• Douzième partie : Fragments. Fragments d’une lettre du Sous-commandant insurgé Moisés envoyée, il y a quelques mois, à une géographie lointaine en distance et proche en pensée : « Enlace Zapatista
    https://enlacezapatista.ezln.org.mx/2023/12/09/douzieme-partie-fragments-fragments-dune-lettre-du-sous-com

    Je veux dire, nous ne voyons pas seulement la tempête et la destruction, la mort et la douleur qu’elle apporte avec elle. Nous voyons aussi ce qui s’ensuit. Nous voulons être la graine d’une future racine que nous ne verrons pas, qui sera ensuite, à son tour, la pelouse que nous ne verrons pas non plus.

    La vocation zapatiste, si quelqu’un nous presse à donner une définition laconique, c’est donc d’« être une bonne graine ».

    Nous ne prétendons pas léguer aux prochaines générations une conception du monde. Ni leur léguer nos misères, nos rancœurs, nos douleurs, nos phobies, ni nos penchants. Qu’ils soient non plus le miroir d’une image plus ou moins approximative de ce que nous supposons bon ou mauvais.

    Ce que nous voulons, c’est léguer la vie. Ce que d’autres générations feront d’elle, ce sera leur décision et, surtout, leur responsabilité. De même que nous, nous avons hérité la vie de nos ancêtres, nous en avons pris ce que nous considérons précieux et nous nous sommes attribués une tâche. Et, bien sûr, nous assumons la responsabilité de la décision que nous avons prise, de ce que nous faisons pour accomplir cette tâche, et des conséquences de nos actions et de nos omissions.

    Quand nous disons : « Il n’est pas nécessaire de conquérir le monde, il suffit de le refaire », nous nous éloignons, définitivement et irrémédiablement, des conceptions politiques en vigueur et des précédentes. Le monde que nous voyons n’est pas parfait, ni de près, ni de loin. Mais il est meilleur, sans aucun doute. Un monde où chacun peut être qui il est, sans honte, sans être persécuté, mutilé, emprisonné, assassiné, marginalisé, opprimé.

    […]

    Pourquoi disons-nous qu’au cauchemar qui est déjà là, et qui ne fera rien d’autre qu’empirer, suivra un réveil ? Et bien, parce qu’il y en a, comme nous, qui s’engagent à regarder cette possibilité. Certes, minime. Mais tous les jours et à toute heure, partout, nous luttons pour que cette minime possibilité grandisse et, bien que petite et sans importance – comme une graine minuscule -, qu’elle grandisse et qu’un jour, elle soit l’arbre de la vie qui sera de toutes les couleurs ou qui ne sera pas.

    Nous ne sommes pas les seuls. Durant ces 30 dernières années, nous nous sommes tournés vers bien des mondes. Des mondes différents dans leurs modes, leurs temps, leurs géographies, leurs histoires, leurs calendriers mais semblables seulement dans l’effort et le regard absurde posé sur un temps hors du temps qui viendra, non par coup du destin, ni par dessein divin, ni parce que quelqu’un perdra pour qu’un autre gagne. Non, ce sera parce que nous y travaillons, en luttant, en vivant et en mourant pour lui.

    https://vimeo.com/885523029

    #zapatistes #ezln #Moises #futur #stratégie #liberté

  • Dixième partie : À propos des pyramides et de leurs usages et traditions. Conclusions de l’analyse critique des MAREZ et CBG « Enlace Zapatista
    https://enlacezapatista.ezln.org.mx/2023/12/05/dixieme-partie-a-propos-des-pyramides-et-de-leurs-usages-et

    On connaît l’obsession des systèmes dominants, tout au long de leur histoire, pour sauver l’image des classes ou des castes dominantes vaincues. Comme si le vainqueur se préoccupait de neutraliser l’image du vaincu, ignorer sa chute. Dans l’étude des vestiges de la civilisation ou de la culture vaincue, l’accent est généralement mis sur les grands palais des souverains, les constructions religieuses de la haute hiérarchie et les statues ou monuments que les dominants de l’époque faisaient faire d’eux-mêmes.

    […]

    Mais s’il n’est pas fait mention du fait que ces constructions ont dû avoir leurs concepteurs – leurs architectes, leurs ingénieurs et leurs artistes – , on mentionnera encore moins « la main-d’œuvre », c’est-à-dire les hommes et les femmes sur le dos desquels (à plus d’un titre) ont été érigées ces merveilles qui fascinent les touristes du monde entier pour tuer le temps avant d’aller en boîte, au centre commercial et à la plage.

