• Legal fiction of non-entry in EU asylum policy

    The fiction of ’#non-entry' is a claim that states use in border management to deny the legal arrival of third-country nationals on their territory, regardless of their physical presence, until granted entry by a border or immigration officer. It is usually applied in transit zones at international airports between arrival gates and passport control, signifying that the persons who have arrived have not yet entered the territory of the destination country. Although physically present, they are not considered to have legally entered the country’s official territory until they have undergone the necessary clearance. In the EU, all Member States make use of the fiction of non-entry in transit zones at ports of entry, but usually in a non-asylum context. In 2018, Germany was one of the first Member States to extend this concept to include land crossings. Since the mass arrival of asylum-seekers in 2015-2016, other Member States too have increasingly looked into ways of using this claim to inhibit asylum-seekers’ entry to their territory and thereby avoid the obligation under international law to provide them with certain protection and aid. This, however, may lead to a risk of refoulement, as the fiction of non-entry limits asylum-seekers’ movement and access to rights and procedures, including the asylum procedure. This is a revised edition of a briefing published in March 2024.

    #pacte #asile #migrations #réfugiés #droit_d'asile #fiction_juridique #fiction_légale #legal_fiction #non-entrée #aéroports #territoire #géographie #zones_frontalières #zones_de_transit #présence_physique

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    ajouté à la métaliste sur #Pacte_européen_sur_la_migration_et_l’asile :
    https://seenthis.net/messages/1019088

    ajouté à la métaliste autour de la Création de zones frontalières (au lieu de lignes de frontière) en vue de refoulements :
    https://seenthis.net/messages/795053

  • L’ère de la standardisation : conversation sur la Plantation, Anna Lowenhaupt Tsing, Donna Haraway
    https://www.terrestres.org/2024/02/23/lere-de-la-monoculture-et-de-la-standardisation-conversation-sur-la-plan

    [Donna Haraway] D’une certaine manière, la notion de #Plantationocène nous force à prêter attention aux cultures qui se sont constituées autour de la nourriture et de la #plantation en tant que système de #travail forcé multi-espèces. Le système de la plantation accélère la temporalité même des générations. La plantation perturbe en effet les successions de génération pour tous les acteurs·trices humains·es et non humains·nes. Elle simplifie radicalement leur nombre et met en place des situations favorisant la vaste prolifération de certain·es et l’élimination d’autres. Cette façon de réorganiser la vie des espèces favorise en retour les épidémies. Ce système dépend d’un certain type de travail humain forcé, car si jamais la main-d’œuvre peut s’échapper, elle s’enfuiera de la plantation.

    Le système de la plantation nécessite donc soit un génocide ou l’exil forcé d’une population, ou encore un certain mode d’enfermement et de remplacement de la force de travail locale par une main d’œuvre contrainte venant d’ailleurs. Cela peut être mis en place par des contrats bilatéraux mais quoiqu’il en soit asymétriques, soit par de l’esclavage pur et simple. La plantation dépend ainsi par définition de formes très intenses de #travail_forcé, s’appuyant aussi sur la sur-exploitation du travail mécanique, la construction de machines pour l’exploitation et l’extraction des êtres terrestres. Je pense d’ailleurs qu’il est essentiel d’inclure le travail forcé des #non-humains – plantes, animaux et microbes – dans notre réflexion.

    Dès lors, lorsque je réfléchis à la question de savoir ce qu’est une plantation, il me semble qu’une combinaison de ces éléments est presque toujours présente sur les cinq derniers siècles : simplification radicale ; remplacement de peuples, de cultures, de microbes et de formes de vie ; travail forcé. Plus encore peut-être que ces éléments, la plantation repose en outre sur le bouleversement des temporalités qui rendent possible la succession des générations, la transmission et le passage d’une génération à l’autre pour chaque espèce, y compris pour les êtres humains. J’évite le mot reproduction à cause de son aspect productiviste, mais je veux souligner l’interruption radicale de la possibilité de prendre soin des générations et, comme Anna me l’a appris, la rupture du lien avec le lieu – la capacité d’aimer et de prendre soin des localités est radicalement incompatible avec la plantation. En pensant à la plantation, toutes ces dimensions semblent être constamment présentes à travers diverses configurations.

    Anna Tsing : J’ajouterai brièvement que le terme plantation m’évoque l’héritage d’un ensemble bien particulier d’histoires convoquant ce qui s’est passé après l’invasion européenne du Nouveau Monde, notamment la capture d’Africain·es comme main-d’œuvre asservie et la simplification des cultures pour forcer les travailleurs·euses asservi·es à devenir des travailleurs·euses agricoles. Dans de nombreuses petites exploitations agricoles indépendantes, des dizaines de cultures agricoles différentes peuvent être pratiquées et exiger du soin de la part des agriculteurs-trices qui se préoccupent de chacune d’elles. En concevant à l’inverse des systèmes reposant sur du travail forcé et contraint, l’agriculture en est venue à reposer sur des simplifications écologiques.

    #histoire #mise_au_travail #capitalisme #anthropocène #capitalocène #écologie

  • Prof. Hanna Kienzler 🧡 🇵🇸 sur X :
    https://twitter.com/HannaKienzler/status/1758129312220484003

    These days, I often think of my German teacher. As 16-year-olds we learned lots about the Holocaust and other Nazi crimes by reading books, watching films, visiting places of commemoration, and talking to older people who survived or witnessed the atrocities.

    In this process, we started to become arrogant accusing our grandparents and their generation of their deeds and stating that we would (or rather could) never partake in such horrors.

    We were convinced that we had amassed enough civil courage to not only withstand calls to partake in violence, condemn those who do, and protect people targeted. Hearing our narrative and observing our increasing self-confidence, our teacher intervened saying something along these lines: “Slow down! You have no idea of the violence you are capable of perpetrating . You have no idea if you would have the stamina to speak out against injustice, let alone protect others. History has never tested you. You never had to prove yourselves.”

    I remember his words every day as I witness the violence perpetrated by Israel against Palestinians. I am being tested by history – we all are - and have a choice to make of how we want to go down in the books of history.

    #Gaza
    #génocide #assistance_de_génocide #génocide_assisté
    #non-assistance_à_génocidés

  • « #Anatomie_d’une_chute » et la question de l’#interprétation du #récit

    « Vous ne contextualisez pas, vous délirez sur un détail ! »
    « Un roman n’est pas la vie, un auteur n’est pas un personnage ! »
    « Mais un auteur peut exprimer ses idées par ses personnages ! »

    Des bribes d’un cours de licence de lettres ? Des débats lors d’un colloque littéraire ? Non ! Il s’agit de certains échanges entre les personnages du film Anatomie d’une chute de Justine Triet, palme d’or du dernier Festival de Cannes, qui met en scène le procès de l’écrivaine Sandra Voyter, accusée d’avoir tué son mari Samuel.

    On pourrait penser que ces échanges sont irréalistes. Mais la littérature s’invite parfois dans des procès bien réels : dans Histoire de la violence, Edouard Louis relate, de manière autobiographique, un épisode traumatique (une agression physique et un viol). Lors du procès, son avocat a renvoyé, dans sa plaidoirie, au récit de l’écrivain, alors que l’avocate de l’accusé a déclaré qu’Edouard Louis « avait confondu son roman avec la réalité ». La procureure elle, a appelé à trouver une « vérité judiciaire » et non « littéraire ».

    La manière dont le film de Justine Triet traite la question du couple, du genre, de l’innocence et de la culpabilité a été abondamment commentée. Mais une autre question irrigue le film : celle de l’interprétation du récit littéraire (les deux protagonistes du couple étant, l’une écrivaine à succès, l’autre aspirant écrivain), notamment lorsque ce récit joue sur certaines marges troubles, entre fiction et non-fiction, représentation artistique et fidélité mimétique au réel et lorsqu’il se confronte à d’autres récits, qui ont leurs propres critères de cohérence, de validité, de recevabilité : le récit juridique, mais aussi le récit journalistique, le récit psychanalytique, le récit médical, le récit d’expert, etc.

    Chaque catégorie peut par ailleurs se décliner en une multitude de récits : les récits des avocats comme ceux des experts peuvent être diamétralement opposés, par exemple. Le passage d’une langue à l’autre dans le film – de l’anglais au français et vice-versa – nous fait d’ailleurs littéralement entendre cette polyphonie.

    L’autofiction, ou l’art de brouiller les limites entre fiction et réalité

    « What do you want to know ? » (« Que voulez-vous savoir ? ») demande, au tout début du film, Sandra à l’étudiante venue l’interroger. Elle veut savoir ce qui relève de la réalité et de la fiction dans les écrits de Sandra Voyter, et si l’écrivaine pense qu’on ne peut inventer, créer, qu’à partir de la réalité. Or la production littéraire de Sandra se situe dans un genre qu’on peut appeler l’autofiction.

    Le terme a été employé pour la première fois en 1977 par l’écrivain et critique Serge Doubrovsky (pour qualifier son récit, Fils). Il mêle ce qu’on pourrait croire a priori opposé : l’autobiographie et la fiction. L’autofiction est en effet un récit inspiré par la vie de l’autrice ou de l’auteur du récit, mais un récit qui se permet de romancer, d’imaginer, qui ne veut pas se plier aux critères de sincérité, d’authenticité, de conformité aux faits qu’on associe souvent à l’autobiographie traditionnelle (et au « pacte autobiographique » tel qu’il a été défini par Philippe Lejeune).

    Le terme autofiction a donné lieu à de multiples définitions et à de multiples critiques, comme l’a montré le chercheur Philippe Gasparini. Il n’est notamment pas aisé de le distinguer du roman autobiographique comme l’a résumé Sylvie Jouanny, on peut distinguer deux tendances : l’une, référentielle, qui repose sur l’homonymie entre narrateur/narratrice, auteur/autrice et personnage et qui considère que « l’autofiction est un roman qui traite de la réalité, fût-ce dans le recours à la fiction », l’autre, fictionnelle, qui défend « la fiction plus que l’autobiographie » et s’intéresse au travail de « fictionnalisation de soi » (cette fictionnalisation pouvant remettre en cause l’homonymie entre narrateur/narratrice, auteur/autrice et personnage).

    Dans Anatomie d’une chute, il est admis que Sandra Voyter écrit de l’autofiction en s’inspirant des éléments de sa vie (notamment l’accident de son fils, mais aussi ses relations avec son père). Lorsque l’étudiante, au début du film, essaie de distinguer ce qui est réel de ce qui est inventé, Sandra esquive et déplace le sujet de la conversation. Mais, tout au long du film, elle va devoir répondre aux questions de la police, de ses avocats, avant et pendant le procès.

    Elle va devoir parler d’elle, de ses livres, et chaque élément de son discours va être disséqué, chacun des mots prononcés (ou échappés, comme lorsque l’étudiante appelle l’accusée par son prénom durant le procès) va être analysé comme on pourrait le faire dans une explication de texte.
    « Alors, on va vraiment entrer dans un débat littéraire ? »

    C’est lorsqu’un des livres de Sandra est brandi au procès, malgré les protestations d’une des avocates de la défense (« On ne juge pas des livres, on juge des faits ») qu’on se retrouve au cœur de questions débattues dans le monde de la recherche et de la critique littéraires.

    Reprenons les échanges entre l’accusation et la défense et la manière dont ces débats incarnent différentes manières de lire l’œuvre littéraire.

    Les questions posées sont fondamentales dès qu’il s’agit d’interpréter une œuvre littéraire : qui parle ? (le personnage ou l’auteur/l’autrice ?) Peut-on comprendre le sens d’un extrait (d’un livre ou d’un enregistrement – celui de la dispute du couple –) sans le mettre en rapport avec un contexte plus large ? Qui décide du sens d’un texte (la personne qui produit le discours ? Celle qui le reçoit ?)

    L’accusation veut lire l’extrait d’un livre de Sandra Voyter, qui raconte les pensées d’un personnage qui éprouve le désir de tuer. L’accusation établit clairement un lien mimétique entre ce passage et la mort de Samuel : Sandra aurait préfiguré dans son roman son désir de tuer.

    Pour la défense, c’est inacceptable : « Vous ne contextualisez pas ! Vous délirez sur un détail » ! L’extrait n’est pas contextualisé, il ne s’agit que d’un personnage secondaire, qui d’ailleurs ne passe pas à l’acte. Même dans le régime du texte littéraire, il ne s’agit que d’un fantasme, pas d’un fait. La défense reproche à l’accusation de surinterpréter en faisant d’un passage secondaire le cœur du livre – ce à quoi l’accusation répond que la défense avait également relevé ce passage, ce qui voudrait dire qu’elle le considérait bien comme significatif.

    La défense insiste : il faut distinguer l’autrice du personnage. Le point de vue du personnage n’engage pas l’autrice. Il existe une différence entre le monde de la fiction (du personnage) et celui de la réalité (de l’autrice).

    L’accusation se justifie alors sur ce dernier point : « Les livres de Sandra Voyter font partie du procès, elle y met son existence, notamment son couple ». Les livres de l’accusée appartiennent au récit de soi, d’inspiration autobiographique, on peut donc faire cette adéquation entre personnage et autrice puisqu’il ne s’agit pas de fiction.

    Pour la défense, il ne s’agit pas d’autobiographie, mais d’autofiction, un genre qui se permet de réintroduire de la fiction dans l’écriture de soi. La défense essaie de ridiculiser la lecture de la littérature comme mimétique de la réalité (« Vous allez nous dire que Stephen King est un serial killer ? »), l’accusation la justifie (« La femme de Stephen King n’a pas été retrouvée morte ! »)
    La littérature ou le jeu avec les limites

    Par rapport au trouble suscité par le récit littéraire, l’enregistrement de la dispute entre Sandra et son mari semble pouvoir constituer un récit fiable. Mais en réalité cette dispute se révèle être, comme le dit l’avocat de la défense, un « document ambigu » tout aussi ambigu que le texte de Sandra Voyter, pour deux raisons.

    D’une part, comme le texte cité par l’accusation, l’enregistrement n’est qu’un extrait, qu’un moment de la relation entre deux personnes et ne peut représenter toute leur vie. Sandra Voyter le dit : l’enregistrement n’est pas la réalité, car il n’est qu’une partie de la réalité – tout comme elle dit au psychanalyste, joué par le metteur en scène Wajdi Mouawad, qui rapporte le récit de ses sessions avec Samuel : « Mais ce que vous dites n’est qu’une petite partie de la situation globale ». Il s’agit bien de leurs échanges, de leurs mots, de leurs voix, mais ce n’est pas eux – tous leurs êtres, la somme de leurs échanges, de leurs interactions, de leurs corps : on ne peut jamais saisir l’entièreté d’un être ni d’une relation.

    D’autre part, alors qu’on croit a priori, avec cet enregistrement, être à coup sûr dans le domaine de la réalité, des faits (et non de la fiction et de la représentation) on apprend, via l’avocat de la défense, que Samuel enregistrait des moments de sa vie et les retranscrivait, qu’il cherchait à faire de « l’autofiction » (le mot est prononcé) en s’inspirant de la méthode de son épouse. On pense ici à différentes productions de littérature contemporaine qui donnent une part de plus en plus importante à des documents matériels : Annie Ernaux, qui retranscrit son journal intime (dans Se perdre ou Je ne suis pas sortie de ma nuit), qui introduit des reproductions de photographies dans ses livres (tout comme Édouard Louis), Neige Sinno qui reproduit dans Triste Tigre les articles de presse parlant de son enfance et de l’arrestation de son beau-père pour viol.

    On pense plus généralement aux productions, qui se développent depuis les années 1960, que la chercheuse Marie-Jeanne Zenetti appelle, après l’écrivain Magnus Enzensberger, des factographies. Les factographies cherchent une nouvelle manière de dire le réel en captant des images, des sons, des discours. Elles peuvent se manifester formellement par des compilations de notes, des retranscriptions, des reproductions d’archives. Dans ces récits à l’« écriture enregistreuse », il s’agit de « jouer au document et avec le document » comme le dit Marie-Jeanne Zenetti.

    L’enregistrement fait par Samuel Voyter n’est-il pas aussi un objet littéraire ? La défense se demande ainsi si Samuel n’aurait pas provoqué la dispute pour avoir de la matière pour son livre. L’ordre traditionnel (la littérature qui vient après la vie, retranscrit la vie, représente la vie) est inversé : il y aurait d’abord la littérature (l’envie d’écrire, la mise en scène) et ensuite la vie. On retrouve les propos tenus par Sandra Voyter dans un ancien entretien : « Mon travail, c’est de brouiller les pistes pour que la fiction détruise le réel » et le commentaire des journalistes : « On a l’impression que ça vient de ses livres, qu’elle l’a déjà écrit ».

    Dernier récit et dernier doute du film : lorsque l’enfant du couple, Daniel, fait le récit de son trajet avec son père, pour emmener leur chien chez le vétérinaire. Il rapporte les propos de Samuel, qui aurait filé une métaphore entre l’état du chien et le sien, pour préparer son fils à sa mort prochaine. « Ce récit est extrêmement subjectif » déclare l’accusation. S’agit-il d’une interprétation ? D’une invention ? Ou Daniel se met-il lui aussi à pratiquer l’autofiction ?
    Anatomie d’une chute ou les mises en abyme du récit

    En filmant le public du procès, la réalisatrice met en abyme notre situation de spectatrices et spectateurs : nous regardons le public qui regarde le procès, ce public qui frémit à l’annonce d’un éventuel rebondissement – tout comme nous. Le film nous renvoie à nos attentes et nos projections sur le type de récit que nous avons envie de voir (ou d’entendre, ou de lire…)

    Ainsi, dans une émission de débat télévisé de deuxième partie de soirée représentée dans le film – sur laquelle tombe Sandra Voyter en zappant – la question de sa culpabilité ou de son innocence n’est plus liée aux faits, mais, plus cyniquement (ou d’un point de vue plus littéraire ?) à l’intérêt de l’un ou l’autre récit : « L’idée d’une écrivaine qui assassine son mari est tellement plus intéressante que celle d’un prof qui se suicide ».

    D’un côté, les émois potentiellement romanesques du couple, le lien dangereux entre fiction et non-fiction, de l’autre la mort banale d’un homme qui a échoué en tant qu’écrivain. La conclusion judiciaire du procès a l’air d’entériner le second récit (le suicide), puisque Sandra est acquittée, mais c’est bien le premier récit (la femme coupable) qui est interrogé et mis en scène. Parce que c’est ce que le public (le public du procès, le public du film) voulait voir ?

    « Je crois qu’il y a eu trop de mots dans ce procès et j’ai plus rien à dire », déclare Sandra Voyter aux journalistes à la sortie du tribunal. De fait, on parle beaucoup dans Anatomie d’une chute (nous avons pu commenter le film dans cet article en ne parlant quasiment que de dialogue verbal, sans mentionner les autres manifestations du langage cinématographique !) – jusqu’au silence final de Sandra : la multitude des récits n’aboutit pas à une vérité proclamée, mais à l’indicible, à l’invérifiable, à l’opacité (ce qui est devenu quasiment un topos romanesque). Se refuser à toute conclusion rassurante, est-ce une déconstruction du récit traditionnel… ou une variation sur un type de récit dont nous avons déjà l’habitude, un récit ouvert, un récit réflexif, un récit qui joue sur la mise en abyme de lui-même, bref le récit d’un film littéraire ?

    https://theconversation.com/anatomie-dune-chute-et-la-question-de-linterpretation-du-recit-2158

    #procès #justice #littérature #vérité #fiction #non-fiction #cohérence #validité #recevabilité #récit_juridique #polyphonie #réalité #autofiction #Serge_Doubrovsky #factographies

  • #Stanislas : face aux #mensonges de la direction, de nouveaux témoignages

    Homophobie, sexisme, absence d’éducation à la sexualité ou cours religieux obligatoires... Depuis la publication du rapport d’inspection, le directeur de cet établissement privé conteste toute dérive. D’anciens élèves rencontrés par Mediapart répondent.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/270124/stanislas-face-aux-mensonges-de-la-direction-de-nouveaux-temoignages
    #lycée #sexisme #homophobie #témoignages #Amélie_Oudéa-Castéra #non-mixité #Frédéric_Gauthier #autoritarisme #catéchisme #rapport #rapport_d'inspection #Philippe_Ariño #homosexualité #manif_pour_tous #thérapie_de_conversion #avortement #anti-avortement #catholicisme #préjugés_sexistes #éducation_à_la_sexualité #contraception #catéchèse #prosélytisme

  • Au niveau européen, un pacte migratoire « dangereux » et « déconnecté de la réalité »

    Sara Prestianni, du réseau EuroMed Droits, et Tania Racho, chercheuse spécialiste du droit européen et de l’asile, alertent, dans un entretien à deux voix, sur les #risques de l’accord trouvé au niveau européen et qui sera voté au printemps prochain.

    Après trois années de discussions, un accord a été trouvé par les États membres sur le #pacte_européen_sur_la_migration_et_l’asile la semaine dernière. En France, cet événement n’a trouvé que peu d’écho, émoussé par la loi immigration votée au même moment et dont les effets sur les étrangers pourraient être dramatiques.

    Pourtant, le pacte migratoire européen comporte lui aussi son lot de mesures dangereuses pour les migrant·es, entre renforcement des contrôles aux frontières, tri express des demandeurs d’asile, expulsions facilitées des « indésirables » et sous-traitance de la gestion des frontières à des pays tiers. Sara Prestianni, responsable du plaidoyer au sein du réseau EuroMed Droits, estime que des violations de #droits_humains seront inévitables et invite à la création de voies légales qui permettraient de protéger les demandeurs d’asile.

    La chercheuse Tania Racho, spécialiste du droit européen et de l’asile et membre du réseau Désinfox-Migrations, répond qu’à aucun moment les institutions européennes « ne prennent en compte les personnes exilées », préférant répondre à des « objectifs de gestion des migrations ». Dans un entretien croisé, elles alertent sur les risques d’une approche purement « sécuritaire », qui renforcera la vulnérabilité des concernés et les mettra « à l’écart ».

