• Pas de mouchard au CCL Indymedia Lille -13/05/17
    https://lille.indymedia.org/spip.php?article30832

    À Martine Aubry, maire de Lille
    À Philippe Monloubou, président du directoire d’Enedis

    Madame, Monsieur,

    Nous avons bien reçu le mail des relations clients d’EDF du 25 avril 2017 indiquant que vous envisagez de changer le compteur électrique de notre local pour le remplacer par un mouchard du nom de Linky. Sans doute est-ce là une de ces bourdes qui font la poésie de la gestion algorithmique des banques de données. La gestion rationalisée et déshumanisée de l’existence dans laquelle vous nous empêtrez a encore quelques limites. De savoir que des gestionnaires de votre trempe sont aussi mal équipé.es, nous a un temps réjouit. Nous avons appris à nous méfier du progrès technicien qui, sous ses apparats dépolitisés et écologiques, s’impose et transforme le monde avec l’air anodin d’un changement de matériel. Malgré notre incrédulité à ce que vous osiez nous informer de la pose imminente d’un mouchard dans notre local, il nous semble important de vous rappeler quelques banalités.

    L’installation de mouchards dans le foyer de chaque individu est un projet politique détestable. L’espionnage des habitudes privées de chacun.e à des fins policières et commerciales, permis par votre gadget connecté nous révulse. Vous avez beau jeu de nous expliquer que cette modernisation de nos vieux compteurs n’est destinée qu’à la réduction de notre facture d’électricité et à l’effort national pour un capitalisme soutenable. Si une autre fin du monde est possible, ce sera bien sans nous. Nous tenons à vous signifier que nous ne participerons pas à la gestion de la catastrophe et ne croyons aucunement au pouvoir régulateur de l’État. L’existence de l’État est une condition du développement capitaliste, responsable de l’écocide en cours. L’édiction de normes encadrant le développement industriel n’est qu’une manière de museler les mécontentements dus aux ravages de celui-ci afin de permettre à la catastrophe d’advenir. En ce sens, peu importe les quelques garanties que vous pourriez concéder pour nous rassurer, nous avons appris qu’il vaut mieux parfois vivre contre son temps que de céder à la marche forcée de l’histoire que vous écrivez.

    Vous aurez beau nous montrer que vous maîtrisez la sécurité des données que vous collectez sur chacun.e d’entre nous. Nous savons qu’il y a toujours une âme détraquée pour s’atteler à toutes les ignominies que la technique permet. Et il n’est pas ici question de droite ou de gauche. Ce que vous nommez « effacement diffus » permettant de couper unilatéralement et à distance certains équipements électriques aurait fait pâlir d’envie n’importe quel technocrate soviétique.

    Nous refusons votre logique gestionnaire et, quand bien même notre facture se verrait réduite, nous ne sommes pas prêt.es à sacrifier notre vie et le peu de liberté qu’il nous reste pour quelques euros. Vous ne nous achèterez pas comme cela. Face à un flic, il est encore possible de refuser de parler. Lorsque vous menacez de transformer insidieusement nos prises électriques en espionnes, ce n’est plus le moment de nous interroger si il reste des innocent.es dans ce monde. Alors que le spectacle de la vie quotidienne s’expose instantanément sur les écrans et que de nombreux individus se font volontairement les auxiliaires des services de police, nous sommes encore archaïquement attaché.es à la liberté de pouvoir nous réunir à l’abri des regards indiscrets.

    Le Centre Culturel Libertaire n’est pas une habitation mais un lieu d’activité et d’organisation anarchiste. L’espionnage massif des individus est un projet abject et l’ampleur de votre projet inédite. L’installation d’un mouchard dans un local politique a toutefois un autre sens et s’inscrit dans une longue histoire. En effet, la surveillance de groupes subversifs aspirant à un monde libéré de l’emprise de la marchandise et de l’État n’a rien de nouveau. Nous connaissons nos ennemis et vous connaissez notre existence. Cependant, l’indiscrétion dont vous faites preuve en nous informant de la pose prochaine de ce dispositif de contrôle et de surveillance dans notre local nous laisse quelque peu pantois.es.

    Que nous soyons dépendant.es de vous pour avoir accès à l’électricité est une compromission que nous acceptons. Notre inscription dans la cité en est depuis longtemps tributaire. Tant bien que mal, nous nous accommodons de l’existence d’un compteur, cet instrument de mesure du travail nécessaire à fournir l’énergie que nous consommons. Nous consentons à envoyer régulièrement de l’argent à EDF en échange de la fourniture d’électricité. Veuillez bien croire que nous ne vous laisserons pas vous immiscer davantage dans nos activités.

    Seul un algorithme peut annoncer calmement et sans rire l’installation d’un mouchard dans un local anarchiste : vous n’espérez tout de même pas que nous allons accepter l’installation de celui-ci. Par la présente lettre, nous tenons cependant à vous signifier, au cas où votre cynisme dépasserait notre entendement, que nous sommes fermement déterminé.es à empêcher au moindre de vos sous-traitants d’avoir accès à notre compteur. Nous vous serions reconnaissant.es de bien vouloir les en avertir.

