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  • Entretien avec Le Comptoir (2018)
    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=1037

    Toujours en librairie : Manifeste des Chimpanzés du futur contre le transhumanisme. Voir ici

    Nous avons publié à l’automne 2017 un Manifeste des Chimpanzés du futur, contre le transhumanisme (Editions Service compris), suivi de multiples réunions-débats à travers la France, et d’échanges comme celui-ci avec le site du Comptoir (http://comptoir.org) Le transhumanisme n’est pas une idéologie parmi d’autres, mais l’idéologie dominante de la mécanocratie, la classe dirigeante qui détient les mékhané, les moyens/machines – c’est le même mot en grec - de la puissance. Avoir, savoir, pouvoir. Le transhumanisme a une histoire. Il ne s’est pas toujours nommé ainsi et il changera encore de nom, dès que celui-ci sera devenu infâme, comme il s’est déjà débarrassé du nom d’« eugénisme », trop compromis par les (...)

    « http://comptoir.org » #Documents
    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/entretien_avec_le_comptoir_2018.pdf

  • « Je ne veux pas m’inquiéter toute ma vie pour une autre personne » : elles ont décidé de ne pas avoir d’enfants et l’assument
    Gaëlle Dupont, Le Monde, le 24 février 2018
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2018/02/24/elles-ont-decide-de-ne-pas-avoir-d-enfant-et-l-assument_5261898_3224.html

    Non, elles ne sont pas malheureuses ; non, elles ne changeront pas d’avis ; non, elles n’ont pas peur de se retrouver seules quand elles seront vieilles. Mais oui, elles aimeraient que la société change de regard sur elles, les femmes qui ont choisi de ne pas avoir d’enfants. « Je ne suis pas un monstre », lance Cyrielle, 30 ans, une jeune femme sans enfants qui entend bien le rester, en réponse à un appel à témoignages lancé sur Lemonde.fr. Le dernier bilan démographique de l’Insee l’a montré : si la natalité reste élevée en France par rapport aux autres pays européens, les Françaises, en particulier celles âgées de 25 à 34 ans, font de moins en moins d’enfants (1) . L’indicateur de fécondité s’établit à 1,88 enfant par femme (contre 2 en 2012).

    Quelle est la part, dans cette évolution, de celles et ceux qui ont choisi de ne pas engendrer ? « On ne peut pas leur attribuer cette baisse, analyse la sociologue Anne Gotman. Mais ils y participent. » La part des personnes définitivement sans enfants augmente depuis les années 1970. Selon les derniers chiffres publiés par l’Institut national d’études démographiques, aujourd’hui en France 6,3 % des hommes et 4,3 % des femmes de 15 à 49 ans déclarent ne pas avoir d’enfants et ne pas en vouloir.

    « Depuis toujours, je sens au fond de moi que la maternité, ce n’est pas pour moi, et de plus en plus de personnes de ma génération remettent en cause l’ordre naturel des choses », confirme Virginie, 28 ans. Les réseaux sociaux, les forums et groupes Facebook rendent visible le phénomène et permettent d’échanger. « Grâce à eux, je me sens moins isolée », témoigne Cécile, 22 ans. Certains flairent même le filon commercial : des voyagistes proposent désormais des hôtels et restaurants sans enfants – une offre qui reste très rare en France.

    Signe d’une libération de la parole, de très nombreuses femmes de tous âges ont répondu à l’appel lancé sur Lemonde.fr. Elles sont issues de milieux sociaux divers et, contrairement aux idées reçues, la plupart sont ou ont été en couple. Elles ont un point commun : la colère. Parce que leur choix suscite au mieux l’incrédulité, au pire la réprobation. « C’est universel, poursuit Cécile. Les gens me demandent pourquoi, me disent : “Tu changeras d’avis quand tu rencontreras la bonne personne.” C’est très infantilisant. »

