Donc réclamer la levée de ces brevets, ce n’est pas qu’une attitude altruiste internationale, c’est aussi pour nous-mêmes. Brevets dont je rappelle quand même qu’ils utilisent des technologies qui, dans leur grande majorité, ont été conçues dans des universités publiques ou avec l’aide massive de fonds publics. Le livre “L’État Entrepreneurial” démontre cela très bien. Beaucoup de ces innovations technologiques viennent de nos universités, viennent du travail de chercheurs altruistes, qui n’en ont tiré aucun profit. Moi je suis biologiste de formation, j’ai vu des gens passionnés bosser pour des salaires très modestes. Il faut arrêter de croire que ce qui fait marcher l’humanité, c’est la recherche du profit. Ce n’est pas vrai. Il est d’autant plus immoral que la privatisation de ces techniques et découvertes mettent aujourd’hui notre santé collective en danger.

    Propos recueillis par Claude Semal le 1er septembre 2021.
    (1) NDLR : Héritier du “Secours Rouge” proche du PCF (1923-1943), le Secours Populaire a été créé en 1945 par fusion avec l’Association Nationale des victimes du Nazisme. C’est aujourd’hui la troisième association française de solidarité, en terme de budget, derrière la #Croix-Rouge et le #Secours_Catholique, mais c’est la première en terme de réseau militant. En 2018, elle est venue en aide à plus de trois millions de personnes grâce à plus de 80.000 #bénévoles.

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