• Intelligence Artificielle : La pédagogie contre l’illusion ?
    https://cafepedagogique.net/2024/07/04/intelligence-artificielle-la-pedagogie-contre-lillusion
    https://cafepedagogique.net/wp-content/uploads/2024/07/une-image-contenant-texte-police-capture-decran.png

    L’Ecole au front de l’I.A.

    L’ouvrage d’Olivier Ertzscheid aborde la question des « artefacts génératifs » (terme qu’il préfère à « Intelligence artificielle ») sous bien des aspects : techniques, philosophiques, politiques, artistiques, juridiques… Il éclaire aussi les défis posés à l’éducation : « Nous sommes une nouvelle fois devant un changement absolument majeur de notre manière d’enseigner, de transmettre, et d’interagir dans un cadre éducatif, a fortiori lorsque celui-ci est asynchrone et / ou à distance. »

    Car après s’être livrée à la terreur des jeux vidéo, de Wikipédia ou des réseaux sociaux, l’Ecole est peut-être menacée par une nouvelle panique morale : la qualité des textes (et pas que) produits par l’I.A. fait entrer l’Ecole (et pas que) dans l’ère du soupçon. Elle renforce potentiellement un sentiment d’insécurité chez les enseignant·es confronté·es au nouveau pouvoir d’écrire que la machine offre aux élèves. Mais elle leur donne aussi, du moins à celles et ceux qui s’y forment, des facilités nouvelles pour concevoir une séquence, un cours, un diaporama, un QCM, une évaluation… Côté élèves comme côté enseignant·es, le piège, c’est peut-être précisément le sentiment de toute puissance que donne la machine. L’immédiateté de la réponse offerte par les assistants conversationnels est un leurre, une tentative d’hypnose. Le travail de l’Ecole, c’est précisément de nous aider à sortir de la pensée magique pour saisir que l’IA, loin d’être une transcendance, est une technologie, à élucider, que cette technologie fonctionne au service d’intérêts économiques et politiques, qu’elle existe grâce à l’intervention de travailleurs et travailleuses de plus en plus invisibles et exploitées.

    Le 1er danger pour l’Ecole, c’est l’aveuglement, l’ignorance de ce qui se joue, avec pour conséquence l’abandon des élèves face à la technique, susceptible une fois encore de renforcer les inégalités scolaires et socioculturelles. « Nous devons accepter, souligne Olivier Ertzscheid, de braconner sur ces terres d’une relation dialogique automatisée. Et nous devons à tout prix et à tout coût intégrer dans nos pratiques ces nouvelles formes de braconnage technique et culturel et y accompagner étudiantes et étudiants. »

    L’ouvrage d’Olivier Ertzscheid est une belle entreprise de démystification qui nous invite à nous faire à notre tour désillusionnistes. Dépasser la peur comme la fascination implique de comprendre « comment ça marche », de rendre visible ce qui est volontairement dissimulé, de refuser un assujettissement à une IA qui soit déprise sur le savoir et emprise sur les croyances. Ce qui s’impose d’urgence, c’est une pédagogie critique des normes non seulement sociales, mais aussi désormais épistémologiques : au travail !
    Jean-Michel Le Baut

    Olivier Ertzscheid, Les IA à l’assaut du cyberespace – Vers un Web synthétique, C&f Editions, Juin 2024, ISBN 2376620856

    Sur le site de la maison d’édition : https://cfeditions.com/ia-cyberespace

    #Olivier_Ertzscheid #Cyberespace #Intelligence_artificielle #Education

  • Lecture de « Les IA à l’assaut du cyberespace » d’Olivier Ertzscheid | Babelio
    https://www.babelio.com/livres/Ertzscheid-Les-IA-a-lassaut-du-cyberespace/1677811/critiques/4021466

    Critique de BibiOTek

    BibiOTek
    17 juillet 2024
    L’intelligence artificielle (IA) est un terme assez récent dont nous entendons pourtant parler de plus en plus. Partant de recherches scientifiques et de développements informatiques, c’est devenu un terme marketing regroupant un ensemble d’outils, plus ou moins intelligents. C’est donc primordial de commencer par bien comprendre les origines de ce domaine d’étude et d’éclaircir la notion d’intelligence qui est bien souvent utilisée à tord.

    Dans cet ouvrage Olivier Ertzschied commence par clarifier certains fonctionnements de l’IA et notamment ce qu’on appelle LLM pour Large Language Model, des modèles d’apprentissage automatique de texte permettant de « comprendre » et produire du texte et qui sont à l’origine de ChatGPT entre autres. Je mets bien comprendre entre guillemets car c’est un semblant de compréhension. On le comprend assez vite, l’IA n’a d’intelligent que son nom, le reste étant purement et simplement des calculs mathématiques à partir d’une quantité faramineuse de données d’entraînement.

    En revanche cet outil veut nous faire croire qu’il comprend ce qu’on écrit, ce qui implique interpréter la sémantique du texte. Or, pour simplifier, c’est uniquement comme une suite de mots, ou plutôt de tokens, que le texte est assimilé. Mais cette technologie est devenue si puissante qu’elle peut désormais tromper un utilisateur qui pense converser avec un vrai humain. Et ce n’est pas le seul problème : on parle également de métiers voués à disparaître, de travailleurs du clic employés comme modérateurs dans des pays pauvres avec des salaires de misère et exposés aux pires atrocités, de la question des sources des données d’entraînement et du droit d’auteur des « oeuvres » produites. L’auteur aborde tous ces points et interroge le lecteur sur ce qu’il n’aurait peut-être pas imaginé derrière un robot conversationnel ou un générateur d’images.

    J’ai trouvé cet ouvrage intéressant, ça me permet de mettre en parallèle les connaissances techniques que j’avais avec des questionnements plus philosophiques. Pour bien comprendre cet ouvrage et saisir les enjeux, je pense qu’il est nécessaire de connaître déjà un minimum le sujet.

    #Olivier_Ertzscheid #Intelligence_artificielle

  • Olivier Ertzscheid : « Avec l’IA, tout ce qui fait sens se voit soumis à de la spéculation » - L’Humanité
    https://www.humanite.fr/social-et-economie/amazon/olivier-ertzscheid-avec-lia-tout-ce-qui-fait-sens-se-voit-soumis-a-de-la-sp

    Qui contrôle les mots et leurs sens détient les clés du capitalisme « sémiotique » émergeant avec l’intelligence artificielle. Le chercheur Olivier Ertzscheid nous invite à réfléchir les transformations du travail en cours et la place des travailleurs face aux géants du secteur.

    Publié le 17 juillet 2024
    Pierric Marissal

    Pour Olivier Ertzscheid, l’IA nous fait entrer dans un capitalisme sémiotique où tout ce qui fait sens (mot, image, interaction…) s’inscrit dans une chaîne de valeurs soumises à la spéculation.
    © Jeronimo Acero

    Dans son dernier ouvrage1 (1), Olivier Ertzscheid, maître de conférences en sciences de l’information, soulève quantité de questions sur notre rapport à ce qu’il est désormais commun d’appeler l’intelligence artificielle (IA) générative. Il nous amène à réfléchir sur la place de l’humain dans les nouvelles chaînes de valeur d’un capitalisme qui s’est mis à spéculer sur le langage et tout ce qui fait sens.

    #Olivier_Ertzscheid #Intelligence_artificielle

  • Vers un Web zombie ? « Les contenus des IA envahissent Internet au détriment de nos interactions » (Olivier Ertzscheid)
    https://www.latribune.fr/technos-medias/informatique/vers-un-web-zombie-les-contenus-des-ia-envahissent-internet-au-detriment-d

    ENTRETIEN - ChatGPT est-il en train de détruire Internet ? C’est la question à laquelle tente de répondre Olivier Ertzscheid dans son essai, intitulé « Les IA à l’assaut du cyberespace ». Dans ce livre, le chercheur en sciences de l’information dénonce la surabondance de contenus produits par les intelligences artificielles, qui relègue nos interactions sociales dans des couches de moins en moins visibles du Web.

    Propos recueillis par Marine Protais

    Le chercheur Olivier Ertzscheid dénonce l’émergence du « Web synthétique », un Internet où les contenus produits par des machines finissent par occuper l’essentiel de l’espace d’expression visible. (Crédits : DR)

    Depuis quelques mois, certains observateurs parlent d’un internet « mort » ou « zombie », envahi de bots, de textes et d’images générés par intelligence artificielle. Olivier Ertzscheid, chercheur en sciences de l’information et maître de conférences à l’université de Nantes, ne va pas jusqu’à prêcher la mort du web.