    Mediapart : Le pacte migratoire avait été annoncé par la Commission européenne en septembre 2020. Il aura fait l’objet de longues tergiversations et de blocages. Était-ce si difficile de se mettre d’accord à 27 ?

    Tania Racho : Dans l’état d’esprit de l’Union européenne (UE), il fallait impérativement démontrer qu’il y a une gestion des migrations aux #frontières_extérieures pour rassurer les États membres. Mais il a été difficile d’aboutir à un accord. Au départ, il y avait des mesures pour des voies sécurisées d’accès à l’Union avec plus de titres économiques : ils ont disparu au bénéfice d’une crispation autour des personnes en situation irrégulière.

    Sara Prestianni : La complexité pour aboutir à un accord n’est pas due à la réalité des migrations mais à l’#instrumentalisation du dossier par beaucoup d’États. On l’a bien vu durant ces trois années de négociations autour du pacte : bien que les chiffres ne le justifiaient pas, le sujet a été fortement instrumentalisé. Le résultat, qui à nos yeux est très négatif, est le reflet de ces stratégies : cette réforme ne donne pas de réponse au phénomène en soi, mais répond aux luttes intestines des différents États.

    La répartition des demandeurs d’asile sur le sol européen a beaucoup clivé lors des débats. Pourquoi ?

    Sara Prestianni : D’abord, parce qu’il y a la fameuse réforme du #règlement_Dublin [qui impose aux exilés de demander l’asile dans le pays par lequel ils sont entrés dans l’UE - ndlr]. Ursula von der Leyen [présidente de la Commission – ndlr] avait promis de « #dépasser_Dublin ». Il est aujourd’hui renforcé. Ensuite, il y a la question de la #solidarité. La #redistribution va finalement se faire à la carte, alors que le Parlement avait tenté de revenir là-dessus. On laisse le choix du paiement, du support des murs et des barbelés aux frontières internes, et du financement de la dimension externe. On est bien loin du concept même de solidarité.

    Tania Racho : L’idée de Dublin est à mettre à la poubelle. Pour les Ukrainiens, ce règlement n’a pas été appliqué et la répartition s’est faite naturellement. La logique de Dublin, c’est qu’une personne qui trouve refuge dans un État membre ne peut pas circuler dans l’UE (sans autorisation en tout cas). Et si elle n’obtient pas l’asile, elle n’est pas censée pouvoir le demander ailleurs. Mais dans les faits, quelqu’un qui voit sa demande d’asile rejetée dans un pays peut déposer une demande en France, et même obtenir une protection, parce que les considérations ne sont pas les mêmes selon les pays. On s’interroge donc sur l’utilité de faire subir des transferts, d’enfermer les gens et de les priver de leurs droits, de faire peser le coût de ces transferts sur les États… Financièrement, ce n’est pas intéressant pour les États, et ça n’a pas de sens pour les demandeurs d’asile.

    D’ailleurs, faut-il les répartir ou leur laisser le libre #choix dans leur installation ?

    Tania Racho : Cela n’a jamais été évoqué sous cet angle. Cela a du sens de pouvoir les laisser choisir, parce que quand il y a un pays de destination, des attaches, une communauté, l’#intégration se fait mieux. Du point de vue des États, c’est avant tout une question d’#efficacité. Mais là encore on ne la voit pas. La Cour européenne des droits de l’homme a constaté, de manière régulière, que l’Italie ou la Grèce étaient des États défaillants concernant les demandeurs d’asile, et c’est vers ces pays qu’on persiste à vouloir renvoyer les personnes dublinées.

    Sara Prestianni : Le règlement de Dublin ne fonctionne pas, il est très coûteux et produit une #errance continue. On a à nouveau un #échec total sur ce sujet, puisqu’on reproduit Dublin avec la responsabilité des pays de première entrée, qui dans certaines situations va se prolonger à vingt mois. Même les #liens_familiaux (un frère, une sœur), qui devaient permettre d’échapper à ce règlement, sont finalement tombés dans les négociations.

    En quoi consiste le pacte pour lequel un accord a été trouvé la semaine dernière ?

    Sara Prestianni : Il comporte plusieurs documents législatifs, c’est donc une #réforme importante. On peut évoquer l’approche renforcée des #hotspots aux #frontières, qui a pourtant déjà démontré toutes ses limites, l’#enfermement à ciel ouvert, l’ouverture de #centres_de_détention, la #procédure_d’asile_accélérée, le concept de #pays-tiers_sûr que nous rejetons (la Tunisie étant l’exemple cruel des conséquences que cela peut avoir), la solidarité à la carte ou encore la directive sur l’« instrumentalisation » des migrants et le concept de #force_majeure en cas d’« #arrivées_massives », qui permet de déroger au respect des droits. L’ensemble de cette logique, qui vise à l’utilisation massive de la #détention, à l’#expulsion et au #tri des êtres humains, va engendrer des violations de droits, l’#exclusion et la #mise_à_l’écart des personnes.

    Tania Racho : On met en place des #centres_de_tri des gens aux frontières. C’est d’une #violence sans nom, et cette violence est passée sous silence. La justification du tri se fait par ailleurs sur la nationalité, en fonction du taux de protection moyen de l’UE, ce qui est absurde car le taux moyen de protection varie d’un pays à l’autre sur ce critère. Cela porte aussi une idée fausse selon laquelle seule la nationalité prévaudrait pour obtenir l’asile, alors qu’il y a un paquet de motifs, comme l’orientation sexuelle, le mariage forcé ou les mutilations génitales féminines. Difficile de livrer son récit sur de tels aspects après un parcours migratoire long de plusieurs mois dans le cadre d’une #procédure_accélérée.

    Comment peut-on opérer un #tri_aux_frontières tout en garantissant le respect des droits des personnes, du droit international et de la Convention de Genève relative aux réfugiés ?

    Tania Racho : Aucune idée. La Commission européenne parle d’arrivées mixtes et veut pouvoir distinguer réfugiés et migrants économiques. Les premiers pourraient être accueillis dignement, les seconds devraient être expulsés. Le rush dans le traitement des demandes n’aidera pas à clarifier la situation des personnes.

    Sara Prestianni : Ils veulent accélérer les procédures, quitte à les appliquer en détention, avec l’argument de dire « Plus jamais Moria » [un camp de migrants en Grèce incendié – ndlr]. Mais, ce qui est reproduit ici, c’est du pur Moria. En septembre, quand Lampedusa a connu 12 000 arrivées en quelques jours, ce pacte a été vendu comme la solution. Or tel qu’il est proposé aujourd’hui, il ne présente aucune garantie quant au respect du droit européen et de la Convention de Genève.

    Quels sont les dangers de l’#externalisation, qui consiste à sous-traiter la gestion des frontières ?

    Sara Prestianni : Alors que se négociait le pacte, on a observé une accélération des accords signés avec la #Tunisie, l’#Égypte ou le #Maroc. Il y a donc un lien très fort avec l’externalisation, même si le concept n’apparaît pas toujours dans le pacte. Là où il est très présent, c’est dans la notion de pays tiers sûr, qui facilite l’expulsion vers des pays où les migrants pourraient avoir des liens.

    On a tout de même l’impression que ceux qui ont façonné ce pacte ne sont pas très proches du terrain. Prenons l’exemple des Ivoiriens qui, à la suite des discours de haine en Tunisie, ont fui pour l’Europe. Les États membres seront en mesure de les y renvoyer car ils auront a priori un lien avec ce pays, alors même qu’ils risquent d’y subir des violences. L’Italie négocie avec l’#Albanie, le Royaume-Uni tente coûte que coûte de maintenir son accord avec le #Rwanda… Le risque, c’est que l’externalisation soit un jour intégrée à la procédure l’asile.

    Tania Racho : J’ai appris récemment que le pacte avait été rédigé par des communicants, pas par des juristes. Cela explique combien il est déconnecté de la réalité. Sur l’externalisation, le #non-refoulement est prévu par le traité sur le fonctionnement de l’UE, noir sur blanc. La Commission peut poursuivre l’Italie, qui refoule des personnes en mer ou signe ce type d’accord, mais elle ne le fait pas.

    Quel a été le rôle de l’Italie dans les discussions ?

    Sara Prestianni : L’Italie a joué un rôle central, menaçant de faire blocage pour l’accord, et en faisant passer d’autres dossiers importants à ses yeux. Cette question permet de souligner combien le pacte n’est pas une solution aux enjeux migratoires, mais le fruit d’un #rapport_de_force entre les États membres. L’#Italie a su instrumentaliser le pacte, en faisant du #chantage.

    Le pacte n’est pas dans son intérêt, ni dans celui des pays de premier accueil, qui vont devoir multiplier les enfermements et continuer à composer avec le règlement Dublin. Mais d’une certaine manière, elle l’a accepté avec la condition que la Commission et le Conseil la suivent, ou en tout cas gardent le silence, sur l’accord formulé avec la Tunisie, et plus récemment avec l’Albanie, alors même que ce dernier viole le droit européen.

    Tania Racho : Tout cela va aussi avoir un #coût – les centres de tri, leur construction, leur fonctionnement –, y compris pour l’Italie. Il y a dans ce pays une forme de #double_discours, où on veut d’un côté dérouter des bateaux avec une centaine de personnes à bord, et de l’autre délivrer près de 450 000 visas pour des travailleurs d’ici à 2025. Il y a une forme illogique à mettre autant d’énergie et d’argent à combattre autant les migrations irrégulières tout en distribuant des visas parce qu’il y a besoin de #travailleurs_étrangers.

    Le texte avait été présenté, au départ, comme une réponse à la « crise migratoire » de 2015 et devait permettre aux États membres d’être prêts en cas de situation similaire à l’avenir. Pensez-vous qu’il tient cet objectif ?

    Tania Racho : Pas du tout. Et puisqu’on parle des Syriens, rappelons que le nombre de personnes accueillies est ridicule (un million depuis 2011 à l’échelle de l’UE), surtout lorsqu’on le compare aux Ukrainiens (10 millions accueillis à ce jour). Il est assez étonnant que la comparaison ne soit pas audible pour certains. Le pacte ne résoudra rien, si ce n’est dans le narratif de la Commission européenne, qui pense pouvoir faire face à des arrivées mixtes.

    On a les bons et mauvais exilés, on ne prend pas du tout en compte les personnes exilées, on s’arrête à des objectifs de #gestion alors que d’autres solutions existent, comme la délivrance de #visas_humanitaires. Elles sont totalement ignorées. On s’enfonce dans des situations dramatiques qui ne feront qu’augmenter le tarif des passeurs et le nombre de morts en mer.

    Sara Prestianni : Si une telle situation se présente de nouveau, le règlement « crise » sera appliqué et permettra aux États membres de tout passer en procédure accélérée. On sera donc dans un cas de figure bien pire, car les entraves à l’accès aux droits seront institutionnalisées. C’est en cela que le pacte est dangereux. Il légitime toute une série de violations, déjà commises par la Grèce ou l’Italie, et normalise des pratiques illégales. Il occulte les mesures harmonisées d’asile, d’accueil et d’intégration. Et au lieu de pousser les États à négocier avec les pays de la rive sud, non pas pour renvoyer des migrants ou financer des barbelés mais pour ouvrir des voies légales et sûres, il mise sur une logique sécuritaire et excluante.

    Cela résonne fortement avec la loi immigration votée en France, supposée concilier « #humanité » et « #fermeté » (le pacte européen, lui, prétend concilier « #responsabilité » et « #solidarité »), et qui mise finalement tout sur le répressif. Un accord a été trouvé sur les deux textes au même moment, peut-on lier les deux ?

    Tania Racho : Dans les deux cas, la seule satisfaction a été d’avoir un accord, dans la précipitation et dans une forme assez particulière, entre la commission mixte paritaire en France et le trilogue au niveau européen. Ce qui est intéressant, c’est que l’adoption du pacte va probablement nécessiter des adaptations françaises. On peut lier les deux sur le fond : l’idée est de devoir gérer les personnes, dans le cas français avec un accent particulier sur la #criminalisation_des_étrangers, qu’on retrouve aussi dans le pacte, où de nombreux outils visent à lutter contre le terrorisme et l’immigration irrégulière. Il y a donc une même direction, une même teinte criminalisant la migration et allant dans le sens d’une fermeture.

    Sara Prestianni : Les États membres ont présenté l’adoption du pacte comme une grande victoire, alors que dans le détail ce n’est pas tout à fait évident. Paradoxalement, il y a eu une forme d’unanimité pour dire que c’était la solution. La loi immigration en France a créé plus de clivages au sein de la classe politique. Le pacte pas tellement, parce qu’après tant d’années à la recherche d’un accord sur le sujet, le simple fait d’avoir trouvé un deal a été perçu comme une victoire, y compris par des groupes plus progressistes. Mais plus de cinquante ONG, toutes présentes sur le terrain depuis des années, sont unanimes pour en dénoncer le fond.

    Le vote du pacte aura lieu au printemps 2024, dans le contexte des élections européennes. Risque-t-il de déteindre sur les débats sur l’immigration ?

    Tania Racho : Il y aura sans doute des débats sur les migrations durant les élections. Tout risque d’être mélangé, entre la loi immigration en France, le pacte européen, et le fait de dire qu’il faut débattre des migrations parce que c’est un sujet important. En réalité, on n’en débat jamais correctement. Et à chaque élection européenne, on voit que le fonctionnement de l’UE n’est pas compris.

    Sara Prestianni : Le pacte sera voté avant les élections, mais il ne sera pas un sujet du débat. Il y aura en revanche une instrumentalisation des migrations et de l’asile, comme un outil de #propagande, loin de la réalité du terrain. Notre bataille, au sein de la société civile, est de continuer notre travail de veille et de dénoncer les violations des #droits_fondamentaux que cette réforme, comme d’autres par le passé, va engendrer.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/281223/au-niveau-europeen-un-pacte-migratoire-dangereux-et-deconnecte-de-la-reali
    #pacte #Europe #pacte_migratoire #asile #migrations #réfugiés

  • #Naufrage

    « On aurait voulu que je dise, je le sais bien, on aurait voulu que je dise : Tu ne mourras pas, je te sauverai. Et ce n’était pas parce que je l’aurais sauvé en effet, pas parce que j’aurais fait mon métier et que j’aurais fait ce qu’il fallait : envoyer les secours. Pas parce que j’aurais fait ce qu’on doit faire. On aurait voulu que je le dise, au moins le dire, seulement le dire.

    Mais moi j’ai dit : Tu ne seras pas sauvé. »

    En novembre 2021, le naufrage d’un bateau de migrants dans la Manche a causé la mort de vingt-sept personnes. Malgré leurs nombreux appels à l’aide, le centre de surveillance n’a pas envoyé les secours.
    Inspiré de ce fait réel, le roman de #Vincent_Delecroix, œuvre de pure fiction, pose la question du mal et celle de la responsabilité collective, en imaginant le portrait d’une opératrice du centre qui, elle aussi, aura peut-être fait naufrage cette nuit-là. Personne ne sera sauvé, et pourtant la littérature permet de donner un visage et une chair à toutes les figures de l’humanité.

    https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Blanche/Naufrage

    #non-assistance_de_personne_en_danger #migrations #naufrage #humanité #inhumanité #responsabilité #livre #mourir_aux_frontières #roman #secours #morts_en_mer #responsabilité_collective #effroi #Manche #La_Manche

    ping @isskein @karine4 @_kg_ @reka

  • Caricatural, ultra-politisé : le grand n’importe quoi du nouveau #musée_d'Histoire de #Lyon

    Nous avons visité la nouvelle #exposition_permanente du #musée niché dans le vieux Lyon : un parcours déroutant, regorgeant de lacunes, défendant une vision de l’#histoire_engagée et surtout trompeuse.

    Le jour de notre visite, un dossier de presse le martèle, en #écriture_inclusive : le nouveau parcours du musée d’Histoire de Lyon, qui achevait samedi 2 décembre une réorganisation commencée en 2019, a été « co-construit », aussi bien avec des « expert.es » que des témoins et… « témouines », citoyens anonymes de Lyon. Une des conceptrices du musée le détaille : « On est allé en ville, on a posé des questions aux passants, à des jeunes qui faisaient du skate pour leur demander leur récit de la ville ». Un postulat de départ qui fait sourire autant qu’il inquiète et augure du sentiment qu’on éprouvera pendant toute la visite.

    Celle-ci tient par-dessus tout à s’éloigner de la si décriée approche chronologique. Une première salle « questionne » donc la ville, exposant pêle-mêle des objets touristiques ou sportifs récents (maillot de foot), sans enseignement apparent. Il faudra s’y faire : l’histoire n’est pas vraiment au centre du musée d’histoire. La fondation de la ville est évoquée au détour d’un panneau sur lequel un Lyonnais de l’Antiquité exhibe sa… Rolex. Une farce assumée par le musée, dont les guides nous préviennent que les anachronismes fleuriront tout au long des salles. On se mettrait à rire si le musée n’était pas destiné aux enfants aussi bien qu’aux adultes, avec la confusion que ces erreurs assumées entraîneront chez les premiers.
    L’homme blanc quasi absent de... l’industrie lyonnaise

    Les salles, justement, sont magnifiques dans cet hôtel de Gadagne, bâti au XVIe siècle. Mais l’architecture des lieux ne semble pas devoir nous intéresser : un tout petit cartel pour présenter une cheminée monumentale, puis plus rien. Les objets historiques sont rares et s’effacent au profit de montages photographiques et de récits (tous en écriture inclusive bien sûr) de quatre personnages fictifs censés raconter la ville : trois femmes nées à différents siècles, et Saïd, ouvrier devenu bénévole associatif. À l’étage suivant, une pirogue-vivier datée de 1540 trône quand même, dans une ambiance bleutée : c’est la partie consacrée au Rhône et à la Saône. Quelques (beaux) tableaux figurant des scènes de vie des deux fleuves sont exposés... à quelques centimètres du sol : cette seconde partie est dédiée aux enfants de cinq ans et l’on apprend que deux groupes de maternelle ont été consultés pour la concevoir. Des jeux ont été élaborés avec eux, « sans mauvaise réponse pour ne pas être moralisateurs » et parce que le musée est un avant tout un lieu d’amusement. Nous commençons à le croire.

    La suite de l’exposition permanente, qui aborde le sujet de l’industrie lyonnaise, prend toutefois un tour nettement plus désagréable, voire odieux. Voyons bien ce que nous voyons : une absence quasi totale de référence aux ouvriers masculins et blancs. Un métier à tisser inanimé constitue la seule preuve tangible de l’existence des canuts et une salopette vide accrochée au mur figure le prolétariat du XXe siècle. Une véritable provocation car les ouvrières sont elles bien mises en avant, et surtout les travailleurs immigrés. Le directeur, Xavier de La Selle, avait prévenu : « Le concept de Lyonnais de souche n’a aucun sens. » Un visiteur manquant de recul sortira de cette pièce convaincu que la ville n’a été construite que par le travail de femmes et de maghrébins. Le prisme social de l’histoire aurait pu présenter ici un réel intérêt : il est manipulé pour servir une vision politique qu’on ne peut qualifier autrement que de délirante.

    Et nous ne sommes pas au bout de ce délire : la dernière partie, celle qui vient d’être révélée au public, porte sur les « engagements » des Lyonnais. On entre ici dans un bric-à-brac stupéfiant, synthèse gauchiste assumée faisant de l’histoire politique de Lyon une sorte de grande convergence des luttes. Sur les murs et dans les vitrines, des nuages de mots à peu près tous synonymes de rébellion, des pancartes féministes, un haut-parleur, et même un objet sordide : un fait-tout utilisé par une avorteuse locale, célèbre semble-t-il, qui y stérilisait ses ustensiles médicaux mais y cuisait aussi ses pâtes. Le père Delorme, prêtre connu pour avoir organisé en 1983 une grande marche contre le racisme, est abondamment glorifié. Rappelons qu’en matière de religion, le musée ne nous a toujours pas expliqué pourquoi et quand fut construite la basilique de Fourvière ! L’autre référence au catholicisme dans la ville est celle du Sac de Lyon par les calvinistes, une œuvre de bois peint de 1565 décrivant des scènes de pillage, un bûcher d’objets liturgiques, des moines chassés. Son intérêt historique est toutefois anéanti par le commentaire de notre guide, qui n’y voit « pas du tout une scène violente ».

    Désacralisation du savoir

    À ce stade, le musée d’Histoire de Lyon réussit son pari : il n’est plus qu’un divertissement. On aborde une salle qui couvre à rebours la crise algérienne, la Seconde Guerre mondiale et enfin la Révolution. Cette dernière ne fait l’objet que d’un panneau succinct. Le musée est-il ennuyé de devoir évoquer plus en détail les tendances contre-révolutionnaires de Lyon ? À propos de Joseph Chalier, qui avait mis en place une dictature sanguinaire dans la ville avant d’être renversé par le peuple en 1793, un commentaire : « Certains l’ont considéré comme un martyr de la liberté. » L’homme avait commandé la première guillotine à Lyon et préconisait de l’installer sur le pont Morand afin que « les têtes tombent directement dans le Rhône »... Le principal historien consulté sur cette époque, Paul Chopelin, est entre autres fonctions président de la Société des études robespierristes. Enfin, une galerie des grandes figures de l’histoire lyonnaise conclut ce drôle de parcours. Miracle : il s’y trouve presque autant de femmes que d’hommes. Quitte à ce que la première conseillère municipale féminine y tienne la même place qu’Édouard Herriot, maire pendant près d’un demi-siècle. Pas de portrait de Raymond Barre en revanche, mais une lettre anonyme fièrement disposée, le qualifiant de « peu regretté [maire], qui de toute sa carrière s’est bien peu occupé du sort de ceux que son système économique met de côté ».

