• Darmanin : En matière d’immigration, notre main est ferme

    Au total, il y a 30 % d’#éloignements_forcés de plus que sous les deux quinquennats précédents. Dans le même temps, nous naturalisons 30 % de moins. Nous avons durci les conditions d’intégration et les entretiens d’assimilation.

    https://twitter.com/GDarmanin/status/1390583304378847232

    –-> les 3 tweet de Darmanin likés par #Macron

    –—

    Commentaire de François Gemenne :

    Un éloignement forcé, c’est toujours un échec. Qu’un ministre de l’Intérieur se félicite de cela, c’est comme si un ministre de l’Education se félicitait de l’augmentation du taux de redoublement, ou un ministre de la Justice de la hausse du nombre de prisonniers. Quelle misère.

    https://twitter.com/Gemenne/status/1391787516731273219

    #Darmanin #Gérard_Darmanin #France #expulsions #statistiques #chiffres #migrations #renvois #asile #réfugiés #machine_à_expulser #naturalisation #intégration #conditions_d'intégration #assimilation #titre_de_séjour #rhétorique #fermeté

    ping @isskein @karine4

  • La #naturalisation comme #dépolitisation de la pandémie - Perspectives Printanières, par @twoinou_
    https://perspectives-printanieres.info/index.php/2021/04/27/catastrophisme-pandemique

    Un premier principe d’une approche sanitaire raisonnée de la #pandémie réside dans la possibilité de reconnaître que l’expertise du conseil scientifique – et plus généralement du corps scientifique spécialisé (qui n’inclut pas que les médecins et épidémiologistes) – est vitale. Cette reconnaissance n’est pas possible en régime catastrophiste, car le virus est considéré comme inévitablement meurtrier, délégitimant le fait de tout faire pour sauver des vies. Le #catastrophisme pandémique est ainsi #criminel car il alimente l’idée que l’« empirisme zéro » invalide toutes les conclusions scientifiques immédiates en matière infectiologique ou épidémiologique62.
    Second principe : la raison sanitaire n’ancre pas dans la population l’idée d’une mise en balance des générations : les vulnérabilités de chacun·e à l’instant T sont reconnues et appréhendées. L’attention est ainsi portée sur la position sociale des personnes (genre, race, classe mais aussi handicap), plutôt que sur leur seul âge. Ce principe n’est d’ailleurs pas valable qu’en temps de pandémie, puisque la #vulnérabilité est une condition continue et non événementielle – dans cette optique, l’auteur de ces lignes vous invite à signer la pétition en cours pour la déconjugalisation de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH).
    Un troisième principe de raison sanitaire pour gérer la pandémie réside dans la maximisation des capacités hospitalières : celle-ci permet de faire disparaître le tri qu’est obligé de pratiquer le personnel médical lorsqu’il manque de lits. Maximiser les capacités des services de #santé permet aussi d’en réduire la surcharge, dont le poids des dispositifs managériaux sur le traitement des patients – la résorption de la nécessité managériale ne permet toutefois pas d’affirmer que les biais racistes du corps médical se réduiront, car ceux-ci ne résultent pas (ou pas seulement) d’une telle gestion des capacités de soin. Plus généralement, une raison sanitaire primant sur le nouveau #managérialisme hospitalier redonnerait aux services de santé leur destination publique essentielle.
    Le déploiement de moyens exceptionnels permettant d’anticiper la catastrophe constitue un quatrième principe63 de l’idée de raison sanitaire. L’ouverture des brevets vaccinaux pour les produire en masse, sans dépendre du bon vouloir de groupes industriels mettant en balance leurs intérêts économiques et la santé des populations64. Déployer de tels moyens exceptionnels face à la catastrophe, c’est refuser la stratégie catastrophiste d’attente et de réaction face aux impacts variés de la pandémie.

  • #Intersectionnalité : une #introduction (par #Eric_Fassin)

    Aujourd’hui, dans l’espace médiatico-politique, on attaque beaucoup l’intersectionnalité. Une fiche de poste a même été dépubliée sur le site du Ministère pour purger toute référence intersectionnelle. Dans le Manuel Indocile de Sciences Sociales (Copernic / La Découverte, 2019), avec Mara Viveros, nous avons publié une introduction à ce champ d’études. Pour ne pas laisser raconter n’importe quoi.

    « Les féministes intersectionnelles, en rupture avec l’universalisme, revendiquent de ne pas se limiter à la lutte contre le sexisme. »

    Marianne, « L’offensive des obsédés de la race, du sexe, du genre, de l’identité », 12 au 18 avril 2019

    Une médiatisation ambiguë

    En France, l’intersectionnalité vient d’entrer dans les magazines. Dans Le Point, L’Obs ou Marianne, on rencontre non seulement l’idée, mais aussi le mot, et même des références savantes. Les lesbiennes noires auraient-elles pris le pouvoir, jusque dans les rédactions ? En réalité si les médias en parlent, c’est surtout pour dénoncer la montée en puissance, dans l’université et plus largement dans la société, d’un féminisme dit « intersectionnel », accusé d’importer le « communautarisme à l’américaine ». On assiste en effet au recyclage des articles du début des années 1990 contre le « politiquement correct » : « On ne peut plus rien dire ! » C’est le monde à l’envers, paraît-il : l’homme blanc hétérosexuel subirait désormais la « tyrannie des minorités ».

    Faut-il le préciser ? Ce fantasme victimaire est démenti par l’expérience quotidienne. Pour se « rassurer », il n’y a qu’à regarder qui détient le pouvoir dans les médias et l’université, mais aussi dans l’économie ou la politique : les dominants d’hier ne sont pas les dominés d’aujourd’hui, et l’ordre ancien a encore de beaux jours devant lui. On fera plutôt l’hypothèse que cette réaction parfois virulente est le symptôme d’une inquiétude après la prise de conscience féministe de #MeToo, et les révélations sur le harcèlement sexiste, homophobe et raciste de la « Ligue du Lol » dans le petit monde des médias, et alors que les minorités raciales commencent (enfin) à se faire entendre dans l’espace public.

    Il en va des attaques actuelles contre l’intersectionnalité comme des campagnes contre la (supposée) « théorie du genre » au début des années 2010. La médiatisation assure une forme de publicité à un lexique qui, dès lors, n’est plus confiné à l’univers de la recherche. La polémique a ainsi fait entrevoir les analyses intersectionnelles à un public plus large, qu’articles et émissions se bousculent désormais pour informer… ou le plus souvent mettre en garde. Il n’empêche : même les tribunes indignées qui livrent des noms ou les dossiers scandalisés qui dressent des listes contribuent, à rebours de leurs intentions, à établir des bibliographies et à populariser des programmes universitaires. En retour, le milieu des sciences sociales lui-même, en France après beaucoup d’autres pays, a fini par s’intéresser à l’intersectionnalité – et pas seulement pour s’en inquiéter : ce concept voyageur est une invitation à reconnaître, avec la pluralité des logiques de domination, la complexité du monde social.

    Circulations internationales

    On parle d’intersectionnalité un peu partout dans le monde – non seulement en Amérique du Nord et en Europe, mais aussi en Amérique latine, en Afrique du Sud ou en Inde. Il est vrai que le mot vient des États-Unis : c’est #Kimberlé_Crenshaw qui l’utilise d’abord dans deux articles publiés dans des revues de droit au tournant des années 1990. Toutefois, la chose, c’est-à-dire la prise en compte des dominations multiples, n’a pas attendu le mot. Et il est vrai aussi que cette juriste afro-américaine s’inscrit dans la lignée d’un « #féminisme_noir » états-unien, qui dans les années 1980 met l’accent sur les aveuglements croisés du mouvement des droits civiques (au #genre) et du mouvement des femmes (à la #race).

    Cependant, ces questions sont parallèlement soulevées, à la frontière entre l’anglais et l’espagnol, par des féministes « #chicanas » (comme #Cherríe_Moraga et #Gloria_Anzaldúa), dans une subculture que nourrit l’immigration mexicaine aux États-Unis ou même, dès les années 1960, au Brésil, au sein du Parti communiste ; des féministes brésiliennes (telles #Thereza_Santos, #Lélia_Gonzalez et #Sueli_Carneiro) développent aussi leurs analyses sur la triade « race-classe-genre ». Bref, la démarche intersectionnelle n’a pas attendu le mot intersectionnalité ; elle n’a pas une origine exclusivement états-unienne ; et nulle n’en a le monopole : ce n’est pas une « marque déposée ». Il faut donc toujours comprendre l’intersectionnalité en fonction des lieux et des moments où elle résonne.

    En #France, c’est au milieu des années 2000 qu’on commence à parler d’intersectionnalité ; et c’est d’abord au sein des #études_de_genre. Pourquoi ? Un premier contexte, c’est la visibilité nouvelle de la « #question_raciale » au sein même de la « #question_sociale », avec les émeutes ou révoltes urbaines de 2005 : l’analyse en termes de classe n’était manifestement plus suffisante ; on commence alors à le comprendre, pour les sciences sociales, se vouloir aveugle à la couleur dans une société qu’elle obsède revient à s’aveugler au #racisme. Un second contexte a joué un rôle plus immédiat encore : 2004, c’est la loi sur les signes religieux à l’école. La question du « #voile_islamique » divise les féministes : la frontière entre « eux » et « nous » passe désormais, en priorité, par « elles ». Autrement dit, la différence de culture (en l’occurrence religieuse) devient une question de genre. L’intersectionnalité permet de parler de ces logiques multiples. Importer le concept revient à le traduire dans un contexte différent : en France, ce n’est plus, comme aux États-Unis, l’invisibilité des #femmes_noires à l’intersection entre féminisme et droits civiques ; c’est plutôt l’hypervisibilité des #femmes_voilées, au croisement entre #antisexisme et #antiracisme.

    Circulations interdisciplinaires

    La traduction d’une langue à une autre, et d’un contexte états-unien au français, fait apparaître une deuxième différence. Kimberlé Crenshaw est juriste ; sa réflexion porte sur les outils du #droit qu’elle utilise pour lutter contre la #discrimination. Or aux États-Unis, le droit identifie des catégories « suspectes » : le sexe et la race. Dans les pratiques sociales, leur utilisation, implicite ou explicite, est soumise à un examen « strict » pour lutter contre la discrimination. Cependant, on passe inévitablement de la catégorie conceptuelle au groupe social. En effet, l’intersectionnalité s’emploie à montrer que, non seulement une femme peut être discriminée en tant que femme, et un Noir en tant que Noir, mais aussi une femme noire en tant que telle. C’est donc seulement pour autant qu’elle est supposée relever d’un groupe sexuel ou racial que le droit peut reconnaître une personne victime d’un traitement discriminatoire en raison de son sexe ou de sa race. Toutefois, dans son principe, cette démarche juridique n’a rien d’identitaire : comme toujours pour les discriminations, le point de départ, c’est le traitement subi. Il serait donc absurde de reprendre ici les clichés français sur le « communautarisme américain » : l’intersectionnalité vise au contraire à lutter contre l’#assignation discriminatoire à un groupe (femmes, Noirs, ou autre).

    En France, la logique est toute différente, dès lors que l’intersectionnalité est d’abord arrivée, via les études de genre, dans le champ des sciences sociales. La conséquence de cette translation disciplinaire, c’est qu’on n’a généralement pas affaire à des groupes. La sociologie s’intéresse davantage à des propriétés, qui peuvent fonctionner comme des variables. Bien sûr, on n’oublie pas la logique antidiscriminatoire pour autant : toutes choses égales par ailleurs (en l’occurrence dans une même classe sociale), on n’a pas le même salaire selon qu’on est blanc ou pas, ou la même retraite si l’on est homme ou femme. Il n’est donc pas ou plus possible de renvoyer toutes les explications à une détermination en dernière instance : toutes les #inégalités ne sont pas solubles dans la classe. C’est évident pour les femmes, qui appartiennent à toutes les classes ; mais on l’oublie parfois pour les personnes dites « non blanches », tant elles sont surreprésentées dans les classes populaires – mais n’est-ce pas justement, pour une part, l’effet de leur origine supposée ? Bien entendu, cela ne veut pas dire, à l’inverse, que la classe serait soluble dans une autre forme de #domination. En réalité, cela signifie simplement que les logiques peuvent se combiner.

    L’intérêt scientifique (et politique) pour l’intersectionnalité est donc le signe d’une exigence de #complexité : il ne suffit pas d’analyser la classe pour en avoir fini avec les logiques de domination. C’est bien pourquoi les féministes n’ont pas attendu le concept d’intersectionnalité, ni sa traduction française, pour critiquer les explications monocausales. En France, par exemple, face au #marxisme, le #féminisme_matérialiste rejette de longue date cette logique, plus politique que scientifique, de l’« ennemi principal » (de classe), qui amène à occulter les autres formes de domination. En 1978, #Danièle_Kergoat interrogeait ainsi la neutralisation qui, effaçant l’inégalité entre les sexes, pose implicitement un signe d’égalité entre « ouvrières » et « ouvriers » : « La #sociologie_du_travail parle toujours des “#ouvriers” ou de la “#classe_ouvrière” sans faire aucune référence au #sexe des acteurs sociaux. Tout se passe comme si la place dans la production était un élément unificateur tel que faire partie de la classe ouvrière renvoyait à une série de comportements et d’attitudes relativement univoques (et cela, il faut le noter, est tout aussi vrai pour les sociologues se réclamant du #marxisme que pour les autres. »

    Or, ce n’est évidemment pas le cas. Contre cette simplification, qui a pour effet d’invisibiliser les ouvrières, la sociologue féministe ne se contente pas d’ajouter une propriété sociale, le sexe, à la classe ; elle montre plus profondément ce qu’elle appelle leur #consubstantialité. On n’est pas d’un côté « ouvrier » et de l’autre « femme » ; être une #ouvrière, ce n’est pas la même chose qu’ouvrier – et c’est aussi différent d’être une bourgeoise. On pourrait dire de même : être une femme blanche ou noire, un garçon arabe ou pas, mais encore un gay de banlieue ou de centre-ville, ce n’est vraiment pas pareil !

    Classe et race

    Dans un essai sur le poids de l’#assignation_raciale dans l’expérience sociale, le philosophe #Cornel_West a raconté combien les taxis à New York refusaient de s’arrêter pour lui : il est noir. Son costume trois-pièces n’y fait rien (ni la couleur du chauffeur, d’ailleurs) : la classe n’efface pas la race – ou pour le dire plus précisément, le #privilège_de_classe ne suffit pas à abolir le stigmate de race. Au Brésil, comme l’a montré #Lélia_Gonzalez, pour une femme noire de classe moyenne, il ne suffit pas d’être « bien habillée » et « bien élevée » : les concierges continuent de leur imposer l’entrée de service, conformément aux consignes de patrons blancs, qui n’ont d’yeux que pour elles lors du carnaval… En France, un documentaire intitulé #Trop_noire_pour_être_française part d’une même prise de conscience : la réalisatrice #Isabelle_Boni-Claverie appartient à la grande bourgeoisie ; pourtant, exposée aux discriminations, elle aussi a fini par être rattrapée par sa couleur.

    C’est tout l’intérêt d’étudier les classes moyennes (ou supérieures) de couleur. Premièrement, on voit mieux la logique propre de #racialisation, sans la rabattre aussitôt sur la classe. C’est justement parce que l’expérience de la bourgeoisie ne renvoie pas aux clichés habituels qui dissolvent les minorités dans les classes populaires. Deuxièmement, on est ainsi amené à repenser la classe : trop souvent, on réduit en effet ce concept à la réalité empirique des classes populaires – alors qu’il s’agit d’une logique théorique de #classement qui opère à tous les niveaux de la société. Troisièmement, ce sont souvent ces couches éduquées qui jouent un rôle important dans la constitution d’identités politiques minoritaires : les porte-parole ne proviennent que rarement des classes populaires, ou du moins sont plus favorisés culturellement.

