• Et en #France ? - Libération
    http://www.liberation.fr/monde/2014/08/18/et-en-france_1082805

    Il y a pourtant une leçon plus générale à tirer de ces événements tragiques : la difficulté qu’éprouvent les #démocraties d’aujourd’hui à faire cohabiter des #minorités diverses et socialement inégales. Croit-on, par exemple, que les rapports entre la police française et les minorités qui composent la population hexagonale soient bien meilleurs qu’aux Etats-Unis ? Les commentateurs exhortent les autorités américaines à lutter avec plus d’énergie contre la discrimination. Et les autorités françaises ? Il n’y a pas assez de Noirs dans la police américaine. Y a-t-il assez de #musulmans dans la police française ? Et pourquoi a-t-on reculé dans la lutte contre les contrôles au faciès ? Ville inconnue en France jusqu’à la semaine dernière, #Ferguson n’est finalement pas si exotique.

  • Après la #préférence_nationale, la #préférence_religieuse ?

    Dans le nord de l’#Irak, l’avancée de l’#Etat_islamique pousse sur les routes de l’exode des dizaines de milliers de personnes issues des #minorités menacées par l’innommable politique de « #purification_religieuse » des #djihadistes. Tous les #non-sunnites sont visés : #chrétiens, #yézidis, #chiites. Mais, après la prise de la première ville chrétienne du pays, #Qaraqosh, c’est la fuite de cette population qui, de par son ampleur, fait d’abord la « une » des journaux.
    En #Suisse, la tragédie humanitaire a ému jusqu’aux pires fossoyeurs du devoir d’#asile. Voilà qu’il s’est trouvé un conseiller national #UDC, le Bernois #Erich_von_Siebenthal, pour demander d’accueillir ces chrétiens. Ou du moins de les accueillir « en priorité ». Dans l’interpellation au Conseil fédéral qu’il prévoit de déposer durant la session d’automne, l’élu introduira la notion de préférence religieuse en matière d’asile. Au nom d’une #proximité_culturelle. Parce qu’ils seraient des #coreligionnaires. Parce que ces #réfugiés s’intégreraient mieux que, au hasard, des #musulmans
    A l’UDC, il se trouve des personnes séduites par la proposition. Elle est pourtant insupportable et odieuse à plus d’un titre. D’abord parce qu’elle se réclame de l’#identité_chrétienne que, pourtant, elle pervertit frontalement en piétinant le principe évangélique cardinal d’accueil et de charité sans distinction. C’est la misère et l’appartenance à une même fraternité humaine qui relient celui qui appelle à l’aide et celui qui lui tend la main. Ce principe n’a d’ailleurs pas de copyright, car il est universel. Une préférence religieuse contredirait tout simplement les #Conventions_de_Genève, qui commandent aux Etats d’accorder les mêmes droits aux réfugiés, sans distinction de race, de nationalité ou de religion. Hier, les évêques suisses ont lancé un appel à l’aide à toutes les minorités menacées dans le nord de l’Irak.
    Après l’initiative contre les minarets, voilà donc encore une trouvaille émanant des bancs de l’UDC pour alimenter le #choc_des_civilisations. Un univers mental qui, pour rappel, avait notamment servi en 2003 à justifier l’attaque d’un autoproclamé « Occident judéo-chrétien » contre « l’axe du mal ». Et de déstabiliser durablement la région que les chrétiens et autres minorités fuient désormais plus massivement que jamais...
    Mais la réalité est têtue. Car au-delà des réactions émotionnelles et primaires de l’élu UDC, la vérité est que la Suisse, sous la pression de son parti, pratique une #politique_d’asile tellement restrictive qu’elle ne fait pas beaucoup de distinctions entre les réfugiés, dans la mesure où tous, ou presque, sont d’abord soupçonnés d’#abus avant d’être considérés comme en danger. L’UDC, d’ailleurs, n’a pas fini d’exploiter son filon. Il y a deux semaines, en vue des élections fédérales de 2015, elle annonçait étudier le lancement d’une énième initiative pour restreindre le droit d’asile en réservant ce dernier aux réfugiés arrivant chez nous par voie aérienne.
    Que se passera-t-il, demain, quand des chrétiens persécutés viendront chez nous à pied ?

    http://www.lecourrier.ch/122991/apres_la_preference_nationale_la_preference_religieuse

    #islamophobie #réfugiés #accueil #accueil_préférentiel

  • Comment Washington dresse sa liste noire de terroristes
    http://www.lapresse.ca/international/dossiers/sous-surveillance/201407/23/01-4786256-comment-washington-dresse-sa-liste-noire-de-terroristes.php

    #musulmans de préférence,

    Ce texte non classifié de 166 pages, rédigé par le Centre national du Contre-terrorisme (NCTC) et rendu public par le site internet The Intercept, dissèque les instructions que les différentes autorités américaines doivent suivre pour inscrire quelqu’un dans les principales bases de données de surveillance terroriste.

    Au fil des cinq chapitres du « Guide des listes de surveillance », dressé en mars 2013 en collaboration avec les 19 agences militaires et judiciaires du renseignement, on apprend que « les preuves irréfutables et les faits concrets ne sont pas nécessaires » pour avoir « des soupçons raisonnables » de l’implication terroriste d’un individu et qu’il suffit d’avoir des « renseignements ou des informations que l’on peut verbaliser ».

    Fustigeant le jargon du document, The Intercept y voit un élargissement de l’autorité du gouvernement à « nommer » des suspects de #terrorisme sur la base de « vagues informations fragmentaires ».

    (...) le « guide » permet même aux morts de figurer parmi les quelque 464 000 noms listés.

    Le NCTC craint en effet que l’identité des morts ou leurs documents de voyage ne soient réutilisés « de manière frauduleuse - une tactique terroriste éprouvée », a expliqué à l’AFP un porte-parole de l’Agence gouvernementale.