    Tirons un bilan positif : il n’est pas donné à tout amateur d’histoire d’expérimenter une telle distorsion, une telle désacralisation du savoir. Aux inventions « pédagogiques » en vogue, pour certaines réussies mais souvent inutiles, le musée d’histoire de Lyon ajoute un militantisme qui laisse pantois, et ignore des pans entiers de l’histoire lyonnaise, ne faisant qu’effleurer le reste. L’équipe du musée est certes enthousiaste, convaincue de bien faire, mais s’est méprise sur la notion d’engagement. Plus qu’une déception, pour une structure qui emploie 50 personnes (et exploite aussi un musée de la marionnette et de guignol, peut-être moins amusant) avec un budget annuel d’environ 3 millions d’euros. Son projet scientifique et culturel, validé par l’État, bénéficie du plein soutien de l’actuelle mairie : le maire Grégory Doucet (EELV) se dit ainsi « admiratif du travail colossal » des équipes du musée d’une ville « profondément humaine, tissée par les lumières du monde ». Un tissu, oui, mais pas vraiment de lumière.

    https://www.lefigaro.fr/histoire/mensonger-ultra-politise-le-grand-n-importe-quoi-du-nouveau-musee-d-histoir

    Mots-clé tirés de l’article et de la vidéo :
    #wokisme #woke #révolution_culturelle_woke #intersectionnalité #affaire_de_Grenoble #militantisme #militants_extrémistes #ségrégationnisme #séparatisme #pride_radicale #non-mixité #genre #panique_morale #anti-wokisme #universalisme #universités #culture #films #imaginaire #civilisation_occidentale #industrie_lyonnaise #woke-washing #engagement #père_Delorme #1983 #Marche_pour_l'égalité_et_contre_le_racisme #planning_familial #catholicisme #racisme_systémique #Sac_de_Lyon #divertissement #Joseph_Chalier #histoire #Paul_Chopelin #militantisme

    Les invité·es :

    1. #Nora_Bussigny, autrice de ce #livre :
    Les Nouveaux Inquisiteurs


    https://www.albin-michel.fr/les-nouveaux-inquisiteurs-9782226476951

    2. #Pierre_Valentin, auteur de ce livre :
    L’#idéologie_woke. Anatomie du wokisme


    https://www.fondapol.org/etude/lideologie-woke-1-anatomie-du-wokisme

    3. #Samuel_Fitoussi :
    https://www.wikiberal.org/wiki/Samuel_Fitoussi
    (et je découvre au même temps « wikilibéral »)
    –-> qui parle notamment du film #Barbie (min 18’30)

    https://www.fondapol.org/etude/lideologie-woke-1-anatomie-du-wokisme

  • Notation des allocataires : l’indécence des pratiques de la CAF désormais indéniable – La Quadrature du Net
    https://www.laquadrature.net/2023/11/27/notation-des-allocataires-lindecence-des-pratiques-de-la-caf-desormais

    C’est en transformant les allocataires en « assisté·es », puis en risques pour la survie de notre système social que le discours de « lutte contre l’assistanat » a fait de leur contrôle un impératif de « bonne gestion »18. Qu’importe que toutes les estimations montrent que la « fraude sociale » est marginale et que c’est au contraire le non-recours aux aides qui se révèle être un phénomène massif.

    Devenu objectif institutionnel, le contrôle doit être rationalisé. Le numérique devient alors l’outil privilégié de « la lutte contre la fraude sociale » par la capacité qu’il offre aux dirigeant·es de répondre aux injonctions de résultats tout en offrant un alibi technique quant aux pratiques de discrimination généralisée que leur tenue impose.

    Ces logiques sont saillantes dans la réponse écrite par la CAF pour s’opposer à la transmission du code de son algorithme, avant d’y être contrainte par la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA). Elle assume ouvertement un discours policier en avançant comme principal argument que cette communication consisterait en une « atteinte à la sécurité publique » car « en identifiant les critères constituant des facteurs de ciblage, des fraudeurs pourraient organiser et monter des dossiers frauduleux ».

    Enfin, un chiffre transmis dans la même réponse témoigne de l’emballement gestionnaire à l’œuvre et vient souligner la disproportion entre les moyens techniques déployés et les enjeux financiers. L’algorithme est entraîné pour détecter des trop-perçus s’élevant à 600 euros sur deux ans. Soit donc, 32 millions d’intimités violées par un algorithme à la recherche de… 25 euros par mois.

  • Dans la #Manche, les coulisses terrifiantes du sauvetage des migrants

    Il y a deux ans, au moins 27 personnes périssaient dans des eaux glaciales au large de Calais, après le naufrage de leur embarcation. Mediapart a enquêté sur les pratiques des différents acteurs missionnés pour sauver celles et ceux qui tentent de rejoindre le Royaume-Uni par la mer.

    « Parfois, ils refusent notre appel, parfois ils décrochent. Quand j’appelle le 999, ils me disent d’appeler les Français, et les Français nous disent d’appeler les Anglais. Ils se moquent de nous. » Ces quelques phrases, issues d’un échange entre un membre de l’association #Utopia_56 et un exilé se trouvant à bord d’une embarcation dans la Manche, résument à elles seules les défaillances du #secours en mer lorsque celui-ci n’est pas coordonné.

    Elles illustrent également le désarroi de celles et ceux qui tentent la traversée pour rejoindre les côtes britanniques. Le 20 novembre 2021, les membres d’Utopia 56 ont passé des heures à communiquer par messages écrits et audio avec un groupe d’exilé·es qui s’était signalé en détresse dans la Manche. « Nous avons appelé tous les numéros mais ils ne répondent pas. Je ne comprends pas quel est leur problème », leur dit un homme présent à bord. « Restez calmes, quelqu’un va venir. Appelez le 112 et on va appeler les #garde-côtes français, ok ? » peut-on lire dans les échanges consultés par Mediapart.

    « Comme ils ont pu nous contacter, on a relancé le #Cross [#Centre_régional_opérationnel_de_surveillance_et_de_sauvetage_maritimes – ndlr], qui a pu intervenir. Mais on peut se demander ce qu’il se serait passé pour eux si ça n’avait pas été le cas », commente Nikolaï, d’Utopia 56. Cet appel à l’aide désespéré a été passé seulement quatre jours avant le naufrage meurtrier du #24_novembre_2021, qui a coûté la vie à au moins vingt-sept personnes, parmi lesquelles des Afghan·es, des Kurdes d’Irak et d’Iran, des Éthiopien·nes ou encore un Vietnamien.

    Un an plus tard, Le Monde révélait comment le Cross, et en particulier l’une de ses agent·es, avait traité leur cas sans considération, voire avec mépris, alors que les personnes étaient sur le point de se noyer. Une #information_judiciaire a notamment été ouverte pour « homicides », « blessures involontaires » et « mise en danger » (aggravée par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence), menant à la mise en examen de cinq militaires pour « #non-assistance_à_personne_en_danger » au printemps 2023.

    « Ah bah t’entends pas, tu seras pas sauvé », « T’as les pieds dans l’eau ? Bah, je t’ai pas demandé de partir »… Rendue publique, la communication entre l’agente du Cross et les exilé·es en détresse en mer, en date du 24 novembre, a agi comme une déflagration dans le milieu associatif comme dans celui du secours en mer. Signe d’#inhumanité pour les uns, de #surmenage ou d’#incompétence pour les autres, cet épisode dramatique est venu jeter une lumière crue sur la réalité que subissent les migrant·es en mer, que beaucoup ignorent.

    « Urgence vitale » contre « urgence de confort »

    Entendue dans le cadre de l’#enquête_judiciaire, l’agente concernée a expliqué faire la différence entre une situation d’« #urgence_vitale » et une situation de « #détresse » : « Pour moi, la détresse c’est vraiment quand il y a une vie humaine en jeu. La plupart des migrants qui appellent sont en situation de détresse alors qu’en fait il peut s’agir d’une urgence de confort », a déroulé la militaire lors de son audition, précisant que certains cherchent « juste à être accompagnés vers les eaux britanniques ».

    Elle décrit aussi des horaires décalés, de nuit, et évoque des appels « incessants » ainsi que l’incapacité matérielle de vérifier les indicatifs de chaque numéro de téléphone. Un autre agent du Cross explique ne pas avoir souvenir d’un « gros coup de bourre » cette nuit-là. « Chaque opération migrant s’est enchaînée continuellement mais sans densité particulière. » Et de préciser : « Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de densité particulière que nous faisons le travail avec plus de légèreté ; aucun n’est mis de côté et chaque appel est pris au sérieux. »

    Deux sauveteurs ont accepté de se confier à Mediapart, peu après le naufrage, refusant que puisse se diffuser cette image écornée du #secours_en_mer. « C’est malheureux de dire des choses comme ça », regrette Julien*, bénévole à la #Société_nationale_de_sauvetage_en_mer (#SNSM). Il y a peut-être, poursuit-il, « des personnes avec moins de jugeote, ou qui ont décidé de se ranger d’un côté et pas de l’autre ».

    L’homme interroge cependant la surcharge de travail du Cross, sans « minimiser l’incident » de Calais. « La personne était peut-être dans le rush ou avait déjà fait un certain nombre d’appels… Ils sont obligés de trier, il peut y avoir des erreurs. Mais on ne rigole pas avec ça. »

    Lorsque des fenêtres météo favorables se présentent, sur une période d’à peine deux ou trois jours, le Cross comme les sauveteurs peuvent être amenés à gérer jusqu’à 300 départs. Les réfugié·es partent de communes de plus en plus éloignées, prenant des « #risques énormes » pour éviter les contrôles de police et les tentatives d’interception sur le rivage.

    « Cela devient de plus en plus périlleux », constate Julien, qui décrit par ailleurs les stratégies employées par les #passeurs visant à envoyer beaucoup d’exilé·es d’un seul coup pour en faire passer un maximum.

    Il y a des journées où on ne fait que ça.

    Alain*, sauveteur dans la Manche

    « En temps normal, on arrive à faire les sauvetages car nos moyens sont suffisants. Mais à un moment donné, si on se retrouve dans le rush avec de tels chiffres à gérer, on a beau être là, avoir notre #matériel et nos #techniques de sauvetage, on ne s’en sort pas. » Julien se souvient de cette terrible intervention, survenue fin 2021 au large de la Côte d’Opale, pour laquelle plusieurs nageurs de bord ont été « mis à l’eau » pour porter secours à un canot pneumatique disloqué dont le moteur avait fini à 23 heures au fond d’une eau à 7 degrés.

    Présents sur zone en une demi-heure, les nageurs récupèrent les exilé·es « par paquet de trois », essayant d’optimiser tous les moyens dont ils disposent. « On aurait peut-être eu un drame dans la Manche si on n’avait pas été efficaces et si les nageurs n’avaient pas sauté à l’eau », relate-t-il, précisant que cette opération les a épuisés. L’ensemble des personnes en détresse ce jour-là sont toutes sauvées.

    Le plus souvent, les sauveteurs font en sorte d’être au moins six, voire huit dans l’idéal, avec un patron qui pilote le bateau, un mécanicien et au moins un nageur de bord. « Le jour où on a frôlé la catastrophe, on était onze. Mais il nous est déjà arrivé de partir à quatre. »

    Alain* intervient depuis plus de cinq années dans la Manche. La surface à couvrir est « énorme », dit-il. « Il y a des journées où on ne fait que ça. » Ce qu’il vit en mer est éprouvant et, « au #drame_humain auquel nous devons faire face », se rajoute parfois « le #cynisme aussi bien des autorités françaises que des autorités anglaises ».

    On a sauvé en priorité ceux qui n’avaient pas de gilet. Les autres ont dû attendre.

    Alain* à propos d’un sauvetage

    Il évoque ce jour de septembre 2021 où 40 personnes sont en danger sur une embarcation qui menace de se plier, avec un brouillard laissant très peu de visibilité. Ne pouvant y aller en patrouilleur, l’équipe de quatre sauveteurs se rend sur zone avec deux Zodiac, et « accompagne » l’embarcation jusqu’aux eaux anglaises. Mais celle-ci commence à se dégonfler.

    La priorité est alors de stabiliser tous les passagers et de les récupérer, un par un. « Ça hurlait dans tous les sens, mais on a réussi à les calmer », relate Alain qui, tout en livrant son récit, revit la scène. « Il ne faut surtout pas paniquer parce qu’on est les sauveteurs. Plus difficile encore, il faut se résoudre à admettre que c’est un sauvetage de masse et qu’on ne peut pas sauver tout le monde. » Alain et ses collègues parviennent à charger tous les passagers en les répartissant sur chaque Zodiac.

    Lors d’un autre sauvetage, qu’il qualifie de « critique », ses collègues et lui doivent porter secours à une quarantaine d’exilés, certains se trouvant dans l’eau, et parfois sans gilet de sauvetage. « On a sauvé en priorité ceux qui n’avaient pas de gilet, explique-t-il. Mais les autres ont dû attendre notre retour parce qu’on manquait de place sur notre bateau. Et par chance, entre-temps, c’est la SNSM qui les a récupérés. » Ce jour-là, confie-t-il, le Cross a « vraiment eu peur qu’il y ait des morts ».

    Négociations en pleine mer

    À cela s’ajoute la « #mise_en_danger » provoquée par les tractations en pleine mer pour déterminer qui a la responsabilité de sauver les personnes concernées.

    Une fois, raconte encore Alain, le boudin d’un canot pneumatique transportant 26 personnes avait crevé. « On leur a dit de couper le moteur et on les a récupérés. Il y avait un bébé de quelques mois, c’était l’urgence absolue. » En mer se trouve aussi le bateau anglais, qui fait demi-tour lorsqu’il constate que les exilé·es sont secouru·es.

    « Les migrants se sont mis à hurler parce que leur rêve s’écroulait. C’était pour nous une mise en danger de les calmer et de faire en sorte que personne ne se jette à l’eau par désespoir. » Le bateau anglais finit par revenir après 45 minutes de discussion entre le Cross et son homologue. « Plus de 45 minutes, répète Alain, en pleine mer avec un bébé de quelques mois à bord. »

    Qu’est devenu ce nourrisson ? s’interroge Alain, qui dit n’avoir jamais été confronté à la mort. Il faut se blinder, poursuit-il. « Nous sommes confrontés à des drames. Ces personnes se mettent en danger parce qu’elles n’ont plus rien à perdre et se raccrochent à cette traversée pour vivre, seulement vivre. » Il se demande souvent ce que sont devenus les enfants qu’il a sauvés. Sur son téléphone, il retrouve la photo d’une fillette sauvée des eaux, puis sourit.

    Pour lui, il n’y aurait pas de « consignes » visant à distinguer les #eaux_françaises et les #eaux_anglaises pour le secours en mer. « On ne nous a jamais dit : “S’ils sont dans les eaux anglaises, n’intervenez pas.” Le 24 novembre a été un loupé et on ne parle plus que de ça, mais il y a quand même des gens qui prennent à cœur leur boulot et s’investissent. » Si trente bateaux doivent être secourus en une nuit, précise-t-il pour illustrer son propos, « tout le monde y va, les Français, les Anglais, les Belges ».

    Lors de ses interventions en mer, la SNSM vérifie qu’il n’y a pas d’obstacles autour de l’embarcation à secourir, comme des bancs de sable ou des courants particulièrement forts. Elle informe également le Cross, qui déclenche les sauveteurs pour partir sur zone.

    « On approche très doucement du bateau, on évalue l’état des personnes, combien ils sont, s’il y a des enfants, s’il y a des femmes, si elles sont enceintes », décrit Julien, qui revoit cet enfant handicapé, trempé, qu’il a fallu porter alors qu’il pesait près de 80 kilos. Ce nourrisson âgé de 15 jours, aussi, qui dépassait tout juste la taille de ses mains.

    Si les exilés se lèvent brutalement en les voyant arriver, ce qui arrive souvent lorsqu’ils sont en détresse, le plancher de l’embarcation craque « comme un carton rempli de bouteilles de verre » qui glisseraient toutes en même temps vers le centre. Certains exilés sont en mer depuis deux jours lorsqu’ils les retrouvent. « En short et pieds nus », souvent épuisés, affamés et désespérés.

    Des « miracles » malgré le manque de moyens

    Les sauveteurs restent profondément marqués par ces sauvetages souvent difficiles, pouvant mener à huit heures de navigation continue dans une mer agitée et troublée par des conditions météo difficiles. « L’objectif est de récupérer les gens vivants, commente Julien. Mais il peut arriver aussi qu’ils soient décédés. Et aller récupérer un noyé qui se trouve dans l’eau depuis trois jours, c’est encore autre chose. »

    En trois ans, le nombre de sauvetages a été, selon lui, multiplié par dix. Le nombre d’arrivées au Royaume-Uni a bondi, conduisant le gouvernement britannique à multiplier les annonces visant à durcir les conditions d’accueil des migrant·es, du projet d’externalisation des demandes d’asile avec le Rwanda, à l’hébergement des demandeurs et demandeuses d’asile à bord d’une barge, plus économique, et non plus dans des hôtels.

    Pour Julien, les dirigeant·es français·es comme britanniques s’égarent dans l’obsession de vouloir contenir les mouvements migratoires, au point de pousser les forces de l’ordre à des pratiques parfois discutables : comme le montrent les images des journalistes ou des vacanciers, certains CRS ou gendarmes viennent jusqu’au rivage pour stopper les tentatives de traversée, suscitant des tensions avec les exilé·es. Aujourd’hui, pour éviter des drames, ils ne sont pas autorisés à intercepter une embarcation dès lors que celle-ci est à l’eau.

    Dans le même temps, les sauveteurs font avec les moyens dont ils disposent. Un canot de sauvetage vieillissant, entretenu mais non adapté au sauvetage de migrants en surnombre, explique Julien. « On porte secours à près de 60 personnes en moyenne. Si on est trop lourd, ça déséquilibre le bateau et on doit les répartir à l’avant et au milieu, sinon l’eau s’infiltre à l’arrière. » Ses équipes ont alerté sur ce point mais « on nous a ri au nez ». Leur canot devrait être remplacé, mais par un bateau « pas plus grand », qui ne prend pas ce type d’opérations en compte dans son cahier des charges.

    En un an, près de « 50 000 personnes ont pu être sauvées », tient à préciser Alain, avant d’ajouter : « C’est un miracle, compte tenu du manque de moyens. » Il peut arriver que les bénévoles de la SNSM reçoivent une médaille des autorités pour leur action. Mais à quoi servent donc les médailles s’ils n’obtiennent pas les moyens nécessaires et si leurs requêtes restent ignorées ?, interroge-t-il.

    « La France est mauvaise sur l’immigration, elle ne sait pas gérer », déplore Alain, qui précise que rien n’a changé depuis le drame du 24 novembre 2021. Et Julien de conclure : « Les dirigeants sont dans les bureaux, à faire de la politique et du commerce, pendant que nous on est sur le terrain et on sauve des gens. S’ils nous donnent des bateaux qui ne tiennent pas la route, on ne va pas y arriver… »

    Mercredi 22 novembre, deux exilés sont morts dans un nouveau naufrage en tentant de rallier le Royaume-Uni.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/241123/dans-la-manche-les-coulisses-terrifiantes-du-sauvetage-des-migrants
    #Calais #mourir_en_mer #morts_aux_frontières #mourir_aux_frontières #France #UK #Angleterre #GB #sauvetage #naufrage #frontières #migrations #asile #réfugiés

  • RSA sous conditions : « Désormais, les classes laborieuses apparaissent profiteuses et paresseuses », Frédéric Farah
    https://www.marianne.net/agora/humeurs/rsa-sous-conditions-desormais-les-classes-laborieuses-apparaissent-profite

    Ambiance #restauration et ultralibéralisme : un minimum vital contre un peu de #travail renvoie à un amendement britannique voté… à l’époque victorienne, fustige l’économiste Frédéric Farah alors que sénateurs et députés se sont mis d’accord sur un conditionnement du #RSA à quinze heures d’activité.

    L’obligation d’exercer des heures d’activité en échange de l’obtention du revenu de solidarité active (RSA) au risque d’une #radiation n’a rien de neuf si l’on veut bien redonner de la profondeur historique à la question. Cette dernière doit nous conduire a plus précisément en 1834 au Royaume-Uni avec l’abolition de la loi sur les pauvres. Il s’agissait d’un système d’#assistance à l’œuvre dans les paroisses existant depuis 1795. Un système qui s’est vite retrouvé dans le viseur de certains députés de l’époque car il favorisait l’assistance et la #paresse, selon eux. Lors des débats à la Chambre des Communes, ils affirmaient qu’il fallait exposer les pauvres au vent vif de la #concurrence. C’est avec l’abolition des lois sur les pauvres que naît le #marché_du_travail contemporain. Il s’agit alors de mettre à disposition des industriels d’alors une main-d’œuvre bon marché et dont le pouvoir de négociation demeurait faible.

    De ce débat vont demeurer deux constantes, portées par le discours libéral, et qui survivent depuis plus d’un siècle et demi. La première se fonde sur l’anthropologie négative et discriminatoire : les #pauvres ont un penchant à la paresse et ont tendance à abuser des subsides publics. La seconde insiste sur la nécessité d’exercer sur eux un #contrôle_social et placer leurs droits sous conditions. En 1922, l’économiste libéral Jacques Rueff pestait contre la persistance du #chômage anglais au double motif que l’#allocation du chômage de l’époque était dissuasive pour le #retour_à_l’emploi et que les syndicats créaient de la rigidité sur le marché du travail et empêchaient les ajustements nécessaires.