    Les questions sur leurs motivations les agacent. « Quelqu’un qui veut des enfants n’a pas à s’expliquer, contrairement à quelqu’un qui n’en veut pas », relève Matilda, 22 ans. « Je n’ai jamais eu le désir d’enfant, tout simplement, résume Audrey, 37 ans. Pas besoin de chercher telle ou telle cause. » La crainte des « douleurs de l’accouchement », des « signes indélébiles » de la grossesse est parfois évoquée. Certaines affirment sans détour ne pas aimer les enfants, ces êtres bruyants autour desquels le monde des autres adultes semble tourner. « Je ne les supporte pas s’ils sont un tant soit peu turbulents », lance Charlotte, 28 ans. « Je n’ai jamais été attirée par les bébés, affirme Carla, 31 ans. Ils me font peur, je ne les trouve pas mignons. »

    Mais ce sentiment n’est pas forcément partagé. Aurélie, 35 ans, se dit « complètement gaga de [s]es neveux et nièces ». « Avec mon conjoint, nous sommes instituteurs, nous avons une très bonne relation avec les enfants », témoigne également Anne, 60 ans. Nombreuses sont celles qui apprécient les enfants... des autres. Car un point fait l’unanimité : un enfant, c’est une « charge », un « poids », un « fil à la patte », bref, un gêneur. « Je ne supporterais pas qu’une tierce personne vienne désaxer mon couple », témoigne Julie, 29 ans. « Je ne veux pas m’inquiéter toute ma vie pour une autre personne », affirme de son côté Alexandra, 32 ans. Pour elles, faire un enfant est une décision irréversible dans un monde angoissant.

    Séverine, 31 ans, au chômage, redoute l’instabilité qui l’entoure. « Le CDI est en voie de disparition, relate-t-elle. Plus rien n’est sûr. Si j’ai un enfant, comment savoir qu’il ne manquera de rien ? Je peux perdre mon emploi, mon mari peut me quitter. Je le vois autour de moi. Moi, ça m’angoisse, je n’ai pas le cran. » Beaucoup de « sans enfants » voient encore plus loin, s’inquiètent de la violence du monde, et surtout de la dégradation de l’environnement, qu’elles associent à la surpopulation. On leur reproche leur égoïsme ? Elles retournent l’argument. « C’est l’envie d’enfants qui me paraît égoïste et irraisonnée : dans un monde pareil, sérieusement ? », s’étrangle Déborah, 29 ans. « Je m’inquiète beaucoup plus pour les générations futures que ceux qui font des enfants sans réfléchir », renchérit Sabine, 65 ans.

    Au contraire, être sans enfants présente de nombreux avantages : avoir du temps pour soi, pour les autres, pour sa carrière... « Nous avons beaucoup de projets professionnels et personnels, pratiquons de nombreux loisirs, voyageons beaucoup, aimons inviter nos amis pour des soirées arrosées à refaire le monde, allons au spectacle, aimons lire... bref vivre », écrit une femme de 35 ans. « J’ai préféré passer mes nuits à discuter, écrire, lire ou danser, plutôt qu’à changer des couches », renchérit Michèle, 67 ans. Ne pas avoir d’enfants, c’est aussi faire durer sa jeunesse. « Nous menons une vie d’adolescents à la retraite », résume Anne.

    Pour plusieurs de ces femmes, leur propre mère est un contre-modèle. « La femme qui court toute la journée, qui travaille avec trois enfants, aux petits soins pour tout le monde, première partie, dernière rentrée, poursuit Anne. Je ne pouvais pas vivre ça, l’idée m’était insupportable. » Beaucoup rejettent la « charge mentale » qui pèse sur les femmes, et à travers elle la norme qui veut qu’en France il faut travailler et avoir des enfants (si possible deux). De nombreuses femmes ralentissent leur carrière, voire s’arrêtent de travailler pour élever leurs enfants. Les « childfree » (« libres d’enfants », le néologisme vient des Etats-Unis) choisissent un autre chemin pour vivre comme elles l’entendent.

