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  • DU CUI AU PEC : Chronique d’une matinée avec le DRH | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/pauline-menguy/blog/150918/du-cui-au-pec-chronique-dune-matinee-avec-le-drh

    Monsieur le directeur RH nous reçoit. Nous sommes une quarantaine de travailleurs de plus de 58 ans et de travailleurs #handicapés dans la salle. Des travailleurs qui n’ont pas leur place dans la « start up Nation ».

    L’accueil est cinglant :
    « Ce sont vos derniers six mois, après celui-ci vous ne signerez plus de contrat avec la ville. »

    « Je suis désolé de devoir vous l’annoncer. Nous sommes là pour vous donner les pistes qui vous permettront déjà de bien comprendre ce qui vous arrive et de prendre les dispositions nécessaires pour que vous puissiez à nouveau prétendre à un emploi pérenne par la suite.
    Rencontrez votre conseiller Pôle Emploi. Vous allez me dire, c’est pas facile quand on a déjà 60 ans, mais toutes les situations sont uniques. Ce n’est pas moi qui vais répondre à votre problème, c’est votre employeur. »

    Le type est odieux, les voix s’élèvent. Au fond de moi j’espère une insurrection. Je commence à retranscrire tous les échanges. Une façon de prendre du recul certainement en me donnant une contenance, un rôle.

    « Vous devez faire des efforts pour améliorer votre CV. Il est temps de se prendre en charge. Aujourd’hui on est entré dans le 21ème siècle, vous vous devez d’être connecté » Il est épaulé par Soraya une conseillère Pole Emploi qui nous rappelle gentiment que le contrat aidé n’est pas un vrai travail, que nous sommes des chercheurs d’emploi.
    « Je bosse 35 heures pour la Ville et vous me dites que je n’ai pas de #travail ? », interrompt une femme. « Le but du CUI est de monter en autonomie, un assisté n’intéresse pas un employeur ». Le type n’hésite pas sur la forme.
    « Vous croyez que c’est simple ? » lance un autre. « Ce n’est pas moi qui vous le reproche c’est la #société mon cher monsieur. »

  • #Éducation prioritaire | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/marc-bablet/blog/250918/education-prioritaire

    On ne peut être que scandalisé par la manière dont on cherche en ce moment à remplacer dans des séminaires d’IEN de ce mois de septembre un Roland Goigoux qui est une vraie référence en matière de lecture par Franck Ramus qui, à ma connaissance n’a guère travaillé dans les classes et qui, s’il connaît le cerveau, ne connaît pas l’#enseignement… Or, j’y reviendrai, pour travailler utilement pour les apprentissages en milieu populaire, il ne suffit pas de connaître en laboratoire les apprentissages, il faut connaître les conditions scolaires de leur réalisation. Car les enseignants sont chargés de faire apprendre leurs élèves à l’école pas en laboratoire sous un scanner…Si on continue comme cela, on ratera l’essentiel et tout espoir de voir évoluer les résultats inégalitaires de l’école française. En outre, on peut craindre que derrière ces façons d’aborder les questions, il n’y ait l’idée qu’il serait souhaitable de modifier très profondément l’école au point de ce qui s’est fait par exemple en Suède avec le succès que l’on sait (voir le Monde diplomatique de septembre 2018). C’est la seule manière que j’ai de comprendre la haine de la sociologie et des sciences de l’éducation qui règne en ce moment au ministère.

  • Poudre de perlimpinpin élyséenne | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/paul-cassia/blog/160918/poudre-de-perlimpinpin-elyseenne

    L’information se présente comme une fake news ou, à tout le moins, une parodie : évidemment que la présidence de la République française ne commercialise pas un T-shirt bardé de la mention « poudre de perlimpinpin » ! Un président de la République française qui a été élu sur l’engagement de restaurer la gravité de la fonction ne saurait tomber si bas ! Au demeurant, quelle administration, quelle entreprise privée, pourrait ainsi s’auto-discréditer et, s’agissant de l’Elysée, discréditer le cœur de la République, en se vendant au public comme pourvoyeuse de « poudre de perlimpinpin » ?

    #gorafi_encore_plagié #élysée #politique #capitalisme

  • La crise du « Média » : une tentative de diagnostic sociologique | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/dominique-g-boullier/blog/210818/la-crise-du-media-une-tentative-de-diagnostic-sociologique

    par Dominique Boullier

    Un projet ambitieux comme Le Média demande de mobiliser des compétences et des visions différentes qui doivent trouver une synergie. Mais le débat n’est pas cadré de la même façon par tous. Plusieurs principes supérieurs semblent être entrés en conflit (le business, la réputation, l’expertise journalistique, le militantisme). Ils sont pourtant tous nécessaires à la survie du projet du Média.

    Un projet ambitieux comme le média demande de mobiliser des compétences, des références, des visions différentes qui doivent trouver une synergie, toujours provisoire et donc révisable, c’est même la condition de la survie. Mais il est parfois difficile d’identifier les origines de ces différences car le débat n’est pas cadré de la même façon par tous. L’entrée dans une « épreuve de justification » peut donc être favorable à condition de ne pas devenir un exercice de démolition réciproque, ce qui semble s’être passé pendant le séminaire de juillet.

    Plusieurs mondes et plusieurs principes supérieurs semblent être entrés en conflit et ils sont pourtant tous nécessaires à la survie du projet du média. Le problème est un bien un problème d’accord entre des principes, de dosage du compromis qu’il faut de toutes façons trouver. La solution n’est pas dans une purification des principes (car il y en a plusieurs précisément) ni dans un arrangement pour tenir bon et masquer les différends car ils reviendront en force de toutes façons.

    Quatre principes semblent contribuer au média et donc à sa gouvernance et sont représentés par des personnes différentes, porteuses d’une vision plutôt que d’une autre.

    1/ Le premier principe est celui du business, de la rentabilité, de la performance du projet sur un marché concurrentiel, etc.

    2/ Le deuxième principe supérieur qui domine nécessairement dans un média, c’est celui de l’opinion, qui est devenu désormais celui de la réputation. Un média joue avant tout dans ce registre, d’autant plus pour le média qui était d’emblée une cible privilégiée des concurrents. La réputation médiatique se gagne avec des alliés qui ont déjà de la réputation, ce qui est un cercle vicieux, c’est vrai mais chacun le constate à la télévision où l’on invite toujours les gens connus …par les médias (et donc les gens des médias eux-mêmes d’ailleurs, d’où cet effet de connivence qui fait perdre pied avec le réel).

    Comme on le voit, les deux principes supérieurs qui ont été les plus actifs sont le business et la réputation (ou l’opinion). Or, ce sont précisément ceux qui dominent notre monde financiarisé et qui le mènent à sa perte. Le projet du média se devait de rééquilibrer cela par deux autres principes qui avaient été annoncés et qui ont eu bien du mal à s’exprimer.

    3/ Le troisième principe qui était au cœur du projet, c’est bien l’expertise journalistique, au sens d’un savoir-faire professionnel, qui soit réinventé et retrouvé contre sa dénaturation par le business et la réputation dans les médias dominants. Le démarrage avec des professionnels du journalisme était de ce point de vue une garantie qu’on n’allait pas avoir la radio de campus sympa mais totalement amateur ni le canal militant de la bonne parole certifiée.

    4/ Le quatrième principe qui est au cœur du projet du média, c’est le militantisme, on appelle ça en sociologie pragmatique le principe civique, celui de la mobilisation des citoyens, de leur contribution. Sur ce plan, le nombre est toujours un critère décisif. Or, les socios sont particulièrement nombreux et leur capacité à soutenir le projet a été un principe nettement différenciant par rapport à tous les autres nouveaux médias. Cette référence au nombre, au pouvoir du collectif et aux règles juridiques qui le reconnaissent comme dans toutes les institutions, a été souvent mobilisée pour protester contre la mise à l’écart des socios du processus de décision. Ce qui d’un strict point de vue business, ou réputation ou journalistique n’est pas un problème : c’est avant tout parce que le média porte ce principe du pouvoir du collectif que la question se pose.

    Instituer pour garder l’élan vital

    C’est le dernier point que je peux mettre en débat là aussi. L’élan vital doit être préservé et tout ce qui a contribué à des postures mortifères doit être réparé et cela ne peut se faire que par un débat qui admette la difficulté du compromis à trouver. Instituer, ce n’est pas tuer le projet, ce n’est pas le normaliser, c’est au contraire lui donner une chance de vivre en donnant sa place à chacun, selon de nouvelles règles et de nouveaux équilibres plus explicites. (Vitam instituere dit Legendre, c’est la fonction des institutions , garantir les places de chacun).

    #Médias #Journalisme #Sociologie_pragmatique

  • A qui profite le sale ? | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/benjamine-weill2/blog/150818/qui-profite-le-sale

    Alors que la France a célébré la victoire de son équipe de football, supposée représenter son ouverture et sa diversité, les débats entre ceux qui revendiquent la dimension cathartique de la vulgarité des slogans dans les stades et ceux qui déplorent cette culture de masse comme étant avilissante, ont fait rage. Sauf qu’au-delà du bien-fondé ou non de l’amour du football, n’est-ce pas surtout la question de la bienséance qui s’y niche ? Ce fameux « bon goût à la française » si précieux à « notre » culture, mais que personne ne saurait finalement définir ? Ce qui est sûr, c’est que le mauvais goût, le vulgaire, le sale doivent être bannis de ce qui « représente la France », en tout cas en surface.

    L’image donnée au monde se veut lisse, diverse, ouverte, politiquement correcte. Mais entre les relents racistes qui entourent les institutions qui mènent le jeu footballistique et les révélations d’agressions sexuelles dans les fans zones, difficile de faire la part des choses entre ce qui est sale et ce qui ne l’est pas. Les affres des supporters peinent à être mis en exergue afin de ne pas gâcher la fête. L’image de cohésion et d’amour collectif que l’on cherche à traduire et la question des origines des joueurs restent tabous. Bref, le vulgaire, le sale, le mauvais goût semblent plus facile à dénoncer quand ils ne touchent pas à la grandeur de la France.

    video

    Souvent, voire systématiquement, pointée du doigt dans le rap français, la vulgarité semble se cantonner à ce domaine. Quand Médine souhaite faire le Bataclan, l’insurrection vient des défenseurs de l’ordre moral qui y voient blasphème républicain et mauvais goût. Quand il est question que Damso chante l’hymne des Diables Rouges, le peuple se soulève contre cette « erreur de casting » vu la vulgarité du bonhomme. Pourtant, l’hymne de l’union Belge a été confiée à Grand Jojo, comme le précise Mekolo Biligui, blogueuse et journaliste rap pour le magazine iHH, chroniqueuse radio dans le VRF Show sur Radio Campus Paris, dans le Toho-Bohu sur Radio VL, qui dit dans Tiens c’est la belle vie « ma nourrice était négresse, c’était une noire avec des tresses quand je prenais le sein j’aimais ça, ça goûtait le chocolat ». A croire que le racisme ouvertement exprimé vaut mieux que la régression au stade anal et que l’humour à caractère sexuel ne vaut qu’à condition d’être cantonné au sport. Dans le cadre de cette communion nationale, les dérives sont socialement acceptables (tant racistes que sexistes), mais dans le rap tout est suspect. L’un et l’autre relève pourtant des mêmes mécanismes : la catharsis, la sublimation, le dépassement de soi pour rejoindre le collectif, le sentiment d’appartenance.

