• Trente nuances de #capitalisme urbain
    https://metropolitiques.eu/Trente-nuances-de-capitalisme-urbain.html

    À partir d’entrées disciplinaires variées et d’enquêtes menées sur les cinq continents, trente auteurs et autrices dépeignent les multiples visages du capitalisme urbain et livrent ainsi des outils pour penser les obstacles au droit à la ville. Les analyses attachées à saisir les transformations urbaines au prisme des dynamiques des rapports de pouvoirs connaissent depuis une vingtaine d’années un indéniable renouveau dans les sciences sociales françaises, en géographie notamment (Gintrac 2020). Pour #Commentaires

    / capitalisme, #néolibéralisme, #inégalités

    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_vancriekingen-2.pdf

  • Barbara Stiegler : « La crise due au coronavirus reflète la vision néolibérale de la santé publique »

    Dans un entretien au « Monde », la philosophe explique que la colère citoyenne face à l’impréparation des gouvernements doit déboucher sur un sursaut politique et une véritable « démocratie sanitaire ».

    Propos recueillis par Nicolas Truong
    Publié le 09 avril 2020 à 05h51 - Mis à jour le 09 avril 2020 à 18h13

    Professeur de philosophie politique à l’université Bordeaux-Montaigne et responsable du master « soin, éthique et santé », Barbara Stiegler est l’auteure d’Il faut s’adapter. Sur un nouvel impératif politique (Gallimard, 336 p., 22 euros) et de Du cap aux grèves. Récit d’une mobilisation. 17 novembre 2018-5 mars 2020 (Editions Verdier, 139 p., 7 euros, à paraître).

    Comment expliquer l’impréparation, notamment française, face à cette pandémie mondiale ?

    L’impréparation est en effet générale, mais les motifs divergent selon la culture politique de chaque pays. Aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni, les choix qui ont été faits au départ allaient dans le sens du laisser-faire et s’inscrivaient dans une vision utilitariste assumée. Pour le bien commun, il valait mieux que certaines vies de moindre valeur soient sacrifiées.

    En France, où un tel discours aurait eu du mal à passer, la réduction continue du nombre de lits et de soignants et la pénurie de masques, d’équipements de protection et bientôt de médicaments conduit également à trier les patients, mais sans le dire publiquement.
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    Cette situation reflète plutôt la vision néolibérale de la santé publique et son imaginaire. Dans sa conception du sens de l’histoire, nous irions en effet vers un monde immatériel de flux et de compétences, censé être en avance sur le monde d’avant, qui lui serait fait de stocks et de vulnérabilités, c’est-à-dire au fond de matière et de souffrance.

    Nos économies développées seraient fondées sur « l’innovation » et sur « l’économie de la connaissance », ce serait là d’ailleurs le nouveau sens de la santé, et elles devraient déléguer aux continents du Sud, à l’Afrique et à l’Asie principalement, la fabrication industrielle des biens matériels. Avec une telle conception fantasmatique du sens de l’histoire, nos gouvernants ne pouvaient que renvoyer l’épidémie infectieuse et l’industrie manufacturière à un monde sous-développé et à des temps anciens que nous, Occidentaux, aurions dépassés. L’idée fut au fond qu’un tel virus était, comme les stocks de masques, trop archaïque pour concerner nos sociétés, trop performantes pour y être exposées.

    « L’idée de la médecine dite “proactive” est d’augmenter les performances des individus et leur capacité à s’adapter, y compris à un environnement dégradé »

    L’origine supposée de la pandémie a d’ailleurs pu contribuer à redoubler ce mécanisme de déni. Car quel rapport nos vies aseptisées et nos systèmes de santé ultramodernes pouvaient-ils bien avoir avec ce sombre mélange de saleté, d’élevage domestique confiné et de faune sauvage malade qu’évoquent les marchés d’animaux asiatiques ?

    Tournant le dos à ces images déplaisantes de chauve-souris et de volailles infectées, pourtant emblématiques de notre économie mondialisée qui entasse les vivants dans des environnements industriels de plus en plus dégradés, le néolibéralisme préfère tourner ses regards vers l’avenir radieux promis par l’innovation biomédicale et continuer d’occulter les facteurs sociaux et environnementaux de toutes les pathologies, tant infectieuses que chroniques.

    Quelle vision de la médecine porte l’idéologie néolibérale ? Et dans quelle mesure reprend-elle celle de Walter Lippmann [écrivain et polémiste américain (1889-1974)], qui, d’après vous, théorisait déjà, dans les années 1930, une conception néolibérale de la santé ?

    L’idée véhiculée depuis des années est au fond que notre système sanitaire doit en finir avec la vieille médecine clinique, fondée sur la souffrance et la plainte du patient, de même qu’il serait censé en avoir fini avec les grandes épidémies infectieuses, supposant l’assistance à des populations vulnérables. C’est le sens de la médecine dite « proactive », portée par les promesses du virage numérique et des données massives (big data) en santé.

    A notre vieille médecine jugée « réactive », la vision proactive oppose des processus d’optimisation continue, où ce sont les patients eux-mêmes qui sont censés gérer de manière optimale leurs propres comportements face aux risques.

    Comme chez Walter Lippmann, l’idée est d’augmenter les performances des individus et leur capacité à s’adapter, y compris à un environnement dégradé. Cette vision, que l’on retrouve dans le champ de la maladie chronique avec la « médecine des 4 P » (« personnalisée », « prédictive », « préventive », « participative »), sous-tend une nouvelle conception de la santé publique, qui passe exclusivement par la responsabilité individuelle et qui refuse d’assumer une vision collective des déterminants sociaux de santé, toujours soupçonnée de déboucher sur une action sociale trop collectiviste.

    « Les néolibéraux considèrent que ceux qu’ils appellent les “dirigeants” sont par principe en avance sur la population. Or, la situation actuelle tend à démontrer l’inverse »

    C’est l’accumulation de tous ces dualismes imaginaires qui a créé la cécité de nos gouvernants face à la crise et qui a produit la situation actuelle : un très long retard au démarrage pour prendre des mesures collectives de santé publique, doublé d’une spectaculaire pénurie organisée au nom de la santé elle-même, alors même que des alertes sur les maladies émergentes se multipliaient dans la littérature scientifique depuis des années et que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) lançait des recommandations très claires dès la fin du mois de janvier.

    Ce retard de compréhension, voire ce déni, d’une grande partie des élites politiques ne vient-il pas démentir les positions de Walter Lippmann, et ne donne-t-il pas raison à son contradicteur, John Dewey [philosophe pragmatiste américain 1859-1952], qui soutient que les publics sont par principe en avance sur leurs représentants ?

    Absolument. Comme la crise climatique et comme d’autres grandes crises sanitaires, ce virus révèle le retard des gouvernants et de leurs stéréotypes sur les citoyens, ou plus exactement sur ceux que John Dewey nomme les « publics », c’est-à-dire les groupes de citoyens qui sont en première ligne face à un problème.

    Avec Walter Lippmann, les néolibéraux considèrent que ceux qu’ils appellent les « dirigeants » (leaders) sont par principe en avance sur la population. Parce qu’ils sont beaucoup plus mobiles, ils auraient une vue plus adaptée à la mobilité du réel, tandis que les masses inertes seraient par nature enfermées dans ce qu’il appelle des « stéréotypes », c’est-à-dire des représentations figées du réel.
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    Or, la situation actuelle tend à démontrer l’inverse. Si les « élites » mondialisées sont aveugles et dans le déni, c’est du fait même de leur mobilité, car cette dernière les attache à des manières de vivre qui se révèlent de plus en plus archaïques et inadaptées à la crise écologique, tandis que les populations s’inquiètent de manière bien plus lucide et commencent à douter.

    Dans ce conflit des représentations, les stéréotypes des dirigeants ont un énorme pouvoir de contamination, tout aussi viral que les fameuses « fake news » des réseaux sociaux.

    Aviez-vous pris vous-même la mesure de l’ampleur de l’épidémie ? Etiez-vous plutôt du côté des stéréotypes des gouvernants ou de la lucidité de ces publics ?

    Je n’ai rien compris à ce qui se passait. Débordée par d’autres fronts ouverts par la mobilisation sociale, j’ai plus ou moins fait confiance au gouvernement dans sa gestion du virus et j’ai adhéré par inertie aux stéréotypes et aux « fake news » diffusés par le discours dominant : « C’est une petite grippe », « Il ne faut rien changer à nos habitudes de sortie » (le président Emmanuel Macron, le 6 mars), « La Chine et l’Italie surréagissent ».

    « “Restez chez vous, mais allez voter…” La multiplication de ces signaux contradictoires produit un effet permanent de “double contrainte” qui est intenable »

    C’est seulement le soir de la fermeture brutale de tous les cafés et tous les restaurants par le premier ministre, Edouard Philippe, que j’ai commencé à comprendre qu’on nous cachait quelque chose. Une injonction contradictoire apparaissait au grand jour, qui reprenait exactement la même structure que l’élément déclencheur de la crise des « gilets jaunes » avec la taxe carbone. « Soyez mobiles, mais ne prenez pas votre voiture » (novembre 2018) devenait « Restez chez vous, mais allez voter » (mars 2020), contradiction qui n’a pas cessé d’être relayée ensuite par des énoncés du type : « Restez chez vous, mais allez travailler ».

    Au lieu de passer leur temps à dénoncer les réseaux sociaux et accréditer l’idée que le pouvoir serait par principe du côté du savoir, les experts et les gouvernants seraient bien inspirés de reconnaître leur retard sur les événements.

    Quels sont les effets psychiques, sociaux et politiques de ces injonctions contradictoires ? Et quels effets produisent-ils sur notre démocratie ?

    La multiplication de ces signaux contradictoires autour du thème de l’ouverture et de la clôture, de la stase et du flux, produit un effet permanent de « double contrainte » (double bind), qui est intenable pour ceux auxquels elle s’adresse et qui sape complètement l’autorité des gouvernants. Son origine est toujours la même. Elle vient de la crise écologique et sanitaire qui fracasse le cap, et avec lui le discours de ses capitaines, de l’intérieur. Et elle est aussi ce qui produit leur retard et leur stérétotypie par rapport aux « publics » au sens de John Dewey.

    En Chine, en Italie et en France, ce furent en effet les publics concernés, ceux qui étaient réellement en lutte contre le virus, qui ont été à chaque fois en avance sur la situation et qui ont dû se révolter contre les pouvoirs en place. Or, ce retard a été sans cesse dénié et dissimulé par les dirigeants.

    « Il faut exiger, dès maintenant, que les choix de santé publique deviennent une affaire collective et non la chose réservée des experts et des dirigeants »

    Dans notre pays, ce fut et c’est encore la fonction du discours dominant sur l’indiscipline et l’irresponsabilité des Français. Ce discours a aussi pour fonction de nous culpabiliser. En surinvestissant le registre moral, il s’agit de produire une complète dépolitisation des questions, qui passe par l’héroïsation des soignants, l’activation de la fibre morale de tous les citoyens et la stigmatisation des mauvais Français.

    En mettant en scène notre ignorance, il permet enfin de donner les pleins pouvoirs aux dirigeants. Dans un monde complexe, mouvant et incertain, les masses doivent laisser la décision aux experts et dans une situation de crise, la démocratie doit faire place à l’union sacrée derrière son chef de guerre.
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    Sauf que derrière la mise en scène d’un pays en ordre de bataille, la défiance est toujours là et la colère grandit. Cette colère n’ira dans le bon sens qu’à condition de devenir politique. Pour cela, il faut exiger dès maintenant une véritable démocratie sanitaire. Que les choix de santé publique deviennent, comme les choix économiques et sociaux, une affaire collective et non la chose réservée des experts et des dirigeants.

    Puisque nous entrons dans un temps de crises majeures, le prétexte de la pandémie n’est pas audible, à moins qu’on choisisse clairement d’en finir avec la démocratie et de préférer un gouvernement autoritaire (la Chine) ou par le big data (la Corée du Sud). Cette tentation existe dans les discours dominants, mais je crois qu’il faut systématiquement la combattre.

    Le pouvoir dit « Restez chez vous », mais également que « tout continue ». En quoi s’agit-il d’une illusion ?

    Cette illusion est le moteur des « grands plans de continuité d’activité » (business continuity plan), qui fleurissent dans toutes nos organisations. Ces plans jouent évidemment sur le bon sens. Ne faut-il pas continuer à soutenir la vie, à s’occuper de nos élèves, de nos étudiants, de nos enfants, à assurer le maintien des fonctions vitales du pays ?

    Mais derrière ces assertions de bon sens, c’est tout autre chose qui se joue. En imposant à tous l’économie du numérique, qui livre toute une population, y compris les plus jeunes (une injonction contradictoire de plus !), au pouvoir des écrans, nos responsables ne font en réalité qu’une chose : poursuivre à toute force la pression du surmenage, de l’évaluation et de la compétition mondialisée qui minent nos sociétés.

    L’idée est de ne surtout pas affronter les discontinuités inouïes du réel et de les recouvrir par une continuité factice, en jouant sur des ressorts psychologiques bien connus : la peur du vide, l’évitement du deuil et la terreur devant l’inédit.

    Cette situation illustre parfaitement ce que j’étudie depuis plusieurs années. Le néolibéralisme n’est pas seulement dans les grandes entreprises, sur les places financières et sur les marchés. Il est d’abord en nous, et dans nos minuscules manières de vivre qu’il a progressivement transformées et dont il s’agit aujourd’hui que nous reprenions collectivement le contrôle.

    #pandemie #john_dewey #néolibéralisme #democratie_sanitaire

  • Le #néolibéralisme est-il mauvais pour la #santé ?
    https://theconversation.com/le-neoliberalisme-est-il-mauvais-pour-la-sante-153493

    Le néolibéralisme favorise et valorise l’individualisme et impacte donc la santé à travers deux mécanismes connexes, nous expliquent les auteurs. Le premier est le fait de considérer l’individu comme un entrepreneur en compétition avec les autres, qui doit assurer seul son développement personnel. La responsabilité du succès repose sur les seules épaules de l’individu isolé ; cela rompt les chaînes de solidarité, réduit le bien-être, accroît les sentiments d’insécurité, d’anxiété, de stress et de dépression.

    En outre, le néolibéralisme éloigne les individus de la vie du groupe et de ses effets curatifs potentiels. En effet, le fait d’appartenir à un ou plusieurs groupes, d’être soutenu par eux, et le fait de posséder un sens aigu de l’identité sociale sont la base de ressources sociales et psychologiques aidant à améliorer la santé.

  • (Devinette)

    Le néolibéralisme est-il mauvais pour la santé ?
    https://theconversation.com/le-neoliberalisme-est-il-mauvais-pour-la-sante-153493

    La nature des débats publics est parfois surprenante pour qui explore les sciences économiques ; s’il est bon de discuter des croyances et des dogmes, certaines idéologies semblent rarement faire l’objet de grands débats : c’est le cas du néolibéralisme.

    Alors que la mentalité dite « libérale », caractéristique de la tradition rationaliste des Lumières, place au cœur des textes de notre Constitution les principes de liberté, d’égalité, de solidarité ou encore de démocratie, une idéologie semble avoir « furtivement » (selon les termes de la politologue Wendy Brown) mené sa révolution. Cette idéologie néolibérale, reposant sur une forme de rationalité marchande généralisée, est bien connue des chercheur·e·s en gestion.