    Il a souligné que les listes de surveillance continuaient à « mûrir pour s’adapter à une menace diffuse en constante évolution » et qu’elles avaient notamment été révisées après la tentative d’attentat du Nigérian Umar Farouk Abdulmutallab, qui voulait faire détoner un explosif dissimulé dans ses sous-vêtements à bord d’un avion à Noël 2009.

    « No Fly List »

    La liste des « terroristes connus ou suspects », identifiés sous le sigle KST pour « Known or Suspected Terrorists », comprenait 16 noms avant le 11 septembre 2001. Elle en comptait 463 834 en 2013 (après un taux d’élimination d’1%) répartis sur différentes bases de données, dont la fameuse « No Fly List » qui interdit à ses membres de prendre des vols au départ ou à destination des États-Unis.

    « Au lieu de limiter sa surveillance aux réels terroristes connus, le gouvernement a bâti un vaste système fondé sur le postulat supposé et imparfait que l’on peut prédire qu’une personne va commettre un acte terroriste à l’avenir », a dénoncé Hina Shamsi, une responsable de la puissante Union américaine de défense des libertés (ACLU).

    « Selon cette théorie dangereuse, le gouvernement accuse secrètement » des gens de terrorisme sans leur donner la possibilité de se défendre « d’une menace qu’ils n’ont pas mise à exécution », a-t-elle ajouté, estimant que les critères utilisés par le gouvernement « n’auraient jamais dû rester secrets ».

    Le NCTC s’est défendu de surveiller des individus « sur la seule base de leurs activités protégées par le Premier Amendement de la Constitution », comme la race ou la religion. Son porte-parole a ajouté que des « critères renforcés » étaient utilisés pour la « No Fly List ».

    D’après le document cité par The Intercept, les agents du gouvernement utilisent des éléments « non prouvés » collectés sur Facebook ou Twitter, réunissent des prescriptions médicales, des cartes de supermarché ou des amendes pour excès de vitesse, et récupèrent des informations sur votre chien, votre assurance santé, votre matériel de plongée ou encore ce que contiennent vos poches.

    Mais « la politique du gouvernement américain est de ne jamais confirmer ni démentir qu’un individu est sur une liste de surveillance », précise le document. Quand un Américain figure sur la « No Fly List », il ne doit jamais en être informé.

    Et si l’on y entre sur de simples « soupçons raisonnables », « la difficulté d’être radié de la liste est soulignée » dans le document par un passage précisant que l’on peut rester ou entrer sur la liste noire, même après avoir été acquitté de terrorisme.

  • Le FBI mis en cause dans l’organisation d’attentats par des Américains musulmans
    http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2014/07/21/le-fbi-a-pousse-des-americains-musulmans-a-commettre-des-attentats_4460774_3

    Le FBI a « encouragé, poussé et parfois même payé » des musulmans américains pour les inciter à commettre des attentats, au cours d’opérations de filature montées de toutes pièces. C’est la conclusion d’un rapport de l’ONG Human Rights Watch publié lundi 21 juillet.

    Dans nombre des plus de 500 affaires de terrorisme conduites par les tribunaux américains depuis le 11 septembre 2001, « le ministère américain de la justice et le FBI ont ciblé des musulmans américains dans des opérations clandestines de contre-terrorisme abusives, fondées sur l’appartenance religieuse et ethnique », dénonce ce rapport étayé de nombreux exemples.

    Selon HRW, le FBI a souvent ciblé des personnes vulnérables, souffrant de troubles mentaux et intellectuels. Des informateurs ou policiers infiltrés auraient alors interagi avec elles en élaborant le plan d’attentat, en fournissant les ressources pour le mettre en œuvre, puis en persuadant, voire en faisant pression sur la personne pour qu’elle y participe.

    L’étude cite notamment les « quatre de Newburgh », accusés d’avoir planifié des attentats contre des synagogues et une base militaire américaine, alors que le gouvernement avait, selon un juge, « fourni l’idée du crime, les moyens, et dégagé la voie », transformant en « terroristes » des hommes « dont la bouffonnerie était shakespearienne ».

    Le rapport cite également le cas de Rezwan Ferdaus, condamné à dix-sept ans de prison à l’âge de 27 ans pour avoir voulu attaquer le Pentagone et le Congrès avec des mini-drones bourrés d’explosifs. Un agent du FBI avait dit de Ferdaus qu’il avait « de toute évidence » des problèmes mentaux, mais le plan avait été entièrement conçu avec le policier infiltré, le FBI ayant notamment financé son voyage et son armement.

  • Une histoire par-delà « la séparation »
    http://lectures.revues.org/14913
    Commentaire de Frédéric Abécassis sur Abdelwahab Meddeb, Benjamin Stora (dir.), Histoire des relations entre juifs et musulmans des origines à nos jours, Paris, Editions Albin Michel, 2013, 1145 p., ISBN : 978-2-226-24851-0.

    Cette proximité entre islam et judaïsme est une expérience de l’altérité dont seule une histoire comparée, accompagnée d’une contextualisation rigoureuse, peut permettre d’éprouver les parallèles et les synchronies. Si cette vie commune a souvent pris la forme d’une franche hostilité ou d’une domination parfois brutale, l’Autre a aussi pu être considéré « comme participant à un destin commun » (p. 22). Comme le rappelle Makram Abbes dans un beau commentaire de Sa‘id al-Andalusî (1029-1070) : « si la notion de tolérance nous renvoie, notamment par son sens faible, à une acceptation de l’Autre qui a lieu malgré nous, le texte de Sa‘id montre qu’il existe une dimension de l’altérité qui peut être atteinte seulement si l’on pense que l’Autre fait partie du “Nous” » (p. 766).