    Cette antienne libérale s’est tue jusqu’à la fin des années 1970 pour une série de raisons : le keynésianisme triomphant d’après-guerre admettait que le #plein-emploi ne pouvait être la règle du fonctionnement du capitalisme mais l’exception. Il ne fallait donc pas accabler les #chômeurs. Par ailleurs, la présence d’un communisme fort doublé d’une puissance syndicale significative était aussi de réels garde-fous aux dérives libérales. Enfin, la dénonciation des méfaits de la finance en raison de la folie spéculative qui l’avait portée au krach en 1930 avait conduit à en limiter le pouvoir. Ces éléments avaient pour un temps rangé au magasin des oubliettes la vieille rengaine libérale sur la supposée paresse des #assistés. Il a fallu construire de véritables #allocations-chômage, comme en 1958 en France, et élargir le #droit_des_travailleurs. Le rapport de force penchait en faveur du travail. Cette brève parenthèse historique n’aura duré qu’un temps assez bref, soit une vingtaine années.

    DE PRÉJUGÉS EN LOIS
    Le retour du prêchi-prêcha libéral est venu d’outre-Atlantique là même où l’#État-providence se manifestait avec force lors de la période rooseveltienne. Cette fois, la contre-offensive était portée par le républicain Richard Nixon qui avait employé pour la première lors d’une allocution télévisée en 1969 le terme de « #workfare », en somme un État qui incite au travail et non à l’assistance comme le « welfare » (« État-providence ») aurait pu le faire. Ici, la critique de l’État-providence rejoignait la définition d’Émile Ollivier, inventeur du terme sous le Second Empire, pour se moquer de ceux qui attendent l’obole de l’État comme autrefois ceux qui espéraient le salut d’une divine Providence. La lame de fond a progressivement emporté l’Europe dans le sillage de la révolution conservatrice de la fin 1970 et la thématique libérale accusant les pauvres d’être peu travailleurs et de vivre au crochet de la société a retrouvé son actualité. La répression de la finance d’après-guerre laissa place à la répression sociale.

    Pire, ces préjugés se sont transformés en lois effectives. Les pouvoirs politiques devenaient l’instance de validation du café du commerce. Ainsi, en 1992 sera lancée l’#allocation_unique_dégressive qui visait à réduire les allocations-chômage dans le temps pour inciter au retour à l’emploi. Abandonnée en 2001, elle aura été un échec retentissant. Nicolas Sarkozy tout empreint de cette idéologie libérale et jamais en retard pour valider les propos de comptoir, donnera naissance à cette étrangeté : le Revenu de solidarité active (RSA) laissant entendre qu’il existerait une #solidarité passive. Prétextant que le « I » du revenu minimum d’insertion avait été négligé, il lancera une nouvelle version qui devait encourager la reprise d’activité d’où l’existence d’un RSA capable d’autoriser un cumul emploi et revenu de solidarité. Ce dispositif ne parviendra pas à atteindre ses objectifs. L’État a même réussi à faire des économies sur la population de bénéficiaires potentiels puisque le #non-recours permet à l’État en la matière d’économiser environ deux milliards d’euros à l’année. Plus de 30 % des Français qui pourraient le demander ne le font pas.

    TRIO CHÔMEUR-PROFITEUR-FRAUDEUR
    Ce workfare se retrouve dans la transformation de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) en #Pôle_emploi en 2008. La définition du chômeur changeait aussi puisque l’allocataire était tenu de faire des #actes_positifs de recherche, laissant encore une fois accroire à une paresse presque naturelle qui le conduirait à ne pas en faire, sans compter la multiplication des critères de contrôle et, de ce fait, des #radiations. Last but not least, la dernière réforme de l’assurance chômage, en réduisant durée et montant des allocations et en les rendant cycliques, place les chômeurs en difficulté et les oblige à accepter des rémunérations inférieures à leurs qualifications, comme le souligne l’enquête de l’Unédic de ce mois d’octobre. Avant la transformation en obligation légale de suivre une quinzaine d’heures de formation, un autre vent devait souffler pour rendre légitime cette proposition, celle de la montée des fraudes à l’assurance sociale. Au chômeur, et au pauvre jugés paresseux, profiteur, devait s’ajouter le titre de fraudeur. Le trio commence à peser.

    C’est donc cette #histoire brossée ici à grands traits qu’il ne faut pas oublier pour comprendre que rendre obligatoire cet accompagnement pour la réinsertion n’a rien d’une nouveauté. Elle prend sa source dans une #stigmatisation ancienne des pauvres ou des allocataires des #minima_sociaux et un ensemble de préjugés relayés par l’État. La nouvelle version du RSA aurait pu s’affranchir de l’obligation de toutes sortes de tâches dont l’utilité reste à prouver, mais le caractère contraignant témoigne encore une fois de la défiance des pouvoirs publics à l’égard de populations en difficulté. Au fond il s’agit toujours de la même condescendance à l’œuvre. Il fut un temps où les classes laborieuses apparaissaient dangereuses. Désormais, elles apparaissent profiteuses et paresseuses. Mais demeure l’unique constante du pouvoir, la nécessité de les combattre.

    Travail gratuit contre RSA : « Le rentier trouve normal qu’on demande à tous de participer à l’effort commun », Jacques Dion
    https://www.marianne.net/agora/les-signatures-de-marianne/travail-gratuit-contre-rsa-le-rentier-trouve-normal-quon-demande-a-tous-de

    Cumuler RSA et emploi : mais au fait, qu’en pensent les premiers concernés ? Laurence Dequay
    https://www.marianne.net/economie/protection-sociale/cumuler-rsa-et-emploi-mais-au-fait-quen-pensent-les-premiers-concernes

    Travailler pour toucher le RSA : mais au fait, comment vont faire les pauvres ? Louis Nadau
    https://www.marianne.net/economie/protection-sociale/travailler-pour-toucher-le-rsa-mais-au-fait-comment-vont-faire-les-pauvres

    RSA sous condition : un retour des Ateliers nationaux de 1848 ?
    Mythe du plein-emploi, Audrey Lévy
    https://www.marianne.net/societe/rsa-sous-condition-un-retour-des-ateliers-nationaux-de-1848

    ébaubi par Marianne

  • #Ta-Nehisi_Coates Speaks Out Against Israel’s “Segregationist Apartheid Regime” After West Bank Visit

    As pressure builds for a ceasefire after 27 days of Israel’s bombardment of Gaza, author and journalist Ta-Nehisi Coates joins us in a broadcast exclusive interview to discuss his journey to Palestine and Israel and learning about the connection between the struggle of African Americans and Palestinians. “The most shocking thing about my time over there was how uncomplicated it actually is,” says Coates, who calls segregation in Palestine and Israel “evil.” “There’s no way for me, as an African American, to come back and stand before you, to witness segregation and not say anything about it.” Coates acknowledges the suppression of those advocating for Palestinian rights but says this is not new for Black writers and journalists. “I have to measure my fear against the misery that I saw.”

    https://www.democracynow.org/2023/11/2/ta_nehisi_coates

    extraits avec sous-titres en français ici :

    "J’ai passé 10 jours en Palestine, dans les #territoires_occupés et en Israël proprement dit. (...) Je pense que ce qui m’a le plus choqué, c’est que dans tous les éditoriaux ou reportages que j’ai lus sur Israël et sur le conflit avec les Palestiniens, il y a un mot qui revient tout le temps et c’est celui de « #complexité ». (...) Je m’attendais à une situation dans laquelle il était difficile de discerner le bien et le mal, difficile de comprendre la dimension morale, difficile de comprendre le conflit. Et ce qui était peut-être le plus choquant, c’est que j’ai immédiatement compris ce qui se passe là-bas. Le meilleur exemple qui me vient à l’esprit est probablement le deuxième jour, lorsque nous sommes allés à Hébron et que la réalité de l’#occupation est devenue évidente. Nous sortions de Jérusalem-Est en voiture. J’étais avec PalFest, et nous sortions de Jérusalem-Est pour aller en Cisjordanie. Et vous pouviez voir les colonies, ils nous les montraient du doigt. Je me suis soudain rendu compte que je me trouvais dans une région du monde où certaines personnes pouvaient voter et d’autres non. Et cela m’était évidemment très familier. Je suis arrivé à Hébron, notre groupe d’écrivains est sorti, et un guide palestinien nous a fait visiter la ville. Nous sommes arrivés dans une rue et il nous a dit : ’Je ne peux pas marcher dans cette rue. Si vous voulez continuer, vous devez continuer sans moi’. (...) Hébron est très pauvre. (...) Son marché était fermé, mais il y a quelques vendeurs que je voulais soutenir. Je marchais pour atteindre le vendeur, et j’ai été arrêté à un #checkpoint. Il y a des checkpoints dans toute la ville, dans toute la Cisjordanie. Votre #liberté_de_circulation est totalement restreinte, et la liberté de circulation des Palestiniens est totalement restreinte. Et comme je me dirigeais vers le checkpoint, un garde israélien en est sorti, probablement de l’âge de mon fils. Et il m’a dit : ’Quelle est ta #religion, l’ami ?’ Et j’ai répondu : ’Je ne suis pas vraiment religieux’. (...) Et il m’a apparu clairement que si je ne professais pas ma religion, et la bonne religion, je n’allais pas être autorisé à passer. Il m’a dit : ’D’accord, quelle était la religion de tes parents ?’ J’ai répondu qu’ils n’étaient pas très religieux non plus. Il a dit : ’Quelle était la religion de tes grand-parents ?’. J’ai répondu : ’Ma grande-mère était chrétienne’. Et il m’a laissé passer. J’ai alors compris très clairement ce qui se passait là-bas. Et je dois dire que cela m’était assez familier. J’étais dans un territoire où votre #mobilité était entravée, où votre droit de vote est entravé, où votre droit à l’eau est entravé, où votre droit au logement est entravé, et tout cela sur la base de l’#appartenance_ethnique. Et cela m’a semblé extrêmement familier. Et donc, ce qui m’a plus choqué pendant mon séjour là-bas, c’est de voir à quel point, en fait, les choses ne sont pas compliquées. Je ne dis pas que les détails ne sont pas compliqués, l’histoire est toujours compliquée. Les événements du présents sont toujours compliqués, mais la façon dont les médias occidentaux en rendent compte donnent l’impression qu’il faut un doctorat en études moyen-orientales pour comprendre la #moralité élémentaires du maintien d’un peuple dans une situation dans laquelle ne dispose pas de #droits_fondamentaux, y compris le droit que nous chérissons plus, le droit de suffrage, le droit de vote. Et déclarer ensuite que cet Etat est une #démocratie. (...) C’est en effet assez familier pour ceux qui d’entre nous connaissent l’histoire afro-américaine.
    (...)
    Martin Luther King a passé sa vie à lutter contre la ségrégation. Israël est une société marquée par la ségrégation. Les territoires occupés sont marqués par la ségrégation. (...) Il y a des panneaux pour indiquer où certaines personnes peuvent aller. Il y a des #plaques_d'immatriculation différentes qui interdisent à certaines personnes d’aller à certains endroits. Les autorités vous diront qu’il s’agit d’une #mesure_de_sécurité. Mais si vous revenez à l’#histoire de #Jim_Crow, dans ce pays, elles vous diront exactement la même chose. Les gens ont toujours de bonnes raisons, en dehors de ’je déteste’ et ’je ne t’aime pas’ pour justifier leur droit d’imposer un #régime_oppressif à d’autres personnes. (...)
    J’ai grandi dans une époque et dans un endroit où je ne comprenais pas vraiment l’éthique de la #non-violence. Et par éthique, j’entends que la #violence en elle-même est corruptrice, qu’elle corrompt l’âme. Et je n’avais pas vraiment compris cela. Si je suis vraiment honnête avec vous, autant je voyais ma relation avec le peuple palestinien, et autant la nature de cette relation était claire, il était également clair qu’il y avait une sorte de relation avec le peuple israélien, et ce n’était pas une relation que j’appréciais particulièrement. Parce que je comprenais la #rage qui naît d’un passé d’#oppression. Je comprenais la #colère. Je comprenais le sentiment d’#humiliation que l’on ressent lorsque des personnes vous soumettent à une oppression multiple, à un #génocide, et que les gens détournent le regard. Je suis la descendance de 250 ans d’#esclavage, je viens d’un peuple où la violence sexuelle et le viol sont inscrits dans nos os et dans notre ADN. Et je comprends comment, lorsque vous avez l’impression que le monde vous a tourné le dos, vous pouvez alors tourner le dos à l’éthique du monde. Mais j’ai également compris à quel point cela peut être corrupteur. J’écoutais hier soir (...) être interviewé et le journaliste lui a demandé combien d’enfants, combien de personnes devaient être tués pour justifier cette opération. Est-ce qu’il y a un seuil au nombre de personnes tuées au-delà duquel on se dit : ’C’est trop, ça n’est pas possible, ça ne justifie pas’. Et ce membre du congrès ne pouvait pas donner de chiffre. Et je me suis dit que cet homme avait été corrompu. Cet homme s’est perdu. Il s’est perdu dans l’humiliation. Il s’est perdu dans la #vengeance. Il s’est perdu dans la violence. J’entends toujours ce terme répété encore et encore, le ’#droit_de_se_défendre'. Et le #droit_à_la_dignité ? Et le droit à la #moralité ? Et le droit d’être capable de dormir la nuit ? Parce que je sais, c’est que si j’étais complice, et je le suis, de #bombardements d’enfants, de bombardements de camps de réfugiés, peu importe qui s’y trouve, j’aurais du mal à dormir la nuit. Et je m’inquiète pour l’âme des gens qui peuvent faire cela et qui peuvent dormir la nuit.

    https://twitter.com/caissesdegreve/status/1720224934964699412

    #à_écouter #à_lire #Israël #Palestine #apartheid #Cisjordanie #visite #ségrégation #apartheid #droit_de_vote

  • #Judith_Butler : Condamner la #violence

    « Je condamne les violences commises par le #Hamas, je les condamne sans la moindre réserve. Le Hamas a commis un #massacre terrifiant et révoltant », écrit Judith Butler avant d’ajouter qu’« il serait étrange de s’opposer à quelque chose sans comprendre de quoi il s’agit, ou sans la décrire de façon précise. Il serait plus étrange encore de croire que toute #condamnation nécessite un refus de comprendre, de #peur que cette #compréhension ne serve qu’à relativiser les choses et diminuer notre #capacité_de_jugement ».

    Les questions qui ont le plus besoin d’un #débat_public, celles qui doivent être discutées dans la plus grande urgence, sont des questions qui sont difficiles à aborder dans les cadres existants. Et même si l’on souhaite aller directement au cœur du sujet, on se heurte à un cadre qui fait qu’il est presque impossible de dire ce que l’on a à dire. Je veux parler ici de la violence, de la violence présente, et de l’histoire de la violence, sous toutes ses formes. Mais si l’on veut documenter la violence, ce qui veut dire comprendre les #tueries et les #bombardements massifs commis par le Hamas en Israël, et qui s’inscrivent dans cette histoire, alors on est accusé de « #relativisme » ou de « #contextualisation ». On nous demande de condamner ou d’approuver, et cela se comprend, mais est-ce bien là tout ce qui, éthiquement, est exigé de nous ? Je condamne les violences commises par le Hamas, je les condamne sans la moindre réserve. Le Hamas a commis un massacre terrifiant et révoltant. Telle a été et est encore ma réaction première. Mais elle n’a pas été la seule.

    Dans l’immédiateté de l’événement, on veut savoir de quel « côté » sont les gens, et clairement, la seule réaction possible à de pareilles tueries est une condamnation sans équivoque. Mais pourquoi se fait-il que nous ayons parfois le sentiment que se demander si nous utilisons les bons mots ou comprenons bien la situation historique fait nécessairement obstacle à une #condamnation_morale absolue ? Est-ce vraiment relativiser que se demander ce que nous condamnons précisément, quelle portée cette condamnation doit avoir, et comment décrire au mieux la ou les formations politiques auxquelles nous nous opposons ?

    Il serait étrange de s’opposer à quelque chose sans comprendre de quoi il s’agit, ou sans la décrire de façon précise. Il serait plus étrange encore de croire que toute condamnation nécessite un refus de comprendre, de peur que cette compréhension ne serve qu’à relativiser les choses et diminuer notre capacité de jugement. Mais que faire s’il est moralement impératif d’étendre notre condamnation à des #crimes tout aussi atroces, qui ne se limitent pas à ceux mis en avant et répétés par les médias ? Quand et où doit commencer et s’arrêter notre acte de condamnation ? N’avons-nous pas besoin d’une évaluation critique et informée de la situation pour accompagner notre condamnation politique et morale, sans avoir à craindre que s’informer et comprendre nous transforme, aux yeux des autres, en complices immoraux de crimes atroces ?

    Certains groupes se servent de l’histoire de la violence israélienne dans la région pour disculper le Hamas, mais ils utilisent une forme corrompue de raisonnement moral pour y parvenir. Soyons clairs. Les violences commises par #Israël contre les Palestiniens sont massives : bombardements incessants, assassinats de personnes de tous âges chez eux et dans les rues, torture dans les prisons israéliennes, techniques d’affamement à #Gaza, expropriation radicale et continue des terres et des logements. Et ces violences, sous toutes leurs formes, sont commises sur un peuple qui est soumis à un #régime_colonial et à l’#apartheid, et qui, privé d’État, est apatride.

    Mais quand les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard (Harvard Palestine Solidarity Groups) publient une déclaration disant que « le régime d’apartheid est le seul responsable » des attaques mortelles du Hamas contre des cibles israéliennes, ils font une erreur et sont dans l’erreur. Ils ont tort d’attribuer de cette façon la #responsabilité, et rien ne saurait disculper le Hamas des tueries atroces qu’ils ont perpétrées. En revanche, ils ont certainement raison de rappeler l’histoire des violences : « de la #dépossession systématique des terres aux frappes aériennes de routine, des #détentions_arbitraires aux #checkpoints militaires, des séparations familiales forcées aux #assassinats ciblés, les Palestiniens sont forcés de vivre dans un #état_de_mort, à la fois lente et subite. » Tout cela est exact et doit être dit, mais cela ne signifie pas que les violences du Hamas ne soient que l’autre nom des violences d’Israël.

    Il est vrai que nous devons nous efforcer de comprendre les raisons de la formation de groupes comme le Hamas, à la lumière des promesses rompues d’Oslo et de cet « état de mort, à la fois lente et subite » qui décrit bien l’existence des millions de Palestiniens vivant sous #occupation, et qui se caractérise par une #surveillance constante, la #menace d’une détention sans procès, ou une intensification du #siège de #Gaza pour priver ses habitants d’#eau, de #nourriture et de #médicaments. Mais ces références à l’#histoire des Palestiniens ne sauraient justifier moralement ou politiquement leurs actes. Si l’on nous demandait de comprendre la violence palestinienne comme une continuation de la violence israélienne, ainsi que le demandent les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard, alors il n’y aurait qu’une seule source de #culpabilité_morale, et même les actes de violence commis par les Palestiniens ne seraient pas vraiment les leurs. Ce n’est pas rendre compte de l’autonomie d’action des Palestiniens.

    La nécessité de séparer la compréhension de la violence omniprésente et permanente de l’État israélien de toute justification de la violence est absolument cruciale si nous voulons comprendre quels peuvent être les autres moyens de renverser le #système_colonial, mettre fin aux #arrestations_arbitraires et à la #torture dans les prisons israéliennes, et arrêter le siège de Gaza, où l’eau et la nourriture sont rationnés par l’État-nation qui contrôle ses frontières. Autrement dit, la question de savoir quel monde est encore possible pour tous les habitants de la région dépend des moyens dont il sera mis fin au système colonial et au pouvoir des colons. Hamas a répondu de façon atroce et terrifiante à cette question, mais il y a bien d’autres façons d’y répondre.

    Si, en revanche, il nous est interdit de parler de « l’#occupation », comme dans une sorte de Denkverbot allemand, si nous ne pouvons pas même poser le débat sur la question de savoir si le joug militaire israélien sur la région relève du #colonialisme ou de l’#apartheid_racial, alors nous ne pouvons espérer comprendre ni le passé, ni le présent, ni l’avenir. Et beaucoup de gens qui regardent le carnage dans les médias sont totalement désespérés. Or une des raisons de ce #désespoir est précisément qu’ils regardent les #médias, et vivent dans le monde sensationnel et immédiat de l’#indignation_morale absolue. Il faut du temps pour une autre #morale_politique, il faut de la patience et du courage pour apprendre et nommer les choses, et nous avons besoin de tout cela pour que notre condamnation puisse être accompagnée d’une vision proprement morale.

    Je m’oppose aux violences que le Hamas a commises, et ne leur trouve aucune excuse. Quand je dis cela, je prends une position morale et politique claire. Je n’équivoque pas lorsque je réfléchis sur ce que cette condamnation implique et présuppose. Quiconque me rejoint dans cette position se demande peut-être si la condamnation morale doit reposer sur une compréhension de ce qui est condamné. On pourrait répondre que non, que je n’ai rien besoin de connaître du Hamas ou de la Palestine pour savoir que ce qu’ils ont fait est mal et pour le condamner. Et si l’on s’arrête là, si l’on se contente des représentations fournies par les médias, sans jamais se demander si elles sont réellement utiles et exactes, et si le cadre utilisé permet à toutes les histoires d’être racontées, alors on se résout à une certaine ignorance et l’on fait confiance aux cadres existants. Après tout, nous sommes tous très occupés, et nous n’avons pas tous le temps d’être des historiens ou des sociologues. C’est une manière possible de vivre et de penser, et beaucoup de gens bien-intentionnés vivent effectivement ainsi, mais à quel prix ?

