• Pollution numérique : voyage au bout d’un like
    https://www.franceinter.fr/emissions/la-terre-au-carre/la-terre-au-carre-du-mardi-21-septembre-2021

    Et si votre « like » avait bien plus d’impact environnemental que vous ne pouviez l’imaginer. Alors que le maître mot du monde numérique est « dématérialisation » il existe bel et bien un impact matériel et palpable.

    #Numérique #Pollution #SNT

  • Les nouvelles technologies rafraichissent-elles la politique ?
    https://www.franceculture.fr/emissions/le-temps-du-debat/les-nouvelles-technologies-rafraichissent-elles-la-politique


    La communication politique s’adapte à l’ère numérique : tik tok, twitch, youtube, les candidats à la présidentielle s’invitent sur les réseaux sociaux. Les nouvelles technologies menacent-elles notre système démocratique ou représentent-elles au contraire l’avenir de la participation électorale ?

    Excellente émission qui met en évidence les enjeux de l’utilisation du numérique en politique.

    #Numérique #SNT #RéseauxSociaux #Politique #Démocratie

  • Désinformation : les principales propositions de la commission Bronner - L’Express
    https://www.lexpress.fr/actualite/societe/desinformation-les-principales-propositions-de-la-commission-bronner_216590

    Mieux comprendre le fonctionnement des algorithmes, promouvoir « les logiques publicitaires responsables », permettre une demande de réparation quand de fausses informations ont causé un préjudice... Voici les principales propositions de la commission sur la désinformation face au risque de voir émerger des « réalités parallèles ». Présidée par le sociologue Gérald Bronner, elle a rendu son rapport mardi à Emmanuel Macron. La commission composée de quatorze universitaires ou personnalités compétentes était chargée de faire le point sur l’impact de l’explosion d’informations permise par le numérique, et sur les éventuelles mesures à prendre pour éviter que celle-ci ne favorise désinformation et, in fine, l’affaiblissement de la démocratie. Dans leur viseur : les « antivax » et les promoteurs des théories complotistes.

    #EMI #Infox #Complotisme #Information #Numérique

  • Recherche : une obsession délétère pour le numérique — Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/291221/recherche-une-obsession-deletere-pour-le-numerique

    Philosophe des sciences et directeur de recherche au CNRS, Philippe Huneman observe depuis des années la recherche « prendre un tournant vers un régime néolibéral et concurrentiel », et le numérique s’imposer. Les raisons de cette évolution sont principalement d’ordre économique : « La fintech [l’innovation en matière de services financiers – ndlr], la cybersécurité, l’intelligence artificielle, les algorithmes, ce sont sur ces thématiques que la croissance et la guerre économique vont se jouer. Et servir la technologie devient la mission de la recherche. »

    Allez hop, on passe au travers du #paywall :

    La ministre Frédérique Vidal en a fait l’une de ses causes privilégiées : le numérique doit transformer l’enseignement supérieur et la recherche en profondeur. Mais des chercheurs fustigent une « injonction numérique » omniprésente qui perturbe désormais le monde académique. « Dans tout financement, dans tout projet de recherche, la présence du numérique est quasiment systématique », regrette François Jarrige, historien et maître de conférences à l’université de Bourgogne.

    « Ça fait chic d’en mettre partout, on retrouve le numérique dans les objets de recherche, dans les méthodes d’enquête, comme dans la forme des productions de la recherche, renchérit Lise Gastaldi, maîtresse de conférences en sciences de gestion à l’université d’Aix-Marseille. Dès que vous utilisez ces mots-clés, vous augmentez vos chances d’obtenir des financements d’un facteur 2 ou 3. » Elle cite en exemples l’intelligence artificielle (« on l’a à toutes les sauces, quels que soient les sujets ») ou encore la robotisation et le big data.

    La question du numérique occupe désormais une place dominante dans les objets de recherche et oriente la répartition des financements dans l’ensemble des disciplines, en sciences humaines et sociales comme en sciences dures. Un chercheur spécialiste de la mémoire, qui souhaite rester anonyme, confie qu’il est aujourd’hui « presque obligatoire d’insérer une dimension numérique », afin de voir son projet subventionné. Selon lui, un travail de recherche en histoire intégrant l’utilisation de technologies de réalité virtuelle aurait par exemple plus de chances d’être financé qu’un autre plus traditionnel.

    Doctorant en sciences de l’éducation, Quentin Gervasoni a lui aussi été confronté à cette situation. C’était il y a trois ans, au moment de construire son projet de thèse, lequel est aujourd’hui financé par le LabEx ICCA (université Sorbonne-Paris-Nord). « De façon très pragmatique, je voulais faire ma thèse donc je voulais un financement, raconte-t-il. Et pour les appels à projets fléchés du LabEx ICCA, il y avait quatre axes dont deux étaient liés au numérique. » Le jeune chercheur, qui souhaitait alors analyser les transferts d’apprentissage autour de la franchise Pokémon, décide de revoir complètement son idée d’origine afin de rentrer dans les cases du laboratoire.

    Avec l’aide de son directeur de thèse, il intègre en urgence une dimension qu’il n’avait pas prévue : l’observation de communautés en ligne. « Aujourd’hui, ma thèse porte sur la réception de Pokémon sur Internet et sur le rôle d’Internet dans l’attachement sur la durée à la franchise. Ce n’est pas du tout la thèse que j’avais envie de faire au départ. Mais je me suis raccroché à ça parce qu’il me fallait de l’argent pour mon projet. »

    Bien sûr, dans une société qui tend à se numériser, il est intéressant et même nécessaire de se pencher sur ces notions et d’en utiliser les outils pour faire avancer la recherche. Mais selon certains chercheurs, cette injonction numérique ne résulte pas d’une volonté de créer de nouvelles connaissances sur ces thématiques, plutôt d’un effet de mode exagéré et d’une vision utilitariste de la recherche.

    Philosophe des sciences et directeur de recherche au CNRS, Philippe Huneman observe depuis des années la recherche « prendre un tournant vers un régime néolibéral et concurrentiel », et le numérique s’imposer. Les raisons de cette évolution sont principalement d’ordre économique : « La fintech [l’innovation en matière de services financiers – ndlr], la cybersécurité, l’intelligence artificielle, les algorithmes, ce sont sur ces thématiques que la croissance et la guerre économique vont se jouer. Et servir la technologie devient la mission de la recherche. »

    La « loi de programmation pluriannuelle de la recherche » (LPPR), promulguée fin 2020 et censée tracer les grandes lignes de la recherche pour la décennie à venir, prévoit que l’un des objectifs de la loi soit de « renforcer les capacités d’innovation et la compétitivité des entreprises françaises », entérinant cette idée que la recherche est un outil qu’on peut orienter et dont on est en droit d’attendre, à court terme, des résultats qui bénéficieront majoritairement aux acteurs du privé.

    L’effet de mode autour du numérique s’explique aussi par la manière dont sont attribuées les subventions aux laboratoires et aux chercheurs. De plus en plus, ces derniers doivent répondre à des appels à projets lancés par des instances comme l’Agence nationale de la recherche (ANR) ou des collectivités territoriales à l’échelle de la France ou à l’échelle européenne. « Qu’il y ait plus de numérique aujourd’hui dans les projets de l’ANR ne me surprendrait pas, déclare Julien Barrier, maître de conférences en sociologie à l’ENS de Lyon, qui a longuement travaillé sur les politiques de l’ESR et pointe du doigt la domination de ce financement sur projets, institutionnalisée par la création de l’ANR. Cela me semble être typique des effets de mode qu’on retrouve dans la communauté scientifique et qui vont être amplifiés par cette logique de financement. »

    Dans un contexte où l’argent public manque cruellement au monde académique, le financement sur projets est un moyen d’identifier précisément les thématiques sur lesquelles on veut investir. « Les grandes priorités de la recherche sont impulsées par la communauté scientifique mais aussi par les pouvoirs publics ou par des groupes qui représentent différents intérêts sociaux et économiques, et qui vont essayer de faire passer des priorités auprès des agences de financement », remarque Julien Barrier.

    Contactée par Mediapart, l’ANR confirme que certains axes du numérique sont des « priorités nationales définies par l’État ». L’intelligence artificielle jouit par exemple d’un sort privilégié : d’une part, « un abondement financier sur l’axe thématique avec un total de 5 millions d’euros dédiés à l’intelligence artificielle en 2021 » ; et d’autre part, « 5 millions d’euros supplémentaires sur d’autres axes thématiques pour les projets mobilisant d’autres disciplines mais à composante IA ». Comme IA et santé, par exemple.

    Difficile pour les chercheurs, de lutter. Ne pas se plier à cette injonction tacite revient presque à abandonner l’idée de voir ses travaux financés, explique Lise Gastaldi. « Il peut y avoir des effets de résistance de la part de chercheurs mais, selon les disciplines, cela peut devenir vite impossible de travailler. » Si bien que les universitaires, en particulier les plus jeunes et les plus précaires, ont intériorisé cette tendance et reprennent, lorsqu’ils se présentent ou mettent en avant leurs travaux de recherche, des notions liées au numérique, quelle que soit leur discipline. C’est le cas d’une doctorante en histoire et philosophie des sciences, qui préfère conserver l’anonymat : elle nous confie avoir choisi d’intégrer à sa thèse des méthodes numériques d’analyse et de visualisation de données. « C’est un choix stratégique que je pourrai mettre en avant dans ma carrière et ma difficile recherche de poste… »

    La loi de programmation de 2020 n’arrangeant rien, François Jarrige estime qu’il est devenu presque impossible « d’aller à contre-courant ». En l’espace de six ans, depuis sa première diatribe contre le « déferlement numérique », le chercheur a vu le phénomène s’intensifier dans tous les domaines : « Ce qu’on pouvait trouver encore étrange et discutable devient aujourd’hui une norme acceptée qu’on peut éventuellement critiquer dans les couloirs mais sur laquelle personne n’ose s’exprimer collectivement. »

    #recherche #numérique

  • affordance.info : Je n’ai pas eu le temps de faire plus court.
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2021/11/le-temps-de-faire-pus-court.html

    Faire court. Imiter le court. Reproduire le court. Faire rythme. Ce défilement est avant tout un battement, une pulsation. Le format aujourd’hui c’est la pulsation. C’est pourquoi il importe de savoir comment en contrôler la vitesse. La vitesse de ces enchaînements déterminés algorithmiquement dans le seul but de fabriquer des routines d’aliénation scopique, cette capacité à ne valoriser le court que tant qu’il concourt à fabriquer de l’artificiellement long en continu, ce refus total et programmatique du discontinu, cela interroge aujourd’hui notre capacité plus globale, plus politique, à nous confronter à des régimes narratifs nécessitant d’articuler le temps long comme autre chose que la simple agrégation de séquences courtes.