    L’Histoire des relations entre juifs et musulmans marque un pas supplémentaire dans ce sens et un élargissement. Elle est un véritable acte de foi dans la capacité de la discipline historique, et plus largement, des sciences sociales, à assumer une forme de régulation académique de cette mondialisation, une médiation entre passé et présent et entre les termes extrêmes de ce paradoxe. Entre mise en avant des particularismes et inscription dans l’histoire universelle, la proposition permet de déplacer le curseur de l’analyse à différentes échelles et de considérer que toute interaction entre un-e juif-ve et un-e musulman-e, quelle qu’en soit la qualité ou l’intensité, engage quelque chose qui les dépasse. Loin de toute essentialisation et des spéculations métaphysiques, il s’agit au contraire, à échelle humaine, de resituer l’ancrage de ce « quelque chose » dans des lignées croyantes contingentes et « de donner la chance au laboratoire du chercheur de féconder le sens commun du citoyen » (p. 16).

    #islam #judaïsme #juif #musulman #histoire_globale #histoire_comparée

  • L’Europe s’arme contre ses jeunes jihadistes
    http://fr.myeurop.info/2014/06/03/l-europe-s-arme-contre-ses-jeunes-jihadistes-13946

    Tristan de Bourbon Elise Gazengel Marco Bertolini Ludovic Clerima

    Comment empêcher les jeunes européens de rejoindre la #guerre_sainte en #Syrie ou ailleurs ? Prévention, gestion des retours ou encore coopération entre les Etats, l’Europe commence à s’armer contre les apprentis jihadistes.

    #Mehdi_Nemmouche est-il l’auteur de la tuerie du musée Juif de Bruxelles ? Depuis son arrestation le 30 mai dernier, il est maintenu en garde à vue. lire la (...)

    #EUROFOCUS #Société #Europe #Royaume-Uni #attentats #Bernard_Cazeneuve #djihad #jihad #ministre_de_l’Intérieur #Mohammed_Merah #musulmans

  • A Zell Am See, des touristes, oui, mais sans burqa
    http://fr.myeurop.info/2014/05/27/a-zell-am-see-des-touristes-oui-mais-sans-burqa-13924

    Ludovic Clerima

    La ville de Zell Am See en #Autriche vient de publier un #guide à l’attention des touristes et plus particulièrement des visiteurs arabo-musulmans. Le mot d’ordre du livret : l’adaptation.

    Les riches touristes des #emirats_arabes sont toujours bien accueillis à Salzburg en Autriche. Une région connue pour ses pistes de #ski exceptionnelles et son lac cristallin. lire la suite

    #REVUE_DU_WEB #Société #arabe #argent #discrimination #Golfe #islamophobie #musulmans #Qatar #raciste #tourisme

  • Européennes 2014 : le #populiste #geert_wilders en déroute
    http://fr.myeurop.info/2014/05/23/election-europeennes-deroute-populisme-geert-wilders-13907

    Marco Bertolini

    Il n’y a pas eu de raz-de-marée populiste aux #Pays-Bas. Le PVV de #Geert_Wilders n’a obtenu hier que 12,2% des voix contre 17% en 2009 aux élections européennes. Décryptage des raisons de cet échec.

    Aux #pays-bas on a voté dès jeudi pour les députés européens. lire la suite

    #INFO #Politique #Union_européenne #casher #echec #élection #election #élection_européennes_2014 #Europe #islam #islamophobe #juif #musulman #néerlandais #résultat #viande_halal #xenohobe