    Que nous faudrait-il dire et faire, en revanche, si notre morale et notre politique ne s’arrêtaient pas à l’acte de condamnation ? Si nous continuions, malgré tout, de nous intéresser à la question de savoir quelles sont les formes de vie qui pourraient libérer la région de violences comme celles-ci ? Et si, en plus de condamner les crimes gratuits, nous voulions créer un futur dans lequel ce genre de violences n’aurait plus cours ? C’est une aspiration normative qui va bien au-delà de la condamnation momentanée. Pour y parvenir, il nous faut absolument connaître l’histoire de la situation : l’histoire de la formation du Hamas comme groupe militant, dans l’abattement total, après Oslo, pour tous les habitants de Gaza à qui les promesses de gouvernement autonome n’ont jamais été honorées ; l’histoire de la formation des autres groupes palestiniens, de leurs tactiques et de leurs objectifs ; l’histoire enfin du peuple palestinien lui-même, de ses aspirations à la liberté et au #droit_à_l’autodétermination, de son désir de se libérer du régime colonial et de la violence militaire et carcérale permanente. Alors, si le Hamas était dissous ou s’il était remplacé par des groupes non-violents aspirant à la #cohabitation, nous pourrions prendre part à la lutte pour une Palestine libre.

    Quant à ceux dont les préoccupations morales se limitent à la seule condamnation, comprendre la situation n’est pas un objectif. Leur indignation morale est à la fois présentiste et anti-intellectuelle. Et pourtant, l’indignation peut aussi amener quelqu’un à ouvrir des livres d’histoire pour essayer de comprendre comment un événement comme celui-ci a pu arriver, et si les conditions pourraient changer de telle sorte qu’un avenir de violence ne soit pas le seul avenir possible. Jamais la « contextualisation » ne devrait être considérée comme une activité moralement problématique, même s’il y a des formes de contextualisation qui sont utilisées pour excuser ou disculper. Est-il possible de distinguer ces deux formes de contextualisation ? Ce n’est pas parce que certains pensent que contextualiser des violences atroces ne sert qu’à occulter la violence ou, pire encore, à la rationaliser que nous devrions nous soumettre à l’idée que toute forme de contextualisation est toujours une forme de #relativisme_moral.

    Quand les Groupes Solidarité pour la Palestine de Harvard disent que « le régime d’apartheid est le seul responsable » des attaques du Hamas, ils souscrivent à une conception inacceptable de la responsabilité morale. Il semble que pour comprendre comment s’est produit un événement, et ce qu’il signifie, il nous faille apprendre l’histoire. Cela veut dire qu’il nous incombe tout à la fois d’élargir la perspective au-delà de la terrible fascination du moment et, sans jamais nier l’horreur, de ne pas laisser l’#horreur présente représenter toute l’horreur qu’il y a à représenter, et nous efforcer de savoir, de comprendre et de nous opposer.

    Or les médias d’aujourd’hui, pour la plupart d’entre eux, ne racontent pas les horreurs que vivent les Palestiniens depuis des décennies, les bombardements, les tueries, les attaques et les arrestations arbitraires. Et si les horreurs des derniers jours ont pour les médias une importance morale plus grande que les horreurs des soixante-dix dernières années, alors la réaction morale du moment menace d’empêcher et d’occulter toute compréhension des #injustices_radicales endurées depuis si longtemps par la Palestine occupée et déplacée de force.

    Certains craignent, à juste titre, que toute contextualisation des actes violents commis par le Hamas soit utilisée pour disculper le Hamas, ou que la contextualisation détourne l’attention des horreurs perpétrées. Mais si c’est l’horreur elle-même qui nous amenait à contextualiser ? Où commence cette horreur et où finit-elle ? Si les médias parlent aujourd’hui de « guerre » entre le Hamas et Israël, c’est donc qu’ils proposent un cadre pour comprendre la situation. Ils ont, ainsi, compris la situation à l’avance. Si Gaza est comprise comme étant sous occupation, ou si l’on parle à son sujet de « prison à ciel ouvert », alors c’est une autre interprétation qui est proposée. Cela ressemble à une description, mais le langage contraint ou facilite ce que nous pouvons dire, comment nous pouvons décrire, et ce qui peut être connu.

    Oui, la langue peut décrire, mais elle n’acquiert le pouvoir de le faire que si elle se conforme aux limites qui sont imposées à ce qui est dicible. S’il est décidé que nous n’avons pas besoin de savoir combien d’enfants et d’adolescents palestiniens ont été tués en Cisjordanie et à Gaza cette année ou pendant toutes les années de l’occupation, que ces informations ne sont pas importantes pour comprendre ou qualifier les attaques contre Israël, et les assassinats d’Israéliens, alors il est décidé que nous ne voulons pas connaître l’histoire des violences, du #deuil et de l’indignation telle qu’est vécue par les Palestiniens.

    Une amie israélienne, qui se qualifie elle-même d’« antisioniste », écrit en ligne qu’elle est terrifiée pour sa famille et pour ses amis, et qu’elle a perdu des proches. Et nous devrions tous être de tout cœur avec elle, comme je le suis bien évidemment. Cela est terrible. Sans équivoque. Et pourtant, il n’est pas un moment où sa propre expérience de l’horreur et de la perte de proches ou d’amis est imaginé comme pouvant être ce qu’une Palestinienne éprouve ou a éprouvé de son côté après des années de bombardement, d’incarcération et de violence militaire. Je suis moi aussi une Juive, qui vit avec un #traumatisme_transgénérationnel à la suite des atrocités commises contre des personnes comme moi. Mais ces atrocités ont aussi été commises contre des personnes qui ne sont pas comme moi. Je n’ai pas besoin de m’identifier à tel visage ou à tel nom pour nommer les atrocités que je vois. Ou du moins je m’efforce de ne pas le faire.

    Mais le problème, au bout du compte, n’est pas seulement une absence d’#empathie. Car l’empathie prend généralement forme dans un cadre qui permette qu’une identification se fasse, ou une traduction entre l’expérience d’autrui et ma propre expérience. Et si le cadre dominant considère que certaines vies sont plus dignes d’être pleurées que d’autres, alors il s’ensuit que certaines pertes seront plus terribles que d’autres. La question de savoir quelles vies méritent d’être pleurées fait partie intégrante de la question de savoir quelles sont les vies qui sont dignes d’avoir une valeur. Et c’est ici que le #racisme entre en jeu de façon décisive. Car si les Palestiniens sont des « #animaux », comme le répète Netanyahu, et si les Israéliens représentent désormais « le peuple juif », comme le répète Biden (englobant la diaspora juive dans Israël, comme le réclament les réactionnaires), alors les seules personnes dignes d’être pleurées, les seules qui sont éligibles au deuil, sont les Israéliens, car la scène de « guerre » est désormais une scène qui oppose les Juifs aux animaux qui veulent les tuer.

    Ce n’est certainement pas la première fois qu’un groupe de personnes qui veulent se libérer du joug de la #colonisation sont représentées comme des animaux par le colonisateur. Les Israéliens sont-ils des « animaux » quand ils tuent ? Ce cadre raciste de la violence contemporaine rappelle l’opposition coloniale entre les « civilisés » et les « animaux », qui doivent être écrasés ou détruits pour sauvegarder la « civilisation ». Et lorsque nous rappelons l’existence de ce cadre au moment d’affirmer notre condamnation morale, nous nous trouvons impliqué dans la dénonciation d’une forme de racisme qui va bien au-delà de l’énonciation de la structure de la vie quotidienne en Palestine. Et pour cela, une #réparation_radicale est certainement plus que nécessaire.

    Si nous pensons qu’une condamnation morale doive être un acte clair et ponctuel, sans référence à aucun contexte ni aucun savoir, alors nous acceptons inévitablement les termes dans lesquels se fait cette condamnation, la scène sur laquelle les alternatives sont orchestrées. Et dans ce contexte récent qui nous intéresse, accepter ce cadre, c’est reprendre les formes de #racisme_colonial qui font précisément partie du problème structurel à résoudre, de l’#injustice intolérable à surmonter. Nous ne pouvons donc pas refuser l’histoire de l’injustice au nom d’une certitude morale, car nous risquerions alors de commettre d’autres injustices encore, et notre certitude finirait par s’affaisser sur un fondement de moins en moins solide. Pourquoi ne pouvons-nous pas condamner des actes moralement haïssables sans perdre notre capacité de penser, de connaître et de juger ? Nous pouvons certainement faire tout cela, et nous le devons.

    Les actes de violence auxquels nous assistons via les médias sont horribles. Et dans ce moment où toute notre attention est accaparée par ces médias, les violences que nous voyons sont les seules que nous connaissions. Je le répète : nous avons le droit de déplorer ces violences et d’exprimer notre horreur. Cela fait des jours que j’ai mal au ventre à essayer d’écrire sans trouver le sommeil, et tous les gens que je connais vivent dans la peur de ce que va faire demain la machine militaire israélienne, si le #discours_génocidaire de #Netanyahu va se matérialiser par une option nucléaire ou par d’autres tueries de masse de Palestiniens. Je me demande moi-même si nous pouvons pleurer, sans réserve aucune, pour les vies perdues à Tel-Aviv comme pour les vies perdues à Gaza, sans se laisser entraîner dans des débats sur le relativisme et sur les #fausses_équivalences. Peut-être les limites élargies du deuil peuvent-elles contribuer à un idéal d’#égalité substantiel, qui reconnaisse l’égale pleurabilité de toutes les vies, et qui nous porte à protester que ces vies n’auraient pas dû être perdues, qui méritaient de vivre encore et d’être reconnues, à part égale, comme vies.

    Comment pouvons-nous même imaginer la forme future de l’égalité des vivants sans savoir, comme l’a documenté le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies, que les militaires et les colons israéliens ont tué au minimum 3 752 civils palestiniens depuis 2008 à Gaza et en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est. Où et quand le monde a-t-il pleuré ces morts ? Et dans les seuls bombardements et attaques d’octobre, 140 enfants palestiniens ont déjà été tués. Beaucoup d’autres trouveront la mort au cours des actions militaires de « #représailles » contre le Hamas dans les jours et les semaines qui viennent.

    Ce n’est pas remettre en cause nos positions morales que de prendre le temps d’apprendre l’histoire de la #violence_coloniale et d’examiner le langage, les récits et les cadres qui servent aujourd’hui à rapporter et expliquer – et interpréter a priori – ce qui se passe dans cette région. Il s’agit là d’un #savoir_critique, mais qui n’a absolument pas pour but de rationaliser les violences existences ou d’en autoriser d’autres. Son but est d’apporter une compréhension plus exacte de la situation que celle proposée par le cadre incontesté du seul moment présent. Peut-être d’autres positions d’#opposition_morale viendront-elles s’ajouter à celles que nous avons déjà acceptées, y compris l’opposition à la violence militaire et policière qui imprègne et sature la vie des Palestiniens dans la région, leur droit à faire le deuil, à connaître et exprimer leur indignation et leur solidarité, à trouver leur propre chemin vers un avenir de liberté ?

    Personnellement, je défends une politique de #non-violence, sachant qu’elle ne peut constituer un principe absolu, qui trouve à s’appliquer en toutes circonstances. Je soutiens que les #luttes_de_libération qui pratiquent la non-violence contribuent à créer le monde non-violent dans lequel nous désirons tous vivre. Je déplore sans équivoque la violence, et en même temps, comme tant d’autres personnes littéralement stupéfiées devant leur télévision, je veux contribuer à imaginer et à lutter pour la justice et pour l’égalité dans la région, une justice et une égalité qui entraîneraient la fin de l’occupation israélienne et la disparition de groupes comme le Hamas, et qui permettrait l’épanouissement de nouvelles formes de justice et de #liberté_politique.

    Sans justice et sans égalité, sans la fin des violences perpétrées par un État, Israël, qui est fondé sur la violence, aucun futur ne peut être imaginé, aucun avenir de #paix_véritable – et je parle ici de paix véritable, pas de la « #paix » qui n’est qu’un euphémisme pour la #normalisation, laquelle signifie maintenir en place les structures de l’injustice, de l’inégalité et du racisme. Un pareil futur ne pourra cependant pas advenir si nous ne sommes pas libres de nommer, de décrire et de nous opposer à toutes les violences, y compris celles de l’État israélien, sous toutes ses formes, et de le faire sans avoir à craindre la censure, la criminalisation ou l’accusation fallacieuse d’antisémitisme.

    Le monde que je désire est un monde qui s’oppose à la normalisation du régime colonial israélien et qui soutient la liberté et l’autodétermination des Palestiniens, un monde qui réaliserait le désir profond de tous les habitants de ces terres de vivre ensemble dans la liberté, la non-violence, la justice et l’égalité. Cet #espoir semble certainement, pour beaucoup, impossible ou naïf. Et pourtant, il faut que certains d’entre nous s’accrochent farouchement à cet espoir, et refusent de croire que les structures qui existent aujourd’hui existeront toujours. Et pour cela, nous avons besoin de nos poètes, de nos rêveurs, de nos fous indomptés, de tous ceux qui savent comment se mobiliser.

    https://aoc.media/opinion/2023/10/12/condamner-la-violence

    ici aussi : https://seenthis.net/messages/1021216

    #à_lire #7_octobre_2023 #génocide

    • Palestinian Lives Matter Too: Jewish Scholar Judith Butler Condemns Israel’s “Genocide” in Gaza

      We speak with philosopher Judith Butler, one of dozens of Jewish American writers and artists who signed an open letter to President Biden calling for an immediate ceasefire in Gaza. “We should all be standing up and objecting and calling for an end to genocide,” says Butler of the Israeli assault. “Until Palestine is free … we will continue to see violence. We will continue to see this structural violence producing this kind of resistance.” Butler is the author of numerous books, including The Force of Nonviolence: An Ethico-Political Bind and Parting Ways: Jewishness and the Critique of Zionism. They are on the advisory board of Jewish Voice for Peace.

      https://www.youtube.com/watch?v=CAbzV40T6yk

  • Luttes féministes à travers le monde. Revendiquer l’égalité de genre depuis 1995

    Les #femmes, les filles, les minorités et diversités de genre du monde entier continuent à subir en 2021 des violations de leurs #droits_humains, et ce tout au long de leur vie. En dépit d’objectifs ambitieux que se sont fixés les États pour parvenir à l’#égalité_de_genre, leur réalisation n’a à ce jour jamais été réellement prioritaire.

    Les progrès réalisés au cours des dernières décennies l’ont essentiellement été grâce aux #mouvements_féministes, aux militant.es et aux penseur.ses. Aujourd’hui, la nouvelle génération de féministes innove et donne l’espoir de faire bouger les lignes par son inclusivité et la convergence des luttes qu’elle prône.

    Cet ouvrage intergénérationnel propose un aperçu pédagogique à la thématique de l’égalité de genre, des #luttes_féministes et des #droits_des_femmes, dans une perspective historique, pluridisciplinaire et transnationale. Ses objectifs sont multiples : informer et sensibiliser, puisque l’#égalité n’est pas acquise et que les retours en arrière sont possibles, et mobiliser en faisant comprendre que l’égalité est l’affaire de tous et de toutes.

    https://www.uga-editions.com/menu-principal/nos-collections-et-revues/nos-collections/carrefours-des-idees-/luttes-feministes-a-travers-le-monde-1161285.kjsp

    Quatrième conférence mondiale sur les femmes


    https://fr.wikipedia.org/wiki/Quatri%C3%A8me_conf%C3%A9rence_mondiale_sur_les_femmes

    #féminisme #féminismes #livre #résistance #luttes #Pékin #Quatrième_conférence_mondiale_sur_les_femmes (#1995) #ONU #diplomatie_féministe #monde #socialisation_genrée #normes #stéréotypes_de_genre #économie #pouvoir #prise_de_décision #intersectionnalité #backlash #fondamentalisme #anti-genre #Génération_égalité #queer #LGBTI #féminisme_décolonial #écoféminisme #masculinité #PMA #GPA #travail_du_sexe #prostitution #trafic_d'êtres_humains #religion #transidentité #non-mixité #espace_public #rue #corps #écriture_inclusive #viols #culture_du_viol

  • mayday : Naufrage de migrants dans la Manche en 2021 : comment la marine nationale a tenté d’interférer dans l’enquête judiciaire


    Le bâtiment du Cross de Gris-Nez (Pas-de-Calais), face aux côtes anglaises, le 3 avril 2022. JOHAN BEN AZZOUZ / PHOTOPQR / VOIX DU NORD / MAXPPP

    Des écoutes téléphoniques montrent que le ministère des armées a soutenu en coulisses les militaires mis en cause par la justice après la mort d’au moins vingt-sept personnes en novembre 2021. Une enquête est ouverte pour violation du secret de l’instruction.
    Par Abdelhak El Idrissi et Julia Pascual

    « Sincèrement les deux mecs… heu… j’aurais préféré qu’ils soient morts. » Ce 31 mai 2023, Marc Bonnafous se confie à un proche. Voilà un an et demi qu’une enquête a été ouverte sur le naufrage d’un bateau de migrants dans la Manche, en novembre 2021. Même s’il n’est plus directeur du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross) de Gris-Nez (Pas-de-Calais) depuis plusieurs mois déjà, Marc Bonnafous s’inquiète des développements de cette affaire qui menace les services de secours en mer.
    Une semaine auparavant, neuf de ses anciens subordonnés ont été placés en garde à vue par des gendarmes pour des soupçons de non-assistance à personne en danger. Dans les jours qui avaient suivi ce drame ayant coûté la vie à au moins vingt-sept personnes, les deux survivants qu’évoque Marc Bonnafous avaient notamment expliqué dans la presse avoir appelé les secours français et anglais à de nombreuses reprises pour prévenir que leur bateau était en train de couler. En vain. « Quand j’ai vu que les deux naufragés avaient commencé à dire à la police qu’il y avait eu des soucis sur l’opération[de secours] j’ai dit : “houla, ça pue” », raconte-t-il au téléphone. Il ne se doute pas qu’il est alors écouté par les enquêteurs.
    Au total, une dizaine de personnes, travaillant au Cross ou sur le patrouilleur de service public Flamant, en mer la nuit du naufrage, ont fait l’objet d’interceptions téléphoniques. Le contenu des enregistrements, dont Le Monde a pris connaissance, montre à quel point l’affaire embarrasse la hiérarchie militaire et révèle les manœuvres de la marine nationale pour suivre de près les évolutions de l’enquête afin de préparer les mis en cause, quitte à s’affranchir du secret de l’enquête.

    [...]

    Le 11 mai 2023, les personnels du Flamant ne savent pas encore qu’ils vont être convoqués à la fin du mois par les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie maritime de Cherbourg (Manche). La marine nationale, elle, est déjà au courant. Et décide d’aviser ses troupes. Le rôle de messager est assuré par un très haut gradé, le vice-amiral d’escadre François-Xavier Blin, alors inspecteur de la marine nationale. « Il va y avoir huit personnes de votre équipage(…) qui vont être convoquées (…). Bon normalement la date n’est pas censée être connue », confie, prudent, le vice-amiral d’escadre Blin à Audrey M., la commandante du patrouilleur Flamant. Il détient cette information depuis la veille grâce, assure-t-il, au commandant Marc Woodcock, à l’époque numéro deux de la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord.

    [...] Toujours dans l’idée de se préparer aux auditions, François-Xavier Blin propose à Audrey M. de s’entretenir au téléphone, le 12 mai, avec Thomas Bride, un magistrat détaché auprès du ministère des armées où il dirige la division des affaires pénales militaires. Un fait « très rare », souligne le vice-amiral, de sorte que ce magistrat « aimerait qu’il n’y ait pas de publicité » sur l’échange car « il ne veut pas que quelqu’un puisse dire qu’il y a eu collusion (…), vous voyez ? Il est juge, quand même. »
    Interrogé sur son intervention, le magistrat Thomas Bride réfute catégoriquement toute transmission « d’éléments issus d’une procédure pénale ​​à qui que ce soit ». Il explique au Monde sa proposition d’un entretien à Audrey M., par la nécessité d’apporter aux militaires des explications sur le fonctionnement de la procédure pénale. « Aucun autre message que celui d’être le plus exhaustif possible, complet et sincère n’est porté dans ce type d’entretien », ajoute-t-il. C’est pourtant son service qui a reçu des éléments de l’enquête transmis par le parquet de Paris, comme le prévoit le code de procédure pénale, afin d’obtenir un avis consultatif du ministère des armées sur l’opportunité d’élargir l’enquête à des faits de non-assistance à personne en danger.

    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/10/11/naufrage-de-migrants-dans-la-manche-en-2021-comment-la-marine-nationale-a-te
    https://justpaste.it/ba264

    #exilés #migrants #Manche #naufrage #naufragés #CROSS #secours_en_mer #non-assistance_à_personne_en_danger #violation_du_secret_de_l’instruction

  • Aujourd’hui lors de la queue au supermarché.
    La cliente qui me précède pose habilement le petit truc séparateur entre clients derrière ses produits, je l’en remercie et et elle m’adresse un beau sourire.
    Elle n’avait pas beaucoup d’articles, mais notamment un #saucisson, c’est peut-être pourquoi la caissière lui lance un aimable « Ça sent l’apéro ».
    La cliente lui répond : « en fait c’est mon #anniversaire, mais ma famille n’est pas là, alors je vais fêter ça toute seule »
    J’ai hésité à lui proposer de partager mes bières avec son saucisson.
    Le temps de réagir, ce moment fugace était terminé.

    • Hier, on est passé à un magasin de producteurs. Comme on est dans les Hautes-Pyrénées (terre d’élevage), ils ont un très bon rayon boucherie, même pas plus cher que le supermarché.
      On est tout seuls.
      Je demande à la personne qui encaisse si c’est habituel (comme on choisit nos horaires, on cherche les heures creuses).

      « Non, là, c’est juste que les gens sont au bout. Ils n’y arrivent plus, c’est fini. ».

      Là, on parle de la classe moyenne pas trop gênée en fin de mois. C’est la clientèle du lieu.

      Le Lidl pas loin a un sas de sécurité pour entrer. Comme dans une banque. Je ne sais pas depuis combien de temps. Je pense me souvenir que la chaine avait mis en place ce système avec affichage de messages en leds lors du covid, pour filtrer/compter les clients. Je n’y vais pas souvent, mais j’ai l’impression que le dispositif ne marchait plus.