    […]

    Cela dit, cette « image » de la pyramide – la pointe supérieure étroite et la base inférieure large – est à présent utilisée par le Sous-commandant insurgé Moisés pour nous expliquer un peu ce qu’a été le travail analytique (féroce et implacable, à mon avis) des MAREZ et des Conseils de bon gouvernement.

    Les MAREZ [Municipalités autonomes rebelles zapatistes] et les Conseils de bon gouvernement [CBG] n’ont pas eu que des défauts. Il faut se rappeler comment nous en sommes arrivés là. Pour les peuples zapatistes, ils ont été comme une école d’alphabétisation politique. Une auto-alphabétisation.

    La plupart d’entre nous ne savaient ni lire, ni écrire, ni parler espagnol. En outre, nous parlons des langues différentes. Ce fut une bonne chose car ainsi notre idée et notre pratique ne sont pas venues de l’extérieur ; au contraire, nous avons dû chercher dans nos propres têtes, dans notre histoire en tant qu’indigènes, dans notre mode, quoi.

    Nous n’avions jamais eu l’occasion de nous gouverner nous-mêmes. Nous avons toujours été gouvernés. Avant même l’arrivée des Espagnols, l’empire aztèque, que le gouvernement actuel aime tant – parce que ce truc des petits chefs leur plaît bien, je crois – a opprimé beaucoup de langues et de cultures, non seulement dans ce qui est aujourd’hui le Mexique, mais aussi dans ce qui est aujourd’hui l’Amérique centrale.

    […]

    Et, bon, nous avons dû nous organiser pour cela. Pendant dix ans, nous nous étions organisés et préparés pour le soulèvement armé, pour mourir et tuer, quoi. Et puis il s’est avéré que nous devions nous organiser pour vivre. Et vivre, c’est la liberté. Et la justice. Et pouvoir nous gouverner nous mêmes en tant que peuples, et non comme de petits enfants tels que les gouvernements nous voient.

    […]

    Ces gens nous soutiennent donc et nous avons commencé petit à petit avec la médecine préventive. Comme nous avions déjà récupéré les terres, et bien nous avons amélioré notre alimentation, mais on avait besoin de plus que ça. Alors la santé, quoi. Il faut récupérer les connaissances de l’herboristerie, mais ça ne suffit pas, on a aussi besoin de la science. Et grâce aux docteurs et aux doctoresses, que nous appelons « fraternités » parce que ce sont comme nos frères ; ils se sont rendus disponibles et nous ont guidés. C’est comme ça que sont nés ou se sont formés les premiers formateurs de santé, c’est-à-dire ceux qui préparent les promoteurs.

    […]

    Et puis c’est comme si une avancée en amenait une autre. Et en peu de temps, ben, ces jeunes en veulent plus, apprendre plus. Nous avons donc organisé notre santé dans chaque village, chaque région et chaque zone. Nous progressons dans chaque domaine de la santé, sages-femmes, plantes médicinales, hueseros [ndt : médecin traditionnel spécialiste des os], laboratoire, dentiste, ultrason, entre autres, et il y a des cliniques. Et pareil pour l’école, c’est-à-dire l’éducation. Nous disons école, parce que de l’éducation, les adultes, nous en manquons aussi, c’est très large pour nous ce que nous mettons dans « éducation », c’est pas seulement pour les enfants et les adolescents.

    […]

    Et la chose la plus importante que nous avons apprise dans les MAREZ, c’est que l’autonomie ne se fait pas dans la théorie, en écrivant des livres et en faisant des discours. Elle se fait dans l’action. Et nous devons le faire nous-mêmes en tant que pueblos, et ne pas attendre que quelqu’un vienne le faire pour nous.

    Tout cela est, disons, ce qu’il y a de bon des MAREZ : une école d’autonomie pratique.