    #néolibéralisme #ultralibéralisme #idéologies #marchandisation

    • propre lien:

      https://taz.de/Neues-Buch-von-Sahra-Wagenknecht/!5764480

      Die US-Theoretikerin Nancy #Fraser hat in dem Bündnis von Neoliberalismus und Linksliberalen eine Voraussetzung für den Aufstieg des Rechtspopulismus identifiziert. Ein „dröhnender Dauerdiskurs über Vielfalt“, so Fraser, habe die Forderungen nach sozialer Gleichheit verdrängt. Die Linke müsse sich wieder sozialer Gerechtigkeit zuwenden, aber ohne Minderheitenrechte zu vergessen.

      Auch Sahra Wagenknecht treibt die Frage um, warum die gesellschaftliche Linke partout nicht mehrheitsfähig wird. Sie knüpft in ihrer Streitschrift „Die Selbstgerechten“ an Frasers Kritik an und radikalisiert sie bis zur Unkenntlichkeit. Denn bei ihr sind der giftige Neoliberalismus und der nur scheinbar menschenfreundliche Linksliberalismus fast das Gleiche.

      „Die linksliberale Erzählung ist nichts als eine aufgehübschte Neuverpackung der Botschaften des Neoliberalismus. So wurde aus Egoismus Selbstverwirklichung, aus Flexibilisierung Chancenvielfalt, aus Verantwortungslosigkeit gegenüber den Menschen im eigenen Land Weltbürgertum.“

      [...]

      –------------
      cf. aussi:

      Interview:
      Sahra Wagenknecht: «In einer Demokratie muss man zur Grundlage nehmen, was die Menschen wollen, und nicht, was einige hippe Weltbürger schön finden»

      https://www.nzz.ch/international/deutschland/sahra-wagenknecht-identitaetspolitik-will-ungleichheit-ld.1611631

      [...]

      Die linken Parteien verlieren mehr und mehr aus den Augen, für wen sie eigentlich da sein müssen. Wir sind keine Interessenvertretung gutsituierter Grossstadt-Akademiker, sondern müssen uns vor allem für die einsetzen, die sonst keine Stimme haben: die in schlecht bezahlten Service-Jobs arbeiten, oder auch für die klassische Mittelschicht, etwa Handwerker und Facharbeiter, die oft keinen akademischen Abschluss haben. Debatten über Denk- und Sprachverbote gehen an den Bedürfnissen der Menschen vorbei.

      [...]

      #Wagenknecht #Allemagne #dieLinke #gauche_modérée #centre-gauche #cancel_culture #néolibéralisme

    • Ein Gespräch mit Sahra Wagenknecht über Identitäten, Wir-Gefühle, soziale Benachteiligung, den Begriff „Heimat“ sowie Umweltpolitik und Fridays for Future (Teil 1)

      https://www.heise.de/tp/features/Sahra-Wagenknecht-Was-wir-einfordern-muessen-ist-echte-Gleichbehandlung-602819

      [...]

      Die Lifestyle-Linken par exellence sind natürlich die Grünen. Sie werden hauptsächlich von dem Milieu gewählt, in dem diese Botschaften ankommen: Eher gutsituierte, akademisch gebildete Großstädter, die in Vierteln wohnen, in denen schon die Mieten garantieren, dass man mit Ärmeren oder Zuwanderern, soweit es sich nicht um Hochqualifizierte handelt, persönlich kaum in Kontakt kommt - und also auch nicht mit den mit Armut und Zuwanderung verbundenen Problemen. Die Wähler der Grünen verdienen im Schnitt mittlerweile mehr als die der FDP. Das reale Leben bewegt sich für viele in einer Art Filterblase.

      Die Grünen sind erfolgreich, weil sie die Lebenswelt, die Interessen und die kosmopolitischen und individualistischen Werte dieses Milieus repräsentieren. Die Frage ist nur: Sollten Parteien, die sich als links verstehen, mit den Grünen vor allem um diese Wählerschaft konkurrieren? Oder sollten sie nicht eher versuchen, wieder die Stimme derjenigen zu sein, die es schwer haben, denen Bildungschancen vorenthalten werden, die um jedes bisschen Wohlstand kämpfen müssen und sich heute großenteils von niemandem mehr vertreten fühlen? Für diese Menschen da zu sein, war jedenfalls mal der Anspruch der Linken.

      [...]

      Identität ist eine wichtige Sache - jeder Mensch hat Identitäten; und zwar meistens nicht nur eine. Ich etwa verstehe mich als Saarländerin, weil ich hier lebe, aber natürlich auch als Bürgerin dieses Landes und als Europäerin. Die entscheidende Frage ist, ob man die gemeinsamen Identitäten in den Vordergrund stellt, oder die, die spalten und den Unterschied von der Mehrheitsgesellschaft betonen - ob man also die Abstammung und die sexuelle Orientierung hervorhebt oder das, was Belegschaften und auch die große Mehrheit der Bevölkerung eint: Die meisten Menschen müssen von ihrer Arbeit leben, profitieren von einem starken Sozialstaat, sind nicht reich. Aber sie haben deutsche oder nicht-deutsche Eltern, sind homo- oder heterosexuell.

      [...]

      #Verts #Gauche_du_lifestyle #identité

    • Stéfanie #Roza, https://seenthis.net/messages/912250 ,
      et Judith Basad font valoir des arguments très similaires:

      Identitätspolitik: „Schlechtes Gewissen einer Wohlstandselite“ 26. April 2021, Florian Rötzer

      Judith Basad über Ihr Buch „Schäm dich!“, die Kritik an der Identitäts-, Gender- und Antirassismus-Politik und die Weltsicht von Sprachaktivisten

      https://www.heise.de/tp/features/Identitaetspolitik-Schlechtes-Gewissen-einer-Wohlstandselite-6022674.html

      [...]

      Eine solche Form (....) hat mit Foucault oder Derrida nichts mehr zu tun, da diese Philosophen keine politischen Prämissen aus ihren Theorien abgeleitet haben. Auch die Poststrukturalisten, die die Grundlage für das Gendern und den ganzen Sprachaktivismus bilden, haben nie gefordert, dass die Sprache etwa in staatlichen Institutionen verändert werden muss, um eine gerechtere Gesellschaft zu erreichen. Letztendlich wird dieses postmoderne Cherry-Picking betrieben, um eine Ideologie durchzusetzen, die nur noch in Hautfarben, Binaritäten und Feindbildern denkt. Das ist meiner Meinung nach sehr gefährlich.

      Sie sagen auch, es seien Menschen aus einer bestimmten Schicht, die diese Theorien verfolgen und diese Ideologie durchsetzen wollen. Wie würden Sie diese Schicht beschreiben?

      Für die Rechten sind es vor allem die „linksversifften Grünen“, sie meinen damit relativ wohlhabende Menschen, die keine großen Probleme haben. Was treibt diese Menschen an?

      Judith Basad: Dahinter steckt ein religiöses Bedürfnis, das meiner Meinung nach mit einer Wohlstandsverwahrlosung einhergeht. Denn bei denjenigen, die in dieser Bewegung am lautesten sind – die etwa im Netz andere als Rassisten beschimpfen und Veranstaltungen sprengen – handelt es sich um eine Bildungselite, die gerne damit angibt, dass sie Foucault und Judith Butler verstanden haben.

      Diese Art von Aktivismus ist deswegen so erfolgreich, weil sich alles ums Weißsein dreht. Motto: Wie können „wir Weißen“ bessere Menschen werden? Für mich ist ziemlich offensichtlich, dass dahinter ein schlechtes Gewissen einer Wohlstandselite steckt, die behütet aufgewachsen ist und nun für diesen Wohlstand Reue empfindet.

      Wenn weiße Studenten sich demonstrativ im Fernsehen, in Artikeln oder auf Social Media für ihre Hautfarbe schämen, dann ist das nichts anderes als die Sehnsucht nach Unterwerfung, Buße und Läuterung – damit man der Welt zeigen kann, dass man jetzt zu den moralisch Guten gehört.

      [...]

    • Dialektik: Von Gleichheit, Perspektive und Aktion
      25. April 2021 Gerhard Mersmann

      https://neue-debatte.com/2021/04/25/dialektik-von-gleichheit-perspektive-und-aktion

      [...]

      Die Auswüchse, die das Treiben der Identitären, der Inquisitoren, der Sektierer zeitigen, sind grotesk und sie dokumentieren, in welcher Sackgasse sich Gemeinwesen wie Politik befinden. Gesellschaftlicher Fortschritt, wie er auch immer beschrieben werden mag, ist einer Paralyse gewichen, die an Selbstzerstörung nicht mehr zu überbieten ist.

      Es liegt auf der Hand, dass es einen Weg zurück nicht mehr geben kann, und es ist offensichtlich, dass es so nicht mehr weitergehen kann. Wer das vorschlägt und die inquisitorische Befindlichkeitsprogrammatik weiter vorantreiben will, bietet keine Option für alles, was ein Gemeinwesen ausmacht.

      Die Sprachvergewaltigung, die Verhunzung von Texten, die Kreation absurder Begriffe, alles wird weiter getrieben, ohne dass sich dadurch eine Perspektive erkennen ließe, die einen gesellschaftlichen Nutzen hätte.

      Gleichheit, Perspektive und Aktion

      Das Kernstück einer Gesellschaft, die in die Zukunft weist, muss das Prinzip der Gleichheit sein. Wird das aufgegeben, dann bleibt nach dem Aufräumen der umherliegenden Fleischfetzen der individuellen Befindlichkeit das Recht des Stärkeren, welches von der Spaltung begünstigt wird und Tür und Tor zur brutalen Herrschaft öffnet. Welches, bitte schön, von den vielen Opfern, wird sich dann noch dem widersetzen können?

      An ihren Taten sollt ihr sie messen, heißt es in einem der ältesten abendländischen Sätze. Doch welche Taten werden diejenigen vorweisen können, die ihre Identität als Anfang- und Endpunkt setzen?

      Die einzigen Taten, die in ihrem Journal stehen, weisen nicht in eine Richtung der Befreiung, sondern in die der Ranküne, der Vergeltung und der Zerstörung.

      Wer standhalten will, schrieb Theodor W. Adorno (1), einer der immer wieder Stigmatisierten, darf nicht verharren in leerem Entsetzen. Damit dokumentierte er sein Gespür für die Notwendigkeit der Gegenwehr, der aktiven Veränderung, der Gestaltung. Wer standhalten will, der muss sich seiner selbst bewusst sein, gewiss, der muss sich Verbündete suchen, und das geschieht auf dem Feld der Gemeinsamkeit.

      [...]

      #langue #égalité

  • La garantie d’emploi, un outil au potentiel révolutionnaire | Romaric Godin
    http://www.contretemps.eu/chomage-economie-garantie-emploi-depassement-capitalisme

    L’ouvrage de Pavlina Tcherneva qui inaugure la collection « Économie politique » avance une proposition qui peut paraître a priori insensée : fournir à tous les citoyens qui le souhaitent un travail rémunéré, permettant de vivre décemment. Tout l’intérêt de son propos est de montrer que, précisément, cette proposition n’a rien d’insensé, mais qu’elle est parfaitement réalisable pour peu que l’on se libère de certaines certitudes qui ne sont que des constructions politiques. L’idée que le chômage soit le mode d’ajustement « normal » de l’économie est déjà un choix politique remarquablement déconstruit par l’autrice. Source : (...)

  • Facteur de production, entreprise, portefeuille : les métamorphoses du capital humain, Michel Feher
    https://www.youtube.com/watch?v=Ki7D_5IZvNo

    Séance du 6 février 2020 : La « soumission » de projet. Bureaucratie, management et capital humain

    Interroger les fondements et l’efficace des dispositifs de financement et de recrutement qui affectent la manière de travailler des scientifiques, tel est le propos de la seconde séance de Politiques des Sciences, en partenariat avec RogueESR. Si les #managers de la #recherche, et avec eux certains scientifiques, ne semblent plus avoir pour horizon favorable de la recherche que d’augmenter le taux de sélection de l’Agence Nationale de la Recherche (l’#ANR), c’est le signe qu’il faut remettre sur le métier ce qui semble aller de soi dans cette manière de concevoir la dite excellence scientifique.

    A quel moment est-il devenu évident que le #projet devait être l’élément majeur de l’appréciation de la valeur des scientifiques, et la base légitime du financement de leurs recherches ? Comment peut-on accepter que notre métier soit le seul dans lequel, après de longue études et un processus de sélection étroit, on ne reçoive pas les moyens de l’exercer ?

    Pour démêler ce que ces processus doivent aussi bien aux schèmes du #New_Public_Management qu’à des théories qui se sont arrimées à autant de pratiques, on examinera à la fois une agence, l’ANR, des théories, celles du capital humain, des techniques de gestions et de contrôle, le #management, et un processus, celui de la bureaucratisation néolibérale, qui tend à coloniser les subjectivités, dans la recherche et en dehors, avec parfois l’enthousiasme gourmand de ceux qui « soumissionnent ».


    Michel Feher, Facteur de production, #entreprise, portefeuille : les métamorphoses du #capital_humain

    #évaluation #enseignement_supérieur #néolibéralisme #Foucault #Michel_Feher

    • Le temps des investis - Essai sur la nouvelle question sociale, Michel FEHER
      https://www.editionsladecouverte.fr/le_temps_des_investis-9782707197429

      L’emprise de la finance modifie aujourd’hui les attentes et les pratiques de l’ensemble des acteurs sociaux. C’est vrai des entreprises, qui veillent davantage au cours de leurs actions qu’à leur chiffre d’affaires, mais aussi des gouvernements, qui jugent plus urgent d’apaiser les inquiétudes de leurs créanciers que de répondre aux demandes de leurs électeurs. Même les particuliers gagent moins leur sécurité matérielle sur les revenus de leur travail que sur l’appréciation de toutes leurs ressources – leur patrimoine, mais aussi leurs compétences, relations, comportements.

      Selon Michel Feher, en déplaçant les enjeux de la question sociale, ces nouvelles priorités obligent la gauche à se réinventer. Car la « titrisation » des rapports humains sur les marchés financiers diffère de la marchandisation du travail sur le marché de l’emploi. Plus que sur l’extraction du profit, elle focalise les luttes sur les conditions d’allocation du crédit. L’exploitation que les employeurs continuent de faire subir à leurs employés renvoie désormais au pouvoir de sélection que les investisseurs exercent sur les « investis ».

      Les résistances à l’hégémonie des institutions financières devront trouver les moyens de peser sur les évaluations de la gouvernance entrepreneuriale et des politiques publiques en spéculant contre les critères qui président actuellement aux choix des financeurs. Si l’objectif poursuivi consiste à favoriser une autre circulation du capital, les militants qui les mettent en œuvre y puiseront également les éléments d’un imaginaire politique renouvelé.

  • « Guerres culturelles » : les #sciences_sociales sont prises pour cibles du #Brésil à la #Pologne

    En Amérique du Sud ou en Europe, les universitaires qui travaillent dans des champs attaqués par les conservateurs, comme les #études_de_genre, se retrouvent en première ligne. Parmi eux, la Brésilienne #Marcia_Tiburi, exilée en France, qui juge, malgré tout, nécessaire « de construire une #culture_du_dialogue avec les différences ».