    Mais le chercheur estime que celui-ci s’est considérablement transformé avec l’apparition de contenus non produits par les humains. Il détaille son analyse de ce « Web synthétique » et de son impact sur notre manière d’interagir, notre langue, et nos normes sociales dans un essai intitulé Les IA à l’assaut du cyberespace, publié le 5 juin chez C&F Editions.

    LA TRIBUNE - Vous parlez d’un « Web synthétique », qu’entendez-vous par ce terme ?

    OLIVIER ERTZSCHEID - C’est un Internet où les contenus produits par des machines finissent par occuper l’essentiel de l’espace d’expression visible du Web. Aux antipodes d’un Web naturel, organique, où chacun produit lui-même des contenus. Nous savions déjà que les bots, ces programmes informatiques qui publient de manière automatique, occupent une part de plus en plus importante. Ils représentent la moitié du trafic d’Internet et sont aussi producteurs d’information (ou de désinformation). Puis sont venus ChatGPT et les autres IA génératives, ce qui a amplifié ce phénomène.

    Qu’est ce que cela a changé exactement ?

    Avec ChatGPT, nous sommes tous devenus acteurs du web synthétique. Nos échanges avec le chatbot - et tout autre IA générative - sont parfois partagés avec des amis, sur les réseaux sociaux... On contribue à la saturation de l’espace discursif. Le problème c’est que cette omniprésence de contenus artificiels, qui ont souvent un intérêt limité, se fait au détriment des interactions sociales.

    Cette autre question se pose, selon moi : est-ce que la vanité de croire que l’on peut apporter une réflexion intéressante va-t-elle résister à ce web submergé par des contenus synthétiques ? L’autre question que cela pose c’est le devenir de ces contenus. On pourrait les considérer comme des déchets, car sans grand intérêt pour la plupart des utilisateurs. Mais ils servent toutefois à l’industrie numérique pour renforcer la connaissance qu’elle peut avoir de nos profils, nous inciter à rester sur les plateformes, pour améliorer ses outils d’IA... Ils n’ont donc pas d’autres utilité que de servir le modèle économique de ces acteurs.

    A-t-on vraiment conscience qu’il s’agit de contenus synthétiques ?

    On s’en accommode. L’enjeu pour les plateformes est de modifier les habitudes. Sur Facebook, par exemple, les interactions ont fondamentalement muté en l’espace de dix ans, au fil des changements stratégiques imposés par Mark Zuckerberg. Au départ, le réseau valorisait les interactions individuelles, ensuite il a davantage mis en avant les contenus des médias pour pouvoir les monétiser.

    Après cela, ce sont les interactions locales, via les groupes, qui ont été davantage mises à l’honneur. Aujourd’hui, c’est encore autre chose. La page d’accueil de Facebook ressemble à un bouquet de chaînes de télévision où l’on voit défiler des contenus très similaires. Cela produit de nouvelles normes : on voit tous la même chose tout le temps, tout en ayant l’impression de voir des contenus très personnalisés. L’interaction avec les pairs, elle, a disparu.

    Elle subsiste dans les groupes privés...

    Justement, cela questionne notre rapport à l’espace public en ligne. Aujourd’hui les interactions « naturelles » ont migré dans des espaces non visibles. Elles se nichent dans des groupes privés, familiaux ou professionnels, des conversations WhatsApp... Pour y accéder, il faut s’inscrire, répondre à des questionnaires, être invité... C’est aussi pour cela que les plateformes commencent à monétiser ces espaces qui ne l’étaient pas avant. On voit arriver dans Messenger ou WhatsApp de la publicité, des contenus poussés de manière algorithmique.

    Vous dites que ce changement d’un web « naturel » à un web « synthétique » produit de nouvelles normes. Lesquelles ?

    Les productions des générateurs d’images sont extrêmement normées. Ces générateurs mettent en place un certain nombre d’interdits : on ne peut pas demander des portraits de femmes aux sein nus, ni de Mussolini en train de jouer au volley avec Hitler... On finit par intérioriser ces interdictions et ces interdictions deviennent des normes.

    De la même manière que l’on a intériorisé en utilisant Instagram à ne pas montrer certaines parties de notre corps. Dans le cas des générateurs d’images et de texte, ce qui est encore plus intéressant et dangereux c’est qu’on finit par brider et donc appauvrir la langue, donc notre capital culturel.

    Vous défendez depuis longtemps l’idée que les réseaux sociaux entretiennent une ligne éditoriale, via les algorithmes de recommandation notamment. Ici, vous dites que les acteurs de l’IA, Meta, OpenAI et d’autres, « norment la langue », il s’agit d’une affirmation encore plus forte... Quel est leur intérêt selon vous ?

    Le langage c’est un outil de négociation pour aller vers de l’interdit, du transgressif... Ces entreprises nous proposent une vision extrêmement utilitariste du langage. Les prompts sont des chaînes de production qu’il faut apprendre à utiliser. Par ailleurs, les modèles doivent répondre à certaines consignes d’évaluation. Les programmateurs doivent s’assurer de leur innocuité, de leur honnêteté...

    Or si on enlève au langage sa capacité à mentir, à blesser, on lui enlève sa capacité à réparer les blessures. Et on finit par obtenir des interactions appauvries et normées, qui n’ont un intérêt que pour les sociétés qui les mettent en ligne.

    La solution est-elle d’interagir avec des modèles de langage différents, qui n’ont pas la même vision du monde ?

    Plus il y a de diversité, mieux c’est. Pour éviter l’aliénation à ces outils, il faut surtout rester en situation de pilotage, et pas de co-pilotage comme le suggère Microsoft [Microsoft a baptisé son assistant virtuel Copilot, et file cette comparaison de co-pilotage entre l’homme et la machine dans sa communication, ndlr]. Cela signifie comprendre comment ces modèles fonctionnent, pourquoi certaines choses peuvent être générées et d’autres non, vérifier à quel point les biais impactent le modèle...

    Il faut aussi avoir conscience de l’existence de modérateurs et modératrices qui nous évitent de faire face à des productions langagières traumatiques. Mais ce qui est inquiétant c’est que les entreprises à l’origine de ces modèles ne sont pour la plupart pas transparentes. Elles disent elles-mêmes ne plus être en capacité d’auditer les bases de données, qui sont devenues trop grandes. Et même lorsqu’une couche technologique est open source (en accès libre), il est rare que l’ensemble le soit.

    Vous évoquez l’effet magique produit par ces technologies. Mais au bout de deux ans, s’est-il estompé ?

    A l’échelle individuelle, on s’aperçoit vite que l’effet de sidération passée - important avec ces outils - cela reste une technologie. Je le constate chez les étudiants. Il y a eu comme avec Wikipedia au départ une utilisation un peu clandestine de ChatGPT. Mais très vite, ils comprennent que les professeurs arrivent à le détecter.

    Les productions sont tellement standardisées qu’elles sont reconnaissables. Et eux-mêmes perçoivent assez rapidement les limites. Ils s’aperçoivent que pour obtenir un résultat satisfaisant, il faut y passer du temps. Soit pour reprendre soi-même ce que ChatGPT écrit, soit pour affiner le prompt. Les étudiants développent une forme de méfiance vis-à-vis de l’IA actuellement.

    Vous faites le parallèle avec Wikipedia, qui lui aussi avait effrayé certains enseignants, avant d’être finalement accepté...

    Wikipedia, malgré la panique morale qu’il avait suscité à l’époque, reste un outil géré de manière transparente et collective. Les détournements et les erreurs sont rapidement corrigés. ChatGPT n’est pas transparent et derrière on trouve une entreprise avec de forts intérêts économiques.

    Si ChatGPT se substitue à Wikipedia, on va dans le mur. Car pour le moment, il n’y a aucun moyen de vérifier où ce modèle puise ses connaissances.

    Mais il ne faut pas tomber dans une forme de panique morale vis-à-vis de cet outil non plus. Car cette posture empêche toute forme d’explication. Il faut simplement se poser la question suivante : quels intérêts servent ces outils et qui parlent derrière ?

    #Olivier_Ertzscheid #Intelligence_artificielle

  • Bouger vite et casser des trucs. Dissolution de la Start-Up Nation. – affordance.info
    https://affordance.framasoft.org/2024/07/dissolution-start-up-nation

    Par Olivier Ertzscheid

    On luttera. On s’engagera. On n’acceptera jamais. Jamais. Ce soir c’est le plomb mais nous sommes déjà demain. Ils voulaient le renoncement. Ils espèrent l’affrontement. Ils n’auront que notre engagement. Total et permanent, absolu et radical.