  • Islamophobie : les données disponibles | Marwan Mohammed

    http://sociologie.revues.org/2108

    Cet ensemble de connaissances sur le rejet des musulmans s’est développé dans le sillage d’enquêtes d’opinion internationales comme le Pew Global Attitudes Project, l’Eurobarometer, l’European ou la World Values Study, menées pour certaines depuis le début des années 1980. (...) En France, ce type d’enquêtes d’opinion est piloté depuis 1990 par la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) et exploité par plusieurs politologues spécialistes des questions identitaires et électorales. Si elles ne sont pas exemptes de critiques liées à leurs commanditaires, à leurs finalités ou à la méthodologie utilisée, ces enquêtes d’opinion jouent, depuis une décennie, un rôle important dans l’objectivation de l’un des volets de l’islamophobie et sa reconnaissance comme fait social. Plusieurs tendances se dégagent de ces enquêtes. D’une part, le fait que les opinions négatives à l’égard de l’islam et des musulmans sont stables et relativement autonomes, c’est‑à‑dire peu sensibles aux variations (notamment la décrue) d’autres formes d’intolérance. Parmi les marqueurs de la religiosité musulmane, le rejet du port du foulard est particulièrement vif. Symbole du « problème musulman » depuis 1989 (année de la première controverse sur le « voile islamique »), son rejet est massif et les opinions négatives atteignent des sommets en 2003, au moment des débats qui ont précédé le vote de la loi du 15 mars 2004. Le port du foulard est le signe d’islamité le plus rejeté, ce que corroborent d’autres instruments de mesure de l’islamophobie. Mais au-delà du « foulard islamique », c’est l’ensemble de la ritualité musulmane qui est l’objet d’une hostilité croissante. Les interdits alimentaires, qui cumulaient 13 % d’opinions défavorables en 2003, suscitent le rejet d’un tiers des répondants en 2011. L’observance du ramadan indispose 26 % des sondés contre 21 % en 2003. Enfin, le sacrifice du mouton lors de la fête de l’Aïd suscite 37 % d’opinions négatives en 2011 contre 25 % en 2003.
    Depuis le début des années 2000, d’autres données sont mobilisables pour se faire une idée des manifestations d’islamophobie en France. Deux organismes enregistrent les saisines des victimes : le ministère de l’Intérieur et le Collectif Contre l’Islamophobie en France (CCIF). En tendance, les courbes du ministère de l’Intérieur et du CCIF se ressemblent et convergent pour dessiner une tendance à l’accroissement continue depuis 2008. Leurs variations se révèlent sensibles à l’agenda médiatique et politique concernant le « problème musulman ». Un pic est identifiable en 2004 et peut être associé aux travaux fort médiatisés de la commission Stasi ayant donné lieu au vote de la loi interdisant les signes religieux ostensibles à l’école publique ; la poussée de 2009 est concomitante des controverses sur l’interdiction du voile intégral et du lancement du débat sur l’identité nationale.
    De nouveaux révélateurs statistiques permettent aujourd’hui de mieux objectiver l’expérience de l’islamophobie en interrogeant l’existence de discriminations en raison de l’appartenance religieuse. Plusieurs enquêtes de victimation européennes établissent aujourd’hui un tableau assez sombre de la condition de diverses minorités, notamment musulmanes12. En France, l’essor de la thématique des discriminations (Fassin, 2002) dont l’enquête TeO est l’un des aboutissements permet de questionner l’existence d’une « pénalité musulmane » (Simon & Stavo‑Debauge, 2004 ; Lesné & Simon, 2012)13. À l’échelle nationale, le motif religieux est très peu mobilisé pour expliquer la discrimination (moins de 1 %). Sa mobilisation est corrélée à l’importance que lui accordent les individus, notamment 5 % des musulmans et près d’un juif sur six, les deux populations qui déclarent l’attachement le plus intense à la religion et à la pratique du culte. Rapporté à leur poids dans la population enquêtée (7 %), il ressort qu’un peu plus d’un enquêté sur deux déclarant avoir été discriminé pour motif religieux est musulman, notamment les femmes. En effet, au sein de cette population, ils sont 38 % à affirmer porter un signe religieux repérable, alors que cette religiosité visible (tous signes confondus) n’est déclarée que par 21 % de l’ensemble des musulmans de l’enquête.
    Une autre approche consiste à postuler une « condition » collective liée à une expérience partagée (N’diaye, 2008). L’importance que les musulmans accordent à la religion dans l’enquête TeO plaide en faveur de cette approche dont les limites sont nombreuses. L’élaboration d’une « condition musulmane » est ici une opération statistique qui ne doit en rien occulter la pluralité des modes d’appartenance ou bien la dimension cumulative des désavantages sociaux pour des populations avant tout ancrées au sein des classes populaires. En fait, l’association de la question des discriminations avec l’idée de condition collective s’opère par la jonction d’une logique d’identification avec une logique de racialisation en fonction du signe religieux (Amiraux, 2008). Au final et par effet d’accumulation, le niveau des discriminations rapportées par les musulmans est « supérieure d’environ 50 % comparativement aux personnes se déclarant sans religion ». Signalons pour finir, l’enquête par testing menée en France par Claire Adida, David Laitin et Marie‑Anne Valfort qui ont comparé le potentiel d’accès à l’emploi de deux Françaises, l’une musulmane et l’autre chrétienne, toutes deux noires de peau et originaires du Sénégal, dont les CV se distinguaient par deux marqueurs religieux. Résultat, pour 100 réponses positives obtenues par Marie Diouf, Khadija Diouf en obtient seulement 38, autrement dit, la candidate musulmane a 2,5 fois moins de réponses positives que la candidate chrétienne.
    La multiplication, la diversification et surtout la convergence des outils de mesure de l’islamophobie au cours des années 2000 tranchent toutefois avec le désintérêt relatif du monde académique et du champ politique français à l’égard de ce phénomène, notamment au regard du dynamisme des sciences sociales anglophones.

    #stigmatisation
    #minorités
    #islamophobie
    #musulmans

  • Islamophobie : la construction d’un « problème musulman » | Marwan Mohammed

    http://sociologie.revues.org/2108

    Cette notion d’islamophobie (...), nous la définissions avec Abdellali Hajjat (Hajjat & Mohammed, 2013) comme un processus complexe d’altérisation qui s’appuie sur le signe de l’appartenance réelle ou présumée à la religion musulmane. Par altérisation, nous pointons le fait de réduire l’agir social des musulmans, réels ou présumés, à un agir religieux essentialisé, en effaçant ou en atrophiant la pluralité et la complexité identitaires et communautaires de cette population. (…) Nous considérons que l’islamophobie est l’une des conséquences de la construction d’un « problème musulman » dont l’enjeu fondamental est la légitimité présentielle des musulmans, notamment ceux issus de l’immigration post‑coloniale sur le territoire national ou certains de ses espaces. (…)
    En France, depuis le début des années 1980, cette croyance en l’existence d’un « problème musulman » se décline de manière moins brutale, au gré de controverses publiques connectant de multiples enjeux : un problème « d’intégration » au regard de la reproduction intergénérationnelle d’une certaine religiosité jugée incompatible avec les conceptions majoritaires de la citoyenneté ou de l’identité nationale ; un problème de modernité en raison de présumées incompatibilités des musulmans avec la démocratie, la laïcité ou l’égalité entre les sexes ; une peur du débordement démographique articulée au « mythe de l’islamisation » (Liogier, 2012) ; un problème de sécurité centré sur la construction d’une menace terroriste de référence islamiste (Bigo, Deltombe & Bonelli, 2008). Les débats publics reposent sur une dichotomisation et une essentialisation radicales de l’islam et des musulmans. Les discours et la mise en image participent de la construction d’un « islam imaginaire », tour à tour opposé à la « République », à « l’État », à la « laïcité » ou à la « Nation » (Deltombe, 2005). Les « musulmans », quant à eux, s’ils ne sont pas opposés aux « Français », sont fréquemment divisés en deux grandes catégories : les « intégristes » (« islamistes » ou « fondamentalistes ») d’un côté et les « modérés » de l’autre (Geisser, 2003). Un binarisme et des logiques d’essentialisation, en total décalage avec la nuance ou la complexité qu’apportent les études en sciences sociales, de plus en plus nombreuses, sur le fait musulman. (…)
    Un cadrage aux effets politiques et sociaux concrets, notamment sur la vie quotidienne de millions de musulmans réels ou présumés. En effet, les solutions politiques suggérées ou apportées au « problème musulman » en Europe, au moins depuis le 11 septembre 2001, penchent nettement vers une logique de contrôle, d’exclusion ou de disciplinarisation (Fournier, 2013 ; McGoldrick, 2006). Valérie Amiraux rappelle ici que l’accumulation des controverses publiques liées à l’islam en Europe a eu pour effet de systématiser l’interdiction légale ou la réprobation publique des vêtements islamiques féminins. La sauvegarde des valeurs nationales, qui seraient fragilisées par l’irruption publique de référentiels musulmans (vestimentaires, institutionnels, cultuels, etc.) passe désormais par leur disqualification symbolique et sociale et leur encadrement juridique. En France, cela prend la forme du bannissement des filles ou des mères voilées de l’école publique, des femmes en niqab de l’espace public, et plus largement, par le déploiement d’une volonté de rejet – fortement genré (Deeb, 2010 ; Mirza, 2013) – de toute expression de l’islam dans le monde du travail, dans l’univers du « care » ou à l’université. Avec Abdelalli Hajjat, nous avons parlé de processus de discrimination légale par capillarité dans la mesure où les arguments juridiques et politiques au fondement des premières interdictions sont réinvestis dans les nouveaux espaces sociaux dans lesquels se développent de nouvelles mobilisations de type prohibitionniste. (…)