    Comment parler à un fasciste ? C’est le titre, surprenant à première vue, qu’a donné l’universitaire brésilienne Marcia Tiburi à l’un de ses nombreux ouvrages. Un titre bien optimiste puisque de #dialogue, il n’en a pas été question : à partir de la publication de ce livre en 2015, elle a été la cible d’une campagne de #dénigrement et de #violences menée par l’#extrême_droite.

    Cette artiste, universitaire, féministe, engagée en politique avec le Parti des travailleurs (PT) – et qui avait dénoncé le coup d’État contre Dilma Roussef en 2016 – a même dû quitter son pays en 2018, juste avant l’arrivée au pouvoir du funeste Jair #Bolsonaro.

    C’est qu’elle s’était lancée, quelques semaines avant, dans la campagne pour le poste de gouverneure de Rio de Janeiro, « avec l’espoir que tout allait changer ». « J’ai conduit un véhicule blindé pendant la campagne, mais quand le PT a perdu, il n’y avait plus moyen de continuer dans le pays, car il n’y avait plus d’espoir. »

    Elle a été harcelée à l’université, a subi des #accusations calomnieuses. « En 2018, j’ai été victime d’une #embuscade_médiatique dans une station de radio où je donnais une interview. Un groupe fasciste appelé #MBL [#Mouvement_Brésil_libre], financé par des hommes d’affaires nationaux et internationaux, a envahi l’espace où je donnais une interview avec des téléphones connectés pour filmer ma réaction. Je suis partie, mais le lendemain, une campagne de #diffamation, avec de fausses nouvelles, des vidéos et affiches numériques a été lancée contre moi et se poursuit jusqu’à aujourd’hui », explique-t-elle.

    Elle vit désormais en France. Elle a été accueillie par l’université Paris VIII et a obtenu une bourse dans le cadre du programme #Pause (#Programme_national_d’accueil_en_urgence_des_scientifiques_en_exil), après un passage par les États-Unis dans une institution protégeant les écrivains persécutés.

    Le Brésil peut être vu comme un laboratoire de malheur, la vitrine des dégâts que la #politique_de_haine mise en œuvre aujourd’hui par l’extrême droite et relayée par la puissance des réseaux sociaux et des médias de masse peut causer à l’un des piliers de la démocratie, la #liberté_académique (lire ici son analyse publiée par l’Iris).

    De l’expérience de Marcia Tiburi, on retient aussi que dans ces « #guerres_culturelles », les universitaires se retrouvent en première ligne. En particulier ceux qui, comme elle, travaillent dans les sciences sociales et dans des champs pris pour cibles par les conservateurs, en particulier les études de genre.

    « Il s’agit d’une #offensive_néolibérale, juge-t-elle. Le cas du Brésil montre clairement que le #fascisme a été déployé comme une #technologie_politique au service du #néolibéralisme. Bolsonaro n’est qu’un épouvantail dans la #plantation_coloniale (malheureusement, mon pays a encore toutes les caractéristiques d’une #colonie), son but et son rôle sont de maintenir les gens hypnotisés et effrayés. »

    À des milliers de kilomètres du Brésil (où le gouvernement coupe dans les fonds destinés à la philosophie pour les réorienter vers les sciences dures jugées plus « utiles »), le continent européen n’est pas épargné. En #Pologne, en #Hongrie ou en #Italie, des chercheuses et des chercheurs sont victimes de cette offensive contre la liberté académique de la part de pouvoirs qui cherchent à imposer leur vision des sciences.

    À #Vérone, petite ville italienne célèbre pour la pièce de Shakespeare Roméo et Juliette, #Massimo_Prearo, qui travaille sur la #sociologie politique du genre et de la #sexualité, s’est retrouvé dans une tempête médiatique et politique pour avoir voulu organiser en 2018 une journée d’études intitulée « Demandeurs d’asile, orientation sexuelle et identité de genre ».

    La Ligue du Nord de Matteo Salvini venait d’accéder au pouvoir dans un gouvernement de coalition avec le Mouvement Cinq Étoiles. « Il y a eu une réaction très forte de la droite et de l’extrême droite qui s’opposaient à ce que ce sujet soit abordé à l’université, nous accusant d’utiliser des arguments idéologiques et non universitaires, et de vouloir imposer la dictature des études de genre et des questions #LGBT », explique Massimo Prearo.

    Plus inquiétant encore, à l’époque, le président de l’université avait cédé à cette pression en décidant de suspendre le colloque, au motif qu’il existait des risques pour les participants. Finalement, la mobilisation, qui s’est traduite par des manifestations et une pétition internationale, a payé : le président est revenu sur sa décision.

    Depuis 2013, les études de genre sont en Italie dans le viseur du camp conservateur. Si cette année-là est un tournant, c’est que trois projets de loi présentés par le gouvernement de centre-gauche sont alors débattus au Parlement : un légalisant le mariage entre personnes de même sexe, un contre l’homophobie et un dernier ouvrant la voie au financement des études de genre à l’école.

    Tous trois déclenchent d’intenses débats dans la société italienne, qui mettent au premier plan les chercheurs dont ces sujets sont la spécialité.

    « En raison de la traduction politique du travail que nous effectuions depuis des années, nous avons été accusés par ceux qui s’opposaient à ces projets de loi de les avoir promus. Nous avons également été accusés de profiter de l’argent public pour promouvoir des lois qui divisent la société », témoigne Massimo Prearo.

    Bref, les concepts circulent, mais lorsqu’ils quittent l’espace académique pour la sphère publique, les chercheurs sont pris à partie et finissent par trinquer. On leur reproche de manquer d’#objectivité ou de verser dans l’#idéologie – l’idéologie étant le discours de l’autre lorsqu’il s’agit de le disqualifier. Avant les études de genre, ce sont les #études_féministes qui avaient dû subir ce type d’attaques dans les années 1990, explique Massimo Prearo.

    « Pas d’autre moyen que de construire une culture du dialogue avec les différences »

    Plus au nord, en Pologne, les études de genre ou les droits des LGBT+ sont également ciblés par le gouvernement du parti Droit et justice (PiS), qui cherche non seulement à imposer sa vision de l’histoire mais aussi, plus largement, à dicter ses vues sur les sciences sociales, au nom d’un #intégrisme_catholique. Comme l’explique un universitaire polonais qui a requis l’anonymat de peur des représailles, la chose s’est faite en deux temps : le pouvoir polonais a commencé par fusionner le ministère de l’éducation et celui des sciences et de l’enseignement supérieur.

    Puis, sous l’égide de ce super-ministère, un nouveau système d’évaluation scientifique des universitaires a été mis en place, reposant sur un système à points. Dans la liste des publications auxquelles seraient attribués des points, ont subitement surgi « plus de 70 nouvelles revues catholiques qui ne répondent pas aux normes des #revues universitaires » et auxquelles sont accordés « plus de points que de nombreuses autres revues réellement universitaires ». « Puisque nous vivons et travaillons dans le système “publier ou périr”, et que nous sommes évalués sur la base des points obtenus par les publications, la conclusion est évidente. Sur la base de cette évaluation, nous pouvons/ne pouvons pas être licenciés ou nous pouvons/ne pouvons pas être promus au rang de docteur ou de professeur. »

    Un « #agenda_catholique_fondamentaliste » est donc à l’ordre du jour, sous la houlette du super-ministre Przemysław #Czarnek. « Il a initié les changements dans les programmes et les livres scolaires, en effaçant les figures et les événements historiques qui ne correspondent pas à la “politique historique” promue par le ministère de la justice (c’est-à-dire en effaçant ou en diminuant le rôle de #Lech_Walesa dans le processus de rupture du système communiste en Pologne) », explique ce chercheur.

    Par ailleurs, les « #créationnistes », qui croient que leur Dieu est à l’origine de l’univers, ont porte ouverte et l’#éducation_sexuelle est interdite dans les écoles. Pour couronner le tout, à l’université, une nouvelle discipline scientifique a été introduite : la #science_de_la_famille !

    Pour ce chercheur polonais, l’objectif est tout simplement de « détruire ou de discréditer l’#élite_universitaire, les #intellectuels, qui représentent le groupe d’opposition le plus dangereux ».

    Alors que faire ? Dans son ouvrage de 2015 (Comment parler avec un fasciste ?, paru aux éditions Record en portugais, trois ans plus tard, en espagnol chez Akal, et qui paraîtra en anglais cet été), extrêmement stimulant pour ceux qui tentent de se débarrasser du spleen qui nous assaille, Marcia Tiburi plaide pour une #politique_de_l’amour face aux campagnes de #haine, relayées par les #réseaux_sociaux.

    Prenant pour cible le fascisme qui revient, recyclé par un néolibéralisme aux abois, elle espère l’avènement d’un dialogue véritable, à l’opposé des débats de confrontation qui ont essaimé sur les écrans de médias hystérisés ; un dialogue véritable qui nous permette d’écouter l’autre, car, dit-elle, « le dialogue est une aventure dans l’inconnu ».

    « De la possibilité de perforer le blindage fasciste au moyen du dialogue dépend notre survie comme citoyen », explique-t-elle. Il est aussi beaucoup question, dans son ouvrage, des réseaux sociaux et des médias tels que Fox News qui se nourrissent du ressentiment et en ont fait un fonds de commerce.

    Alors, quelle n’a pas été sa stupeur lorsque Marcia Tiburi a vu dans son pays d’accueil les attaques menées contre l’université par des ministres français, celui de l’éducation nationale Jean-Michel #Blanquer et celle des universités Frédérique #Vidal. « J’ai vraiment #peur, dit-elle, parce que la France, où je suis accueillie et envers laquelle j’éprouve la plus profonde gratitude et le plus grand respect pour le monde universitaire, ne peut pas être victime de ce genre de #mystification et de #populisme. J’ai perçu [les attaques de Blanquer et Vidal] comme un manque total de #respect, une #violence_symbolique et un #abus_épistémologique contre les professeurs et toute la communauté académique. »

    Pour #Eric_Fassin, professeur à l’université Paris VIII au département de science politique et à celui des études de genre, même s’il faut se garder de généraliser en rapprochant des situations qui présentent des niveaux de gravité différents, « il n’y a plus d’un coté les pays où l’on est protégé et d’un autre côté ceux où l’on serait exposé ». Pointant « l’#anti-intellectualisme des régimes néolibéraux », il estime qu’« on n’est plus sûr de qui est à l’abri et pour combien de temps ». « C’est relativement nouveau », souligne-t-il, en jugeant indispensable « une #internationalisation_de_la_solidarité ».

    Depuis 2015, Marcia Tiburi a écrit trois autres essais sur le Brésil, dont Ridicule politique (2017) et Le Délire du pouvoir (2019). On l’interroge sur l’ironie de son titre Comment parler avec un fasciste ?, au vu de sa situation actuelle. « L’échec nous appartient à tous, répond-elle. Mais je ne vois pas d’autre moyen que de construire une culture du dialogue avec les différences. C’est la façon de soutenir les droits fondamentaux. »

    Dans un laboratoire, on mène toutes sortes d’expériences. Certaines réussissent, d’autres non. Dans celui du Brésil, il faut espérer que Jair Bolsonaro échoue. Et que Marcia Tiburi réussisse.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/130321/guerres-culturelles-les-sciences-sociales-sont-prises-pour-cibles-du-bresi
    #université #solidarité

    ping @isskein @karine4

  • « Le choix de la guerre civile » Une autre histoire du néolibéralisme
    https://luxediteur.com/catalogue/le-choix-de-la-guerre-civile

    Cet ouvrage aborde le #néolibéralisme sur le terrain qui, dès ses origines, fut le sien : le choix de la #guerre_civile en vue de réaliser le projet d’une pure société de marché. Une #guerre_de_domination polymorphe qui sait parfois se doter des moyens de la coercition militaire et policière, mais qui se confond souvent avec l’exercice du pouvoir gouvernemental et qui se mène dans et par les institutions de l’État.

    De Hayek à Thatcher et Pinochet, de Mises à Trump et Bolsonaro et de Lippmann à Biden et Macron, le néolibéralisme a pris et prend des formes diverses selon ce que commandent les circonstances. Et ce qui apparaît, dans cette perspective stratégique, c’est l’histoire d’une logique dogmatique implacable qui ne regarde pas aux moyens employés pour affaiblir et, si possible, écraser ses ennemis.

    Parution en Europe : 8 avril 2021

    « Chili, BLM, Gilets jaunes, HK : comment le néolibéralisme a fait le choix de la guerre civile.

    L’archipelisation des luttes et le divertissement comme horizon pour éviter la formation d’un peuple politique et une démocratie égalitaire. @lux_editeur »

  • Deported: «Immigrant Policing, Disposable Labor and Global Capitalism»

    The United States currently is deporting more people than ever before: 4 million people have been deported since 1997—twice as many as all people deported prior to 1996. There is a disturbing pattern in the population deported: 97% of deportees are sent to Latin America or the Caribbean, and 88% are men, many of whom were originally detained through the U.S. criminal justice system. Weaving together hard-hitting critique and moving first-person testimonials, Deported tells the intimate stories of people caught in an immigration law enforcement dragnet that serves the aims of global capitalism. Tanya Golash-Boza uses the stories of 147 of these deportees to explore the racialized and gendered dimensions of mass deportation in the United States, showing how this crisis is embedded in economic restructuring, neoliberal reforms, and the disproportionate criminalization of black and Latino men. In the United States, outsourcing creates service sector jobs and more of a need for the unskilled jobs that attract immigrants looking for new opportunities, but it also leads to deindustrialization, decline in urban communities, and, consequently, heavy policing. Many immigrants are exposed to the same racial profiling and policing as native-born blacks and Latinos. Unlike the native born, though, when immigrants enter the criminal justice system, deportation is often their only way out. Ultimately, Golash-Boza argues that deportation has become a state strategy of social control, both in the United States and in the many countries that receive deportees.

    https://nyu.universitypressscholarship.com/view/10.18574/nyu/9781479894666.001.0001/upso-9781479894666-chapter-001

    #capitalisme #néolibéralisme #migrations #travail #exploitation #capitalisme_global #économie #livre #USA #renvois #expulsions

    Possible de lire l’introduction en ligne:
    https://nyu.universitypressscholarship.com/view/10.18574/nyu/9781479894666.001.0001/upso-9781479894666-chapter-001

  • How Law Made Neoliberalism | Boston Review
    http://bostonreview.net/law-justice/jedediah-britton-purdy-amy-kapczynski-david-singh-grewal-how-law-made-

    Many people recognize that the law has changed in anti-egalitarian and anti-democratic ways in recent decades—for example, that Citizens United amplified the role of money in politics, or that the construct of “colorblindness” has become entrenched in constitutional doctrine and helps sustain structural racism. In our view these are not isolated changes, but part of an orientation—an ideology about markets, governments, and law that has become foundational to our legal infrastructure. We call this orientation the “Twentieth-Century Synthesis” in legal thought.

