organization:université de bourgogne

  • Histoire des métiers (1/4) : Résister à la technique ou la dompter ? Les métiers face aux technologies
    https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/histoire-des-metiers-14-resister-a-la-technique-ou-la-dompter-les-meti


    C’est en ce moment, on y parle des #typographes

    Pour ouvrir cette semaine consacrée à l’histoire des métiers, Emmanuel Laurentin reçoit François Jarrige, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Bourgogne, grand spécialiste de l’#histoire des #techniques, de l’#industrialisation, et des enjeux sociaux qui leur sont liés.

    Au XIXème siècle, le développement technologique s’accélère comme jamais auparavant, les nouvelles techniques gagnent tous les pans de la société et la modifient en profondeur, et en premier lieu, le monde du travail. Ouvriers, artisans, comment les travailleurs voient-ils leur activité et par conséquent tout leur quotidien modifié, et comment appréhendent-ils ces changements ? L’univers machinique nouveau a-t-il suscité des résistances, des enthousiasmes ? Comment les penseurs du travail s’en sont-ils emparés ?

  • Voile durant un examen : le Cneser donne raison à une étudiante
    https://www.mediapart.fr/journal/france/150519/voile-durant-un-examen-le-cneser-donne-raison-une-etudiante

    Le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) a annulé une sanction visant une jeune étudiante en droit, de confession musulmane, qui avait refusé de dégager ses oreilles durant toute la durée d’une épreuve en juin 2016. Au nom de la lutte contre les fraudes, l’université de Bourgogne avait émis des consignes de contrôle visant spécifiquement les étudiantes voilées.

    #France #Université,_voile

  • « #Dieselgate » : l’expertise qui met en cause #Renault
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/05/13/dieselgate-l-expertise-qui-met-en-cause-renault_5461406_3244.html

    En octobre 2017, les magistrats instructeurs ont ordonné à l’Institut supérieur de l’automobile et des transports (ISAT) de procéder à une batterie de tests complémentaires afin de confirmer l’hypothèse de la présence de dispositifs frauduleux. Une campagne d’essais a été réalisée sur deux modèles de la marque : Captur et Clio IV. Les conclusions de l’ISAT sont sans équivoque sur « l’existence d’une modification des dispositifs de dépollution permettant l’adaptation à la procédure d’homologation de façon différente de conditions d’utilisation réelles ».

    #paywall mais compris que ça ne marche pas sous certaines conditions : quand il fait chaud ou froid et à moins de 50 km/heure, c’est-à-dire en ville.
    #fraude #pollueur #pollution

    • Suite

      « Aucune purge » en dessous de 50 km/h

      Pour aller plus loin, les experts de l’ISAT, institut rattaché à l’université de Bourgogne, ont étudié les mécanismes de cette modification. Ils observent que les deux systèmes de dépollution retenus par Renault, la vanne dite « EGR » et le piège à NOx, ne fonctionnent pas dans certaines conditions. La vanne EGR « cesse d’être opérante » à des températures en dessous d’un seuil pouvant être rencontré l’hiver ou supérieur à un seuil qui peut fréquemment être dépassé en conditions normales, non hivernales.

      Quant au piège à NOx, il fonctionne « avec une fréquence faible sur une large plage de vitesses pratiquées couramment » et ne réalise « aucune purge » en dessous de 50 km/h. Autant dire que ces systèmes de dépollution sont largement inopérants en ville où les populations sont particulièrement exposées aux rejets de NOx. Un risque considérable en termes de santé publique puisqu’on estime que les oxydes d’azote et les particules fines sont à l’origine de 48 000 décès prématurés en France chaque année.

      Augmentation des émissions d’oxydes d’azote
      « Nous parvenons aux mêmes conclusions sur l’augmentation des émissions d’oxydes d’azote résultant de cette manipulation pour les véhicules roulant normalement et pensons que, si le fonctionnement de la vanne EGR et du piège à NOx était conforme à celui mis en place pour l’homologation, ces véhicules produiraient, notamment en circulation urbaine, nettement moins d’oxydes d’azote », poursuit l’ISAT. « De l’ordre de la moitié », estiment les experts.