    #Format #Numérique #SNT #NSI

  • Usbek & Rica - « Les plateformes nous conditionnent à les voir comme des parties prenantes de nos vies »
    https://usbeketrica.com/fr/article/les-plateformes-nous-conditionnent-a-les-voir-comme-des-parties-prenant

    Que se passerait-il si nous ne pouvions poster que 100 publications sur les réseaux sociaux au cours de notre vie  ? Entretien avec Ben Grosser, chercheur et artiste à l’origine d’une nouvelle plateforme qui repose précisément sur ce principe, Minus.

    #reseauxsociaux #numerique #communication #SNT

  • La prescription du dr Véran : encore plus d’écrans

    Partout, le #désert_médical progresse. Services d’urgences fermés la nuit, impossibilité de trouver un médecin traitant, délais d’attente s’allongeant pour avoir accès à un spécialiste : à #Grenoble comme ailleurs, l’offre de soins dans la « start-up nation » est en chute libre.
    Quels remèdes face à ce terrible diagnostic ? Sans aucune originalité, le ministre de la Santé Olivier Véran impose un traitement : « Dans le domaine de la santé, le #numérique il va être partout, il est déjà partout mais il sera encore plus partout. »

    Le « dégradé » à la mode

    Alors que le service des urgences de la clinique mutualiste et de l’hôpital de Voiron fonctionnent en mode très « dégradé », n’acceptant plus de patients la nuit sauf cas extrêmes, comment ça se passe aux dernières urgences fonctionnelles de la cuvette ? Mi-novembre, Le Postillon a passé un bout de nuit dans celles de l’hôpital Nord, et papoté avec quelques patients et soignantes.

    https://www.lepostillon.org/-Decembre-2021-Janvier-2022-.html

    #Le_Postillon, journal en papier.

    @rastapopoulos
    A propos de : https://seenthis.net/messages/938803#message938867

    « Pensez-vous qu’il faut obliger les soignant.e.s à se faire vacciner, sans quoi ils perdent leur taff ? »

    Bah… oui. [...] Ya rien de réactionnaire à ça, et c’est même fou qu’on finisse par trouver réac de faire… le B.A.BA des choix de santé publique.

    Où sont les choix de #santé_publique, svp ?

    Voir aussi : https://seenthis.net/messages/939138

    • Je ne vois absolument pas le rapport avec la choucroute. :p

      T’as pas encore remarqué depuis deux ans, qu’en gros absolument tout le monde ici sur seenthis critique tout autant les anti-sanitaires/négationnistes de l’épidémie, que le gouvernement qui fait en majorité n’importe quoi aussi ? Et qui est rassuriste tout autant pour d’autres raisons (pour ne pas avoir l’air d’avoir un bilan pourri, pour pousser au travail et à la reprise économique, pour économiser du fric et ne pas faire de gros travaux, etc, etc).

      Donc les choix de santé publique, c’est pas les choix du gouvernement, bien évidemment. C’est :
      – le masque dans tous les lieux clos et en extérieur si foule dense
      – des travaux de grandes ampleurs dans tous les bâtiments (publics ET privés) qui accueillent du monde, pour avoir des aérations dignes de ce nom (comme il a été dit : l’aération is the new hygiène des mains : un truc majeur qui en le généralisant peut faire baisser nombre de maladies sans industrie chimique compliquée)
      – vulgariser à grande échelle le fait que ça se transmet par aérosol et non par les surfaces
      – et donc logiquement refermer plus souvent les bars et restos qui sont des lieux clos où les gens sont structurellement sans masques
      – prendre en compte la transmission dans les écoles (et donc là aussi fermer plus souvent des classes)
      – arrêter de péter l’hopital public et remettre des moyens dedans
      – et donc LES vaccinations obligatoires (le covid parmi plusieurs autres) de toutes les maladies pouvant se transmettre facilement dans un lieu comme l’hopital pour tous les personnels de santé qui cotoient donc toute la journée des personnes fragiles : LA BASE
      – etc etc

      Et donc de nombreux choix pas du tout faits par le gouvernement, qui n’en fait ponctuellement certains que si dans sa balance ça ne réduit pas trop l’économie notamment.

      Et donc comme le dit @biggrizzly, fausse alternative, c’est pas antivax ou gouvernement, c’est ni l’un ni l’autre, et c’est pas sur leurs basesà eux qu’on détermine ce qui devrait être important ou utile de faire ensemble (ensemble en tant que groupe qui se coordonne pour avoir une politique commune de santé publique, pas chacun dans son coin en tant qu’individu).

    • @rastapopoulos @biggrizzly

      « Ensemble en tant que groupe qui se coordonne pour avoir une politique commune de santé publique »  ?!?

      Mais pour cela il faudrait instaurer un #rapport_de_force avec le gouvernement. Il me semble.

      Et lorsque l’on traite ceux qui ne veulent pas se faire vacciner d’assassins comme le fait Arno*, avec tout le mépris qui va aux manifs anti-passe sanitaire, lorsque l’on ne défend pas les soignants opposés à l’obligation vaccinale sous peine de licenciement comme tu le fait, comment créer ce rapport de force et cette « politique commune » ? SVP ?!

      Bref, comment ne serait-ce que tenter de changer la situation sans soutenir, voire même en justifiant - quant on ne fait pas dans la surenchère - les mesures gouvernementales, ceux qui luttent sur place pour la faire changer ?

      J’aimerais vraiment que l’on m’explique comment réaliser cette géniale quadrature du cercle. A moins que ce ne soit le degré zéro de la stratégie politique...

      Autrement dit, cet « ensemble en tant que groupe » - qui est bien abstrait, donc - semble ne concerner que les vaccinés à jour de leurs combien de doses, déjà ? Et avec ou sans QR code pour le prouver ?

      L’entre-soi confortable des gens raisonnables et éclairés... ?!?

      En définitive, le mépris flagrant et la moquerie de la gauche à l’égard des préoccupations légitimes des gens (concernant les confinements, les vaccins ou les passeports sanitaires) sont honteux. Non seulement ces préoccupations sont enracinées dans des difficultés réelles, mais elles découlent également d’une méfiance légitime envers les gouvernements et les institutions qui ont été indéniablement capturés par les intérêts des entreprises.

      https://qg.media/2021/11/30/le-naufrage-de-la-gauche-politique-face-au-covid-par-toby-green-et-thomas-fazi

      Un texte un peu naïf sur la « gauche progressiste », mais qui résume bien la situation de décomposition du soi-disant camp de l’émancipation.

    • C’est sûr qu’on a pas du tout déjà mille fois répondu sur le fond dans mille fils… : il y a décorrélation complète entre les raisons de nos avis, et les raisons des actions du gouvernement. Ce n’est pas parce que ces raisons ne sont pas les tiennes qu’on n’y a pas déjà répondu. :)

      Pourquoi diable est-ce qu’on instaurerait un rapport de force avec le gouvernement pour défendre les soignants opposés à la vaccination… alors que comme déjà dit, c’est juste la base en santé public : le principe même d’être soignant c’est être tous les jours en contact très rapproché avec uniquement des personnes faibles. Toutes les personnes intervenants dedans doivent être vaccinées pour les maladies qui se transmettent le plus à une période donnée. Ya strictement rien de nouveau, tous ces gens, ont déjà l’obligation d’être vaccinés pour X maladies de ce genre, et le covid est une de plus car il remplit tous les critères d’une maladie dangereuse, qui se propage très beaucoup et très facilement dans un lieu comme l’hôpital, et qui tue une part non négligeable des personnes faibles qui sont dedans. Ya strictement aucune raison de laisser approcher ces gens sans avoir toutes les tranches d’emmental à la fois (masque + vaccin + désinfection + aération + etc etc).

      La question c’est pas « qu’est-ce qu’on pourrait bien faire contre le gouvernement », la question c’est « qu’est-ce que nous, en tant que collectif porteur de valeurs d’émancipation, on aurait fait/on aimerait faire comme décisions/actions pour prendre en compte l’épidémie et réduire les risques de morts et de cas graves là à court terme en premier lieu » (le dernier point est important car il est trop facile de dire « si si si on réduisait plein de pollutions en 30/50/100 ans de changements, alors yorait moins de maladies industrielles et donc nos corps seraient en moyenne en meilleure santé », ce qui est vrai aussi mais laisse concrètement crever et devenir handicapés des millions de gens là maintenant = darwinisme social). Réponse à avoir bien sûr en ayant pris en compte ce qu’on sait de plus précis au fur et à mesure : transmission par aérosols et non par surface, etc. Et réponse à avoir bien sûr again en partant du principe qu’on est pas négationniste/rassuriste de l’épidémie et de sa dangerosité.

      Sans aucun rapport avec le gouvernement, en prenant en compte les savoirs du moment, il est parfaitement possible que certaines de nos décisions aillent à l’encontre de l’État ou de l’économie (arrêter d’aller travailler dans certains lieux, faire des travaux d’aération avec l’argent public) et d’autres aillent dans le même sens (porter le masque dès qu’on est dans un lieu clos ou en foule extérieur). Ce qu’ont fait des communautés comme les zapatistes (dont la plupart qui devaient se déplacer sont vaccinés contre le covid). Bref on se répète quoi, notre baromètre n’est pas en se comparant à l’État.