    #corruption_légale #états-unis #néolibéralisme #droit

  • Pour le contre-populisme - Édouard Delruelle (UCL)

    Ces deux thèses dessinent en creux les tâches que devrait se donner selon moi, un « contre-populisme » : (1) non pas « construire un peuple » mais plutôt le déconstruire, le diviser d’avec lui-même ; (2) défendre et refonder une citoyenneté sociale devenue désormais la cible prioritaire du néolibéralisme – après avoir été affaiblie depuis plus de 25 ans par les partis « socialistes » eux-mêmes

    #balibar vs #mouffe
    #spinoza vs #freud
    #populisme #néolibéralisme

    http://blogs.ulg.ac.be/edouard-delruelle/populisme-de-gauche-contre-populisme

  • Basculements
    Mondes émergents, possibles désirables

    Ernest London

    https://lavoiedujaguar.net/Basculements-Mondes-emergents-possibles-desirables

    Dénonçant la notion d’effondrement, qui dépolitise les enjeux en postulant une trajectoire unique et comme jouée d’avance, Jérôme Baschet, qui a enseigné à l’Universidad Autonoma de Chiapas, à San Cristóbal de Las Casas, propose celle de « basculements » qui fait place, au contraire, à l’imprévisibilité croissante de notre temps et au rôle central de la mobilisation politique. Alors qu’« un microscopique fragment de l’à peine-vivant » a provoqué « la paralysie d’une machinerie aussi ample et ramifiée que l’économie mondiale », supposant la reproduction d’autres crises systémiques du capitalisme, il esquisse plusieurs scénarios, dont celui d’une ouverture des possibles qui nous engagerait vers des manières de vivre échappant aux logiques du système-monde capitaliste.

    Il tente, tout d’abord, de cerner les tendances principales que la crise du coronavirus a pu induire, amplifier ou affecter significativement : accélération de la numérisation généralisée ; modification des équilibres géostratégiques, confirmant l’effritement de l’hégémonie états-unienne et la montée en puissance de la Chine ; reconfiguration des circuits de la globalisation, notamment avec un mouvement de relocalisations productives dans un souci de souveraineté plutôt que dans une perspective écologique ; interventionnisme accru de l’État dont on attend une réponse face à la pandémie, que l’on critique ses manquements ou l’excès des mesures d’exception. Toutefois, ce serait une erreur de postuler une « opposition diamétrale » entre néolibéralisme et État, puisque le premier a toujours eu besoin du second pour assurer sa bonne régulation, l’État étant appelé à la rescousse pour socialiser les pertes et se désengageant à nouveau pour permettre la privatisation des bénéfices. (...)

    #Jérôme_Baschet #capitalisme #économie #globalisation #néolibéralisme #État #pandémie #crise #effondrement #modèle_chinois #Frédéric_Lordon #Murray_Bookchin #Erik_Olin_Wright #expérience_zapatiste #Gilets_jaunes #stratégies #rupture

  • La valeur d’une vie

    Bientôt les pauvres n’auront plus le droit de parler, les vieux de vivre et les jeunes de chanter. Une alliance inédite entre la science, la rationalité économique et le néolibéralisme autoritaire prépare des monstres que nous ne soupçonnons pas. Cette alliance nous accommode au pire, dont le renoncement aux valeurs et principes qui fondent le vivre ensemble et notre humanité.

    La gestion politique de la #crise_sanitaire est une machine à discriminer. Elle élève au carré les #inégalités sociales et économiques, de classe et de genre, et aujourd’hui les inégalités devant le #droit_à_la_santé et à la vie. Ces inégalités étaient insupportables avant la pandémie. Elles sont aujourd’hui la cause d’un effondrement social, économique et tout simplement moral. Si des études sérieuses (voir celle de l’INSEE ici) montrent que le virus « creuse les inégalités », ce sont avant tout les politiques néolibérales qui causent en priorité la mort des personnes âgées et des plus pauvres, l’exposition et la fragilisation des ouvriers, quand les classes sociales les plus favorisées traversent la pandémie avec infiniment moins de risque.

    Les choix politiques du gouvernement en matière de gestion de la crise sont passés successivement du mensonge d’Etat aux errements criminels, des errements à la bureaucratisation inefficace, de la bureaucratisation à la rationalisation impuissante, et désormais de la rationalisation au contrôle des corps. Cette dernière étape nous fait entrer dans la plus vertigineuse des dystopies. Des hommes politiques et des médecins ont pu concevoir d’interdire la parole dans les transports en commun. Alors que l’impératif sanitaire de la distance (physique et sociale) crée des pathologies de masse, il faudrait encore que les pauvres et le jeunes s’imposent le silence dans les transports en commun. Pourquoi donc l’Etat n’a-t-il pas pris depuis mars 2020 les dispositions qui auraient permis à chaque personne qui prend un bus, un tram ou un métro de bénéficier gratuitement d’un masque FFP2 ? Au lieu de cela on interdit aux plus défavorisés et aux jeunes de porter leur masque artisanal, sans prévoir une campagne et des moyens de protection pour quelques millions de personnes. Le problème n’est pas que l’Etat néolibéral de Macron et Castex serait maladroit, commettrait des erreurs à répétition, improviserait et jonglerait dans les difficultés de gestion d’une crise effroyable – même si ce peut être le cas -, le problème est qu’ils assomment systématiquement les pauvres, les jeunes et les vieux. Ce qui est effroyable, ce n’est pas le virus en lui-même, c’est le capitalisme qui le gère et en développe les conséquences. Parmi celles-ci, il en est une qui doit nous alarmer. La remise en cause du droit à la vie.

    Depuis le début de cette pandémie chaque jour qui passe accroît notre tolérance à l’insupportable. L’insupportable m’a été donné à entendre dans la bouche d’un Chef de service de l’Hôpital Bichat qui s’exprimait au journal de 13h de France-Inter ce dimanche 24 janvier 2021. On peut l’entendre ici, à 12mn et 40 secondes. Les propos de ce médecin ont créé en moi un choc. Un choc d’une grande violence. Ce choc a été provoqué par la rencontre entre la mémoire, l’historicité et la culture d’un côté, et de l’autre une parole médicale, autorisée et publique appelant à choisir la mort de nos aîné.es - et associant ce choix à un « courage » politique. Voici la transcription exacte des propos tenus par ce médecin, qui évoque des alternatives à un reconfinement général :

    « Soit faire des confinements sur des populations extrêmement à risque, soit admettre que ce qu’on vit après 80 ans c’est du bonus.

    Est-ce qu’aujourd’hui est-ce qu’on peut encore s’autoriser ces bonus ?

    Je pense qu’il faut prioriser les jeunes générations, les forces actives de la société, les PME.
    Je pense qu’il faut qu’on fasse des choix qui sont difficiles. » Il parle d’une « vision globale du courage. »

    Il convient de bien comprendre la portée de ces propos. Une portée incalculable et qui échappe certainement, du moins en partie, à celui qui les tient.

    Tout d’abord le médecin use d’un lexique de gestionnaire et fait entrer la question de la valeur d’une vie dans une rationalité comptable : le « bonus », les « forces actives », « s’autoriser » et « les PME ». C’est ici le point de vue d’un gestionnaire du vivant, à savoir très exactement ce qu’ont produit vingt années de massacre managérial et de rationalisation comptable dans les hôpitaux publics.

    Ensuite le médecin, qui est un très bon communiquant – comme tout excellent gestionnaire –, prend soin de surfer sur l’opposition au confinement, le soutien à la jeunesse et à l’économie pour nous arracher un consentement (« admettre ») au moyen d’une question rhétorique (« est-ce qu’on peut encore s’autoriser »), mais jamais au moyen d’un raisonnement ou une démonstration. Car il faudrait demander à ce Chef de service comment il explique que la fin du bonus des plus de 80 ans aiderait en quoi que ce soit à sauver la jeunesse. Quel est son raisonnement ? Pourquoi prioriser les jeunes générations devrait-il conduire à sacrifier nos aîné.es ? Le souci de tous n’exige-t-il pas de travailler au bien de la jeunesse comme à celui des aîné.es ? L’imposition d’un choix, soumis à un impératif totalement subjectif et irrationnel (« il faut », « il faut ») ne serait-il pas ici un moyen de résoudre la situation proprement tragique des personnels hospitaliers et des médecins en première ligne : diminuer la charge sur les hôpitaux par un consentement à laisser mourir les aîné.es dans les Ehpad ou à leur domicile, ce qui s’est produit massivement lors deux premiers confinements ? Le discours est ici celui d’un accommodement avec le pire. La banalisation de la transgression de tous les codes de déontologie et des éthiques médicales est en route. J’invite qui n’aurait pas en mémoire le Serment d’Hippocrate à le relire où à en prendre connaissance : https://www.conseil-national.medecin.fr/medecin/devoirs-droits/serment-dhippocrate . Vous pourrez aisément lister les principes sur lesquels le médecins’assoit. Et les articles du Code de déontologiequ’il appelle à transgresser.

    Enfin il faut vraiment être attentif à ceci que le médecin ne parle pas ici de la question très sensible du choix que font collectivement des équipes médicales confrontées à l’impossibilité de prendre en charge tous les patients. Choix codifié par des règles précises. Il nous parle de tout autre chose : d’un choix à faire pour la société, un choix politique et social, « difficile » et « courageux », une « vision globale ». On se dit alors que cet homme est prêt à entrer en politique ou bien au CA de SANOFI. Car, le médecin, comme bien de ses collègues arpentant les radios et les plateaux de télévision, sort non seulement de la morale, de l’éthique médicale, de la déontologie, mais il sort aussi tout simplement de sa profession (ce qui est une faute), pour s’instituer en manager du politique. C’est ce à quoi on assiste massivement depuis bientôt un an : la fabrique de l’opinion et l’administration politique de la crise sanitaire par les nouveaux managers de la science et une classe très particulière de médecins-experts qui ne font pas honneur à une profession, laquelle est, avec tous les soignants, dans les plus grandes difficultés et qui paye un tribut considérable à cette pandémie.

    Ce déportement de la parole médicale vers le politique, au nom d’une expertise et de l’autorité scientifique, concerne directement la communauté de recherche et d’enseignement.. Allons-nous laisser les nouveaux managers de la science, au demeurant rigoureusement incultes, avilir toutes les règles de l’éthique médicale et de l’intégrité scientifique en les laissant proférer à longueur de journée, énormités, mensonges, contre-vérités, sophismes, paradoxes et dans le cas qui nous occupe une monstruosité absolue, laquelle parvient à rencontrer du crédit chez un nombre significatif de collègues et de citoyens, dont la raison aura certainement été mise à mal par les temps très durs que nous traversons ?

    Bien sûr ce médecin n’est pas le tout de l’Hôpital. Il ne le représente pas. Il n’est pas la vie vivante des soignants qui se battent pour sauver autrui, quel qu’il soit, sans aucune discrimination. Il n’est pas l’infirmière qui se prend le Covid parce qu’elle n’a pas de FFP2. Qui est donc ce médecin, qui est cet homme pour appeler à supprimer les « Èves octogénaires » de Baudelaire ? À en finir avec le bonus, la chance et le bonheur d’être vivant à 80 ans ? Et pourquoi pas 75 ? ou 85 ? ou 90 ? J’aimerais inviter ce médecin, non pas à lire « Les petites vieilles » de Baudelaire, mais simplement à ouvrir une histoire de l’art ou de la littérature (ou même de la science), et à rechercher les œuvres qui ont été créées par des artistes qui avaient plus de 80 ans. Je pourrais l’inviter à considérer les « bonus » de Pierre Soulages ou Bernard Noël. Et ce « bonus » incroyable du sourire de sa propre grand-mère.

    La question qu’il nous revient de nous poser aujourd’hui est double : accepte-t-on de laisser passer, une fois, deux fois, trois fois, le discours de ce médecin jusqu’à la banalisation du Mal, jusqu’à se complaire dans le plus abject des cynismes, au risque de sortir de l’humanité ? Et plus fondamentalement : quelle est la valeur d’une vie ? Quelle valeur accordons-nous à une vie humaine ? Spinoza exposait cette conception de la vie humaine dans son Traité politique : « … une vie humaine, qui n’est pas définie par la seule circulation du sang, et d’autres choses qui sont communes à tous les animaux, mais surtout par la raison, la vraie vertu et la vie de l’Esprit »*.

    Pascal Maillard

    *La traduction est de Henri Meschonnic dans Langage, histoire une même théorie, Verdier, 2012, p.78, chapitre 5. "L’humanité, c’est de penser libre". Ce chapitre est la reprise d’une communication faite au colloque Qu’est-ce que l’humanité organisé à Toulouse les 8-17 mars 2004.

    https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/260121/la-valeur-d-une-vie
    #droit_à_la_vie #coronavirus #covid-19 #pandémie #néolibéralisme #néo-libéralisme #contrôle_des_corps #discriminations #capitalisme #vieux #jeunes #choix #médecine #politique #éthique

  • En Europe, la convergence des néolibéraux et des #identitaires

    Entretien croisé avec #Michel_Feher, philosophe, et #Chloé_Ridel, du Groupe d’études géopolitiques de l’ENS. Le premier revient sur son analyse de l’Europe « bleue-brune » qui se dessine, et la seconde sur l’idée d’« #Europe-civilisation » qui se substitue au « #nationalisme_à_la_papa ».

    https://www.youtube.com/watch?v=-vAMFAcgHqg&feature=emb_logo


    https://www.mediapart.fr/journal/international/251118/en-europe-la-convergence-des-neoliberaux-et-des-identitaires

    #néolibéralisme #extrême_droite #entretien

    • « Faire de l’Europe une maison de retraite fortifiée pour des épargnants de souche. »

      (Macron) « Quand on se met à virer à droite, demandez au PS, c’est jamais suffisant, et c’est toujours l’extrême droite qui emporte le morceau. »

      « Je ne pense pas que le populisme xénophobe est une réaction aux politiques néolibérales et à la financiarisation, je pense au contraire qu’il en est une extension. Il ya une grave erreur à gauche en particulier à penser que cette montée de l’extrême droite, c’est une réaction, que ce serait une révolte (...) quand on voit les programmes, ces gens là ne sont pas du tout des antilibéraux (...) les gens qui dirigent l’AFD en Allemagne sont des membres de la Société du Mont Pellerin, c’est-à-dire le cénacle même des économistes néolibéraux. »

      Michel Feher (actionnaire) reste stimulant.

      #phobie_migratoire #capital_humain #capital_d'autochtonie #identitaires

  • Les origines néolibérales de l’antiglobalisme

    « Globalistes » contre « Nationalistes », cette nouvelle ligne de fracture politique masque la vérité : les nationalistes populistes cherchent moins à défendre un modèle social qu’à s’affranchir des contraintes internationales imposés par les règles du #libre-échange. Leur but est en réalité d’aller vers plus de #capitalisme, et de contester le droit des nations non-blanches à intégrer équitablement le jeu du libre-échange mondial.