    L’articulation entre classe et race se joue par exemple autour du concept de #blanchité. Le terme est récent en français : c’est la traduction de l’anglais #whiteness, soit un champ d’études constitué non pas tant autour d’un groupe social empirique (les Blancs) que d’un questionnement théorique sur une #identification (la blanchité). Il ne s’agit donc pas de réifier les catégories majoritaires (non plus, évidemment, que minoritaires) ; au contraire, les études sur la blanchité montrent bien, pour reprendre un titre célèbre, « comment les Irlandais sont devenus blancs » : c’est le rappel que la « race » ne doit rien à la #biologie, mais tout aux #rapports_de_pouvoir qu’elle cristallise dans des contextes historiques. À nouveau se pose toutefois la question : la blanchité est-elle réservée aux Blancs pauvres, condamnés à s’identifier en tant que tels faute d’autres ressources ? On parle ainsi de « #salaire_de_la_blanchité » : le #privilège de ceux qui n’en ont pas… Ou bien ne convient-il pas de l’appréhender, non seulement comme une compensation, mais aussi et surtout comme un langage de pouvoir – y compris, bien sûr, chez les dominants ?

    En particulier, si le regard « orientaliste » exotise l’autre et l’érotise en même temps, la #sexualisation n’est pas réservée aux populations noires ou arabes (en France), ou afro-américaines et hispaniques (comme aux États-Unis), bref racisées. En miroir, la #blanchité_sexuelle est une manière, pour les classes moyennes ou supérieures blanches, de s’affirmer « normales », donc de fixer la #norme, en particulier dans les projets d’#identité_nationale. Certes, depuis le monde colonial au moins, les minorités raciales sont toujours (indifféremment ou alternativement) hypo- – ou hyper- –sexualisées : pas assez ou bien trop, mais jamais comme il faut. Mais qu’en est-il des majoritaires ? Ils se contentent d’incarner la norme – soit d’ériger leurs pratiques et leurs représentations en normes ou pratiques légitimes. C’est bien pourquoi la blanchité peut être mobilisée dans des discours politiques, par exemple des chefs d’État (de la Colombie d’Álvaro Uribe aux États-Unis de Donald Trump), le plus souvent pour rappeler à l’ordre les minorités indociles. La « question sociale » n’a donc pas cédé la place à la « question raciale » ; mais la première ne peut plus servir à masquer la seconde. Au contraire, une « question » aide à repenser l’autre.

    Les #contrôles_au_faciès

    Regardons maintenant les contrôles policiers « au faciès », c’est-à-dire fondés sur l’#apparence. Une enquête quantitative du défenseur des droits, institution républicaine qui est chargée de défendre les citoyens face aux abus de l’État, a récemment démontré qu’il touche inégalement, non seulement selon les quartiers (les classes populaires), mais aussi en fonction de l’âge (les jeunes) et de l’apparence (les Arabes et les Noirs), et enfin du sexe (les garçons plus que les filles). Le résultat, c’est bien ce qu’on peut appeler « intersectionnalité ». Cependant, on voit ici que le croisement des logiques discriminatoires ne se résume pas à un cumul des handicaps : le sexe masculin fonctionne ici comme un #stigmate plutôt qu’un privilège. L’intersectionnalité est bien synonyme de complexité.

    « Les jeunes de dix-huit-vingt-cinq ans déclarent ainsi sept fois plus de contrôles que l’ensemble de la population, et les hommes perçus comme noirs ou arabes apparaissent cinq fois plus concernés par des contrôles fréquents (c’est-à-dire plus de cinq fois dans les cinq dernières années). Si l’on combine ces deux critères, 80 % des personnes correspondant au profil de “jeune homme perçu comme noir ou arabe” déclarent avoir été contrôlées dans les cinq dernières années (contre 16 % pour le reste des enquêté.e.s). Par rapport à l’ensemble de la population, et toutes choses égales par ailleurs, ces profils ont ainsi une probabilité vingt fois plus élevée que les autres d’être contrôlés. »

    Répétons-le : il n’y a rien d’identitaire dans cette démarche. D’ailleurs, la formulation du défenseur des droits dissipe toute ambiguïté : « perçus comme noirs ou arabes ». Autrement dit, c’est l’origine réelle ou supposée qui est en jeu. On peut être victime d’antisémitisme sans être juif – en raison d’un trait physique, d’un patronyme, ou même d’opinions politiques. Pour peu qu’on porte un prénom lié à l’islam, ou même qu’on ait l’air « d’origine maghrébine », musulman ou pas, on risque de subir l’#islamophobie. L’#homophobie frappe surtout les homosexuels, et plus largement les minorités sexuelles ; toutefois, un garçon réputé efféminé pourra y être confronté, quelle que soit sa sexualité.

    Et c’est d’ailleurs selon la même logique qu’en France l’État a pu justifier les contrôles au faciès. Condamné en 2015 pour « faute lourde », il a fait appel ; sans remettre en cause les faits établis, l’État explique que la législation sur les étrangers suppose de contrôler « les personnes d’#apparence_étrangère », voire « la seule population dont il apparaît qu’elle peut être étrangère ». Traiter des individus en raison de leur apparence, supposée renvoyer à une origine, à une nationalité, voire à l’irrégularité du séjour, c’est alimenter la confusion en racialisant la nationalité. On le comprend ainsi : être, c’est être perçu ; l’#identité n’existe pas indépendamment du regard des autres.

    L’exemple des contrôles au faciès est important, non seulement pour celles et ceux qui les subissent, bien sûr, mais aussi pour la société tout entière : ils contribuent à la constitution d’identités fondées sur l’expérience commune de la discrimination. Les personnes racisées sont celles dont la #subjectivité se constitue dans ces incidents à répétition, qui finissent par tracer des frontières entre les #expériences minoritaires et majoritaires. Mais l’enjeu est aussi théorique : on voit ici que l’identité n’est pas première ; elle est la conséquence de #pratiques_sociales de #racialisation – y compris de pratiques d’État. Le racisme ne se réduit pas à l’#intention : le racisme en effet est défini par ses résultats – et d’abord sur les personnes concernées, assignées à la différence par la discrimination.

    Le mot race

    Les logiques de domination sont plurielles : il y a non seulement la classe, mais aussi le sexe et la race, ainsi que l’#âge ou le #handicap. Dans leur enchevêtrement, il est à chaque fois question, non pas seulement d’#inégalités, mais aussi de la #naturalisation de ces hiérarchies marquées dans les corps. Reste que c’est surtout l’articulation du sexe ou de la classe avec la race qui est au cœur des débats actuels sur l’intersectionnalité. Et l’on retrouve ici une singularité nationale : d’après l’ONU, les deux tiers des pays incluent dans leur recensement des questions sur la race, l’#ethnicité ou l’#origine_nationale. En France, il n’en est pas question – ce qui complique l’établissement de #statistiques « ethno-raciales » utilisées dans d’autre pays pour analyser les discriminations.

    Mais il y a plus : c’est seulement en France que, pour lutter contre le racisme, on se mobilise régulièrement en vue de supprimer le mot race de la Constitution ; il n’y apparaît pourtant, depuis son préambule de 1946 rédigé en réaction au nazisme, que pour énoncer un principe antiraciste : « sans distinction de race ». C’est aujourd’hui une bataille qui divise selon qu’on se réclame d’un antiracisme dit « universaliste » ou « politique » : alors que le premier rejette le mot race, jugé indissociable du racisme, le second s’en empare comme d’une arme contre la #racialisation de la société. Ce qui se joue là, c’est la définition du racisme, selon qu’on met l’accent sur sa version idéologique (qui suppose l’intention, et passe par le mot), ou au contraire structurelle (que l’on mesure à ses effets, et qui impose de nommer la chose).

    La bataille n’est pas cantonnée au champ politique ; elle s’étend au champ scientifique. Le racisme savant parlait naguère des races (au pluriel), soit une manière de mettre la science au service d’un #ordre_racial, comme dans le monde colonial. Dans la recherche antiraciste, il est aujourd’hui question de la race (au singulier) : non pas l’inventaire des populations, sur un critère biologique ou même culturel, mais l’analyse critique d’un mécanisme social qui assigne des individus à des groupes, et ces groupes à des positions hiérarchisées en raison de leur origine, de leur apparence, de leur religion, etc. Il n’est donc pas question de revenir aux élucubrations racistes sur les Aryens ou les Sémites ; en revanche, parler de la race, c’est se donner un vocabulaire pour voir ce qu’on ne veut pas voir : la #discrimination_raciste est aussi une #assignation_raciale. S’aveugler à la race ne revient-il pas à s’aveugler au racisme ?

    Il ne faut donc pas s’y tromper : pour les sciences sociales actuelles, la race n’est pas un fait empirique ; c’est un concept qui permet de nommer le traitement inégal réservé à des individus et des groupes ainsi constitués comme différents. La réalité de la race n’est donc ni biologique ni culturelle ; elle est sociale, en ce qu’elle est définie par les effets de ces traitements, soit la racialisation de la société tout entière traversée par la logique raciale. On revient ici aux analyses classiques d’une féministe matérialiste, #Colette_Guillaumin : « C’est très exactement la réalité de la “race”. Cela n’existe pas. Cela pourtant produit des morts. [...] Non, la race n’existe pas. Si, la race existe. Non, certes, elle n’est pas ce qu’on dit qu’elle est, mais elle est néanmoins la plus tangible, réelle, brutale, des réalités. »

    Morale de l’histoire

    A-t-on raison de s’inquiéter d’un recul de l’#universalisme en France ? Les logiques identitaires sont-elles en train de gagner du terrain ? Sans nul doute : c’est bien ce qu’entraîne la racialisation de notre société. Encore ne faut-il pas confondre les causes et les effets, ni d’ailleurs le poison et l’antidote. En premier lieu, c’est l’#extrême_droite qui revendique explicitement le label identitaire : des États-Unis de Donald Trump au Brésil de Jair Bolsonaro, on assiste à la revanche de la #masculinité_blanche contre les #minorités_raciales et sexuelles. Ne nous y trompons pas : celles-ci sont donc les victimes, et non pas les coupables, de ce retour de bâton (ou backlash) qui vise à les remettre à leur place (dominée).

    Deuxièmement, la #ségrégation_raciale que l’on peut aisément constater dans l’espace en prenant les transports en commun entre Paris et ses banlieues n’est pas le résultat d’un #communautarisme minoritaire. Pour le comprendre, il convient au contraire de prendre en compte un double phénomène : d’une part, la logique sociale que décrit l’expression #White_flight (les Blancs qui désertent les quartiers où sont reléguées les minorités raciales, anticipant sur la ségrégation que leurs choix individuels accélèrent…) ; d’autre part, les #politiques_publiques de la ville dont le terme #apartheid résume le résultat. Le #multiculturalisme_d’Etat, en Colombie, dessinerait une tout autre logique : les politiques publiques visent explicitement des identités culturelles au nom de la « #diversité », dont les mouvements sociaux peuvent s’emparer.

    Troisièmement, se battre pour l’#égalité, et donc contre les discriminations, ce n’est pas renoncer à l’universalisme ; bien au contraire, c’est rejeter le #communautarisme_majoritaire. L’intersectionnalité n’est donc pas responsable au premier chef d’une #fragmentation_identitaire – pas davantage qu’une sociologie qui analyse les inégalités socio-économiques n’est la cause première de la lutte des classes. Pour les #sciences_sociales, c’est simplement se donner les outils nécessaires pour comprendre un monde traversé d’#inégalités multiples.

    Quatrièmement, ce sont les #discours_publics qui opposent d’ordinaire la classe à la race (ou les ouvriers, présumés blancs, aux minorités raciales, comme si celles-ci n’appartenaient pas le plus souvent aux classes populaires), ou encore, comme l’avait bien montré #Christine_Delphy, l’#antisexisme à l’antiracisme (comme si les femmes de couleur n’étaient pas concernées par les deux). L’expérience de l’intersectionnalité, c’est au contraire, pour chaque personne, quels que soient son sexe, sa classe et sa couleur de peau, l’imbrication de propriétés qui finissent par définir, en effet, des #identités_complexes (plutôt que fragmentées) ; et c’est cela que les sciences sociales s’emploient aujourd’hui à appréhender.

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    Ce texte écrit avec #Mara_Viveros_Vigoya, et publié en 2019 dans le Manuel indocile de sciences sociales (Fondation Copernic / La Découverte), peut être téléchargé ici : https://static.mediapart.fr/files/2021/03/07/manuel-indocile-intersectionnalite.pdf

    À lire :

    Kimberlé Crenshaw, « Cartographies des marges : intersectionnalité, politique de l’identité et violences contre les femmes de couleur » Cahiers du Genre, n° 39, février 2005, p. 51-82

    Défenseur des droits, Enquête sur l’accès aux droits, Relations police – population : le cas des contrôles d’identité, vol. 1, janvier 2017

    Christine Delphy, « Antisexisme ou antiracisme ? Un faux dilemme », Nouvelles Questions Féministes, vol. 25, janvier 2006, p. 59-83

    Elsa Dorlin, La Matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la nation française, La Découverte, Paris, 2006

    Elsa Dorlin, Sexe, race, classe. Pour une épistémologie de la domination, Presses universitaires de France, Paris, 2009

    Didier Fassin et Éric Fassin (dir.), De la question sociale à la question raciale ? Représenter la société française, La Découverte, Paris, 2009 [première édition : 2006]

    Éric Fassin (dir.), « Les langages de l’intersectionnalité », Raisons politiques, n° 58, mai 2015

    Éric Fassin, « Le mot race – 1. Cela existe. 2. Le mot et la chose », AOC, 10 au 11 avril 2019

    Nacira Guénif-Souilamas et Éric Macé, Les féministes et le garçon arabe, L’Aube, Paris, 2004

    Colette Guillaumin, « “Je sais bien mais quand même” ou les avatars de la notion de race », Le Genre humain, 1981, n° 1, p. 55-64

    Danièle Kergoat, « Ouvriers = ouvrières ? », Se battre, disent-elles…, La Dispute, Paris, 2012, p. 9-62

    Abdellali Hajjat et Silyane Larcher (dir.), « Intersectionnalité », Mouvements, 12 février 2019

    Mara Viveros Vigoya, Les Couleurs de la masculinité. Expériences intersectionnelles et pratiques de pouvoir en Amérique latine, La Découverte, Paris, 2018

    https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/050321/intersectionnalite-une-introduction#at_medium=custom7&at_campaign=10

    #définition #invisibilisation #antiracisme_universaliste #antiracisme_politique #racisme_structurel

    voir aussi ce fil de discussion sur l’intersectionnalité, avec pas mal de #ressources_pédagogiques :
    https://seenthis.net/messages/796554

  • France : naturalisation des étrangers en « première ligne », une mesure « anecdotique » - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/29446/france-naturalisation-des-etrangers-en-premiere-ligne-une-mesure-anecd