      Le rapport bat en brèche les arguments de défense du constructeur. Contacté par Le Monde, le groupe explique ne « pas pouvoir commenter un document auquel il n’a pas eu accès ». Depuis le début de l’affaire, il répète qu’« aucun de ses services n’a enfreint les règles, européennes ou nationales, relatives à l’homologation des véhicules » et maintient que « les véhicules Renault ne sont pas équipés de logiciels de fraude aux dispositifs de dépollution ».

      Les conseils du constructeur estiment que l’enquête de la justice française « pose, entre les autorités européennes et les Etats membres, des questions d’interprétation des normes régissant les conditions d’homologation des véhicules ». Afin de verrouiller leur instruction, les juges du pôle santé chargés du dossier du « dieselgate » ont justement saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Cette « demande de décision préjudicielle » a été enregistrée en mars. Les juges sollicitent la CJUE pour qu’elle précise l’interprétation du droit de l’Union, afin de l’appliquer correctement dans le cadre du dossier du « dieselgate ».

      Au centre des interrogations des magistrats français, un règlement européen datant du 20 juin 2007 et « relatif à la réception des véhicules à moteur au regard des émissions des véhicules particuliers et utilitaires légers (Euro 5 et Euro 6) et aux informations sur la réparation et à l’entretien des véhicules ». C’est ce règlement n° 715/2007 qui définit les procédures d’homologation et impose aux constructeurs les exigences techniques susceptibles de limiter les rejets de gaz polluant, et notamment des fameux oxydes d’azote, dans le but d’améliorer la qualité de l’air. Il s’applique aux véhicules concernés par le « dieselgate », mis en circulation avant 2015 et répondant donc aux normes Euro 5 et Euro 6.

      « Dispositif d’invalidation »
      Au total, les juges parisiens ont adressé dix questions préjudicielles à la CJUE. Elles tournent essentiellement autour de la notion de « dispositif d’invalidation » défini dans le règlement en question. Ce dernier le décrit, dans son article 3-10, comme « tout élément de conception qui détecte la température, la vitesse du véhicule, le régime du moteur en tours/minute, la transmission, une dépression ou tout autre paramètre aux fins d’activer, de moduler, de retarder ou de désactiver le fonctionnement de tout ou partie du système de contrôle des émissions dans des conditions dont on peut raisonnablement attendre qu’elles se produisent lors du fonctionnement et de l’utilisation normaux des véhicules ».
      Un tel dispositif utilisé aux fins d’activer ou de moduler le système de contrôle des émissions pour obtenir l’homologation du véhicule peut-il être rangé dans cette catégorie ? Si oui, ce dispositif tombe-t-il sous le coup de l’article 5-2 du même règlement, qui prévoit que « l’utilisation de dispositifs d’invalidation qui réduisent l’efficacité des systèmes de contrôle des émissions est interdite » ?
      L’argument de la sécurité et de la protection du moteur
      Le même article prévoit cependant des exemptions, notamment lorsque « le besoin du dispositif se justifie en termes de protection du moteur contre des dégâts ou un accident et pour le fonctionnement en toute sécurité du véhicule ». C’est cet argument de sécurité et de protection du moteur qui est avancé par les ingénieurs de Renault et les autres constructeurs impliqués dans le « dieselgate » (hormis Volkswagen qui a reconnu la fraude aux Etats-Unis) pour en justifier l’emploi.

      C’est également pourquoi les magistrats instructeurs parisiens font cette ultime requête très technique auprès de la CJUE : « le ralentissement du vieillissement ou de l’encrassement du moteur fait-il partie des impératifs de “protection du moteur contre les dégâts ou un accident” ou du “fonctionnement en toute sécurité du véhicule” qui peuvent justifier la présence d’un dispositif d’invalidation au sens de l’article 5-2 ? ».
      La Cour de justice de l’Union européenne n’a pas encore répondu aux juges français. Le rapport d’expertise de l’ISAT, en tout cas, ne fait aucune mention d’une quelconque nécessité de « sécurité » ou de « protection du moteur » pour justifier la désactivation des systèmes de dépollution.

      Stéphane Mandard

      #bagnole #particules_fines

  • Changement d’heure
    Raisonnement par l’absurde


    Si j’ai bien compris, le prochain changement d’heure sera le dernier : décision européenne suite à un référendum.
    Donc on restera en heure d’été tout le temps.
    Donc on aura 2 heures de décalage par rapport au Soleil (à 14h de l’après midi, il sera midi solaire).
    Donc on sera dans le même fuseau horaire que l’Ukraine.
    Donc il sera la même heure en Corogne (Espagne) et au Donbass (Ukraine).
    Ce qui correspond à la même distance que de la côte est à la côte ouest des USA.
    Donc c’est comme si les USA normalisaient une heure unique sur tout leur territoire.