    Un texte en fait très puritain qui valide l’équation sexe = saleté et vulgarité. Il réussit aussi le tour de force de faire passé les agressions sexuelles infligées aux femmes pour un simple problème d’hygiène. L’activation de l’argument de la « catharsis » ou « la sublimation » est unilatérale comme d’habitude, puisque on ne catharsis que les machos porteurs de couilles. C’est un peu comme de mettre en valeur l’aspect cathartique pour les blancs racistes de chants qui légitimeraient et inciterait au lynchage des noirs.

    #misogynie #hygiène #puritanisme #catharsis #sexisme #rap #foot #virilité #culture_du_viol

  • Canopé propose un escape game ou les élèves peuvent jouer le rôle d’Himmler....

    Plongeons dans l’histoire avec l’escape-game...
    https://occitanie-canope.canoprof.fr/eleve/apprendre-par-le-jeu/escape-game-educatice_eleve

    RÉSEAU CANOPÉ
    Placé sous tutelle du ministère de l’Éducation nationale, Réseau Canopé édite des ressources pédagogiques transmédias (imprimé, web, mobile, TV), répondant aux besoins de la communauté éducative. Acteur majeur de la refondation de l’école, il conjugue innovation et pédagogie pour faire entrer l’École dans l’ère du numérique.

    • On peut débattre de l’intérêt des jeux de rôles dans l’enseignement de l’histoire. Je suis de ceux qui doutent fortement de la capacité de ces activités pour construire un savoir historique structuré, de ceux qui craignent que cela ne serve que la collecte d’informations disparates.

      Mais quels que puissent être nos avis sur la question, est-il moralement possible de faire jouer à des élèves le rôle d’un responsable nazi ? Surtout quand il s’agit de leur demander de jouer le rôle d’un théoricien du racisme et de l’extermination des juifs.
      C’est pourtant ce que fait le réseau Canopé avec la conception et la diffusion d’un escape game où les élèves sont invités à jouer le rôle d’Himmler.

      Et face à l’élève qui déclamerait avec fougue devant ses camarades de classe les paroles tenues par Himmler pour inciter les officiers SS à faire preuve de détermination dans l’extermination des juifs, que devra faire l’enseignant ? Le féliciter de la qualité de sa recherche documentaire ?

      Et l’élève dont le grand-père ou l’arrière grand-père est mort dans les camps d’extermination, faudra-t-il lui demander de produire un discours vantant l’extermination ?

      Et l’élève qui, vivant dans une famille d’extrême-droite prendra un intérêt pervers à jouer ce rôle et à le prendre en prétexte pour dire ce qui est impossible de dire à l’école ....

      Les concepteurs de ce jeu sont des apprentis sorciers. La frénésie avec laquelle ils défendent leur volonté de transformer l’enseignement à partir de situations ludiques les prive de tout jugement. Eux et ceux qui semblent prêts à valoriser ce jeu dans le cadre de Ludovia.

      Si jamais le ministre devait se rendre à Ludovia... nous lui serions gré de tenir un discours de raison sur ce sujet.

      https://blogs.mediapart.fr/paul-devin/blog/150818/les-apprentis-sorciers-de-canope

    • Moi j’y crois. Une série télé qui se passe en pleine Écosse du 17eme m’a apporté autant qu’un musée sur l’histoire franco-anglaise. Je sais qu’un exemple et même 1000 exemples ne sont pas une preuve, mais cognitivement, l’esprit retient mieux quand plusieurs sens sont actifs, alors quand le plaisir s’active, ça donne des points en plus...

    • Réaction – dans la journée – de l’auteur aux réactions suscitées par le premier billet – que l’on ne connait que par ce qu’en dit l’auteur puisque les commentaires sont désactivés.

      Les apprentis sorciers de Canopé (suite...) | Le Club de Mediapart
      https://blogs.mediapart.fr/paul-devin/blog/150818/les-apprentis-sorciers-de-canope-suite

      A en croire certains tweets de réaction, le billet de ce matin procéderait de la seule volonté polémique d’un antipédagogue partisan du retour aux fondamentaux et opposant à toute forme de modernisme pédagogique.

      Une polémique gratuite ?

      Non, pas une polémique mais une question essentielle : est-il raisonnable au sein du service public d’enseignement de proposer aux élèves de jouer avec le personnage d’Himmler ?

      J’admets que l’expression « j’ai été Himmler » n’a pas été utilisée par Canopé mais par É’scape qui l’a supprimée de sa page dans la journée. Mais c’est dommage que Ludovia ou Canopé n’aient pas réagi lors de cette publication qui proposait de mettre des élèves dans le rôle d’Himmler. D’autant plus dommage que la présentation sur le site de Canopé n’est pas sans ambiguïté puisqu’il s’agit d’identifier un des groupes du jeu avec le personnage d’Himmler. C’est tout de même problématique...

      En tout cas, la question de fond reste entière. Défendre une pédagogie du jeu ne peut suffire à faire l’économie de la question de la légitimité de ce type de mise en situation. 

      Une telle question, accusent certains, serait une stratégie conservatrice prônant le retour aux fondamentaux. Ceux qui lisent ce que j’ai pu écrire sur le sujet ou entendu mes interventions sur ce thème savent qu’il n’en est rien ! Quand à l’accusation d’antipédagogisme, voir sur le sujet :
      Ici ou ici

      La seule motivation du billet de ce matin est donc la question de la légitimité. Or dans toutes les réactions qu’on peut lire sur la toile, beaucoup d’enthousiasme, de plaisir de jeu, d’admiration technique... mais pas ce questionnement fondamental. C’est pourquoi, l’alerte à laquelle j’ai contribué est légitime et nécessaire.

  • L’art contemporain : une balise vers les gouffres | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/cuenod/blog/070818/lart-contemporain-une-balise-vers-les-gouffres

    Nous vivons en paix, paraît-il. Nous, c’est-à-dire l’infime partie repue de l’humanité Pourtant, tout est guerre parmi nous, autour de nous, en nous. Guerres entre groupes économiques, guerres entre religions, guerres entre pays, guerres entre générations ; guerres larvées, ouvertes, bruyantes, silencieuses ; guerres froides, tièdes, chaudes ; guerres bleues, saignantes, à point, très cuites. Et Annie Le Brun de citer le poète et agitateur libertaire William Morris (1834-1896) pour dénoncer l’origine de cette spirale belliqueuse : « Le système de concurrence illimitée ». L’hypercapitalisme financier a poussé le moteur de la concurrence vers ses régimes extrêmes. Désormais, à la concurrence entre entreprises s’est ajoutée la concurrence entre individus considérés comme des autoentrepreneurs, le mot moderne pour désigner les esclaves. Pour cela, il convient d’enserrer les humains dans des réseaux serrés de représentations divertissantes et abrutissantes qui les castrent de toute velléité de révolte. Pour mener à bien cette offensive vers l’aliénation massive, la banalisation de la laideur est devenue un impératif, d’où l’invasion de ce qu’Annie Le Brun nomme « le réalisme globaliste » . La beauté possède un potentiel révolutionnaire qui met en danger cette stratégie.

    L’art contemporain et la laideur comme stratégie

    Définir la beauté demeure aléatoire. Mais c’est justement cet aléatoire qui en fait une force libératoire. La beauté est indissociable de la surprise bouleversante qu’elle provoque chez celle ou celui qui en est traversé. « Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie », écrivait Lautréamont dans ses « Chants de Maldoror ». La beauté fait naître une émotion passionnée qui foudroie quiconque s’en approche. Désormais, pour cet heureux « quiconque » plus rien ne sera comme avant. Dès lors, la beauté met le feu aux poudres à l’intérieur de celle ou celui qui la vit. D’où risque d’explosion que la laideur du « réalisme globaliste » – avec ses MacDo gerbatoires, ses autoroutes grisâtres du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, son urbanisme d’un style benzodiazépine généralisé – s’efforce de désamorcer grâce à l’apport décisif de l’art contemporain qui banalise l’originalité et trivialise la poésie.

    Est-il besoin d’ajouter – oui, sans doute, considérant l’état confusionnel du temps présent – que cette émotion bouleversée par la beauté a pour ennemi l’émotivité, ce sentiment médiocre distillé par les gros médias pour distraire leur troupeau ? De même, la sensibilité est mise à mal par la sensiblerie. L’émotivité tente de bloquer l’élan passionnel enclenché par l’émotion née de la beauté et la sensiblerie désensibilise la sensibilité en la rabaissant dans le trivial. La beauté, voilà l’ennemie de ce que Le Plouc nomme la « société médiamercantile ».

    Il s’agit aussi d’extirper de ce paysage globalisé tout ce qui n’a pas de valeur marchande, d’où le titre de ce magnifique essai d’Annie Le Brun. La Joconde, devenue l’icône des selfies, doit rapporter plus que le prix d’un billet au Louvre, aussi l’installateur Jeff Koons (célèbre pour ses caniches en plastique et autres basses conneries de hauts prix) et l’inévitable famille Arnault – qui est au mécénat ce que la tribu d’Attila fut à l’art équestre – l’ont-t-ils transformée en sac à main Vuitton avec quatre autres victimes[1]. Le comble du mépris pour l’art et les artistes. On se demande si Vuitton-Koons ne vont pas un jour réduire la « Victoire de Samothrace » à l’état de balai de chiotte griffé.

    L’ « artfairiste » Kapoor lave plus noir que le noir le plus noir

    Le plus accompli et le plus cynique des entrepreneurs de l’art contemporain demeure Anish Kapoor qui s’est assuré à prix d’or (mais non connu) l’exclusivité de l’usage artistique du Vantablack.« Ce noir plus noir que tous les noirs » a pour particularité d’absorber la lumière à 99,965%. « De là son extraordinaire capacité d’abolir les formes. (…) Qui s’entêterait à vouloir (…) y discerner quelque chose ne verrait qu’un trou noir à la place d’un volume, celui-ci serait-il le plus irrégulier possible », explique Annie Le Brun. Kapoor dispose donc du monopole artistique de ce Vantablack. Juridiquement, il n’y a rien à redire. L’« artfairiste » est passé à la caisse. Politiquement, son investissement démontre à quel point l’art contemporain a partie liée avec l’hypercapitalisme financier et globalisé. Symboliquement, en acquérant le Vantablack qui efface les formes, Kapoor « devient un des maîtres de ce pouvoir d’indistinction » où tout est fonction, non de la beauté qui se dégage d’une œuvre, mais uniquement de sa valeur d’échange.