    La ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa annonçait en septembre une circulaire visant à « accélérer » et « faciliter » la naturalisation française des ressortissants étrangers en « première ligne » lors de la crise sanitaire. Quatre mois après cette annonce, l’association la Cimade dénonce une mesure « anecdotique », qui exclut les travailleurs sans-papiers."Les étrangers qui ont travaillé en première ligne pendant le confinement seront naturalisés plus vite en reconnaissance de leur engagement". Mi-septembre, la ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa annonçait sur sa page Twitter la publication d’une circulaire demandant aux préfets « d’accélérer » et « faciliter » la naturalisation française des ressortissants étrangers en « première ligne » lors de la crise sanitaire.
    Dix-sept secteurs d’activité sont visés par le gouvernement comme celui de l’aide à domicile, de l’entretien, de l’agriculture, de l’éducation, de la santé...
    Presque quatre mois après cette annonce, où en est-on réellement ?
    700 personnes ont obtenu la nationalité française
    Si l’association la Cimade a reconnu, lundi 4 janvier, une « mesure positive pour ceux qui en bénéficient », elle l’estime néanmoins « anecdotique ». « C’est très bien que certaines personnes soient régularisées mais en termes d’effets réels sur l’accès au droit des étrangers, l’impact est très marginal », note Lise Faron, responsable des questions de droit au séjour à la Cimade, jointe par InfoMigrants.
    Le 22 décembre, soit trois mois après cette annonce, le cabinet de Marlène Schiappa indiquait le dépôt en préfecture de près de 3 000 dossiers. « À ce jour, 74 personnes ont acquis la nationalité française et 693 sont en passe de l’obtenir », précisait le communiqué. Une goutte d’eau si l’on compare ce nombre à celui des 50 000 naturalisations acquises chaque année par la procédure classique. Sans compter que pour les étrangers en situation régulière, qui auront le privilège de bénéficier de cette mesure, il faudra s’armer de patience. Dans les préfectures, les rendez-vous pour déposer un dossier de naturalisation sont à un niveau de saturation record. Il est tout simplement impossible d’effectuer la démarche dans plusieurs administrations de France. « On est dans une situation inédite de fermeture quasi complète de certaines préfectures », alerte Lise Faron. « Il y a des personnes qui passent des nuits entières à tenter d’obtenir un rendez-vous et ça peut durer des semaines, voire des mois ».
    Déçus par cette mesure, les acteurs associatifs espéraient plus. La directive concerne uniquement les étrangers en situation régulière en France, car porteurs d’un titre de séjour. Les quelque 350 000 sans-papiers qui vivent dans l’Hexagone sont donc totalement exclus de la circulaire. « Pourtant l’énorme besoin réside dans la question de la régularisation de cette population », insiste Lise Faron.Depuis le début de la crise sanitaire, de plus en plus de voix se sont élevées pour demander la régularisation des travailleurs sans-papiers, également en première ligne. « La majorité travaille dans des emplois dits d’utilité sociale essentielle comme le nettoyage des locaux, les services de livraison, le tri des déchets ou encore le domaine de l’agriculture », expliquait en juin à InfoMigrants Marilyne Poulain de la CGT.
    D’un autre côté, de nombreux travailleurs sans-papiers employés dans l’hôtellerie ou la restauration ont perdu leur emploi et n’ont pas pu bénéficier des aides de l’État, comme le chômage partiel.
    « Régulariser les sans-papiers reviendrait à reconnaitre qu’ils participent au bon fonctionnement de la société française. Or, le gouvernement préfère afficher sa politique de fermeté et de dissuasion », analyse encore Lise Faron qui déplore par ailleurs que « la naturalisation soit brandie comme une récompense »."À l’instar de Mamoudou Gassama, de Lassana Bathily ou des travailleurs en première ligne, on considère la naturalisation comme une faveur, alors que c’est un droit", rappelle-t-elle. « Il faut sortir de cette vision méritocratique de l’accès à la nationalité française ».

    #Covid-19#migrant#migration#france#sante#politiquemigratoire#regularisation#naturalisation#travailleurpremiereligne

  • « En première ligne » durant la pandémie de Covid-19, près de 700 travailleurs étrangers vont être naturalisés
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/12/23/en-premiere-ligne-durant-la-pandemie-de-covid-19-pres-de-700-travailleurs-et

    « Professionnels de santé, femmes de ménage, gardes d’enfants, caissiers… Ils ont prouvé leur attachement à la nation ; c’est désormais à la République de faire un pas vers eux ». Près de 700 travailleurs étrangers qui ont été en « première ligne » durant l’épidémie de coronavirus et ont « montré leur attachement à la nation » vont être naturalisés français, a annoncé mardi 22 décembre le cabinet de Marlène Schiappa, ministre déléguée à la citoyenneté. Mi-septembre, Mme Schiappa avait donné instruction aux préfets d’« accélérer » et de « faciliter » cet accès à la nationalité française pour les personnes qui avaient « contribué activement » à la lutte contre le Covid-19. Les préfets peuvent utiliser la notion de « services rendus importants » pour réduire à deux ans au lieu de cinq la durée minimale de résidence en France exigée. En trois mois, 2 890 demandes ont été enregistrées par les préfectures pour ce motif. A l’heure actuelle, 693 personnes sont « en passe d’obtenir [la naturalisation] et 74 l’ont déjà obtenue », a détaillé dans un communiqué le cabinet de Mme Schiappa, chargé notamment des questions liées aux réfugiés et à l’intégration. En 2019, plus de 112 000 personnes ont acquis la nationalité française, dont plus de 48 000 par naturalisation – une procédure en net recul (-10 %) par rapport à 2018.

    #Covid-19#migrant#migration#france#sante#travailleurmigrant#enpremiereligne#naturalisation#nation#crisesanitaire

  • Covid News: Live Updates - The New York Times
    https://www.nytimes.com/live/2020/12/22/world/covid-19-coronavirus

    Some 700 foreigners in France who were exposed to the coronavirus through their work will be put on a fast track for naturalization as a reward for their commitment during the pandemic, the junior minister for citizenship said on Tuesday.The beneficiaries, whom the ministry called “frontline foreign workers in the face of the health crisis,” include health care workers, child care professionals, housekeepers and cashiers.“They have proved their commitment to the nation,” a statement from the office of the minister, Marlène Schiappa, said. “It is now up to the Republic to take a step toward them.”In September, the French Interior Ministry asked regional officials to identify foreign workers who had “actively contributed” to the fight against the coronavirus and facilitate their application for fast naturalization.“Some foreigners swung into action and were particularly exposed in the fight against the Covid-19 pandemic,” Ms. Schiappa wrote in a letter sent in September to regional authorities. “They actively participated in the national effort, with dedication and courage.”More than 70 applicants have since then obtained citizenship and 693 more are in the final stage of the process, Ms. Schiappa’s office said in the statement on Tuesday. The authorities have also been ordered to reduce the residency period in France required to obtain citizenship to two years from the usual five in the case of “great services rendered.

    #Covid-19#migrant#migration#sante#france#naturalisation#crisesanitaire#politique#nation

  • « Le gouvernement nous a oubliés » : des milliers de sans-papiers manifestent en France
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/12/18/le-gouvernement-nous-a-oublies-des-milliers-de-sans-papiers-manifestent-en-f

    A l’occasion de la journée internationale des migrants, vendredi 18 décembre, des milliers de sans-papiers ont manifesté en France pour réclamer leur régularisation, mettant en avant la situation des clandestins fragilisés par la crise sanitaire. Après celles de mai, juin et octobre, qui avaient réuni des milliers de personnes, cette quatrième journée de mobilisation a eu lieu dans une cinquantaine de villes, dont Bordeaux, Marseille ou Strasbourg. A Paris, plus d’un millier de personnes, essentiellement originaires d’Afrique, ont défilé calmement entre 18 h 30 et 20 heures dans le centre de la capitale, encadrées par un important dispositif policier. « Sans-papiers en danger », « L’effort national, c’est nous », proclamaient notamment leurs banderoles, éclairées par des flambeaux allumés en mémoire des migrants morts en exil.
    Lire aussi le reportage : Vingt-quatre heures avec des travailleurs sans papiers, les « premiers de corvée »

    « On est là pour tous les sans-papiers de France. Pendant le Covid, c’est nous qui faisons tout le travail, qui avons nettoyé les hôpitaux, pendant que ceux qui ont le chômage partiel sont bien au chaud à la maison. Le gouvernement nous a oubliés », a déploré auprès de l’Agence France-Presse (AFP) Siby Ahamada, membre du collectif des sans-papiers de Montreuil.

    Kanouté, un Malien de 25 ans, explique qu’il cumule deux emplois : l’un à la plonge dans un restaurant du 8e arrondissement, sans être déclaré ; l’autre comme livreur à vélo, qu’il effectue en utilisant l’identité de quelqu’un d’autre. « On me donne un compte et je roule toute la nuit, et à la fin le mec me donne quelques euros. Pendant le confinement, on ne s’est pas arrêtés », explique-t-il, ajoutant : « Sans papiers, on ne peut pas vraiment démarrer notre vie » en France.« Comme on n’a pas de papiers, les patrons profitent de nous, et quand ils veulent ils ne nous payent pas », explique un autre Malien, Lassana, 50 ans, qui vit clandestinement en France depuis dix-neuf ans et travaille dans le bâtiment « une semaine par ci, un jour par là, parfois juste pour 40 euros ». « On est là depuis longtemps, mais notre vie est bloquée. » « Le sentiment d’injustice est tel pour ces gens, qui sont dans les métiers essentiels, que ce déni de droit est insupportable », a souligné Fernanda Marrucchelli, de la Fédération des associations de solidarité avec tous les immigrés (Fasti).
    La préfecture de police de Paris avait interdit une partie du défilé – l’arrivée du cortège devant la mairie – au motif de crainte de troubles à l’heure du couvre-feu anti-Covid-19 instauré à partir de 20 heures, dans ces quartiers très commerçants bondés à l’approche des fêtes de fin d’année.
    Les organisateurs avaient au départ laissé entendre qu’un nouveau campement pourrait malgré tout être constitué devant l’Hôtel de Ville à la fin de la manifestation, trois semaines après le démantèlement musclé par les forces de l’ordre de tentes de migrants installées place de la République, lequel avait suscité une vive émotion. Ils se sont finalement ravisés face au dispositif policier massif déployé sur place, appelant à la dispersion « pour ne pas mettre les gens en danger ». « L’indignation née place de la République, c’est quoi le résultat ? Les migrants sont toujours à la rue. Les indignations, c’est bien, nous, ce qu’on veut, ce sont des actes », a dénoncé Denis Godard, un des organisateurs de cette Marche des solidarités à l’appel de plus de 200 collectifs.
    Les sans-papiers espèrent, par cette nouvelle journée de mobilisation, être mieux écoutés que lors des manifestations d’octobre, organisées au lendemain de l’assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty par un réfugié d’origine tchétchène converti aux thèses djihadistes. Au cours de ces derniers mois, le dossier n’est pas resté au point mort : le gouvernement a donné à la mi-septembre instruction aux préfets de faciliter la naturalisation française des ressortissants étrangers mobilisés en première ligne durant l’épidémie. Au début de novembre, l’entourage de la ministre déléguée à la citoyenneté, Marlène Schiappa, a fait savoir qu’une première série de 334 naturalisations était en cours. Une goutte d’eau, ont aussitôt jugé les associations, qui estiment que les naturalisations, réservées par définition aux étrangers en situation régulière, ne sont qu’une infime partie de l’équation. Le nombre de sans-papiers en France est estimé entre 300 000 et 600 000.

    #Covid-19#migrant#migration#france#sante#pandemie#travailleuressentiel#travailleeurmigrant#naturalisation#economie

  • Un futur incertain attend les migrants extra-européens en Suisse

    Terre d’immigration depuis des décennies, la Suisse ne fait pourtant pas figure de bon élève en matière d’intégration. Elle se classe toujours parmi les pays d’Europe qui font le moins d’efforts pour offrir une #stabilité à #long_terme aux immigrés non européens, selon une étude comparative internationale.

    La Suisse n’offre pas aux immigrés un avenir sûr, conclut une étude. Publié mercredi, le #MIPEX (Migrant Intergration Policy Index) compare les #politiques_d’intégration de 52 pays et établit un #classement. La Confédération termine au 25e rang, derrière la France, l’Allemagne, l’Italie ou encore le Royaume-Uni. Elle obtient 50 points sur 100, soit sept à huit points de moins que la moyenne des autres pays d’Europe occidentale.

    Plus de 80% de la #population_étrangère vivant en Suisse est originaire d’un pays européen. Elle bénéficie de l’accord sur la libre circulation des personnes et est ainsi libre de venir travailler ou s’établir en Suisse. C’est pour les ressortissants extra-européens que la situation se complique.

    L’étude place la Suisse parmi les pays qui proposent aux migrants de pays tiers des possibilités d’intégration temporaires, mais pas la garantie de pouvoir s’établir de manière permanente. Une position similaire à celle de l’Autriche et du Danemark. « Ces pays ne font que la moitié du chemin pour accorder aux migrants des droits fondamentaux et l’égalité des chances. Leurs politiques encouragent la population à considérer les immigrés comme des étrangers et non comme des égaux et des voisins à part entière », commentent les chercheurs.

    La #politique_d’intégration de la Confédération n’a pas évolué au cours de la dernière décennie, montre également l’index. « L’approche suisse s’inscrit dans une forme de continuité », relève Gianni D’Amato, le directeur du Forum suisse pour l’étude des migrations (SFM), qui participe à l’élaboration du MIPEX. La Suisse veut bénéficier des avantages économiques de la migration, mais l’intégration sur le long terme n’est pas son objectif, analyse ce dernier. « Le message que le pays adresse aux migrants est le suivant : vous êtes les bienvenus, mais pas trop nombreux et pas pour toute votre vie. Il faut maintenir le contrôle pour pouvoir limiter le nombre d’immigrés », dit-il.

    L’étude identifie deux principales lacunes dans la politique suisse d’intégration : la faiblesse de la protection contre les #discriminations et la difficulté d’accès à la #naturalisation.

    Une protection lacunaire contre la discrimination

    Les victimes de discriminations sont moins protégées et soutenues en Suisse que partout ailleurs sur le continent, montre la comparaison internationale. La Confédération apparaît comme le seul pays européen à ne pas disposer d’une loi nationale contre la discrimination et d’un organisme d’aide aux victimes.

    Le problème n’est pas nouveau. Depuis plusieurs années, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) recommande aux autorités suisses de renforcer, en droit civil et administratif, la protection des victimes de #discrimination_raciale. Le Centre suisse de compétences des droits humains émet également des propositions similaires.

    Si la Suisse se montre réticente à prendre des mesures supplémentaires dans ce domaine, les discriminations que subissent les migrants touchent tous les domaines de la vie quotidienne. « Elles se manifestent entre autres sur le #marché_du_travail ou la recherche d’un logement », déplore Didier Ruedin, maître d’enseignement et de recherche au SFM. 

    La norme pénale antiraciste (art.261bis du Code pénal) punit certes toute discrimination basée sur l’appartenance raciale, ethnique, religieuse ou sur l’orientation sexuelle. « Son champ d’application est cependant restreint. La preuve en est que les cas de discriminations sont nombreux, mais ils donnent lieu à peu de jugements », souligne Didier Ruedin.

    Un passeport difficile à obtenir

    La politique restrictive de la Suisse en matière de naturalisation est également mise en évidence par la recherche. En 2017, les citoyens suisses ont certes accepté de faciliter la naturalisation de quelque 25’000 jeunes étrangers de troisième génération. L’étude souligne cependant que le passeport suisse reste plus difficile à obtenir que celui de la plupart des pays d’Europe occidentale. En outre, les conditions de naturalisation ont encore été durcies en 2018, avec l’entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur la nationalité.

    Un taux de naturalisation plus élevé favorise une meilleure intégration des étrangers, relèvent pourtant les experts. Il renforce l’acceptation des migrants, leur statut socio-économique, leur participation politique, ainsi que leur sentiment d’appartenance et leur confiance en leur pays d’accueil, détaille le rapport.

    Des prestations de #santé adaptées

    Si la politique d’intégration de la Suisse est loin d’être avant-gardiste, le pays offre certains avantages aux immigrés. Il se distingue en particulier grâce à son système de santé accessible à toutes les catégories de migrants. Celui-ci permet à la Confédération de se hisser à la deuxième place du classement dans ce domaine, aux côtés de l’Irlande, de la Nouvelle-Zélande et de la Suède. Le rapport salue entre autres le portail pour l’égalité des chances en matière de santé « migesplus », qui met à disposition des informations sur la santé en 56 langues.

    Le marché du travail helvétique offre également d’intéressantes opportunités à une partie des citoyens non européens disposant d’un permis de travail. Ils peuvent accéder à une activité indépendante, à un emploi dans le service public, à l’aide sociale et à la formation. Sur ce point, le pays se situe dans la moyenne européenne.

    https://www.swissinfo.ch/fre/un-futur-incertain-attend-les-migrants-extra-europ%C3%A9ens-en-suisse/46215416

    #Suisse #migrations #intégration

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  • Finally, Good News for Asylum Seekers in Italy. New Decree Rolls Back Some of the Worst Aspects of Immigration Policy

    It pledged last year to do so, and now the Italian government has restored some humanity to its immigration and asylum system. This week, the council of ministers adopted a decree that reverses many of the worst policies imposed by the previous interior minister and current leader of the anti-immigrant League Party, Matteo Salvini.