      Et si on avait suivi les mêmes demi-raisonnements depuis 40 ans de sida, j’imagine pas l’hécatombe… ("l’État dit qu’il faut se masquer le pénis mais c’est faux", « c’est seulement les homos et les personnes faibles qui transmettent ça et qui ont un risque », etc etc). Encore heureux que les groupes de malade ont mélangé savoirs savants (comment la maladie se transmet vraiment maintenant qu’on sait, quels médicaments peuvent repousser ou réduire la maladie ou la souffrance) et savoirs personnels… et non pas les assertions complotistes ou anti-sanitaires qui étaient apparues de même dès le début de l’épidémie de sida, aussi bien chez des complotistes que chez des racistes ou homophobes dans les gens au pouvoir (on a plusieurs décennies de documentation, d’archives, pour faire le bilan de ça).

    • @rastapopoulos

      Pourquoi diable est-ce qu’on instaurerait un rapport de force avec le gouvernement pour défendre les soignants opposés à la vaccination

      Lorsque l’on ne veut rien comprendre ( bis repetitam ) : pour défendre un service public de soin, banane !

      notre baromètre n’est pas en se comparant à l’État

      Lorsque l’on ne veut rien comprendre ( ter repetitam ) : mais peut-être faudrait-il faire preuve de plus d’imagination politique...

      Si je comprend bien le sens de ta réponse, il n’y a pas de problème politique, que des solutions techniques ?!?

  • L’opportunisme pandémique du néolibéralisme

    https://www.lamuledupape.com/2021/12/06/lopportunisme-pandemique-du-neoliberalisme-vu-par-celia-izoard

    Lors de la dernière Fête du Vent organisée par l’Amassada à la fin du mois d’août 2021, #Celia_Izoard a donné une conférence consacrée à la gestion sanitaire de la pandémie de #Covid-19 en France, et plus largement, à l’impact des intérêts capitalistes sur les politiques de #santé_publique.

