• « Ce que l’on me propose en France, c’est le droit de mourir »

    "Aude se bat pour elle et pour les autres. Pour faire connaître ce cancer très agressif qui cible les femmes jeunes - 40 % d’entre elles ont moins de 40 ans. « C’est un cancer qui progresse vite. Mais quand il est localisé, soigné à temps et qu’il n’y a pas de métastases, il se traite. Même si son taux de récidive est de 30 % et qu’il nous donne une espérance de vie de 14 mois en cas de rechute. »

    Cancer du sein triple négatif. En impasse thérapeutique en France, pourquoi Aude « tente le tout pour le tout » en Allemagne
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/cotes-d-armor/lannion/lannion-cancer-du-sein-triple-negatif-en-impasse-therap

    Aude Le Roux est atteinte d’un cancer du sein triple négatif métastasé. La jeune femme, originaire de Lannion, se tourne vers l’Allemagne pour suivre un traitement de « la dernière chance ». Les soins coûtent cher et sont financés grâce à une cagnotte en ligne.

    « Ce que l’on me propose en France, c’est le droit de mourir ». Les mots claquent fort. La voix se tait un instant, rattrapée par les larmes. Aude Le Roux est atteinte d’un cancer du sein triple négatif, diagnostiqué en 2020.
    En impasse thérapeutique en France, la jeune femme, âgée de 35 ans et maman d’un petit garçon de 3 ans, s’est rendue en Allemagne pour recevoir un traitement par immunothérapie et vaccinothérapie. « Quand on n’a plus le choix, on tente le tout pour le tout » confie-t-elle.
    « Mon seul espoir de vivre »

    De retour chez elle depuis quelques jours, à Lannion, dans les Côtes-d’Armor, elle accuse le coup. Et se sent « très fatiguée ». Elle sait que ce voyage est celui de « la dernière chance, mon seul espoir de vivre » car, il y a tout juste un an, elle a appris que des métastases touchent ses os, son foie et ses poumons. Même le Trodelvy, ce médicament novateur qui permet de doubler l’espérance de vie des femmes atteintes d’un cancer du sein triple négatif, n’a pas fonctionné sur elle.

    Aude raconte qu’elle a passé quatre jours « intenses » dans une clinique privée de Dornstetten, proche de la frontière française. Avec, chaque matin, des séances d’immunothérapie combinées au vaccin.

    On connaît des cas de rémission dans cette clinique. C’est pour cela que l’on y va
    Aude Le Roux

    « En France, à part la chimio, on ne peut pas me proposer autre chose, vu mon état, relate Aude. Pour accéder à l’immunothérapie, il aurait fallu que je ne reçoive aucun traitement après la découverte des métastases. Quant au vaccin, il en est au stade des essais cliniques et les critères pour faire partie de ces essais sont drastiques. »

    Alors, elle s’est tournée vers l’Allemagne et plus particulièrement cette clinique où d’autres ’triplettes’ - c’est ainsi que les femmes touchées par le cancer du sein triple négatif se surnomment- ont également été soignées. « On connaît des cas de rémission dans cet établissement spécialisé en oncologie, c’est pour cela que l’on y va » souligne-t-elle encore.
    Une cagnotte en ligne pour payer les soins

    Le coût du traitement est élevé : environ 200.000 euros pour une année. Car Aude va devoir se déplacer jusqu’en Allemagne toutes les trois semaines, tout en poursuivant sa chimiothérapie à l’hôpital de Plérin. Les soins pratiqués ne seront pas remboursés par la sécurité sociale. Impasse thérapeutique mais aussi impasse financière.

    « J’ai vu Aude en janvier, raconte l’une de ses amies, Iris le Gars. Elle était désemparée. ’Il ne me reste plus que l’Allemagne’ m’a-t-elle dit. Elle m’a aussi dit ce que coûterait un tel traitement, j’étais effarée par la somme ».

    Avec trois autres amies, Iris décide de créer une association : Audalavie. Elle lance une cagnotte en ligne. Les dons arrivent très vite. 50.000 euros en quelques jours, puis 100.000. A ce jour, 182.868 euros ont été collectés. Soit un an de soins pour Aude. « La cagnotte est toujours ouverte, précise Iris. Une fois qu’Aude n’aura plus besoin de ce traitement, nous reverserons ce qu’il reste d’argent à d’autres femmes qui en ont besoin ».
    Move for Aude ce week-end

    L’association organise aussi des événements pour recueillir des dons. Comme cette opération « Move for Aude » qui débutera ce 4 mars. « Il suffit d’acheter un dossard en ligne à 4 euros, de chausser ses baskets et de faire une activité sportive de son choix » explique Iris Le Gars.

    Courir, marcher, pédaler, nager, surfer.... L’essentiel étant de poster vidéos et photos accompagnées du hashtag #moveforaude. « On a déjà 400 inscriptions, se réjouit la présidente d’Audalavie. Les clubs sportifs relaient le défi. C’est génial car nous voulons aider notre amie dans son combat ».

    « Retrouver un semblant de vie normale »

    « Cette générosité m’a donné de l’énergie et de la force » sourit Aude Le Roux qui peut compter sur son entourage. « Grâce au soutien de ma famille, de mes amis, je suis toujours là ».

    En deux ans, elle a enchaîné chimiothérapies, ablation du sein, le corps pétri de douleurs constantes. Des jours avec, des jours sans. Parfois, le moral est plus sombre. « J’aimerais jouer au tennis avec mes copines, sortir avec mon fils sans avoir mal, danser, profiter de la vie, retrouver un semblant de vie normale. Et surtout, vivre sans douleurs ».

    Le matin, elle dort beaucoup. Quand le physique suit, elle rejoint l’association Solution-Riposte où elle pratique l’escrime. Là, elle y croise d’autres femmes qui ont été opérées d’un cancer du sein et qui, comme elle, viennent réapprendre la mobilité de leur bras, mais également se reconstruire. « Ça me fait du bien » dit-elle.

    C’est un cancer qui progresse vite. Mais quand il est localisé, soigné à temps et qu’il n’y a pas de métastases, il se traite
    Aude Le Roux

    Aude se bat pour elle et pour les autres. Pour faire connaître ce cancer très agressif qui cible les femmes jeunes - 40 % d’entre elles ont moins de 40 ans. « C’est un cancer qui progresse vite. Mais quand il est localisé, soigné à temps et qu’il n’y a pas de métastases, il se traite. Même si son taux de récidive est de 30 % et qu’il nous donne une espérance de vie de 14 mois en cas de rechute. »

    Cette sportive dans l’âme avait prévu de faire le tour de Bretagne à vélo, l’année dernière, pour informer et sensibiliser sur le triple négatif. Les résultats de son scanner ont stoppé net l’initiative. « Depuis, je n’ai pas trouvé la force de le faire. Je le ferai plus tard. J’espère qu’un jour, je pourrai ».