    The decree isn’t perfect, but it’s a step in the right direction.

    The decree, adopted October 5, essentially re-establishes in Italian law the residency permit on humanitarian grounds that Salvini abolished in 2018, now called “special protection.” This two-year permit is for people who don’t qualify for asylum, but who shouldn’t be sent away because they would face a risk of torture or inhuman or degrading treatment. The permit is also for people who have family and social links in Italy, or who suffer from serious physical or mental health issues. By one estimate, more than 37,000 people became undocumented since 2018 because humanitarian permits were abolished.

    Crucially, the decree allows people to convert this and other short-term residency permits into longer-term residency permits based on employment. This will help prevent people falling into undocumented status. The decree reduces detention pending deportation to three months from six.

    While the previous government restricted the nation’s reception system to recognized refugees and unaccompanied children, the new decree opens the doors to asylum seekers awaiting a decision. It also ensures asylum seekers have the right to register with the city hall where they live, since a Constitutional Court ruling this past July found the denial of this right made it “unjustifiably difficult for asylum seekers to access the services to which they are entitled.”

    One large blot on the decree is the failure to take a clear stand against criminalization of humanitarian activities. The government chose to reduce from 1 million to 50,000 euros, rather than eliminate, the noxious fines on ships that perform search-and-rescue at sea. Last year, six United Nations human rights authorities called on Italy to incentivize rather than discourage shipmasters from fulfilling their moral and legal obligation to respond to ships in distress. The current government has delayed disembarkations and impounded rescue vessels on administrative grounds.

    Parliament will have a chance to correct that, and make other improvements, when the decree is submitted for parliamentary oversight.

    https://www.hrw.org/news/2020/10/07/finally-good-news-asylum-seekers-italy

    #nouveau_décret #décret_salvini #Italie #asile #migrations #réfugiés #Italie #130/2020 #decreto_immigrazione #décret #SPRAR #accueil #permis_de_séjour #protection_internationale #travail #protection_spéciale #protection_humanitaire #réfugiés_environnementaux #réfugiés_climatiques #sauvetage #Méditerranée #citoyenneté #naturalisation #SIPROIMI #hébergement

    ping @karine4 @isskein

    • In vigore il nuovo decreto in materia di immigrazione (D.L. n. 130 del 21 ottobre 2020): luci e ombre

      Oggi, 22 ottobre, è entrato in vigore il Decreto-legge n. 130/2020, pubblicato in Gazzetta ufficiale il 21 ottobre 2020 e recante “Disposizioni urgenti in materia di immigrazione, protezione internazionale e complementare, modifiche agli articoli 131-bis,391-bis, 391-ter e 588 del codice penale, nonché misure in materia di divieto di accesso agli esercizi pubblici ed ai locali di pubblico trattenimento, di contrasto all’utilizzo distorto del web e di disciplina del Garante nazionale dei diritti delle persone private della libertà personale.

      Atteso da svariati mesi e noto all’opinione pubblica come “decreto immigrazione”, il decreto interviene in svariate materie, modificando anzitutto i c.d. decreti sicurezza del 2018 e 2019, che avevano a loro volta modificato alcune norme contenute nel Testo unico sull’immigrazione (D. Lgs. n. 286/1998), nonché la legge n. 91/1992 in materia di cittadinanza e i D. Lgs. n. 25/2008 e D. Lgs. n. 142/2015 (attuativi della direttiva UE c.d. Procedure e della direttiva UE c.d. Accoglienza del Sistema europeo comune di asilo).

      In altre parole, il c.d. nuovo decreto immigrazione prevede una serie di modifiche, apportate a diverse fonti normative, su tematiche sensibili, che non si limitano alla disciplina in materia d’immigrazione, ma riguardano anche la protezione internazionale e nuove ipotesi di protezione speciale, il soccorso in mare, degli aspetti relativi alla disciplina in materia di cittadinanza e all’accoglienza dei richiedenti asilo.

      In materia di immigrazione, il decreto è intervenuto, anzitutto, sui permessi di soggiorno per motivi di lavoro. Alle categorie di permessi già convertibili, sono state aggiunte le nuove ipotesi permesso per protezione speciale, calamità, residenza elettiva, acquisto della cittadinanza o dello stato di apolide, attività sportiva, lavoro di tipo artistico, motivi religiosi e assistenza ai minori.

      Quanto poi alla protezione internazionale, il nuovo decreto ha stabilito delle modifiche procedurali e sostanziali alla previgente disciplina. Le prime hanno modificato le modalità di svolgimento degli esami prioritari, delle procedure accelerate, nonché della gestione delle domande reiterate in fase di esecuzione di un provvedimento di allontanamento. Sul piano sostanziale

      Inoltre, sono estese le categorie di soggetti che possono beneficiare di permessi di soggiorno per protezione speciale, che costituirà una sorta di nuova categoria residuale di protezione rispetto alle due forme di protezione internazionale (lo status di rifugiato e la protezione internazionale), tanto da far parlare, nei primi commenti, di un sostanziale ritorno alla categoria della precedente protezione umanitaria, pur sotto altra veste terminologica.

      Nella specie, la nuova normativa prevede che non possa essere espulso o respinto e piuttosto meriti protezione, per l’appunto speciale, non solo, come già era previsto sino ad oggi, la persona che rischiava di subire torture, ma anche due nuove ipotesi: i) chi rischia di subire trattamenti inumani o degradanti nel paese d’origine e ii) chi rischia la violazione del diritto al rispetto della propria vita privata e familiare nel territorio nazionale. Inoltre la durata del permesso di soggiorno per protezione speciale è stata ampliata da 1 anno a 2 anni.

      Infine, sempre in materia di protezione complementare, è stata ampliata la nozione del permesso di soggiorno per calamità naturale: attuale presupposto per la concessione del permesso è adesso la semplice esistenza di una situazione di “grave” calamità. In altre parole, non si richiede più che lo stato di calamità sia eccezionale e transitorio come in precedenza, in un probabile tentativo di apertura alla protezione dei c.d. migranti ambientali (normando quanto già preconizzato dalla giurisprudenza della Corte di Cassazione).

      Tra le note positive, viene altresì espressamente prevista l’iscrizione del richiedente protezione internazionale nell’anagrafe della popolazione residente.

      Quanto alla questione del soccorso in mare, in seguito alle pesanti critiche ricevute sul punto dal secondo decreto sicurezza, la nuova disciplina è intervenuta modificando il quadro dei divieti e dei limiti di navigazione per le imbarcazioni delle ONG. In particolare, il Ministro dell’interno, di concerto con il Ministro della difesa e dei trasporti ed informato il Presidente del Consiglio, può ancora limitare o vietare l’ingresso e il transito in acque territoriali a navi non militari o governative non commerciali. Tuttavia, il decreto prevede una deroga a tale divieto o limite di navigazione, nell’ipotesi di navi che abbiano effettuato soccorsi a norma delle convenzioni internazionali, e che abbiano comunicato le operazioni alle autorità competenti nazionali o del loro stato di bandiera.

      Negli altri casi, invece, di “inosservanza del divieto o del limite di navigazione”, è prevista la comminazione di multe che vanno da 10mila a 50mila euro. Si ricorda che, precedentemente al nuovo decreto, in caso di violazione del divieto di cui sopra, era prevista un’ammenda amministrativa, con un limite superiore all’attuale multa (fino a un milione per chi avesse salvato i migranti in mare). Infine, con il nuovo decreto, non è più previsto il sequestro dell’imbarcazione entrata in acque territoriali in maniera irregolare.

      Per quanto riguarda la normativa in materia di cittadinanza, il decreto ha modificato la legge n.91 del 1992, riducendo il tempo di attesa della risposta alla domanda per l’acquisto della cittadinanza italiana da quattro a tre anni, un risultato comunque insoddisfacente alla luce del fatto che la formulazione originaria della legge del 1992 stabiliva una durata di due anni (ed era stato aumentato a quattro anni dal decreto sicurezza del 2018 sopramenzionato). Inoltre non è abrogata la norma che prevede la revoca della cittadinanza per chi l’ha acquisita, in caso di condanna definitiva per reati collegati al terrorismo, creando una discriminazione odiosa rispetto a chi è cittadino italiano iure sanguinis.

      Infine, in materia di accoglienza, è stato creato il nuovo Sistema di accoglienza e integrazione, che sostituisce il SIPROIMI (Sistema di protezione per titolari di protezione internazionale e per minori stranieri non accompagnati), ritornando a un sistema simile ai vecchi SPRAR (Sistema di protezione per richiedenti asilo e rifugiati). Tuttavia, le funzioni di prima assistenza o soccorso verranno gestite nei centri governativi ordinari e straordinari istituiti dal Ministro dell’Interno, quindi attraverso i grandi e largamente disfunzionali centri di prima accoglienza che abbiamo imparato a conoscere. La successiva fase di accoglienza, invece, viene affidata agli enti locali e si articolerà in due livelli di servizi, distinti a seconda che si tratti di soggetti richiedenti protezione internazionale (per i quali la normativa torna appunto a prevedere forme di accoglienza in precedenza eliminate dal decreto sicurezza del 2018) ovvero titolari della stessa. Nel primo caso sono previsti servizi di assistenza sanitaria, sociale e psicologica nonché di mediazione linguistico-culturale, nel secondo caso si aggiungono servizi di integrazione del soggetto, tra cui l‘orientamento al lavoro e la formazione professionale. Inoltre, il decreto ha reso potenziali beneficiari dei suddetti servizi anche i titolari di una serie di permessi di soggiorno speciali (protezione speciale, protezione sociale, violenza domestica, calamità, particolare sfruttamento lavorativo, atti di particolare valore civile, casi speciali).

      Il nuovo decreto ha dunque nuovamente inciso sul precedente impianto normativo in materia di immigrazione e asilo riformando e, per lo più, abrogando le modifiche introdotte dai cosiddetti “decreti sicurezza”, pur mantenendone alcuni profili criticabili. I tempi di attesa per l’ottenimento della cittadinanza sopra evidenziati, così come il mantenimento della criminalizzazione del soccorso marittimo sono tra questi. In ogni caso, il contenuto può ritenersi complessivamente soddisfacente e il decreto è indubbiamente un passo verso l’apertura e un trattamento della politica migratoria quale evento strutturale e non meramente emergenziale.

      https://www.unionedirittiumani.it/in-vigore-il-nuovo-decreto-in-materia-di-immigrazione-d-l-n-130-d

  • France : naturalisation des étrangers en « première ligne » contre le Covid, un effet d’annonce ? - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/27322/france-naturalisation-des-etrangers-en-premiere-ligne-contre-le-covid-

    La ministre déléguée à la Citoyenneté, Marlène Schiappa, a donné instruction aux préfets d’"accélérer" et "faciliter" la naturalisation française des ressortissants étrangers qui se sont mobilisés "en première ligne" durant la pandémie de Covid-19. Une mesure difficile à appliquer tant les préfectures françaises sont saturées. Agents de nettoyage, infirmiers, médecins, manutentionnaires … Les ressortissants étrangers en “première ligne” lors du pic de la pandémie de Covid-19 en France pourraient voir leur accès à la nationalité française “facilité”. Pour eux, la durée minimale de résidence en France exigée sera de deux ans, au lieu des cinq années requises actuellement. Mardi 15 septembre, Marlène Schiappa a donné instruction aux préfets d’"accélérer" et de "faciliter" l’acquisition de la nationalité française pour les étrangers en situation régulière qui ont “contribué activement, en première ligne, à la lutte contre le Covid-19, notamment les personnels de santé. La ministre déléguée à la Citoyenneté voudrait qu’ils procèdent à "un examen prioritaire et individualisé de ces dossiers".

    #Covid-19#migrant#migration#france#sante#politiquemigratoire#naturalisation#personnelsante

  • Sur l’immigration, Gérald Darmanin durcit la ligne du gouvernement
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/09/11/sur-l-immigration-gerald-darmanin-durcit-la-ligne-du-gouvernement_6051792_32

    La DGEF devra mettre en musique les orientations du ministre, qui partage son portefeuille avec Marlène Schiappa, déléguée à la citoyenneté. A elle, les questions d’asile et d’« intégration républicaine », notamment par les naturalisations auxquelles elle veut redonner de la « solennité ». A lui, les évacuations de campements de rue, la lutte contre l’immigration irrégulière. D’un côté, l’humanisme, de l’autre, la fermeté. Cette scission du dossier migratoire étonne, tant ses éléments se recoupent : les personnes migrantes à la rue sont ainsi majoritairement des demandeurs d’asile et des réfugiés. Les premières dissonances entre les deux ministres n’ont d’ailleurs pas tardé à se manifester au sujet des travailleurs sans papiers mobilisés pendant le confinement (aides à domicile, éboueurs, livreurs, caissiers…). Le cabinet de M. Castaner s’était mobilisé au début de l’été, envisageant la régularisation de « plusieurs milliers » d’entre eux. Des préfectures avaient même été sollicitées en ce sens. Jusqu’à ce que le remaniement gouvernemental, début juillet, interrompe les travaux. Mais le projet n’a pas totalement été enterré. D’après nos informations, le cabinet de Mme Schiappa a envoyé un télégramme aux préfets à la fin de l’été, les invitant à faire preuve de « discernement » vis-à-vis des candidats à une régularisation ou à une naturalisation s’étant illustré pendant la crise due au Covid-19. A peine quelques heures se sont écoulées avant que le cabinet de M. Darmanin envoie un contre-ordre, rendant le texte de sa collègue caduc. Un premier couac à Beauvau. L’entourage de Mme Schiappa assure aujourd’hui qu’une circulaire est en préparation pour accélérer uniquement les naturalisations des travailleurs étrangers en situation régulière mobilisés pendant la crise.

    #Covid-19#migrant#migration#france#sante#politiquemigratoire#regularisation#confinement#naturalisation#travailleurmigrant

  • ’I am Italian too’: How #BlackLivesMatter protests reignited the Italian citizenship debate

    Global anti-racism protests following the death of African-American George Floyd could impact Italy’s citizenship laws. Here, politicians are under pressure to allow more children of migrants born and educated in the country to become Italians.

    June 2 is the day Italy celebrates becoming a republic. Partly, it is a day for reflecting on the values of the country and its citizens, and what it means to be Italian. “This year it will be remembered for a series of exceptional events,” writes Angelica Pesarini in an essay entitled “Questions of Privilege” on the newsletter for cultural space Il lavoro culturale (Cultural work).

    Pesarini is a faculty member in social and cultural analysis at New York University (NYU) in Florence. She is also a black Italian, born in Italy to a family with roots in Somalia and Eritrea, countries that have colonial links with Italy.

    Many Italians think “to be Italian is to be white,” Pesarini told the BBC in 2019. “I feel I have to justify my Italian-ness a lot,” she continued. “People assume I cannot be Italian. When people ask me: ’Where are you from?’ I say: ’I’m from Rome.’ They ask: ’No, but where are you really from?’” Pesarini says that this frequent exchange demonstrates how “race, colonialism and whiteness are all connected to Italian identity today.”

    Children of migrants

    Pesarini is Italian, but her identity is still questioned. For others, the children of migrant parents, it is not just strangers who ask questions about their roots, but the state itself. As Italy’s migrant population grows, and more and more children are being born in Italy and growing up and going to school in the Italian system, they ask why they too cannot be recognized as Italian citizens.

    The current law allows Italian citizenship to be granted automatically only to those born to Italian parents. The children of migrants, both those born on Italian soil and those who migrated with their parents as minors, are not automatically granted an Italian passport when they turn 18.

    ’One million’ Italians without citizenship

    According to the campaign group “Italiani senza cittadinanza” (Italians without citizenship), there are now one million people in this position. “I feel I am Italian, but it as though the state doesn’t see me,” says Alessia Korotkova in a video made by Oxfam in 2019. She had hoped to compete at the Olympic Games in Tokyo 2020 but she couldn’t because she was unable to get Italian citizenship. “We might seem invisible to the state,” Korotkova continues, “but we are not invisible, we ARE here,” she says smiling as the video flashes up a hashtag #noicisiamo (#We_are_here).