    « On pourra avancer que tout cela se limite à un milieu très restreint », ajoute Annie Le Brun. Erreur. « Tout cela » concerne chacun de nous, avertit la poète et essayiste : « Force est de constater qu’on se trouve là devant l’art officiel de la mondialisation, commandé, financé et propagé par les forces réunies du marché, des médias et des grandes institutions publiques et privées, sans parler des historiens d’art et philosophes appointés qui s’en font les garants. Cette entreprise-culture a toutes les apparences d’une multinationale, où se forge, se développe, s’expérimente la langue de la domination dans le but de court-circuiter toute velléité critique[2]. »

    La peur de la pensée conduit vers toutes les abdications et surtout au renoncement à cet infini en nous qui se fait jour chaque fois que la beauté[3]surgit. Alors, comment sortir de ces réseaux de représentations qui nous font accepter l’inacceptable ? En ayant un regard et du courage, conclut Annie Le Brun :

    « Innombrables sont les chemins de traverse pour y échapper, quand on veut bien prendre le risque de ne pas se tenir du côté des vainqueurs. Mieux, de s’en tenir au plus loin. Ce que j’en sais est qu’on ne s’y bouscule pas mais qu’on y respire beaucoup mieux et que, certains jours, même parmi les plus sombres, l’horizon peut s’éclaircir d’une soudaine et stupéfiante lumière. »

    Jean-Noël Cuénod

    Annie Le Brun – Ce qui n’a pas de prix, Beauté, laideur et politique – Editions Stock, collection les essais – 173 pages.

    J’en ai un peu marre de voire l’art contemporain réduit à Koons, Kapoor et Arnault, c’est un choix aussi de considéré ceci comme l’art contemporain et de réduire l’art à cette seule catégorie multi-milliardaire. Pour moi c’est pas ça l’art contemporain, ça c’est de l’art spéculatif contemporain, ca devrait interessé seulement les spéculateur·ices. Je vais pas voire ces expos, j’achète pas ces trucs, je m’en fiche d’eux et ce qu’ils pensent et ressentent du monde. Toutes les époques ont produit ce type d’art à la botte du pouvoir et aussi un tas de choses à la marge, et dont la qualité est rare selon les critères qu’on a là dessus. Pourquoi choisir de passer du temps sur Koons et ignoré les artistes marginale·aux tout aussi contemporain·nes ? Il n’y a probablement jamais eu autant d’artistes qu’aujourd’hui, et c’est pas la qualité qui manque (j’en connais pas mal alors c’est qu’il y en a vraiment beaucoup) et les seuls qui comptent sont ceux qui sont coté en bourse.
    Il y a en plus un gros fond de mépris du peuple dans cette manière de pensé les masses comme stupides. Que la peinture d’un vieux marchand d’armes de la renaissance, finisse sur des sacs à main, qu’est ce que ca peu nous faire ? C’est plutot sa place. Vinci c’était une sorte de Koons, en pire puisqu’il concevait des armes, participait à des assassinat politiques t pratiquait la peinture de manière accessoire. Alors déco de sacs à main LVMH il aurait probablement trouvé ca super du moment qu’il touchait les royalties.

    Sinon tous les trucs du texte qui dénonce la « sensiblerie » et la « trivialité » ca pue le virilisme. Triva est une déesse attachée aux femme (déesse des croisements) et ce sont les femmes qu’on accuse de sensiblerie, contrairement aux hommes qui eux s’adonnent virilement à l’histoire avec la grande H sans faire de sentiments. Et il réduit la révolte à un truc de mâles castrés ou pas castrés ;
    « Pour cela, il convient d’enserrer les humains dans des réseaux serrés de représentations divertissantes et abrutissantes qui les castrent de toute velléité de révolte. »

    Enfin ca me fait pensé à un truc vécu très souvent (mais heureusement pas toujours) quant je me présente. Quant je dit que je suis artiste, on me demandent si j’en vie (c’est à dire si il y a une valeure en € et $ pour mes dessins). Et là c’est toujours pareil lorsque cette question est posée. Si je dit non, la personne change de sujet et n’a plus aucun intérêt pour ce que je pourrait produire d’artistique qui n’est plus qu’un passe temps (un truc trivial, avec mépris du trivial qui va avec). Si je dit oui, alors la personne montre un intérêt pour mon travail, (avec même quelques manifestations de respect et considération, genre c’est sérieux, pas trivial) poursuit sur le sujet et demande à voire ce que je fait comme choses artistiques. En fait réduire l’art contemporain à Koons et à l’art spéculatif, c’est partagé cette mentalité qui n’accorde de la valeur et de l’intérêt que pour ce qui se paye en millions.
    Je voudrais tenté une définition de l’art, je voie l’art comme la transposition plastique de valeurs politiques individuelles et collectives. Est art pour chacun·e ce que chacun·e définit comme art selon ses propres critères. C’est un peu circulaire mais par exemple ca permet de concilié le fait que pour une personne au Dahomey du XVII° qui sculpte un vaudou en fer, cette personne ne fait pas de l’art mais plutot un truc religieux, mais une autre personne, par exemple un·e bourgeois·s blanc·he du XXI° peut y voire « de l’art » selon ses critères bourgeois blanc (esthétique, métaphysiques, financier, savoir faire, historicité...). Ca fait qu’on peut être aussi artiste tou·tes seul·e, pas besoin de reconnaissance extérieure. Mais ca fait aussi qu’on peu ne pas être reconnu. Ca fait qu’on peu voire Koons et Vinci comme des propagandistes du pouvoir, des publicitaires, plutot que comme des artistes.
    Enfin pour les sacs, je viens de me souvenir qu’un de mes dessins est sur un sac aussi. Et que ca m’aurais pas déplu d’avoir les royalties non plus...
    https://seenthis.net/messages/401711
    Ca me rappel la fin de No Logo ; la publicité (ou le capitalisme) récupère tout, y compris ma pomme.

  • Jérôme Turot : « La loi sur le droit à l’erreur ne protègera pas les contribuables » | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/emilie-durand/blog/070818/jerome-turot-la-loi-sur-le-droit-l-erreur-ne-protegera-pas-les-contr

    La loi « pour un État au service d’une société de confiance » vient d’être définitivement adoptée. On attend beaucoup d’un "droit à l’erreur" que la loi porte. De quoi parle-t-on ?
    Jérôme Turot : Le droit à l’erreur concerne essentiellement le problème des sanctions. Ce texte prévoit que lorsqu’un contribuable aura commis une erreur pour la première fois, l’Administration ne pourra lui appliquer une sanction, sauf à démontrer son absence de bonne foi.

    Cela protège-t-il le contribuable qui fait une erreur « de bonne foi » dans sa déclaration de revenus ? Sera-t-il exempté de pénalité la première fois ?

    Jérôme Turot :. En principe. Mais une seule fois dans sa vie. Une fois que vous avez fait une erreur, vous n’y avez plus droit. C’est une sorte de permis à point… avec un seul point, et sans récupération de point ! Le plus décevant, c’est que, même la première fois, votre droit à l’erreur n’est pas garanti car, selon le texte, l’Administration a quand même la possibilité de prouver votre mauvaise foi.

    C’est là qu’on constate que cela ne change pas grand-chose. Avant cette loi, en effet, l’Administration ne pouvait appliquer une pénalité sans démontrer la mauvaise foi. Mais, en pratique, lors d’un contrôle fiscal, le vérificateur part du principe que le contribuable est de mauvaise foi et lui applique assez systématiquement la pénalité de mauvaise foi.

    Certes le juge pourrait décharger cette pénalité de mauvaise foi en estimant que la mauvaise foi n’a pas été démontrée. Mais en attendant que le juge se prononce, le contribuable se verra tout de même infliger cette pénalité, et peut même craindre des poursuites pénales immédiates… Une menace qui le poussera à négocier et à accepter le redressement moyennant l’abandon de la pénalité. C’est, en réalité, le but dans lequel le vérificateur notifie cette pénalité...

    Qui distinguera l’erreur de mauvaise fois, la bienveillance de la pénalité ?

    Jérôme Turot : De plus en plus souvent, le vérificateur applique aujourd’hui la pénalité de mauvaise foi parce qu’il considère que cela mettra le contribuable dans de meilleures dispositions pour discuter. Rappelons que le but ultime est de faire accepter le redressement au contribuable et d’éviter ainsi le contentieux.

    Pour motiver la mauvaise fois, le vérificateur va, tout simplement, se prévaloir de la « nature du manquement » et du postulat que « le contribuable ne pouvait ignorer » qu’il faisait une fausse déclaration. Le contribuable est réputé ne pas ignorer le droit fiscal, y compris la jurisprudence qui ne cesse de préciser des lois obscures : tout Français doit lire les revues de jurisprudence fiscale…

    Pourtant le ministre Darmanin a expliqué que la loi s’appuierait sur le principe de la « faute avouée est à moitié pardonnée... »

    Jérôme Turot : Certes. Mais la petite mention « sauf si l’Administration démontre la mauvaise foi » gâche cette belle promesse. C’est là qu’on revient au système antérieur… Avez-vous remarqué que ce texte devait être prêt en juillet 2017, et qu’il a fallu un an de plus pour le mettre au point ? Il semble que ce retard soit du à la résistance des services, comme souvent, face à l’impulsion trop généreuse du ministre… Les pénalités représentent une manne budgétaire importante… comme les radars. Donc, de même qu’on installe plus en plus de radars, on applique de plus en plus de pénalités. Si l’on voulait véritablement instituer ce droit à l’erreur, on pourrait simplement écrire que « en cas de premier manquement à une obligation fiscale ou sociale, il n’y a pas de pénalité. » En ôtant à l’administration la possibilité de se faire juge de la bonne foi, et donc de refuser à son gré le droit à l’erreur.

    La loi n’aura donc aucun effet bénéfique pour les contribuables ?

    Jérôme Turot : Il faut reconnaître que sous le quinquennat précédent, on ne parlait pas de « droit à l’erreur ». On était entièrement dans la répression, l’accroissement des pénalités, l’allongement de la durée de prescription, etc. On doit honnêtement reconnaître aujourd’hui, grâce à cette loi, une amélioration du climat. Mais il faut que les services épousent ce changement, ce qui leur est difficile car, tout en proclamant le droit à l’erreur, Bercy impose à chaque service des objectifs croissants de rendement du contrôle fiscal. Les vérificateurs sont tenus de rapporter du gibier, ceux qui rentrent trop souvent bredouilles de leurs contrôles ne font pas carrière.

    Il me semble qu’il est prevu de licencié 20.000 agent·es du fisc, donc ca m’étonnerais que les employés qui restons aient le temps de faire dans le cas par cas. Je pense que cette loi est prévu pour absorbé un peu du mécontentement que va provoqué le nouveau système d’impots.