      Plus tard, je passe au Netto en bas de chez moi pour un article qui ne s’y trouve pas. J’ai voulu sortir sans achat par les caisses, comme je le fais de temps en temps quand je ne trouve rien. Cette fois, le caissier a été très agressif et m’a ordonné d’ouvrir mon sac devant tout le monde.

      Bref, ça sent pas le joie et la prospérité, tout ça.

    • La pauvreté et la faim dans l’immeuble contre ma maison. Les fins de mois sont hard et iels fument beaucoup. J’essaye d’être attentive et de faire trop à manger pour apporter aux voisin‧es. J’ai peur d’en rater d’autres. Pour des tas de raisons je ne suis pas forcément en relation avec tou‧tes vu les arrivées et départs réguliers. J’ai peur. Je mange à ma faim ainsi que deux de mes enfants adultes qui travaillent et habitent avec moi. Iels ne trouvent pas de logement .

    • Ben moi je vais au marché, et justement hier, on a convenu avec la femme portugaise qui a son stand de beignets de morue hyper bons qu’il y a des sujets qu’il ne faut pas aborder :

      Donc aujourd’hui si tu veux pas revenir déprimer chez toi avec ton cabas, et même si tu croyais avoir affaire à des humains ne parle pas
      – de politique
      – de police
      – de macron
      – de Nahel
      – d’émigration
      – du temps qu’il fait (ça c’est elle qui l’a ajouté et elle a cité un exemple que j’ai oublié où elle est revenue chez elle déprimée pour une histoire de météo)

      C’était mon tour hier de revenir déprimée parce que le volailler a trouvé que la mère de Nahel n’aurait pas du lui laisser les clefs de la voiture alors qu’il était mineur. Et pourquoi il s’est pas arrêté aussi hein. Et cinq minutes après il te dit que tout le monde déteste la police et que lui aussi. Ils sont tous moulinés à Cnews et à je sais plus quelle chaine de merde en continue qui te vomit des trucs infects et faux à répéter à tes clients au marché. Sauf la dame portugaise évidemment, mais j’ai pas creusé puisqu’on a parlé que du sujet de ne pas en parler, ça mange pas de beignet.

      Je dois être maso, je ne lâche pas l’idée que c’est à cet endroit que ça se passe. Quand j’ai la patate, je peux te retourner tout ce petit monde et tenir la conversation contre trois fachos du quotidien mais quand jaillit un « …toute la misère du monde » les bras et la langue me tombent bien souvent.

    • Cet été, suite à not’fête des voisins en décalé, on s’est retrouvés à 6 ou 7 pour terminer la soirée, dont le dernier arrivé, militaire de carrière. Autour de la table, c’est lui qui a calmé le jeu sur les émeutes... en allant à rebours des idées de CNews & cie. Les îlots d’humanité sont rares, et méritent d’être cultivés avec soin.
      J’avoue être lache la plupart du temps. Le voisin du dernier qui est raciste, j’arrête la discussion quand il se lance dans telle diatribe. Quand l’ancienne voisine flic nous lançait sur les cassos, j’essayais, mais je sentais bien que de toute façon, l’intello-bobo-chef-d-entreprise n’avait pas grande légitimité à dire quoi que ce soit à l’encontre de ces gens au contact quotidien du pire de l’humanité.

    • France travail est spécifiquement pensé pour faire des ravages.
      La fermeture de l’observatoire de la pauvreté anticipait ce qui est dans les cartons depuis le début : une paupérisation de masse dans le cadre d’une reconversion massive de la France comme pays à activité essentiellement touristique.

      Dans ce cadre précis, tu n’a pas besoin de système d’éducation ou de santé performants.

    • C’est très étonnant la tournure qu’a pris ce fil, je ne pensais pas du tout à la pauvreté quand j’ai écrit ces quelques lignes. Je pensais à la solitude, mais aussi comment dans ce supermarché (qui est l’un des plus crade de la ville où j’habite, et où je vais régulièrement) il y a des moments d’humanité. Chacun-e lit ce qu’il veut dans ces épisodes.

      Annexe 1 : c’était une caisse « chèque et carte seulement », ce que « la cliente qui me précède » n’avait pas remarqué. Devant sa détresse, la caissière a aussitôt demandé à sa voisine caissière si elle pouvait encaisser les espèces « c’est son anniversaire ». Ce qui fût fait.

      Annexe 2 : cette même caissière à également scanné mon pack de bière comme une seule canette (je soupçonne que c’est involontaire). Ça m’est déjà arrivé, et j’avais alors attiré l’attention de la caissière sur son erreur, de crainte qu’elle en pâtisse. Mais entre-temps j’ai réalisé qu’il n’y a pas de raison qu’elle soit pénalisée, alors hier j’ai rien dit.

      Annexe 3 : je me souviens d’un texte que j’ai lu sur masto dans lequel il était dit « n’essayez pas de faciliter la vie des caissières en anticipant les questions standards, vous les privez des quelques secondes de répit que la machine leur accorde ».

    • La pauvreté (le manque d’argent) crée fatalement de la solitude dans une société où chaque bouffée d’air que tu respires est devenue monétisable.
      Chaque fois que nous invitons des amis à table, on a du mal à s’en remettre.
      Ça marche aussi pour :
      – à chaque fois qu’on voyage pour rencontrer la famille qui est loin
      – à chaque fois qu’on reçoit des invitations pour un évènement local où il te faut fatalement passer à la caisse
      – à chaque fois que nous offrons des cadeaux aux enfants et petits-enfants

      Depuis 2017, (année de l’élection de la petite crapule libertarienne) on « déconsomme » de ouf. On peut se passer de beaucoup de choses mais des amis, c’est le truc le plus difficile.

      Après, tu as les bourgeois middle class qui viennent t’expliquer qu’il faut rester « positif » ... Comme si chaque gorgée d’humiliation quotidienne n’était pas encore assez amère.
      Du coup je vais passer faire un tour chez Walmart pour m’acheter des coupe-faim Ou me faire prescrire des anxiolytiques par mon MT ? J’hésite ...

    • @monolecte : je crois bien que tu as oublié la CAF dans ton descriptif de création de pauvreté. C’est pas pour moi que je le mentionne mais pour mon « petit » dernier (27 ans) qui tombe de Charybde en Scylla dans « l’entreprise de sa vie ». Le moindre faux pas est désormais fatal. Plus aucune chance de remonter la pente vers un niveau de vie décent. Heureusement, il lui reste la musique ...

      #non-recours (dsl pour le trollage @grommeleur)

      https://www.youtube.com/watch?v=UB_5arrnAYw

  • Le conditionnement du versement du RSA risque-t-il d’accroître le non-recours à cette aide sociale ?
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/10/10/le-conditionnement-du-versement-du-rsa-risque-t-il-d-accroitre-le-non-recour

    Cependant, les chercheurs estiment plus vraisemblable que ces contrôles découragent les allocataires et accroissent le non-recours. « A priori, la grande majorité de ces personnes [a] de véritables difficultés à retourner vers le marché du travail, commente Rémi Le Gall. Les sanctions sont plutôt un signal de méfiance de l’institution envers leur situation qui les conduit à sortir du dispositif qu’un marchepied vers un retour à l’emploi. »

    Pour les auteurs de l’étude, « une plus grande intensité de contrôle augmente les coûts supportés par les allocataires pour accéder à l’allocation, ce qui peut les conduire à renoncer à l’allocation et à leurs démarches d’insertion, soit l’exact inverse de l’objectif poursuivi ». La réforme introduite par la loi pour le plein-emploi pourrait alors agir comme un repoussoir pour certaines personnes en situation de précarité et les mener à renoncer à la solidarité nationale.

  • Des #pratiques_policières et préfectorales illégales et alarmantes en guise de réponse à la demande de places d’hébergement d’urgence.

    Briançon, le 2 octobre 2023 - La semaine dernière, la préfecture des Hautes-Alpes a annoncé l’arrivée, dès le jeudi 21 septembre, de 84 effectifs supplémentaires dédiés au renforcement des contrôles à la frontière franco-italienne. Depuis, des #interpellations se multiplient autour de la frontière, jusque dans la ville de #Briançon, et même au-delà, où la police traque les personnes exilées pour les chasser de l’espace public. Or, si la préfecture se targue de respecter la loi, il n’en est rien et ces pratiques policières et préfectorales sont illégales et dangereuses.

    Les pratiques en matière de contrôles des personnes exilées dans la ville de Briançon ont changé depuis jeudi dernier : chaque jour, plus d’une dizaine de personnes ont été retenues au poste de police, parfois une nuit entière, suite à des contrôles d’identité dans la ville même, fait plutôt rare jusqu’ici. Les exilé.e.s sont poursuivi.e.s au-delà même de Briançon, dans le train, les bus, et jusqu’à Paris, où vendredi matin (29 septembre) une armada de policiers les attendaient à la descente du train de nuit à la gare d’Austerlitz. La présence policière est également renforcée à Marseille, Gap ou Grenoble.

    Ces contrôles ciblent les personnes racisées, et sont suivies par des retenues au commissariat pouvant aller jusqu’à 24 heures, qui se soldent par des mesures d’éloignement : des OQTF (obligation de quitter le territoire français) sans délai, parfois suivies par des placements en CRA (centre de rétention) dans des villes éloignées, comme Toulouse.

    Dans la ville frontalière de Briançon, ces vagues d’interpellations dissuadent les personnes exilées de circuler, elles ne sont donc en sécurité que dans le seul lieu d’accueil actuellement ouvert, un bâtiment occupé en autogestion. La société publique locale Eau Service de la Haute Durance, dont le président n’est autre que le maire de Briançon, M. MURGIA, a coupé l’approvisionnement en eau courante de ce bâtiment le 17 août 2023. Aggravant la précarité des personnes accueillies, cette décision a de fortes répercussions pour la santé et le respect des droits fondamentaux des personnes. (Le lieu accueillant l’association Refuges solidaires a fermé fin août, ne pouvant assurer seul l’hébergement d’urgence à Briançon.)

    Des ordres ont été donné par le préfet pour augmenter la présence policière dans la ville de Briançon. L’augmentation des contrôles d’identité viserait à prévenir la recrudescence des « incivilités » liées au contexte de pression migratoire. Les forces de l’ordre répètent que les contrôles qu’ils opèrent dans la ville de Briançon sont des contrôles dits « Schengen »[1], possibles dans une bande de 20 km après la frontière, visant à rechercher et prévenir la criminalité transfrontalière.

    Or, le fait de franchir une frontière irrégulièrement, ou de se maintenir sur le territoire français irrégulièrement ne sont pas des infractions permettant de justifier un contrôle d’identité. En aucun cas, la police ne peut déduire que la personne est étrangère à cause d’un critère inhérent à la personne contrôlée (couleur de peau, d’yeux, de cheveux, vêtements, etc..). Ces contrôles sont restreints dans le temps : pas plus de douze heures consécutives. Or, ils sont permanents dans la zone frontalière briançonnaise. Dans les faits, ce sont bien des contrôles au faciès qui sont menés, car ce sont bien les personnes racisées qui sont la cible de ces contrôles, qui ne semblent justifiés par aucun motif précis. A moins que le simple fait de dormir dans la rue soit considéré cyniquement comme une infraction par l’État, ou une « incivilité » alors même que celui-ci se place dans l’illégalité en n’ouvrant pas de places d’hébergement d’urgence dans le département ? Ces contrôles au faciès font plutôt penser à une réelle volonté du préfet de supprimer la présence des personnes exilées de l’espace public.

    Par ailleurs, la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne) a bien rappelé dans sa décision[2] du 21 septembre que la France met en place des pratiques illégales en termes de contrôles et d’enfermement aux frontières intérieures, et qu’elle est tenue de se conformer aux textes européens, ce qu’elle ne fait pas.

    Ces pratiques répondent à la même logique que celle dénoncée par nos associations depuis maintenant plusieurs années à la frontière : une volonté politique d’empêcher à tout prix les personnes exilées de circuler, en faisant fi des textes de loi qui encadrent à la fois les contrôles d’identité et les procédures de non-admissions sur le territoire. Aussi, la réponse de l’Etat est une fois de plus de faire croire qu’il est possible « d’étanchéifier » la frontière, en déployant pour cela des moyens dispendieux.

    Or, Médecins du Monde et Tous migrants ont mené une enquête sur une semaine à la fin du mois d’août, et les résultats de nos observations confirment ce que nous documentons depuis plusieurs années : ce dispositif de contrôle de la frontière met en danger les personnes. Il n’empêche absolument pas les personnes exilées d’entrer en France, mais accroît par contre leur vulnérabilité en rendant le passage plus difficile, plus dangereux.

    Les récits des personnes qui traversent la frontière sont édifiants : contrôles par surprise, courses-poursuites par les forces de l’ordre, qui provoquent des chutes, avec des fractures, des entorses ou encore des pertes de connaissance. Marchant en moyenne 10 heures depuis l’Italie pour atteindre Briançon, les personnes font état de leur extrême fatigue, de déshydratation, et du risque de se perdre en montagne. Certain.es ont passé plus de 48 heures en montagne, parfois sans boire ni manger. Cette énième traversée de frontières avec des tentatives de passage souvent multiples s’ajoute à un parcours migratoire extrêmement éprouvant et crée de plus des reviviscences traumatiques susceptibles ensuite de se traduire par des altérations de la santé mentale. Les récits recueillis ces dernières semaines et les observations de Médecins du Monde lors des permanences médicales confirment ces pratiques.

    La plupart des personnes qui traversent la frontière sont originaires des pays d’Afrique sub-saharienne, et plus récemment du Soudan, et relèvent du droit d’asile ou de la protection subsidiaire. Les refouler en Italie de manière systématique et collective ignore le droit d’asile européen. De même, prendre à leur encontre des mesures d’éloignement (OQTF) vers leurs pays d’origine, où elles risquent la mort ou la torture, est contraire au principe de non-refoulement (article 33 de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés).

    [1] Encadrés par le Code de procédure pénale, article 78-2 alinéa 5
    [2] Contrôle des frontières : le gouvernement contraint de sortir de l’illégalité - Alerte presse inter-associative- 21 septembre 2023. http://www.anafe.org/spip.php?article694

    communiqué de presse Tous Migrants (co-signée avec Médecins du Monde), reçu le 3 octobre 2023 via la newsletter de Tous Migrants

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    • Ritorno a #Oulx, sulla frontiera alpina. Aumentano i transiti, i respingimenti sono sistematici

      Sono già diecimila i passaggi monitorati quest’anno allo snodo Nord-occidentale, in forte aumento rispetto al 2022 quando furono in tutto 12mila. La stretta sorveglianza del confine da parte francese e il mancato accesso ai diritti sul territorio italiano, se non per iniziative volontarie, colpiscono duramente i migranti. Il reportage

      Per le strade di Briançon, primo Comune francese subito dopo il confine con l’Italia alla frontiera Nord-occidentale, non c’è quasi nessuno. È una notte fonda dei primi d’ottobre quando all’improvviso sbuca un gruppo di ragazzi che si dirige con passo svelto verso la stazione: cercano un luogo dove potersi riposare. Intorno è tutto chiuso e avrebbero bisogno almeno di bere un sorso d’acqua, ma la gioia di essere riusciti ad arrivare in Francia compensa la necessità di dormire e di mangiare.

      “Ce l’abbiamo fatta”, dice sorridendo uno di loro. Sono in cinque, tutti provenienti dal Niger e tra loro c’è anche un minorenne. “Abbiamo camminato per otto ore -racconta- ci siamo fermati solo per nasconderci dalla polizia in mezzo agli alberi. Oppure ci siamo sdraiati per terra quando sentivamo un rumore dal cielo”.

      A far paura in questi giorni non sono solo i gendarmi appostati con i binocoli ma anche i droni che il governo francese sta usando per bloccare quanti più transitanti possibile. Dotati di visori termici, sono in grado di stanare i ragazzi anche di notte ed è per questo che i “cacciati” tendono a salire sempre più in cima, oltre i duemila metri. In questo modo il loro tragitto, di per sé già complicato, diventa ancora più pericoloso, soprattutto con la neve e il ghiaccio. Il gruppo arrivato a Briançon saluta e si nasconde nel buio per trovare un posto dove riposare qualche ora. C’è da aspettare l’alba, quando con un treno o con un autobus si tenterà di proseguire il viaggio verso una delle principali città francesi.

      “C’è mio fratello che mi aspetta”, racconta un sedicenne mentre riempie la bottiglietta alla fontanella del centro di Claviere (TO), l’ultimo Comune italiano prima del confine. È pomeriggio e il sole è decisamente caldo per essere ottobre, ma lui indossa una giacca a vento e una sciarpa pronta a far da cappello se in nottata la temperatura dovesse scendere. Aspetta insieme a un gruppo di giovani che si faccia buio per salire in montagna. “Non ho paura della montagna. Ho paura di essere preso dalla polizia e di essere rimandato indietro -continua-. Ma tanto ci riprovo”. Un secondo ragazzo racconta di essere già stato respinto due volte: “Ma prima o poi ce la faccio. Sono stato picchiato tante volte lungo il viaggio, torturato e minacciato. Il buio e la montagna non potranno mai essere peggio”. Del freddo sì, qualcuno ha paura.

      La maggior parte delle persone che si apprestano ad attraversare le Alpi non ha idea di quanto le temperature possano scendere in montagna. In questi giorni di caldo decisamente anomalo, poi, non credono a chi li avverte che potrebbero soffrire il freddo e battere i denti. E così al rifugio “Fraternità Massi” di Oulx i volontari devono convincerli a prendere la felpa e a indossare i calzettoni prima di infilare gli scarponi da montagna.

      Questo luogo è diventato negli anni un punto di riferimento fondamentale per i migranti che vogliono lasciare l’Italia e raggiungere la Francia. Ma negli ultimi mesi il flusso di persone che ogni giorno arrivano è cresciuto fino a raggiungere livelli insostenibili. “All’anno scorso ne arrivavano tra le cinquanta e le cento al giorno. Ma i momenti di sovraffollamento erano poco frequenti -spiega una delle volontarie-. Arrivavano soprattutto dalla rotta balcanica: erano siriani, afghani, palestinesi, bengalesi. C’era anche qualche persona nordafricana. Oggi, invece, arrivano quasi esclusivamente migranti provenienti dai Paesi dell’Africa sub-sahariana sbarcati nelle scorse settimane a Lampedusa o in altre località del Sud”.

      In questi giorni al rifugio i volontari sono sotto pressione: arrivano fino a 250 persone a notte ma i posti a disposizione sono solo 80. “È chiaro che dover aiutare così tante persone ha messo a dura prova l’organizzazione -spiega don Luigi Chiampo, parroco di Bussoleno (TO) che gestisce la struttura-. Significa farli dormire per terra, faticare per offrire a tutti un piatto di pasta o per vestirli in maniera adeguata ad affrontare la montagna”. Il rifugio è un luogo sicuro, dove le persone in transito sanno di poter trovare le cure di cui hanno bisogno dal momento che è sempre presente il presidio di due associazioni che offrono assistenza medico-sanitaria: Rainbow for Africa e Medici per i diritti umani (Medu). Ma soprattutto sanno che possono cambiare le scarpe, spesso lacere e inadeguate. “La maggior parte di chi arriva qui lo fa con le infradito ai piedi -racconta Sofia, una delle volontarie- indossando magliette e pantaloncini. Non possono andare in montagna così”.

      Al mattino gli ospiti del rifugio si mettono in fila al guardaroba, una stanza al pian terreno dell’edificio dove si può trovare tutto il necessario per questa nuova tappa del viaggio: scarpe, pantaloni, maglie, giacconi, guanti, calzettoni, cappellini e zaini per uomini, donne e bambini. Tutto viene catalogato per taglia e tipologia.

      “Shoes, chaussures, scarpe. Non vanno bene quelle”, spiegano i volontari. Le persone si lasciano consigliare ma alcune, soprattutto i più giovani, sgranano gli occhi di fronte a felpe colorate e giacche morbide.

      E così, imbacuccati e attrezzati, aspettano l’autobus per Claviere. “Ho 18 anni -dice uno di loro- ma sono partito quando ne avevo 16. Sono due anni che cerco di salvarmi la vita e ora sono nelle mani di Dio”. La maggior parte dei migranti che in questi giorni stanno tentando di attraversare le Alpi è sbarcata nelle scorse settimane a Lampedusa e in poco tempo ha raggiunto il confine: “Non vogliamo rimanere in Italia, abbiamo tutti famiglia o amici che ci aspettano in Francia o in Belgio -spiega Hassan a nome dei suoi compagni di viaggio-. Abbiamo una casa e forse anche un lavoro ad aspettarci”.

      Tra i migranti al rifugio di Oulx ci sono anche molte donne con bambini piccoli. Per loro la traversata in montagna è ancora più difficile, ma non c’è alternativa. Ismael sta imparando a camminare proprio in questi giorni, aggrappandosi alle gambe delle sedie e appoggiandosi alle mani di tanti sconosciuti che gli sorridono. “Non ha paura di niente”, ammette la madre. Insieme a un piccolo gruppo, anche lei tenterà di raggiungere Briançon.

      Intanto è ora di lasciare il rifugio per andare alla stazione e salire sull’autobus. Biglietto alla mano le persone prendono posto e salutano i volontari, sperando davvero di non rivederli più. Se dovessero ripresentarsi a sera tarda o la mattina seguente vorrà dire che la polizia francese li avrà presi e respinti.