    Celia Izoard introduit son propos en remontant à l’époque de l’incendie de l’usine #Lubrizol à Rouen, le 26 septembre 2019. 10 000 tonnes de produits chimiques partent en fumée : reprotoxiques, mutagènes, cancérigènes… La population locale constate des effets directs sur la santé : crises d’asthme violentes, vomissements et diarrhée, pertes de capacité respiratoire qui perdurent…
    « Ce qui est frappant, dès le départ dans cette catastrophe, c’est que très rapidement la préfecture a déclaré qu’il n’y avait pas de toxicité aiguë, en jouant délibérément sur les mots : pas de toxicité aiguë, ça veut juste dire qu’on ne va pas mourir tout de suite en respirant cet air. »
    Les angles morts de la santé publique
    Celia Izoard se lance dans une série d’enquêtes, et constate qu’il y a toute une catégorie de la population qu’on a obligé à travailler ce jour-là, malgré les nuages de fumée très dense. Les services de communication de la préfecture opposent toujours la même réponse à la journaliste : « Mais voyez-vous, l’air était complètement respirable ce jour-là. » La situation, mise en parallèle avec la crise sanitaire dans lequel le monde est plongé depuis début 2020, interroge lourdement sur la vocation de l’État à protéger la santé des citoyen•nes.
    « À ce moment-là, j’ai commencé à m’intéresser au cancer, pour plusieurs raisons. La première, c’est que je me demandais si on pourrait montrer un jour que l’incendie de Lubrizol a eu un impact. Pour l’instant, la version officielle c’est que non, on ne peut rien prouver, rien montrer. La seconde, c’est que comme dans d’autres endroits en France, près de Rouen, il y a des parents et plus particulièrement des mères de familles dont les enfant sont atteints de cancer et qui constatent des taux anormaux de cancers de l’enfant dans leur entourage – ce qu’on appelle un cluster. Elles alertent Santé Publique France, qui vient faire une enquête. Le plus souvent, l’agence de santé constate la surincidence de cancers, mais ne conclut pas sur une cause quelconque, alors que les parents suspectent les pollutions des usines ou des exploitations agricoles environnantes. »
    Dans ce cadre d’enquête, Celia Izoard travaille sur l’épidémiologie et sur le #cancer, son lien avec l’environnement, et sur la manière dont on produit les chiffres officiels. La journaliste est très étonnée de s’apercevoir que les pouvoirs publics, notamment l’agence Santé Publique France, n’a pas du tout les moyens de savoir combien il y a de cas de cancers en région parisienne ou autour de Rouen, là où se trouve une grande partie de l’industrie pétrolière et chimique française. Les registres du cancer ne sont en effet établis que dans 22 départements en France et ne concernent que 22 % de la population. Ils sont faits de manière assez arbitraire en fonction des registres préexistants, parmi lesquels figurent par exemple le Tarn ou d’autres zones pas forcément connues pour leurs forts risques environnementaux.
    « C’est très étonnant quand on se souvient du fait que le cancer fait 150 000 morts par an, qu’il y a 350 000 nouveaux cas chaque année, et que pour certaines catégories de cancers, l’augmentation est très importante et devrait constituer un signal. »
    Pour exemple avec les cancers de la thyroïde, en augmentation de 4,4% par an, ce qui est très important.
    « Il y a vraiment ce qu’on appelle une science « non produite » autour de ces questions. Et je suis très étonnée du discours officiel de ces institutions, à la fois Santé Publique France et le Circa (Centre International de Recherche sur le Cancer), qui ont une politique de santé publique fondée sur les comportements individuels : alerter la population sur le fait qu’il faut avoir une bonne alimentation, faire du sport, ne pas fumer, ne pas boire, etc. »
    Selon Celia Izoard, certains textes tendent même à dissuader les gens de penser que le cancer pourrait être lié à des facteurs environnementaux.
    Dans un article consacré à la pétrochimie et à l’incendie de Lubrizol pour la Revue Z, la journaliste reproduit un tableau du Circa dans lequel sont découpés les facteurs de risque pour le cancer : tabac, alcool, alimentation, expositions professionnelles, pollution de l’air extérieur… Les substances chimiques de l’environnement y sont classées comme dernier facteur de risques, avec seulement 0,1% des cas. Pour Celia Izoard, on a là un découpage d’une incroyable mauvaise foi, car on pourrait très bien considérer que les substances chimiques de l’environnement peuvent être liées à des expositions personnelles comme l’alimentation.
    « Ce découpage n’est pas honnête intellectuellement. J’en arrive à la conclusion qu’il y a une volonté délibérée de la part des pouvoirs publics de ne pas incriminer l’industrie et de ne pas produire de données là-dessus. »
    Lors de son enquête, Celia Izoard essaie de téléphoner à Santé Publique France afin d’obtenir un entretien, dans le but de confronter l’institution à ses conclusions. Mais l’agence oppose une fin de non-recevoir :
    « On est désolé, c’est pas contre vous, mais il n’y a personne pour vous répondre parce qu’il y a un nouveau virus, et tout le monde est là dessus. »
    On est en janvier 2020, et l’État ne peut répondre à une journaliste à propos des cancers en France, en raison d’un nouveau virus. Une non-réponse qui en dit long sur les moyens mis en place pour la santé publique.
    L’État et la pandémie
    Le cancer fait plus de 150 000 morts en France chaque année. Celia Izoard compare la différence de traitement du cancer par les autorités publiques avec le cas des infections de rougeole, pour laquelle existe un vaccin, mais non obligatoire jusqu’à récemment. Elle constate que l’État opère un pilotage très serré du contrôle de cette maladie.
    « Quand il y a des cas de rougeole, on peut être appelé, on demande quels sont les cas contacts, etc. La rougeole faisant à peu près huit morts par an, je m’interroge alors sur ce décalage avec la manière dont le cancer est pris au sérieux dans la recherche de ses causes. »
    Entre Lubrizol et l’épidémie de Covid, à ce moment la journaliste fait partie du camp des perplexes, à cause de la différence de réaction des pouvoirs publics, de l’État, face à ces deux événements catastrophiques.
    « D’un côté, une forme de déni caractéristique des catastrophes industrielles : « non ce n’est rien, il ne se passe pas grand chose », Emmanuel Macron fait un scandale car on a osé comparer Lubrizol à AZF, deux catastrophes chimiques pourtant comparable. »
    Avec le Covid, très rapidement des mesures d’exception sont prises, et semblent à beaucoup de personnes assez disproportionnées par rapport au danger. Après une première phase de déni, les médias se montrent très alarmistes, suivant les impulsions du gouvernement.
    Celia Izoard s’interroge. Et émet une première hypothèse, « très faible », pour comprendre la réaction des États qui sont désormais prêts, pour protéger la population, à bouleverser fondamentalement le système social et modifier radicalement les modes de vie en inversant les règles du droit.
    « C’est l’idée qu’il y a une sorte de peur atavique vis à vis des maladies infectieuses et contagieuses, qui serait un reste historique lié à la peste et aux grandes épidémies. »
    Par ailleurs, on accepterait certaines maladies, le cancer notamment, comme étant la rançon du progrès, bien qu’on ne présente pas celui-ci de manière objective et qu’on occulte les pollutions diverses qu’il engendre. On n’accepterait pas le retour des maladies infectieuses car elles représentent une dimension rétrograde : « l’âge moderne n’est pas censé tolérer ce genre d’événements. »
    En deuxième idée, la journaliste émet la pensée suivante : il ne faut pas confondre santé publique et santé de l’ordre public.
    « C’est à dire que la principale menace dans cette situation de pandémie, c’est la menace pour l’État lui-même. »
    Le degré de contrainte exercé par le gouvernement français sur la population serait ainsi lié à la fragilité de ses infrastructures de base. Au cours des trente dernières années, 160 000 lits d’hôpitaux ont été supprimés. On a un risque de débordement réel.
    « On ne peut pas entasser des cadavres comme on compte les décès de mort lente du cancer, ce n’est pas du tout le même phénomène visuel d’un point de vue de ce que l’on appelle une crise . »
    En mettant en place des mesures draconiennes, l’État se protègerait ainsi lui-même. C’est moins la préservation de la santé publique qui serait recherchée que celle de la continuité du pouvoir.
    « La différence de l’enjeu entre l’incendie de Lubrizol à Rouen et la pandémie de Covid, même si les phénomènes ne sont pas comparables dans leurs proportions, c’est la distinction entre la santé publique et la santé de l’ordre public. »
    Pour Celia Izoard, l’illustration la plus frappante en est le fait que des centaines de postes de vigiles ont été créés pour contrôler les passes sanitaires à l’entrée des hôpitaux, alors même qu’on est en déficit de soignant•es depuis des années.
    « La santé ne paraît pas être la priorité, ou d’une manière extrêmement spécifique et discutable, dans les mesures qui sont prises. »
    Dans sa réaction primitive, l’État cherche donc rapidement à se protéger d’un procès en imprévoyance, qui romprait le pacte qui le lie aux citoyen•nes qu’il est censé protéger. Il faut éviter de subir de plein fouet l’effet de la baisse drastique des moyens de la santé publique et de l’inaction face aux maladies chroniques, qui forment des comorbidités très importantes dans le cadre du Covid. Les discours politiques prennent soin de retourner l’accusation contre la population (on se souviendra par exemple de la déclaration du préfet de Paris Didier Lallement :
    « Ceux qui sont aujourd’hui hospitalisés, ceux qu’on trouve dans les réanimations, ce sont ceux qui au départ du confinement ne l’ont pas respecté. »
    En somme, si la situation est dramatique, c’est parce que les citoyen•nes ne se plient pas aux mesures sanitaires ou ne se font pas vacciner.
    L’opportunisme néolibéral piloté par le gouvernement
    Le troisième axe de réflexion suivi par Celia Izoard intègre les enjeux du capitalisme moderne.
    « L’État protège les empires industriels, et son rôle depuis la révolution industrielle est de piloter la modernisation. C’est à dire, développer les forces productives et, depuis un certain temps, mettre en place l’orthodoxie néolibérale. »
    L’État va donc développer des politiques de santé publique convergentes avec cet objectif. Dans le cas de Lubrizol et des accidents industriels, on comprend donc que les politiques menées ne peuvent viser à démanteler l’industrie pétrochimique, pourtant l’un des principaux vecteurs de ce type de pollution. Le rôle de l’État est donc de répondre à tout événement en plaçant avantageusement ses alliés, typiquement les grands groupes industriels ou les entreprises prometteuses.
    Pour Celia Izoard, les politiques de santé publique menées face à l’épidémie de Covid19 répondent très clairement à ces critères : « on a un soutien très fort à la télémédecine et à l’e-santé, le déploiement d’un gouvernement algorithmique et d’un vaccin biotechnologique. » On nage en plein NBIC (Nano Bio Info Cogno), cette convergence des technosciences très en vue qui tire la croissance économique.
    « D’une certaine manière, la pandémie est une opportunité dont s’est saisie l’État pour accélérer la société du Big Data et ouvrir de gigantesques marchés par la contrainte légale sur les individus. Le passe sanitaire est un formidable couteau suisse dont vont pouvoir émerger tout un tas de nouvelles start-ups et de nouveaux usages, qui ont tous pour point commun d’être liés à l’intelligence artificielle, à la donnée et à la numérisation des activités. »
    La journaliste en veut pour preuve le Ségur de la Santé à l’automne dernier, lequel a débloqué une enveloppe de 8 milliards d’investissements pour le secteur. On y trouve une augmentation de 180€ de salaire pour certaines catégories de soignant•es, mais le quart de l’enveloppe est dévolu au développement de la télémédecine, à la numérisation et à la collecte de données.
    « Entre la clinique et la télémédecine, nous avons deux visions du soin diamétralement opposées. D’un côté une médecine liée aux pratiques incarnées par des humains, qui nécessite d’embaucher. Et de l’autre côté, une médecine des nouvelles technologies fondée sur l’automatisation : la e-Santé. »
    Ainsi, c’est dans ce sens là qu’il faudrait comprendre la négligence absolue de l’État en matière de soutien aux moyens humains pour faire face à la pandémie.
    « Il y a vraiment un passage d’un système à l’autre, avec l’idée d’un système de santé où les humains, les soignant•es ont beaucoup moins de place, et où on va pouvoir marchandiser la santé en faisant travailler des tas de boîtes pour collecter des données, piloter les appareils de télémédecine, déployer la 5G et mettre en place des systèmes de capture et de surveillance épidémiologique etc. »
    Cette nouvelle médecine, sa e-Santé, ses robots et ses capteurs, sont considérés comme prioritaires dans la course des nations autour de la révolution technologique que représente l’intelligence artificielle. La réaction de l’État est donc inscrite au coeur d’une guerre économique : « data is the new oil ».
    « Le but de notre gouvernement est de créer des géants nationaux dans ce domaine et d’ouvrir des marchés. Et ça, on ne peut le faire sans une collecte massive de données de santé. »
    « Cédric Villani, dans le rapport sur l’intelligence artificielle qu’il a dirigé, le précise : le rôle de l’État aujourd’hui, c’est de lancer des grands projets qui permettent une collecte massive de données de qualité, dans les domaines prioritaires, la santé et l’éducation notamment. »
    Dans les discours politiques tenus dès les premiers temps de la pandémie, on comprend à cette lumière la mise en avant d’un monde d’après auquel s’opposerait l’archaïsme de celui d’avant. Et ce monde d’après, c’est celui dont ont besoin un certain nombre d’États pour maintenir leurs intérêts industriels.
    La formule d’Emmanuel Macron : « Nous sommes en guerre », elle fait sens. Oui, nous sommes en guerre, c’est la guerre économique. Ce qui explique aussi la violence du débat intellectuel et la violence avec laquelle tous ceux qui sont considérés comme « covido-sceptiques » ou susceptibles de tenir des propos covido-sceptiques, ou qui pourraient, de manière épidémique, être cas contact avec d’autres personnes ayant produit de tels discours, sont évincés du débat de manière hystérique et inédite.
    Le Covid s’est ainsi présenté comme une opportunité extraordinaire pour accélérer drastiquement cette transformation #numérique de la santé et de la société en général. Dès la fin 2019, l’Agence européenne de la santé lance un appel d’offres pour créer une e-carte de vaccination, dédiée à limiter les risques pandémiques en Europe. Cet appel d’offres est remporté début 2020 par quatre entreprises françaises, dont le spécialiste de la transformation numérique, l’entreprise Jouve. C’est ce consortium qui met très rapidement en place le passeport sanitaire européen. Dans le domaine de la collecte massive de données de santé, et de manière plus générale, du Big Data et de l’intelligence artificielle, « la France a beaucoup de pions à placer. »
    La course mondialisée
    Un autre élément important vient étayer la réflexion de Celia Izoard :
    « Aujourd’hui le modèle en matière de monde d’après, de société pilotée par ce genre de technologies – de manière très antagoniste avec nos traditions politiques -, ce sont les pays asiatiques : la Chine, la Corée du Sud, Singapour, Taiwan… Ce n’est pas un hasard si très rapidement, il est dit dans les plus hautes instances, qu’il va falloir imiter ces pays. »
    Ainsi de l’Institut Montaigne, l’un des principaux responsables de la mise en place des doctrines néolibérales en France, qui publie un rapport dès avril 2020 sur la réponse des pays asiatiques à la pandémie, vantant les systèmes mis en place. Au moment de la publication de ce rapport, ce n’est pas l’efficacité de ces mesures qui est mise en avant : non seulement il est encore trop tôt pour mesurer leurs effets, mais une partie des pays cités sont aussi des îles et ne connaissent donc pas les mêmes enjeux de gestion de la pandémie. Sans parler de la Chine dont les chiffres ne sont pas fiables. On ne cesse depuis de vanter ces systèmes, voire de les appliquer. « C’est un enjeu industriel majeur, il faut donc pousser dans ce sens. »
    En juin 2021, trois sénateurs français rédigent le rapport Crise sanitaire et outils numériques , dans lequel ils se livrent au même exercice, passant en revue les réponses des pays asiatiques. Le discours, en substance, est le suivant : plein de verrous ont sauté, les gens sont plus prêts à accepter les mesures, le passe sanitaire se met en place, mais ça ne va pas assez loin du tout. Il faut faire sauter d’autres obstacles politiques rapidement. Les sénateurs mettent en cause le rôle de la CNIL, terrible obstacle par sa lecture beaucoup trop traditionaliste des droits et libertés. Le modèle chinois est porté aux nues : des caméras biométriques à reconnaissance faciale permettent de scruter les interactions sociales, de rattraper ceux devant être placés en quarantaine, des caméras thermiques mesurent leur température, et un équivalent du passe sanitaire est mis en place dès mars 2020, au moment où le confinement est décrété en France. Ce passe numérique est développé par de très grandes entreprises liées au gouvernement chinois. Alibaba et Tencent développent les fameuses applis et services de réseaux sociaux utilisés par la quasi-totalité de la population en Chine. Un contact tracing est inclus dans ces applis, tout le monde y est donc soumis de fait.
    En Corée du Sud, des quarantaines obligatoires sont décidées, avec un contact tracing très intrusif. On utilise toutes les données disponibles : relevés bancaires, factures téléphoniques, géolocalisation… Lorsqu’on est placé en quarantaine, une application de géolocalisation alerte les forces de l’ordre si celle-ci n’est pas respectée ou si le smartphone est éteint pendant plus de quinze minutes. À Singapour, on a aussi une quarantaine géolocalisée couplée à une vidéosurveillance analysant les interactions des individus dans l’espace public, ainsi qu’une application « Trace Together », qui permet à l’administration de surveiller nominativement toutes les interactions en fonction de la localisation du téléphone. Dès mars 2020, un passe sanitaire est mis en place, « Safe Entry », pour contrôler les accès aux espaces publics. C’est un passe nominatif, et les données sont directement transmises aux autorités. C’est ce genre de mesures qui est clairement visé par les sénateurs ou par l’institut Montaigne, et qui dessinent l’accélération de l’hypercapitalisme contemporain.

    #QR_code, #passe_sanitaire, #technocritique, #Etat, #sauver_des_vies, #obligation_vaccinale.