    #stigmatisation
    #minorités
    #islamophobie
    #musulmans

  • I Talked to a Young Muslim Facebook Group about Pork | MUNCHIES
    http://munchies.vice.com/articles/i-talked-to-a-young-muslim-facebook-group-about-pork

    Restrict a child, and he or she will become unquenchably curious about the very thing you forbid. Muslim parents have yet to figure this out and continue to fiercely discourage the consumption of pork, the drinking of alcohol, and any contact with the opposite gender (prior to that mandatory marriage to your cousin at age 14). Prohibition never works for booze or sex, whether on a national level or within a household. Kids will always gravitate toward altered states and carnal satisfaction, breaking the rules set forth by their parents. Comparatively, the charms of pork are easier to resist, but abstaining from it becomes a compromise for Muslim kids. If you have any allegiance at all to your parents or to Islam, it’s how you keep one foot within bounds. I grew up in Thailand, one of the world’s greatest hotbeds for culinary explorations in swine. From age zero to 13, I was exposed to some of the most incredible preparations of pork on the planet, and was allowed to eat none of them. Though I lived in Thailand, my parents are Muslim Pakistanis, and there was no room for dietary transgression.

    I progressed through the teenage rites of passage at the same pace as any American kid, but like so many with Muslim backgrounds, my rebellion excluded pork. My foot remained in bounds until I was 25. When I finally started eating pork, it was an orchestrated effort. I chose to exploit my pig virginity for the sake of inspiration and a catchy premise for a blog. What followed was eating lot of it and writing a lot of words about it, and when it was over, I was completely desensitized to the revulsion that so many Muslims feel about the animal. With my lifelong conditioning undone, the classic Muslim arguments against pork suddenly sounded like the bullshit they are to me.

    I recently gathered a few opinions on the matter via a Facebook group populated by young Muslims. I asked if any of them ate pork, and if so, why they did it. I received a slew of responses, some of them non-chalant about the practice while others were fiercely opposed. As you see in any comment scenario, the loudest voices were the most predictable. To justify their avoidance, several argued that pork is “filthy,” backing it up claims like the following:

    “The fact that all pork must be cured before being sold in stores is scary. It smells and looks disgusting.”

    “Pigs digest food very quickly. Toxins remain in pork. Pigs from industrial farms literally eat shit. Pork has way more bacteria than other meats and requires a lot of preparation in cooking and cleaning the meat.”

    “I think empirically I could research a paper in a day to prove how much likelier a pig is to have overall bad health, viruses/contamination.”

    These were often made in the same breath with denying any religious influence on their views:

    “My ideas on pork are not rooted in religion or what my family says. I’ve read a lot about pork, meat, and food in general.”

    “Part of it is holding onto culture, I guess, and also it’s the unhealthiest meat.”

    All this conjecture is fully ignorant of the reality that billions of people consume pork every day and there is no abundance of parasite epidemics breaking out from it. It is no “filthier” than any other meat and has the same recommended cooking temperature as beef and lamb. The insistence on pork’s filthiness centers around one purported habit, the same one my parents and grandparents drilled into me to ensure that I would never warm up to it.

    #porc #musulman #cuisine

  • Après #Londres, Paris se mobilise contre le #djihad
    http://fr.myeurop.info/2014/04/23/apres-londres-paris-se-mobilise-contre-le-djihad-13690

    Tristan de Bourbon

    Si les responsables de la sécurité britannique parlent depuis peu de la menace islamiste, le gouvernement évite l’amalgame entre musulmans et terroristes. Mais les musulmans britanniques restent sous surveillance.

    Ils seraient environ 500. Un demi-millier de Français partis, estime Laurent Fabius, en #Syrie combattre dans les rangs des #Djihadistes. lire la suite

    #INFO #France #Royaume-Uni #Bachar_Al_Assad #islamistes #jeunes #musulmans_radicaux