  • Quand la judéo-facho-sphère verse dans un racisme antimusulman délirant | Le Club de Mediapart

    https://blogs.mediapart.fr/guillaume-weill-raynal/blog/020818/quand-la-judeo-facho-sphere-verse-dans-un-racisme-antimusulman-delir

    Un mot, d’abord, sur cette expression « Judéo-facho-sphère », qui peut paraître provocatrice et outrancière, mais que j’assume pleinement. Le courant néoconservateur, on le sait, n’est pas sans lien avec la communauté juive et les réseaux pro-israéliens, que ce soit en France ou aux Etats-Unis. Le soutien inconditionnel à la politique israélienne a beaucoup contribué à fédérer des milieux hétéroclites, parfois issus de la gauche libérale qui, via la critique de certaines dictatures du tiers-monde, comme on disait alors, ont progressivement évolué vers une adhésion aux thèses très droitières sur le choc des civilisations, pour aboutir finalement à un racisme antimusulman totalement décomplexé. L’article d’Yves Mamou, publié le 1er août dernier sur Facebook apparait à cet égard comme un cas exemplaire.

    Yves Mamou n’est pas n’importe qui. Il a été journaliste durant plusieurs années à la rubrique Economie du Monde. Il est régulièrement invité sur les plateaux de la chaine israélienne francophone i24. Sa page n’est pas réservée à quelques internautes triés sur le volet. Elle est entièrement publique et compte plus de deux mille amis. Les publications quotidiennes qui y figurent font donc partie intégrante d’un débat public qu’elles contribuent à nourrir et à influencer. Il signe par ailleurs un livre, à paraître en septembre prochain, intitulé Intelligence avec l’ennemi, qui entend dénoncer une prétendue complicité des élites françaises avec l’islamisme. Un islamisme compris... au sens large. L’éditeur n’a pas encore fait connaitre le texte de la quatrième de couverture, mais Mamou l’a publié, toujours sur son mur Facebook, en juillet dernier : « L’islam et l’islamisme se propagent en France avec une facilité déconcertante : la multiplication du nombre de mosquées, de femmes voilées ou de commerces halal modifient à grande allure les paysages urbains. L’immigration musulmane augmente, le terrorisme islamiste meurtrit la nation mais la justice pourchasse comme raciste la moindre déclaration "islamophobe" ». Tout dans la nuance.

  • #Maladie de #Lyme: des citoyens se mobilisent | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/yves-faucoup/blog/260718/maladie-de-lyme-des-citoyens-se-mobilisent

    Le 19 juillet, plusieurs sociétés scientifiques reprochaient, dans un communiqué, à la Haute Autorité de Santé (HAS) d’avoir publié, au sujet du traitement de la maladie de Lyme, une recommandation ne répondant pas « aux critères de qualité » requises. Des sommités montent au créneau pour contester ce qui est demandé par des médecins et des associations de défense : à savoir que la maladie peut s’installer et devenir chronique, malgré le traitement antibiotique, et donc diagnostic et soins doivent en tenir compte. Déjà, la HAS avait beaucoup tardé à publier le 20 juin un Protocole national de diagnostic et de soins (PNDS), aussitôt cloué au pilori dès le 22 juin par l’Association française pour l’information scientifique (AFIS), ainsi que par l’Académie nationale de médecine (2 juillet). De son côté, les associations, dont France Lyme, considèrent que ce protocole comporte des imperfections, tout en reconnaissant des avancées. Ces affrontements, parfois assez violents, plongent dans le désarroi des patients de plus en plus nombreux ayant le sentiment de ne pas être pris en considération par les autorités politiques et scientifiques.

  • Nicaragua : « La droite vandale » | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/kassandra/blog/300518/nicaragua-la-droite-vandale

    Les têtes pensantes de certaines fractions de la gauche qui se prononcent dans le monde pour la défense de Daniel Ortega, devraient se demander – comme doit se le demander la CIA – pourquoi ces marches populaires sont accompagnées aussi par la musique et les chants insurrectionnels de la lutte contre la dictature de Somoza ?

    Ils pourraient alors constater que ces hymnes de bataille du peuple révolutionnaire, chantés et inspirés par les frères Carlos et Luis Enrique Mejía Godoy, le groupe vénézuélien Los Guaraguaos, les Chiliens Inti Illimani et la chanteuse argentine Mercedes Sosa, sont les mêmes qui sont entonnés 48 ans plus tard, dans les rues du Nicaragua, parce que les muchachos d’aujourd’hui, se battent avec le même patriotisme contre une autre dictature ; comme les muchachos d’hier !

    Un autre détail : si cette insurrection de la conscience et sans recours aux armes de tout le peuple n’avait pas un but patriotique, juste et démocratique, les Mejía Godoy et d’autres auteurs-compositeurs n’auraient pas créé, comme ils le font aujourd’hui, de nouvelles chansons inspirées et dédiées aux jeunes assassinés par les paramilitaires de l’ortéguisme. Même les adeptes du rap sont sensibilisés à cette lutte populaire.
    […]
    Tôt ou tard, cette crise trouvera son dénouement dans une société démocratique et, espérons-le, ne devra plus jamais faire face au continuisme dictatorial d’aucun autre opportuniste. La garantie de cette démocratie résidera dans les courants juvéniles sains inspirés par la révolution - et qui, avec leur lutte, inspirent un autre type de révolution -, libres de compromissions et de soumission à qui que ce soit.

    pour Carlos Mejía Godoy, cf. https://seenthis.net/messages/704134

  • Hold-up annoncé sur un pognon de dingue | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/ugictcgt/blog/020718/hold-annonce-sur-un-pognon-de-dingue

    Chemin faisant, nous en arrivons à cette dernière dépêche du 27 juin lorsque sort le rapport de la Cour des Comptes qui annonce que « les excédents dégagés par les administrations de Sécurité Sociale seront "plafonnés" à partir de 2019, le surplus devant servir à réduire le déficit de l’État pour un montant qui pourrait atteindre 24 milliards d’euros en 2022, selon la Cour des Comptes ».

    Tiens donc ? On nous annonce ainsi un véritable hold-up sur nos cotisations à la Sécurité Sociale. On nous estime même le montant du préjudice... Et puis fermez le ban... Rappelons au passage que ce forfait à venir a été inscrit dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP), adoptée en décembre avec le budget 2018 qui a prévu que ces excédents servent « à la réduction du déficit de l’État ». En clair, Macron va faire payer les milliards de cadeaux aux plus riches, les primes aux premiers de cordée, l’abandon de l’ISF en piquant l’argent de la protection sociale.

  • Sans paywall.

    Le moment néofasciste du néolibéralisme | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/290618/le-moment-neofasciste-du-neoliberalisme

    Comment penser ensemble la montée des extrêmes droites et la dérive autoritaire du néolibéralisme ? D’un côté, il y a le suprématisme blanc avec l’élection de Donald Trump, et en Europe, la xénophobie politique d’un Viktor Orbán ou d’un Matteo Salvini, mais aussi le fichage des chercheurs sur le genre et l’homosexualité en Hongrie ou celui des Roms en Italie, pour ne prendre que ces exemples. De l’autre, il y a ce qu’on peut appeler des coups d’État démocratiques : il n’est pas besoin d’envoyer l’armée contre la Grèce (« des banques, pas des tanks ») ni au Brésil (des votes et non des bottes) – même si les champions du néolibéralisme, comme en France, ne reculent pas devant les violences policières pour réprimer les mouvements sociaux qui leur résistent. Des deux côtés, les libertés publiques reculent. Et les deux phénomènes n’ont rien d’incompatible. L’Europe s’accommode désormais de l’extrême droite au pouvoir : en 2000, elle sanctionnait l’Autriche de Jorg Haider ; en 2018, celle-ci va en assumer la présidence avec Sebastian Kurz.

  • Privatisation des barrages français : un acte de haute trahison | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/bertrand-rouzies/blog/160618/privatisation-des-barrages-francais-un-acte-de-haute-trahison

    Le gouvernement Philippe, naufrageur de l’intérêt général, a capitulé sans combattre devant une vieille exigence de la Commission européenne. La France sera le seul pays européen à affaiblir un secteur vital en pleine phase de transition vers un nouveau modèle énergétique. Un crime irrémissible contre l’avenir.

    • On imagine fort bien à quels types de chantage les nouveaux propriétaires de barrages pourraient se livrer pour augmenter leurs gains au détriment des communs et de la sécurité : rétention jusqu’au seuil de la pénurie pendant les pics de consommation pour faire monter les prix (rien ne l’empêche juridiquement), fin des lâchers d’eau gratuits en fonction des besoins des vallées (loisirs, agriculture), entre autres exemples signalés par Pierre Gilbert. Un opérateur privé va-t-il anticiper les sécheresses en réfléchissant à des plans de stockage sur le long terme ? Et quid de la maintenance ? EDF investit 400 millions d’euros par an dans l’entretien et le renforcement de ses barrages, dont certains ne sont plus tout jeunes et risqueraient, en cas d’économies de bouts de chandelle, de provoquer des catastrophes. Jean-Bernard Lévy, PDG d’EDF, a déjà prévenu que certains investissements étaient obérés par l’incertitude pesant sur le destin des barrages français. Hors de question pour l’entreprise de lancer des travaux qui profiteraient à de futurs acquéreurs privés. Sauf que certains travaux sont, pour le dire sèchement, urgents. Voilà le genre de petit jeu malsain qu’alimente la concurrence « libre et non faussée ». Le témoignage de Jean-Louis Chauz, président du Conseil économique, social et environnemental d’Occitanie, illustre bien l’appréhension qui gagne peu à peu les collectivités : « En 2035, le déficit de stockage d’eau pour la nouvelle démographie de la région et les besoins de l’agriculture, des écosystèmes, de la préservation de la biodiversité, sera de 1 milliard de m3. EDF et Engie ont provisionné les budgets nécessaires pour engager les travaux pour le stockage d’eau. À l’heure où l’Occitanie est confrontée à un problème majeur de ressources en eau dans les années à venir, à même de compromettre son développement, voire sa sécurité sanitaire, il est incompréhensible et dangereux de chercher à complexifier une organisation de la gestion de l’eau… »

      Et s’il ne fallait retenir de cette privatisation que le gain pour les caisses de l’État, là encore les comptables qui nous gouvernent seraient bien en peine de lui trouver quelque avantage. La Cour des comptes a calculé que si l’État en retirait 520 millions d’euros par an de redevances, ce serait Byzance. 520 millions d’euros, ce n’est jamais que cinq fois moins que l’excédent brut actuel…

      Instruire le procès en haute trahison

      Dans l’article 68 (révisé en 2007) de la Constitution, il est dit que « le président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ». Pour un président de la République, la haute trahison, au sens de l’article 68 avant révision, se définit comme l’action volontaire d’aller contre les principes que la Constitution le charge de défendre ès qualités. Parmi ces principes, l’article 5 par exemple : « Le président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État. Il est le garant de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire. » Il me semble que cet article 5 englobe la question de l’approvisionnement énergétique. Le président Macron est donc coupable, sur ce dossier, de « manquement », conjointement avec le premier ministre. Le 6 décembre 2017, des députés et élus territoriaux de La France insoumise publiaient une tribune de protestation sur le site Reporterre. Il fallait aller plus loin, frapper plus fort, car un tel « manquement » déchire notre horizon et foule ostensiblement aux pieds la Constitution.

