• #Islamophobie
    France. Une « nouvelle laïcité » toujours plus répressive

    article de Rafik Chekkat pour Orient XXI

    https://orientxxi.info/magazine/abaya-interdite-a-l-ecole-ou-l-extension-d-une-laicite-repressive,6676

    Avec sa décision d’interdire l’abaya dans les établissements scolaires, le ministre de l’éducation nationale Gabriel Attal poursuit l’encadrement politique du religieux. Cette « nouvelle laïcité » que promeut à son tour Emmanuel Macron entraine une stigmatisation toujours plus poussée des musulman·es et assigne le corps éducatif au rôle de police des intentions.

    (lecture audio en cours d’upload chez @karacole )

  • L’école, Gabriel Attal et la laïcité « geignarde » | Le Club
    https://blogs.mediapart.fr/jean-bauberot/blog/280823/l-ecole-gabriel-attal-et-la-laicite-geignarde

    Je propose que l’on étudie dans les différentes classes, dès la journée de rentrée, les deux premiers articles de la loi de 1905 et les propos d’Aristide Briand, rapporteur de la Commission parlementaire, présentant cette loi : il s’agit, indiquait-il, de proclamer « solennellement que, non seulement la République ne saurait opprimer les consciences ou gêner dans ses formes multiples l’expression extérieure des sentiments religieux, mais encore qu’elle entend respecter et faire respecter la liberté de conscience et la liberté des cultes. »

    Quand au vêtement, Briand s’est montré, à ce sujet, on ne peut plus clair : il a refusé l’interdiction du port de la soutane pour deux raisons : d’abord, fondamentalement, parce que la loi de 1905 est une « loi de liberté » et qu’en conséquence, elle ne doit pas « interdire à un citoyen de s’habiller de telle ou telle manière » ; ensuite, parce que le résultat serait « plus que problématique » : la soutane interdite, on pourrait compter sur « l’ingéniosité combinée des prêtres et des tailleurs » pour créer un « vêtement nouveau ». La loi de 1905 = la liberté de conscience + le refus de jouer au chat et à la souris. Intelligence des principes et intelligence de la stratégie.

    • Pour rappel, l’épisode « piscine » de mes petits à #Montpellier, conséquence totalement crétine de ce jeu du « chat et de la souris » :
      https://seenthis.net/messages/987740

      Les ceusses qui, sur les réseaux, croient qu’on va juger la longueur des jupes en fonction de la religion supposée de l’élève se gourent. C’est effectivement ce qui se faisait déjà, mais maintenant que c’est une règle « officielle » du ministère, rapidement l’aspect raciste sera indéfendable (c’est-à-dire attaqué devant des tribunaux), donc on tentera des définitions « techniques » du vêtement incriminé, et de toute façon on connaît déjà la solution des nostalgiques de l’école idéale du cinéma en noir et blanc : c’est l’uniforme pour tout le monde. Les dog whistle racistes inapplicables ou illégaux, la Macronie a l’habitude, il suffit de revenir quelques temps plus tard sur le thème « on peut jamais rien faire » et donc proposer une mesure plus réactionnaire (quoi que sur ce coup-là, le conseil d’État n’a pas trop de mal à valider les mesures racistes parce que c’est pour ton bien, donc cette histoire d’abaya, si des juges locaux l’invalident, en montant suffisamment haut ça sera validé in fine).

      Encore un ou deux ministres de l’éducation et on y sera, à l’uniforme (avantage de l’idée : en plus ça fout le bordel dans la gauche, bien plus divisée que la droite à ce propos). La Ministre de la jeunesse et du SNU sera simplement rebaptisée « Ministre de la jeunesse en uniforme, bien dégagé derrière les oreilles ».

    • Ce que dit le texte, c’est qu’il n’existe pas d’ultra-laïcité. La laïcité, c’est la liberté de conscience pour les citoyens et l’état neutre vis à vis de la liberté de conscience. Le dévoiement actuel est de considérer que l’élève qui va à l’école fait partie intégrante de l’état, et qu’il doit donc être lui aussi « neutre » (mais pas à la façon de l’état évidemment, qui file quelques milliards à l’enseignement catholique). Ça n’a jamais été l’objet de cette loi, la neutralité des élèves relativement à la liberté de conscience. La loi de 2004 aurait dû être censurée par le CC, pour conflit frontal avec la loi de 1905, mais la loi de 1905 est une loi, et pas un article de la constitution, et donc, pas de possibilité pour le CC de s’engager dans cette voie j’imagine, d’autant qu’il se peut qu’il n’y avait pas non plus de volonté de, évidemment, le CC ne statuant pas forcément en droit, puisque rien ne l’y oblige.

    • L’abaya, l’arbre qui cache la forêt ?
      https://www.cafepedagogique.net/2023/06/15/labaya-larbre-qui-cache-la-foret

      Jean-Fabien Spitz est spécialiste de philosophie politique. Dans cet entretien qu’il accorde au Café pédagogique, il revient sur les récentes polémiques autour du port de l’abaya par certaines élèves et sur le principe des « signes religieux par destination »

      Aujourd’hui, il y a tout un débat sur les tenues vestimentaires par destination. Selon vous, c’est contraire même à l’essence de la loi sur la laïcité. Pourquoi ?