    Donc on sera quand même obligé de compenser le temps de présence du soleil dans nos vies.
    Donc on décalera sûrement un peu nos horaires de travail.
    Donc à l’échelle européenne certains commenceront à 7h et d’autres à 10h.
    Donc c’est comme si on ne changeait rien.

    Précédente discussion :
    https://seenthis.net/messages/719501

    PS : certains éléments sont de rapides raccourcis pour permettre de faire avancer le délire

    • Différences de longitude entre les points extrêmes de…
      • la Chine : 61°, heure unique
      • l’Union européenne : (hors Açores, Canaries et outre-mer) 48°, 3 fuseaux horaires
      • les États-Unis : (continentaux hors Alaska) 58°, 4 fuseaux horaires
      • les États-Unis : (Alaska inclus, hors Hawaï, 5 fuseaux (qui devraient être 6, l’Alaska étant décalé de pratiquement 1 fuseau,…)
      • les États-Unis (50 états) :6 fuseaux
      sans compter les territoires extrêmes, Îles Mariannes du Nord et Îles Vierges états-uniennes,…

      (pour mémoire, un fuseau horaire fait, théoriquement, 15°)

      Les Échos donne un point assez complet (09/18)
      https://www.lesechos.fr/26/09/2018/lesechos.fr/0302287681702_changement-d-heure---le-casse-tete-europeen.htm

    • Je n’ai pas d’opposition à l’arrêt des changement d’heure. Je trouve juste bête de mettre toute l’europe en Gmt+2 au lieu de Gmt+1 qui est la moyenne européenne. Et alors qu’à 60km d’ici, en Angleterre, ils restent en gmt. On travaillera aux meme horaires, sauf que ca s’appelera 8h chez eux et 10h chez moi. Simple convention. J’ai un peu entendu dire que le referendum européen c’était : vous préférez l’été ou l’hiver... Façon vous voulez une boule vanille ou chocolat ?

    • Il me semble qu’il s’agit de la fin du changement d’heure, pas de la fusion des fuseaux horaires. Cette uniformisation de l’heure de l’UE a été proposée début janvier par Szymon Dolecki, mathématicien polonais en retraite de l’Université de Bourgogne.

      Pour un fuseau horaire unique dans l’Union européenne
      https://www.courrierinternational.com/article/pour-un-fuseau-horaire-unique-dans-lunion-europeenne

      Pour ce mathématicien polonais, professeur émérite de l’université de Bourgogne, il ne devrait y avoir qu’un seul fuseau horaire en Europe, au lieu des trois actuels. Aux pays et aux régions de fixer les rythmes sociaux.

      #paywall

    • @aude_v Non. Mais c’est une idée simple qui marcherait. Un reproche cependant, ça pourrait amener à un libéralisation des décalages d’horaire par entreprise. Car je suis persuadé qu’avec l’heure fixe, on va tendre vers 2 à 3 horaires de travail par an dans chaque entreprise.

      @simplicissimus Ce n’est pas l’uniformisation d’un mono fuseau européen. (C’est une décision obligatoire mais individuelle de chaque état). Toutefois si en France il est choisi de rester à la prochaine heure d’été, on sera à la même heure que l’Ukraine. Il va peut être se produire des enclaves. Tu pourras aller en ligne droite et avoir GMT+2 GMT+1 GMT+2. J’appelle ça marcher sur la tête.

    • dans la série #enclaves, l’Arizona qui ne pratique pas l’heure d’été #daylight_saving_time à laquelle passent les États-Unis dimanche 10 mars, à l’exception de la nation Navajo qui la pratique, sauf la nation Hopi qui suit le choix de l’état, sachant qu’il y a une enclave navajo dans le territoire hopi…

      Most of Arizona Has No Daylight Saving Time
      https://www.timeanddate.com/time/us/arizona-no-dst.html

      Most of the US state of Arizona does not use Daylight Saving Time (DST). The exception is the Navajo Nation.
      ©timeanddate.com

      With the exception of the Navajo Nation, Arizona does not set the clocks forward 1 hour in spring for DST with the rest of the United States.