    “I’m a foreigner in my own home,” says Ghassan Ezzarraa in another video in the series. “I feel like I am in a video game; to become myself, I have to jump the hurdles to the next level,” he says. “I am the only person in my family still considered a foreigner,” he adds.

    One of the lucky ones?

    Ghassan might be considered one of the lucky ones. At the end of January 2020, he was granted citizenship in his home town of Reggio Emilia at the age of 23. He had been living in Italy since he was four years old.

    But his journey to citizenship, like that of many others, was long and complicated. Ghassan was born in Rabat, Morocco in 1996. Just after he turned four, he and his mother were able to join his father in Italy where he had been living and working. A year later, his sister was born on Italian soil, but even that didn’t qualify her for automatic citizenship.

    According to La Repubblica newspaper, as a long time resident, Ghassan’s father received Italian citizenship in 2015. His sister, who was still a child, received it soon after, as did his mother, as his father’s legal spouse. Only Ghassan, who had already turned 18 failed to “inherit” the citizenship granted to the rest of his family.

    Becoming Italian

    Having been through the Italian school system, Ghassan applied for citizenship, traveling to Morocco to obtain all the necessary documents. The procedure should have taken two years, but under the government’s migration and security decree, this process was lengthened to four years.

    The complications meant that Ghassan had to partially give up on the athletic career he had dreamed of because, as a ’foreigner’, he was not eligible to receive sponsorship and training. He took up a job and, with the help of various cultural organizations, campaigned to get his story heard. Finally, the mayor of Reggio Emilia in the north of Italy, did listen and announced the happy news on his Facebook page in January.

    Different proposals debated

    The debate on citizenship rights has continued for decades. A commission in the current parliament has been hearing evidence on the issue since late 2019. Its deliberations were largely buried during the restrictions placed on Italy by the COVID-19 pandemic, but now, with demonstrations across Italy taking place in protest over the death of African-American George Floyd, the issue is back in the media, and public, spotlight.

    The current government is split on the issue, writes the Italian news agency ANSA. Three different proposals have been put forward. The first is granting citizenship based on where you are born, ie, if you are born on Italian soil, you should be considered Italian. The second is an idea based around education and culture. According to this, if you have been educated in Italian, speak the language fluently and think ’like an Italian’, then why shouldn’t you be considered Italian? This second proposal would also allow those who migrated with their parents but grew up feeling themselves to be Italian citizens to access citizenship. The third is a combination of both these ideas.

    The UN children’s charity, UNICEF in Italy, points out that this law would not automatically grant citizenship to any child of a migrant born on Italian soil. In fact, even the new proposals are rich with caveats. Children of parents who are waiting to have their request for international protection decided, for instance, would not qualify. Nor would children born to parents without a legal permit to stay.

    A change to the citizenship law would help children of those who have lived in Italy for a long time, completed more than five years of education and/or a professional qualification and possibly obtained Italian citizenship themselves. UNICEF says it is needed to “stop discrimination against those children who are legitimately part of Italian society.”
    Black people die in Italy too

    In her essay, Angelica Pesarini lists some of the black people, many of whom are migrants, who have been murdered on Italian soil. She highlights the death of a Malian man Soumalia Sacko on Republic Day two years ago in 2018. Sacko, she writes, was working “exploited” in the Calabrian fields in the south of Italy. He was helping two workmates collect some material from an abandoned building in the fields, in order to try and construct a shack where they were living. As they were collecting the material, they were shot at by an Italian man with an “unlicensed shotgun.” The shots resulted in a head trauma, from which Sacko died.

    His death, writes Pesarini, was initially “reported in a distorted manner” based on information provided by the Prefecture in Reggio Calabria. They said, that he was “shot at by someone unknown whilst stealing.” Soon after his death, the deputy Prime Minister at the time, Matteo Salvini, tweeted about migrants “The fun’s over;” referring to the idea that migrants arrive in Italy just to obtain benefits and ’easy’ work.
    #BlackLivesMatter: Italy

    One of the leading members of the Sardines movement, which has been fighting for migrant rights in Italy, is also pushing for the citizenship law to be reformed. “This is such an important law that it shouldn’t fall victim to political disagreement or propaganda,” Jasmine Cristallo, spokesperson for the “6,000 Sardines” movement told ANSA.

    Campaigners are hopeful that they can use the momentum of the protests around the world and anger at institutional racism to change politicians’ minds and bring citizenship laws into the 21st century. On Facebook on June 9, Italians without citizenship posted pictures from the latest demonstration in Rome, where Italian-Haitian anti-racism campaigner Stella Jean called for a change to the current citizenship laws. Jean told ANSA: “I’m speaking today because it is no longer possible to remain silent. I don’t want my own children to be subject to the threats I received as a girl. Everyone merits citizenship.”

    https://www.infomigrants.net/en/post/25300/i-am-italian-too-how-blacklivesmatter-protests-reignited-the-italian-c
    #citoyenneté #Italie #migrations #naturalisation #nationalité

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  • L’impensé colonial de la #politique_migratoire italienne

    Les sorties du Mouvement Cinq Étoiles, au pouvoir en Italie, contre le #franc_CFA, ont tendu les relations entre Paris et Rome en début d’année. Mais cette polémique, en partie fondée, illustre aussi l’impensé colonial présent dans la politique italienne aujourd’hui – en particulier lors des débats sur l’accueil des migrants.

    Au moment de déchirer un billet de 10 000 francs CFA en direct sur un plateau télé, en janvier dernier (vidéo ci-dessous, à partir de 19 min 16 s), #Alessandro_Di_Battista savait sans doute que son geste franchirait les frontières de l’Italie. Revenu d’un long périple en Amérique latine, ce député, figure du Mouvement Cinq Étoiles (M5S), mettait en scène son retour dans l’arène politique, sur le plateau de l’émission « Quel temps fait-il ? ». Di Battista venait, avec ce geste, de lancer la campagne des européennes de mai.
    https://www.youtube.com/watch?v=X14lSpRSMMM&feature=emb_logo


    « La France, qui imprime, près de Lyon, cette monnaie encore utilisée dans 14 pays africains, […] malmène la souveraineté de ces pays et empêche leur légitime indépendance », lance-t-il. Di Battista cherchait à disputer l’espace politique occupé par Matteo Salvini, chef de la Ligue, en matière de fermeté migratoire : « Tant qu’on n’aura pas déchiré ce billet, qui est une menotte pour les peuples africains, on aura beau parler de ports ouverts ou fermés, les gens continueront à fuir et à mourir en mer. »

    Ce discours n’était pas totalement neuf au sein du M5S. Luigi Di Maio, alors ministre du travail, aujourd’hui ministre des affaires étrangères, avait développé à peu près le même argumentaire sur l’immigration, lors d’un meeting dans les Abruzzes, à l’est de Rome : « Il faut parler des causes. Si des gens partent de l’Afrique aujourd’hui, c’est parce que certains pays européens, la #France en tête, n’ont jamais cessé de coloniser l’Afrique. L’UE devrait sanctionner ces pays, comme la France, qui appauvrissent les États africains et poussent les populations au départ. La place des Africains est en Afrique, pas au fond de la Méditerranée. »

    À l’époque, cette rhétorique permettait au M5S de creuser sa différence avec la Ligue sur le dossier, alors que Matteo Salvini fermait les ports italiens aux bateaux de migrants. Mais cette stratégie a fait long feu, pour des raisons diplomatiques. Celle qui était alors ministre des affaires européennes à Paris, Nathalie Loiseau, a convoqué l’ambassadrice italienne en France pour dénoncer des « déclarations inacceptables et inutiles ». L’ambassadeur français à Rome a quant à lui été rappelé à Paris, une semaine plus tard – en réaction à une rencontre de dirigeants du M5S avec des « gilets jaunes » français.

    En Italie, cet épisode a laissé des traces, à l’instar d’un post publié sur Facebook, le 5 juillet dernier, par le sous-secrétaire aux affaires étrangères M5S Manlio Di Stefano. À l’issue d’une rencontre entre Giuseppe Conte, premier ministre italien, et Vladimir Poutine, il écrit : « L’Italie est capable et doit être le protagoniste d’une nouvelle ère de #multilatéralisme, sincère et concret. Nous le pouvons, car nous n’avons pas de #squelettes_dans_le_placard. Nous n’avons pas de #tradition_coloniale. Nous n’avons largué de bombes sur personne. Nous n’avons mis la corde au cou d’aucune économie. »

    Ces affirmations sont fausses. Non seulement l’Italie a mené plusieurs #guerres_coloniales, jusqu’à employer des #armes_chimiques – en #Éthiopie de 1935 à 1936, dans des circonstances longtemps restées secrètes –, mais elle a aussi été l’un des premiers pays à recourir aux bombardements, dans une guerre coloniale – la guerre italo-turque de 1911, menée en Libye. Dans la première moitié du XXe siècle, l’Italie fut à la tête d’un empire colonial qui englobait des territoires comme la Somalie, la Libye, certaines portions du Kenya ou encore l’Éthiopie.

    Cette sortie erronée du sous-secrétaire d’État italien a au moins un mérite : elle illustre à merveille l’impensé colonial présent dans la politique italienne contemporaine. C’est notamment ce qu’affirment plusieurs intellectuels engagés, à l’instar de l’écrivaine et universitaire romaine de 45 ans #Igiaba_Scego. Issue d’une famille somalienne, elle a placé la #question_coloniale au cœur de son activité littéraire (et notamment de son roman Adua). Dans une tribune publiée par Le Monde le 3 février, elle critique sans ménagement l’#hypocrisie de ceux qui parlent du « #colonialisme_des_autres ».

    À ses yeux, la polémique sur le franc CFA a soulevé la question de l’effacement de l’histoire coloniale en cours en Italie : « Au début, j’étais frappée par le fait de voir que personne n’avait la #mémoire du colonialisme. À l’#école, on n’en parlait pas. C’est ma génération tout entière, et pas seulement les Afro-descendants, qui a commencé à poser des questions », avance-t-elle à Mediapart.

    Elle explique ce phénomène par la manière dont s’est opéré le retour à la démocratie, après la Seconde Guerre mondiale : #fascisme et entreprise coloniale ont été associés, pour mieux être passés sous #silence par la suite. Sauf que tout refoulé finit par remonter à la surface, en particulier quand l’actualité le rappelle : « Aujourd’hui, le corps du migrant a remplacé le corps du sujet colonial dans les #imaginaires. » « Les migrations contemporaines rappellent l’urgence de connaître la période coloniale », estime Scego.

    Alors que le monde politique traditionnel italien évite ce sujet délicat, la question est sur la table depuis une dizaine d’années, du côté de la gauche radicale. Le mérite revient surtout à un groupe d’écrivains qui s’est formé au début des années 2000 sous le nom collectif de Wu Ming (qui signifie tout à la fois « cinq noms » et « sans nom » en mandarin).

    Sous un autre nom, emprunté à un footballeur anglais des années 1980, Luther Blissett, ils avaient déjà publié collectivement un texte, L’Œil de Carafa (Seuil, 2001). Ils animent aujourd’hui le blog d’actualité politico-culturelle Giap. « On parle tous les jours des migrants africains sans que personne se souvienne du rapport historique de l’Italie à des pays comme l’Érythrée, la Somalie, l’Éthiopie ou la Libye », avance Giovanni Cattabriga, 45 ans, alias Wu Ming 2, qui est notamment le co-auteur en 2013 de Timira, roman métisse, une tentative de « créoliser la résistance italienne » à Mussolini.

    Dans le sillage des travaux du grand historien critique du colonialisme italien Angelo Del Boca, les Wu Ming ont ouvert un chantier de contre-narration historique qui cible le racisme inhérent à la culture italienne (dont certains textes sont traduits en français aux éditions Métailié). Leur angle d’attaque : le mythe d’une Italie au visage bienveillant, avec une histoire coloniale qui ne serait que marginale. Tout au contraire, rappelle Cattabriga, « les fondements du colonialisme italien ont été posés très rapidement après l’unification du pays, en 1869, soit huit ans à peine après la création du premier royaume d’Italie, et avant l’annexion de Rome en 1870 ».

    La construction nationale et l’entreprise coloniale se sont développées en parallèle. « Une partie de l’identité italienne s’est définie à travers l’entreprise coloniale, dans le miroir de la propagande et du racisme que celle-ci véhiculait », insiste Cattabriga. Bref, si l’on se souvient de la formule du patriote Massimo D’Azeglio, ancien premier ministre du royaume de Sardaigne et acteur majeur de l’unification italienne qui avait déclaré en 1861 que « l’Italie est faite, il faut faire les Italiens », on pourrait ajouter que les Italiens ont aussi été « faits » grâce au colonialisme, malgré les non-dits de l’histoire officielle.
    « La gauche nous a abandonnés »

    Au terme de refoulé, Cattabriga préfère celui d’oubli : « D’un point de vue psychanalytique, le refoulé se base sur une honte, un sentiment de culpabilité non résolu. Il n’y a aucune trace de ce sentiment dans l’histoire politique italienne. » À en croire cet historien, l’oubli colonial italien deviendrait la pièce fondamentale d’une architecture victimaire qui sert à justifier une politique de clôture face aux étrangers.

    « Jouer les victimes, cela fait partie de la construction nationale. Notre hymne dit : “Noi fummo da sempre calpesti e derisi, perché siam divisi” [“Nous avons toujours été piétinés et bafoués, puisque nous sommes divisés” – ndlr]. Aujourd’hui, le discours dominant présente les Italiens comme des victimes des migrations pour lesquelles ils n’ont aucune responsabilité. Cette victimisation ne pourrait fonctionner si les souvenirs de la violence du colonialisme restaient vifs. »

    Un mécanisme identique serait à l’œuvre dans la polémique sur le franc CFA : « On stigmatise la politique néocoloniale française en soulignant son caractère militaire, à quoi on oppose un prétendu “style italien” basé sur la coopération et l’aide à l’Afrique. Mais on se garde bien de dire que l’Italie détient des intérêts néocoloniaux concurrents de ceux des Français », insiste Cattabriga.

    L’historien Michele Colucci, auteur d’une récente Histoire de l’immigration étrangère en Italie, est sur la même ligne. Pour lui, « l’idée selon laquelle l’Italie serait un pays d’immigration récente est pratique, parce qu’elle évite de reconnaître la réalité des migrations, un phénomène de longue date en Italie ». Prenons le cas des Érythréens qui fuient aujourd’hui un régime autoritaire. Selon les chiffres des Nations unies et du ministère italien de l’intérieur, ils représentaient environ 14 % des 23 000 débarqués en Italie en 2018, soit 3 300 personnes. Ils ne formaient l’année précédente que 6 % des 119 000 arrivés. De 2015 à 2016, ils constituaient la deuxième nationalité, derrière le Nigeria, où l’ENI, le géant italien du gaz et du pétrole, opère depuis 1962.

    « Les migrations de Somalie, d’Éthiopie et d’Érythrée vers l’Italie ont commencé pendant la Seconde Guerre mondiale. Elles se sont intensifiées au moment de la décolonisation des années 1950 [la Somalie est placée sous tutelle italienne par l’ONU de 1950 à 1960, après la fin de l’occupation britannique – ndlr]. Cela suffit à faire de l’Italie une nation postcoloniale. » Même si elle refuse de le reconnaître.