  • MENSONGES LACANIENS, par JACQUES VAN RILLAER | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/jean-louis-racca/blog/290212/mensonges-lacaniens-par-jacques-van-rillaer

    « Notre pratique est une escroquerie : bluffer, faire ciller les gens, les éblouir avec des mots qui sont du chiqué, c’est quand même ce qu’on appelle d’habitude du chiqué — à savoir ce que Joyce désignait par ces mots plus ou moins gonflés — d’où nous vient tout le mal. »

    Jacques Lacan, 26 février 1977 [1]

    Le fondement essentiel des pratiques de ceux qui se nomment « psychanalystes » sont des textes de Freud et de quelques disciples. Il est donc crucial de connaître le degré de fiabilité des affirmations contenues dans ces publications. Des milliers de personnes croient que Freud, Bettelheim ou Lacan sont des savants parfaitement intègres, qui ont observé méthodiquement des faits, qu’ils ont ensuite mis par écrit sans les déformer. Ces personnes ignorent ou refusent d’admettre les inévitables processus de distorsion du traitement des informations et la pratique du mensonge chez une large proportion des êtres humains, y compris chez les hommes de science.

    DES MENSONGES DÈS LE DÉPART DU FREUDISME

    Le voile sur les mensonges de Freud a commencé à être levé par son disciple Ernest Jones. Dans sa célèbre biographie, Jones signale que le traitement d’Anna O., le cas princeps de la psychanalyse, ne s’était pas terminé comme c’est écrit dans les Etudes sur l’hystérie. Alors qu’on y lisait qu’Anna O. avait été délivrée de tous ses symptômes, Jones signalait qu’après un an et demi de « cure par la parole » la malade avait dû être placée dans un institut psychiatrique. Il ajoutait : « Un an après qu’il eût cessé de la soigner, Breuer confia à Freud qu’elle était tout à fait détraquée, et qu’il lui souhaitait de mourir et d’être ainsi délivrée de ses souffrances [2] ».

    D’autres révélations ont également été faites par des disciples. Ainsi Oskar Pfister, pasteur suisse devenu analyste freudien, a confié à Henri Ellenberger, qui avait fait une analyse didactique sous sa direction, que l’ouvrage de Jones contenait des « légendes », notamment la légende que Freud aurait été constamment attaqué de façon malhonnête [3].

    C’est sans doute Ellenberger, le plus célèbre des historiens de la psychiatrie, qui a porté des coups décisifs aux légendes relatives à l’intégrité scientifique de Freud. Chargé du cours d’histoire de la psychiatrie à la Fondation Menninger (Etats-Unis), il s’est donné la peine de faire une enquête sur le cas d’Anna O qui lui fit découvrir son dossier médical dans la clinique suisse où elle avait été placée, faute d’être aidée par la psychanalyse. On y lisait que la patiente — dont Freud a écrit à plusieurs reprises qu’elle avait été guérie detous ses symptômes [4] — présentait nettement plus de troubles après le traitement qu’avant et qu’elle était même devenue morphinomane durant la cure. Ellenberger a publié ces faits en 1972 [5] et y a consacré quelques pages dans l’édition française de sa monumentale histoire de la psychothérapie [6]. Il a également montré que Freud avait beaucoup plagié et était beaucoup moins original que le grand public ne le croit.
    Peu après, Frank Cioffi a publié l’article « Freud était-il un menteur ? » [7]. Rapprochant simplement des textes de 1896 et de 1924, il montrait que Freud avait menti sur un point capital de sa doctrine. En 1896, Freud écrivait que l’hystérie de toutes ses patientes sans exception s’expliquait par « des séductions subies dans la première enfance ». Il ajoutait : « Les malades ne racontent jamais ces histoires spontanément. On ne réussit à réveiller la trace psychique de l’événement sexuel précoce que sous la pression la plus énergique du procédé analyseur et contre une résistance énorme, aussi faut-il leur arracher le souvenir morceau par morceau. […] Dans la plupart des cas, les souvenirs n’étaient retrouvés qu’après plus de cent heures de travail [8] ». A partir des années 1910, Freud a raconté qu’il avait été trompé par ses patientes, qui lui racontaient spontanément des histoires d’inceste qu’il avait pris naïvement, à l’époque, pour des récits d’événements réels. Freud dit avoir compris ensuite qu’il s’agissait seulement de fantasmes produits par les désirs œdipiens. Il n’a jamais reconnu qu’il avait conditionné ses patientes à inventer ce qui était conforme à sa théorie.

    Par la suite, des historiens du freudisme, à mesure que des archives se publiaient, ont découvert de plus en plus de mensonges et de légendes. Les ouvrages de Crews, Bénesteau, Borch-Jacobsen et Shamdasani, parmi bien d’autres, montrent l’ampleur des mystifications [9].

    Aux mensonges de Freud s’ajoutent ceux de disciples célèbres, à telle enseigne que Cioffi, trente ans après son célèbre article, conclut le bilan des tromperies de Freud et de freudiens par ces mots : « Le mouvement psychanalytique dans son ensemble est l’un des mouvements intellectuels les plus corrompus de l’Histoire [10] ». On pourrait évoquer par exemple les impostures de Bruno Bettelheim [11] ou le Journal d’une adolescente, que Hermina Hug-Hellmut — la première analyste d’enfants — , publia comme le récit d’une adolescente alors qu’elle l’avait entièrement inventé [12]. Nous nous limitons ici aux cas de Jacques Lacan et de son beau-fils Jacques-Alain Miller, son héritier au sens matériel et figuré du terme.

    POURQUOI AVOIR CRÉÉ L’ÉCOLE FREUDIENNE DE PARIS ?

    En 1962, au moment de choisir des études universitaires, la lecture d’ouvrages vantant les prodigieuses victoires de la psychanalyse m’ont incité à opter pour la psychologie [13] . Dès ma 2e année d’études, je me suis adressé à la Société Belge de Psychanalyse, affiliée à l’International Psychoanalytical Association (IPA), pour entamer une didactique freudienne. La présidente m’a répondu qu’il fallait être diplômé médecin ou psychologue avant de pouvoir commencer ce type d’analyse. L’année suivante, j’apprenais par Jacques Schotte, professeur de mon université, qu’il allait fonder, avec quatre autres psychanalystes, l’Ecole belge de psychanalyse (EBP), qui se rattacherait à l’Ecole freudienne de Paris (EFP), que venait de créer Jacques Lacan. Il m’expliqua que, dans l’association lacanienne, les règles étaient moins « obsessionnelles » [14] que dans la corporation « annafreudienne ». En effet, la porte était grande ouverte aux étudiants en psychologie, aux philosophes, aux théologiens, aux prêtres qui quittaient l’Eglise, etc. Je pus ainsi commencer une analyse didactique dès ma 3e année de psychologie, chez Winfried Huber, qui avait effectué la sienne à Paris, chez Juliette Favez-Boutonnier. Celle-ci avait été analysée par René Laforgue, qui l’avait été par Eugénie Sokolnika, qui l’avait été par Freud. J’évoque cette « filiation » parce que, selon la doctrine freudienne, le pouvoir d’être analyste se transmet de la même façon que le pouvoir d’être prêtre catholique : le sacrement autorisant la pratique sacrée est conféré par quelqu’un qui a lui-même reçu cette grâce au terme d’une lignée qui remonte jusqu’au Christ.

    Pendant les quatorze années de mon adhésion à l’EBP, je n’ai jamais entendu parler de lavéritable raison pour laquelle Lacan avait fondé l’EFP en 1964. Le lecteur qui douterait de cette ignorance peut lire d’un bout à l’autre les 420 pages de mon livre Les illusions de la psychanalyse, publié en 1981. La raison essentielle de la création de l’EFP n’y apparaît nulle part, malgré d’abondantes critiques de Lacan. Ce n’est qu’en 1985 que j’en ai été informé par la lecture du livre de François Perrier Voyages extraordinaires en Translacanie [15] . Dans l’EBP, il s’agissait d’une information qui avait été soigneusement dissimulée. Dans l’EFP, elle avait été progressivement occultée. Voici les faits.

    Au début des années 50, les autorités de la Société Française de Psychanalyse (SFP) ont constaté que Lacan menait un nombre considérable d’analyses didactiques. Elles ont également appris que la durée des séances était largement inférieure à la durée réglementaire de 45 minutes. Pire : cette durée diminuait d’année en année pour ne plus être que de quelques minutes. Les autorités psychanalytiques internationales ont alors mené plusieurs enquêtes sur la durée des séances chez Lacan. A partir de 1953, les dirigeants de l’IPA ont, à plusieurs reprises, rappelé Lacan à l’ordre. Chaque fois, il y avait « promesses de Lacan, non tenues, bien sûr, puis colères, amabilités, injures, rapprochements, ruptures » [16] . En juillet 1963, après dix années de mises en garde répétées, l’IPA retirait définitivement à Lacan le titre de didacticien. Le document, intitulé la « Directive de Stockholm » (du nom du congrès où cette décision fut prise), précisait : « Le Dr. Lacan n’est plus désormais reconnu comme analyste didacticien. Cette notification devra être effective le 31 novembre 1963 au plus tard. Tous les candidats en formation avec le Dr. Lacan sont priés d’informer la Commission des études s’ils désirent ou non poursuivre leur formation, étant entendu qu’il sera exigé d’eux une tranche supplémentaire d’analyse didactique avec un analyste agréé par la Commission des études. Cette notification devra être effective le 31 décembre 1963 au plus tard [17] ».

    Soulignons que Lacan gardait le titre de « psychanalyste » de la SFP et de l’IPA. Il pouvait continuer à analyser des patients, il pouvait même continuer ses cours et séminaires, mais il fulminait et préparait sa riposte : la création de sa propre Ecole de psychanalyse.

    « L’EXCOMMUNICATION MAJEURE »

    Le 20 novembre, devant l’amphithéâtre bondé de l’hôpital Ste-Anne, Lacan tenait un Séminaire au cours duquel il allait se dire victime d’une excommunication comparable à celle infligée par les autorités rabbiniques à Baruch Spinoza :

    « Mon enseignement, désigné comme tel, subit, de la part d’un organisme qui s’appelle le Comité exécutif d’une organisation internationale qui s’appelle l’International Psychoanalytical Association, une censure qui n’est point ordinaire, puisqu’il ne s’agit de rien de moins que de proscrire cet enseignement — qui doit être considéré comme nul, en tout ce qui peut en venir quant à l’habilitation d’un psychanalyste, et de faire de cette proscription la condition de l’affiliation internationale de la société psychanalytique à laquelle j’appartiens.

    Cela encore n’est pas suffisant. Il est formulé que cette affiliation ne sera acceptée que si l’on donne des garanties pour que, à jamais, mon enseignement ne puisse, par cette société, rentrer en activité pour la formation des analystes.

    Il s’agit donc là de quelque chose qui est proprement comparable à ce qu’on appelle en d’autres lieux l’excommunication majeure. Encore celle-ci, dans les lieux où ce terme est employé, n’est-elle jamais prononcée sans possibilité de retour.