    #Olivier_Ertzscheid

  • Intelligence Artificielle : La pédagogie contre l’illusion ?
    https://www.cafepedagogique.net/2024/07/04/intelligence-artificielle-la-pedagogie-contre-lillusion

    L’Ecole au front de l’I.A.

    L’ouvrage d’Olivier Ertzscheid aborde la question des « artefacts génératifs » (terme qu’il préfère à « Intelligence artificielle ») sous bien des aspects : techniques, philosophiques, politiques, artistiques, juridiques… Il éclaire aussi les défis posés à l’éducation : « Nous sommes une nouvelle fois devant un changement absolument majeur de notre manière d’enseigner, de transmettre, et d’interagir dans un cadre éducatif, a fortiori lorsque celui-ci est asynchrone et / ou à distance. »

    Car après s’être livrée à la terreur des jeux vidéo, de Wikipédia ou des réseaux sociaux, l’Ecole est peut-être menacée par une nouvelle panique morale : la qualité des textes (et pas que) produits par l’I.A. fait entrer l’Ecole (et pas que) dans l’ère du soupçon. Elle renforce potentiellement un sentiment d’insécurité chez les enseignant·es confronté·es au nouveau pouvoir d’écrire que la machine offre aux élèves. Mais elle leur donne aussi, du moins à celles et ceux qui s’y forment, des facilités nouvelles pour concevoir une séquence, un cours, un diaporama, un QCM, une évaluation… Côté élèves comme côté enseignant·es, le piège, c’est peut-être précisément le sentiment de toute puissance que donne la machine. L’immédiateté de la réponse offerte par les assistants conversationnels est un leurre, une tentative d’hypnose. Le travail de l’Ecole, c’est précisément de nous aider à sortir de la pensée magique pour saisir que l’IA, loin d’être une transcendance, est une technologie, à élucider, que cette technologie fonctionne au service d’intérêts économiques et politiques, qu’elle existe grâce à l’intervention de travailleurs et travailleuses de plus en plus invisibles et exploitées.

    Le 1er danger pour l’Ecole, c’est l’aveuglement, l’ignorance de ce qui se joue, avec pour conséquence l’abandon des élèves face à la technique, susceptible une fois encore de renforcer les inégalités scolaires et socioculturelles. « Nous devons accepter, souligne Olivier Ertzscheid, de braconner sur ces terres d’une relation dialogique automatisée. Et nous devons à tout prix et à tout coût intégrer dans nos pratiques ces nouvelles formes de braconnage technique et culturel et y accompagner étudiantes et étudiants. »

    L’Ecole au front des langages

    L’ouvrage d’Olivier Ertzcheid pose quelques bases d’une didactique de l’I.A. qu’il nous faudra rapidement construire. Il nous rappelle en particulier combien il devient encore plus essentiel de développer les compétences linguistiques des élèves, au premier chef la maitrise du vocabulaire et de la syntaxe.

    L’Ecole au front de l’EMI

    Le travail qui nous incombe, c’est de favoriser une posture de déconstruction : les élèves doivent développer un regard critique sur les productions générées par l’IA. Savoir analyser, comparer, vérifier, sélectionner, hiérarchiser, sourcer, corriger, enrichir, restructurer … les propositions de l’IA supposent bien des connaissances, des capacités et des entraînements, ce qui fait de l’EMI plus que jamais une urgence et un impératif, et ce dans toutes les disciplines tant chacune est impactée.

    L’ouvrage d’Olivier Ertzscheid est une belle entreprise de démystification qui nous invite à nous faire à notre tour désillusionnistes. Dépasser la peur comme la fascination implique de comprendre « comment ça marche », de rendre visible ce qui est volontairement dissimulé, de refuser un assujettissement à une IA qui soit déprise sur le savoir et emprise sur les croyances. Ce qui s’impose d’urgence, c’est une pédagogie critique des normes non seulement sociales, mais aussi désormais épistémologiques : au travail !

    Jean-Michel Le Baut

    #Olivier_Ertzscheid #Ia_cyberespace #Education #Intelligence_artificielle

  • Autorisation des contenus pornographiques et violents sur X : « Ça s’inscrit dans une économie qui est rentable », regrette Olivier Ertzscheid
    https://www.europe1.fr/emissions/linterview-de-5h40/autorisation-des-contenus-pornographiques-et-violents-sur-x-ca-sinscrit-dans

    Olivier Ertzscheid, chercheur français en sciences de l’information et de la communication, répond aux questions de Victor Pourcher. Ensemble, ils reviennent sur l’autorisation des contenus pornographiques et violents sur le réseau social X.

    Victor Pourcher remplace Alexandre Le Mer ce mercredi 5 juin 2024.

    Invité(s) : Olivier Ertzscheid, chercheur français en sciences de l’information et de la communication

    #Olivier_Ertzscheid #X

  • Nouveau livre :-) Les IA à l’assaut du cyberespace. Vers un web synthétique. – affordance.info
    https://affordance.framasoft.org/2024/05/les-ia-a-lassaut-du-cyberespace-vers-un-web-synthetique

    Olivier Ertzscheid annonce la parution de son ouvrage et parle un peu du making of.

    Sortie officielle le 5 Juin mais commandes déjà possible sur le site de ce merveilleux éditeur : C&F Éditions.

    Voilà pour l’essentiel. Et pour le reste, quelques mots.

    #Olivier_Ertzscheid #Ia-cyberespace

  • Nouvelle-Calédonie : le blocage de TikTok est-il légal ?
    https://www.latribune.fr/technos-medias/internet/nouvelle-caledonie-le-blocage-de-tiktok-est-il-legal-997722.html

    Peu efficace, liberticide et potentiellement illégale... La décision de Gabriel Attal de bloquer TikTok en Nouvelle-Calédonie pour espérer ramener le calme dans l’archipel interroge de nombreux observateurs. Car même prise dans un contexte état d’urgence, une telle décision doit être justifiée par lutte contre le terrorisme. Explications.
    Marine Protais
    16 Mai 2024, 19:38

    Une mesure qui rappelle l’Iran et la Chine

    Au-delà de sa légalité, l’aspect anti-démocratique du blocage d’un réseau social interpelle. Cette mesure rappelle des décisions prises en Iran, en Chine, en Inde... des états connus pour leurs pratiques autoritaires. « La mise sur le même plan sémantique du "déploiement de l’armée" et de "l’interdiction de TikTok" est à la fois surréaliste et programmatique. Surréaliste car on croirait un cadavre exquis, et programmatique car elle désigne la plateforme comme disposant des attributs d’une puissance militaire qu’il convient d’abattre. C’est donc à la fois se tromper de sujet et se tromper de cible" », écrit sur son blog Olivier Ertzcheid, chercheur spécialiste en sciences de l’information.

    Coïncidence. La décision du Premier ministre Gabriel Attal de bloquer TikTok en Nouvelle Calédonie est intervenue le même jour que la publication du rapport de l’ONG Access Now. Celle-ci fait un bilan du nombre de blocages du web et des plateformes durant l’année 2023. Ceux-ci sont en forte augmentation, rapporte l’ONG, qui s’inquiète d’une normalisation de cette pratique. Dans ce rapport, l’ONG rappelle d’ailleurs la prise de parole d’Emmanuel Macron lors des émeutes de juin 2023 suite à la mort de Nahel Mezouk, durant laquelle il avait déjà évoqué le potentielle blocage de la plateforme, provoquant des réactions enflammées.

    Par ailleurs, si le but est d’empêcher à des groupes de s’organiser ou de diffuser des campagnes de désinformation, on peut s’interroger sur pourquoi le choix de TikTok plutôt qu’une autre plateforme. « Sans accès à TikTok, la jeunesse réellement mobilisée et active se trouvera et s’est déjà probablement trouvée d’autres canaux de mobilisation et d’organisation, le premier d’entre eux étant WhatsApp, écrit encore Olivier Ertzscheid. Et pour "l’autre jeunesse", celle qui se contente d’être jeune mais n’est ni particulièrement mobilisée ou politisée, elle vivra cette interdiction comme une censure et une privation aussi injustifiée qu’injustifiable, et là peut-être y verra les raisons de se mobiliser ou d’entrer dans le conflit. »
    Si l’on bloque TikTok, pourquoi ne pas bloquer WhatsApp et Telegram ?