      A riportare i migranti al rifugio è un mezzo della Croce Rossa che fa la spola, anche più volte al giorno, tra Monginevro e Oulx. Seguiamo l’autobus per ritornare a Claviere: mentre un gruppo s’inerpica su per la montagna, un furgoncino torna giù con a bordo cinque persone bloccate la sera precedente. È un meccanismo perverso a regolare questo passaggio a Nord-Ovest, l’ennesimo che i migranti subiscono durante il loro viaggio. Mentre sulle montagne va in scena la caccia all’uomo e i bambini sono rimpallati come biglie, i governi europei giocano al braccio di ferro, senza pensare a canali legali che possano garantire sicurezza e rispetto dei diritti umani.

      https://www.youtube.com/watch?v=z_MO67A_-nQ&embeds_referring_euri=https%3A%2F%2Faltreconomia.it%2F&

      https://altreconomia.it/ritorno-sulla-frontiera-alpina-a-oulx-aumentano-i-transiti-i-respingime

    • La denuncia di MEDU: «Respinti anche se minorenni»

      È quel che sta accadendo al confine italo-francese

      Siamo al confine alpino tra Italia e Francia. Più precisamente a Oulx in Alta Val di Susa, al #Rifugio_Fraternità_Massi. Un edificio di solidarietà, assistenza e cura gestito in maniera coordinata da un pool di professionisti e volontari, in cui ognuno opera con compiti specifici assegnati in base all’esperienza, alle competenze alle finalità dell’organizzazione di appartenenza. Un “luogo sicuro” dove poter riposare per una notte, trovare abiti puliti, un pasto dignitoso e ricevere assistenza medica prima di riprendere il proprio viaggio verso la Francia.

      Qui MEDU (Medici per i diritti umani) da inizio del 2022 fornisce assistenza medica alle migliaia di persone migranti diretti in Francia presso l’ambulatorio allestito dall’associazione Rainbow for Africa (R4A) al Rifugio. L’associazione garantisce la presenza di un medico, di una coordinatrice e di un mediatore linguistico – culturale. In particolare, il medico si occupa sia di fornire assistenza sanitaria ai pazienti che di coordinare le attività sanitarie svolte dalle organizzazioni e dai medici volontari presenti presso il rifugio.

      Nell’ultimo web report pubblicato nel mese di maggio del 2023 le autrici descrivono Oulx come una delle ultime tappe di un lungo viaggio, che può durare dai 2 ai 6 anni e che può costare dai 2 agli 8 mila euro. «Un viaggio che collega l’Afghanistan, la Siria, l’Iran e molti paesi africani con i paesi del nord Europa e dell’Europa centrale, attraverso valichi alpini che superano i 1.800 metri di quota».

      Sono numerosi i minori non accompagnati che ogni giorno raggiungono il Rifugio Fraternità Massi.

      «Negli ultimi mesi, in concomitanza con l’aumento degli arrivi via mare», spiega l’organizzazione umanitaria, «il numero delle presenze è aumentato in modo significativo: a fronte di una capienza di 70 posti, si registrano anche 230 presenze in una sola notte presso il rifugio, tra cui donne e minori».

      Sono tantissime le testimonianze, raccolte da MEDU, di minori non accompagnati che sono stati respinti al controllo di frontiera perché al momento dell’ingresso in Italia sono stati registrati – per loro stessa dichiarazione o per errore – come maggiorenni. Nonostante il loro tentativo di dichiarare la vera età al confine, vengono comunque respinti in Italia, invece di accedere alla procedura di asilo in Francia.

      «Non riconoscere la minore età al confine vuol dire esporre i minori ai rischi derivanti dall’attraversamento della frontiera a piedi, di notte, lungo sentieri di montagna impervi e pericolosi, soprattutto nei mesi invernali. A questi, si aggiunge il rischio di consegnarli alle reti dell’illegalità e dello sfruttamento» denuncia MEDU.

      «Stiamo continuando a garantire ascolto e cure alle persone accolte presso il rifugio e a portare all’attenzione dell’opinione pubblica le loro storie» – conclude l’organizzazione – «che raccontano nella maggior parte dei casi di violazioni e abusi subìti lungo le rotte migratorie».

      https://www.meltingpot.org/2023/10/la-denuncia-di-medu-respinti-anche-se-minorenni
      #mineurs #MNA #val_de_suse

  • #Propriété_collective des #terres : « Des espaces de résistance face à l’agriculture industrielle et capitaliste »

    basta ! : Dans le secteur agricole, on compte seulement une installation pour deux à trois cessations d’activité, alors qu’un agriculteur sur quatre doit partir à la retraite d’ici 2030. L’accès à la terre est-il le frein principal à l’activité agricole en France ?

    Tanguy Martin : L’accès à la terre est clairement un frein, économique d’abord. La terre, selon les régions, peut coûter assez cher. S’y ajoutent les coûts des bâtiments, du cheptel, des machines, dans un contexte où les fermes n’ont cessé de grandir en taille depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

    Il y a aussi un principe de défiance : c’est plus facile de vendre ses terres, ou de les louer à son voisin qu’on connaît depuis très longtemps, qu’à quelqu’un qu’on ne connaît pas, qui peut vouloir faire différemment, non issu du territoire... Or, 60 % des gens qui veulent s’installer aujourd’hui ne sont pas issus du milieu agricole. Les freins administratifs se combinent à ce parcours du combattant.

    Aujourd’hui l’accès à la terre se fait par le marché : les terres sont allouées aux gens capables de rentabiliser une ressource, et pas forcément aux gens capables de nourrir un territoire ou de préserver un environnement.

    À partir de quel moment la terre agricole est-elle devenue une marchandise ?

    Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la terre est restée un bien de prestige et de pouvoir à travers lequel on maîtrise la subsistance de la population. Mais après 1945, l’agriculture est entrée dans le capitalisme : on commence à faire plus de profit avec la terre et la production de nourriture, voire à spéculer sur le prix de la terre.

    La terre est même depuis devenue un actif financier. Aujourd’hui, les sociétés dites à capitaux ouverts (financiarisées), dont le contrôle peut être pris par des non-agriculteurs, ont fait main basse sur 14 % de la surface agricole utile française. C’est plus d’une ferme sur dix en France [1]. Le phénomène a doublé en 20 ans !

    Peut-on vraiment parler de spéculation sur les terres en France alors même que le prix stagne en moyenne à 6000 euros par hectare depuis plusieurs années ? Il est quand même de 90 000 euros par hectare aux Pays-Bas !

    Depuis quelques années, le prix de la terre stagne et on pourrait en conclure qu’il n’y a pas de spéculation. En réalité, le prix de la terre a globalement augmenté en France sur les 20 dernières années.

    Actuellement, ce prix augmente dans certaines régions et baisse dans d’autres. Les endroits où l’on peut spéculer sur la terre sont globalement ceux où l’agriculture s’est industrialisée : les zones céréalières dans le centre de la France, de betteraves en Picardie, de maïs dans le Sud-Ouest... Là, le prix de la terre continue à augmenter.

    En revanche, il y a des endroits en déprise, notamment les zones d’élevage comme le Limousin, où le prix de la terre peut baisser. Les prix augmentent aussi à proximité des villes et des zones touristiques, où la terre risque de devenir constructible.

    En France, ce sont les Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) qui sont en charge de réguler le marché des ventes des terres agricoles. Elles sont très critiquées. Que faut-il faire de ces organisations ?

    Les Safer ont participé à limiter les inégalités d’accès à la terre et un prix de la terre relativement bas en France. C’est vrai, même s’il y a d’autres explications aussi, comme la plus faible valeur ajoutée produite par hectare en France.

    Pour autant, les Safer doivent encore évoluer pour pouvoir répondre aux enjeux alimentaires et agricoles du 21e siècle, il faut arriver à démocratiser leur gouvernance. Celles-ci restent aujourd’hui très liées aux décisions du syndicalisme majoritaire (de la FNSEA, ndlr). Les Safer doivent aussi devenir plus transparentes. Actuellement, les réunions de décision se tiennent à huis clos : c’est censé protéger les gens qui prennent les décisions pour qu’ils soient éloignés de certaines pressions, mais cela crée une opacité très délétère pour l’institution.

    Un autre élément à revoir, c’est la façon dont on fixe les objectifs politiques des Safer. Ces dernières, quand elles achètent une terre, doivent la revendre à la personne qui répond aux objectifs politiques qui sont notamment fixés dans des documents nommés « schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles ».

    Ces documents, écrits par l’État et validés par arrêté préfectoral, décrivent quel type d’agriculture vont viser les Safer et d’autres instances de régulation foncière. Or, ces documents, du fait que le syndicat majoritaire est largement consulté, défendent plutôt la prolongation de l’agriculture vers son industrialisation. Il y a donc un enjeu à ce que ces documents soient écrits pour défendre une agriculture du 21e siècle qui défend l’agroécologie, et des paysannes et paysans nombreux sur les territoires. À ces conditions-là, il n’y a pas de raison de vouloir se passer des Safer.

    Le fait que nous ayons un système qui alloue la terre, non pas en fonction de l’offre et de la demande, mais en vertu d’un projet politique censé répondre à l’intérêt général, est un trésor inestimable en France qu’il faut absolument garder.

    En creux de votre ouvrage se pose la question du rapport à la propriété. Est-il possible de dépasser le modèle du paysan propriétaire ?

    Sur le principe, rien ne justifie le fait qu’à un moment, une personne ait pu dire « cette terre m’appartient ». La terre étant à la fois un lieu d’accueil du vivant et le lieu où l’on produit la nourriture, on peut estimer que la propriété de la terre doit être abolie. Sauf que, dans une société très attachée à la propriété privée, cela paraît utopique.

    Prenons donc le problème d’une autre façon, et voyons ce qu’on peut déjà faire à court terme. Il faut avoir en tête que les agriculteurs ne sont pas majoritairement propriétaires des terres qu’ils travaillent : 60 % de cette surface est louée dans le cadre du fermage. Il y a même des paysan·nes qui décident parfois de ne pas acheter la terre et préfèrent la louer pour éviter de s’endetter.

    D’autre part, on dispose d’une régulation foncière selon laquelle la terre n’est pas une marchandise comme les autres et ne doit pas être uniquement dirigée par le marché. Ces mécanismes juridiques permettent à l’État, aux collectivités locales et aux syndicats agricoles, de définir ensemble qui va accéder à la terre indépendamment du fait que ces personnes soient riches ou pas.

    On a là un embryon qui pourrait faire imaginer un droit de l’accès à la terre en France institué en commun. Il faut renforcer et orienter ces mécanismes – qui ont plein d’écueils ! – vers des enjeux d’alimentation, d’emploi, d’environnement... Chercher à démocratiser la question de l’accès à la terre et « le gouvernement des terres », c’est à la fois une capacité à se prémunir des effets mortifères du capitalisme, et cela permet de penser comment on pourrait gérer les terres autrement.

    Le capitalisme n’est pas une fatalité : il y a d’autres manières d’être au monde, de produire de l’alimentation, de vivre, de sortir d’un monde où le but n’est que la recherche du profit. C’est comme quand on milite pour la sécurité sociale de l’alimentation : la Sécurité sociale en 1946 n’a pas renversé le capitalisme, mais elle a créé des espaces de répits face au capitalisme, extrêmement importants pour que les gens vivent bien et envisagent de transformer la société.

    Le livre dresse un panorama des organisations qui travaillent au rachat des terres pour les mettre à disposition de paysan·nes répondant à des critères socio-environnementaux, avec des règles transparentes d’attribution de l’accès au foncier. Les surfaces acquises restent toutefois modestes. Peut-on uniquement compter sur ce type d’initiatives ?

    Les gens qui s’intéressent à la terre aujourd’hui ont bien compris qu’on n’allait pas abolir la propriété privée demain. Ils ont aussi compris que s’ils voulaient expérimenter d’autres manières de faire de l’agriculture et de l’alimentation, il fallait accéder à la propriété des terres.

    L’idée de la propriété collective, ce n’est pas l’abolition de la propriété privée, mais que des gens se mettent ensemble pour acheter de la terre. C’est ce que fait Terre de Liens en louant ensuite la terre à des paysan·nes qui mettent en œuvre des projets répondant aux enjeux de société, d’emploi, d’environnement, d’entretien du territoire... Mais c’est aussi ce que font d’autres structures de propriété foncière – la Société civile des terres du Larzac, la Terre en commun sur la Zad de Notre-Dame des Landes, Lurzaindia dans le Pays basque, la foncière Antidote, et bien d’autres.

    Tout un tas de gens essaient d’acheter des terres pour en faire des espaces de résistance face à l’agriculture industrielle et capitaliste. Cela permet d’imaginer d’autres rapports à la propriété. Ce sont des lieux d’expérimentation très importants pour susciter de nouveaux imaginaires, apprendre à faire autrement, créer de nouvelles manières d’être au monde.

    Le problème de ces lieux-là, c’est qu’ils ne peuvent pas permettre un changement d’échelle. Cela ne peut pas être la solution de sortie des terres du capitalisme. Comme elles n’abolissent pas la propriété, s’il fallait racheter toutes les terres, cela coûterait des centaines de milliards d’euros.

    Par ailleurs, ces terres ne sont pas à vendre à court terme – une terre se vend en moyenne tous les 75 ans. D’où la nécessité de faire à la fois des expérimentations de propriété collective, tout en ravivant la question de la régulation foncière pour sortir l’agriculture du capitalisme.

    En quoi la lutte de Notre-Dame des Landes, victorieuse en 2018, a reconfiguré les luttes, notamment anticapitalistes, autour des terres ?

    La question agricole et foncière, en France et même en Europe, était très peu investie par les milieux anticapitalistes. L’activisme des gens qui vont s’installer dans la Zad, les coopérations menées avec des syndicats agricoles comme la Confédération paysanne, ont – non sans débats houleux et conflits internes – mené à une lutte assez exemplaire sur un territoire.

    La répression peut être énorme, mais la capacité de résistance aussi. Cette lutte a produit des façons de faire sur le territoire – en termes d’habitat, d’agriculture collective, de vivre ensemble – inspirantes pour toute une génération militant contre le néolibéralisme et le capitalisme. Beaucoup de milieux politiques aujourd’hui parlent de subsistance, d’alimentation, de terres.

    Notre-Dame des Landes marque aussi le fait qu’avec de moins en moins d’agriculteurs dans la société (2,5 % des gens sont des travailleurs de la terre dont 1,9 % sont des agriculteurs au sens légal), les enjeux agricoles ne peuvent être uniquement du ressort des luttes paysannes. La centralité de ces luttes doit être partagée avec d’autres types d’acteurs politiques, notamment des gens qui habitent le territoire sans être forcément paysans.

    La dynamique des Soulèvements de la Terre est-elle un prolongement de Notre-Dame des Landes ?

    En effet, il me semble que Notre-Dame-des-Landes est une inspiration forte de la pensée qui s’agrège autour des Soulèvements, mouvement riche de sa pluralité. Les Soulèvements montrent que les espoirs nés de l’expérimentation à Notre-Dame-des-Landes sont possibles partout et qu’il va falloir faire différemment dans tous les territoires – chaque endroit ayant ses spécificités.

    Les questions de rapport à la terre ont aussi émergé dans l’espace politique des années 1990, avec les luttes au Chiapas, au Mexique, qui continuent d’inspirer les milieux politiques en Europe et en France. Cette circulation des imaginaires de luttes permet de penser des mondes différemment. Les Soulèvements arrivent à fédérer de manière assez importante et repolitisent très clairement ces questions de la terre. Ils portent ces questions sur tous les territoires qui ont envie de s’en emparer en disant : « C’est possible aussi chez vous ».

    Peut-on sortir l’agriculture du capitalisme ? Pour Tanguy Martin, auteur de Cultiver les communs, il faut combiner les expérimentations de propriété collective tout en s’attachant à la régulation foncière.

    https://basta.media/Propriete-collective-des-terres-des-espaces-de-resistance-face-a-l-agricult
    #agriculture #résistance #capitalisme #accès_à_la_terre #terre #financiarisation #spéculation #Sociétés_d’aménagement_foncier_et-d’établissement_rural (#Safer)

  • #Alpes-Maritimes : à #Menton, près de 3 000 migrants interpellés en deux semaines

    Ce total porte à 32 000 le nombre d’#interpellations depuis le début de l’année le long de la #frontière dans le département, un chiffre en hausse de 20 % par rapport à l’an dernier sur la même période, a précisé vendredi la directrice départementale de la police aux frontières.

    Les renforts des forces de l’ordre ont permis d’interpeller près de 3 000 migrants depuis le 8 septembre à Menton, dans les Alpes-Maritimes, avant l’afflux possible de migrants débarqués en masse à Lampedusa, a annoncé, vendredi 22 septembre, Emmanuelle Joubert, directrice départementale de la police aux frontières.

    Ce total porte à 32 000 le nombre d’interpellations depuis le début de 2023 le long de la frontière dans ce département, un chiffre en hausse de 20 % par rapport à 2022 sur la même période alors que les arrivées en Italie ont plus que doublé par rapport à 2022, a expliqué Mme Joubert lors d’un point de presse.

    Parmi les migrants interpellés, 24 000 ont fait l’objet d’une procédure de non-admission et ont été remis aux autorités italiennes, soit 10 % de plus qu’en 2022. Mais beaucoup ont été comptabilisés plusieurs fois après avoir multiplié les tentatives. Les autres étaient des mineurs non accompagnés, qui ne peuvent être refoulés et dont le nombre a bondi de 50 %, pour atteindre 5 000 arrivées, et des majeurs interceptés au-delà de la bande de 20 kilomètres permettant les réadmissions en Italie.

    Rétablissement des contrôles aux frontières

    Les procédures ont été mises en place en 2015 avec le rétablissement des contrôles aux frontières à la suite des attentats : tous les trains passant par Menton sont contrôlés, des policiers filtrent les postes-frontières et patrouillent dans les montagnes de l’arrière-pays. Seuls les contrôles sur l’autoroute restent beaucoup plus aléatoires.

    Depuis le 1er juin, une force frontière (border force) est déployée, avec des renforts de personnel, l’appui des militaires de l’opération « Sentinelle » et de drones à caméras thermiques. Dans un arrêt rendu jeudi, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a estimé que la France ne pouvait pas procéder à des refoulements systématiques de cette manière. « Nous avons été informés. L’Etat réalise une analyse, nous aurons les instructions plus tard », a expliqué Mme Joubert.

    En attendant, les contrôles se sont intensifiés après l’arrivée de plus de 12 000 migrants en quelques jours la semaine dernière sur les côtes italiennes, pour la plupart sur la petite île de Lampedusa. Mais « il s’écoule souvent un délai de plusieurs semaines entre leur arrivée en Italie et le passage de la frontière », a expliqué Mme Joubert. Ainsi, les personnes interpellées jeudi étaient arrivées à la fin d’août ou au début de septembre en Italie. Seuls deux avaient débarqué la semaine dernière à Lampedusa.

    Lors d’un déplacement à Menton, le 12 septembre, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, avait annoncé des renforts dans la lutte contre l’immigration irrégulière à la frontière italienne, où la France constate « une augmentation de 100 % des flux », avait-il dit.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/09/22/alpes-maritimes-a-menton-pres-de-3-000-migrants-interpelles-en-deux-semaines

    #chiffres #statistiques #2023 #frontières #asile #migrations #réfugiés #frontière_sud-alpine #militarisation_des_frontières #non-admission #procédure_de_non-admission #réadmissions #push-backs #refoulements #contrôles_systématiques #Vintimille #contrôles_frontaliers #border_force #force_frontière #opération_Sentinelle #Sentinelle #anticipation (par rapport aux arrivées probables en lien avec le nombre important de personnes débarquées à Lampedusa...)

    Lien avec #Lampedusa...
    https://seenthis.net/messages/1017235

    • Militari, elicotteri, droni e cani contro i migranti: la Francia blinda il confine con l’Italia

      Parigi proroga ancora ancora una volta il ripristino dei controlli alle frontiere aboliti da Schengen. «Non accoglieremo migranti da Lampedusa»

      Il ministro dell’Interno Gérald Darmanin aveva chiarito già lunedì scorso, prima dell’incontro con il suo omologo italiano Matteo Piantedosi, che “la Francia non accoglierà migranti da Lampedusa”. 120 uomini a supporto della Géndarmerie, militari, droni, elicotteri e cani a controllare il confine. Parigi proroga ancora ancora una volta il ripristino dei controlli alle frontiere aboliti dal trattato di Schengen salvo casi particolari. È la tensione che sale per la pressione migratoria che nelle ultime settimane preme dall’Italia e allarma l’Europa. A Lampedusa intanto continuano gli arrivi. 13 in un’ora, 402 le persone sbarcate, oltre 1.800 gli ospiti dell’hotspot di Contrada Imbriacola. Attenzione alta anche sul lato est, a Trieste, sulla rotta balcanica.

      Il totale di migranti sbarcati in Italia nel 2023 ieri è salito a 131mila. A Ventimiglia ieri c’erano circa 400 migranti. Blindato il valico di Ponte San Ludovico per impedire il passaggio da Ventimiglia. I controlli sono molto fitti tra Garavano e Mentone. Parigi smentisce l’impegno sul campo contro i clandestini anche del “Vigipirate”, il reparto speciale collegato al piano di sicurezza anti-terrorismo strutturato nel 1978 dal Presidente Giscard d’Estaing. Proprio vicino alla frontiera si sta lavorando a una nuova struttura di identificazione che servirà a trattenere nelle ore serali i migranti irregolari individuati dalla parte francese del confine e che verranno riportati in Italia la mattina dopo.

      La pressione migratoria è percepita come una “minaccia” a Parigi. I migranti si inerpicano di notte su sentieri anche pericolosi, a strapiombo, per attraversare il confine. “Sono dispiegati 120 militari della Border Force che assicurano, notte e giorno, azioni di sorveglianza della frontiera – spiega la prefettura del dipartimento francese delle Alpes-Maritimes – con missione di dissuasione, raccolta di informazioni sul terreno e individuazione di stranieri in situazione irregolare nella striscia di confine”. Gli agenti del Vigipirate sono chiamati “chasseurs des Alpes”, i cacciatori delle Alpi.