    Depuis que Trump a installé le conflit entre les « nationalistes » et les « globalistes » comme l’antagonisme politique central, il a été repris en chœur par tous les « populistes » sans exception, de Farage à Orban en passant par Salvini et Bolsonaro. Marine Le Pen a ainsi déclaré dans un récent entretien accordé à Breitbart (le média auparavant dirigé par Bannon) : « Le globalisme est un esprit post-national […] Il porte en lui l’idée que les #frontières doivent disparaître, y compris les protections que ces frontières apportent habituellement à une #nation. Elle repose sur l’idée que ce sont les #marchés tout puissants qui décident de tout. Ce concept de globalisme est poussé par des technocrates qui ne sont jamais élus et qui sont les personnes typiques qui dirigent les choses à Bruxelles dans l’Union européenne. Les gens qui croient aux nations – les nationalistes – c’est exactement le contraire. Ils croient que les nations sont le moyen le plus efficace de protéger la #sécurité, la #prospérité et l’#identité nationales pour s’assurer que les gens prospéreront dans ces nations. »

    À l’intérieur de cette opposition, le « nationalisme » est implicitement compris comme la défense des populations attaquées par la #globalisation_économique, le retour de la #souveraineté de l’#Etat-nation et le « #protectionnisme ». Dans un entretien accordé l’an passé au Figaro, #Emmanuel_Todd estimait qu’un renversement était en train de se produire, aux États-Unis avec le protectionnisme de #Trump : « Une génération avait mis à bas, avec le néolibéralisme de Reagan, la société qu’avait instaurée l’#Etat-providence rooseveltien ; une nouvelle génération d’Américains est en train de balayer aujourd’hui le modèle des années 1980 » ; et au #Royaume-Uni, avec le #Brexit où, alors que « Thatcher était une figure du néolibéralisme aussi importante que Reagan, […] notre plus grande surprise a été de voir la #droite conservatrice assumer le Brexit et discuter à présent ses modalités, et même s’engager à tâtons dans un #conservatisme de “gauche” ».

    Mais la rupture produite par les populistes va-t-elle effectivement dans le sens annoncé par Todd, d’une limitation du #libre-échange, d’un recul du néolibéralisme et d’un #conservatisme_social ? Rien n’est moins sûr dès que l’on s’intéresse à la provenance de ce #nationalisme_anti-globaliste.

    De Thatcher au Brexit : nations souveraines et #libre_entreprise

    Avant d’être soutenu par une partie des ouvriers britanniques déclassés, le Brexit trouve ses origines dans l’#euroscepticisme du Parti conservateur britannique dont la figure de proue a été… #Thatcher. C’est son célèbre discours devant le Collège de l’Europe à Bruges en septembre 1988 qui a fait émerger le think-tank du « Groupes de Bruges » réunissant des Tories eurosceptiques dont #Alan_Sked et #Nigel_Farage, et dont bientôt sortirait le #UKIP conduisant le Royaume-Uni au Brexit. Thatcher tançait dans son discours le « super-État européen exerçant une nouvelle domination depuis Bruxelles », elle opposait l’Europe existante de la #communauté_économique_européenne, celle de la #bureaucratie, du #centralisme et du #protectionnisme à l’#Europe de la #libre-entreprise, du #libre-échange et de la #déréglementation qu’elle appelait de ses vœux.

    Il fallait surtout en finir avec le protectionnisme à l’égard du monde extra-européen de façon à réconcilier les nations européennes avec les « marchés réellement globaux ». La critique de l’Europe ne portait cependant pas seulement sur les contraintes pesant sur la #libre_entreprise, la recherche d’une identité européenne transcendante faisait aussi courir le risque d’une disparition des #identités_nationales avec leurs coutumes et leurs traditions. Contre ce « méga-État artificiel », il fallait concevoir l’Europe comme une « famille de nations ».

    Le libre-échange d’une part et le nationalisme d’autre part que Thatcher opposait à la bureaucratie régulatrice de Bruxelles, n’étaient du reste pas séparés, mais bien d’un seul tenant : « Je n’eus d’autre choix, affirme-t-elle dans ses mémoires, que de brandir le drapeau de la #souveraineté_nationale, de la #liberté_du_commerce et de la #liberté_d’entreprise – et de combattre ». On se situe donc à mille lieux d’un nationalisme qui chercherait à s’établir en rempart contre la #mondialisation économique et le libre-échange : c’est au contraire la récupération de la #souveraineté_nationale qui, en s’affranchissant des contraintes supranationales européennes, doit permettre aux peuples de se réconcilier avec le libre-échange mondialisé.

    Or cette position nationale-néolibérale, qui veut faire de la nation britannique l’actrice directe de son inscription dans la #mondialisation_économique, est celle de tous les principaux brexiters, Farage en tête, mais aussi de tous les défenseurs d’un « hard brexit » parmi l’establishment Tory, de #Boris_Johnson à #Jacob_Ress-Mogg en passant par #Steven_Baker et #Dominic_Rabb. Au deuxième semestre 2018, une enquête de Greenpeace a révélé que #David_Davis, l’ancien secrétaire au Brexit de #Theresa_May, #Owen_Paterson, l’ancien secrétaire à l’agriculture et à l’environnement de David Cameron, et #Shanker_Singham, un expert commercial de l’Institute of Economic Affairs, s’étaient rendus en Oklahoma au cours d’un voyage financé par le lobby agro-industriel américain pour préparer avec des membres de l’administration Trump un accord commercial bilatéral post-Brexit, prévoyant notamment l’importation en Angleterre de #poulet lavé au chlore et de #bœuf aux hormones.

    Paterson, en déplorant qu’un tel accord soit impossible dans le cadre actuel des réglementations de l’Union européenne, a tweeté qu’il était essentiel que « le Royaume-Uni ait le contrôle de ses tarifs et de son cadre réglementaire ». C’est peu de dire qu’on est loin du « #conservatisme_de_gauche » … Au contraire, comme l’avait anticipé Thatcher, la récupération de la souveraineté nationale face à l’#Union_européenne est le moyen de plus de #déréglementation et de libre-échange.

    Anti-globalisme et libre-échangisme mondialisé chez #Rothbard

    Qu’en est-il aux États-Unis ? « La génération qui est en train de balayer le modèle des années 1980 » est-elle, à la différence du Royaume-Uni, en rupture avec le néolibéralisme de Reagan ? La droite radicale qui a contesté l’héritage de Reagan pour finalement aboutir à l’élection de Donald Trump s’est construite au tournant des années 1990 dans les marges du Parti républicain. Réunissant des « paléo-libertariens » autour de #Murray_Rothbard et #Lew_Rockwell et des « paléo-conservateurs » autour de Patrick Buchanan, ce mouvement s’appelait « paléo » parce qu’il revendiquait un retour à la #Droite_originaire (#Old_Right) du Parti républicain entre les années 1930 et 1950 qui défendait l’#isolationnisme et les intérêts de la nation américaine (#America_First) contre l’#interventionnisme_militaire, mais aussi la #liberté_individuelle, le gouvernement minimal et la propriété privée contre le #New_Deal et le #Welfare_state. Il s’était formé pour contester la prise du pouvoir sous #Reagan puis l’hégémonie sous Bush des néoconservateurs et leur imposition du #Nouvel_ordre_mondial. Leur critique s’est incarnée dans les campagnes des primaires républicaines de #Buchanan en 1992 et 1996.

    Ce que ciblaient les paléo dans le Nouvel ordre mondial, c’était un super-étatisme internationaliste, un système mondial de Welfare-warfare state, où l’importation de la « démocratie globale » partout dans le monde par l’interventionnisme américain sous l’égide de l’ONU se conjuguait à un gouvernement économique mondial de type keynésien. Les termes de « globalisme » et de globaloney étaient utilisés notamment par Rothbard au début des années 1990 pour décrier ce système et ils étaient empruntés au vocabulaire de la Old Right pour qui ils désignaient déjà ce complexe internationaliste de l’interventionnisme extérieur onusien et de la perspective d’un New Deal global que ses membres critiquaient dans les politiques de Franklin Roosevelt et Harry Truman.

    Rothbard puisait notamment son inspiration chez un historien révisionniste de la Seconde Guerre mondiale dont il avait été proche, Harry Elmer Barnes. De plus, dans les années 1970, alors que la Guerre du Vietnam était encore en cours, des anti-impérialistes avec qui il collaborait avaient déjà remis au goût du jour la critique du globalisme. Lorsque la globalisation économique se concrétisa dans la première moitié des années 1990 avec l’Alena puis la création de l’OMC, ces nouveaux éléments devinrent partie intégrante de sa critique et les nouvelles cibles de l’attaque contre le « globalisme ». Rothbard dénonçait l’Alena comme du « commerce bureaucratique réglementé » conçu par « un sinistre Establishment centriste dont le dévouement à la liberté et au libre-échange s’apparente à celui de Leonid Brejnev ». L’Alena entraînait en particulier une harmonisation des législations vers le haut qui allait contraindre les entreprises américaines à se soumettre aux normes environnementales et au droit du travail contraignants des législations canadiennes et mexicaines contrôlées par des syndicalistes et des socialistes.

    Tout ce « mercantilisme » ne signifiait rien d’autre selon lui que la spoliation que les élites politiques mondiales opéraient sur le libre-échange véritable au détriment de la masse des gens qui ne pouvaient en jouir directement. Il alertait sur la perte de souveraineté que représentait l’Alena qu’il comparait au « super-étatisme de la Communauté européenne » car cet accord imposait la mise sur pied d’« institutions d’un super-gouvernement internationaliste arrachant la prise de décision des mains des Américains ». Face à cette « politique globaliste » (globalist policy), une « nouvelle coalition populiste » et « un nouveau nationalisme américain » devaient être définis : il fallait abroger l’Alena, se retirer de toutes les agences gouvernementales supranationales (ONU, OIT, UNESCO, etc.), stopper l’aide au développement et durcir les conditions d’immigration qui provoquaient l’élargissement de l’État social, au nom d’authentiques marchés libres.

    Comme chez Thatcher, on est à l’opposé d’une critique du libre-échange ; le nationalisme est au contraire là aussi un moyen de sauver le libre-échange mondialisé qui est confisqué par les institutions supranationales bureaucratiques et socialisantes – en un mot « globalistes ».

    Lorsque les populistes s’attaquent au « globalisme », ils emboîtent le pas d’une critique qui ne visait pas à l’origine la mondialisation des échanges de biens et de services, mais au contraire le super-étatisme des élites politiques mondiales qui parasitent le fonctionnement du libre-échange mondialisé. Une distinction conceptuelle s’impose donc entre le « globalisme » et le « mondialisme », puisque dans les cas des héritages de Thatcher ou de Rothbard, l’anti-globalisme va de pair avec un mondialisme libre-échangiste absolument revendiqué.
    Anti-globalisme et hiérarchie des nations de Buchanan à Trump

    Aux États-Unis, après la seconde campagne de Buchanan pour les primaires républicaines de 1996, les premiers doutes des libertariens ont cependant laissé place à la rupture avec les paléo-conservateurs autour de la question du protectionnisme et des barrières tarifaires. La rupture fut définitivement consommée en 1998 avec la publication du livre de Buchanan The Great Betrayal. How American Sovereignty and Social Justice Are Being Sacrified to the Gods of the Global Economy. C’est dans ce livre que Buchanan affirme son attachement au « nationalisme économique » et qu’il fait du « conflit » entre les « nationalistes » et les « globalistes » le « nouveau conflit de l’époque qui succède à la Guerre froide »[1], définissant la ligne que reprendront littéralement Bannon et Trump. Soutenant le protectionnisme industriel, il déplace le contenu de l’anti-globalisme dans le sens de la défense des intérêts économiques nationaux contre la mondialisation du libre-échange.

    Cependant, l’opposition simple entre le nationalisme économique à base de protectionnisme industriel et le libre-échange illimité mérite d’être approfondie. D’abord, Buchanan est toujours resté un adversaire résolu de l’État-providence et The Great Betrayal est surtout une défense de l’économie américaine pré-New Deal où l’existence de barrières tarifaires aux importations a coïncidé avec une période de croissance. Pour autant, cette période a été marquée par de fortes inégalités économiques et sociales.

    Ensuite, dans le cas de Trump, l’usage qu’il fait du protectionnisme est pour le moins pragmatique et ne relève pas d’une position de principe. Lorsqu’il a baissé drastiquement fin 2017 l’impôt sur les sociétés, il a montré que sa défense de l’emploi américain ne convergeait pas nécessairement avec la « justice sociale ». Ciblant certaines industries correspondant à son électorat comme l’automobile, il se sert surtout des barrières tarifaires aux importations comme d’une arme parfois purement psychologique et virtuelle, parfois effective mais temporaire, dans une guerre commerciale qui peut aboutir à davantage de libre-échange.

    Dans l’USMCA (United States-Mexico-Canada Agreement), l’accord de l’Alena renégocié, si 75% des composants d’une automobile devront être fabriqués aux États-Unis pour qu’elle soit exemptée de barrières douanières (contre 62, 5% avec l’Alena), en revanche le marché laitier canadien sera davantage ouvert aux fermiers américains, tandis que Trump a récemment supprimé les barrières aux importations d’acier et d’aluminium venant du Mexique et du Canada, pour inciter ces pays à ratifier l’USMCA. S’il continue de se servir des droits de douane punitifs dans la guerre commerciale avec la Chine, il a recherché davantage de libre-échange avec l’Union européenne.

    Enfin, lorsque des journalistes demandèrent à Buchanan de quel économiste il s’inspirait, il répondit qu’il s’agissait de Wilhelm Röpke[2], l’un des principaux fondateurs de l’ordo-libéralisme, la forme prise par le néolibéralisme en Allemagne qui inspira la politique économique de Ludwig Erhardt sous Adenauer. Or Röpke n’était pas un thuriféraire, mais bien au contraire un opposant farouche au « nationalisme économique » et au « protectionnisme » qui représentait des fléaux pour l’ordre économique international qu’il cherchait à construire[3]. Cependant, il estimait que le libre-échange mondial ne pouvait intégrer les nations postcoloniales, car il n’avait été possible avant la première guerre mondiale que parmi le cercle des nations occidentales partageant un même ordre de valeurs culturelles et religieuses.

    Cette insistance sur des conditions extra-économiques morales et spirituelles au développement économique fait qu’il revendique une « troisième voie » appelée « économie humaine » entre le libre-échange purement fondé sur la concurrence et la social-démocratie. En cohérence avec cette « économie humaine », il s’engagea publiquement en faveur du maintien de l’apartheid en Afrique du Sud parce que les Noirs sud-africains se situaient « à un niveau de développement qui excluaient la véritable intégration spirituelle et politique avec les Blancs hautement civilisés »[4].

    Son nationalisme n’était finalement pas dirigé contre le libre-échange, mais pour un ordre hiérarchique international fondé sur des conditions de développement économiques différenciées, ne laissant pas aux nations non blanches les moyens d’intégrer le libre-échange mondial. Lorsque Buchanan tempête contre l’immigration et la reconquista économique mexicaine menaçant la culture américaine, il se situe effectivement dans le sillage de la position nationale-néolibérale de Röpke. Dans un débat télévisé en vue des élections européennes de 2019, Marine Le Pen promettait elle aussi, du reste, d’opposer au « capitalisme sauvage » une « économie humaine ».