    « Lorsqu’on étudie les menaces cyber, la plateforme que nous croisons le plus souvent c’est Telegram. C’est celle qui est la plus utilisée pour mener à bien des cyberattaques ou des campagnes de désinformation », pointe de son côté Adrien Merveille, expert en cybersécurité chez Check Point Software Technologies..

    Un blocage est par ailleurs toujours contournable. « Quand vous bloquez une plateforme, il y a toujours un moyen de le contourner, rappelle. En quelques clics, vous pouvez télécharger un VPN. Même dans des pays où le blocage étatique est bien plus fort, certains trouvent des moyens de le contourner » rappelle Arnaud Lemaire, expert en cybersécurité chez F5.

    Marine Protais

    #TikTok #Olivier_Ertzscheid

  • Réseaux sociaux : face aux accusations, TikTok cède aux uns mais pas aux autres - Un regard chrétien sur l’actualité – La Croix International
    https://international.la-croix.com/fr/ethique/reseaux-sociaux-face-aux-accusations-tiktok-cede-aux-uns-mai
    https://admin.international.la-croix.com/assets/785f2b8f-5f76-40b9-93fe-73a6e6ac4f36?format=jpg&width=

    Jouer les Européens contre les Américains

    « J’ai du mal à croire que la suspension de TikTok Lite en Europe ne soit pas liée à la menace d’interdiction de TikTok prononcée la veille aux États-Unis », estime le sénateur LR Claude Malhuret, qui a piloté en 2023 une commission d’enquête parlementaire sur cette plateforme. « Les dirigeants de l’entreprise jouent la montre et essaient de gagner du temps. Ils concèdent une victoire aux Européens tout en résistant aux Américains. »

    De fait, ByteDance, la maison mère chinoise de TikTok, a annoncé jeudi 25 avril n’avoir aucune intention de vendre son application, au risque de se voir interdite aux États-Unis. Des recours juridiques sont toutefois prévus. « Nous allons continuer à nous battre pour vos droits dans les tribunaux », a promis à ses abonnés le patron de TikTok, le Singapourien Shou Zi Chew.

    « À chaque fois qu’elles sont entravées, les plateformes jouent la carte de la liberté d’expression », souligne Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur en sciences de l’information à l’université de Nantes (1). « C’est une manière relativement habile de faire passer l’idée que ce qu’on leur reproche va à l’encontre des valeurs cardinales des pays qui les accusent. »
    Poser des jalons

    Au-delà d’une possible stratégie de diversion, la suspension rapide de TikTok Lite en Europe reste un bon signal, selon ce spécialiste. « Avec le règlement sur les marchés numériques (DMA) et le règlement sur les services numériques (DAS), entrés en vigueur récemment, l’Union européenne a enfin un cadre juridique fort avec des sanctions proportionnées, autrement dit adaptées à la trésorerie de ces très grandes entreprises. Ce cadre fort est bien identifié par les plateformes. »

    Une question se pose toutefois : pourquoi avoir lancé TikTok Lite, version « extrême » de TikTok, au moment même où l’application est la plus contestée ? Olivier Ertzscheid y voit une pratique assez courante dans le secteur du numérique : une manière de « poser des jalons » et d’« avancer ses pions ».

    « Vous balancez une fonctionnalité extrême, inimaginable, puis vous la retirez presque immédiatement pour montrer que vous êtes “raisonnable”, résume-t-il. Quelque temps après, vous revenez avec une application similaire mais qui va un peu moins loin. Celle-là aura toutes les chances de paraître acceptable aux yeux de l’opinion. » Selon lui, cette stratégie a notamment été éprouvée pour contrer le non-consentement des internautes au recueil de leurs données personnelles.

    (1) Auteur du Monde selon Zuckerberg, C&F Éditions, 2020, 15 €, 112 p.

    #TikTok #Olivier_Ertzscheid #Economie_numérique

  • La bulle de filtres : comment les réseaux sociaux nous confortent dans « nos propres croyances et opinions »
    https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-fil-des-reseaux/la-bulle-de-filtres-les-reseaux-sociaux-nous-confortent-dans-nos-propre

    Pour inciter les internautes à rester sur les plateformes, les algorithmes repèrent les intérêts de chacun et proposent un contenu personnalisé. Au point de limiter la diversité d’opinion.
    Article rédigé par France Info - Audrey Abraham
    Radio France
    Publié le 25/12/2023 07:49 Mis à jour le 26/12/2023 10:09
    Temps de lecture : 2 min

    Vous vous êtes probablement déjà demandé pourquoi vous tombez toujours sur les mêmes vidéos de cuisine, de déco, de chatons sur Instagram, Tiktok ou encore Facebook. Cela n’a rien d’un hasard, ça a même un nom ! C’est ce qu’on appelle la bulle de filtres et les algorithmes en sont responsables. Concrètement, le moindre click, le moindre like est mémorisé et indique vos préférences à la plateforme pour personnaliser le contenu qui vous est proposé.
    à lire aussi Les algorithmes d’Instagram facilitent la vente de pédopornographie, selon des chercheurs

    Olivier Ertzscheid est maître de conférences à l’université de Nantes : « Les propriétaires de ces plateformes se disent ’Pour garder les gens attentifs pour que les gens restent sur nos plateformes il faut qu’on leur serve des choses dont on sait déjà qu’elles les intéressent et donc plutôt que de leur présenter des opinions, des avis différents, on va leur présenter des choses qui vont dans le sens de ce qu’on appelle leur propre biais de croyances.’ Si ce sont des gens qui ont une passion pour la gastronomie on va leur afficher toujours plus de sites en lien avec la gastronomie. »

    Voilà comment chacun à notre niveau, en sélectionnant les comptes que nous avons envie de suivre, les contenus que nous avons envie de partager, nous alimentons sans nous en rendre compte cette bulle de filtre, « alors que la promesse initiale des réseaux sociaux, c’est de vous exposer à plein de gens différents, de diversités de culture, d’opinions, de points de vue, d’avis, reprend Olivier Ertzscheid. Finalement, on s’aperçoit qu’on nous expose de plus en plus à de l’identique, à des choses qui nous confortent pour nos propres croyances et opinions. » Les vidéos de cuisine, de musique, de paysages sont donc concernées. Ce que l’on peut considérer comme du contenu léger mais pas uniquement. Le contenu politique est aussi soumis au mécanisme des algorithmes.
    Un usage politique

    C’est dans ce cas de figure que la bulle de filtres est moins anodine et mérite d’être davantage questionnée. On le sait sur les réseaux sociaux tout est mélangé. Il n’y a pas d’un côté le contenu divertissant, de l’autre les sujets politiques. Le flux est constant, continu... Les discours sont plus ou moins explicites.

    Alors notre faculté de discernement s’altère : « De toute éternité, l’être humain, a toujours des biais et il adore se conforter, se vautrer dans ses propres biais culturels, sociologiques, politiques, etc. Là où ça devient problématique c’est à partir du moment où tout ça est brassé sans qu’on ait de ligne éditoriale claire. Les gens qui en général vont acheter le journal ou lire le journal ’Libération’. Il est assez rare que ce soit aussi des gens qui vont lire le journal ’Valeurs Actuelles’. Parce qu’ils savent ce qu’ils vont chercher. Ils savent que ’Libération’ est à gauche et que ’Valeurs Actuelles’ est très à droite. À l’échelle des médias sociaux, ce qui est compliqué c’est quand on n’a pas les codes pour décrypter les intentions, sachant qu’il y a toujours des intentions qui peuvent être basiquement commerciales et de plus en plus souvent aussi politiques. »

    Impossible d’y échapper, les algorithmes sont l’essence même des réseaux sociaux. L’important c’est d’en être conscient. Les autorités de régulation imposent d’ailleurs aux plateformes d’être plus transparentes avec les utilisateurs, qui on le rappelle sont parfois mineurs, en expliquant notamment autant que possible la manière dont fonctionnent leurs algorithmes.

    #Olivier_Ertzscheid #Algorithmes #Médias_sociaux

  • Réseaux sociaux : le passage au payant aurait-il des avantages ?
    https://www.la-croix.com/debat/Reseaux-sociaux-passage-payant-aurait-avantages-2023-10-10-1201286307

    Débat

    Olivier Ertzscheid Enseignant-chercheur en sciences de l’information à l’université de Nantes, auteur du Monde selon Zuckerberg

    Le Wall Street Journal a révélé début octobre que Meta, la maison mère de Facebook et Instagram, préparait le lancement d’un abonnement payant pour profiter de ces réseaux sociaux sans pub. Une manière de se conformer aux nouvelles règles européennes, qui imposent de donner aux utilisateurs la possibilité de refuser la publicité ciblée, sans y laisser son chiffre d’affaires.