    Un choix renforcé par ce qu’elles perçoivent de la vie des parents. « Je ne vois pas d’avantage à avoir des enfants, relève Edith, 27 ans. En revanche, une journée passée à entendre mes collègues me suffit à dresser une longue liste d’inconvénients (nuits blanches, contraintes horaires, dépenses, angoisses). »

    Les propos des femmes « childfree » prennent souvent des accents féministes. Car la pression sociale pèse particulièrement sur elles. « Mes frères ne veulent pas d’enfants, ça passe, témoigne Virginie. Moi, ça ne passe pas du tout. » « Dans l’esprit de la plupart des gens, une femme doit avoir des enfants, résume Séverine. Elle ne peut pas être heureuse autrement. » Celles qui dérogent à cette norme ont le sentiment de passer pour « une demi-femme », « une femme sans cœur ». D’autres évoquent un « défaut inavouable », une « hérésie », un « tabou ». Elles doivent faire face en particulier à l’incompréhension de leurs parents. Même au travail, la disponibilité des « childfree » est bienvenue, mais leurs absences et leur fatigue moins bien tolérées, car non justifiées par la présence d’enfants.

    Alors certaines, comme Corinne, 54 ans, revendiquent haut et fort de ne pas être « un utérus sur pattes ». D’autres manient l’humour, d’autres encore prétendent qu’elles sont stériles. Alors, on les plaint. Le regard du corps médical est jugé particulièrement infantilisant. Beaucoup de jeunes femmes ont fait des démarches en vue d’une stérilisation, sans succès. « J’aimerais juste qu’on me laisse tranquille avec ça et qu’on arrête de se mêler des affaires de mon corps », lâche Laureline, 37 ans. Selon les « sans enfants », leurs contradicteurs essaient surtout de se rassurer sur leurs propres choix. « Les gens ont peur de ce qui sort de la norme », tranche Carla.

    (1) Baisse de la natalité : il faut redonner du sens à la politique familiale
    Editorial, Le Monde, le 16 janvier 2018
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2018/01/16/redonner-du-sens-a-la-politique-familiale_5242418_3232.html

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    «  Le mouvement “childfree” contient l’idée d’un vrai choix  »
    Gaëlle Dupont, Le Monde, le 24 février 2018
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2018/02/24/le-mouvement-childfree-contient-l-idee-d-un-vrai-choix_5261967_3224.html

    #Anne_Gotman est sociologue, directrice de recherche émérite au CNRS-Centre de recherche sur les liens sociaux. Elle a publié Pas d’enfant, la volonté de ne pas engendrer, en 2017 (Editions de la Fondation Maison des sciences de l’homme).

    Sur les réseaux sociaux, de plus en plus de personnes se revendiquent « childfree », ce phénomène est-il nouveau ?

    La volonté de ne pas engendrer a toujours existé dans l’histoire, mais au niveau individuel. Ce qui est nouveau, c’est la naissance d’un mouvement collectif de personnes qui s’identifient comme « childfree », c’est-à-dire « libre d’enfants ». Elles étaient auparavant appelées « childless », sans enfants, un terme qui avait une dimension jugée trop négative. « Childfree » contient l’idée d’un choix. Il correspond à une prise de conscience. Ce mouvement identifiable aujourd’hui sur les réseaux sociaux est né à la fin du XX e siècle dans des associations américaines. Aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, certains militent même pour disposer de « childfree zones » (zones sans enfants), être déchargés de tous les impôts liés à la scolarisation des enfants... Cela témoigne d’une forme de fragmentation de ces sociétés.

    Sont-elles de plus en plus nombreuses ?

    Les personnes sans enfants ont été plus nombreuses dans le passé. En France, au tournant du XX e siècle, près de 25 % des femmes n’avaient pas d’enfants. Le taux d’infécondité a connu un minimum dans les années 1940. Parmi les femmes nées à cette époque, seule une sur dix n’a pas eu d’enfants. Il remonte depuis les années 1970 dans de nombreux pays de l’OCDE. Aujourd’hui, l’infécondité définitive atteint en France 21 % des hommes nés entre 1961 et 1965, et 13,5 % des femmes nées à la même époque.

    Ces personnes n’ont pas toutes choisi de ne pas avoir d’enfants...

    Non, on estime à 3 % la part due à l’infertilité médicale. Les autres se divisent en deux catégories : les early articulators, qui savent très jeunes qu’ils n’auront pas d’enfants, des femmes le plus souvent, et les postponers, ceux qui remettent à plus tard : ils ont envie à un moment de leur vie mais n’ont pas l’occasion, puis ont de moins en moins envie.