  • Après le #minaret, le #voile

    La section valaisanne de l’Union démocratique du centre (#UDC) a annoncé hier qu’elle allait lancer une #initiative_cantonale pour proscrire le port du voile à l’#école. Après les minarets, il serait effectivement dommage de se priver d’un si bel objet de polémique. Ceci alors que la ­situation en Suisse est relativement pacifiée et qu’on peine à trouver des cas réellement problématiques.
    Oh, bien sûr, le débat est toujours légitime. Dans un Etat laïc, certaines limites sont évidemment pertinentes et doivent être rappelées en matière de #religions. Il est souhaitable de garantir aux enfants comme un besoin utile, voire essentiel, l’apprentissage de la #natation, auquel il ne saurait être question se soustraire sous prétexte de pudibonderie, comme l’a rappelé récemment la justice. Et pas question d’échapper à certains enseignements sous prétexte qu’hypothétiquement ils égratigneraient tel ou tel dogme religieux. La question est donc bien plus où l’on place le curseur et pas sur sa légitimité.
    Mais ce genre de sujets sociétaux est surtout du pain béni pour les #partis_populistes. Ils permettent de diviser la gauche et les partis institutionnels en dévoyant le principe de la #laïcité. Un peu comme les racistes ou les négationnistes brandissent la liberté d’expression pour justifier leurs élucubrations.
    Toujours tentant quand on est en train de braconner quelques voix. De plus, ils peuvent être gagnés devant le peuple. Ceci en jouant sur la #peur et en stigmatisant un #bouc_émissaire : l’#arabo-musulman qui vient voler le pain du bon Helvète et ne respecterait même pas ses #coutumes. En plus, il se trouve toujours quelques imbéciles utiles pour apporter de l’eau au moulin udéciste : des représentants souvent autoproclamés des intérêts des #musulmans. En tenant quelques propos odieux sur la #lapidation, ou en relativisant la pertinence de certaines normes fondamentales en matière de droits humains, ils alimentent la #peur et, partant, le #rejet.
    Gardons donc à l’esprit les fondamentaux de la #démocratie. L’Etat doit-il nous dire comment nous habiller ? Comment penser ? En quoi croire ? De fait, l’UDC invoque sa volonté de défendre les « #racines_chrétiennes » de notre société pour justifier son texte islamophobe. En cela, le parti blochérien montre que la défense de la laïcité – un des socles de l’Etat de droit et de la démocratie – n’est pas le premier de ses soucis. C’est bien dans une optique de #choc_des_civilisations que s’inscrit sa pitoyable démarche.
    Et on se réjouit déjà, au cas où cette initiative passerait, qu’un fondamentaliste chrétien attaque les masques de Loetschenthal pour leur dangereux potentiel animiste.

    http://www.lecourrier.ch/119638/apres_le_minaret_le_voile

    #islamophobie #Valais #Suisse

  • ISRAEL. Une loi distingue les arabes chrétiens et musulmans - Le Nouvel Observateur
    http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20140225.OBS7662/israel-une-loi-distingue-les-arabes-chretiens-et-musulmans.html

    Israël a adopté lund1 24 février un projet de loi controversé qui, pour la première fois, fait la distinction entre les citoyens arabes de confession musulmane et ceux d’obédience chrétienne, suscitant des protestations palestiniennes.

    Le texte approuvé lundi par la Knesset (Parlement israélien) élargit la Commission nationale sur l’égalité des chances dans l’emploi de cinq à 10 membres, accordant des sièges distincts à des représentants des travailleurs chrétiens et musulmans de la communauté arabe israélienne.

    « Nous avons beaucoup en commun avec les chrétiens. Ils sont nos alliés naturels, un contrepoids aux musulmans qui veulent détruire le pays de l’intérieur », a déclaré le parrain de ce projet de loi, Yariv Levin, du parti Likoud (droite nationaliste) du Premier ministre Benjamin Netanyahu, cité par les médias.
    « Une manœuvre politique de l’extrême droite »

    La nouvelle loi prévoit également des sièges réservés à la communauté druze, aux juifs ultra-orthodoxes et aux immigrés juifs d’Ethiopie, des communautés où le taux de chômage est supérieur à la moyenne.

    Un député arabe israélien de la Knesset a dénoncé un texte empreint d’un « sectarisme sans précédent ». « Il s’agit d’une manœuvre politique de l’extrême droite », a expliqué Basel Ghattas, un chrétien grec orthodoxe.

    Le texte a également été dénoncé par l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). « Nous rejetons cette loi », a affirmé dans un communiqué Hanane Achraoui, membre du Comité exécutif de l’OLP, déplorant qu’elle cherche « à créer une nouvelle réalité au sein de notre peuple sur une base religieuse au lieu de se fonder sur l’identité nationale ».
    Diviser les arabes chrétiens et musulmans

    Les Arabes israéliens sont les descendants des 160.000 Palestiniens restés sur leur terre après la guerre qui a conduit à la création d’Israël en 1948. Cette communauté compte aujourd’hui plus de 1,4 million de personnes, soit 20% de la population totale.

    Israël - qui bénéficie du soutien idéologique et financier des chrétiens évangélistes sionistes, en particulier américains - s’efforce de jouer la carte de la division entre arabes chrétiens et musulmans dans le conflit israélo-palestinien, selon les adversaires du projet de loi.

    Ce texte a été approuvé trois mois avant le premier voyage en Terre sainte du pape François, qui doit se rendre en Jordanie, à Bethléem (Cisjordanie) et à Jérusalem du 24 au 26 mai prochain....

    #Israël
    #arabes
    #Palestine
    #musulmans
    #chrétiens
    #loi
    #knesset

    • La stratégie du diviser pour régner d’Israël : considérer les Palestiniens chrétiens comme « non-arabes »

      Par Yazan al-Saadi, Chloé Benoist
      Article publié le 21 février 2014 / Al Akhbar

      http://www.ism-france.org/analyses/La-strategie-du-diviser-pour-regner-d-Israel-considerer-les-Palestiniens

      Le projet a été proposé par Yariv Levin, président de la coalition conservatrice au pouvoir Likud-Yisrael Beitenu en janvier 2014. « Mon projet de loi accordera une représentation et un cadre de référence distincts à la population chrétienne, qui les distingueront des arabes musulmans, » avait dit Levin à l’époque. « C’est une étape importante et historique qui peut introduire un équilibre dans l’Etat d’Israël, et pour nous [les juifs] avec les chrétiens, » avait-il ajouté. « Je veille à ne pas faire référence à eux en tant qu’arabes, parce qu’ils ne sont pas arabes. »

  • Radicalement décomplexé
    http://www.bakchich.info/societe/2014/01/06/radicalement-decomplexe-63010

    #Manuel_Valls, ministre de l’Intérieur, vient de l’énoncer distinctement, dans une circulaire adressée aux préfets : « Il y a lieu de faire preuve de la plus grande vigilance lorsque sont susceptibles d’être prononcés des propos incitant à la #discrimination, à la #haine ou à la #violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur #origine, de leur #appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une #race ou une #religion donnée. »

    Cela est parfaitement exact – et nous devons souhaiter que cette nécessaire « vigilance » s’applique dans toutes les occasions où de tels « propos » risquent d’être « prononcés ».