    Recueilli par Mélinée Le Priol, le 10/10/2023 à 19:06

    #Olivier_Ertzscheid

    • Paywall, donc je ne sais pas ce que ça raconte. Mais cette histoire de passage au payant, c’est typiquement la dernière étape de l’enshitification décrite par Doctorow.

      Mais ça renvoit aussi à ce qu’on disait sur la bulle internet en 1999/2000 avec les copains : c’est une dernière étape avant la fin d’un tel service, parce que dans le principe même de la « nouvelle économie » en tant que « bulle », il y aura toujours juste derrière un autre service qui sera lancé, super-trop-cool, financé massivement par du capital-risque, donc gratuit, pour le remplacer. (Et on repart pour un cycle de tentative de monopole basé sur le gratuit, et puis au bout d’un moment il faudra tenter de rentabiliser les milliards investis, et re-enshitification et fin de la blague.)

    • C’est la même chose pour tous ces services de mise en relation entre personne* : balblacar, mteeic, de gratuits ils sont devenus payants en surfant sur l’hégémonie qu’ils ont créé. Alors qu’ils ne produisent strictement rien, ne nécessitent aucune matière première (sauf celle des esclaves de Apple/MS qui sont dans les usines ou les mines de terres rares) et revendent les données de leurs abonnés. Mais ce n’est jamais assez, les gloutons du capital en veulent toujours plus.

      * et on ne te répond plus quand tu demandes l’heure dans la rue et l’autostop a disparu (la sécurité jusqu’au bout du web)

  • Les cagnottes en ligne, miroirs de nos émotions collectives
    https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2023/09/23/soutien-aux-sinistres-marocains-depart-a-la-retraite-chirurgie-mammaire-la-f

    « Aux Etats-Unis, lancer une cagnotte, c’est devenu un réflexe quasi automatique, quand une famille a des frais médicaux importants à payer. La régulation ne se fait pas entre l’Etat et des acteurs privés, mais entre les individus et les plates-formes, loin des politiques publiques », commente Olivier Ertzscheid, chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’université de Nantes. Pour le maître de conférences, « cela contribue à installer un “mercy market”, ou marché de la pitié. Les malades sont dans l’obligation d’apprendre à attiser la pitié en ligne ».

    Pour toutes les cagnottes, des anniversaires de mariage au soutien aux policiers en colère, les hébergeurs retiennent toujours une commission, entre 1,5 % et 6 %, selon les plates-formes et les montants récoltés. Quelle que soit la cause soutenue, Olivier Ertzscheid y voit d’abord « une politique d’acteurs du numérique qui ont intérêt à monétiser l’ensemble de nos activités sociales, en captant une marge au passage ». La générosité des uns peut rapporter gros à d’autres.

    #Olivier_Ertzscheid #Cagnotte #Marché_de_la_pitié

  • Mort de Nahel : vidéodrame. – affordance.info
    https://affordance.framasoft.org/2023/06/mort-de-nahel-videodrame

    Par Olivier Ertzscheid

    La mort de Nahel a été filmée par un smartphone et diffusée quasi instantanément sur différents réseaux sociaux, obligeant le ministère de l’intérieur à acter une bavure policière déjà documentée en tant qu’élément de preuve.

    Ensuite la concurrence des médias.

    Médias sociaux et médias soucieux d’en être ou d’y trouver une place. Une concurrence tripartite entre, d’une part, les médias télévisuels d’info en continu et leurs incessants “plateaux de débats”, d’autre part les plateformes précédentes – sachant que les premiers se servent des secondes comme autant de mécanismes de renforcements attentionnels en découpant en “séquences” supposément virales tous les éléments de plateau permettant de rajouter des focales émotionnelles et spectaculaires – et enfin les médias “pure player” comme Brut ou des comptes de journalistes indépendants (Clément Lanot notamment) dont le succès en pareille circonstance s’explique par leur capacité à fournir à la fois le côté “brut” du reportage de terrain en temps réel et la continuité de l’action journalistique qui en fait le sous-texte spectaculaire autant qu’elle nourrit le commentaire de celui qui filme.

    Dans le vidéo drame qui a vu la circulation des images de la mort de Nahel, on ne voit jamais Nahel mourir mais on comprend qu’il vient d’être tué. La force de démonstration de ces images vient de ce décalage. Leur viralité également car toute autre image donnant à voir sa mort aurait déclenché d’autres processus de circulation virale où il se serait agi tout à la fois d’éviter et de contourner le blocage des plateformes. Ici il n’y a rien à bloquer, il n’y a qu’à montrer la monstruosité d’un geste, d’une mise en joue qui met en jeu une vie.

    En clôturant cet article on attire mon attention sur la déclaration d’Emmanuel Macron indiquant, je cite, chez “les jeunes” (sic), “une forme de mimétisme de la violence (…) on a le sentiment parfois que certains d’entre eux vivent dans la rue les jeux vidéos qui les ont intoxiqués.”

    Le discours sur le mimétisme et la reproduction de scènes de violence des jeux vidéos dans la “vraie vie” c’est une thèse qui ne tient pas la route et qui n’a jamais été établie scientifiquement. S’il peut y avoir parfois des corrélations il n’y a en aucun cas de causalité. Le discours que tient Macron est un discours écran et un discours refuge, qui n’a pour seul but que de le mettre à l’abri de ses propres responsabilités. Ces émeutes et ces scènes de violence auraient existé même dans un monde totalement déconnecté, même chez les Amish. Parce que ce qui se passe actuellement est un fait sociologique (et politique) et non un fait technologique (et numérique).

    Le président de la start-up nation est, une nouvelle fois, un vieux con comme les autres.

    #Olivier_Ertzscheid #Emeutes #Vidéo #Médias

  • Apple Vision Pro : le casque était un masque. – affordance.info
    https://affordance.framasoft.org/2023/06/apple-vision-pro-le-casque-etait-un-masque

    par Olivier Ertzscheid

    Après quelques années d’exploitation sans concurrence réelle de l’Oculus par Méta, après la hype autour du lancement du “Métavers”, après que toutes les Big Tech sont en quête perpétuelle du Next Big Thing dans le domaine de l’équipement comme seul Apple fut longtemps en mesure produire et d’en annoncer, c’est le Apple de Tim Cook qui vient donc de lancer le casque Apple Vision Pro, je cite “le premier ordinateur spatial”.

    On avait “l’informatique ubiquitaire“, on avait “l’ordinateur quantique“, voici donc … “l’ordinateur spatial” !! Rien à voir avec la conquête de l’espace (même si dans un storytelling un peu bourrin on décline les usages du Apple Vision Pro avec des références permanentes à la série Fondation produite par … Apple TV), il s’agit ici de l’espace physique, de la spatialité de notre présence au monde qu’Apple nous promet de révolutionner.

    Mais rien n’y fait car à bien y regarder (dans le casque), c’est l’impression d’un nouvel enfermement. Celui du casque de réalité virtuelle. L’appareillage de ce que certains voient comme un monde nouveau, qu’ils nomment Métavers, là où d’autres soulignent la vanité de ce désespérément plat Net B.

    Le casque Apple Vision Pro m’intéresse non pas pour les fantasmes qu’il alimente ou pour les développements techniques qu’il met en oeuvre mais par la triangulation du regard qu’il installe de manière inédite et qui, par bien des points, permet de situer l’analyse et la prospective de ces équipements et des “réalités” qu’ils cristallisent. S’il s’agit du “premier ordinateur spatial“, c’est bien parce qu’il n’est pas de situation dans l’espace sans triangulation. Je m’explique.

    #Olivier_Ertzscheid #Apple_Vision_Pro #Réalité_virtuelle

  • Audioblog - s02#53 - Où va ce satané Facebook ? avec Olivier Ertzscheid - 2 décembre 2021
    https://audioblog.arteradio.com/blog/186156/podcast/187249/s02-53-ou-va-ce-satane-facebook-avec-olivier-ertzscheid-2-decem

    Un podcast Olivier Ertzscheid / David Dufresne.