    Lorsque des universitaires ou des commentateurs, y compris à gauche, insistent sur les aspects économiques positifs pour les populations, du nationalisme anti-globaliste, ils se méprennent absolument sur les origines comme sur les politiques menées par les populistes nationalistes. Ceux-ci revendiquent la récupération de la souveraineté nationale et critiquent les règles transnationales de la globalisation économique, non pour protéger leur modèle social et le droit du travail de leur population, mais pour s’affranchir de ce qui resterait en elles de contraintes environnementales ou sociales, et s’en servir comme tremplin vers plus de capitalisme et de libre-échange, ou pour contester le droit des nations non-blanches à intégrer équitablement le jeu du libre-échange mondial. Dans cette bataille, ce sont les national-néolibéraux qui affrontent les globalistes néolibéraux, dans une course qui pousse le monde dans une direction toujours plus mortifère, et ne comporte pas le moindre aspect positif.

    https://aoc.media/analyse/2019/10/28/les-origines-neoliberales-de-lantiglobalisme

    #nationalisme #globalisme #anti-globalisme #néolibéralisme #néo-libéralisme #populisme #discours_de_Bruges #industrie_agro-alimentaire #boeuf

    ping @karine4

  • Le néo-populisme est un néo- libéralisme

    Comment être libéral et vouloir fermer les frontières ? L’histoire du néolibéralisme aide à comprendre pourquoi, en Autriche et en Allemagne, extrême droite et droite extrême justifient un tel grand écart : oui à la libre-circulation des biens et des richesses, non à l’accueil des migrants.

    https://aoc.media/analyse/2018/07/03/neo-populisme-neo-liberalisme

    –-> je re-signale ici un article publié dans AOC media qui date de 2018, sur lequel je suis tombée récemment, mais qui est malheureusement sous paywall

    #populisme #libéralisme #néo-libéralisme #néolibéralisme #fermeture_des_frontières #frontières #histoire #extrême_droite #libre-circulation #migrations #Allemagne #Autriche

    ping @karine4 @isskein

    • #Globalists. The End of Empire and the Birth of Neoliberalism

      Neoliberals hate the state. Or do they? In the first intellectual history of neoliberal globalism, #Quinn_Slobodian follows a group of thinkers from the ashes of the Habsburg Empire to the creation of the World Trade Organization to show that neoliberalism emerged less to shrink government and abolish regulations than to redeploy them at a global level.

      Slobodian begins in Austria in the 1920s. Empires were dissolving and nationalism, socialism, and democratic self-determination threatened the stability of the global capitalist system. In response, Austrian intellectuals called for a new way of organizing the world. But they and their successors in academia and government, from such famous economists as Friedrich Hayek and Ludwig von Mises to influential but lesser-known figures such as Wilhelm Röpke and Michael Heilperin, did not propose a regime of laissez-faire. Rather they used states and global institutions—the League of Nations, the European Court of Justice, the World Trade Organization, and international investment law—to insulate the markets against sovereign states, political change, and turbulent democratic demands for greater equality and social justice.

      Far from discarding the regulatory state, neoliberals wanted to harness it to their grand project of protecting capitalism on a global scale. It was a project, Slobodian shows, that changed the world, but that was also undermined time and again by the inequality, relentless change, and social injustice that accompanied it.

      https://www.hup.harvard.edu/catalog.php?isbn=9780674979529

      #livre #empire #WTO #capitalisme #Friedrich_Hayek #Ludwig_von_Mises #Wilhelm_Röpke #Michael_Heilperin #Etat #Etat-nation #marché #inégalités #injustice #OMC

    • Quinn Slobodian : « Le néolibéralisme est travaillé par un conflit interne »

      Pour penser les hybridations contemporaines entre néolibéralisme, #autoritarisme et #nationalisme, le travail d’historien de Quinn Slobodian, encore peu connu en France, est incontournable. L’auteur de Globalists nous a accordé un #entretien.

      L’élection de Trump, celle de Bolsonaro, le Brexit… les élites des partis de #droite participant au #consensus_néolibéral semblent avoir perdu le contrôle face aux pulsions nationalistes, protectionnistes et autoritaires qui s’expriment dans leur propre camp ou chez leurs concurrents les plus proches.

      Pour autant, ces pulsions sont-elles si étrangères à la #doctrine_néolibérale ? N’assisterait-on pas à une mutation illibérale voire nativiste de la #globalisation_néolibérale, qui laisserait intactes ses infrastructures et sa philosophie économiques ?

      Le travail de Quinn Slobodian, qui a accordé un entretien à Mediapart (lire ci-dessous), apporte un éclairage précieux à ces questions. Délaissant volontairement la branche anglo-américaine à laquelle la pensée néolibérale a souvent été réduite, cet historien a reconstitué les parcours de promoteurs du néolibéralisme ayant accompli, au moins en partie, leur carrière à #Genève, en Suisse (d’où leur regroupement sous le nom d’#école_de_Genève).

      Dans son livre, Globalists (Harvard University Press, 2018, non traduit en français), ce professeur associé au Wellesley College (près de Boston) décrit l’influence croissante d’un projet intellectuel né « sur les cendres de l’empire des Habsbourg » à la fin de la Première Guerre mondiale, et qui connut son apogée à la création de l’#Organisation_mondiale_du_commerce (#OMC) en 1995.

      À la suite d’autres auteurs, Slobodian insiste sur le fait que ce projet n’a jamais été réductible à un « #fondamentalisme_du_marché », opposé par principe à la #puissance_publique et au #droit. Selon lui, l’école de Genève visait plutôt un « #enrobage » ( encasement ) du #marché pour en protéger les mécanismes. L’objectif n’était pas d’aboutir à un monde sans #frontières et sans lois, mais de fabriquer un #ordre_international capable de « sauvegarder le #capital », y compris contre les demandes des masses populaires.

      Dans cette logique, la division du monde en unités étatiques a le mérite d’ouvrir des « voies de sortie » et des possibilités de mise en #concurrence aux acteurs marchands, qui ne risquent pas d’être victimes d’un Léviathan à l’échelle mondiale. Cela doit rester possible grâce à la production de #règles et d’#institutions, qui protègent les décisions de ces acteurs et soustraient l’#activité_économique à la versatilité des choix souverains.

      On l’aura compris, c’est surtout la #liberté de l’investisseur qui compte, plus que celle du travailleur ou du citoyen – Slobodian cite un auteur se faisant fort de démontrer que « le #libre_commerce bénéficie à tous, même sans liberté de migration et si les peuples restent fermement enracinés dans leurs pays ». Si la compétition politique peut se focaliser sur les enjeux culturels, les grandes orientations économiques doivent lui échapper.

      L’historien identifie dans son livre « trois #ruptures » qui ont entretenu, chez les néolibéraux qu’il a étudiés, la hantise de voir s’effondrer les conditions d’un tel ordre de marché. La guerre de 14-18 a d’abord interrompu le développement de la « première mondialisation », aboutissant au morcellement des empires de la Mitteleuropa et à l’explosion de revendications démocratiques et sociales.

      La #Grande_Dépression des années 1930 et l’avènement des fascismes ont constitué un #traumatisme supplémentaire, les incitant à rechercher ailleurs que dans la science économique les solutions pour « sanctuariser » la mobilité du capital. Les prétentions au #protectionnisme de certains pays du « Sud » les ont enfin poussés à s’engager pour des accords globaux de #libre_commerce.

      L’intérêt supplémentaire de Globalists est de nous faire découvrir les controverses internes qui ont animé cet espace intellectuel, au-delà de ses objectifs communs. Une minorité des néolibéraux étudiés s’est ainsi montrée sinon favorable à l’#apartheid en #Afrique_du_Sud, du moins partisane de droits politiques limités pour la population noire, soupçonnée d’une revanche potentiellement dommageable pour les #libertés_économiques.

      Le groupe s’est également scindé à propos de l’#intégration_européenne, entre ceux qui se méfiaient d’une entité politique risquant de fragmenter le marché mondial, et d’autres, qui y voyaient l’occasion de déployer une « Constitution économique », pionnière d’un « modèle de gouvernance supranationale […] capable de résister à la contamination par les revendications démocratiques » (selon les termes du juriste #Mestmäcker).

      On le voit, la recherche de Slobodian permet de mettre en perspective historique les tensions observables aujourd’hui parmi les acteurs du néolibéralisme. C’est pourquoi nous avons souhaité l’interroger sur sa vision des évolutions contemporaines de l’ordre politique et économique mondial.

      Dans votre livre, vous montrez que les néolibéraux donnent beaucoup d’importance aux #règles et peuvent s’accommoder des #frontières_nationales, là où cette pensée est souvent présentée comme l’ennemie de l’État. Pourriez-vous éclaircir ce point ?

      Quinn Slobodian : Quand on parle d’ouverture et de fermeture des frontières, il faut toujours distinguer entre les biens, l’argent ou les personnes. Mon livre porte surtout sur le #libre_commerce, et comment des #lois_supranationales l’ont encouragé. Mais si l’on parle des personnes, il se trouve que dans les années 1910-1920, des néolibéraux comme #von_Mises étaient pour le droit absolu de circuler.

      Après les deux guerres mondiales, cette conception ne leur est plus apparue réaliste, pour des raisons de #sécurité_nationale. #Hayek a par exemple soutenu l’agenda restrictif en la matière de #Margaret_Thatcher.

      Même si l’on met la question de l’immigration de côté, je persiste à souligner que les néolibéraux n’ont rien contre les frontières, car celles-ci exercent une pression nécessaire à la #compétitivité. C’est pourquoi l’existence simultanée d’une économie intégrée et de multiples communautés politiques n’est pas une contradiction pour eux. De plus, une « #gouvernance_multiniveaux » peut aider les dirigeants nationaux à résister aux pressions populaires. Ils peuvent se défausser sur les échelons de gouvernement qui leur lient les mains, plus facilement que si on avait un véritable #gouvernement_mondial, avec un face-à-face entre gouvernants et gouvernés.

      Cela pose la question du rapport entre néolibéralisme et #démocratie

      Les néolibéraux voient la démocratie de manière très fonctionnelle, comme un régime qui produit plutôt de la #stabilité. C’est vrai qu’ils ne l’envisagent qu’avec des contraintes constitutionnelles, lesquelles n’ont pas à être débordées par la volonté populaire. D’une certaine façon, la discipline que Wolfgang Schaüble, ex-ministre des finances allemand, a voulu imposer à la Grèce résulte de ce type de pensée. Mais c’est quelque chose d’assez commun chez l’ensemble des libéraux que de vouloir poser des bornes à la #démocratie_électorale, donc je ne voudrais pas faire de mauvais procès.

      Les élections européennes ont lieu le 26 mai prochain. Pensez-vous que l’UE a réalisé les rêves des « globalists » que vous avez étudiés ?

      C’est vrai que la #Cour_de_justice joue le rôle de gardienne des libertés économiques au centre de cette construction. Pour autant, les règles ne se sont pas révélées si rigides que cela, l’Allemagne elle-même ayant dépassé les niveaux de déficit dont il était fait si grand cas. Plusieurs craintes ont agité les néolibéraux : celle de voir se développer une #Europe_sociale au détriment de l’#intégration_négative (par le marché), ou celle de voir la #monnaie_unique empêcher la #concurrence entre #monnaies, sans compter le risque qu’elle tombe aux mains de gens trop peu attachés à la stabilité des prix, comme vous, les Français (rires).

      Plus profondément, les néolibéraux sceptiques se disaient qu’avec des institutions rendues plus visibles, vous créez des cibles pour la #contestation_populaire, alors qu’il vaut mieux des institutions lointaines et discrètes, produisant des règles qui semblent naturelles.

      Cette opposition à l’UE, de la part de certains néolibéraux, trouve-t-elle un héritage parmi les partisans du #Brexit ?

      Tout à fait. On retrouve par exemple leur crainte de dérive étatique dans le #discours_de_Bruges de Margaret Thatcher, en 1988. Celle-ci souhaitait compléter le #marché_unique et travailler à une plus vaste zone de #libre-échange, mais refusait la #monnaie_unique et les « forces du #fédéralisme et de la #bureaucratie ».

      Derrière ce discours mais aussi les propos de #Nigel_Farage [ex-dirigeant du parti de droite radicale Ukip, pro-Brexit – ndlr], il y a encore l’idée que l’horizon de la Grande-Bretagne reste avant tout le #marché_mondial. Sans préjuger des motivations qui ont mené les citoyens à voter pour le Brexit, il est clair que l’essentiel des forces intellectuelles derrière cette option partageaient des convictions néolibérales.

      « L’hystérie sur les populistes dramatise une situation beaucoup plus triviale »

      De nombreux responsables de droite sont apparus ces dernières années, qui sont à la fois (très) néolibéraux et (très) nationalistes, que l’on pense à Trump ou aux dirigeants de l’#Alternative_für_Deutschland (#AfD) en Allemagne. Sont-ils une branche du néolibéralisme ?

      L’AfD est née avec une plateforme ordo-libérale, attachée à la #stabilité_budgétaire en interne et refusant toute solidarité avec les pays méridionaux de l’UE. Elle joue sur l’#imaginaire de « l’#économie_sociale_de_marché », vantée par le chancelier #Erhard dans les années 1950, dans un contexte où l’ensemble du spectre politique communie dans cette nostalgie. Mais les Allemands tiennent à distinguer ces politiques économiques du néolibéralisme anglo-saxon, qui a encouragé la #financiarisation de l’économie mondiale.

      Le cas de #Trump est compliqué, notamment à cause du caractère erratique de sa prise de décision. Ce qui est sûr, c’est qu’il brise la règle néolibérale selon laquelle l’économie doit être dépolitisée au profit du bon fonctionnement de la concurrence et du marché. En ce qui concerne la finance, son agenda concret est complètement néolibéral.

      En matière commerciale en revanche, il est sous l’influence de conseillers qui l’incitent à une politique agressive, notamment contre la Chine, au nom de l’#intérêt_national. En tout cas, son comportement ne correspond guère à la généalogie intellectuelle de la pensée néolibérale.

      Vous évoquez dans votre livre « l’#anxiété » qui a toujours gagné les néolibéraux. De quoi ont-ils #peur aujourd’hui ?

      Je dirais qu’il y a une division parmi les néolibéraux contemporains, et que la peur de chaque camp est générée par celui d’en face. Certains tendent vers le modèle d’une intégration supranationale, avec des accords contraignants, que cela passe par l’OMC ou les méga-accords commerciaux entre grandes régions du monde.

      Pour eux, les Trump et les pro-Brexit sont les menaces contre la possibilité d’un ordre de marché stable et prospère, à l’échelle du globe. D’un autre côté figurent ceux qui pensent qu’une #intégration_supranationale est la #menace, parce qu’elle serait source d’inefficacités et de bureaucratie, et qu’une architecture institutionnelle à l’échelle du monde serait un projet voué à l’échec.

      Dans ce tableau, jamais la menace ne vient de la gauche ou de mouvement sociaux, donc.

      Pas vraiment, non. Dans les années 1970, il y avait bien le sentiment d’une menace venue du « Sud global », des promoteurs d’un nouvel ordre économique international… La situation contemporaine se distingue par le fait que la #Chine acquiert les capacités de devenir un acteur « disruptif » à l’échelle mondiale, mais qu’elle n’en a guère la volonté. On oublie trop souvent que dans la longue durée, l’objectif de l’empire chinois n’a jamais consisté à étendre son autorité au-delà de ses frontières.

      Aucun des auteurs que je lis n’est d’ailleurs inquiet de la Chine à propos du système commercial mondial. Le #capitalisme_autoritaire qu’elle incarne leur paraît tout à fait convenable, voire un modèle. #Milton_Friedman, dans ses derniers écrits, valorisait la cité-État de #Hong-Kong pour la grande liberté économique qui s’y déploie, en dépit de l’absence de réelle liberté politique.

      Le débat serait donc surtout interne aux néolibéraux. Est-ce qu’il s’agit d’un prolongement des différences entre « l’école de Genève » que vous avez étudiée, et l’« l’école de Chicago » ?

      Selon moi, le débat est un peu différent. Il rappelle plutôt celui que je décris dans mon chapitre sur l’intégration européenne. En ce sens, il oppose des « universalistes », partisans d’un ordre de marché vraiment global construit par le haut, et des « constitutionnalistes », qui préfèrent le bâtir à échelle réduite, mais de façon plus sûre, par le bas. L’horizon des héritiers de l’école de Chicago reste essentiellement borné par les États-Unis. Pour eux, « l’Amérique c’est le monde » !