      Mountain Standard Time
      Almost all of Arizona is on the same time zone, Mountain Standard Time (MST), all year. The time zone has a UTC offset of minus 7 hours (UTC-7).
      It is also known as Mountain Time, but that term refers both to standard time and the time zone which is elsewhere used during DST: Mountain Daylight Time (MDT).

      Navajo Nation Uses DST
      The Navajo Nation, a semi-autonomous Native American territory, follows the United States DST schedule. It lies in northeastern Arizona, northwestern New Mexico, and southeastern Utah.

      During DST the Navajo Nation, which includes the towns of Tuba City, Chinle, and Window Rock, sets the clocks forward 1 hour to Mountain Daylight Time (MDT), which is 6 hours behind UTC (UTC-6).

      No DST in Hopi Nation
      A part of the Hopi Nation, which lies within the Navajo Nation, follows Arizona’s no-DST rule. To confuse matters more, there is also an even smaller Navajo Nation territory within the Hopi Nation within the Navajo Nation. In addition to this, there is another Hopi area adjacent to the main Hopi Nation territory.

      As a result, if driving the correct route from the Arizona state border through both Navajo and Hopi areas to the other side one can end up changing one’s clock 7 times! For example: Tuba City (Navajo) and Moenkopi (Hopi) are only a couple of miles apart, but they have a 1-hour time difference during the summer. Jeddito (Navajo), in the middle of Hopi Nation territory, is 1 hour ahead of the surrounding areas during summer.

      Opted out of DST
      Arizona is exempt from DST according to the US Energy Policy Act of 2005. The Act gives every state or territory the right to decide if it wants to use DST. If DST is observed, the state has to schedule DST in sync with the rest of the US: From the second Sunday in March until the first Sunday in November.
      Because of Arizona’s hot climate, DST is largely considered unnecessary. The argument against extending the daylight hours into the evening is that people prefer to do their activities in the cooler evening temperatures.

      Note qu’avant la standardisation de 1977, c’était la même chose à l’échelle du pays tout entier, chaque état voire chaque comté se déterminait indépendamment des autres…
      (histoire compliquée, détaillée dans l’article WP ci-dessous.

      Sinon, la Californie est en train de passer à l’heure d’été toute l’année…
      Daylight saving time in the United States - Wikipedia
      https://en.wikipedia.org/wiki/Daylight_saving_time_in_the_United_States

      California
      California voters passed Proposition 12 in 1949, approving DST in the state.
      In 2018, voters ratified a legislative plan for year-round daylight saving time, subject to congressional approval.

  • Acte IV : Gilets Jaunes des Luttes, via @paris
    https://paris-luttes.info/acte-iv-gilets-jaunes-des-luttes-11225

    Appel commun à un cortège massif des collectifs et des luttes pour un Acte IV, samedi 8 décembre, au départ de la Gare Saint Lazare et en direction des Champs-Élysées. Soyons plus nombreu.ses que jamais !

    Samedi 1er décembre, au milieu des nombreux affrontements entre Gilets jaunes et forces de police, un cortège hors du commun a vu le jour : à l’appel des Cheminots de l’Intergare, du Comité Adama, de la Plateforme d’Enquêtes Militantes, de l’Action Antifasciste Paris-Banlieue et du Comité de Libération et d’Autonomie Queer, nous avons défilé ensemble au départ de Saint-Lazare, vers les Champs-Élysées.

    Samedi 8 décembre, nous appelons à reproduire ces alliances pour faire front commun...

    Les banlieues hésitent à rejoindre le mouvement des « gilets jaunes », Louise Couvelaire (mais les lycéens du 93 et bien d’autres avant eux dès le 24 novembre ont déjà tranché, ndc)
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/05/les-banlieues-hesitent-a-rejoindre-le-mouvement-des-gilets-jaunes_5392966_32

    Les #banlieues hésitent à rejoindre le mouvement des « gilets jaunes »
    Après être restées à l’écart des #manifestations, des associations des quartiers populaires tentent de mobiliser.