    Depuis des années, Olivier Ertzscheid est l’une des meilleures vigies de la facebookisation des esprits, des corps et des défaites. Chercheur, auteur de Le monde selon Zuckerberg (C&F éditions), Olivier Ertzscheid tient le blog https://www.affordance.info, plaque tournante des tourments numériques de nos mondes. Avec lui, on s’est interrogé sur l’avenir de Facebook, et de nous toutes et tous. Et Metaverse, de ses algos si fous qu’ils semblent désormais livrées à eux mêmes. Trois heures de master-class.

    📢 Au Poste Libertés publiques, libertés fondamentales, police, sousveillance & contre-filatures. Causeries hebdomadaires proposées par le réalisateur David Dufresne (« Un pays qui se tient sage »). Chaque lundi. Et parfois plus sur Twitch ►► https://www.twitch.tv/davduf

    #Olivier_Ertzscheid #David_Dufresne #Facebook

  • 19 janvier - La Roche-sur-Yon : à l’IUT, une conférence sur la communication digitale pour les entreprises | Le Journal du Pays Yonnais
    https://actu.fr/pays-de-la-loire/la-roche-sur-yon_85191/la-roche-sur-yon-a-liut-une-conference-sur-la-communication-digitale-pour-les-e

    Mon actu

    La conférence qui a lieu le 19 janvier, à 8 h 30 à l’IUT, est animée par Olivier Ertzscheid, enseignant chercheur de l’IUT, également Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication.
    Usages numériques

    Olivier Ertzscheid s’intéresse aux usages numériques et à l’évolution des technologies.

    Il est également auteur de plusieurs livres dont Le monde selon Zuckerberg : portraits et préjudices ou encore L’appétit des géants : pouvoir des algorithmes, ambitions des plateformes.

    Le thème de la conférence, Comment communiquer sur les réseaux sociaux pour une entreprise en 2023, a pour objectif d’apporter des clés/outils aux entreprises afin de communiquer sur les réseaux sociaux.
    Questions/réponses

    Un temps d’échange est prévu à l’issue de la conférence au cours duquel Olivier Ertzscheid répondra aux questions des différentes structures présentes.

    Cet évènement fait partie des quatre semaines d’évènements que l’IUT a mis en place depuis la rentrée de septembre 2022 afin de répondre à une demande d’information des entreprises du territoire sur l’offre de formation en constante évolution.

    Ces évènements reprennent les thématiques des quatre filières de formation : information et communication, gestion des entreprises et des administrations, génie biologique et réseaux et télécommunications.

    #Olivier_Ertzscheid

  • Le droit à l’avortement à l’épreuve de l’algorithme - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/analyse/2022/07/19/le-droit-a-lavortement-a-lepreuve-de-lalgorithme

    Au lendemain de la décision de la Cour suprême, on semble redécouvrir que les promesses des applications de grossesses, et de ce que la journaliste Lucie Ronfaut nomma la « MenstruTech », ne sont que l’incarnation d’un cauchemar dans lequel chaque donnée rattachée au cycle menstruel devient un stigmate faisant du corps de chaque femme une cible. Cible pour les lobbies « pro-vie » ; cible pour les stratégies publicitaires des plus offrants ; cible pour des actions de harcèlement auprès de celles ayant déjà eu recours à l’avortement ou l’envisageant. Et le tout à partir de données, vendues ou achetées auprès de courtiers de données (DataBrokers), alimentant d’une main des régies publicitaires auxquelles ils s’abreuvent de l’autre.

    Chaque fait en lien avec une situation de grossesse choisie ou non, chaque intention, chaque mot-clé déposé sur un moteur de recherche, chaque commentaire ou chaque émoticône lâchée sur un forum ou un réseau social, chaque déplacement vers ou à proximité d’un centre du planning familial, d’un hôpital ou d’une clinique pratiquant des IVG devient une preuve sans justice, une sentence sans jugement, une condamnation sans contradictoire. Une donnée parmi d’autres qui auront beau jeu de venir la corréler pour permettre à ceux qui le souhaitent d’y projeter leurs fausses causalités. Bruno Latour rappelait qu’on serait mieux avisé de parler « d’obtenues » que de « données » tant le mot-valise et l’anglicisme générique de « data » ne sert aujourd’hui qu’à masquer et à travestir les stratégies politiques qui réclament le déploiement de dispositifs toujours plus massifs et indistincts de collecte.

    Le cycle menstruel devient un cycle industriel comme les autres. Rien désormais ne peut échapper à cette dynamique de la trace ; comme le sang des règles que pendant si longtemps l’industrie publicitaire chercha à rendre bleu ou totalement invisible, chaque fait menstruel est aujourd’hui disponible dans un régime paradoxal de visibilité où l’on prend prétexte d’une discrétion et d’une singularité de la collecte pour mieux la mettre à disposition d’acteurs discrétionnaires de sa publicitarisation (principalement les courtiers de données dont nous parlions plus haut). Et l’on parle aujourd’hui de « chalutage » de données. Littéralement une pêche au chalut, c’est à dire sans se préoccuper de la diversité, de la taille ou de l’âge de ce que l’on ramènera mais avec le seul objectif d’en ramener le maximum possible en une seule fois, en un seul passage.

    La première loi bioéthique en France date de 1994. Nous avons eu besoin d’inventer ces lois de bioéthique pour anticiper et contrôler, sur un plan scientifique et philosophique, les évolutions des questions liées au fait de donner la vie et d’être en capacité de manipuler les embryons. Mais en 2022 nous en sommes réduits à constater que la simple détention de données pourtant triviales d’un trajet Uber effectué par une femme en direction d’une clinique pratiquant l’avortement représente, pour elle d’abord et pour la société toute entière ensuite, un danger finalement bien plus grand, bien plus imminent et bien plus incontrôlable par la puissance publique, que la mobilisation de connaissances scientifiques de haut-niveau nécessitant elles-mêmes des équipements et des investissements lourds.

    Nous commençons à peine à réfléchir au coût environnemental du numérique et des données qu’il agrège et collige. Mais la réflexion sur le coût social de ces données est pour tout dire encore indigne d’une société développée. Et s’il existe – heureusement – des travaux universitaires pionniers (on citera par exemple Alain Supiot, Antoinette Rouvroy, Antonio Casilli, Jen Schradie…) ceux-ci ne trouvent presqu’aucun écho dans un champ politique entièrement obstrué par les « recommandations » de cabinets de conseil ou de think-tanks qui sont en effet à l’activité de penser ce que les chars d’assaut sont à l’activité de promenade.

    « Don’t Be Evil ». Telle fut pendant longtemps la devise de l’entreprise Google (aujourd’hui Alphabet) avant d’opter en 2015 pour le plus neutre « Do The Right Thing ». Il n’existe pas d’entreprise du numérique qui ne mette en avant le projet d’une technostructure de la bienveillance ou du « care » : chaque service, chaque application, chaque interface est à chaque fois présentée –dans sa dimension marketing – pour « augmenter » ou « enrichir » notre expérience. De la relation (à soi, aux autres, à ses pairs) dans sa dimension la plus symbolique, à la réservation (d’un train, d’un repas, d’un logement, etc.) dans sa dimension la plus triviale, tout cela contribuerait à notre bien, et parfois même carrément au bien commun. Mais il n’est aucune entreprise du numérique qui ne conçoive ses produits et services autrement que par le déploiement d’une infrastructure de la surveillance. Or une technostructure, fut-elle celle de la bienveillance, reposant sur une infrastructure de la surveillance, ne sera ni de deviendra jamais rien d’autre qu’un projet politique autoritaire créant les conditions du maintien de son emprise totale sur nos vies.

    Presque 50 ans plus tard, la honte, la solitude et l’angoisse des poursuites font leur retour dans au moins 8 États des USA. L’anonymat, lui, est devenu presqu’impossible. Impossible pour les femmes aujourd’hui et … demain pour qui d’autre ? Après l’arrêt Roe v. Wade, le juge Clarence Thomas entend désormais s’attaquer à l’arrêt Lawrence v. Texas, ce qui rendrait de fait l’homosexualité illégale dans un certain nombre d’États (sensiblement les mêmes que ceux qui ont immédiatement suivi l’interdiction de l’avortement).

    D’abord les femmes. Puis les homosexuel.le.s. Il faut imaginer aujourd’hui les nouveaux moyens de traque qui sont à disposition de toutes les folies discriminatoires. Nous vivons dans des démocraties où les droits des femmes, puis des minorités, au prix de luttes incessantes, apparaissaient enfin et au moins en partie garantis et protégés comme jamais ils ne l’avaient été jusqu’ici dans l’histoire des sociétés développées. C’est précisément ce moment que l’histoire choisit pour nous rappeler que ces droits n’ont jamais été aussi fragiles et dépendants de la décision de quelques êtres obsessionnels qui ne calculent le devenir de l’humanité qu’à l’aune de leurs propres névroses. Ce qui est en soi, la meilleure définition possible d’un algorithme.

