#nouvel_ordre_informationnel

  • Comment l’Occident perd la bataille internationale de l’information
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/04/18/comment-l-occident-perd-la-bataille-internationale-de-l-information_6597160_

    RécitSur ordre de Donald Trump, Voice of America a cessé d’émettre, tandis que les financements de Radio Free Europe et de Radio Free Asia ont été coupés. Les discussions européennes pour les sauver patinent. En face, les médias internationaux de Chine et de Russie disposent d’énormes budgets.

    A Radio Free Europe, l’effet a été moins immédiat. En tant qu’association à but non lucratif, elle reçoit chaque année une subvention votée par le Congrès américain. Celle-ci, de 142 millions de dollars (125 millions d’euros) en 2025, court jusqu’à fin septembre. Mais l’USAGM refuse de lui verser l’argent du mois d’avril. Une partie du personnel a été mise au chômage partiel, et certains programmes ont été réduits. « Il s’agit de limiter les dépenses pour pouvoir tenir plus longtemps », explique Stephen Capus, le président de RFE. Préférant ne pas être trop précis, il estime pouvoir continuer « plusieurs semaines » dans les conditions actuelles.

    Il a lancé des recours judiciaires en urgence, qu’il a gagnés. La subvention a été approuvée par les élus américains : il ne revient donc pas à la nouvelle dirigeante de l’USAGM de la modifier en cours d’année. Pourtant, l’ordre de la justice n’y a rien fait : l’argent n’est toujours pas arrivé.

    En 1991, le média américain a joué un rôle primordial dans l’échec du coup d’Etat contre Mikhaïl Gorbatchev. Les généraux soviétiques avaient arrêté le dirigeant et installé un black-out de tous les médias. Boris Eltsine, nouvellement élu président de Russie (1991-1999), prit la parole sur RFE pour appeler les Moscovites à se rassembler au centre de la ville. Par milliers, ceux-ci sont venus, précipitant l’échec du coup de force.

    Il y a urgence à agir, car France Médias Monde, que sa PDG défend comme « média de résistance et résilience démocratique », est d’ores et déjà régulièrement visé par des opérations étrangères de déstabilisation. Début avril, un influenceur ivoirien, soupçonné d’être financé par les Russes, a partagé une fausse information annonçant la mort du président de la République, Alassane Ouattara, en détournant le logo de France 24. Le message sur les réseaux sociaux a totalisé 100 000 vues en l’espace de quelques heures. Un démenti a été diffusé sur les antennes du groupe et en ligne, avant que France Médias Monde saisisse Facebook et le régulateur ivoirien.

    Pour lutter contre les infox qui se multiplient depuis l’invasion russe de l’Ukraine, l’entreprise a mis en place quatre nouveaux projets de « hubs » afin de répondre aux urgences géopolitiques. Un renforcement de la production numérique arabophone a été lancé le 27 février avec le recrutement d’une quinzaine de personnes à Beyrouth pour le Moyen-Orient, tandis qu’une offre numérique panafricaine à destination des jeunes Africains va être inaugurée à Dakar d’ici à l’été. En Europe de l’Est, le « hub » de Bucarest, lancé en 2022 et adossé à la rédaction déjà existante sur place, a été renforcé avec une offre de RFI en ukrainien et le souhait, à terme, de lancer une offre numérique en langue turque. D’une façon révélatrice des tensions géopolitiques, ce travail est financé à hauteur de 4,9 millions d’euros par an par le ministère des affaires étrangères, et non par celui de la culture.

    Alors que la réforme de l’audiovisuel public est toujours souhaitée par la ministre de la culture, Rachida Dati, Mme Saragosse se mobilise pour ne pas y figurer, craignant d’être le parent pauvre en cas de mise en place d’une holding exécutive aux côtés de France Télévisions, Radio France et l’Institut national de l’audiovisuel. « Sans faire de procès d’intention, la variable d’ajustement est toujours l’international, bien qu’on pèse à peine 7 % du budget total de l’audiovisuel public », alerte-t-elle. Elle estime que « ce n’est pas le moment de détourner la France de la scène internationale en pleine guerre hybride ». « Au moment où Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, parle de “bouclier démocratique” en Europe, avec une défense souveraine, je ne comprendrais pas qu’on ne se dise pas qu’il faut aussi réarmer la France sur le plan informationnel international », insiste-t-elle.

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