    Elle n’existe sous cette forme que dans une communauté religieuse désignée par le terme indicatif, symbolique, de la synagogue, et c’est proprement ce dont Spinoza fut l’objet. Le 27 juillet 1656 d’abord — singulier bicentenaire puisqu’il correspond à celui de Freud — Spinoza fut l’objet du kherem, excommunication qui répond bien à l’excommunication majeure, puis il attendit quelque temps pour être l’objet du chammata, lequel consiste à y ajouter cette condition de l’impossibilité d’un retour.

    Je ne suis pas en train de dire — mais ce ne serait pas impossible — que la communauté psychanalytique est une Église. Cependant, incontestablement, la question surgit de savoir ce qui en elle peut bien faire ici écho à une pratique religieuse [18] ».

    Sept mois plus tard, le 21 juin 1964, c’est le grand coup de théâtre autocratique. Lacan proclame dans son séminaire la création de sa propre société de psychanalyse en ces termes :

    « Je fonde — aussi seul que je l’ai toujours été dans ma relation à la cause psychanalytique — l’Ecole Française de Psychanalyse, dont j’assurerai, pour les quatre ans à venir dont rien dans le présent ne m’interdit de répondre, personnellement la direction [19] ».

    Lacan préfèrera peu après le nom « Ecole Freudienne de Paris ». Il la présidera jusqu’à sa dissolution, par lui-même, en 1980, peu avant sa mort. Inutile d’insister sur le fait qu’il ne mit plus aucun frein à sa frénésie du commerce des didactiques, recevant jusqu’à 80 analysants par jour [20]. Ceux-ci étaient complices. Comme le note François Roustang, ancien jésuite devenu pour un temps analyste lacanien : « Devenir analyste, reconnu par Lacan, était une manière de titre de noblesse, qui ouvrait à la possibilité de se faire une clientèle. Sans lui, nombre d’entre nous n’auraient jamais accédé à ce statut et n’auraient pas eu les moyens d’en vivre. Après avoir donné l’existence à beaucoup, l’analyse devenait le moyen de leur subsistance [21] ». Jean-Guy Godin, qui restera toujours fidèle au gourou, ne dit pas autre chose : « Pour chacun de nous, Lacan était une société, une société par actions dont nous détenions chacun une part ; d’autant que, dans ce début des années soixante-dix, sa cote ne cessait de monter [22] ». Perrier, un des premiers lieutenants de Lacan, écrit : « Il était parfaitement conscient du pouvoir de son nom, de ce que signifiait, pour les gens, de dire : “Je suis sur le divan de Lacan.” D’ailleurs, les séances dites courtes consistaient en un véritable compostage : le sourire et la poignée de main du maître. [23] »

    Durant ma formation à l’EBP, je n’ai entendu parler qu’une seule fois des « séances courtes ». C’était à l’occasion du séminaire d’Alphonse De Waelhens sur le texte « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse ». Lacan y justifie son innovation en disant qu’elle rejoint la technique zen, qu’elle « déconcerte la résistance du patient », qu’elle « brise le discours pour accoucher la parole [24] ». Dans Ecrits, où ce texte de 1953 est réédité, Lacan a ajouté cette note en bas de page : « Pierre de rebut ou pierre d’angle, notre fort est de n’avoir pas cédé sur ce point (1966) ». De Waelhens était passé rapidement sur ce passage, se contentant de dire que cette technique n’était pas en usage en Belgique. Il n’avait pas relevé la note infrapaginale. Il n’avait pas dit — ce que lui devait savoir — que les séances courtes étaient la « pierre » sur laquelle Lacan « n’avait pas cédé », la pierre sur laquelle est édifiée l’EFP et, secondairement, l’EBP à laquelle nous appartenions.

    UNE ÉCOLE FREUDIENNE « OUVERTE »

    En fondant sa propre école, Lacan s’octroyait le moyen de continuer une pratique extrêmement lucrative, mais il allait en outre prendre dans ses filets ce qu’on appelle psychanalyse en France. En effet, tandis que les autres sociétés freudiennes exigeaient généralement une formation de psychologue ou de médecin avant d’entamer la formation analytique, Lacan ouvrait les bras à tout qui se voulait psychanalyste. Il se montrait particulièrement séducteur à l’endroit des philosophes, des mathématiciens et des agrégés de droit [25]. La distinction entre analyse didactique et analyse thérapeutique était abrogée. Sous prétexte de balayer la bureaucratie « ipéiste », la hiérarchie autoritaire et les règles rigides, Lacan déclarait qu’il n’était plus nécessaire d’être psychanalyste, ni même en analyse, pour pouvoir s’inscrire au titre de membre de son Ecole. Simplement il distinguait trois types de membres : les « analystes de l’Ecole » (AE), reconnus par un jury d’agrément, les « analystes membres de l’Ecole » (AME), garantis par l’Ecole, et les « analystes praticiens » (AP), qui s’autorisent d’eux-mêmes [26].

    Jean Clavreul, fidèle lieutenant de Lacan jusqu’à la mort (celle de Lacan et la sienne), a bien décrit comment ce procédé a fait exploser le nombre de lacaniens : « Le prestige de l’Ecole freudienne fut tel qu’il y eut de plus en plus d’adhésions, à tel point que les demandes d’adhésion devinrent aussi importantes que le nombre d’adhérents, plus de six cents à ce moment-là. Cela était dû au fait que Lacan ne prononçait jamais d’exclusion. Pendant quinze années, l’Ecole freudienne n’a jamais exclu personne[27] ». En France,psychanalyse est alors devenu davantage synonyme de lacanisme que de freudisme(orthodoxe) [28]. Lacan était un champion du marketing psy.

    Trois ans plus tard, Lacan sera poussé par ses camarades à formuler des règles plus strictes pour la reconnaissance du titre d’analyste de son Ecole (la « passe »), mais le « Freud français » aura réussi à noyer les analystes affiliés à l’IPA sous le nombre des siens. Son « ouverture » aux philosophes et aux lettrés lui aura permis de noyauter tous les médias et les hautes sphères du pouvoir [29]. Son beau-fils « jouit » encore pleinement de ce pouvoir.

    LA DISSIMULATION CONTINUE

    A ma connaissance, il n’y a aucun écrit de Lacan qui mentionne la véritable raison du refus par l’IPA de continuer à agréer ses didactiques au-delà de 1963. La majorité de ses disciples ont dissimulé autant que lui ce motif et donc la véritable raison de la création de l’EFP. Ainsi Jacques-Alain Miller écrit-il en 2011 dans Vie de Lacan : « Il [Lacan] n’a pas tellement pâli de la rétorsion de l’Autre. Oui, bien sûr, une Association internationale alors basée à Chicago l’a persécuté, chassé — ou plutôt a voulu l’émasculer comme analyste, en lui interdisant de former des gens. N’en faisons pas toute une histoire. En définitive, elle pouvait peu, sinon aider au rinforzando de la calomnie. Lacan, de son côté, avait de la ressource, ne se laissa pas intimider, et manœuvra comme un chef. C’est alors que je l’ai connu, janvier 1964, et je fus le témoin direct, et aussi l’un des instruments, de sa brillante contre-offensive. Il triompha en France, au prix d’y rester enfermé, car coupé du milieu international [30] ».

    Elisabeth Roudinesco, qui détient le pouvoir d’informer les lecteurs du journal Le Mondedes matières psy, évoque le véritable motif, mais en l’édulcorant et en minimisant son importance. Dans Pourquoi la psychanalyse ?, elle écrit que la scission de 1963 se produisit « lorsque Lacan ne fut pas accepté comme didacticien dans les rangs de l’IPA du fait de son refus de se soumettre aux règles en vigueur concernant la durée des séances et la formation des analystes. Lacan refusait, en effet, de se plier à l’impératif de la séance de cinquante-cinq minutes et proposait de l’interrompre par des ponctuations significatives donnant un sens à la parole du patient. [...] Par ailleurs — et c’est sans doute la raison profonde de cette rupture —, Lacan restaurait, par son enseignement et par son style, la figure freudienne du maître socratique à une époque où celle-ci était jugée néfaste par l’IPA [31] » (souligné par J.V.R.)

    LE POUVOIR CURATIF DES CURES FREUDIENNES ET LACANIENNES

    Depuis longtemps, la médiocrité des résultats que Freud obtenait par ses traitements est connue et bien documentée [32]. Ceci n’empêche nullement les frères Miller d’affirmer que Freud guérissait sans difficulté, comme par magie. Ils affirment ce fait, mais l’expliquent de façon tout à fait différente.

    Jacques-Alain donne une explication freudienne classique : « Au départ, les cures analytiques avaient des résultats rapides et spectaculaires. Il suffisait de livrer à un patient la clé de l’Œdipe, c’était si révolutionnaire que cela le métamorphosait. Au fur et à mesure, la nouveauté se dissipait, les cures devenaient plus longues, plus complexes [33] ». Autrement dit : si les cures sont devenues si longues, voire interminables, c’est parce que tout le monde parle désormais du complexe d’Œdipe.

    Gérard, lui, avance une explication typiquement lacanienne : « L’aliénation du sujet à la chaîne signifiante, c’est ce que la psychanalyse naissante avait mis au jour. Qu’est-ce que l’âge d’or de la découverte freudienne, sinon ce temps béni des dieux où les symptômes analysés cédaient comme par miracle ? Lecture émerveillée des premiers textes de Freud... La psychanalyse dévoilait le lien du sujet au langage, témoignait de l’emprise du signifiant sur le corps, réussissait à annuler la souffrance par la parole. [34] » Autrement dit : si les cures sont devenues si longues, c’est parce que tout le monde sait que le symptôme est langage et que sa disparition tient en une analyse de Signifiants.

    Lacan a été pour le moins discret sur les effets de ses propres cures. Il s’est toujours plu à affirmer que la psychanalyse n’est pas une psychothérapie. Ainsi dans sa célèbre interview à la télévision, il déclare : « La psychothérapie, quelle qu’elle soit, tourne court, non qu’elle n’exerce pas quelque bien, mais qui ramène au pire [35] ». Même discours lors de l’ouverture de la section clinique de l’université Paris VIII : « La psychothérapie ramène au pire... Ce n’est pas la peine de thérapier [sic] le psychique. Freud aussi pensait ça. Il pensait qu’il ne fallait pas se presser de guérir [36] ». Les témoignages d’anciens lacanienssont accablants. Perrier par exemple écrit : « J’aurais aimé que Lacan publiât ses chiffres : c’est fou ce qu’on se suicidait chez lui ! Pour sa part, il avait horriblement peur de la mort. Une anecdote est restée célèbre : il avait foutu à la porte Diatkine, parce que ce dernier fantasmait sur la mort. Ça aussi, c’est très grave. Si Lacan a tué tout son monde, c’est parce que seul le cheminement de la pensée l’intéressait. Les êtres humains, il s’en foutait. Et la séduction qu’il exerçait sur eux dépouillait ses malades et ses clients de toute capacité d’autodéfense, ou peu s’en faut [37] ».