  • Gauthier Roussilhe | Explications sur l’empreinte environnementale du secteur numérique
    https://gauthierroussilhe.com/post/explication-empreinte.html

    Par Gauthier Roussilhe

    L’empreinte environnementale du secteur numérique fait toujours l’objet de nombreux débats en France et en Europe. Du fait du manque de connaissances en sciences environnementales appliquées au secteur numérique, de nombreuses choses sont publiées et répétées sans être confrontées aux recherches récentes et vérifiées. À ce titre, j’ai regroupé les questions courantes qui parcourent le débat public pour y répondre de façon courte. Pour chaque question je propose aussi une réponse longue, argumentée et basée sur les connaissances scientifiques vérifiées les plus récentes.

    #Numérique #Empreinte_carbone #Ecologie_numerique

    • Comme pour beaucoup de documents de ce genre, la majeure partie est consacrée à la consommation d’énergie et aux GES (pour une fois en insistant plus qu’ailleurs sur la partie fabrication). Alors que le numérique c’est plein d’autres pollutions, l’industrie minière, l’accaparement de terres, d’eau, des pollutions chimiques aussi bien en amont, qu’en aval pour la fin de vie (dont il s’accorde à dire qu’il y a très peu d’études là dessus, c’est pratique) avec les cimetières de machines et composants dans d’autres pays lointains, et d’énormes problèmes sociaux et de (non) droits humains.

      L’environnement c’est aussi les êtres humains qui y vivent.

      Selon l’adage NIMBY (pas chez oim), si on faisait chez nous ne serait-ce que le quart de ce qu’on s’approprie ailleurs pour fabriquer (et jeter ensuite) les internets, les mobiles, etc, la population péterait un câble et refuserait ou bien il faudrait se transformer en pays encore plus autoritaire pour l’obliger, et on détruirait irrémédiablement tous les différents territoires et paysages (ce qui est déjà le cas deci delà, cf les enquêtes de PMO et d’autres sur la french silicon valley grenobloise).

      Sur la #5G sinon aussi :
      https://gauthierroussilhe.com/pdf/5G-Juillet2020.pdf

  • Nicolas Alep, Quelques pistes de réflexion pour une décroissance numérique, 2021 – Et vous n’avez encore rien vu…
    https://sniadecki.wordpress.com/2021/11/17/decroissance-numerique

    Retour assez détaillé sur les retours qu’illes ont eu sur leur livre « Contre l’Alternumérisme » (recension seenée ici : https://seenthis.net/messages/827883)

    Dans notre petit essai corrosif Contre l’Alternumérisme [1], écrit avec Julia Laïnae, nous nous sommes employés à exposer les désaccords de fond qui nous séparent des courants prônant la maîtrise du numérique et à promouvoir l’idée d’une « désescalade technologique ». Le reproche principal qui nous a été adressé est que livre n’ouvre aucune perspective d’action, n’est pas un programme politique et encore moins un guide pour « mieux vivre avec le numérique ». Frustrant ? Pour nombre de lecteurs, visiblement oui. Mais en l’état, et pour de nombreuses raisons, il serait malhonnête de prétendre être en mesure de produire le mode d’emploi d’une sortie du numérique.

    #critique_techno #internet #numérique #informatisation #logiciel_libre

  • Le cycle du silicium
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?article1589

    « Du silex au silicium », on connaît ces triomphales trajectoires que les communicants des sciences et technologies, et autres apologistes du progrès industriel, ont coutume de projeter dans leurs livres, expositions, films, conférences, etc. Ces trajectoires se prolongeant vers un infini futur et merveilleux sur l’écran de leurs PowerPoints, grâce à la Transition, qui, pour être « écologique », ne peut être que « numérique ». C’est du moins ce que nous disent nos technologistes Verts, Yannick Jadot, candidat EELV aux présidentielles, Guillaume Gontard, sénateur Vert de l’Isère, Jean-Luc Mélenchon, « planificateur écologique », également candidat aux présidentielles, ou encore André Chassaigne, député communiste du Puy de Dôme, dont nous rapportons ici les propos. Ces insanités ne peuvent se proférer qu’à la (...)

    #Nécrotechnologies
    https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/le_cycle_du_silicium.pdf

    • Suite de la brochure et du livre « Le téléphone portable, gadget de destruction massive » parus il y a 15 ans au début des années 2000.

      Article très très informatif, sans aucune insulte (contrairement à ce que laissait penser l’intro, juste pour faire chier). Ça mériterait même un #toctoc @rezo peut-être.

      A l’instar de Thierry Breton, l’actuel commissaire européen au numérique, de passage le 21 juillet 2021, nos personnalités ne manquent jamais de célébrer « un écosystème impressionnant » - entendez la liaison recherche-université-industrie-pouvoirs publics. Tous feignent d’ignorer le fondement matériel de cet écosystème : les matières premières. Comme si la vie virtuelle qu’ils promeuvent fonctionnait hors de la réalité matérielle. Il leur suffirait pourtant de se rendre à 35 km de là, à Livet-et-Gavet dans la vallée de la Romanche, où FerroPem produit du silicium métal. Mais le décor se prête moins aux photos publicitaires.

      La vie connectée des Smartiens dépend des semi-conducteurs. Sans eux, plus un véhicule ne roule, plus un hôpital n’accueille de patients, plus une ampoule ne s’allume, plus une information ni un touitte ne circule. Tout s’arrête. Comme son nom l’indique, un semi-conducteur est un élément ou un composé chimique qui peut conduire l’électricité dans certaines conditions et non dans d’autres. On peut donc en faire un interrupteur marche/arrêt, utile pour effectuer des calculs. C’est le fondement de l’informatique. Le silicium est le plus utilisé pour la fabrication des puces électroniques, pour ses propriétés semi-conductrices et son abondance. Mais l’industrie microélectronique utilise aussi le germanium, l’arséniure de gallium, le carbure de silicium et récemment le nitrure de gallium.

      […]

      En 2017, 35 à 40 milliards de tonnes de matériaux silicatés ont été extraits du sol, soit trois fois plus que tous les combustibles fossiles.

      […]

      On ignore quelles sont les réserves mondiales de quartz, mais les carriers français (Colas, Imerys) promettent d’assurer « plusieurs décennies » au niveau de production de 2019, grâce aux trous creusés dans l’Allier, la Dordogne, le Lot5. D’ici là, les ingénieurs trouveront bien d’autres matériaux à extraire sous terre et sous mer.

      Pour produire des objets connectés, de l’« énergie renouvelable » solaire et des véhicules « propres », il faut défoncer la Terre avec des engins lourds, de la dynamite, du gasoil et beaucoup de poussière. Les particules nanoscopiques de silice rongent les poumons des mineurs. La silice, cancérogène reconnu, provoque la silicose comme le charbon. Mais pas de nostalgie minière, il faut mourir avec son temps.

      […]

      Deuxième phase du processus : la transformation de la silice en silicium métal. Le matériau s’obtient par carboréduction, en ajoutant du carbone (bois, charbon, houille) au silicium.

      […]

      Selon les experts, la production de silicium métal engloutit en moyenne 11 mégawatts/heure (11 000 kWh) par tonne de produit fini9. Pour parler clair, les trois fours de Livet-et-Gavet consomment chaque année l’équivalent électrique d’une ville de 150 000 habitants (comme Grenoble intra muros).

      […]

      Lecteurs de Lorraine ou du Pas-de-Calais, vous vous interrogez : pourquoi avoir installé une usine métallurgique dans une étroite vallée aux portes de l’Oisans, encaissée entre les massifs de Belledonne et du Taillefer, loin de toute zone d’activité ? A cause des ressources naturelles - naturellement. Matière et énergie. Rien ne sort de rien.

      La Romanche, torrent de montagne, attire les industriels dès la fin du XIXe siècle, quand Aristide Bergès développe la Houille blanche dans une vallée proche16. Elle est rapidement jalonnée de barrages et de six centrales. L’électricité alimente les premières usines électrochimiques et le tramway qui dessert dès 1893 ce couloir de 14 km de long. Le bois des forêts attire aussi les métallurgistes. La guerre de 1914-18 donne un coup d’accélérateur à l’industrie locale, grâce aux marchés passés avec l’artillerie pour fournir des obus au front. A partir de la moitié du XXe siècle, Péchiney exploite le site des Clavaux, empoisonnant bêtes et forêts de ses rejets de fluor.

      […]

      En 2020, EDF inaugure à Livet-et-Gavet une nouvelle centrale, creusée dans la montagne, après le plus gros chantier hydroélectrique d’Europe mené durant 10 ans. L’installation, liée à un nouveau barrage et une prise d’eau, remplace les anciennes et doit produire l’équivalent de la consommation annuelle de 230 000 habitants (560 GWh). Une ligne à haute tension de 63 000 volts relie la centrale au site des Clavaux. Voilà pourquoi FerroPem produit du silicium métal ici.

      Mais on peut faire la même chose ailleurs, et pour moins cher. La Chine produit 70 % du silicium métal mondial (2,2 millions de tonnes par an), dans le Yunnan, le Sichuan et désormais surtout dans le Xinjiang. Sa part dans la production mondiale a plus que doublé en 20 ans, grâce à ses ressources en quartz et à la hausse de sa production d’électricité. Elle répond ainsi à sa demande intérieure et exporte massivement. L’électricité est fournie par les barrages et les centrales à charbon qui empoisonnent la population des « villes-cancer ». Quant à la main d’œuvre, notamment les Ouïgours, elle vaut cher mais ne coûte rien.

      C’est de Chine que vient la pénurie en cette fin 2021. Le gouvernement restreint les approvisionnements des usines en électricité, à la fois pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, et en raison du manque d’eau des centrales hydroélectriques dû à la sécheresse. Effet immédiat : chute de la production du silicium métal, dont le prix augmente de 300 % en deux mois. Rappel à la réalité pour ceux qui prétendent que la « transition numérique » économise l’énergie. Pour baisser la consommation d’électricité, il faut arrêter les usines. CQFD.