      I migranti intanto “hanno ben compreso che sono aumentati i controlli – ha dichiarato all’Ansa Jacopo Colomba di We World – ma loro hanno vissuto frontiere molto più traumatiche di questa. Hanno capito che c’è più polizia ma non vivono questa cosa come un trauma eccessivo. Dalle prime testimonianze che ci hanno fornito comprendono che ci vorrà più di un tentativo per passare e il turn over sarà più lento ma alla fine passeranno“. Qualora dovesse aumentare il flusso di persone aumenterebbero anche i prezzi dei passeurs.

      https://www.unita.it/2023/09/20/militari-elicotteri-droni-e-cani-contro-i-migranti-la-francia-blinda-il-confin

  • Pause #pipi (1/4)

    « Tu fais encore pipi au lit mais t’as déjà intériorisé qu’il y a des toilettes pour les filles et pour les garçons »

    « Ah si je pouvais faire pipi debout ! » Quelle personne dotée d’une vulve n’a pas eu, ce ne serait-ce qu’une seule, fois cette pensée traverser son esprit ? Position privilégiée ou imposée, dominante ou enfermante ? Et la lunette, levée ou baissée ? Geste anodin ou subi au quotidien ? Qu’est-ce qu’est-ce que ces positions aux toilettes déterminent de notre position dans la société ? C’est le début d’une enquête décalée et documentée. Pour commencer, remontons à la petite enfance. Tandis que les toilettes non mixtes et les urinoirs font leur entrée à l’école élémentaire, les codes genrés s’assimilent goutte après goutte...

    Pause pipi
    Chaque jour, nous évacuons en moyenne 1,5 à 2 litres d’urine - soit, dans une vie, l’équivalent d’un camion-citerne par personne ! Faire pipi, est si universel et quotidien, que nous en oublions de questionner ce qui se joue derrière chaque miction : un rapport à son propre corps, à son identité et au monde. Avec malice, Julie Auzou ausculte notre époque par la lunette (relevée ou non, là est la question) en mêlant témoignages de proches, d’une sociologue-géographe, d’un photographe et de personnes rencontrées au fil de ses recherches. Chez soi, dans son lit, à l’école, en manif, dans les bars ou en festival : de l’intimité la plus secrète aux mouvements les plus collectifs, qu’est-ce que l’acte d’uriner révèle de nos rapports de genre ? Une production ARTE Radio.

    https://www.arteradio.com/son/61678850/pause_pipi_1_4
    #podcast #audio #genre #filles #garçons #toilettes #intériorisation #pipi_debout #position #enfants

  • RSA : « Stigmatiser les pauvres ne mène pas au plein-emploi »

    un collectif de diverses #associations de solidarité et des #syndicats prend position contre certaines dispositions du projet de #loi_pour_le_plein-emploi examiné par le Sénat le 10 juillet. Ce texte prévoit de conditionner le #RSA à la réalisation de 15 à 20 heures d’#activité.

    Le projet de loi pour le plein-emploi est examiné le 10 juillet au Sénat. Sous prétexte de remobilisation, le revenu de solidarité (RSA) sera conditionné à la réalisation de quinze à vingt heures d’activité sous peine de #suspension de son versement en vue, soi-disant, de la « remobilisation ».

    La recherche du #plein-emploi peut certes réduire la #pauvreté globale, mais ne doit pas accentuer la misère de certains et stigmatiser les plus éloignés de l’emploi. Il serait indigne pour notre pays de priver des ménages de toute ressource. Le #travail est un facteur d’intégration et d’émancipation, s’il est librement choisi et s’il s’exerce dans des conditions décentes. [autant dire rarement ah ah ah]

    Certains secteurs d’activité en tension ont besoin de main-d’œuvre, mais peinent à recruter et à garder leurs salariés au regard de garanties collectives de bas niveau et de #conditions_de_travail peu attractives voire très pénibles. Avec son projet de loi Plein emploi, le gouvernement semble vouloir pallier ces difficultés en y positionnant les allocataires du RSA voire les travailleurs avec un handicap ou les jeunes de moins de 25 ans, même contre leur gré. Or, la difficulté d’accès à l’emploi des #allocataires du RSA est due à des facteurs multiples. Il est d’abord essentiel de leur faciliter l’accès au logement, à la mobilité durable, aux soins, et à la garde des enfants. Il ne doit pas y avoir de pression abusive pour accepter n’importe quel travail, sans tenir compte des compétences et des projets des personnes.

    Des risques de radiation massive d’allocataires

    Nous dénonçons le risque de « trappe à précarité » pour les personnes devant accepter des emplois très #précaires, temps partiels subis ou contrats courts, n’ouvrant ensuite pas droit à l’#assurance chômage. Augmenter les contraintes n’est pas la solution et renforce la stigmatisation des personnes.

    L’inscription obligatoire des conjoints des allocataires du RSA à Pôle emploi, demain renommé « #France_Travail », augmente le risque des #contrôles abusifs de la situation globale des ménages, qui pourrait accentuer le #non-recours aux droits.

    Nous alertons également sur les risques de #radiation massive d’allocataires et sur les risques de pression institutionnelle, risques aggravés par la dégradation des conditions de travail des agents de Pôle emploi qui vont devoir faire face à l’arrivée de près de deux millions d’allocataires du RSA, selon l’Insee, et leurs conjoints inscrits automatiquement. Le mirage du traitement numérique des chômeurs porte les graines d’une déshumanisation de l’accompagnement et pose des problèmes majeurs de protection des données.

    Revaloriser le RSA et l’indexer sur l’inflation

    Alors que la décentralisation était au cœur du programme d’Emmanuel Macron, l’Etat veut reprendre aux départements et aux régions des compétences puisque ces collectivités pourraient être subordonnées à France Travail, opérateur de l’Etat. Cette tentation de #recentralisation risque de décourager ou démotiver les acteurs de l’insertion, parfois trop peu mobilisés.

    Nous portons un projet alternatif de plein-emploi solidaire. Ce projet s’articule autour de trois principes : Le droit à l’emploi en premier lieu. Différentes initiatives montrent qu’il est possible et fécond d’adapter le travail aux personnes éloignées de l’emploi. Pour que ce droit soit effectif et, afin de répondre au sentiment de relégation, il doit s’accompagner d’une lutte contre les discriminations à l’embauche de tous ordres. Le droit à l’accompagnement deuxièmement.
    Les ambitions énoncées dans le projet de loi nécessitent des moyens importants qui doivent être adoptés en parallèle. Il convient également de sécuriser les actions des acteurs de l’insertion par l’activité économique en assurant leur financement sur le long terme. Enfin, le droit de vivre dignement.

    Le niveau actuel du RSA ne permet qu’une maigre survie. Il ne permet pas de sortir de la grande pauvreté et on dénombre un million de travailleurs pauvres. C’est pourquoi il faut revaloriser significativement le RSA et l’indexer sur l’inflation des petits revenus comme le smic.

    Les signataires de cette tribune sont : Sophie Binet, secrétaire générale #CGT ; Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité ; Véronique Devise, présidente Secours catholique ; Laurent Escure, secrétaire général [des dbeaufs de l’]#UNSA ; Daniel Goldberg, président Uniopss ; Marie-Aleth Grard, présidente ATD Quart-monde ; Noam Leandri, président Collectif Alerte ; Marylise Léon, secrétaire générale [des jaunes mal camouflés de la], #CFDT ; Florence Rigal, présidente Médecins du Monde ; Pascale Ribes, présidente APF France handicap ; Antoine Sueur, président [des exploiteurs d’] Emmaüs France.
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/10/rsa-stigmatiser-les-pauvres-ne-mene-pas-au-plein-emploi_6181320_3232.html

  • “Vite abbandonate”, la situazione dei migranti in arrivo dalle rotte balcaniche a #Trieste

    Al confine orientale l’assenza istituzionale lascia per strada migliaia di persone, soccorse solo dalle associazioni umanitarie. L’emergenza invasione è “artificiale”: il numero degli arrivi, infatti, è assolutamente gestibile. Una rete solidale di realtà che operano in città ha curato un rapporto per far luce su inefficienze e omissioni

    Migliaia di persone migranti lasciate a loro stesse, lungaggini anche di 70 giorni per accedere al servizio di prima accoglienza, carenza di strutture dove passare la notte, anche nei mesi più freddi. È una situazione di grave difficoltà, in netto peggioramento, quella fotografata dal rapporto “Vite abbandonate” (https://www.icsufficiorifugiati.org/vite-abbandonate-rapporto-sulla-situazione-e-i-bisogni-dei-migr), risultato di un’analisi dettagliata svolta nel corso del 2022 a Trieste -punto di ingresso nel nostro Paese delle rotte balcaniche- da parte di una rete solidale di associazioni che in città operano nel campo dell’accoglienza, della tutela sanitaria e dell’assistenza umanitaria alle persone migranti. Tra i membri del network, la Comunità di San Martino al Campo, il Consorzio italiano di solidarietà (Ics), la Diaconia valdese (Csd), Donk humanitarian medicine, International rescue committee Italia e Linea d’Ombra.

    A provocare il degrado del sistema di tutela e dei servizi di bassa soglia non è stato un aumento spropositato degli arrivi. Confrontando infatti l’ultimo trimestre del 2021 (683 arrivi totali registrati) e l’ultimo trimestre del 2022 (5.940 arrivi totali registrati), la crescita è evidente ma non è di entità tale da compromettere una gestione efficace dei flussi. “Ci sono dei momenti nel corso dell’anno in cui i numeri sono effettivamente rilevanti, da luglio a novembre ci sono stati dai 1.300 agli oltre 2mila ingressi al mese -spiega Gianfranco Schiavone, presidente dell’Ics e membro dell’Associazione studi giuridici sull’immigrazione (Asgi)- ma se dividiamo la cifra annuale, 13.127, per 365 giorni, vediamo una media di 35 arrivi al giorno; c’è un clima di allarmismo che vuole imputare la situazione di difficoltà non alla carenza di servizi, ma all’entità dei flussi. Questo per legittimare attività che non dovrebbero essere svolte, come le riammissioni informali, e la creazione di strutture di grandi dimensioni dove rinchiudere le persone”. Da notare, in più, che solo il 32% di coloro che giungono a Trieste dichiara di voler presentare domanda di asilo in Italia; solo un terzo delle persone migranti, quindi, inciderà in maniera continuativa sul sistema pubblico. Eppure l’intero rapporto evidenzia grandi problemi gestionali e umanitari.

    A partire da giugno 2022, nonostante l’aumento delle domande di asilo, il sistema di prima accoglienza (basato su due strutture, l’Ostello di Campo sacro e Casa Malala nella località di Fernetti) si è saturato rapidamente, a causa del rallentamento delle procedure di trasferimento e del ricollocamento dei richiedenti asilo in altre Regioni italiane. Così, le persone -1.535 tra luglio e dicembre 2022- sono rimaste abbandonate in strada, all’addiaccio dai 30 ai 70 giorni prima di poter accedere all’accoglienza prevista per legge. L’Ics, in questo periodo, ha inviato 14 segnalazioni formali via posta certificata alla prefettura di Trieste, per renderla edotta di quanto stava avvenendo. Ma non ha ricevuto risposta.

    Da notare che si tratta, in larga parte, di persone che avrebbero diritto a pieno titolo della protezione internazionale. Il 54% dei migranti vengono dall’Afghanistan, Paese in cui si stima che 28 milioni di abitanti abbiano bisogno di aiuti umanitari e che il 97% dei cittadini sia a rischio povertà. Il 25% delle persone viene poi dal Pakistan, il 6% dal Bangladesh, il 4,3 % dall’India, il 3,9% dal Kurdistan turco, il 2,3% dal Nepal e il 4,5% da altri Paesi. La percentuale di afghani si alza ulteriormente quando si parla di minori stranieri non accompagnati: tra i 1.406 minorenni incontrati e assistiti nel 2022, l’85% era di questa nazionalità.


    Alla presenza di persone in strada, le istituzioni hanno dapprima reagito con un approccio securitario, mandando pattuglie di polizia per fare allontanare coloro che si accampavano in Piazza Libertà (nei pressi della stazione) e comminando multe per bivacco fino a 100 euro per coloro che erano rimasti fuori dal sistema di accoglienza ed erano quindi costretti a vivere all’addiaccio. Da agosto, invece, è stata permessa la riapertura, sostanzialmente a spese delle associazioni della rete curatrice del dossier, del Centro diurno in via Udine della Comunità di San Martino al Campo che, da maggio 2020, non operava più come servizio a bassa soglia verso chiunque avesse bisogno, ma solo verso un numero limitato di persone senza fissa dimora residenti.

    Ulteriori letti sono stati messi a disposizione dal Comune di Trieste dal primo gennaio 2023, portando la capacità totale dei dormitori cittadini a 55 posti, a cui si devono aggiungere altri 25 posti in un’altra struttura per famiglie e situazioni più vulnerabili. L’intervento è stato estremamente utile ma parziale. Nel solo dormitorio gestito dalla Comunità di San Martino al Campo, nell’ultimo quadrimestre del 2022, su un totale di 733 posti letto complessivi, 604 (82%) sono stati assegnati a persone richiedenti asilo in attesa di entrare nel sistema di accoglienza.

    Coloro che arrivano dalle rotte balcaniche non necessitano solo di un letto ma anche di altri tipi di assistenza. Tra agosto e settembre 2022, per esempio, 1.088 persone hanno ricevuto visite mediche approfondite nell’ambulatorio di Donk humanitarian medicine, allestito nel Centro diurno in via Udine. Le patologie riscontrate sono state infestazioni cutanee (quasi sempre scabbia), lesioni cutanee da traumi subiti durante il viaggio, malattie infettive e respiratorie. Le associazioni della rete sono inoltre intervenute per fornire cibo, vestiti e informazioni legali alle persone migranti in Piazza Libertà. L’associazione Linea d’ombra distribuisce una media di 50 pasti al giorno, con un picco di 174 in una sera di agosto. “Le nostre proposte sono semplici -conclude Schiavone-, ovvero ripristinare un sistema di accoglienza che realmente funzioni, che a Trieste vuol dire un buon sistema di trasferimenti verso il territorio nazionale, e strutturare i servizi di bassa soglia tenendo conto che la città, per la sua natura e la sua collocazione geografica, deve essere considerata come un’area metropolitana”.

    https://altreconomia.it/vite-abbandonate-la-situazione-dei-migranti-in-arrivo-dalle-rotte-balca
    #Italie #asile #migrations #réfugiés #frontière_sud-alpine #accueil #non-accueil

    • Vite abbandonate: Rapporto sulla situazione e i bisogni dei migranti in arrivo dalla rotta balcanica a Trieste – anno 2022

      La mattina del 15 giugno, al Circolo della Stampa di Trieste, è stato presentato il “Rapporto sulla situazione e i bisogni dei migranti in arrivo dalla rotta balcanica a Trieste – anno 2022”. Di seguito potete leggere la sintesi dei contenuti, mentre è possibile scaricare integralmente il report cliccando qui: https://www.icsufficiorifugiati.org/wp-content/uploads/2023/06/Report-Piazza-2022-Web_compressed.pdf

      Per la sua posizione geografica Trieste è e rimarrà un luogo di arrivo e di passaggio per un gran numero di persone che fuggono da situazioni drammatiche nei paesi di origine. L’aggravarsi delle crisi umanitarie in alcune zone dell’Asia ha determinato, a partire dall’estate dello scorso anno, un notevole incremento degli arrivi dalla rotta balcanica.

      Il Rapporto, redatto dalla Rete solidale che unisce le organizzazioni attive a Trieste sui temi dell’accoglienza, della tutela legale e dell’assistenza umanitaria alle persone migranti, fotografa nel dettaglio la situazione degli arrivi dalla rotta balcanica nel corso del 2022 e analizza l’impatto che questi hanno avuto sul sistema locale dei servizi, e parzialmente sul sistema dei dormitori per l’inverno 2022/2023, analizzando le principali criticità emerse. Il Rapporto si conclude con raccomandazioni alle istituzioni sugli interventi, finora carenti o assenti, che è urgente realizzare al fine di garantire il rispetto delle normative vigenti e la tutela dei diritti umani fondamentali.

      Le migliaia di persone che annualmente giungono in città, tra le quali molti nuclei familiari e minori non accompagnati, hanno un estremo bisogno di prima assistenza e di informazioni sui loro diritti, di cure sanitarie, della possibilità di lavarsi, cambiarsi gli abiti, sfamarsi, riposarsi in un luogo riparato. Gli enti e le associazioni che hanno redatto questo Rapporto hanno riempito, almeno parzialmente e nei limiti delle proprie possibilità, la mancanza di interventi istituzionali. Con una presenza costante in Piazza Libertà e al Centro Diurno, hanno assicurato il monitoraggio quotidiano degli arrivi e dei bisogni, garantito assistenza materiale attraverso la distribuzione di cibo e vestiario, assistenza medica e infermieristica, informazione e orientamento legale; tutto ciò tramite il lavoro svolto da operatori, medici e infermieri, mediatori linguistico-culturali e volontari, attingendo a risorse proprie o derivanti dalla solidarietà popolare.

      Dal 1° gennaio al 31 dicembre 2022 sono state incontrate e assistite nell’area della Stazione di Trieste un totale di 13.127 persone in arrivo dalla rotta balcanica, per oltre la metà provenienti dall’Afghanistan. Ben 1.406 i minori non accompagnati, l’11% del totale. 172 i nuclei familiari, prevalentemente di origine curda turca, composti da un totale di 825 persone, tra le quali 440 bambini, prevalentemente di età tra i 4 e gli 11 anni. Circa un terzo delle persone dichiara di voler presentare domanda di asilo in Italia, mentre i due terzi sono orientati a raggiungere altri paesi, come Francia, Germania, Portogallo e Svizzera. Il dato conferma come l’Italia non sia, nella maggior parte dei casi, la destinazione finale delle persone migranti e degli afghani in particolare che arrivano in città.

      Nonostante l’aumento delle domande di asilo nel corso del 2022 non sia stato tale da potersi definire un’emergenza, a partire da giugno 2022 il sistema di prima accoglienza imperniato sulle due strutture dell’Ostello di Campo Sacro e di casa Malala a Fernetti si è saturato rapidamente. È esploso, con dimensioni non paragonabili con il passato, il fenomeno dei richiedenti asilo abbandonati in strada a centinaia, lasciati all’addiaccio dai 30 ai 70 giorni prima di poter accedere all’accoglienza come previsto dalla legge. Gli effetti della situazione sul centro cittadino e sull’area della stazione di Trieste sono stati subito evidenti: i gruppi di migranti lasciati in strada si sono moltiplicati, con giacigli improvvisati in ogni spazio disponibile, dalle aiuole alle pensiline degli autobus.

      Solo da agosto 2022 la riapertura del Centro Diurno di via Udine ha permesso di migliorare l’assistenza alle persone in arrivo e limitare in parte il degrado derivante dall’abbandono. Il Comune di Trieste ha disposto nello stesso periodo la copertura economica per l’aumento di 20 posti per l’accoglienza notturna, ma i costi di gestione del Centro Diurno e degli essenziali servizi di assistenza sono stati e rimangono tuttora coperti quasi esclusivamente dalle organizzazioni della Rete che hanno messo a disposizione risorse economiche e supporto logistico.

      L’apertura di ulteriori posti letto finanziata dal Comune di Trieste, avvenuta dal 1° gennaio 2023, ha portato la capacità dei dormitori cittadini a un totale di 55 posti cui va aggiunta, per le famiglie e le situazioni più vulnerabili, un’ulteriore struttura cittadina dalla capienza massima di 25 posti. Questo intervento si è rivelato di grande utilità, anche se ancora insufficiente a coprire il fabbisogno reale della città, tanto più che nella stagione invernale l’abbandono in strada espone le persone a sofferenze indicibili fino al rischio di morte.

      Nell’ultimo quadrimestre del 2022, presso il solo dormitorio di San Martino al Campo, su un totale di 733 posti letto messi a disposizione, ben l’82% (604) sono stati assegnati a richiedenti asilo in attesa di entrare nel sistema di prima accoglienza a loro dedicato. La mancata accoglienza dei richiedenti asilo ha quindi occupato la grande parte dei posti che dovrebbero invece essere destinati a persone del territorio che si trovano in stato di bisogno e a cittadini stranieri il cui percorso migratorio per una pluralità di ragioni non si conclude a Trieste.

      La città di Trieste, snodo di passaggio fondamentale nella rotta balcanica, avrebbe bisogno di una attenta strategia su questo tema e dovrebbe essere dotata di un programma di gestione del fenomeno migratorio di ampio respiro, che assomigli alla programmazione tipica di un’area metropolitana di confine.

      In particolare gli interventi pubblici dovrebbero mirare a perseguire i seguenti tre obiettivi prioritari:

      1. Predisporre un piano pubblico in grado di assicurare un’assistenza umanitaria, uno screening medico e un ricovero temporaneo a elevata turnazione in condizioni di sicurezza per diverse migliaia di persone nel corso dell’anno.

      2. Assicurare l’accesso immediato dei cittadini stranieri che presentano domanda d’asilo a Trieste al sistema di prima accoglienza e ai servizi a loro dedicati.

      3. Favorire una gestione dell’accoglienza che garantisca la libertà delle persone, promuovendo l’inclusione sociale, ed eviti forme di marginalizzazione e ghettizzazione.

      l Rapporto illustra dettagliatamente e per punti le misure che le autorità competenti (Comune di Trieste, Prefettura di Trieste, ASUGI) dovrebbero adottare per raggiungere i suddetti obiettivi.

      Non costituisce invece una risposta sensata l’ipotesi della apertura a Trieste di un hotspot, di fatto una struttura detentiva e non di prima accoglienza. La privazione della libertà all’interno di tali centri ha già sollevato enormi problematiche giuridiche relative alla conformità con la Costituzione e con la normativa dell’Unione Europea, e l’apertura di tali strutture non porterebbe alcun beneficio al buon funzionamento del sistema di prima accoglienza dei richiedenti asilo del territorio.

      https://www.icsufficiorifugiati.org/vite-abbandonate-rapporto-sulla-situazione-e-i-bisogni-dei-migr