    Olivier Ertzscheid

    Chercheur en sciences de l’information et de la communication, Maître de conférences à l’université de Nantes (IUT de La Roche-sur-Yon)

    #Olivier_Ertzscheid #Avortement #Surveillance

  • affordance.info : Ukraine. Para Bellum Numericum. Chronique du versant numérique d’une guerre au 21ème siècle.
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2022/02/guerre-ukraine-numerique.html
    https://www.affordance.info/.a/6a00d8341c622e53ef0278806d9a68200d-600wi

    Il y a déjà de longues années, je présentais le média Twitter à mes étudiant.e.s en leur expliquant qu’il était vital de s’y intéresser car s’y donnaient à voir non seulement des informations vitales mais aussi à valeur patrimoniale que l’on se devait de suivre attentivement et, pour certaines d’entre elles, de s’efforcer de conserver. Et je prenais ce qui semblait alors assez surréaliste et baroque, l’une des premières « déclarations du guerre » ce faisant exclusivement via ce média. C’était le 14 novembre 2012, et le compte Twitter officiel de l’armée Israëlienne annonçait lancer des frappes sur le peuple palestinien vivant dans la bande de Gaza.

    Depuis cette première déclaration de guerre via Twitter, les choses ont énormément changé et c’est l’écosystème numérique dans son entier, avec au premier plan les grande plateformes sociales, qui jouent un rôle déterminant, à la fois dans des opérations de désinformation ou de propagande, mais aussi plus globalement sur le plan géostratégique et géopolitique.

    Il y a 10 ans de cela, déclarer la guerre sur Twitter était une anomalie. Aujourd’hui et avec la guerre aux portes de l’Europe en Ukraine, l’anomalie serait d’imaginer une guerre sans Twitter.

    A partir de ce que révèle chaque jour la guerre en Ukraine, je veux dans cet article essayer de faire un point, forcément provisoire, sur ce qui se joue lors d’une guerre dans, par, grâce et à cause des grands écosystèmes numériques et de leur écho médiatique et géopolitique.

    #Guerre #Médias_sociaux #Ukraine #Olivier_Ertzscheid

  • Ukraine/Russie : Para Bellum Numericum - davduf.net
    https://www.davduf.net/ukraine-russie-para-bellum-numericum-2187

    La cyberguerre pour de vrai, avec Olivier Ertzscheid, Maître de Conférences Université La Roche/Yon et Nantes. Dans son blog, Olivier a parfaitement résumé les enjeux : « Il y a 10 ans, déclarer la guerre sur Twitter était une anomalie. Aujourd’hui, et avec la guerre aux portes de l’Europe en Ukraine, l’anomalie serait d’imaginer une guerre sans Twitter. » On prend le café avec lui, pour mieux comprendre ce que nous traversons. Les GAFA, l’Uberisation des conflits, GoogleMaps comme vecteur de guerre en direct. Venez nombreux, venez en paix --- et déterminés.

    #Olivier_Ertzscheid

  • Où va ce satané Facebook ? - davduf.net
    http://www.davduf.net/ou-va-ce-satane-facebook-2109

    Depuis des années, Olivier Ertzscheid est l’une des meilleures vigies de la facebookisation des esprits, des corps et des défaites. Chercheur, auteur de Le monde selon Zuckerberg (C&F éditions), Olivier Ertzscheid tient le blog https://www.affordance.info, plaque tournante des tourments numériques de nos mondes. Avec lui, on s’est interrogé sur l’avenir de Facebook, et de nous toutes et tous. Et Metaverse, de ses algos si fous qu’ils semblent désormais livrées à eux mêmes. Trois heures de master-class.

    L’émission et débat sont à revoir dans leur intégralité sur Twitch en attendant une version remontée au bon soin d’Euryale pour Blast. Merci à tous d’avoir participé au débat et aux nouveaux abonnés qui soutiennent la chaîne !

    📢 Au Poste Libertés publiques, libertés fondamentales, police, sousveillance & contre-filatures. Causeries proposées par le réalisateur David Dufresne (« Un pays qui se tient sage »). Chaque lundi et chaque jeudi. Et parfois plus sur Twitch ►► https://www.twitch.tv/davduf

    #Olivier_Ertzscheid #David_Dufresne #Médias_sociaux #Twitch

  • Facebook : par-delà le like et la colère - AOC media - Analyse Opinion Critique
    https://aoc.media/opinion/2021/12/05/facebook-par-dela-le-like-et-la-colere

    Les révélations récentes de la lanceuse d’alerte Frances Haugen, ancienne employée de Facebook au sein du département d’« intégrité civique », montrent que la circulation sur le réseau social de contenus extrêmement clivants et polarisés résulte de choix consciemment effectués par l’entreprise pour maximiser sa rentabilité économique plutôt que d’une logique algorithmique aveugle. D’où l’importance de créer les conditions d’une supervision démocratique et d’une recherche publique indépendante qui puisse étudier sans entrave les mécanismes de circulation des données au sein de la plateforme.

    #Facebook #Olivier_Ertzscheid

  • Facebook Files : Frances Haugen ou la révolte d’un pur produit de la Silicon Valley
    https://www.marianne.net/societe/big-brother/facebook-files-frances-haugen-ou-la-revolte-dun-pur-produit-de-la-silicon-

    C’est cette agence de communication qui l’a aidée à préparer ses interventions publiques, et notamment l’émission de télévision américaine « 60 minutes », lors de laquelle son identité a été révélée au grand public. Pour ajouter un étage à cette fusée pensée pour tenir la dragée haute au colosse qu’est Facebook, une dernière institution est venue la soutenir : l’ONG Luminate, fondée par le milliardaire franco-américain Pierre Omidyar. Un personnage intrigant, fondateur d’Ebay, épinglé par le scandale d’évasion fiscale Paradise Papers, et mécène de médias ayant servi de plateformes aux révélations d’Edward Snowden, le lanceur d’alerte qui a révélé les programmes de surveillance de masse aux États-Unis. Selon Le Monde, c’est une structure financée par l’ONG de Pierre Omidyar qui règle la facture de la tournée de Frances Haugen. On est donc loin de la caricature de David contre Goliath, ce qui témoigne d’une mutation dans le profil et les méthodes des lanceurs d’alerte.

    « Cette organisation lui permet d’imposer son agenda à Facebook, qui ne peut pas attendre que le soufflé retombe. Ils sont donc obligés de répondre et c’est ce qui peut entraîner un changement dans les pratiques de la plateforme », juge le chercheur Olivier Ertzscheid, auteur du Monde selon Zuckerberg (C & F, 2 020), interrogé par Marianne. « Il est aussi intéressant de noter une évolution dans le domaine dénoncé par les lanceurs d’alertes. Cela a commencé dans les années 1990 par la santé, puis Snowden ou Julian Assange ont dénoncé les dérives liberticides des États, et désormais les alertes émanent de l’intérieur des géants du numérique », observe auprès de Marianne Olivier Alexandre, docteur en sociologie et chargé de recherche au CNRS.
    Crise morale

    La Silicon Valley est désormais attaquée par ses enfants. « Frances Haugen partage avec les leaders de la Silicon Valley de nombreuses similarités sociologiques. Elle a le même âge que Mark Zuckerberg (37 ans : N.D.L.R.), ils sont de cette génération qui a été aux premières loges en grandissant en même temps que les réseaux sociaux. Elle est américaine et blanche dans un milieu qui se présente comme très ouvert mais qui discrimine les étrangers et les latinos et les Afro-Américains. Elle est ingénieure en informatique avec une solide culture scientifique qui fonde une croyance dans le fait que les nouvelles technologies sont une source de progrès. Et enfin, comme la plupart des cadres de la Silicon Valley, elle est issue d’un milieu social très favorisé », décrypte le sociologue Olivier Alexandre.