    […]

    Donc, en résumé, je te dis que les MAREZ et les CBG nous ont servi à apprendre que la théorie sans pratique n’est que du blabla. Et que la pratique sans la théorie, ben, tu marches à l’aveugle. Et comme il n’y a pas de théorie de ce que nous avons commencé à faire, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de manuel ou de livre, et bien, alors nous avons aussi dû faire notre propre théorie. C’est en trébuchant que nous avons fait la théorie et la pratique. Je crois que c’est pour ça que les théoriciens et les avant-gardes révolutionnaires ne nous aiment pas beaucoup, parce que nous ne leur avons pas seulement pris leur boulot. Nous leur avons aussi montré que les mots sont une chose et que la réalité en est une autre. Et nous voilà, nous, les ignorants et les arriérés, comme ils disent, qui ne pouvons pas trouver le chemin parce que nous sommes des paysans. Mais nous sommes là et même s’ils nous nient, nous existons. Tant pis.

    […]

    En décembre et en janvier prochains, nous ne célébrons pas les 30 ans du soulèvement. Pour nous, chaque jour est une célébration, parce que nous sommes vivants et en lutte.

    Nous allons célébrer le fait que nous avons entamé un chemin qui nous prendra au moins 120 ans, peut-être plus. Cela fait déjà plus de 500 ans que nous sommes sur la route, nous n’en avons donc plus pour très longtemps, à peine un peu plus d’un siècle. Et ce n’est plus si loin. C’est, comme le dit José Alfredo Jiménez, « là, juste derrière la petite colline ».

    #zapatistes #organisation #démocratie #Moises #pyramide #autocritique

  • Neuvième partie : La nouvelle structure de l’autonomie zapatiste. « Enlace Zapatista
    https://enlacezapatista.ezln.org.mx/2023/12/01/neuvieme-partie-la-nouvelle-structure-de-lautonomie-zapatis

    Je vais essayer de vous expliquer comment nous avons réorganisé l’autonomie, c’est-à-dire à quoi ressemble la nouvelle structure de l’autonomie zapatiste. Et plus tard, je vous donnerai des explications plus détaillées. Ou peut-être non, je ne vous en expliquerai pas plus, car c’est la pratique qui compte. Bien sûr, vous pouvez aussi venir à l’anniversaire et voir les pièces de théâtre, chansons, poésies et les arts et culture de cette nouvelle étape de notre lutte. Sinon, les tercios compas vous enverront des photos et vidéos. À un autre moment, je vous raconterai ce que nous avons trouvé de bon et de mauvais dans notre bilan critique des MAREZ et des CBG. Maintenant, je vais juste vous dire où on en est.

    […]

    Quatrièmement. – Comme on pourra le voir dans la pratique, le commandement et la coordination de l’autonomie ont été transférés des CBG et des MAREZ aux pueblos et aux communautés, aux GAL. Les zones (ACGAZ) et les régions (CGAZ) sont commandées par les pueblos, elles doivent rendre des comptes aux pueblos et chercher des moyens de répondre à leurs besoins en matière de santé, d’éducation, de justice, d’alimentation et à ceux découlant de situations d’urgence causées par les catastrophes naturelles, pandémies, crimes, invasions, guerres et autres malheurs causés par le système capitaliste.

    Cinquièmement. – La structure et la configuration de l’EZLN ont été réorganisées de manière à accroître la défense et la sécurité des localités et de la terre mère en cas d’agressions, d’attaques, d’épidémies, d’invasion par des entreprises prédatrices de la nature, d’occupations militaires partielles ou totales, de catastrophes naturelles et de guerres nucléaires. Nous nous sommes préparés pour que nos pueblos survivent, même isolés les uns des autres.

    Sixièmement. – Nous comprenons qu’il vous soit difficile d’assimiler ceci. Et que vous deviez batailler un certain temps pour le comprendre. Cela nous a demandé 10 ans à nous pour le penser, et sur ces 10 ans, 3 pour le préparer à la pratique.

    […]

    En réalité, l’unique intention de ce communiqué est de vous dire que l’autonomie zapatiste continue et avance, que nous pensons qu’il en sera mieux ainsi pour les pueblos, communautés, lieux-dits, quartiers, arrondissements, ejidos et hameaux où habitent, c’est-à-dire, luttent les bases d’appui zapatistes. Et que cela a été une décision de leur part, qui a pris en compte leurs idées et propositions, leurs critiques et autocritiques.

    […]

    Nous avons certainement commis beaucoup d’erreurs pendant toutes ces années. Nous en ferons certainement beaucoup d’autres pendant les 120 prochaines années. Mais nous NE nous rendrons PAS, nous NE changerons PAS de chemin, nous NE nous vendrons PAS. Nous examinerons toujours notre lutte, ses temps et ses manières avec un regard critique.

