• "Si la France a des besoins, nous sommes là" : ces migrants soignants qui veulent lutter contre le Covid-19

    En pleine pandémie du coronavirus, alors que les services de santé français sont débordés, des dizaines de demandeurs d’asile et réfugiés ayant des compétences dans le secteur médical se portent volontaires pour aider les hôpitaux, en guise de « gratitude ».

    « Au début de l’épidémie, voir les informations à la télévision sur le nombre de personnes aux urgences et sur la surcharge des services de santé était très dérangeant », explique Bayan Ustwani, un réfugié syrien de 53 ans qui vit en France depuis cinq ans. Regarder l’urgence sanitaire à travers un écran de télévision était d’autant plus dérangeant pour lui étant donné ses compétences dans le secteur médical. Pharmacien en Syrie, il n’a plus exercé depuis son départ de son pays natal, faute d’équivalence de son diplôme syrien en France. « Pour l’obtenir, il aurait fallu que je me relance dans les études pendant plusieurs années, je ne pouvais pas, il fallait que je travaille tout de suite », ajoute Bayan Ustwani qui a aussi des qualifications dans le commerce. Désormais, la situation de crise fait ressortir chez cet homme un sentiment de frustration.

    « Je suis capable de faire beaucoup de choses : gérer un moniteur, confectionner du gel antibactérien à base de mélanges ou autres », assure-t-il. En mars, dès le début du confinement, il s’est coordonné avec une dizaine d’autres soignants membres du groupe Facebook « Médecins et pharmaciens syriens en France » pour proposer leur aide « au ministère de la Santé, au Premier ministre, à la Croix Rouge ». « Si la France a des besoins, nous sommes là et disposés à aider, même de manière bénévole », affirme Bayan Ustwani, qui dit vouloir agir par « gratitude envers la France ».

    Dans le contexte de crise sanitaire dû à l’épidémie de coronavirus, le ministère de la Santé a lancé un appel à la mobilisation, décrivant de « fortes tensions » et le « besoin d’un renfort en personnel ». « Tous les professionnels de santé en activité (salarié, libéral) ou retraités, volontaires pour venir renforcer le système de santé dans le cadre de l’épidémie de Covid-19, sont appelés à se faire connaître », avait-il annoncé dans un communiqué, le 25 mars.
    Les réfugiés diplômés hors UE mobilisables

    Cet appel à la mobilisation se veut large. Pour faciliter le recours à toutes les bonnes volontés, la Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (DIAIR) a, de son côté, rappelé que les réfugiés diplômés hors de l’Union européenne (UE) « exerçant dans leur pays d’origine la profession de médecin, chirurgien-dentiste ou pharmacien » étaient bel et bien autorisés à exercer dans des établissements publics en France, mais « sous statut de contractuel » et sous la surveillance d’un médecin accrédité.

    Preuve de l’urgence de la situation : le gouvernement a étendu ces conditions « pendant la crise » "aux autres ressortissants étrangers n’ayant pas le statut de réfugié".

    Un décret a par ailleurs été publié le 1er avril autorisant médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens diplômés hors de l’UE à exercer dans certains territoires d’Outre-mer, zones parfois « moins attractives ».

    « Je suis prêt à tout pour aider »

    Les bonnes volontés ne manquent pas. À l’image du groupe Facebook de Bayan Ustwani, des groupes WhatsApp ont été créés parmi les candidats migrants. « Je suis prêt à tout pour aider », assure Mohamed, un Libyen de 39 ans, cité dans un communiqué du Haut commissariat pour les réfugiés (HCR). « Je peux travailler au service des Urgences d’un hôpital à n’importe quel poste. Je peux être infirmier assistant, je peux aider à donner des informations. Pour tous ces postes, il est très important d’avoir du personnel hospitalier qui sait faire face à une telle situation. »
    Françoise Henry, secrétaire générale de l’Association d’accueil aux médecins et personnels de santé réfugiés en France (APSR), assure être en contact avec cinq professionnels qui se sont portés candidats en région parisienne, plus gros foyer de l’épidémie du pays. « Ce sont des personnes originaires d’Afrique francophone donc elles maîtrisent la langue. L’un d’entre eux est un demandeur d’asile algérien qui a été infirmier pendant vingt ans. Il a déjà adressé deux demandes de recrutement dans l’Essonne », détaille-t-elle, parlant d’un besoin « évident » de bras dans les hôpitaux français.

    « Ils pourraient aider avec les gestes de base, comme retourner un malade, qui est un acte qui demande beaucoup de personnel », poursuit Françoise Henry.
    « Il ne faut pas oublier les talents des réfugiés »

    Toutefois beaucoup de candidats réfugiés ou demandeurs d’asile se retrouvent sans réponse une fois leur candidature envoyée. À la connaissance de Florence Henry, aucun des professionnels avec lesquels elle est en contact n’avaient été sollicités mercredi 15 avril pour travailler dans un secteur médical connu pour être verrouillé par des autorisations strictes.