    Quel regard est porté sur ces personnes en France ?

    Il est passé d’une condamnation virulente à une vision interrogatrice, voire réprobatrice, mais plus embarrassée qu’accusatrice. Si une personne dit qu’elle n’a pas d’enfants, la conversation s’arrête, le plus souvent l’interlocuteur n’ose pas demander pourquoi, c’est quelque chose de gênant. Les personnes sans enfants en France le vivent très mal et réagissent de façon virulente. C’est une nouveauté. Elles ne veulent plus rester dans la marge et veulent elles aussi faire partie de la norme. En Allemagne, par exemple, où 25 % des femmes nées en 1968 sont sans enfants, les choses sont différentes. Il y a là-bas une véritable culture des familles sans enfants.

    Ce regard a-t-il changé au cours de l’histoire ?

    Il était infiniment plus négatif par le passé. Dans l’Antiquité, le « célibat », qui était alors la condition pour ne pas avoir d’enfants, était très violemment condamné. Les philosophes des Lumières, les révolutionnaires ont été féroces à l’égard des célibataires, considérées comme « homicides d’eux-mêmes et de leur postérité ». C’était aussi une attaque contre l’Eglise. Car celle-ci est ambivalente. Elle prescrit le mariage pour les êtres imparfaits et interdit toute relation sexuelle sans procréation, mais exige le célibat, donc l’absence d’engendrement, pour les prêtres.

    Qui sont les « childfree » ?

    Selon une idée reçue, il s’agirait de personnes très diplômées appartenant à des catégories socioprofessionnelles élevées. C’est en partie vrai. En Grande-Bretagne, 50 % des femmes qui œuvrent à des postes à responsabilité n’ont pas d’enfants. La première ministre, Theresa May, comme d’autres hauts responsables européens (Angela Merkel, Emmanuel Macron, Jean-Claude Juncker), en est un exemple. Mais en valeur absolue, les « childfree » demeurent beaucoup plus nombreux dans les classes moyennes et inférieures. Il s’agit aussi d’un phénomène populaire.

    Quelles sont leurs raisons ?

    Un mélange de causes intimes et sociétales. Au niveau personnel, le fait de ne pas vouloir d’enfants a, selon moi, plus à voir avec le passé qu’avec le futur. Cela ne veut pas dire que ces personnes ont forcément eu une enfance malheureuse, mais elles veulent se situer à part dans la généalogie familiale. Il y a dans le refus de transmettre un refus de recevoir (ne rien devoir à autrui) et un refus de la dépendance. Simultanément, il y a une peur d’y laisser une partie de soi. Parmi les « childfree », l’enfant est vu comme menaçant, voire dévorant.

    La volonté de ne pas donner naissance dans un monde menacé par l’effondrement écologique est souvent citée...

    C’est une raison qui vient couronner le choix mais qui n’est pas motrice. De nombreuses évolutions sociétales peuvent expliquer le phénomène. L’évolution des couples, par exemple, et leur instabilité. Dans le même temps, vous avez des personnes qui veulent vivre une relation « pure », sans risquer de l’abîmer avec l’arrivée d’une tierce personne. L’évolution du marché du travail, qui offre des opportunités quasiment équivalentes aux hommes et aux femmes, joue également un rôle. Cela pose des questions sur la compatibilité entre travail domestique et carrière. La place de l’enfant, enfin, a changé. L’accès à la contraception fait que, quand il arrive, l’enfant a été désiré. Pour les parents, il doit naître et grandir dans de bonnes conditions, ce qui représente des coûts croissants d’éducation et de consommation. Un coût humain aussi, car s’occuper d’enfants n’est aujourd’hui pas forcément vu comme une activité épanouissante.

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    #Baleines noires : aucun #baleineau observé jusqu’ici cette saison
    Radio Canada, le 26 février 2018
    http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1085894/baleines-noires-atlantique-nord-naissances-baleineaux-petits-filets

    #childfree #no_kids #nullipare