      On dirait un slogan de Trump.

      Oui, mais c’est trompeur. Contrairement à certains raccourcis, je ne pense pas que Trump veuille un retrait pur et simple du monde de la part des États-Unis, encore moins un modèle autarcique. Il espère au contraire que les exportations de son pays s’améliorent. Et si l’on regarde les accords qu’il a voulu renégocier, quels sont les résultats ?

      Avec le Mexique, on a abouti à quelque chose de très proche de ce qui existait déjà. Dans le débat dont j’ai esquissé les contours, il serait plutôt du côté des constitutionnalistes, avec des accords de proximité qui s’élargiraient, mais garderaient la Chine à distance. De façon générale, l’hystérie sur les populistes au pouvoir me semble dramatiser une situation beaucoup plus triviale, qui oppose des stratégies quant à la réorganisation de l’économie mondiale.

      Est-ce que le rejet de la Chine s’inscrit dans la même logique que les positions hostiles à l’immigration de Hayek en son temps, et de Trump ou des pro-Brexit aujourd’hui ? En somme, y aurait-il certains pays, comme certains groupes, qui seraient soupçonnés d’être culturellement trop éloignés du libre marché ?

      On retrouve chez certains auteurs l’idée que l’homo œconomicus, en effet, n’est pas universel. Les règles du libre marché ne pourraient être suivies partout dans le monde. Cette idée d’une altérité impossible à accommoder n’est pas réservée à des ressentiments populaires. Elle existe dans le milieu des experts et des universitaires, qui s’appuient sur certains paradigmes scientifiques comme le #néo-institutionnalisme promu par des auteurs comme #Douglass_North. Cette perspective suppose qu’à un modèle socio-économique particulier, doivent correspondre des caractéristiques culturelles particulières.

      https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/100319/quinn-slobodian-le-neoliberalisme-est-travaille-par-un-conflit-interne #WWI #première_guerre_mondiale

  • Numéro en lutte


    La #lutte est pleine
    As the Struggle Continues

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    Precademics 85.42.1
    On #Pause : Academic Precarity in the COVID-19 Era and Beyond in Greece

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    Jeanne Hersant
    Faire de la #science au #Chili : la #recherche_par_projet comme seul horizon

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    Aslıhan Aykaç Yanardağ
    Qu’est-ce qui motive l’enseignant-chercheur ?

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    Ahmet Insel, Élise Massicard and Özgür Türesay
    Témoignage d’un universitaire « agitateur d’idées » en #France et en #Turquie

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    Tang Yun, Katiana Le Mentec and Camille Noûs
    Bureaucratic and Neoliberal Management in Academia. A Franco-Chinese Dialogue between Two Anthropologists

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    Camille Noûs
    Quelque part en Asie : l’expérience d’un “chercheur en visite”

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    Elsa Clavé
    Être #professeur_junior à l’université allemande : retour d’expérience

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    Aslı Vatansever and Aysuda Kölemen
    Reflections on Exile and Academic Precarity : Discussing At the Margins of Academia

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    Cem Özatalay
    Purge, Exile, and Resistance :
    Rethinking the Conflict of the Faculties through the Case of Academics for Peace in Turkey

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    Emine Sevim and Sümbül Kaya
    Sümbül Kaya’nın Emine Sevim ve BIRARADA derneğiyle röportajı
    Entretien avec #Emine_Sevim de l’association « #BİRARADA » par Sümbül Kaya

    https://journals.openedition.org/ejts/6407

    #université #lutte #luttes #ESR #précarisation #précarité #revue #néolibéralisme #Allemagne #précarité_académique #résistance #exile #purge #Chine

  • Les leçons des élections municipales au Brésil
    https://pardem.org/actualite/1090-les-lecons-des-elections-municipales-au-bresil

    Dimanche 29 novembre 2020, pour le second tour des municipales au Brésil, environ 38 millions de Brésiliens, (soit un quart du corps électoral), étaient appelés à élire pour quatre ans les maires et conseillers municipaux de 57 villes dont 18 des 26 capitales d’État.


    La politique néolibérale de Bolsonaro a plongé le pays dans la récession et a provoqué un niveau record de chômage, avec 14 millions de sans-emploi. Le néolibéralisme de Bolsonaro a, comme partout où ces politiques s’appliquent, fait des coupes sombres dans la santé, l’éducation, les transports publics ou le logement, mais aussi poussé les villes à l’endettement, la corruption et la violence. Le plus grand pays d’Amérique latine, où la pandémie de Covid-19 a fait plus de 172 000 morts en huit mois, voit arriver une deuxième vague de coronavirus.

    Avec ce bilan catastrophique pour le peuple brésilien, certains s’attendaient, lors de ces élections municipales, à la déroute de la « droite » et au retour de la « gauche » dans les mairies.

    Bolsonarisme et droites diverses
    Certes, ces municipales indiquent un ample reflux de la vague qui avait porté Jair Bolsonaro au pouvoir en 2018, mais c’est le « centre-droit » qui rafle la mise… Et de loin car il s’empare de la presque totalité des mairies. Par exemple, dans l’État de Bahia, les trois principales villes sont dorénavant aux mains de la droite et du centre-droit ,compatibles avec le bolsonarisme. La capitale du Maranhгo, Sгo Luнs, sera dirigée par Eduardo Braide, allié de Bolsonaro.

    Les villes-capitales Maceio (Alagoas), Aracaju (Sergipe), Fortaleza (Cearб) et Recife (Pernambuco) seront dirigées par des maires « centre-gauche modéré » (PSB, PDT) compatibles avec la droite.

    La victoire a été sans appel dans les deux plus grandes villes du pays. A São Paulo (12,5 millions d’habitants), ville la plus riche du Brésil, le maire sortant Bruno Covas a été reconduit avec près de 60 % des voix, contre 40,62 % à Guilherme Boulos (PSOL). Et à Rio de Janeiro, Eduardo Paes, a remporté 64,07 % des voix, infligeant une défaite cinglante à l’impopulaire maire sortant Marcelo Crivella (35,93 %), ex-pasteur évangélique. Celui-ci est l’un des 13 candidats soutenus par Bolsonaro dont 11 ont été battus.
Analyser, plus en détail, les résultats du centre-droit n’a pas d’interêt car le découpage centre-droit, centre-gauche, droite et bolsonarisme est artificiel, tous ces partis menant la même politique.

    Déroute de la « gauche »
    Pour la première fois depuis le retour de la démocratie au Brésil (1985), le Parti des travailleurs (PT) de l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva n’a pas remporté une seule capitale des 26 États de la fédération. Le PT n’a même pas pu arracher dans le Pernambouc (nord-est), Recife, bastion de la gauche et seule capitale qui était à sa portée. Le PT a disputé quinze seconds tours et n’a remporté que quatre villes, toutes de plus de cent mille habitants : Contagem et Juiz de Fora dans l’État du Minas Gerais, Diadema et Maua dans celui de Sao Paulo. Sur le plan national, le PT passe de 630 maires élus en 2012 à 183 au 1er janvier 2021. 

    Le PT ne représente plus que 2,9 % de l’électorat du pays et moins de 5 % dans le Nordeste, fief de la gauche. L’ensemble des partis de gauche n’arrive pas à 10 % des voix.
Nationalement, le PSOL (petit parti de gauche de gauche), ne dirigera que cinq villes, dont Belém, capitale du Parб, État ou les inégalités sociales, la pression des grands propriétaires terriens et la déforestation sont les plus violentes. Edmilson Rodrigues a conquis la mairie avec une liste plurielle (PSOL, PT, PCdoB, PDT, PCB, Rede, UP).

    Quelles leçons en tirer ?
    – La première leçon est connue mais doit être rappelée. Les politiques néolibérales, désastreuses pour les classes dominées et ravageuses pour les plus pauvres, ne les conduisent pas « automatiquement » à voter à gauche.

    – La deuxième leçon est évidente mais niée par tous les partis « de gauche » du système. Il ne suffit pas, lorsqu’on a le pouvoir, d’améliorer le quotidien des gens en acceptant les limites fixées par le système néolibéral.

    – La troisième est sans appel : Les citoyens refusent le clivage « gauche-droite », artificiel, les « deux camps » appliquant la même politique.

    – La quatrième est claire : sans rupture complète et immédiate avec le néolibéralisme (et le capitalisme) pas de victoire possible des partis de gauche.

    Joël Perichaud

    #Brésil #Bolsonaro #PT #gauche #néolibéralisme #élections

  • #Chili : le soulèvement de 2019 au prisme d’un cycle de luttes et de déceptions
    https://www.cetri.be/Chili-le-soulevement-de-2019-au

    Le soulèvement qui a secoué le Chili en octobre 2019 s’inscrit dans une succession de conflits sociaux. La mobilisation étudiante de 2011 a accouché d’une génération militante radicale, qui a dynamisé les luttes syndicales, féministes et écologistes. Elle a également engendré des tentatives de modifier l’ordre néolibéral par la voie institutionnelle, dont les limites ont approfondi la méfiance des classes populaires envers la (...) #Alternatives_Sud_-_extraits

    / Chili, #Mouvements_sociaux, Relations entre mouvements sociaux & gouvernements, #Contestation, #Néolibéralisme

    #Relations_entre_mouvements_sociaux_&_gouvernements

  • Qui sont les étudiants qui gagnent de l’argent en vendant leurs données ?
    https://www.ladn.eu/tech-a-suivre/data-big-et-smart/etudiant-vendre-donnees-tadata-weward

    De jeunes étudiants et étudiantes téléchargent des applications comme TaData, WeWard et SweatCoin. Elles leur permettent de gagner un maigre butin en échange de leurs données personnelles.

    Fini le dog-sitting et la tonte de pelouse : pour gagner de l’argent de poche certains GenZers préfèrent monnayer leurs données personnelles. Ce nouveau petit boulot du web peu cher payé se fait via des applications comme TaData, WeWard, Vazee ou encore SweatCoin.

    Lise (les prénoms ont été modifiés), 21 ans, étudiante en master à Sciences Po, utilise TaData, une plateforme spécialement ciblée pour les (très) jeunes : 15-25 ans. Depuis deux mois, elle se connecte régulièrement à l’appli pour répondre à des formulaires marketing. « Il s’agit la plupart du temps de questionnaires sur nos préférences de consommation (types de musique que j’aime écouter, quel électroménager je souhaite acheter…). Je reçois une notification dès qu’un nouveau questionnaire est en ligne, et je le fais, ça prend moins de 5 minutes », explique-t-elle. Bilan des courses ? Une quinzaine d’euros, pas de quoi remplir le frigo, mais la somme « n’est pas négligeable », « surtout quand on est étudiant », estime Lise.

    #Données_personnelles #TaData #Arnaque_attentionnelle #Boulots_de_merde #Neolibéralisme #Libertarianisme

  • The Last Colonial Massacre: Latin America in the Cold War by Greg Grandin
    https://notevenpast.org/last-colonial-massacre-latin-america-cold-war

    Afterword: An Interview with Naomi Klein
    ...
    Many readers will know Chile as the fi rst place where the direct relationship between neoliberal economics and torture became evident. But the backstory to Friedman’s involvement with the Pinochet government is less well known. Years ago, when I heard the phrase “the Chicago boys,” I thought it referred to North Americans who had gone to Chile and worked with Pinochet. And that was true to some extent, because Friedman himself did travel to Chile in 1975 and meet with Pinochet. But the real Chicago boys, as you have written in Empire’s Workshop, were the Chileans who had studied at the University of Chicago. To a large extent, that was not just an academic program but the U.S. government’s attempt to change the ideological landscape of Latin America. It started in the 1950s, when a great deal of concern in Washington centered on the so- called pink economists and the notion that Latin America was moving very far to the left.

    One strategy, devised by USAID, was to bring large numbers of Chilean students to the University of Chicago, which was then considered a very ex- treme institution. In the United States, the Chicago economics department was seen as way out there. Friedman was always complaining about how marginal he was, how the Keynesians at Harvard and Yale had a monopoly on political infl uence. He and his colleagues saw themselves as a band of rebels on the fringes, working with these Latin American students, who were brought into what was practically a cult for extreme capitalism. The students were trained as ideological warriors—their tuition was paid for by the U.S. government and later by the Ford Foundation—and then sent back home to battle the “pinks.” It started with Chile, but it later expanded to Argentina, Brazil, Mexico.

    But it failed. Even though millions of dollars were spent on their educa- tion, these ideological warriors fl opped. They went back to Chile in the 1960s and they had their little journals and the economics pages of newspapers and they published papers. But the political debate had moved so far to the left that they were irrelevant to it. The idea that the U.S. State Department was somehow going to convert Chile to Friedmanism, to a form of capitalism that was more radical than anything that had been attempted in the United States, was clearly absurd.

    This initial failure is important because we’re so often told that capitalism, or this radical form of capitalism, has triumphed around the world because there was a battle of ideas, and the Friedmanites won. When Friedman died last year, we heard an unrelenting celebration of this supposedly peaceful battle that his side won. They won in Latin America, they won in Russia, they won in China—or so we are told. But from the very beginning, from the very fi rst laboratory, the Friedmanites lost badly when it was peaceful. But then, of course, the Chicago boys came back, after Salvador Allende’s overthrow, this time with tanks. And it was in this brutal, anti- democratic context that they “won.”

    ...

    I’ve come to think of the War on Terror as playing the same kind of role as a really over- hyped market bubble, much like the dot- coms of the late 1990s. This new economy was announced after September 11. The business prospectus was this: the U.S. government will do whatever it takes to make the country “secure” at home; we will fi ght a war against evil every- where, forever.

    From a business perspective, this is tremendously reassuring because in- vestors are always looking for predictability and sustainability, and the Bush administration has delivered it. It has created a $200 billion market in home- land security and declared that the demand will never end. In other words, if you sink your money in this industry, if you supply “security” products to meet the demand they have created, it’s a safe bet. The government, while launching this new economy, also acts as its venture capitalist, providing unlimited funding to whoever can come up with the newest gadget to make us safe or to wage war abroad.

    The Department of Homeland Security is a great example of this. It is not a governmental agency in the traditional sense, but rather an empty shell that exists only to hand out money to private contractors to produce products that the government then buys.

    https://en.wikipedia.org/wiki/The_Shock_Doctrine

    #colonialisme #néolibéralisme #Chili #stratégie_du_choc #Amérique_latine

  • The Morals of the Market. Human Rights and the Rise of Neoliberalism

    IN THE MID-1980s, Rony Brauman, who, at the time, was the president of the leading humanitarian organization Médecins sans Frontières, established a new human rights group called Liberté sans Frontières. For the inaugural colloquium, Brauman invited a number of speakers, among them Peter Bauer, a recently retired professor from the London School of Economics. Bauer was an odd choice given that he was a staunch defender of European colonialism; he had once responded to a student pamphlet that accused the British of taking “the rubber from Malaya, the tea from India, [and] raw materials from all over the world,” by arguing that actually “the British took the rubber to Malaya and the tea to India.” Far from the West causing Third World poverty, Bauer maintained that “contacts with the West” had been the primary agents of the colonies’ material progress.