    Sur la dizaine de professionnels de santé dont fait partie Bayan Ustwani, même tableau : un seul d’entre eux, un chirurgien ORL, a été contacté par un établissement de santé suite à l’envoi de sa candidature. « Je suis un peu surpris mais c’est comme ça », dit Bayan Ustwani.

    Face à cette situation qui dépasse les frontières de la France, le HCR et le Conseil de l’Europe ont exhorté mardi les pays européens à recourir à ce personnel réfugié qui a les compétences et l’expérience nécessaires. En cette période critique, « il ne faut pas oublier les talents des réfugiés », déclare Céline Schmitt, porte-parole du HCR en France. « D’autant qu’on sent vraiment cette envie de la part des professionnels de santé d’aider les pays qui les ont accueillis. »

    L’un des outils pour organiser au mieux ces renforts serait, selon le HCR, le Passeport européen des qualifications des réfugiés. Mis en place en 2017, ce dispositif « peut aider à établir une liste de praticiens de santé réfugiés ayant été pré-évalués » et ainsi permettre aux autorités sanitaires nationales de déterminer la meilleure façon de les déployer « si et quand c’est nécessaire ». « Les compétences existent. Les solutions, aussi », assure Celine Schmitt.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/24124/si-la-france-a-des-besoins-nous-sommes-la-ces-migrants-soignants-qui-v

    En anglais :
    https://www.infomigrants.net/en/post/24291/if-france-needs-us-we-re-ready-migrant-healthcare-workers-want-to-aid-

    #réfugiés #travail #France #asile #migrations #médecins #soins #santé #solidarité #nous_sommes_là #we_are_here

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    A mettre en lien avec ce qui se passe en #Allemagne :
    Coronavirus : l’Allemagne se tourne vers les migrants pour anticiper une pénurie de soignants
    https://seenthis.net/messages/834802

    ping @karine4 @isskein

  • Cette magnifique photographie des « représentants » des travailleurs, face aux « représentants » du gouvernement, c’est trop beau pour être vrai. Comment tout de suite on se sent trop bien représenté·es…

    Source ici par exemple :
    https://www.france24.com/en/20191219-french-unions-to-stage-new-strikes-and-protests-on-january-over-p

  • Re-commencer Vacarme | Cairn.info
    http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=VACA_080_0001&WT.mc_id=VACA_080

    Editorial de Vacarme, 20 ans après la création de la revue

    Vacarme a commencé il y a vingt ans. Nous sommes vingt ans après, et « nous » est déjà parti de Vacarme ou vient d’arriver, « nous » est revenu, ou est toujours là, tout le temps, ou parfois, de loin. D’une manière ou d’une autre nous avons tou-tes commencé Vacarme, et le recommençons à chaque numéro. Il n’empêche, il y a eu un vrai début.

    Vouloir commencer une revue, c’était vouloir commencer aux trois sens pleins que l’on peut donner à ce terme : rompre, fonder et initier. Rompre en particulier avec deux gauches : d’une part, celle qui en ne s’en prenant qu’au « système » perdait de vue la richesse des résistances singulières encore vivantes et ne donnait plus à espérer que l’assomption d’une désespérance perpétuelle ; d’autre part, celle qui au nom du pragmatisme était déjà en train de renoncer à tout ce qu’elle était. Fonder, non au sens de sceller dans le marbre les principes premiers, mais au sens de tâcher d’avoir un sain mouvement de recul face à tout ce qui nous advient, ne pas se laisser porter ou submerger, mais reprendre — fonder c’est toujours refonder comme commencer c’est toujours recommencer. Enfin, initier au sens de l’inverse de commander ou de suivre, c’est-à-dire comme l’acte d’affirmer l’adresse de subjectivités libres à d’autres subjectivités libres en leur demandant de prendre librement le relais : commencer, c’est toujours l’envoi d’une bouteille à la mer entre deux libertés au risque constant de rester en souffrance comme on dit d’une lettre égarée, mais pour un tel envoi en politique une revue reste peut-être le meilleur des moyens.

    populisme et gauche
    « Gauche » est un mot qui a fâché à Vacarme. Il y a deux lignes : ceux pour qui ce mot a eu un sens fort (« nous sommes la gauche ») et une génération pour qui c’est avant tout la compromission. C’est un clivage intime, irrésolu et reconduit. Il y a pourtant urgence à un moment de recomposition du champ politique. Le débat a fait rage entre Mouffe et Fassin lors de la campagne présidentielle 2017 pour évaluer les bénéfices électoraux de la production d’un populisme de gauche. Peut-on parler de peuple, doit-on parler des gens ? Comment articuler les différentes composantes du peuple avec des revendications minoritaires ? Quelle place les savoirs des gens, des luttes et des experts peuvent-ils avoir dans un renouveau assumé d’une langue politique commune ? C’est un chantier théorique et pratique assez urgent. Il en va de l’avenir de la gauche.

    #Vacarme #Revues #Nous_sommes_la_gauche