    Les stéréotypes coloniaux ont la peau dure. Selon Giovanni Cattabriga, alias Wu Ming 2, « [ses collègues et lui ont] contribué à sensibiliser une partie de la gauche antiraciste, mais [il n’a] pas l’impression que, globalement, [ils soient] parvenus à freiner les manifestations de racisme » : « Je dirais tout au plus que nous avons donné aux antiracistes un outil d’analyse. »

    Igiaba Scego identifie un obstacle plus profond. « Le problème, affirme-t-elle, est qu’en Italie, les Afro-descendants ne font pas partie du milieu intellectuel. Nous sommes toujours considérés un phénomène bizarre : l’école, l’université, les rédactions des journaux sont des lieux totalement “blancs”. Sans parler de la classe politique, avec ses visages si pâles qu’ils semblent peints. »

    Ce constat sur la « blanchitude » des lieux de pouvoir italiens est une rengaine dans les milieux militants et antiracistes. L’activiste Filippo Miraglia, trait d’union entre les mondes politique et associatif, en est convaincu : « Malgré les plus de cinq millions de résidents étrangers présents depuis désormais 30 ans, nous souffrons de l’absence d’un rôle de premier plan de personnes d’origine étrangère dans la politique italienne, dans la revendication de droits. À mon avis, c’est l’une des raisons des défaites des vingt dernières années. »

    Miraglia, qui fut président du réseau ARCI (l’association de promotion sociale de la gauche antifasciste fondée en 1957, une des plus influentes dans les pays) entre 2014 et 2017 (il en est actuellement le chef du département immigration) et s’était présenté aux législatives de 2018 sur les listes de Libres et égaux (à gauche du Parti démocrate), accepte une part d’autocritique : « Dans les années 1990, les syndicats et les associations ont misé sur des cadres d’origine étrangère. Mais ce n’était que de la cooptation de personnes, sans véritable ancrage sur le terrain. Ces gens sont vite tombés dans l’oubli. Certains d’entre eux ont même connu le chômage, renforçant la frustration des communautés d’origine. »

    L’impasse des organisations antiracistes n’est pas sans rapport avec la crise plus globale des gauches dans le pays. C’est pourquoi, face à cette réalité, les solutions les plus intéressantes s’inventent sans doute en dehors des organisations traditionnelles. C’est le cas du mouvement des Italiens de deuxième génération, ou « G2 », qui réunit les enfants d’immigrés, la plupart nés en Italie, mais pour qui l’accès à la citoyenneté italienne reste compliqué.

    De 2005 à 2017, ces jeunes ont porté un mouvement social. Celui-ci exigeait une réforme de la loi sur la nationalité italienne qui aurait permis d’accorder ce statut à environ 800 000 enfants dans le pays. La loi visait à introduire un droit du sol, sous certaines conditions (entre autres, la présence d’un des parents sur le territoire depuis cinq ans ou encore l’obligation d’avoir accompli un cycle scolaire complet en Italie).

    Ce mouvement était parvenu à imposer le débat à la Chambre basse en 2017, sous le gouvernement de Matteo Renzi, mais il perdit le soutien du même Parti démocrate au Sénat. « La gauche a commis une grave erreur en rejetant cette loi, estime Igiaba Scego, qui s’était investie dans la campagne. Cette réforme était encore insuffisante, mais on se disait que c’était mieux que rien. La gauche nous a abandonnés, y compris celle qui n’est pas représentée au Parlement. Nous étions seuls à manifester : des immigrés et des enfants d’immigrés. Il y avait de rares associations, quelques intellectuels et un grand vide politique. À mon avis, c’est là que l’essor de Matteo Salvini [le chef de la Ligue, extrême droite – ndlr] a commencé. »

    Certains, tout de même, veulent rester optimistes, à l’instar de l’historien Michele Colucci qui signale dans son ouvrage le rôle croissant joué par les étrangers dans les luttes du travail, notamment dans les secteurs de l’agriculture : « Si la réforme de la nationalité a fait l’objet de discussions au sein du Parlement italien, c’est uniquement grâce à l’organisation d’un groupe de personnes de deuxième génération d’immigrés. Ce mouvement a évolué de manière indépendante des partis politiques et a fait émerger un nouvel agenda. C’est une leçon importante à retenir. »

    https://www.mediapart.fr/journal/international/241219/l-impense-colonial-de-la-politique-migratoire-italienne?onglet=full
    #colonialisme #Italie #impensé_colonial #colonisation #histoire #migrations #causes_profondes #push-factors #facteurs_push #Ethiopie #bombardements #guerre_coloniale #Libye #histoire #histoire_coloniale #empire_colonial #Somalie #Kenya #Wu_Ming #Luther_Blissett #littérature #Luther_Blissett #contre-récit #contre-narration #nationalisme #construction_nationale #identité #identité_italienne #racisme #oubli #refoulement #propagande #culpabilité #honte #oubli_colonial #victimes #victimisation #violence #néocolonialisme #stéréotypes_coloniaux #blanchitude #invisibilisation #G2 #naturalisation #nationalité #droit_du_sol #gauche #loi_sur_la_nationalité #livre

    –—
    Mouvement #seconde_generazioni (G2) :

    La Rete G2 - Seconde Generazioni nasce nel 2005. E’ un’organizzazione nazionale apartitica fondata da figli di immigrati e rifugiati nati e/o cresciuti in Italia. Chi fa parte della Rete G2 si autodefinisce come “figlio di immigrato” e non come “immigrato”: i nati in Italia non hanno compiuto alcuna migrazione; chi è nato all’estero, ma cresciuto in Italia, non è emigrato volontariamente, ma è stato portato qui da genitori o altri parenti. Oggi Rete G2 è un network di “cittadini del mondo”, originari di Asia, Africa, Europa e America Latina, che lavorano insieme su due punti fondamentali: i diritti negati alle seconde generazioni senza cittadinanza italiana e l’identità come incontro di più culture.

    https://www.secondegenerazioni.it

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  • « Face à l’effondrement, il faut mettre en œuvre une nouvelle organisation sociale et culturelle »

    Par Agnès Sinaï, Pablo Servigne, Yves Cochet

    Le Monde du 23 juillet 2019.

    Vivre avec la fin du monde 1/6.
    Trois membres de l’Institut Momentum appellent à assumer l’effondrement systémique global qui vient pour préparer l’avènement d’une société « résiliente ».

    La fin de notre monde est proche. Une ou deux décennies, tout au plus. Cette certitude qui nous habite désormais, et qui a bouleversé nos croyances et nos comportements, est le résultat d’observations scientifiques nombreuses et variées sur l’évolution du système Terre, mais aussi de l’expression de caractéristiques banales de l’espèce humaine lorsqu’un événement extraordinaire s’annonce.
    Depuis une trentaine d’années, les études et les rapports scientifiques ne cessent d’augmenter la plausibilité d’un seuil climatique planétaire qui fera basculer le système Terre dans un état inconnu, nanti de températures moyennes plus hautes que depuis un million d’années. La probabilité d’un tel futur proche est aujourd’hui plus élevée que celle de tout autre scénario prospectif.
    Ce n’est plus une question de « si », c’est une question de « quand ». En examinant les centaines de travaux afférents, depuis le premier rapport du Club de Rome – Les Limites à la croissance – en 1972, jusqu’au récent rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) – « Rapport spécial du GIEC sur les conséquences d’un réchauffement planétaire de 1,5 °C » –, en octobre 2018, on peut estimer la date de passage de ce seuil planétaire entre 2020 et 2040.
    Trajectoire chaotique
    Ce seuil critique global est la conséquence de multiples boucles de rétroaction autorenforçantes entre éléments du système Terre, dévasté par un siècle de libéral-productivisme. Ainsi, pour le seul cycle du carbone, la fonte du permafrost sibérien, l’affaiblissement du pouvoir de séquestration du carbone par les terres et les océans, la déforestation de l’Amazonie et celle des forêts boréales constituent des boucles de rétroaction qui accélèrent le dérèglement climatique.
    Ces rétroactions s’étendent à tous les sous-systèmes de la Terre, intensifiant ainsi l’érosion de la biodiversité, et réciproquement. Cette trajectoire chaotique du système Terre conduit les sociétés humaines vers un effondrement systémique global : passé ce seuil de bascule, le chaos sera tel qu’aucun Etat ne sera plus capable de faire respecter la loi, de contrôler les armes, de lever des impôts.
    Cependant, ce basculement n’est que la composante objective de l’effondrement. Deux caractéristiques cognitives de l’espèce humaine transforment la plausibilité géobiophysique de l’effondrement en une certitude politique. La première s’énonce comme suit : l’immensité (c’est-à-dire l’imminence et l’ampleur) de la catastrophe « éco-anthropologique » est telle qu’elle excède nos capacités de compréhension, aussi bien de perception que d’imagination. Elle est irreprésentable, démesurée, supraliminaire, comme dit le philosophe Günther Anders. La seconde relève de la spécularité des croyances et des comportements : une personne informée de l’effondrement rapproché ne se demande pas si elle veut changer sa vie – c’est-à-dire diminuer drastiquement son empreinte écologique –, mais seulement si elle le ferait au cas où un certain nombre d’autres le feraient aussi.
    Ainsi, l’effondrement est inévitable non parce que la connaissance scientifique de son advenue est trop incertaine, mais parce que la psychologie sociale qui habite les humains ne leur permettra probablement pas de prendre les bonnes décisions, au bon moment. Il existe souvent plusieurs manières de résoudre un problème local ou circonscrit, mais affronter tous les problèmes ensemble et globalement rend le coût d’éventuelles solutions si élevé que seul le déni s’avère être la réponse adaptée. C’est ce déni de masse qui garantit que l’effondrement est certain.
    Stress prétraumatique
    De nombreuses populations subissent déjà les conséquences des catastrophes globales, des dérèglements écosystémiques et des pollutions diverses. Les classes sociales vulnérables et les pays pauvres (et on ne parle même pas des organismes non humains) subissent déjà des traumatismes qui commencent à être connus (stress, dépression, démence, suicides, maladies, etc.) et qui annoncent tout simplement notre avenir psychique à nous, les privilégiés.
    La prédiction même d’une catastrophe peut faire souffrir. On sait que l’annonce de dégradations à venir provoque déjà ce que les psychologues appellent le stress prétraumatique, autrement dit les effets néfastes de la peur du futur. Ainsi sommes-nous confrontés à un dilemme : comment annoncer que la maison brûle — et qu’elle sera détruite — sans faire peur à ses habitants ? Si vous étiez pompiers, que feriez-vous ? Il faut le dire, bien sûr, le crier haut et fort, avec fermeté et bienveillance. Puis, tout en se concentrant sur l’incendie, prendre soin de certains habitants traumatisés, et motiver tout le monde à sauver ce qui doit l’être.
    Prendre soin. Voilà ce qui manque cruellement à notre époque, et cela constitue une bonne partie de la réponse à la question : comment vivre la fin du monde ? Prendre soin de nous-mêmes, des autres, des non-humains. Prendre soin de notre psyché, des émotions que tout ce chaos génère, c’est-à-dire accueillir par l’écoute : tristesse et désespoir, colère et rage, inquiétude et peur. Tous ces affects sont parfaitement normaux. Pire, ils vont s’intensifier ! Il ne s’agit nullement de se complaire dans ces marais émotionnels, mais d’apprendre à les traverser individuellement et collectivement, à les côtoyer, afin de ne pas se laisser emporter, et trouver les ressources pour organiser la suite, pour résister.
    Mais comment résister à la fin du monde ? Ou plutôt, comment faire émerger un autre monde possible à partir de celui-ci ? La première piste est à rechercher du côté de la permaculture en tant que vision du monde et science pragmatique des sols et des paysages. Le néologisme « permaculture » a été forgé en Australie par Bill Mollison et David Holmgren, à partir de la contraction de deux termes : « permanent » et « agriculture », mais aussi « permanent » et « culture ». Depuis la Tasmanie, berceau de leur prise de conscience, ils formulent l’hypothèse d’un effondrement des subsides énergétiques injectés dans le système agro-industriel. Dès lors, la permaculture devient plus qu’une technique agricole : c’est une autre façon de concevoir le monde, un changement philosophique et matériel global. C’est une vision éthique des sociétés futures, qui seront confrontées à l’évolution des régimes énergétique et climatique.
    Aujourd’hui plus que jamais, il s’agit de rejeter les leurres de la croissance verte afin de revenir à une juste mesure en réduisant considérablement notre empreinte sur le monde. Ce qui veut dire mettre en œuvre immédiatement une nouvelle organisation sociale et culturelle, qui valorise la lenteur et enseigne les boucles de rétroactions, les liens de cause à effet, les mutualismes, la complexité. Dans la société permaculturelle, les réseaux ne sont plus invisibilisés, la frontière entre producteur et consommateur s’estompe dans un contexte de simplification progressive des mégasystèmes. Aussi bien par nécessité de résilience (dans la perspective d’un effondrement des sociétés industrielles) que par éthique des ressources, il s’agit de boucler les cycles, de passer d’une économie extractiviste de stocks à une économie renouvelable de flux. Le nouveau paysage permaculturel se veut directement comestible, au plus proche des habitants, qui eux-mêmes deviennent acteurs de ces nouveaux diagrammes alimentaires et énergétiques. Les paysages se déspécialisent, les fonctions se diversifient.
    Il en résulte une deuxième piste d’action, autour de nouvelles formes politiques territoriales ancrées dans le soin des paysages, œuvrant à la résilience des établissements humains face au nouveau régime climatique. Ces nouveaux territoires prennent le nom de « biorégions » et se substituent aux découpages administratifs actuels grâce à un changement général d’échelle et à une politique de décroissance. Les biorégions permettront, avant, pendant et peut-être après l’effondrement, d’organiser des systèmes économiques locaux territoriaux où les habitants, les manufactures et la Terre travailleront en coopération. La dynamique biorégionale stimulera le passage d’un système hyperefficient et centralisé à une organisation forgée par la diminution des besoins de mobilité, la coopération, le ralentissement, composée d’une multitude de dispositifs et de sources d’énergie. La civilisation automobile et l’agriculture intensive n’auront plus leur place dans cette nouvelle configuration. Les biorégions seront les territoires du ressaisissement.
    Des sociétés conviviales et de proximité
    La troisième voie de la résistance est celle d’un imaginaire social libéré des illusions de la croissance verte, du productivisme et de la vitesse, actionnées par les entreprises transnationales. La ville connectée, emblème d’une techno-euphorie totalement hors-sol, laissera la place à des bourgs et des quartiers off the grid (« hors réseau ») autoproducteurs d’énergie. Le nombre de véhicules sera réduit au strict minimum, les flottes seront administrées par les communes (libres !), tandis que les champs redessinés en polyculture pourront être traversés à pied. Des axes végétaux résorberont les infrastructures de la vitesse ainsi que les friches industrielles. Qui dit sociétés résilientes dit sociétés conviviales et de proximité. Aujourd’hui, chaque métropole occidentale requiert pour son fonctionnement une vaste partie de la planète. Demain, il en sera autrement, en raison de l’effondrement inéluctable des grands réseaux et de l’économie mondialisée, sur fond de bouleversements climatiques.
    Voilà trois pistes, mais il y en aura d’autres. Vivre avec la fin du monde passe nécessairement par un constant effort d’imagination pour arriver à dégager de nouveaux horizons, à les inventer, afin de refermer le couvercle du nihilisme, du mal absolu, du « tout est foutu ». Ce chantier politique ne peut être que collectif. Il faut un récit commun pour rester soudés. Certes, le récit de l’effondrement comporte des risques et des écueils, comme tout récit, mais il est puissant et a plusieurs mérites : il évite le catéchisme de la croissance, il réactive une vision cyclique des choses en appelant une renaissance, et surtout il dit que c’est maintenant ou jamais. Il nous rapproche de l’idée de la mort. D’ailleurs, n’est-ce pas ce que la philosophie nous enseigne depuis des siècles ? Apprendre à bien vivre, c’est apprendre à bien mourir, à prendre conscience de notre statut de mortel, radicalement vulnérable, humble, interdépendant des autres êtres vivants et de notre milieu de vie.

    Agnès Sinaï est journaliste environnementale. Chargée de cours à Sciences Po, elle a fondé l’Institut Momentum en 2011, laboratoire d’idées dont elle a dirigé les trois tomes des Politiques de l’anthropocène (parus aux Presses de Sciences Po).

    Pablo Servigne a une formation d’agronome et d’éthologue. Chercheur « in-terre-dépendant », auteur et conférencier, il est coauteur de plusieurs livres, dont Une autre fin du monde est possible (Seuil, 2018).