    Car en effet – et contrairement à ce que pourrait donner à penser l’actualité de ces derniers jours : ce n’est pas seulement dans les endroits où se produit un ex-humoriste reconverti dans la vomissure antisémite, que sont dits des « mots de haine ».

    Bien au-delà du cas de ce personnage : c’est tous les jours, ou presque, que sont formulées, dans l’espace public – le plus souvent sous le prétexte, un rien orwellien, de lutter contre une imaginaire censure des « #bien-pensants » -, des proférations qui, de fait, discriminent des personnes (ou des groupes de personnes) « à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une race ou une religion donnée »…

    …Et qui sont d’autant plus alarmantes qu’elles ne sont, quant à elles, pas du tout cantonnées dans quelques fétides recoins – mais (presque) partout exhibées, et (presque) partout données comme autant de gages d’un très salutaire #iconoclasme : c’est ce que démontrent, par exemple, l’étude du traitement que la presse dominante, gavée d’aides publiques, réserve coutumièrement aux #Roms ou (bien plus encore, et « à raison de leur appartenance à une religion donnée ») aux #musulman(e)s…

  • Je viens de commencer ce #livre, ça promet...
    L’HIVER DES HOMMES

    #Lionel_DUROY

    Reclus dans la petite république ethniquement « pure » pour laquelle ils ont combattu leurs voisins croates et bosniaques, les Serbes de Bosnie sont pourtant aujourd’hui les gens les plus désespérés qui soient. Un voyage aux confins de l’Europe et une méditation sur la #guerre et l’inaptitude au bonheur.

    http://www.julliard.fr/site/l_hiver_des_hommes_&100&9782260019169.html

    #lecture #ex-Yougoslavie #enfants_de_bourreaux

    • Des citations de ce livre sur les #montagnes :

      - « Expliquez-nous pourquoi, Karadzic a choisi Pale, qui n’était alors qu’un petit village de montagne, pour installer le gouvernement des Serbes de Bosnie, plutôt qu’une ville digne de ce nom, comme Banja Luka par exemple. Que ce village de montagne soit devenu une ville, c’est incompréhensible.
      – Avant la guerre, Karadzic avait déjà des affaires, ici, à Pale. Des affaires un peu louches. Dans une entreprise de Sarajevo où il intervenait comme médecin, il avait donné des congés maladie fictive à des ouvriers, en échange de quoi les ouvriers lui avaient construit gratuitement une maison à Pale. Il avait pas mal de choses, ici, c’est pourquoi il a choisi Pale plutôt que Banja Luka »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.138

      - « Oui. Nous avons prétendument gagné la guerre, mais pendant que les Musulmans vivent tranquillement à Sarajevo dans les maisons des Serbes, nous, les vainqueurs, nous mourons de faim et froid sur notre montagne »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.144.

      - « Les oustachis ne sont pas seulement ’venus’, ils ont occupé Pale durant quatre ans.
      – Pardonnez-moi, je savais que les Allemands étaient présents dans tout le massif montagneux, autour de Sarajevo, mais je ne savais pas que les oustachis étaient à Pale précisément.
      – Ici, ce sont eux qui ont commis tous les massacres. Les Allemands et les Italiens étaient présents, dans des forteresses, mais ils étaient plutôt corrects. Il est même arrivé qu’ils interviennent pour nous défendre contre les oustachis. C’est un officier italien qui a sauvé la vie de ma mère alors qu’un groupe d’oustachis s’apprêtait à l’emmener.
      De nouveau, je songe à Malaparte, officier italien engagé au côté de la Wehrmacht, sur le front de l’Est, comme correspondant de guerre, et sauvant quelques familles juives à Jassy, en Moldavie, avec l’aide du consul d’Italie, tandis que débute le pogrome. Un instant, je suis tenté de demander à notre hôte s’il a lu Malaparte, mais il reprend, sortant soudain de sa méditation :
      – L’esprit de la guerre animait les Allemands, mais les Croates poursuivaient un objectif différent. Les Croates avaient en tête d’exterminer les Serbes. Vous comprenez cela ?
      – Je vous écoute.
      – Ils menaient à l’intérieur de la guerre une autre guerre. Une guerre indigne, criminelle.
      Puis il se tait et m’observe, comme s’il doutait encore que je puisse comprendre. Mais j’acquiesce.
      – J’avais trois ans en 1941, reprend-il, je n’ai donc aucun souvenir de mon père ni de sa disparition. Je sais que le plus âgé des quatre frères, mon oncle Jovo, a été tué dans les heures qui ont suivi l’arrivée des Oustachis. Le lendemain, ou le jour même, mon père et ses deux frères ont rejoint la Résistance dans les montagnes ».

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, pp.166-167.

      - « Le siège du parti serbe était à l’Holiday Inn de Sarajevo. Nous avons senti monter le danger. Les bérets verts musulmans étaient partout dans les rues, et nous savions que parmi eux figuraient beaucoup de criminels, des détenus qui avaient été libérés parce qu’ils connaissaient le maniement des armes. Quand les premières barricades sont apparues, Karadzic a décidé de déménager le siège du parti de Sarajevo à Pale. C’était plus sûr. Ici, nous serions entre Serbes, protégés par les montagnes et les forêts »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.172.

      « ’Je suis chez les fous furieux [des Serbes de la Republique serbe de Bosnie], Hélène, des gens qui s’imaginent nous protéger des Musulmans depuis un plateau perdu de haute montagne. Je ne leur ai pas dit que nous habitions Belleville, au-dessus d’une mosquée, et que nous ne souhaitons pas être protégés des Musulmans’ »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.178.

      - « Elle le pense, oui. Je me souviens qu’un jour elle a dit une drôle de phrase, du genre : ’Nous, les Serbes, prétendons avoir gagné la guerre, mais pendant que les Musulmans vivent tranquillement à Sarajevo, nous mourons de faim et de froid sur notre montagne »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.182.