    Ni amitié ni salutation,
    Quelques membres du CCL,
    Lille, le 12 mai 2017

    Pour toute correspondance, écrire à :
    Centre Culturel Libertaire
    4, rue de Colmar
    59000 Lille

    #Lille #martine_aubry #philippe_monloubou #Enedis #EDF #linky #surveillance #mouchard #espionage #gaspillage #électricité #flicage #anarchiste #nationnal_libéralisme #CCL

  • Pour clore le quinquennat Hollande, une ultime victoire des lobbys contre... la réglementation du lobbying
    http://multinationales.org/Pour-clore-le-quinquennat-Hollande-une-ultime-victoire-des-lobbys-c

    C’est un ultime renoncement qui résume à lui seul bien des déceptions du quinquennat de François Hollande. Le décret d’application de la loi Sapin 2, adoptée l’automne dernier, sur la transparence et l’encadrement du lobbying a été publié dans les derniers jours précédant la passation de pouvoir. Il s’avère très en deçà des attentes de la société civile.

    Le décret d’application de la loi Sapin 2, publié au Journal officiel le 10 mai dernier, dans les derniers jours du quinquennat de François Hollande, valide la création d’un registre numérique des « représentants d’intérêts », autrement dit des lobbyistes. C’était l’une des mesures emblématiques de la loi Sapin 2, adoptée en novembre 2016.

    Le principe d’un tel registre était simple en théorie : obliger les lobbyistes à la transparence pour permettre à tout un chacun de savoir qui rencontre ou communique avec les décideurs politiques à quel moment, sur quels sujets, pour défendre quelles positions, pour le compte de quels clients, et avec quels moyens. En pratique, cependant, tout dépend des informations effectivement disponibles, de leur rythme de publication, de leur vérification, et des sanctions éventuelles contre ceux qui ne respecteraient pas leurs obligations. Et c’est bien là que le bât blesse. Le dispositif prévu pour mettre en œuvre la loi Sapin 2 - déjà elle-même limitée - a été considérablement allégé dans la version finale du décret d’application, malgré les avertissements de la société civile, ainsi que de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique elle-même, instance qui sera chargée de gérer le dispositif.

  • Prendre le ciel d’assaut Le Courrier - Lundi 15 mai 2017- Benito Perez
    https://www.lecourrier.ch/149419/prendre_le_ciel_d_assaut

    Il va falloir s’y habituer. Emmanuel Macron est depuis hier le huitième président de la Ve République française et son discours lénifiant, entre best-seller de développement personnel et langue de bois 2.0, est devenu la doctrine officielle de la patrie des Lumières. Triste époque.
    Pour son intronisation, dimanche, le patron de la République en marche (REM) n’a pas déçu, assénant que les Français, à travers lui, avaient choisi « l’esprit de conquête », sans préciser quels nouveaux territoires il ambitionnait d’assujettir.

    En revanche, depuis quelques jours, on connaît mieux ces « helpers », ces « CEO » et autres « startuppers » qui ont permis à l’ancien « managing director » de Rothschild et ministre de François Hollande de devenir supposément l’homme du « renouveau » (en tout cas de la langue française). Epluchant les documents dérobés par des pirates informatiques, Libération décrit dans son édition de vendredi la communauté agissante et fortunée qui a fabriqué de toutes pièces le phénomène Emmanuel Macron : cadres et patrons d’entreprises, financières et technologiques, sortis de l’ENA ou de HEC.

    Une France d’en haut mais aussi d’ailleurs, puisque les dons ont afflué de l’étranger, où les exilés fiscaux et les « expats » n’ont pas lésiné pour donner une forte impulsion à leur champion, comme l’a décrit Mediapart. Ces réseaux – habilement actionnés jusqu’à concurrence de 20 000 euros par tête de pipe pour ne pas outrepasser les limites légales – dessinent clairement la pyramide sociale incarnée par le nouveau chef de l’Etat : moins de 2% des donateurs ont contribué à près de la moitié du budget de campagne de M. Macron. Une aubaine financière à laquelle il faut encore ajouter l’emprunt personnel de 8 millions d’euros généreusement consenti malgré l’absence de patrimoine à mettre en gage.

    Bref : une fusée politique propulsée du haut 1 vers le bas et dont la conception hiérarchique du monde s’exprime assez naturellement dans son offensive actuelle sur l’Assemblée nationale. Ainsi, dans l’entreprise En Marche, les candidats à la députation sont « embauchés » directement par la cellule de recrutement d’Emmanuel Macron, sur CV, lettre de motivation puis entretien... Etrange démocratie, où l’exécutif compose librement sa future armée législative ! Seules exceptions à ces députés-employés : les transfuges des partis en place, notamment socialistes, cooptés en fonction de leur capacité à arracher des bouts d’appareil, à l’instar des affidés du parrain lyonnais Gérard Collomb.
    Le fait du Prince et la tambouille locale, voilà qui va très nettement révolutionner la façon de faire de la politique en France !

    Non contents d’instiller le poison de la gestion managériale et de la rentabilité aux services publics, les socio-libéraux à la sauce Macron ont donc trouvé moyen de privatiser la vie démocratique. Face à cette tentation autoritaire, rendue possible par la faillite du Parti socialiste, ce qu’il reste de la gauche française devra réagir rapidement, pour ne pas se laisser marginaliser. Surtout, elle devra suivre un chemin diamétralement opposé, tant dans ses objectifs politiques que dans sa future organisation, démocratique et participative. Une fusée propulsée d’en bas, pour « prendre le ciel d’assaut » 2 .

    • 1. Il faudrait encore ajouter la contribution des patrons de presse, détaillée par la journaliste Aude Lancelin : https://audelancelin.com/2017/04/20/emmanuel-macron-un-putsch-du-cac-40
    • 2. Expression de Karl Marx, reprise par le leader de Podemos, Pablo Iglesias.

    #emanuel_macron #nationnal_libéralisme #en_marche #ENA #HEC #gérard_collomb #prince #marquis #gestion #socio-libéraux #privatisation