    #Facebook #Frances_Haugen #Olivier_Ertzscheid #Olivier_Alexandre

  • Facebook Files : les leçons de Frances Haugen sur le plus grand réseau social du monde - L’Express L’Expansion
    https://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/facebook-files-les-lecons-de-frances-haugen-sur-le-plus-grand-re

    « Ce que révèle Frances Haugen est plutôt une confirmation. Les experts, les chercheurs se doutaient des effets de polarisation, des modérations qui n’étaient pas effectuées comme elles l’étaient. Ce qu’amène Frances Haugen c’est la preuve, la documentation de ces dysfonctionnements algorithmiques, humains, éditoriaux », explique Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Nantes et auteur de l’ouvrage : « Le monde selon Zuckerberg : portraits et préjudices » (C&F Editions, 2020).

    #Facebook #Olivier_Ertzscheid #Frances_Haugen

  • « Tout le monde a envie d’y croire » : après deux années de crise sanitaire, l’espoir d’un retour « à la normale » à l’université
    https://www.lemonde.fr/campus/article/2021/09/07/tout-le-monde-a-envie-d-y-croire-apres-deux-annees-de-crise-sanitaire-l-espo

    Didier Delignières a les yeux fixés sur le trombinoscope de ses étudiants de licence de l’année dernière. « J’essaie de mémoriser les yeux de ceux que je retrouve en master prochainement, heureusement en présentiel, mais toujours masqués… », sourit ce professeur à la faculté des sciences du sport de l’université Montpellier-I. Comme nombre d’enseignants-chercheurs, il se réjouit de cette rentrée « la plus normale possible » promise par Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, après un an et demi de crise sanitaire. Une rentrée en « 100 % présentiel », sans jauge ni passe sanitaire requis pour aller en cours. Didier Delignières dit avoir préparé les siens « comme jamais » pour ces retrouvailles en chair et en os avec ses étudiants…

    Terminé donc, la distanciation physique dans les amphithéâtres, les couloirs désespérément vides des facs, les laboratoires de recherche désertés, les cours à distance et la solitude derrière son écran ? « Tout le monde a aujourd’hui envie de croire à cette renaissance. Mais on se demande combien de temps cela va tenir », concède le professeur. Car la « terrible année 2020-2021 » avait elle aussi commencé par l’espérance d’un retour à la normale, avant que la situation sanitaire ne s’assombrisse à l’automne. Et, semaine après semaine, visio après visio, qu’elle ne vienne alimenter la déprime des étudiants, le sentiment d’usure des enseignants, et tout ce qui fait la vie des campus.
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    Si les enseignants-chercheurs sont nombreux à se rassurer devant le tableau de bord de la vaccination du ministère de la santé, selon lequel 85 % des 18-24 ans ont reçu au moins une dose de vaccin, pas question de baisser la garde donc. « Je me méfie. Je prépare ces jours-ci des cours en présentiel, mais en prévoyant un plan B à distance pertinent, au cas où. Si la crise sanitaire a appris une chose aux enseignants, c’est à prendre le temps de réfléchir à des formes pédagogiques différentes selon les contextes », commente Amélie Duguet, maîtresse de conférences en science de l’éducation rattachée à l’Institut de recherche sur l’éducation (Iredu) de l’université de Bourgogne Franche-Comté.
    Dispositifs vidéo

    Une souplesse et des compétences acquises par la force des choses, que les enseignants pourraient mettre à profit plus rapidement que prévu. Les étudiants cas contact non-vaccinés « poursuivront leur enseignement à distance. Une continuité pédagogique, basée sur l’hybridation des enseignements, sera proposée », peut-on lire sur certains documents de rentrée. La phrase alimente chez beaucoup la crainte de ne pas voir de sitôt s’éloigner ce distanciel qui a fait souffrir nombre d’étudiants et de professeurs. « Si on nous demande de rallumer pour cela les caméras zoom, on perdra à nouveau la moitié de l’amphi », redoute Eric Berr, maître de conférences en économie à l’université de Bordeaux.

    Pour l’avenir, il ne se fait pas d’illusions : « Les universités ont investi des millions d’euros pour équiper les amphithéâtres en dispositif de captation vidéo, j’ai du mal à croire qu’on ne nous incitera pas désormais à nous en servir, notamment pour faire face au manque de places. » Plus de 30 000 étudiants supplémentaires sont attendus dans l’enseignement supérieur pour cette rentrée. Si l’enseignant a envie de reprendre son « vrai métier, fait d’interactions et d’échanges en réel avec les étudiants », il sait que certains collègues ont trouvé leur compte avec le distanciel, et souhaitent le voir perdurer au moins en partie.
    Coopérations universitaires freinées

    Ce constat vaut selon lui aussi pour la recherche, au ralenti depuis deux ans. Car si les enseignants-chercheurs se satisfont tant bien que mal, ces derniers mois, du quasi-tout numérique « qui permet, de fait, d’assister facilement et à moindre coût à n’importe quel colloque à l’autre bout du monde », la crise a aussi mis un coup de frein aux coopérations universitaires « qui s’initient souvent lors de discussions informelles entre chercheurs, en marge des conférences ici ou là ». Si « leur retransmission vidéo va sans doute s’installer durablement, puisque le pli a été pris », Eric Berr espère que les semaines et mois qui viennent verront aussi se multiplier les rencontres « en vrai ». Comme l’impression que rien ne sera plus vraiment comme avant malgré le retour à la normale proclamé.
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    Reste que dans les amphis, au-delà de l’usage du numérique, la crise a « obligé nombre d’enseignants à se renouveler pédagogiquement, à proposer des choses différentes aux étudiants, notamment pour dynamiser les cours magistraux. Elle a accéléré une évolution latente, bienvenue, qui perdurera sans doute après cette rentrée », analyse Olivier Oudar, professeur et responsable de la filière sciences de la vie à l’université Sorbonne-Paris Nord.
    Remise à niveau

    Ce renouvellement pédagogique est, selon l’enseignant, d’autant plus important qu’il doit permettre de répondre aux possibles difficultés des étudiants cette année, qui inquiètent nombre de professeurs. « Il va falloir notamment s’adapter aux jeunes qui arrivent sur les bancs de la fac » après avoir étrenné les réformes du lycée et du bac dans ce contexte de crise sanitaire. Mais aussi remettre à niveau ceux des années supérieures.

    « Les étudiants qui entrent en troisième année de licence n’ont jamais connu une année normale, illustre François Sarfati, professeur de sociologie à l’université d’Evry. Certains contenus ont été allégés pendant leurs deux premières années. Nos étudiants n’ont par exemple pas pu mener les enquêtes de terrain prévues durant leur cursus. Il va falloir rattraper ce qui n’a pas été fait. » Un autre enseignant-chercheur va plus loin en expliquant, sous le couvert de l’anonymat : « Les établissements d’enseignement supérieur se sont assurés depuis deux ans que les taux de succès aux examens ne chutent pas trop, à l’image de ce qui s’est passé dans le secondaire avec le bac. Cela va nécessiter de s’adapter au niveau réel des étudiants que nous retrouvons aujourd’hui… »

    « Les étudiants vont-ils exiger plus de souplesse, d’individualisation, pour les cours, les examens, comme ce qu’ils ont eu pendant des mois ? », Aurore Chaigneau, UFR de droit de Paris Nanterre

    Parole d’enseignants, la relation avec les étudiants ne sera sans doute plus tout à fait la même après la période vécue. « Les étudiants vont-ils dorénavant exiger de l’institution et des enseignants plus de souplesse, voire d’individualisation, dans l’organisation des cours, des examens et de la relation pédagogique, à l’image de ce qu’ils ont eu pendant des mois ?, s’interroge Aurore Chaigneau, codirectrice de l’UFR de droit et sciences politiques de l’université Paris Nanterre.
    Détresse étudiante

    Et quid de tous les étudiants que la période a fragilisés économiquement et psychologiquement pour plus longtemps, faute de jobs étudiants et de socialisation digne de ce nom ? « Ce n’est pas parce que la crise sanitaire s’éloigne que la misère et la détresse étudiante vont disparaître en un claquement de doigts, prévient Olivier Ertzscheid, maître de conférences en sciences de l’information à l’université de Nantes. Evidemment que ces éléments ont un impact pédagogique qu’il faut anticiper et prendre en compte en abordant cette nouvelle année », même si les leviers ne sont pas entre les mains des enseignants.

    Cela fait selon lui deux ans que les enseignants-chercheurs, loin de leurs missions premières d’enseignement et de recherche, « font aussi parfois du social » pour soutenir leurs étudiants en difficulté. Une évolution du métier dont il se serait bien passé, et qui lui fait espérer que « rien ne perdure de ces mois de crise », et que cette nouvelle année, normale, permette « d’oublier tout cela, et vite ! ».

    #Education #Université #Olivier_Ertzscheid