    Yves Cochet, militant écologiste depuis quarante ans, a été député de 1997 à 2011, ancien ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement (2001-202) puis député européen jusqu’en 2014. Depuis lors, il préside l’Institut Momentum.

    http://www.lemonde.fr/festival/article/2019/07/22/face-a-l-effondrement-il-faut-mettre-en-uvre-une-nouvelle-organisation-socia

    La phrase qui me paraît la plus remarquable est celle-ci :

    "Ainsi, l’effondrement est inévitable non parce que la connaissance scientifique de son advenue est trop incertaine, mais parce que la psychologie sociale qui habite les humains ne leur permettra probablement pas de prendre les bonnes décisions , au bon moment."

    Voilà une belle manière de naturaliser le #capitalisme ! Les structures de pouvoir, l’État, les entreprises, les institutions, les classes sociales, l’économie, l’industrie et la dynamique du marché capitaliste, etc. tout ça n’existe pas pour nos collapsologues. Non, c’est juste la #nature_humaine qui est responsable du désastre. C’est juste les individus qui ne prennent pas les "bonnes décisions".

    Comme le disait Margaret Thatcher : "la société n’existe pas, il n’y a que des individus qui poursuivent leurs intérêts..." (de mémoire).

    A un tel degré de #bêtise_politique, on peut se demander à quoi et à qui vont servir ces crétins et leurs dupes. Une chose est sûre, certainement pas à l’avènement d’une société émancipée des formes de domination dont ils ne veulent pas voir l’existence ni penser le rôle politique dans le maintien du statu quo ...

    Collapso, collabos ?

    #collapsologie, #naturalisation, #essentialisme, #pseudo-critique.

  • Individus sans monde
    http://www.radiopanik.org/emissions/des-singes-en-hiver/individus-sans-monde

    Pour cette troisième émission nous commencerons la tête plongée dans un brouillard hautement toxique, un brouillard mortel tout droit venu nous hanter depuis les années 30 et les usines de la vallée de la Meuse qui l’ont fait naître. Heureusement, Alexis Zimmer sera avec nous pour lever une partie de la brume sur les stratégies discursives qui hier comme aujourd’hui cherchent à naturaliser les phénomènes industriels .

    Alexis Zimmer, biologiste et philosophe, anthropologue des sciences, auteur de "Brouillards toxiques, Vallée de la Meuse, 1930, contre-enquête" aux éditions Zones Sensibles, 2016 ; et de l’article "À la recherche des #microbiotes perdus » paru dans l’ouvrage collectif "Fragmenter le monde" sous la direction de Rafanaell i Orra Josep, paru aux éditions Divergences,2018. (...)

    #naturalisation #brouillard_toxique #pollution_industrielle #singes_en_hiver #naturalisation,brouillard_toxique,pollution_industrielle,microbiotes,singes_en_hiver
    http://www.radiopanik.org/media/sounds/des-singes-en-hiver/individus-sans-monde_06551__1.mp3

  • Acquisitions de nationalité dans l’UE – Les États membres de l’UE ont octroyé la nationalité à plus de 800 000 personnes en 2017 – Les Marocains, les Albanais et les Indiens en ont été les principaux bénéficiaires

    En 2017, quelque 825 000 personnes ont acquis la nationalité d’un État membre de l’Union européenne (UE), un chiffre en baisse par rapport à 2016 (où il s’établissait à 995 000) et à 2015 (841 000). Si, parmi les personnes devenues citoyens de l’un des États membres de l’UE en 2017, 17% étaient auparavant citoyens d’un autre État membre de l’UE, la majorité était des ressortissants de pays tiers ou des apatrides.


    https://migrationsansfrontieres.com/2019/03/17/acquisitions-de-nationalite-dans-lue-les-etats-membres-de-l
    #Europe #citoyenneté #nationalité #naturalisation #statistiques #chiffres #Eurostat

    v. communiqué Eurostat :
    https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/9641781/3-06032019-AP-EN.pdf/2236b272-24b1-4b59-ade4-748361331b18

  • La plongée des « collapsologues » dans la régression archaïque – Daniel Tanuro
    http://www.contretemps.eu/critique-collapsologie-regression-archaique

    A l’heure où la jeunesse de différents pays entame des mobilisations de masse face à la catastrophe climatique, se pose de façon d’autant plus urgente la nécessité de débattre des cadres d’analyses et des réponses politiques face à la crise environnementale. Parmi les courants de pensée les plus récents sur le marché éditorial, la collaposologie[1] s’avère être un succès de librairie, en particulier grâce aux livres co-écrits par Pablo Servigne. Ce succès, largement porté par une campagne publicitaire des plus classiques, est-il un bon signe pour les luttes écologiques et sociales ? Ou n’obscurcit-il pas les horizons émancipateurs que de telles luttes sont à même dessiner ?

    « Le regard tourné vers l’avant est d’autant plus pénétrant qu’il est conscient. L’intuition, authentique, se veut nette et précise. Ce n’est que si la raison se met à parler que l’espérance, vierge de toute fraude, recommence à fleurir » (Ernst Bloch)

     

    Dans leur ouvrage Comment tout peut s’effondrer, paru en 2014, Pablo Servigne et Rafaël Stevens créaient le concept de « collapsologie », qu’ils définissaient comme suit :

    « La collapsologie est l’exercice transdisciplinaire d’étude de l’effondrement de notre civilisation industrielle et de ce qui pourrait lui succéder, en s’appuyant sur les deux modes cognitifs que sont la raison et l’intuition et sur des travaux scientifiques reconnus ».

    Ce n’était qu’un point de départ. En 2017, Pablo Servigne signait un deuxième ouvrage – L’autre loi de la jungle – avec Gauthier Chapelle. Les auteurs y reprenaient la thèse de l’anarchiste russe Kropotkine qui, dans un essai célèbre, paru en 1902, défendait l’idée – déjà émise par Marx et Engels – que l’évolution des espèces ne résulte pas seulement de la compétition, mais aussi de l’entraide[2]. Enfin, en octobre 2018, le trio Servigne-Chapelle-Stevens signait Une autre fin du monde est possible. Vivre l’effondrement et pas seulement y survivre.

    L’impact de cette trilogie mérite qu’on s’y arrête. Les « collapsologues » jouissent en effet d’une grande renommée, dans des milieux extrêmement différents. D’une part, ils sont fort populaires sur les réseaux sociaux, dans des mouvances alternatives et auprès de nombreux/ses activistes de la mouvance écologique radicale. D’autre part, ils ont été reçus à Bercy et à l’Elysée, invités par les fédérations patronales de Belgique et de Suisse et les plus grands médias mainstream ont amplement commenté leurs écrits. Certains journaux dits « de qualité » ont même été jusqu’à saluer en eux les fondateurs d’une nouvelle discipline scientifique…Qu’est-ce donc qui suscite tant d’intérêt, voire d’engouement ?

    On se concentrera ici sur le dernier livre paru, Une autre fin du monde est possible. Pablo Servigne et ses amis y répondent implicitement à certaines critiques, en ignorent d’autres et approfondissent des thèmes développés précédemment. La grande nouveauté de l’ouvrage est de proposer aux lecteurs de passer de la « collapsologie » à la « collapsosophie », autrement dit de la science de l’effondrement à la philosophie de l’effondrement. On verra que cet exercice ambitieux les entraîne vers des conceptions fort discutables, et même dangereuses.

    #collapsologie #naturalisation_des_rapports_sociaux

    • Eh bé ça va loin là…

      D’emblée, le lecteur est frappé par une contradiction : Servigne, Stevens et Chapelle découvrent l’écoféminisme… mais Une autre fin du monde n’évoque ni la lutte des femmes pour leur émancipation, ni la nécessité d’un mouvement autonome des femmes, ni la place centrale de ce mouvement dans les combats contre la destruction environnementale et sociale. Les auteurs préfèrent développer l’idée que les « archétypes féminin et masculin » sont « des polarités qui ne s’opposent pas ». Estimant que « les hommes souffrent aussi de la blessure secrète du patriarcat », ils plaident pour la « réconciliation hommes-femmes » et nous invitent à pratiquer à cet effet des « rituels initiatiques ».

      C’est là que la « collapsosophie » dérape pour plonger dans la régression archaïque, non seulement en paroles, mais en actes. Question rituels, les auteurs recommandent en effet leurs bonnes adresses : aux lecteurs mâles, ils conseillent de suivre, comme ils l’ont fait eux-mêmes, les week-ends d’initiation du « nouveau guerrier » (New Warrior Training Adventure) organisés par le ManKind Project, dont ils chantent les louanges.

      Ce ManKind Project est un business mis sur pied par trois étasuniens à l’initiative d’un certain Bill Kauth. Pour celui-ci, psychothérapeute jungien, il s’agissait de répondre à la vague féministe des années quatre-vingts. Impressionné par le potentiel émancipateur des groupements féministes, Kauth décida de mettre sur pieds des groupes non mixtes censés permettre aux hommes aussi de se libérer, en retrouvant leurs racines profondes et leur âme de mâles « adultes et sains ». Bref, en assumant leur archétype masculin.

      #anti-féminisme #essentialisme #masculinisme

    • Merci @aude_v !

      #Daniel_Tanuro avait déjà écrit des articles un peu critiques sur ce sujet :

      Une critique de la « collapsologie » : C’est la lutte qui est à l’ordre du jour, pas la résignation endeuillée
      https://www.gaucheanticapitaliste.org/leffondrement-des-societes-humaines-est-il-inevitable-une-cri

      Crise socio-écologique : Pablo Servigne et Rafaël Stevens, ou l’effondrement dans la joie
      http://www.lcr-lagauche.org/pablo-servigne-et-rafael-stevens-ou-leffondrement-dans-la-joie

      Et il y a un article de Pierre Thiesset dans de numéro de mars de La Décroissance qui montre bien comment ces "scientifiques" se font les dupes volontaires et enthousiates de diverses mystoqueries...

    • Ceci dit, chez Adrastia, ils ont même prévu un kit de « résilience » : une sacoche de biffetons bien planquée sous un matelas (et quelques marchandise trocables accumulées en réserve), solutions on ne peut plus efficace pour assurer sa survie en milieu hostile : chacun pour soi et la monnaie pour tous. Mais c’est tellement « bien argumenté », que ces vieux réflexes d’accumulation (en cas de guerre, en cas de crise ou de victoire de la gauche) et bien ça passe crème, enfin chez les CSP++, je suppose. Mais sinon, l’essentiel est de garder sa capacité à « faire société » hein ! ... Un faire société en mode « arnaquez-vous les uns les autres et malheur aux vaincus ». Une somme pour tous les bons petits soldats (guerriers sains, droits et courageux d’avant le patriarcat) du capitalisme productiviste ’globalized’

      http://adrastia.org/plan-damortissement-des-chocs-deffondrement

      Je suis un citoyen lambda, plutôt aisé, ingénieur et entrepreneur, maison, famille nombreuse, les deux pieds dans le système, le bon hamster dans sa roue en fait.

      C’est on ne peut plus clair, non ?

      #la_résilience_sans_peine #darwinisme_social #pourritures #hamster (et fier de l’être)

    • Où l’on découvre un nouveau syndrome dépressif : l’éco-anxiété :
      https://www.francetvinfo.fr/sante/environnement-et-sante/quand-le-changement-climatique-attaque-la-sante-mentale-et-si-votre-dep

      (et aussi)
      Histoire en BD d’un jeune couple gentil qui décide de passer à la « résilience ».
      http://adrastia.org/tout-va-bien-enfin-ca-va-aller

      Plüche est illustratrice et travaille sur un projet de BD, Nours est menuisier et travaille en parallèle sur des projets d’écriture et de photographie. Tous les deux sont fusionnels et vivent heureux et modestement. Mais en ce début d’année, l’équilibre économique mondial commence à s’effriter sérieusement et nos deux personnages, habitants d’une grande ville et loin d’être autonomes, vont subir ce qui se révèlera être la plus grande crise économique que l’Histoire ait connue.

      Pour passer direct à la lecture de la BD :
      https://bdtoutvabien.tumblr.com/post/179654965981/tout-va-bien-sur-vos-%C3%A9crans-en-janvier-2019

      Où l’on découvre (page 12) l’engouement de nos deux jeunes gens pour la collapsologie :
      Madame écoute (en faisant un peu d’exercice physique) une interview de Pablo Servigne (sur la chaîne Youtube de Thinkerview)
      Dialogue entre Madame et Monsieur (page 13) :
      Elle : Il faut que tu écoutes cet interview.
      Lui : D’accord. Je ferai ça cet aprèm en allant à l’atelier.
      Elle : J’ai écouté le début.
      Lui (les pieds déjà sous la table) : Notre cher Pablo est toujours aussi calme ?
      Elle (finissant de réchauffer une gamelle de pâtes) : Ah, toujours.
      (Puis faisant une petite bise affectueuse à Monsieur qui semble un peu contrarié quand même)
      Et toujours aussi beau !

      (Ouch ! ...)

  • Migration: the riddle of Europe’s shadow population
    Lennys — not her real name — is part of a shadow population living in Europe that predates the arrival of several million people on the continent in the past few years, amid war and chaos in regions of the Middle East and Africa. That influx, which has fuelled Eurosceptic nativism, has if anything complicated the fate of Lennys and other irregular migrants.

    Now she is using a service set up by the Barcelona local administration to help naturalise irregular migrants and bring them in from the margins of society. She is baffled by the anti-immigrant rhetoric of politicians who suggest people like her prefer living in the legal twilight, without access to many services — or official protection.❞

    The fate of Lennys and other irregulars is likely to take an ever more central role in Europe’s deepening disputes on migration. They are a diverse group: many arrived legally, as Lennys did, on holiday, work or family visas that have since expired or become invalid because of changes in personal circumstances. Others came clandestinely and have never had any legal right to stay.

    The most scrutinised, and frequently demonised, cohort consists of asylum seekers whose claims have failed. Their numbers are growing as the cases from the surge in migrant arrivals in the EU in 2015 and 2016 — when more than 2.5m people applied for asylum in the bloc — work their way through the process of decisions and appeals. Almost half of first instance claims failed between 2015 and 2017, but many of those who are rejected cannot be returned to their home countries easily — or even at all.

    The question of what to do about rejected asylum applicants and the rest of Europe’s shadow population is one that many governments avoid. Bouts of hostile rhetoric and unrealistic targets — such as the Italian government’s pledge this year to expel half a million irregular migrants — mask a structural failure to deal with the practicalities.

    Many governments have sought to deny irregular migrants services and expel them — policies that can create their own steep human costs. But authorities in a growing number of cities from Barcelona to Brussels have concluded that the combination of hostile attitudes and bureaucratic neglect is destructive.

    These cities are at the frontline of dealing with irregular status residents from Africa, the Middle East and elsewhere. Local authorities have, to varying degrees, brought these populations into the system by offering them services such as healthcare, language courses and even legal help.

    The argument is part humanitarian but also pragmatic. It could help prevent public health threats, crime, exploitative employment practices — and the kind of ghettoisation that can tear communities apart.

    “If we provide ways for people to find their path in our city . . . afterwards probably they will get regularisation and will get their papers correct,” says Ramon Sanahuja, director of immigration at the city council in Barcelona. “It’s better for everybody.”

    The size of Europe’s shadow population is unknown — but generally reckoned by experts to be significant and growing. The most comprehensive effort to measure it was through an EU funded project called Clandestino, which estimated the number of irregular migrants at between 1.9m and 3.8m in 2008 — a figure notable for both its wide margin of error and the lack of updates to it since, despite the influx after 2015.

    A more contemporaneous, though also imprecise, metric comes from comparing the numbers of people ordered to leave the EU each year with the numbers who actually went. Between 2008 and 2017, more than 5m non-EU citizens were instructed to leave the bloc. About 2m returned to countries outside it, according to official data.

    While the two sets of numbers do not map exactly — people don’t necessarily leave in the same year they are ordered to do so — the figures do suggest several million people may have joined Europe’s shadow population in the past decade or so. The cohort is likely to swell further as a glut of final appeals from asylum cases lodged since 2015 comes through.

