Alors que plusieurs portraits du nouveau ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche ont été publiés dans la presse après sa nomination, le cabinet de Patrick Hetzel a essayé de supprimer les passages de sa page Wikipédia qui y faisaient référence. L’Express a retrouvé l’identité de la personne qui a tenté de les caviarder.
Comme nous l’avions noté le lendemain de sa nomination, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Patrick Hetzel, a un rapport ambigu aux sciences (▻https://next.ink/151370/lambigu-rapport-aux-sciences-du-nouveau-ministre-de-la-recherche-patrick-hetze). Les portraits le concernant publiés dans la presse suite à sa nomination et rappelant ses quelques déclarations problématiques semblent ne pas avoir plu à son cabinet.
Il arrive régulièrement que des cabinets de personnalités politiques trafiquent les pages Wikipédia de leur responsable pour purger les références gênantes, ou que l’encyclopédie en ligne reçoive des menaces d’un service de renseignement. Ou encore qu’une société d’intelligence économique caviarde des dizaines de pages.
Le cabinet de Patrick Hetzel a voulu faire de même, révèle notre confrère de l’Express, Victor Garcia. Il a remonté les traces d’un compte utilisateur de Wikipédia nommé Sj87420, créé vendredi 27 septembre (soit trois jours après la nomination de Patrick Hetzel) et ayant immédiatement multiplié les modifications sur la page Wikipédia de Patrick Hetzel.
Modifications détectées par les #alertes automatiques de Wikipédia
« Pas moins de six alertes automatiques "anti-abus" et "anti-erreur" de Wikipédia » ont été déclenchées entre 10h01 et 10h08 ce jour-là, raconte notre confrère. Ces alertes ont bloqué automatiquement les #modifications après avoir détecté des « potentiels #caviardages récurrents », des « suppressions de section » et des « suppressions massives par un nouvel utilisateur ».
Mais Sj87420 a, pour un temps, réussi à supprimer l’intégralité de la partie « #Controverses sur son rapport à la science » de la page. Il a expliqué son action par le fait que cette section serait « polémique, injurieuse et diffamatoire ». Celle-ci avait été rédigée en faisant référence à des articles de Libération, L’Express, La Voix du Nord, Marianne, Le Quotidien du médecin ou encore de Next (lien qui n’a pas été ajouté par notre rédaction).
L’Express explique que Sj87420 est revenu sur la page du ministre trois jours après. Cette fois, c’était pour ajouter « deux nouveaux paragraphes élogieux » qui se fondent sur un article du Parisien. Cet ajout a été retoqué par les modérateurs de l’encyclopédie.
Un compte au pseudo assez transparent
Victor Garcia a réussi, avec l’aide d’internautes, à identifier la personne derrière le compte Sj87420 avec les initiales de l’intéressée et le code postal de son domicile. #Sandrine_Javelaud, nommée récemment directrice adjointe du cabinet de Patrick Hetzel, lui a confirmé être intervenue sur cette page et se défend d’avoir voulu cacher son identité : « si j’avais voulu me masquer, j’aurais pris un pseudonyme comme Pimprenelle et n’aurais jamais avoué ».
À notre collègue, Sandrine Javelaud assure que, pour elle, « ce ne sont pas les articles qui sont diffamatoires, mais la manière dont les sources sont reprises et présentées, alors qu’on connaît la portée d’une page Wikipédia ». « On parle d’un tweet d’avril 2020, alors qu’il n’y avait ni masque, ni test, ni vaccin. Il aurait pu supprimer son tweet, ce que beaucoup d’autres ont fait, mais pas lui », a-t-elle ajouté.
La collaboratrice du ministre reproche quand même à Libération d’avoir « fait un procès en sorcellerie » et à L’Express d’avoir « publié un article sans demander l’avis du ministre ». Notre confrère précise que son média a pourtant sollicité la permanence parlementaire de Patrick Hetzel, sans obtenir de réponse.