      - "Nous sommes dans les montagnes de Romanija, remarque-t-il avec une solennité voulue et tandis qu’on entend le vent siffler sous le plancher de tôle. On dit que c’est ici qu’est née l’âme serbe aux premiers jours du monde.
      – Dans cette immense solitude.
      – Oui, confirme-t-il, la solitude est destin. Chaque fois, dans l’histoire, que nous avons cru pouvoir compter sur un ami, cet ami nous a trahi. Le dernier en date est Mitterand, votre Président. Pendant la guerre, j’étais stationné sur l’aéroport de Sarajevo et j’ai été témoin du jour où les Français ont décidé de faire alliance avec les Musulmans.

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.197.

      - « Il [Ratko] était très intelligent, très doué. Il était la fierté de l’instituteur. Nous, les montagnards, sommes plus intelligents que les gens des villes. La montagne nous oblige à être plus perspicaces pour survivre, tandis que dans la plaine ils n’ont pas besoin de développer leur intelligence, ils ont tout le confort sous la main »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.252.

      - « Si les Serbes veulent se priver de Sarajevo, ça les regarde. Qu’ils restent sur leur montagne, ou à Lukavica. Après tout, nous vivons très bien sans eux »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.347.

      #montagne #République_serbe_de_Bosnie #Republika_Srpska #guerre #conflit #Sarajevo #oustachis

    • Des citations sur la #religion et les #Musulmans :

      - "Comment avez-vous pris que la capitale de votre république, née de la guerre, soit finalement Banja Luka, plutôt que Pale, où avait siégé le gouvernement pendant les combats ?
      – Ce déménagement de la capitale de Pale à Banja Luka a été orchestré de l’extérieur pour tenter de créer une scission entre les Serbes de Bosnie. Mais la manœuvre a échoué, nous avons accepté la chose sans protester.
      – On dit tout de même que Pale serait resté favorable à Karadzic, tandis que Banja Luka soutiendrait Dodik.
      – Dodik est parvenu, avec l’aide des Américains, à chasser du pouvoir le parti de Karadzic. Je préférais Karadzic à Dodik, mais aujourd’hui je soutiens Dodik car son but est le même que le mien : protéger nos frontières contre les Musulmans. Nous, les Serbes de Bosnie, sommes aujourd’hui en première ligne contre l’Islam. Nous gardons les frontières et protégeons ainsi l’Ouest, mais l’Ouest ne nous en est aucunement reconnaissant car il n’a pas encore conscience du danger qui le menace.

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.175.

      - « Pardonnez-moi, dis-je, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris. Vous estimez avoir perdu la guerre le jour où les Musulmans ont quitté Pale ? C’est bien ça ?
      – C’est un divorce. Pensez-vous qu’un divorce soit une victoire ? Avez-vous jamais entendu une personne divorcée se réjouir et se vanter d’avoir gagné quoi que ce soit dans la rupture de son mariage ? Un divorce est un échec, mais ici les gens ne voient pas les choses comme moi, ils continuent de se féliciter d’avoir gagné la guerre, d’avoir chassé les Musulmans »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.187.

    • Des citations sur la #guerre :

      « - Parce que trois mois plus tard, reprend-il, au terme des accords de paix, les Croates ont dû nous rendre Mrkonjic Grad. Ils étaient si furieux qu’ils nou sont tout détruit avant de partir. Quand nous sommes revenus, le 4 février 1996, avec ma mère et tous les habitants qui avaient pu fuir, la ville était un champ de ruines. Toutes les maisons avaient été incendiées, et la nôtre aussi évidemment. Je n’ai pu m’empêcher de pleurer en voyant ce qu’ils avaient fait de notre ville. C’était quelque chose d’inimaginable, tout était détruit, brûlé, pillé. Ils avaient même démonté les machines des usines pour les emporter. Sur les rares maisons encore debout, ils avaient écrit : ’Maison croate’. Ils s’imaginaient donc qu’ils pourraient revenir, en dépit de ce massacre, en déptit de tout le mal qu’ils nous avaient fait »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.116

      « -C’est ça, la logique de la guerre, dit-il après un silence : même pour ceux qui ne veulent pas la faire, elle devient indispensable »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.117

      « Ici aussi, les gens ont cru qu’ils pourraient échapper à leur histoire, ils se sont aimés, ils ont eu des enfants, mais soudain ils se sont souvenus qu’ils avaient des raisons de craindre, de trembler à la vue l’un de l’autre. Ils ont été troublés, puis emportés petit à petit par la mémoire de tout le mal qu’ils se sont fait, autrefois, au temps de leurs parents, de leurs grands-parents, et bientôt ils se sont découverts ivres de haine et de peur, et alors ils n’ont plus vu d’autres issues que de recommencer à se jeter les uns contre les autres »

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.181.

      - Pavlusko Vuskovic dit aux Serbes ce qu’ils veulent entendre, il leur fait croire qu’ils se sont sauvés en chassant les Musulmans et les Croates, alors qu’en vérité ils se sont condamnés à mourir d’isolement et de chagrin

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.191.

      - "Il me semble qu’à chaque rencontre je comprends un peu mieux combien ce qu’ils vivent est effrayant. Ils ont obtenu les frontières qu’ils souhaitaient des accords de paix, mais ces frontières les condamnent à un isolement qui les précipite dans le malheur et la dépression. Néanmoins, ils sont condamnés à défendre cet isolement, ces frontières, et même à en vanter les mérites pour ceux qui ont le plus souffert de la haine des autres. Comment Pavlusko pourrait-il tenir un autre discours, lui dont ils ont tué l’enfant ? Et Slobodan Jasnic, le père de Jelica, dont la famille a été anéantie par les oustachis, que pourrait-il souhaiter de mieux pour ses enfants et petits-enfants que ces frontières ? Après toutes ces guerres, ils savent bien qu’ils ne réussiront jamais qu’à s’entretuer. Comment vont-ils survivre à cette folie ?

      Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.240.