    “The volume of people who are in limbo in the EU will only grow, so it’s really problematic,” says Hanne Beirens, associate director at Migration Policy Institute Europe, a think-tank. “While the rhetoric at a national level will be ‘These people cannot stay’, at a local community level these people need to survive.”

    Barcelona: cities seek practical solutions to ease migrant lives

    Barcelona’s pragmatic approach to irregular migration echoes its history as a hub for trade and movement of people across the Mediterranean Sea.

    It is one of 11 cities from 10 European countries involved in a two-year project on the best ways to provide services to irregular status migrants. Other participants in the initiative — set up last year by Oxford university’s Centre on Migration, Policy, and Society — include Athens, Frankfurt, Ghent, Gothenburg, Lisbon, Oslo, Stockholm and Utrecht.

    A report for the group, published last year, highlights the restrictions faced by undocumented migrants in accessing services across the EU. They were able to receive only emergency healthcare in six countries, while in a further 12 they were generally excluded from primary and secondary care services.

    Some cities have made special efforts to offer help in ways that they argue also benefit the community, the report said. Rotterdam asked midwives, doctors, and schools to refer children for vaccinations, in case their parents were afraid to reveal their immigration status.

    The impact of some of these policies has still to be demonstrated. Ramon Sanahuja, director of immigration at the city council in Barcelona, says authorities there had an “intuition” their approach brought benefits, but he admits they need to do a cost-benefit analysis. As to the potential for the scheme to be exploited by anti-immigrant groups, he says Europe needs “brave politicians who explain how the world works and that the system is complicated”.

    “A lot of people in Barcelona are part of the system — they have [for example] a cleaning lady from Honduras who they pay €10 per hour under the counter,” he says. “Someone has to explain this, that everything is related.” Michael Peel

    https://www.ft.com/content/58f2f7f8-c7c1-11e8-ba8f-ee390057b8c9?segmentid=acee4131-99c2-09d3-a635-873e61754
    #naturalisation #villes-refuge #ville-refuge #citoyenneté #sans-papiers #migrerrance #régularisation #statistiques #chiffres #Europe #Etat-nation #limbe #pragmatisme #Barcelone

    cc @isskein

    –----

    Au niveau de la #terminologie (#mots, #vocabulaire), pour @sinehebdo:

    Belgian policy towards irregular migrants and undocumented workers has stiffened under the current government, which includes the hardline Flemish nationalist NVA party. It has prioritised the expulsion of “transmigrants”— the term used for people that have travelled to Europe, often via north Africa and the Mediterranean and that are seeking to move on from Belgium to other countries, notably the UK. Several hundred live rough in and around Brussels’ Gare du Nord.

    –-> #transmigrants

  • Pakistan PM to Offer Citizenship to Afghans Born in #Pakistan

    Pakistani Prime Minister Imran Khan, in an unprecedented announcement Sunday, pledged to offer Pakistani citizenship to hundreds of thousands of Afghans born to refugee families his country has been hosting for decades.

    The United Nations refugee agency and local officials say there are 2.7 million Afghans, including 1.5 million registered as refugees, in Pakistan. The displaced families have fled decades of conflict, ethnic and religious persecution, poverty and economic hardships in turmoil-hit Afghanistan.

    “Afghans whose children have been raised and born in Pakistan will be granted citizenship inshallah (God willing) because this is the established practice in countries around the world. You get an American passport if you are born in America,” said Khan, who took office last month.

    “Then why can’t we do it here. We continue to subject these people to unfair treatment,” the Pakistani prime minister said at a public event in the southern port city of Karachi Sunday night.

    U.N. surveys suggest that around 60 percent of Afghan refugees were either born in Pakistan or were minors when their parents migrated to Pakistan. War-shattered Afghanistan is therefore alien to most of these young people who are already part of the local economy in different ways.

    This group of refugees, officials say, are reluctant to go back to Afghanistan where security conditions have deteriorated in the wake of the stalemated war between U.S.-backed Afghan security forces and the Taliban insurgency.

    Khan noted in his nationally televised remarks that without Pakistani national identification cards and passports, the refugees have been unable to find decent legal jobs or get a quality education in local institutions.

    These people, the prime minister said, will eventually be forced to indulge in criminal activities, posing security issues for areas like Karachi, the country’s largest city and commercial hub. Afghans are a significant portion of the nearly 20 million residents in Karachi.

    “They are humans. How come we have deprived them and have not arranged for offering them national identification card and passport for 30 years, 40 years,” Khan lamented.

    The Pakistani leader explained that since he is also directly overseeing the federal Interior Ministry, which is responsible for granting passports and identification cards, he will instruct his staff to make efforts without further delay to offer Pakistani nationality to the people “who have come from Afghanistan and whose children are raised and born in here.”

    Khan spoke a day after his Foreign Minister, Shah Mehmood Qureshi, visited Afghanistan, where he discussed among other issues the fate of the registered Afghan refugees who have until December 31, 2018, to stay in Pakistan legally.

    An official statement issued after Qureshi’s daylong trip to Kabul said that in his meetings with Afghan leaders, the foreign minister “underlined the need for dignified, sustainable repatriation of Afghan refugees to their homeland through a gradual and time-bound plan.”

    Pakistani authorities have lately complained that Taliban insurgents waging attacks inside Afghanistan have been using the refugee communities as hiding places. Both countries accuse each other of supporting militant attacks against their respective soils. The allegations are at the center of bilateral political tensions.

    In a meeting last week with visiting U.N. High Commissioner for Refugees, Filippo Grandi, Khan assured him that his government will not force Afghan refugees to leave Pakistan.

    https://www.voanews.com/a/pakistan-pm-to-offer-citizenship-to-afghans-born-in-pakistan/4574015.html
    #citoyenneté #naturalisation #asile #migrations #réfugiés #réfugiés_afghans

    ping @isskein

  • Le projet de passeport autrichien pour ses germanophones fâche l’Italie Belga - 7 Septembre 2018 - RTBF
    https://www.rtbf.be/info/monde/detail_le-projet-de-passeport-autrichien-pour-ses-germanophones-fache-l-italie?

    Le ministère italien des Affaires étrangères a dénoncé vendredi soir la poursuite du projet de Vienne d’offrir un passeport autrichien aux habitants germanophones de la province de Bolzano, dans le nord-est de la péninsule.

    Le ministère a annoncé avoir appris l’existence à Vienne d’une commission gouvernementale chargée de préparer un projet de loi pour sur l’instauration de cette double nationalité.

    « Cette initiative est inopportune en raison de sa portée potentiellement perturbatrice », a insisté le ministère.



    « Il est surtout singulier que le gouvernement assurant la présidence tournante de l’Union européenne, plutôt que de se concentrer sur des actions qui unissent et favorisent la concorde réciproque entre les pays, cultive des projets de loi susceptibles de fomenter la discorde », a-t-il ajouté.

    « Une telle initiative est de plus vraiment curieuse si l’on considère que pour unir les citoyens des différents pays membres de l’UE, il existe déjà la citoyenneté européenne, comme le stipulent les passeports délivrés par chaque Etat » membre, a poursuivi le ministère.

    Province autonome
    La province de #Bolzano, une région montagneuse appelée Alto Adige (Haut-Adige) en italien et Südtirol en allemand, a été principalement autrichienne pendant des siècles, avant d’être intégrée après la Première guerre mondiale à l’Italie, où elle bénéficie d’un régime d’autonomie particulier.

    Au dernier recensement en 2011, 70% de ses habitants s’y sont déclarés germanophones, 26% italophones et 4% ladinophones, une langue rare locale d’origine romane. Le programme du gouvernement autrichien prévoit de proposer un passeport aux germanophones et aux ladinophones.

    Lors de l’annonce du projet fin 2017, les responsables de la province autonome de Bolzano s’étaient réjouis de cette opportunité tout en réaffirmant leur ancrage européen, tandis que leurs voisins également germanophones du Trentin avaient regretté de ne pas figurer dans les plans de Vienne.

    #nationalité #citoyenneté #identité #Sudètes #germanophones #frontières #minorités #nationalisme #UE #union_européenne #Autriche #Italie #passeport #patrie

  • Lessons from Tanzania’s Historic Bid to Turn Refugees to Citizens

    Tanzania was lauded for offering citizenship to 200,000 Burundians, the largest-ever mass naturalization of refugees. But a political stalemate emerged between humanitarians and the government, leaving refugees stuck in the middle, explains researcher Amelia Kuch.

    During Europe’s so-called migrant crisis of 2015, the Tanzanian government gave over 200,000 Burundian refugees a choice between repatriation – returning to Burundi – and naturalization – obtaining Tanzanian citizenship.

    Given the choice, 79 percent of the refugees – 171,600 people – opted for Tanzanian citizenship. It is understood to be the first time in history any state has naturalized such a large group of refugees under the protection of the U.N. refugee agency (UNHCR) in a single move.

    This group of refugees had fled Burundi following ethnic violence and killings in 1972 and now live in three rural settlements in Tanzania: Katumba, Mishamo and Ulyankulu. Since the 1970s, these settlements had transformed into towns: People made improvements to their homes, electricity poles were laid out and the local markets began to expand.

    Research has shown that access to citizenship is an important means of resolving long-term displacement. Yet in most countries, granting citizenship to refugees is still politically unthinkable.

    Tanzania has long been held up as a safe haven for refugees in the region, giving shelter to some 315,000 mainly Burundian and Congolese refugees. The naturalization of Burundian refugees was hailed as a model for progressive solutions to displacement. Yet it has led to a political stalemate between humanitarian organizations and the government, with the “refugees-turned-citizens” stuck in the middle.

    Last month, the Tanzanian government halted the naturalization of another group of more recently arrived Burundian refugees and has since pulled out of the U.N.’s Comprehensive Refugee Response Framework, citing lack of international funding.

    During my research in the former Burundian refugee camps in Western Tanzania since 2014, I have spoken with many former refugees about the naturalization process, as well as NGO employees and government officials.

    The difficulties in Tanzania are important to understanding the challenges of mass naturalization. It is not easy to turn a camp of refugees into a settlement of citizens. They also demonstrate how important it is for refugees to be able to hold both governments and humanitarian organizations accountable when things go wrong.
    A Progressive Solution is Born

    Negotiations around Tanzania’s naturalization policy began in 2007. They resulted in the Tanzania Comprehensive Solution Strategy (TANCOSS), which was adopted that year by the governments of Tanzania and Burundi in partnership with UNHCR. The agreement had three pillars: repatriation to Burundi, granting citizenship to those who opted to pursue naturalization and relocation of naturalized refugees from the settlements to other regions of Tanzania.

    Major investments were promised to facilitate the process. Some $103 million was earmarked for relocation and integration of naturalized refugees in the 2011-15 United Nations Development Assistant Plan (UNDAP).

    Eventually, the resettlement pillar was abandoned because of logistical problems and local resistance to resettling refugees. As a result, the new citizens were permitted to remain in the areas of the settlements in which they had lived for the past four decades. They can now vote in national elections and join political parties.

    “Obtaining citizenship and being allowed to stay here brought peace into my heart. Before I lived in fear,” said one former refugee named Daniel.
    Left in Limbo

    Yet the initial TANCOSS agreement did not include any detailed plans for the refugee settlements after the naturalization of their residents. As a consequence, today the area remains in a governance limbo.

    Every refugee camp had a settlement officer who represented the Ministry of Home Affairs and was responsible for governing the area. Settlement officers remain in power in all three settlements, and they continue to act as the highest authority and arbiters of conflicts.

    “Naturalization certificates are important because they allow us to move, but opening of this space is crucial and still needs to happen,” said one church leader in Ulyankulu, referring to the full integration of the settlements. “As long as we still have a settlement officer and a closed space, the process is not complete.”

    It remains unclear when and how a transition to local governance will take place and what rights to the land the new citizens have. The Tanzania Strategy for Local Integration Program for the New Citizens (TANSPLI), drafted in 2016, stipulates the creation of a master land use plan for the settlements and the surrounding areas, followed by the registration of villages in each settlement and provision of documentation for land rights.

    However, the timeline for implementation is unclear. It “hinges on the availability of funding for the planned development projects,” according to Suleiman Mziray, who is assistant director of refugee services at Ministry of Home Affairs.

    “People here don’t have ownership, you can be taken off your land at any time,” said one elderly man from Kaswa village in Ulyankulu settlement. “It’s like a marriage with no certificate.”
    Lack of Accountability

    Some of these challenges have led to a political stalemate between humanitarian organizations and the government, with each claiming the other has not kept its promises. Meanwhile, residents of the settlements suffer the consequences, as they wait for citizenship documents and investment in infrastructure like access to clean water.

    Due to major delays in the distribution of citizenship certificates by the government, international funding for the promised development projects was redirected to other emergencies. Some of the aid was initially meant for resettlement, so once the refugees were allowed to stay in the former camps, funds were reallocated. Now that they are no longer refugees but citizens, they fall into a responsibility gap. “We have done our part,” a UNHCR official told me on condition of anonymity.

    On the other side is the Tanzanian government: frustrated and disillusioned. They say they were promised that major investments will follow the distribution of citizenship but they never arrived. “We kept our part of the deal and distributed citizenship. But none of the promises materialized,” said an official at the Ministry of Home Affairs.

    The government says it does not intend to invest in the settlements for now, as they are still hoping that international funding might come through eventually.

    Earlier agreements left it ambiguous who would be responsible for implementing the administrative, developmental and social programs that were designed to turn former refugee settlements into properly integrated towns and villages. Without accountability mechanisms, it is hard for former refugees to hold humanitarian organizations or the government to their initial promises.
    Three Lessons from Tanzania

    Clearly, the design and implementation of the naturalization policy was far from perfect. The experience of Tanzania offers a few important lessons.

    First, if similar mass naturalization policies are to be implemented elsewhere, it is key that they are drafted as binding documents, where the parties dedicated to the process (both national governments and international organizations) can be held accountable if they do not deliver on the promises and commitments made within an agreed timeline.

    Second, such policies should be more carefully drafted, incorporating provisions on post-naturalization arrangements regarding local governance and land ownership.

    Finally, despite the pitfalls and unforeseen challenges, my interviews with former refugees shows that naturalization is very important to them. They are acutely aware that citizenship is not a panacea, but firmly maintain that access to legal status provides them with a sense of security and the right to remain in the country, allaying fears of forced repatriation and deportation.

    https://www.newsdeeply.com/refugees/community/2018/02/22/lessons-from-tanzanias-historic-bid-to-turn-refugees-to-citizens?platfor
    #naturalisation #citoyenneté #nationalité #modèle_tanzanien #Tanzanie #asile #migrations #réfugiés #réfugiés_burundais

    v. aussi le #modèle_ougandais qui donne un lopin de terre aux réfugiés

  • Aux #États-Unis, les citoyens naturalisés risquent désormais de perdre leur nationalité | Courrier international
    https://www.courrierinternational.com/article/aux-etats-unis-les-citoyens-naturalises-risquent-desormais-de

    Cette procédure de dénaturalisation est historiquement “extrêmement rare”, explique Masha Gessen, journaliste russo-américaine et auteure de l’article : 

    Et pour cause : le temps qu’une personne obtienne sa #naturalisation, elle a vécu dans le pays depuis plusieurs années et a franchi les différents obstacles pour obtenir le droit de séjour, la résidence permanente et, finalement, la #citoyenneté”.

    Avec cette nouvelle équipe, les citoyens naturalisés américains n’ont plus la garantie de le rester pour toujours. “Nous sommes tous maintenant des citoyens de seconde classe”, déplore la journaliste.

    La seule création de ce service annule la naturalisation de plus de vingt millions de citoyens en niant leur présomption de droit à la résidence permanente.”

    Selon Masha Gessen, “c’est le raisonnement sous-jacent de cette nouvelle initiative qui la rend si contestable : l’idée que les États-Unis sont envahis par des #immigrés malveillants et nuisibles qui trouvent des moyens de s’installer ici.”