      […]

      Étape suivante vers la production des puces : le raffinage du silicium métal en polysilicium. Le polysilicium sert aussi pour l’industrie photovoltaïque, et les trois-quarts de la production se
      font en Chine - notamment dans le Xinjiang et la Mongolie intérieure.

      […]

      On produit le plus souvent le polysilicium suivant le procédé Siemens. Transformez d’abord le silicium métal en gaz trichlorosilane par réaction avec du chlorure d’hydrogène à 300 °. Puis prenez une cloche de confinement de 2 mètres de haut et placez-y des tiges de silicium très pur de 10 mm d’épaisseur. Chauffez les tiges à 1100°. Introduisez le gaz trichlorosilane avec de l’hydrogène dans la cloche-réacteur. Le trichlorosilane se redécompose alors en chlorure d’hydrogène et en atomes de silicium qui se déposent sur les tiges à la vitesse d’un millimètre par heure19. Le rendement est désastreux, mais la transition écolo-numérique le vaut bien.

      Ce n’est pas fini. Il faut maintenant fondre le polysilicium en lingots de silicium monocristallin ultra pur pour l’industrie électronique. On le fait aussi en Chine, bien sûr, d’autant que le plan « Made in China 2025 » exige d’augmenter les capacités de production de l’industrie microélectronique nationale. Plus on descend dans l’affinage du silicium pour se rapprocher des semi-conducteurs, plus le produit devient stratégique. Un très gros producteur se trouve à Singapour : Globalwafers a même racheté l’Américain MEMC, autrement dit Monsanto Electronic Materials Company. Monsanto n’a pas toujours fabriqué que du glyphosate. Les Américains ont encore des usines, telle celle de SVM (Silicon Valley Microelectronics) en Californie. En Europe, l’Allemagne compte les groupes Wacker Siltronic ou Rohm, partenaire de STMicroelectronics.

      Pour obtenir du silicium monocristallin, nous utilisons cette fois la méthode de Czochralski, avec son four sous atmosphère d’argon à 1450°. Plongez un germe de silicium monocristallin dans du silicium liquide et étirez trrrrès lentement (0,4 à 3 mm par minute) en tournant. Comptez 30 heures pour un lingot de 30 à 100 kg, de diamètre 200 ou 300 mm.

      C’est en découpant ces lingots cylindriques en tranches de 1 à 2 mm d’épaisseur qu’on obtient les fameux « wafers », en français les plaquettes de silicium sur lesquelles seront gravés les circuits électroniques.

      Résumons. La « transition écologique » promise par le numérique, le tout électrique et le photovoltaïque exige beaucoup d’électricité. Selon le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’affinage du silicium en polysilicium consomme 150 MWh par tonne de produit fini. La transformation du polysilicium en lingot monocristallin, 31 MWh par tonne. Enfin, la découpe des plaquettes, 42,5 MWh par tonne. Voilà pour les économies d’énergie.

      Du côté de la matière, il faut 7,14 tonnes de quartz pour une tonne de silicium monocristallin. Et la découpe de celui-ci en tranches produit des déchets de sciage (le « kerf ») perdus pour les puces, estimés à 40 % du lingot. Mais on ne rebouche pas les carrières avec. Quant aux produits chimiques utilisés tout au long du procédé, la filière est pudique à ce sujet. Difficile d’en établir une liste précise et quantifiée. Le CNRS donnait en 2010 le chiffre de 280 kg de produits chimiques par kilo de silicium produit (acides, ammoniaque, chlore, acétone, etc.).

      […]

      Les ingénieurs parviendront peut-être à maintenir un mode de vie techno-consommateur sans émission de carbone (quid du méthane, autre gaz à effet de serre ?), avec une hausse des températures limitée à 2°, c’est-à-dire des catastrophes climatiques en chaîne, tout de même. Ce sera au prix d’une Terre dévastée par la production énergétique propre. Des millions d’éoliennes à perte de vue, sur terre et en mer, des océans de panneaux solaires, des installations électriques partout. Quant aux barrages alpins, à la vitesse où fondent les glaciers, qui peut garantir que l’eau y sera suffisante ? La Romanche coulera-t-elle aussi impétueusement dans les périodes de sécheresse de la vertueuse économie décarbonée ?

      Votre voiture électrique n’émet certes pas de CO2 et votre smartphone vous économise des déplacements, mais la société numérique et automobile dévore les ressources naturelles – matière et énergie – qui nous permettent de vivre. Un détail. Et on ne vous parle pas de la faune, de la flore et des paysages - pas de sensiblerie.

      […]

      Nous avons détaillé les risques, les pollutions, la consommation indécente d’eau et d’électricité du site crollois à maintes reprises depuis 2003. Outre la matière grise des ingénieurs locaux, c’est l’eau des massifs alpins et leur production électrique qui justifient l’implantation de ces usines high tech dans le Grésivaudan. Pour rappel, la fourniture d’eau aux usines microélectroniques y est par contrat prioritaire sur les autres usages, quelle que soit la température extérieure.

      A l’usine de STMicroelectronics, les tranches de silicium sont gravées - les plus fines gravures atteignent aujourd’hui 28 nanomètres - pour produire 10 millions de puces par jour. Le processus exige des produits toxiques tels que phosphine (hydrogène phosphoré), thilane ou arsine (mélange hydrogène - arsenic), les « gaz de combat » dont s’était vanté un salarié lors d’une visite.

      […]

      Le Taïwanais est aussi consommateur d’énergie et d’eau que STMicroelectronics. Il engloutit 156 000 tonnes d’eau par jour et se fait approvisionner par camions dans les périodes de sécheresse. Ne le répétez pas aux paysans.

      TSMC fournit les électroniciens américains, dont Apple qui dispose d’une usine dédiée de 10 milliards de dollars à Taïwan. Qu’en pense l’État chinois ? Allez savoir. Tous les smartphones chinois marchent avec des puces conçues en Amérique et produites à Taïwan (ou en Corée du sud). Mais Taïwan, comme tout le monde, dépend de la Chine pour le silicium métal. L’interconnexion des chaînes de production résistera-t-elle aux tensions sino- américaines ?

      […]

      Admirez l’embrouille. Le technocrate se cantonne aux émissions carbone pour dissimuler l’entropie de la matière et de l’énergie, et se réjouit d’amplifier le désastre. Combien de millions de tonnes de quartz, de bois, de charbon, de produits chimiques, combien de millions de mètres cubes d’eau, de millions de mégawatts engloutis, combien de forêts et de sols dévastés, de rivières polluées, de réacteurs nucléaires et de barrages hydroélectriques mobilisés pour ces « 2,5 fois plus de substrats à l’horizon 2026 » et pour leurs usages dans des bagnoles « propres », des smartphones, les infrastructures de la smart city connectées par la 5G ?

      […]

      Voici notre matériau en bout de course, une fois l’objet qu’il rendait « intelligent » devenu obsolète, c’est-à-dire rapidement. Vous jetez votre smartphone tous les deux ou trois ans, selon une étude récente de l’Arcep, l’agence de régulation des télécommunications. C’est devenu un lieu commun depuis que nous l’avons exposé en 2005, mais les déchets électroniques débordent des poubelles, et le recyclage promis alors n’est pas au rendez-vous : 53,6 millions de tonnes ont été produites en 2019, et les experts en prévoient 74,7 millions en 2030.

      Ni le recyclage, ni les infrastructures de destruction « sécurisées » ne peuvent absorber une telle explosion, rapporte une étude de l’ONU. France Stratégie confirme : « Du fait de la croissance de notre consommation et du décalage temporel et spatial entre production et recyclage, le recyclage de nos équipements ne permettra jamais de couvrir l’ensemble de nos besoins ». Quant à notre silicium métal, la difficulté de l’extraire du reste des composants des appareils électroniques et le coût d’une telle opération dissuadent le recyclage. Bilan : sur les 53,6 millions de tonnes de déchets électroniques de 2019, « on ignore ce que sont devenus 82,6 % ou 44,7 millions de tonnes », reconnaît l’OMS dans un rapport le 15 juin 2021.

      En fait, on s’en doute un peu. Une bonne part finissent à Guiyu dans la province chinoise du Guandong, où se trouve la plus grande décharge électronique du monde. Tellement importante qu’elle a sa propre page Wikipedia. Un autre cyber-cimetière mondial se trouve à Agbogbloshie dans la banlieue d’Accra, capitale du Ghana, où enfants et adultes brûlent les plastiques pour en extraire les métaux. Une chaîne de désassemblage bien rôdée employant 10 000 personnes, bien utile à l’Union européenne, première exportatrice de ces carcasses électroniques au Ghana. La circulation de ces déchets est pourtant interdite par la convention de Bâle depuis 1992, mais la croissance des trafics illégaux suit celle de la production et de la consommation. Les articles de presse sur les décharges Agbogbloshie et de Guiyu, ou sur le recyclage et l’incinération sauvages en Inde, se suivent et se ressemblent. Étrange impression de déjà vu, déjà écrit, il y a 15 ans. Il faut croire qu’on radote.

      L’ONU évalue à 50 tonnes par an le volume de substances toxiques lâchées par ces déchets dans la nature : mercure, retardateurs de flamme bromés, cadmium, plomb, PCB, etc. Lesquelles provoquent atteintes au système nerveux, cardiovasculaire et immunitaire, aux poumons, aux reins, troubles neurologiques, cancers, diabète, parmi une liste de dommages plus longue que celle de vos followers sur Twitter.

      Les décharges électroniques contaminent l’eau, l’air, les sols et les habitants. Le dernier rapport de l’OMS alerte sur « un tsunami de déchets électroniques » qui « affectent la santé de millions d’enfants », recensant plus 1000 substances nocives dégagées par les décharges. « "Un enfant qui mange un seul œuf de poule d’Agbogbloshie absorbe 200 fois plus de dioxines que la limite journalière fixée par l’Autorité européenne de sécurité des aliments", avertit Marie-Noël Bruné Drisse, responsable du département environnement et santé infantile à l’OMS. »

      Curieusement, nul gouvernement n’a déclaré d’état d’urgence sanitaire pour stopper les maladies provoquées par ces poisons. Mais quoi, « c’est à ce prix, dit le gosse du Ghana, que vous avez des smartphones en Europe ».