    Freud a toujours écrit que la psychanalyse n’était pas en mesure de traiter les psychoses, qu’il appelait « névroses narcissiques » [38]. Dans les années 1920, il a essayé de traiter un adolescent psychotique, Carl Liebmann, qu’il a qualifié de « paranoïaque super-intelligent » et pour lequel, écrit-il, il s’est « donné beaucoup de mal ». Il en parle dans sa correspondance avec Ferenczi [39], mais n’a jamais rien publié à ce sujet et pour cause : il n’a obtenu aucun résultat positif. Aujourd’hui des lacaniens prétendent, grâce à Lacan, faire mieux que Freud : ils affirment que l’autisme est une « psychose », qu’il leur revient de « traiter », et qu’il est de leur devoir de « combattre les thérapies cognitivo-comportementales » [40]. On attend toujours la publication d’études empiriquement validées.

    DE QUELQUES AUTRES MENSONGES

    Lacan s’est illustré par d’autres formes de tromperie, notamment le plagiat. Par exemple, il a repris à Henri Wallon — sans le citer — la description du stade du miroir. René Zazzo, parmi d’autres, a dénoncé cette malhonnêteté [41], ce qui n’empêche pas nombre delacaniens et d’autres d’enseigner qu’il s’agit d’une « découverte » de Lacan.

    J.-A. Miller s’est fait une spécialité des fausses citations pour diaboliser les TCC et spécialement Skinner. Nous avons déjà eu l’occasion de montrer comment il a utilisé la formule d’un journaliste « We Can’t Afford Freedom » (Nous ne pouvons nous payer le luxe d’être libre) placée sur la couverture d’un numéro du Time où il était question de Skinner, pour en faire une citation exprimant des intentions qui n’étaient absolument pas celles du célèbre professeur de Harvard [42]. Dans son récent « Lacan quotidien » (25-01-2012), on peut lire une autre citation attribuée à Skinner (« Je n’ai poursuivi dans ma vie qu’une idée — une véritable idée fixe. Le mot “contrôle” l’exprime », etc.) qui est en réalité le propos d’un personnage du roman de Skinner Walden Two. C’est comme si attribuait à Camus des phrases d’un personnage de son Caligula. Chacun jugera du niveau éthique et épistémologique du procédé.

    Peut-être le mensonge le plus nuisible de Lacan aura été de faire croire que sa logomachie recelait un sens profond, que seule une longue initiation permettait de comprendre. Cette « imposture intellectuelle » — pour reprendre le titre du célèbre ouvrage de Sokal et Bricmont — a égaré des milliers de personnes dans des exégèses ad infinitum et les a détournés d’activités réellement thérapeutiques. La tradition du mensonge, inaugurée par Freud, est plus que jamais vivante dans le lacanisme.

    ANNEXE : L’ÉTHIQUE DE LACAN SELON JACQUES-ALAIN MILLER

    Extraits de : Vie de Lacan écrite à l’intention de l’opinion éclairée.
    Ed. Navarin, 2001, 24 p.

    « Par beaucoup de traits, et même par un trait essentiel, Lacan n’était pas et ne se croyait pas un homme de bien. “Je n’ai pas de bonnes intentions”, dit-il une fois à son séminaire, moquant les préjugés de ceux qui pensent bien » (p. 12).

    « Il est clair que Lacan voulut être une exception, et s’assumait comme tel. [...] Il évoquait sa vie, écoutez bien, comme “une vie passée à vouloir être Autre malgré la loi” » (p. 15).

    « Que veut dire ce “malgré la loi”, à le prendre au sérieux ? Lacan s’avoue fièrement transgresseur, et joue au délinquant, au vaurien, au voyou. [...] Lacan est en effet quelqu’un qui bravait la loi, et dans les plus petites choses. » (p. 16)

    « Certains se plaisent à lui prêter des passions basses, qui sont, j’en jurerais, les leurs : fortune, notoriété, pouvoir. Mais tout cela va de soi pour l’homme de désir, ce sont des moyens de son désir, ce n’est pas son désir. Lacan incarnait au contraire ce qu’il y a d’énigmatique, de peu rassurant, voire d’inhumain dans le désir » (p. 19).

    « “Tâcher toujours plutôt à changer mes désirs que l’ordre du monde”, la belle maxime cartésienne qui résume tout ce qui est sagesse antique et moderne, n’était pas pour Lacan. Il était du parti contraire. Il entendait, lui, changer autour de lui le train des choses, leur train-train, et avec une obstination, une persévérance, une constance, qui faisait mon admiration » (p. 20).

    « Les anecdotes lacaniennes sont toutes vraies, même celles qui sont fausses, car, en saine doctrine, la vérité se distingue de l’exactitude, et elle a structure de fiction. Tout ce qui court sur le personnage de Lacan, de vu, d’entendu, ou de forgé, inventé, ou simplement de mal entendu, qui le diffame ou qui l’encense, converge à peindre l’homme de désir, et même de pulsion, qu’il était. » (p. 21).

    #psychose #escroquerie #lacan #psychanalyse

    • PSYCHANERIES
      https://sporenda.wordpress.com/2018/02/05/psychaneries

      On ne sait par où commencer tant ce psychanalyste accumule les non-sens et les absurdités. D’abord, affirmer que la pédophilie était quasi-inexistante lorsque l’ordre patriarcal était incontesté est évidemment massivement contrefactuel historiquement. Doit-on rappeler qu’en Angleterre par exemple, les bordels d’enfants des deux sexes étaient parfaitement légaux et nombreux à l’époque victorienne ? Qu’il était coutumier que les maîtres violent leurs très jeunes servantes ? Qu’un grand nombre des patientes de Freud avaient subi des incestes et des viols pédophiles (ce que Freud a décidé de dissimuler par souci de sa carrière et de protection de l’ordre patriarcal) ?

      Et il y a l’affirmation hallucinée que c’est la mort du roi-père (belge) qui signe la multiplication des Dutroux. Moralité : pour éliminer la pédophilie, restaurons la monarchie. Face à de telles bouffées délirantes, on serait tenté-e de conseiller à van Meerbeck d’aller consulter de toute urgence.

      Mais le paralogisme culminant de van Meerbeck, c’est lorsqu’il pose que l’inceste des mères est la partie invisible de l’iceberg : si l’inceste maternel est visible nulle part, c’est justement la preuve qu’il est partout. Par contre, si les cas d’incestes par père ou beau-pères sont majoritairement écrasants dans les cours d’assises et les médias, c’est en fait parce qu’ils n’existent (presque) pas.

      Ne vous y trompez pas : cette mise en accusation constante des mères par la psychanalyse, décrites comme fusionnelles au point d’être vampiriques et immanquablement incestueuses, c’est une opération de détournement d’attention et d’inversion de responsabilité qui vise à exonérer et protéger les pères incestueux : on agite le chiffon rouge d’incestes maternels imaginaires pour cacher la réalité factuellement constatable des nombreux incestes paternels (4 millions de personnes ont été victimes d’inceste en France selon un article de l’Express).

      Séparer la mère des enfants, et les faire passer du côté du père, c’est l’objectif primordial de la psychanalyse. En faisant de la mère une ogresse dont il faut à tout prix éloigner les enfants pour les soustraire à son amour dévorateur–noble tache « civilisatrice » qui est l’apanage du père–la psychanalyse vise à les « groomer » pour les préparer à devenir de bons petits soldats de l’ordre patriarcal ; soumission impossible si les enfants restent identifiés à leur mère, et aux valeurs dites féminines d’empathie, de coopération, de care et de souci du bien collectif dont la (bonne) maternité est porteuse.

      Notez aussi que séparer la mère des enfants et l’empêcher ainsi de les protéger présente l’avantage de faciliter l’accès sexuel des pères incestueux et des pédophiles aux enfants. Et que, dans l’ordre masculin d’inversion des valeurs, quand un meurtrier tue sa femme, c’est de l’amour et il doit être excusé. Mais quand une femme aime et protège ses enfants, (et pourrait fâcheusement s’interposer entre eux et les prédateurs sexuels), c’est de l’inceste, et elle est salie et stigmatisée.

      Stigmatiser la mère « incestueuse » largement imaginaire pour escamoter la réalité de l’inceste paternel tout en facilitant l’accès des prédateurs sexuels aux enfants en les soustrayant à la protection maternelle : coup double–le patriarcat est vraiment très fort.

  • Je n’irai pas chez Enthoven | Le Club de Mediapart
    1 juin 2018 Par Jeanne Guien Blog : Le blog de Jeanne Guien

    Lettre ouverte à M. Raphaël Enthoven, suite à mon invitation à son émission Philosophie(s).
    https://blogs.mediapart.fr/jeanne-guien/blog/010618/je-nirai-pas-chez-enthoven

    Monsieur Enthoven,

    je vous écris pour annuler ma venue à votre émission Philosophie(s) sur Arte, dont le tournage devait avoir lieu ce jour.

    Invitée par votre équipe en mars dernier à y discuter de mon sujet de recherche, la réduction de la durée de vie des objets, j’avais accepté dans l’espoir d’y trouver un espace de dialogue philosophique authentique, de production rigoureuse et collaborative d’un savoir critique utile. La lecture et l’écoute de vos diverses productions m’ont cependant convaincue que cet espoir était vain.

    Ne connaissant pas, il y a trois mois, votre travail, j’ai en effet découvert depuis qu’il était malheureusement semblable à celui des quelques rares autres « philosophes » représentés dans les médias dominants : un déploiement précieux et allusif de culture légitime, mis au service de la reproduction à l’identique des préjugés sociaux et politiques les plus caricaturaux. Immaturité du mouvement étudiant, mysandrie des féministes, paresse des abstentionnistes, communautarisme des anti-racistes ou encore antisémitisme des antisionistes : il n’est pas un seul des partis pris les plus réducteurs et abêtissants de la droite décomplexée auquel vous ne vous empressiez d’apporter votre soutien, à grand renfort de raccourcis historiques, de coupes et pseudo-concessions à l’adversaire, de citations à l’emporte-pièce et d’invocations toutes faites à la démocratie et la liberté de pensée - qu’il est peu étonnant de voir conduire, infailliblement, au moralisme le plus vide. (...)

  • Etats-Unis : mort de Luis Posada #Carriles, héros cubain des anticastristes - Amériques - RFI
    http://www.rfi.fr/ameriques/20180524-mort-luis-posada-carriles-anticastristes-etats-unis-heros-cuba

    Un tueur de civils n’est pas un #terroriste si le pays d’origine des civils est un pays ennemi selon #RFI

    Arrêté en 1976, il est accusé d’être derrière l’attentat contre le vol 455 de la compagnie Cubana Aviacion qui a fait 73 morts. Un rôle confirmé depuis peu suite à la déclassification de documents secrets de la #CIA.

    Luis Posada Carriles parvient à s’enfuir et à rejoindre les #Etats-Unis. Accusé d’être un terroriste par le Venezuela et Cuba, il est au contraire adulé par la communauté cubaine anticastriste aux Etats-Unis. Preuve de sa #notoriété, la radio anticastriste américaine « La Poderosa » a souhaité respecter une minute de silence sur son antenne après la nouvelle de son décès.