      L’idée même d’un vêtement « religieux » est une absurdité. Dans une république laïque, aucun vêtement n’est musulman, ni juif, ni chrétien. Lors du débat consacré à la loi de 1905, certains députés, qui avaient évoqué la possibilité d’interdire le port de la soutane dans l’espace public se sont attirés cette réponse d’Aristide Briand : « Ce costume n’existe plus pour nous avec son caractère officiel… La soutane devient un vêtement comme un autre, accessible à tous les citoyens, prêtres ou non ». Mais l’idée d’un vêtement religieux « par destination » est deux fois plus absurde. Cela voudrait dire qu’un vêtement changerait de sens en fonction de l’intention de celui qui le porte, ce qui justifierait son interdiction lorsqu’il est avéré que celui ou celle qui le porte a l’intention de lui conférer une signification religieuse. Mais comment s’assurer de la réalité de l’intention si le porteur du vêtement prétend le porter pour des raisons non religieuses, ou si, tout simplement, il refuse, comme il en a le droit, d’être interrogé et jugé sur ses intentions ? Car dans un État qui prétend être respectueux des droits des individus, on ne juge pas les intentions mais les actes. L’idée d’un vêtement religieux par destination conduirait à juger différemment un seul et même acte – le port d’une robe longue – en fonction de l’intention de celle qui l’accomplit. C’est la définition même de l’arbitraire, car un État de droit applique une règle uniforme à des actes extérieurement identiques. C’est aussi la porte ouverte à une dérive sans fin car tout signe, tout vêtement peut devenir « religieux par destination ». Il suffit pour cela que les autorités – le proviseur du lycée, le principal, le législateur – décident qu’ils revêtent une intention dont les autorités elles-mêmes sont les juges en dernière instance. Quel est le recours des citoyens face à un tel abus ?

    • Quand je parle d’ultra laïcité, c’est bien sûr pour pointer le dévoiement et l’instrumentalisation politique de la loi de 1905. Je pourrais aussi parler d’ultra républicanisme ou de national-républicanisme pour désigner en fait ce qu’il convient d’appeler une attitude autoritaire dictée par la complaisance envers les thèses fascisantes de l’extrême-droite pétainiste et de l’intégrisme catholique.
      Dans cette logique, Blanquer n’avait pas hésité à recommander une « tenue républicaine » pour les élèves (surtout au féminin) qui fréquentent l’école publique.

      Et donc #dog_whistle (ou #appel_du_pied) puisque la seule issue de la Macronie est de rassembler lors du deuxième tour de l’élection présidentielle les électeur·rices de la droite la plus molle ou la plus dure.

    • N’ayant aucun rapport avec le culte musulman, avec le Coran, c’est un vêtement venant des pays de culture arabe.

      Les journalistes, même quand ils tentent de piquer un peu les politiques en leur demandant « comment vous ferez la distinction entre une ado qui portent une robe longue, et une ado qui porte une abaya pour la religion ? » ne vont jamais jusqu’au bout alors que c’est clairement l’éléphant au milieu de la salle de classe : c’est pas une loi contre les musulmans, mais bien là encore plus explicitement une loi anti arabe.

      Les chef⋅fes d’établissement vont avoir pour seul protocole : si t’as une tête d’arabe (ou parfois noire), c’est une abaya, si t’es blanche, c’est une robe longue. Point.

      En 2023, on en est encore là, avec la guerre d’Algérie et les décolonisations toujours pas digérées, à faire des lois explicitement racistes et anti-arabes (et qui utilisent les femmes comme instrument pour ça, le dévoilement etc, toujours la même histoire).

    • Et voilà, on est donc déjà arrivés, avec Sabrina Agresti-Roubache (sous-ministre de la ville), à l’idée-qu’elle-est-bonne de coller un uniforme aux gamins :
      https://twitter.com/SabrinaRoubache/status/1696437030488572062

      Pour réduire les inégalités et enlever une charge mentale à tous les parents, je suis favorable à l’expérimentation d’une « tenue scolaire » dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.

      Perso je pense qu’il faudrait réintroduire les coups de règle sur les doigts et différentes formes de punitions corporelles, et autoriser les profs à fumer dans la cours pendant les récrés.

    • Je suis sûr qu’il y aura moyen de porter l’uniforme d’une manière ostentatoire et insupportable.

  • Obligation de neutralité : le professeur, un fonctionnaire comme un autre ? (Jean-Pierre Veran, Le Club de Mediapart)
    https://blogs.mediapart.fr/jean-pierre-veran/blog/300418/obligation-de-neutralite-le-professeur-un-fonctionnaire-comme-un-aut

    On observe donc que, la loi du 20 avril 2016 a explicité pour tous les fonctionnaires, y compris les professeurs, une obligation de neutralité jusqu’ici formellement absente de leur statut, même si le principe de neutralité du service public, appliqué à ses usagers comme à ses agents, peut être considéré comme une conséquence de l’égalité devant la loi posée par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. On peut considérer que cette loi clarifie utilement des obligations qui conduisent notamment chaque professeur à distinguer sa liberté d’expression personnelle en tant que citoyen de son obligation de neutralité en situation professionnelle. On observera également qu’elle ne mentionne aucunement le devoir de réserve, qui reste une construction jurisprudentielle et non une disposition statutaire explicite, dont l’usage par les tribunaux relève à chaque fois d’une analyse fine de la situation.

    #éducation #enseignant·e·s #salarié·e·s #fonctionnaire #obligation_de_neutralité #principe_de_neutralité #liberté_d'expression #service_public #devoir_de_réserve