      #silicium #informatique #numérique #numérisation #informatisation #électronique #Grenoble #STMicroelectronics #TSMC #téléphone_portable #téléphone_mobile #5G #extractivisme #pollution #écologie #santé #industrie_minière #eau #énergie #électricité #critique_techno #anti-industriel

  • De nombreux sites internet inaccessibles après une panne chez l’hébergeur français OVHCloud
    https://www.francetvinfo.fr/sciences/high-tech/de-nombreux-sites-internet-inaccessibles-apres-une-panne-chez-l-heberge

    « Une mauvaise configuration du routeur a provoqué la panne du [réseau] », a expliqué le fondateur d’OVHCloud sur Twitter.


    « Ce site est inaccessible ». Une importante panne informatique dans un datacenter d’OVHCloud a empêché les internautes d’accéder à de nombreux sites, mercredi 13 octobre dans la matinée. « Suite à une erreur humaine durant la reconfiguration du network » sur un datacenter localisé à Vint Hill, en Virginie (est des Etats-Unis), l’hébergeur français a rencontré "un souci" sur son réseau informatique, a expliqué sur Twitter le fondateur du géant français de l’informatique en réseau et de l’hébergement, Octave Klaba. 

    « Nous allons isoler [le datacenter de Vint Hill], puis fixer la configuration », a-t-il ajouté. L’opération de maintenance s’est déroulée entre 9 heures et 10h30, permettant un retour à la normale. 

    Suite à une erreur humaine durant la reconfiguration du network sur notre DC à VH (US-EST), nous avons un souci sur la toute la backbone. Nous allons isoler le DC VH puis fixer la conf. https://t.co/kDakq7FGBO

    -- Octave Klaba (@olesovhcom) October 13, 2021
    Après cette intervention, les sites hébergés par OVHCloud étaient en effet de nouveaux accessibles en milieu de matinée. 

    Le problème est résolu, https://t.co/rET07nlI5Q est de nouveau accessible. 
Très bonne journée à toutes et tous. https://t.co/IsAbLB00xg

    -- data.gouv.fr (@datagouvfr) October 13, 2021
    Une « mauvaise configuration du routeur »

    Octave Klaba explique que face à une hausse du nombre d’attaques informatiques par déni de service (DDoS), l’hébergeur a décidé d’ajouter de nouvelles infrastructures pour faire face à la surcharge de trafic dans son centre de données de Vint Hill. "Une mauvaise configuration du routeur a provoqué la panne du [réseau]", détaille-t-il.

Cet incident survient à un moment crucial pour l’entreprise, qui doit entrer en Bourse vendredi. 
    #ovh #cloud #france #internet #bigdata #server #numérique

  • Impact environnemental du numérique : les internautes peu enclins à changer leurs habitudes
    https://theconversation.com/impact-environnemental-du-numerique-les-internautes-peu-enclins-a-c

    L’impact écologique des pratiques « virtuelles » étant très abstrait dans l’esprit des consommateurs, les campagnes de sensibilisation gagneraient à décomposer la chaîne de valeur écologique en étapes clés pour aider les individus à visualiser le lien entre les comportements en ligne et leurs effets environnementaux tangibles.

    #Écologie #Numérique #SNT #Environnement #Internet

  • Les séjours des étudiants à l’étranger remodelés par la pandémie
    https://www.lemonde.fr/campus/article/2021/09/24/recentrage-sur-l-europe-echanges-virtuels-dans-l-enseignement-superieur-l-in

    Les séjours des étudiants à l’étranger remodelés par la pandémie
    Les établissements se réjouissent de voir la reprise de la mobilité internationale, fortement réduite pendant la crise sanitaire. La période a fait évoluer la manière d’envisager les voyages d’études dans les cursus.
    « C’est une nouvelle année universitaire qui commence finalement plutôt très bien. » Comme la plupart des responsables des relations internationales des établissements d’enseignement supérieur, Christine Fernandez, vice-présidente de l’université de Poitiers, ne boude pas son plaisir de voir revenir les échanges internationaux à des niveaux « presque » normaux en cette rentrée 2021, alors que ceux-là avaient chuté « jusqu’à 40 % » l’année dernière tant en mobilité sortante qu’entrante. Près de 250 étudiants poitevins ont rejoint une université étrangère ces jours-ci, et presque autant d’internationaux ont posé leur valise à Poitiers. Soit une baisse, par rapport à 2019, de « seulement 10 % » dans les deux sens pour ce qui est des échanges avec les établissements partenaires, à laquelle il faut ajouter 750 étudiants free movers, accueillis en « mobilité libre ».
    Après une année et demie de crise sanitaire passée en partie derrière leur ordinateur, « les étudiants ont plus que jamais envie de mobilité », résume la vice-présidente, dont l’établissement accueillait au début de septembre l’assemblée générale des élus aux relations internationales des universités. Cet optimisme est confirmé par tous les établissements d’enseignements supérieurs interrogés, comme par les chiffres de Campus France. L’organisme public chargé de la promotion de l’enseignement français auprès des étudiants étrangers faisait état à la mi-septembre de plus de 110 000 demandes de visas étudiants déposées pour cette rentrée auprès des consulats. Un niveau peu ou prou équivalent à la situation de 2019, « qui laisse envisager un effacement de l’effet de la crise Covid », selon l’agence. Du moins dans les chiffres.Il reste en effet à organiser ces échanges dans un contexte sanitaire encore loin d’être apaisé au niveau mondial. « Notre cellule de crise Covid, lancée au plus fort de la crise, fonctionne encore pleinement, confirme Hendrik Lohse, directeur des affaires internationales de l’école de commerce EM Normandie. La situation sanitaire et les règles en vigueur dans les pays d’accueil ou de départ continuent à évoluer et à nécessiter une adaptation de tous les instants. »
    De fait, sur la carte de classement sanitaire des pays, qu’il connaît par cœur, l’orange et le rouge dominent toujours. Mais depuis août, même les étudiants des pays où la circulation active du virus est jugée préoccupante (Brésil, Argentine, Russie, etc.) peuvent venir étudier en France en faisant valoir le « motif impérieux » de leur inscription dans un établissement d’enseignement supérieur.
    Afin de s’adapter aux conditions d’arrivée différenciées des 1 000 étudiants internationaux sur les cinq campus de l’école (notamment l’obligation d’observer une quarantaine), possibilité leur est donnée de commencer les cours en virtuel avant de rejoindre les salles lorsqu’ils le pourront. Les dates de rentrée ont par ailleurs été élargies, comme dans bien d’autres écoles. Côté départs, s’il note une « appétence inchangée » pour partir étudier à l’étranger, il constate un « léger recentrage des étudiants les plus jeunes sur une expatriation en Europe », à l’image de nombreux établissements.
    « Les étudiants ont aujourd’hui tendance à aller prioritairement vers les partenaires qui privilégient le présentiel, ceux européens notamment », confirme Jean-Michel Nicolle, vice-président de la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI), et directeur de l’EPF. Selon lui, la crise a « clairement consolidé les liens entre les établissements européens » ayant continué à s’échanger des étudiants depuis un an, alors que d’autres destinations fermaient ou optaient pour le tout-distanciel, en maintenant parfois des frais de scolarité importants, ce qui n’a pas manqué de faire grincer des dents étudiants et responsables d’écoles françaises.
    Dans ses perspectives de rentrée 2021, parues en septembre, Campus France donne l’exemple des Etats-unis, où seulement 24 % des établissements se préparaient à faire leur rentrée en « tout-présentiel » ces jours-ci… Et ce, après avoir eu « une politique restrictive pour l’ouverture aux étudiants internationaux en 2020 », comme la Chine, le Japon ou encore l’Australie aujourd’hui. Bien loin de la politique volontariste française pour ouvrir ses frontières aux étudiants étrangers, en « 100 % présentiel » désormais. Pour le vice-président de la CDEFI, ces choix politiques différents se traduisent aujourd’hui par « une attractivité plus forte des écoles d’ingénieurs françaises dans le monde », et une « plus grande diversité géographique » des étudiants accueillis en ce moment, plus nombreux en provenance d’Amérique latine et d’Afrique notamment.
    La crise sanitaire rebattra donc encore en 2021 les cartes de la mobilité internationale des étudiants. Mais aussi son calendrier et ses modalités d’enseignement. A Sciences Po, choix a été fait de maintenir l’échange international obligatoire des étudiants inscrits en troisième année pour 2021-2022, mais celui-ci ne sera que d’un semestre, contre un an normalement, la grande école n’ayant pu organiser ces échanges qu’avec 200 établissements partenaires, contre plus de 470 en temps normal. Et 25 % des étudiants de Sciences Po partant auront encore droit à des cours virtuels dans leur établissement d’accueil, comme c’est le cas pour 20 % de ceux de l’Essec, 10 % de ceux de l’EM Strasbourg…« Nous sommes convaincus que l’ouverture internationale, notamment par des expériences de mobilité physique à travers le monde, est indispensable à la formation des jeunes », explique Vanessa Scherrer, directrice des affaires internationales de Sciences Po. Autrement dit : ce distanciel n’est pas la panacée. Mais les innovations en matière numérique, lancées à marche forcée au plus fort de la crise pour maintenir la scolarité et les échanges, « ouvrent de nouvelles perspectives », précise-t-elle. Elle cite la possibilité de proposer aux étudiants des cours avec un professeur étranger resté dans son pays, ou bien de créer « des cours joints internationaux » entre partenaires. Mais ces opportunités viendront « en plus » et non en « remplacement » de celles de la mobilité physique, tient à préciser Mme Scherrer.La crise a ainsi permis d’expérimenter une forme d’« internationalisation à domicile » qui donne des idées à nombre d’établissements. Ces réflexions sont d’ailleurs dans la philosophie de la nouvelle charte Erasmus +, rédigée avant la crise, qui prévoit de développer des programmes de « mobilités hybrides » associant un voyage immersif avec des activités virtuelles pouvant regrouper des étudiants de différents pays. Sciences Po se dit même « être très attentive » au développement, accéléré par la crise, de formations diplômantes entièrement numériques.