    CUBA PIZZI : Le Ben Laden d’Amérique latine est mort | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/pizzicalaluna/blog/250518/cuba-pizzi-le-ben-laden-d-amerique-latine-est-mort

    Luis Posada Carriles était un terroriste d’origine cubaine, que la grande presse mondiale définit simplement comme un « anti-castriste notoire ». Il est parti à l’âge de quatre-vingt-dix ans et sans payer pour tous ses #crimes. Jusqu’au bout, il a été protégé par le gouvernement des Etats-Unis, en particulier par la CIA et la famille Bush.

    Son nom est devenu célèbre lorsqu’on a su qu’il était l’un des auteurs intellectuels de l’explosion de l’avion de Cubana de Aviación, le 6 octobre 1976, avec 73 passagers à bord, peu après son décollage de l’aéroport Seawell des Barbades. Il fut capturé au Venezuela, où il travaillait pour les services de sécurité de ce pays. Après quelques brèves années de prison, la CIA l’aida à s’enfuir et l’amena en Amérique centrale pour qu’il apporte sa collaboration à la guerre de terreur que Ronald Reagan et son vice-président George Bush père menaient contre le gouvernement sandiniste du Nicaragua dans les années quatre-vingt.

  • Le @CRIF et les arabes mangeurs d’enfants |
    Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/melusine-2/blog/210518/le-crif-et-les-arabes-mangeurs-d-enfants

    Il y a six jours, le CRIF a publié sur Twitter une souriante photographie de l’ancienne Première ministre israélienne Golda Meir. Elle y dit : « Nous pouvons pardonner aux arabes de tuer nos enfants, mais nous ne pouvons pas leur pardonner de nous forcer à tuer leurs enfants. La paix s’installera le jour où les arabes aimeront leurs enfants plus qu’ils nous haïssent. » La photographie de Golda Meir sourit et le chargé de communication du CRIF commente : « #Actu – Golda Meir disait cela il y a près de 50 ans, et c’est toujours d’actualité ».

     #Actu : la veille, les snipers israéliens avaient abattu par balles plus de cinquante Palestiniens, dont huit enfants, et blessé près de deux mille sept cents, alors qu’ils manifestaient pacifiquement pour commémorer leur catastrophe, leur exil, leur absence de droits fondamentaux, de droits civils, de droit à vivre. Pacifiquement, parce que les frondes ne menacent pas la vie des soldats israéliens – encore moins celle des civils israéliens – parce que les soldats sont à plusieurs centaines de mètres, derrière une clôture, derrière des miradors, derrière la « frontière », de l’autre côté de l’enclos. Parce qu’il n’y a que dans la Bible qu’on vainc l’injustice avec des pierres, et dans cette région, on sait que la Bible ne dit pas toujours la vérité.

    Les arabes tuent les enfants des autres. Pire encore, ils forcent leurs ennemis à se rendre coupables du meurtre de leurs propres enfants. Ils les forcent à se souiller du sang des innocents. Ils les forcent, oui, ils ne voulaient, ils y ont été forcés, ils auraient préféré l’éviter, éviter de tirer une balle dans la tête de Wesal Khalil, de viser la tête d’une enfant de quatorze ans, mais elle avait une fronde, et elle était palestinienne, alors ils y ont été forcés, d’ailleurs elle voulait mourir. Ce n’est plus seulement le Hamas qui utilise des enfants comme boucliers humains, ce sont les Palestiniens qui apprennent à leurs enfants à monter au front. Mieux, ce sont les arabes qui font des enfants dans le seul but de les envoyer se faire tuer pour que France 2 puisse filmer des balles dans la tête et que ça fasse des images terribles et que ces images nuisent à la réputation de l’armée israélienne.

  • Stefan #Zweig : « Avant 1914, la terre appartenait à tous ses habitants » | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/181216/stefan-zweig-avant-1914-la-terre-appartenait-tous-ses-habitants

    Et de fait, rien ne rend peut-être plus palpable l’énorme régression dans laquelle est entrée l’humanité depuis la première guerre mondiale que les restrictions apportées à la liberté de mouvement des hommes et à leurs libertés. Avant 1914, la #terre appartenait à tous ses habitants. Chacun allait où il voulait et y restait aussi longtemps qu’il voulait. Il n’y avait pas de permissions, pas d’autorisations, et cela m’amuse toujours de voir l’étonnement des jeunes lorsque je leur raconte qu’avant #1914, je voyageais en Inde et en Amérique sans avoir de passeport et même n’en avais jamais vu aucun. On montait dans le train et on en descendait sans rien demander, sans qu’on vous demandât rien, on n’avait pas à remplir un seul de ces centaines de papiers qu’on réclame aujourd’hui. Il n’y avait ni permis, ni #visas, ni tracasseries ; ces mêmes #frontières qui, avec leurs douaniers, leur #police, leurs postes de #gendarmerie, sont aujourd’hui transformées en réseau de barbelés en raison de la #méfiance_pathologique de tous envers tous, n’étaient rien d’autre que des lignes symboliques qu’on traversait avec autant d’insouciance que le méridien de Greenwich. C’est seulement après la guerre que le monde se vit bouleversé par le national-socialisme, et le premier phénomène qu’engendra cette épidémie spirituelle de notre siècle fut la #xénophobie : la haine ou du moins la peur de l’autre. On se défendait partout contre l’étranger, partout on l’excluait. Toutes les humiliations qu’autrefois on avait inventées exclusivement contre les criminels, on les infligeait maintenant à tous les voyageurs avant et pendant le voyage. Il fallait se faire photographier de droite et de gauche, de profil et de face, les cheveux coupés assez court pour que l’oreille fût visible, il fallait donner ses empreintes digitales, d’abord le pouce seul, puis les dix doigts, il fallait en plus présenter des certificats : de santé, de vaccination, de police, de bonne vie et mœurs, des recommandations, il fallait pouvoir présenter des invitations et des adresses de parents, il fallait fournir des garanties morales et financières, remplir des formulaires et les signer en trois, quatre exemplaires, et s’il manquait ne fût-ce qu’une feuille de ce tas de paperasses, on était perdu. »

    Stefan Zweig, Le monde d’hier, souvenir d’un européen, Folio-Essais n° 616, p. 530-532.

  • La ZAD sauvée par le plan biodiversité de Nicolas Hulot | Le Club de Mediapart (mais biodiversité menacée par la prolifération des poulets)
    https://blogs.mediapart.fr/naturalistes-en-lutte/blog/160518/la-zad-sauvee-par-le-plan-biodiversite-de-nicolas-hulot

    Les naturalistes en lutte ont pu consulter en primeur le « plan biodiversité » de Nicolas Hulot. Surprise ! La ZAD de Notre-Dame-des-Landes devient un territoire pilote de protection de la nature. Enfin presque.

    (Ces schizophrènes qui nous gouvernent ...)

    Monsieur le ministre, vous avez dit avoir honte de la situation déplorable de la biodiversité de nos campagnes du fait des pratiques agro-industrielles, mais vous semblez bien la conforter au vu des dégâts commis depuis quelques semaines par les forces de l’ordre sur la ZAD : destruction de haies, de cultures, de prairies, arrachage d’arbres dans de très nombreux boisements, sans compter la pollution des sols et des ruisseaux par l’armement chimique, et cela pour une durée indéterminée.

    Votre discours portant sur cette zone se limite à incriminer un mouvement très divers que vous résumez injurieusement « à une bande d’anarchistes ». A ce sujet, si Anarchie il y a, c’est plutôt à celle d’Elisée Reclus et de sa vision de la relation entre l’Homme et la nature que, pour notre part, nous nous référons.

    Nous, Naturalistes en Lutte, considérons la sauvegarde de la biodiversité et des pratiques agro-environnementales comme un bien commun de l’humanité, qui de surcroît, ne peut se gérer de façon cohérente selon nous, que dans son ensemble et collectivement par les habitant.e.s de la zone.

    Nous prenons acte alors de votre adoption d’une posture de dédain envers ceux qui vous mettent face à vos responsabilités. Mépriser et détruire par l’usage de la force étatique montre la limite de la démocratie que vous incarnez alors que des négociations responsables et apaisées pourraient amener à la réalisation d’un modèle agro-environnemental nouveau et prometteur, que vous espérez d’un côté et détruisez par l’autre.

  • Comment réformer le travail en prison | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/observatoire-international-des-prisons-section-francaise/blog/150218/comment-reformer-le-travail-en-prison

    Cette loi a en effet introduit des taux horaires de rémunération minima indexés sur le SMIC, non plus indicatifs comme auparavant, mais impératifs. Les détenus travaillant aux ateliers doivent ainsi percevoir une rémunération horaire d’au moins 45 % du SMIC (horaire brut), ceux intervenant dans le cadre du service général 20, 25 ou 33 % du SMIC. Par-delà l’extrême faiblesse de ces minima, le problème est qu’ils ne sont pas respectés. L’administration pénitentiaire (AP) a tout simplement décidé qu’elle n’appliquerait pas la loi en « auto-proclamant » un moratoire. C’est ainsi qu’encore aujourd’hui, pour les activités de production, on continue le plus souvent de payer à la pièce : on multiplie un prix à la pièce par le nombre de pièces réalisées et on convertit la somme, formellement, en heures travaillées sans rapport avec le temps effectivement passé au travail. Quant au service général, on paie encore sur la base de forfaits journaliers. Les détenus sont souvent rémunérés pour six heures de travail quotidien, qu’ils les fassent ou non ; ceci permet au chef d’établissement de « protéger son budget » tout en pouvant demander du travail supplémentaire non rémunéré, ponctuellement, à ceux dont on sait qu’ils n’ont pas « vraiment » fait leurs six heures. On retrouve ici le goût de l’administration pour le flou, le flexible, pour se laisser une liberté d’arbitrage qui peut facilement tourner à l’arbitraire. Ceci étant, certains établissements respectent la loi, et des concessionnaires payent parfois au SMIC, voire davantage.

    #prison #travail

  • Obligation de neutralité : le professeur, un fonctionnaire comme un autre ? (Jean-Pierre Veran, Le Club de Mediapart)
    https://blogs.mediapart.fr/jean-pierre-veran/blog/300418/obligation-de-neutralite-le-professeur-un-fonctionnaire-comme-un-aut

    On observe donc que, la loi du 20 avril 2016 a explicité pour tous les fonctionnaires, y compris les professeurs, une obligation de neutralité jusqu’ici formellement absente de leur statut, même si le principe de neutralité du service public, appliqué à ses usagers comme à ses agents, peut être considéré comme une conséquence de l’égalité devant la loi posée par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. On peut considérer que cette loi clarifie utilement des obligations qui conduisent notamment chaque professeur à distinguer sa liberté d’expression personnelle en tant que citoyen de son obligation de neutralité en situation professionnelle. On observera également qu’elle ne mentionne aucunement le devoir de réserve, qui reste une construction jurisprudentielle et non une disposition statutaire explicite, dont l’usage par les tribunaux relève à chaque fois d’une analyse fine de la situation.

    #éducation #enseignant·e·s #salarié·e·s #fonctionnaire #obligation_de_neutralité #principe_de_neutralité #liberté_d'expression #service_public #devoir_de_réserve