    Bauer hammered on this point at the colloquium, claiming that indigenous Amazonians were among the poorest people in the world precisely because they enjoyed the fewest “external contacts.” Taiwan, Hong Kong, Malaysia, and Singapore, he continued, showed proof of the economic benefits such contacts brought. “Whatever one thinks of colonialism it can’t be held responsible for Third World poverty,” he argued.

    In her illuminating new book, The Morals of the Market: Human Rights and the Rise of Neoliberalism, Jessica Whyte recounts this story only to ask why Brauman, a leading humanitarian activist, invited Bauer — whom the Economist had described as being as hostile to foreign aid as Friedrich Hayek had been to socialism — to deliver a talk during the opening event for a new human rights organization. Her response is multifaceted, but, as she traces the parallel histories of neoliberalism and human rights, it becomes clear that the two projects are not necessarily antithetical, and actually have more in common than one might think.

    Indeed, Liberté sans Frontières went on to play a central role in delegitimizing Third World accounts of economic exploitation. The organization incessantly challenged the accusations that Europe’s opulence was based on colonial plunder and that the world economic system made the rich richer and the poor poorer. And while it may have been more outspoken in its critique of Third Worldism than more prominent rights groups, it was in no way an outlier. Whyte reveals that in the eyes of organizations such as Amnesty International and Human Rights Watch, for instance, the major culprit for the woes of postcolonial states was neither Europe nor the international economic order but rather corrupt and ruthless Third World dictators who violated the rights of their populations as they undermined the development of a free economy. This approach coincides neatly with neoliberal thought.

    Whyte contends that we cannot understand why human rights and neoliberalism flourished together if we view neoliberalism as an exclusively economic doctrine that favors privatization, deregulation, and unfettered free markets over public institutions and government. Although she strives to distinguish herself from thinkers like Wendy Brown and Michel Foucault, she ends up following their footsteps by emphasizing the moral dimension of neoliberal thought: the idea that a competitive market was not “simply a more efficient means of distributing resources; it was the basic institution of a moral and ‘civilised’ society, and a necessary support for individual rights.”

    She exposes how neoliberal ideas informed the intense struggle over the meaning of “human rights,” and chronicles how Western rights groups and neoliberals ultimately adopted a similar interpretation, one that emphasizes individual freedoms at the expense of collective and economic rights. This interpretation was, moreover, in direct opposition to many newly independent postcolonial leaders.

    Whyte describes, for instance, how just prior to the adoption of the two 1966 human rights covenants — the International Covenant on Civil and Political Rights and the International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights — Kwame Nkrumah, the first president of independent Ghana, coined the term “neo-colonialism” to refer to a series of mechanisms that perpetuate colonial patterns of exploitation in the wake of formal independence. Nkrumah “argued that the achievement of formal sovereignty had neither freed former colonies from the unequal economic relations of the colonial period nor given them political control over their own territories,” thus preventing these states from securing the basic rights of their inhabitants. A “state in the grip of neo-colonialism,” he wrote, “is not master of its own destiny.”

    Nkrumah thought that only when postcolonial states fully controlled their natural resources would they be able to invest in the population’s well-being. In the meantime, neo-colonial economic arrangements were denying African states the ability to provide adequate education and health care as well as other economic and social rights to their populations, thus revealing how these economic arrangements were welded in a Gordian knot with international politics. Any attempt to understand one without the other provided a distorted picture of reality.

    Such combining of the economy with the political, however, was anathema to neoliberal thought. In 1927, exactly three decades before Ghana’s new leader led his country to independence, Hayek’s mentor, economist Ludwig von Mises, had already argued that colonialism took advantage of the superior weaponry of the “white race” to subjugate, rob, and enslave weaker peoples. But Mises was careful to distinguish colonial oppression from the economic goals of a competitive market, noting that Britain was different since its form of colonialism pursued “grand commercial objectives.” Similarly, the British economist Lionel Robbins separated the benign economic sphere from the merciless political one, writing in the 1930s that “[n]ot capitalism, but the anarchic political organization of the world is the root disease of our civilization.”

    These thinkers set the tone for many neoliberal economists who have since defined colonial imperialism as a phenomenon of politics, not capitalism, while casting the market as a realm of mutually beneficial, free, peaceful exchange. In this view, it is the political realm that engenders violence and coercion, not the economic sphere. Yet, during the period of decolonization neoliberals also understood that they needed to introduce moral justifications for the ongoing economic exploitation of former colonies. Realizing that human rights were rapidly becoming the new lingua franca of global moral speak, Whyte suggests that they, like Nkrumah, began mobilizing rights talk — except that neoliberals deployed it as a weapon against states who tried to gain control over their country’s natural resources as well as a shield from any kind of criticism directed toward their vision of a capitalist market.

    Their relation to the state was complicated, but was not really different from the one espoused by their liberal predecessors. Neoliberal thinkers understood that states are necessary to enforce labor discipline and to protect corporate interests, embracing states that served as handmaidens to competitive markets. If, however, a state undermined the separation of political sovereignty from economic ownership or became attuned to the demands of its people to nationalize resources, that state would inevitably be perceived as a foe. The solution was to set limits on the state’s exercise of sovereignty. As Friedrich Hayek, the author of The Road to Serfdom, put it, the “taming of the savage” must be followed by the “taming of the state.”

    Shaping the state so that it advances a neoliberal economic model can, however, be a brutal undertaking, and the consequences are likely to generate considerable suffering for large segments of the population. Freed from any commitment to popular sovereignty and economic self-determination, the language of liberal human rights offered neoliberals a means to legitimize transformative interventions that would subject states to the dictates of international markets. This is why a conception of human rights, one very different from the notion of rights advanced by Nkrumah, was needed.

    In Whyte’s historical analysis the free-market ideologues accordingly adopted a lexicon of rights that buttressed the neoliberal state, while simultaneously pathologizing mass politics as a threat to individual freedoms. In a nutshell, neoliberal economists realized that human rights could play a vital role in the dissemination of their ideology, providing, in Whyte’s words, “competitive markets with a moral and legal foundation.”

    At about the same time that neoliberalism became hegemonic, human rights organizations began sprouting in the international arena. By the early 1970s, Amnesty International and the International Commission of Jurists were already active in numerous countries around the globe, and Americas Watch (a precursor to Human Rights Watch) had just been established. According to Samuel Moyn, a professor of history at Yale and author of the best seller The Last Utopia, it was precisely during this period that human rights first achieved global prominence. That Western human rights organizations gained influence during the period of neoliberal entrenchment is, Whyte argues, not coincidental.

    Although Whyte emphasizes the writings of leading neoliberal thinkers, a slightly more nuanced approach would have framed these developments as the reflection of a conjunctural moment, whereby the rise of neoliberalism and of human rights NGOs was itself part of numerous economic, social, and cultural shifts. Chile serves as a good example of this conjuncture, revealing how a combination of historical circumstances led neoliberal economics and a certain conception of human rights to merge.

    Notwithstanding the bloody takeover, the extrajudicial executions, the disappearances and wholesale torture of thousands of dissidents, Hayek’s response to Pinochet’s 1973 coup was that “the world shall come to regard the recovery of Chile as one of the great economic miracles of our time.” Milton Friedman, a key figure in the Chicago School, later echoed this assessment, describing Chile as an economic and political “miracle.” The two Nobel Prize winners were not detached observers, having provided advice to Pinochet on how to privatize state services such as education, health care, and social security, and it was Friedman’s former students, the “Chicago Boys,” who occupied central positions within the authoritarian regime, ensuring that these ideas became policy.

    What is arguably even more surprising is the reaction of human rights organizations to the bloody coup in Chile. Whyte acknowledges that Naomi Klein covered much of this ground in The Shock Doctrine, where she details how Amnesty International obscured the relationship between neoliberal “shock therapy” and political violence. Characterizing the Southern Cone as a “laboratory” for both neoliberalism and grassroots human rights activism, Klein argued that, in its commitment to impartiality, Amnesty occluded the reasons for the torture and killing, and thereby “helped the Chicago School ideology to escape from its first bloody laboratory virtually unscathed.” While Whyte concurs with Klein’s assessment, she has a slightly different point to make.

    To do so, she shows how Samuel Moyn contested Klein’s claim that the human rights movement was complicit in the rise of neoliberalism; he argued that the “chronological coincidence of human rights and neoliberalism” is “unsubstantiated” and that the so-called “Chilean miracle” is just as much due to the country’s “left’s own failures.” Moyn’s comment, Whyte cogently observes, “raises the question of why, in the period of neoliberal ascendancy, international human rights organisations flourished, largely escaping the repression that was pursued so furiously against leftists, trade unionists, rural organizers and indigenous people in countries such as Chile.”

    She points out that the CIA-trained National Intelligence Directorate had instructions to carry out the “total extermination of Marxism,” but in an effort to present Chile as a modern civilized nation, the junta did not disavow the language of human rights, and at the height of the repression allowed overseas human rights organizations such as Amnesty International and the International Commission of Jurists to enter the country, giving them extensive freedom of movement.

    Whyte explains that in focusing their attention on state violence while upholding the market as a realm of freedom and voluntary cooperation, human rights NGOs strengthened the great neoliberal dichotomy between coercive politics and free and peaceful markets. Allende’s government had challenged the myth of the market as a realm of voluntary, non-coercive, and mutually beneficial relations, and the Chilean leader paid for it with his life. By contrast, the junta with the Chicago Boys’ aid sought to uphold this myth, while using the state both to enhance a neoliberal economic order and to decimate collective political resistance. Whyte acknowledges that in challenging the junta’s torturous means, human rights NGOs arguably helped restrain the worst of its violence, but they did so at the cost of abandoning the economy as a site of political contestation.

    Whyte’s claim is not simply that the human rights NGOs dealt with political violence in isolation from the country’s economic transformations, as Klein had argued. Rather, she shows that the gap between Amnesty’s version of human rights and the version espoused by postcolonial leaders, like Nkrumah, was wide. Indeed, Amnesty International invoked human rights in a way that had little in common with Nkrumah’s program of economic self-determination, and the organization was even hostile to the violent anti-colonial struggles promoted by UN diplomats from postcolonial societies during the same period. The story of human rights and neoliberalism in Chile is not, as Whyte convincingly shows, simply a story of the massive human rights violations carried out in order to allow for market reforms, or of the new human rights NGOs that contested the junta’s violence. It is also the story of the institutionalization of a conservative and market-driven vision of neoliberal human rights, one that highlights individual rights while preserving the inequalities of capitalism by protecting the market from the intrusions of “the masses.”

    Expanding Whyte’s analysis to the present moment (the book focuses on the years between 1947 and 1987) while thinking of the relation between neoliberalism and human rights as part of a historical conjuncture, it becomes manifest that many if not most human rights NGOs operating today have been shaped by this legacy. One of its expressions is that rights groups rarely represent “the masses” in any formal or informal capacity. Consider Human Rights Watch, whose longstanding executive director Kenneth Roth oversees an annual budget of over $75 million and a staff of roughly 400 people. In four years’ time, Roth will outstrip Robert Mugabe’s 30-year tenure in office; while Roth has dedicated most of his adult life struggling against social wrongs, he has never had to compete in elections to secure his post. Indeed, due to the corporate structure of his organization the only constituency to which he is accountable are Human Rights Watch’s board members and donors — those who benefit from neoliberal economic arrangements — rather than the people whose rights the NGO defends or, needless to say, the “masses.” Moreover, Human Rights Watch is not exceptional within the rights-world, and even though rights organizations across the globe say they are interested in what the “people want,” sovereignty of the people in any meaningful sense, wherein the people can control the decisions that affect their lives most, is not really on the agenda.

    Undoubtedly, Human Rights Watch has shed light on some of the most horrendous state crimes carried out across the globe over the past several decades. Exposing egregious violations is not an easy task and is a particularly important endeavor in our post-truth era. However, truth-telling, in and of itself, is not a political strategy. Even if exposing violations is conceived of as a component of a broader political mobilization, the truths that NGOs like Human Rights Watch have been revealing are blinkered. Given that they interpret human rights in an extremely narrow way, one that aligns quite neatly with neoliberal thought, their strategy therefore fails to provide tools for those invested in introducing profound and truly transformative social change.

    From the get-go, most Western human rights NGOs had been attuned to Cold War politics and refrained from advocating for economic and social rights for decades, inventing numerous reasons to justify this stance: from the claim that the right to education and health care were not basic human rights like freedom of speech and freedom from torture, to the assertion that economic and social rights lacked a precise definition, thus rendering them difficult to campaign for. It took close to a decade after the fall of the Berlin Wall and the ongoing campaigning of Third World activists for the leading human rights organizations to acknowledge that economic and social rights, such as the right to health care, education, and social security, were indeed human rights, rights that they should dedicate at least some of its resources to fight for. But even today, almost 20 years after their integration within Human Rights Watch’s agenda, the resources allocated to the protection of these rights is relatively small, and the way that the organization strives to secure them is deeply skewed by the neoliberal view that politics and markets are separate realms and that human rights work should avoid interference with the capitalist structure of competitive markets. Wittingly or not, organizations like Human Rights Watch have not only bolstered the neoliberal imagination, but have produced a specific arsenal of human rights that shapes social struggles in a way that weakens those who aim to advance a more egalitarian political horizon.

    Several years ago, Roth tried to justify Human Rights Watch’s approach, claiming that the issues it deals with are determined by its “methodology,” and that the “essence of that methodology […] is not the ability to mobilize people in the streets, to engage in litigation, to press for broad national plans, or to provide technical assistance. Rather, the core of our methodology is our ability to investigate, expose, and shame.” The hallmark of human rights work, in his view, is uncovering discrimination, while the unequal arrangement of the local and international economy leading to discrimination are beyond the organization’s purview. Not unlike the neoliberal thinkers discussed in Whyte’s book, Human Rights Watch limits its activism to formal equality, adopting a form of inquiry that ignores and ultimately disavows the structural context, which effectively undercuts forms of collective struggle.

    Returning to Rony Brauman and the creation of Liberté sans Frontières, toward the end of the book Whyte recounts how in a 2015 interview he understood things differently than he had in the mid-1980s. “I see myself and the small group that I brought together as a kind of symptom of the rise of neoliberalism […] We had the conviction that we were a kind of intellectual vanguard, but no,” he laughed, “we were just following the rising tendency.”

    Whyte suggests that this assessment is, if anything, too modest: rather than being a symptom, the humanitarians who founded Liberté sans Frontières explicitly mobilized the language of human rights in order to contest the vision of substantive equality that defined the Third Worldist project. Brauman and his organization benefited from the neo-colonial economic arrangements and, she notes,

    were not powerless companions of the rising neoliberals, but active, enthusiastic and influential fellow travellers. Their distinctive contribution was to pioneer a distinctly neoliberal human rights discourse, for which a competitive market order accompanied by a liberal institutional structure was truly the last utopia.

    The destructive legacy that Whyte so eloquently describes suggests that the convergence between neoliberals and rights practitioners has defanged human rights from any truly emancipatory potential. Formal rights without the redistribution of wealth and the democratization of economic power, as we have learned not only from the ongoing struggles of postcolonial states but also from the growing inequality in the Global North, simply do not lead to justice. So if the objectives of a utopian imagination include equitable distribution of resources and actual sovereignty of the people, we urgently need a new vocabulary of resistance and novel methods of struggle.

    https://lareviewofbooks.org/article/how-human-rights-were-defanged-from-any-truly-emancipatory-potentia
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