    #Covid-19#migrant#migration#france#sante#etudiant#circulation#frontiere#pandemie#mobilitehybride#numerique#virtuel

  • Kiligi, le réseau social où les jeunes s’expriment sur leurs émotions - L’ADN
    https://www.ladn.eu/media-mutants/kiligi-reseau-social-bienvaillance-emotions-jeunes

    Lancée début septembre, Kiligi est une application sociale pour partager ses émotions et recevoir du soutien. La mission de cette nouvelle plateforme est claire : souder les jeunes générations en une communauté bienveillante, capable de se soucier des problèmes d’autrui avec tolérance. Sur l’application, vos états d’âme sont les seuls contenus, habillés de hashtags et d’émojis tous azimuts. Le but à long terme, c’est d’aider les ados en détresse à s’exprimer sur une plateforme plus saine que les autres.

    #SNT #RéseauSocial #Numérique #Émotions

  • Pourquoi s’obstiner à numériser l’école ?
    https://reporterre.net/Mais-pourquoi-s-obstiner-a-numeriser-l-ecole

    « Pourquoi river les enfants à des machines dès leur plus jeune âge ? », écrit l’auteur de cette tribune. Il ne s’agit pas d’être technophobe mais de faire preuve de « techno-discernement » face au tout numérique à l’école et à ses néfastes effets sanitaires et écologiques.
    Philippe Bihouix est ingénieur et auteur d’essais sur les questions environnementales. En 2016, il publiait avec Karine Mauvilly Le désastre de l’école numérique — Plaidoyer pour une école sans écrans, aux éditions du Seuil, qui reparaît aujourd’hui en poche.


    Des enfants utilisent une application d’aide à l’apprentissage de la lecture dans une école marseillaise, en 2018. - © Bertrand Langlois / AFP

    Il y a cinq ans, nous publiions, avec Karine Mauvilly, Le désastre de l’école numérique. Ce livre se voulait un cri d’alerte, au titre provocateur sans doute, à la suite de l’annonce du Plan numérique pour l’éducation lancé deux ans auparavant par le président François Hollande. Nous voulions ouvrir le débat, comprendre, contextualiser, prévenir, interroger et mobiliser enseignants, syndicats, élus, parents et citoyens sur une évolution plus que contestable : celle d’une généralisation de l’enseignement sur écran.

    En termes d’innovation – et de fascination – « technopédagogique », l’école n’en était pas à son coup d’essai. Depuis cent cinquante ans, à l’apparition de chaque nouveau médium (lanterne magique, cinéma, radio, télévision, machines électromécaniques… mini puis micro-informatique), les pédagogues se sont emballés pour les formidables opportunités qui s’ouvraient, séduits, souvent, par des fournisseurs de matériel promettant monts et merveilles. Il est frappant de constater à quel point les mêmes arguments, à travers les âges, ont été brandis… jusqu’à aujourd’hui.


    Les miracles de l’école numérique n’ont été corroborés par aucune étude scientifique. Flickr / CC BY-SA 2.0 / Lucélia Ribeiro

    Les promoteurs du numérique à l’école parlent de motivation et de concentration accrues, d’amélioration des performances, de possibilités de travail collectif, de pédagogies actives ou ludiques, d’adaptation au rythme de chaque enfant… On a hâte de voir les résultats. Ces miracles n’ont été corroborés par aucune étude scientifique – aucune. Pourquoi alors river les enfants à des machines dès leur plus jeune âge ?

    Les preuves des effets délétères de la surexposition aux écrans sur la jeunesse s’accumulent
    L’école numérique soulève par ailleurs d’énormes questions sanitaires et écologiques, entre autres.

    • Sanitaires, d’abord, car les preuves des effets délétères de la surexposition aux écrans sur la jeunesse s’accumulent : phénomènes d’addiction, de dépression, d’agitation, difficultés de concentration, troubles de l’attention, troubles cognitifs, intolérance à la frustration, baisse de l’empathie, violence… Et que fait l’école numérique ? Elle augmente le temps global d’écran des enfants, et, en demandant aux élèves de se connecter après l’école pour faire leurs devoirs, elle légitime auprès des parents l’usage des écrans.

    • Écologiques, ensuite, car l’empreinte du numérique est forte, loin de l’illusion d’immatérialité. Évidemment, il ne viendrait à personne l’idée de contester les avancées technologiques dans d’autres domaines, la médecine par exemple, de dénoncer les appareils électroniques chez les dentistes ou dans les hôpitaux, au prétexte qu’on opérait mieux les patients avant ! Mais, dans le domaine éducatif, la course en avant technologique est bien loin d’avoir démontré une quelconque utilité.

    Cinq ans après la parution de notre livre, où en sommes-nous ? À son arrivée, en 2017, le nouveau ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a commencé par prendre une posture officielle plutôt distanciée avec le numérique. Le « grand plan » a été discrètement remisé : il s’agissait maintenant de bâtir « l’école de la confiance ». Le téléphone portable a même été interdit dans les écoles et les collèges pour la rentrée 2018 – effet d’annonce, car de fait, il l’était déjà…

    Jean-Michel Blanquer n’est pas technophobe, il est au contraire tout à fait fan des possibilités offertes par les « EdTechs » (educational technologies), des start-up qui innovent au service de l’éducation – et notamment avec l’intelligence artificielle (IA). Lors de l’inauguration du « Lab 110 bis » en juin 2018 — un « espace dédié à l’innovation et favorisant l’intelligence collective » logé dans les bureaux du ministère — Jean-Michel Blanquer mentionnait les axes désormais prioritaires du numérique à l’école : « L’IA pour personnaliser les parcours, améliorer l’efficacité de l’enseignement, permettre au professeur de se concentrer sur l’essentiel, notamment par l’aide à l’évaluation ; le traitement massif des données pour permettre une meilleure orientation des étudiants, proposer des formations pros plus pertinentes et améliorer l’employabilité ; la robotique et les objets connectés pour permettre l’inclusion des plus fragiles. »

    Décryptons ce jargon : l’IA pour « personnaliser les parcours » et décharger le professeur du fardeau de l’évaluation consistera à coller l’élève devant son écran, et à mener des tests par QCM (questionnaires à choix multiple) vaguement améliorés sans doute, grâce à un peu de machine learning (l’apprentissage par les machines) ; le « traitement massif des données » pour l’orientation, cela signifie que les parents et les futurs bacheliers n’ont pas fini de souffrir face à l’opacité du logiciel Parcoursup ; quant à la « robotique pour les plus fragiles », mystère !

    Puis vint la crise sanitaire… La grande accélération numérique provoquée par la pandémie de Covid-19 aurait pu être l’occasion de relancer le débat sur la place de ces outils à l’école. Et ce d’autant plus que l’expérience de l’enseignement à distance, malgré l’effort à saluer de nombreux enseignants pour maintenir le lien avec leurs élèves, s’est révélée pitoyable. Mais le débat a surtout porté, dans les premiers temps, sur les inégalités d’équipement des élèves, tous n’ayant pas un ordinateur ou une tablette pour suivre les cours et rendre les devoirs à distance. Et si le contenu pédagogique pendant cette période n’a pas été à la hauteur, c’est l’argument du manque de préparation, d’adaptation (voire d’implication) des enseignants qui a été brandi. Ainsi va la transformation numérique à marche forcée : si elle ne tient pas ses promesses, c’est qu’on n’a pas encore pris la pleine mesure de son potentiel pédagogique.

    La crise a permis un « boom sans précédent du numérique éducatif » — titre d’un article publié dans le Figaro — notamment dans l’enseignement à distance pour les entreprises. Pour ce qui est de l’éducation, c’est moins clair, car, en France, « certains freins subsistent ». Pour Marie-Christine Levet, cofondatrice du fonds Educapital, start-uppeuse des EdTechs — et interrogée dans le même article —, s’il y a des progrès à faire, c’est dans « le grand chantier [de] la digitalisation de notre éducation, de l’école primaire à l’enseignement supérieur. C’est là que nous avons le plus de retard ».

    Il ne s’agit pas de prôner le retour à l’école d’antan mais de faire preuve de « techno-discernement »
    Retard sur quoi, sur qui ? Peu importe ! C’est le principe même du progrès technologique : comme l’explique la Reine rouge dans la suite des Aventures d’Alice au pays des merveilles de Lewis Caroll, ne pas avancer (mais vers où ?), ce n’est pas faire du surplace, c’est reculer : « Ici, vois-tu, on est obligé de courir tant qu’on peut pour rester au même endroit. Si on veut aller ailleurs, il faut courir au moins deux fois plus vite que ça. Allons, allons, plus vite, plus vite ! »

    Le débat n’a toujours pas eu lieu. Il ne s’agit pas d’être technophobe, passéiste ou conservateur, mais de regarder les faits le plus objectivement possible. D’ailleurs, pourquoi la charge de la preuve a-t-elle été inversée, pourquoi est-ce aux « détracteurs » du numérique de démontrer que celui-ci a plus d’effets nuisibles que positifs ? Pourquoi acceptons-nous, collectivement, de prendre pour argent comptant les balivernes des vendeurs de matériel et de logiciel ? Ou celles de leurs chercheurs inféodés, un petit cercle d’acteurs qui font carrière dans le secteur public ou le secteur privé (voire les deux) sur les projets « innovants » autour du numérique ?

    Certes, la crise de l’école n’est pas née avec sa numérisation. Il ne s’agit aucunement de prôner le retour à l’école d’antan, avec tableau noir et règle en bois, mais de faire preuve de « techno-discernement », d’oser questionner la doxa technopédagogique, et d’admettre que l’alternative non numérique est, dans la plupart des cas, meilleure.

    #Enfants #Ecole #éducation #france #enfants #inégalités #travail #education #enseignement #écoles #IA #intelligence_artificielle #numérique #cultures_numériques #internet #google #algorithme #politique #bigdata #france #pouvoirs #data #smartphone #technologisme #surveillance ne l’oublions pas