    #zapatistes #réorganisation #démocratie #autonomie #politique #communisme #communalisme #Moises #autocritique #processus

  • 25 ans de l’#EZLN : Amère célébration

    Face à la menace que représente une avancée aussi brutale de l’hydre capitaliste, ici parée du masque du progressisme, la posture zapatiste s’est donc exprimée avec une extrême fermeté. « Nous n’allons pas nous laisser faire ». « S’ils viennent un tant soit peu nous provoquer, nous nous défendrons ». « Nous allons nous défendre ; nous allons nous battre si c’est nécessaire ».
    /.../ Un autre aspect des paroles de Moisés a suscité de nombreux commentaires et interrogations. Le porte-parole zapatiste a en effet martelé, tout au long de son discours, un « NOUS SOMMES SEULS ! » reçu par beaucoup comme un véritable coup de poing dans l’estomac.

    C’est une Autre Pensée qui me vient en lisant les réactions et interrogations que transmet #Jérôme_Baschet devant cette solitude assumée et même revendiquée : elle me rappelle ce qui m’a fait rentrer en France quand #El_Sub nous a renvoyé-e-s nous battre contre chaque tête de l’Hydre Capitaliste dans chaque pays en 2016. Seul moyen d’en venir à bout.
    Ce n’est qu’en nous occupant, frontalement, des chemins tortueux qu’emprunte cette hydre, partout avec l’aide des progressistes, socialistes, en marchistes, communistes même parfois, que nous pourrons venir à bout de cette folie destructrice en cours.
    Et c’est précisément pour ça que je suis mal devant l’avenir aménagé de l’ex #zad #nddl tout comme je suis mal devant les revendications des #giletsjaunes. Précisément pour ça que je suis aussi critique. Mais aussi précisément pour ça que je n’en veux pas à celleux qui luttent pour survivre quand même.
    Tenter de s’aménager une survie face à la gueule de l’Hydre, face à la guerre (car il est certain depuis avril 2018 que le gouvernement FR nous fait la guerre) c’est humain. Je suis trop couarde moi-même pour condamner ça. Mais il ne faut pas me demander d’y voir une victoire.
    La lucidité d’un #Moisés, d’un #Galeano, et de tant d’autres, souvent Indigènes, c’est à dire encore proches de l’Essence Vitale et sachant que tout est lié, sont autant de phares dans la tempête qui se déchaîne. Croire en « notre » sécurité lors d’une pause en fond de cale est un leurre : le navire sombre.

    https://lundi.am/Amere-celebration

  • Seminaire "La Pensée Critique face à l’Hydre Capitaliste" - #CiDeCi #Chiapas #Mexico du 3 au 9 mai 2015
    https://www.flickr.com/photos/valkphotos/sets/72157651920994107

    Un séminaire pour des graines d’idées, surtout pas pour des solutions toutes faites !

     » Transmission en direct :
    http://cideciseminario.wordpress.com
    http://original.livestream.com/lostejemedios

    +++ d’infos :
    ★ Enlace Zapatista : http://enlacezapatista.ezln.org.mx [castillan]
    ★ Espoir Chiapas : http://espoirchiapas.blogspot.fr [castillan et français]
    ★ Le serpent @ Plumes :
    http://www.le-serpent-a-plumes.antifa-net.fr [français]

    #zapatisme #EZLN #Marcos #Galeano #Moises...

  • #Liban | Un reportage photographique sur les enfants réfugiés

    A l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, l’ONG Save the Children a mandaté le photographe Moises Saman afin qu’il documente les conditions des enfants réfugiés au Liban. Depuis le début de la guerre civile en Syrie, 1.6 millions de réfugiés syriens ont quitté le pays, dont plus de la moitié sont des enfants, forcés avec leurs parents à s’échapper en Jordanie, au Liban et en Egypte pour trouver refuge dans des structures surpeuplées. Saman a visité les réfugiés en Jordanie et au Liban pour montrer où dorment les enfants #réfugiés

    http://www.asile.ch/vivre-ensemble/2013/06/23/liban-un-reportage-photographique-sur-les-enfants-refugies

    #photo #Moises_Saman #reportage_photo #photographie #Syrie #asile #migration #enfants