    Pendant plusieurs semaines, elles n’ont pas bougé. Elles ont pris soin de rester à l’écart, « par prudence », expliquent-elles. D’abord parce qu’elles ont pensé que le mouvement était principalement conduit par des groupes d’extrême droite. Ensuite parce qu’elles ne voulaient pas qu’on impute aux banlieues les violences lors des manifestations. « Heureusement que les Noirs et les Arabes des cités n’y étaient pas dès le départ ! On leur aurait tout mis sur le dos », lance un associatif.
    Passé les premières réticences, certaines associations de banlieue tentent désormais de mobiliser les troupes. L’objectif ? Que les quartiers populaires rejoignent les « gilets jaunes » « massivement ». Un scénario que redoutent les pouvoirs publics. D’autant plus que les lycéens ont commencé à s’arrimer au mouvement.

    Les académies de Créteil et Versailles, en région parisienne, ont été parmi les premières à être touchées par les blocages, vendredi 30 novembre, sur fond de contestation autour de la réforme du baccalauréat et de Parcoursup. Ils étaient plus nombreux ce lundi à Aubervilliers et à Gagny (Seine-Saint-Denis), et à Chelles (Seine-et-Marne). Mardi, la contestation s’est poursuivie en Ile-de-France ainsi que dans plusieurs agglomérations de province, dont Marseille, Toulouse et Lyon, où des affrontements ont eu lieu entre manifestants et forces de l’ordre.

    « Nous, ce qu’on veut surtout, avant de pouvoir faire un plein d’essence, c’est du travail », lâche un résident des Yvelines
    « L’idée que les banlieues puissent se mettre en mouvement inquiète tout le monde, commente Stéphane Peu, député PC de Seine-Saint-Denis, sollicité ces derniers jours par plusieurs ministères anxieux de l’état d’esprit des quartiers. Je constate un soutien aux “#gilets_jaunes” mais pas de connexion directe. »
    Jusqu’à présent, nombre d’habitants des quartiers populaires se sont contentés d’observer ou de soutenir le mouvement à distance. « Pour une fois qu’on ne se retrouve pas en première ligne, lâche un résident des Yvelines, âgé d’une trentaine d’années, qui a participé, plus jeune, à des échauffourées dans sa ville. Et puis nous, ce qu’on veut surtout, avant de pouvoir faire un plein d’essence, c’est du travail. » D’autres ont participé dès la première journée de mobilisation, le 17 novembre, à des blocages, mais sans se revendiquer des « banlieues ». Ils l’ont fait au titre de leur activité professionnelle (contrats précaires, chauffeur VTC…) ou de leur situation personnelle (mère célibataire, chômage…), comme tout autre manifestant. « Le mouvement est né dans les zones rurales et les villes moyennes, alors forcément, les habitants des cités étaient moins représentés », précise un « gilet jaune » de Seine-Saint-Denis.

    La semaine dernière, le comité Vérité pour Adama – du nom d’Adama Traoré, 24 ans, mort en juillet 2016 à la suite d’une interpellation par des gendarmes dans le Val-d’Oise – a lancé un premier appel à rejoindre la manifestation du samedi 1er décembre, à la gare Saint-Lazare, à Paris, où se sont retrouvés ses alliés habituels : cheminots, étudiants proches de l’ultragauche et antifascistes. Etaient aussi présents le député de La France insoumise de Seine-Saint-Denis, Eric Coquerel, et le porte-parole du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), Oliver Besancenot. « Du MIB [Mouvement de l’immigration et des banlieues] au Larzac… Au comité Adama. En jaune », était-il inscrit sur l’une des banderoles.

    Cette semaine, le comité Adama, qui appelle à une « alliance des luttes », veut passer à la vitesse supérieure en activant tous ses réseaux. « Nous ne sommes pas porte-parole des quartiers ni représentatifs, il est essentiel que d’autres acteurs viennent grossir les rangs, on ne peut pas le faire tout seul : nous sommes donc en lien avec des associations en Ile-de-France mais aussi en province prêtes à suivre », affirme Assa Traoré, sœur d’Adama et figure de la lutte contre les violences policières.
    « Grave erreur »
    « On se sent une lourde responsabilité par rapport aux risques de violences et c’est en partie pour cela que l’on a hésité à y aller, explique Almamy Kanouté, militant politique et membre du comité Vérité pour Adama. Mais si nous restons plus longtemps absents de cette révolte légitime, cela va nourrir encore un peu plus le sentiment d’exclusion des habitants des quartiers. » Pour l’association, il s’agit avant tout d’« emmerder l’Etat » en essayant de « canaliser les énergies » sur des opérations précises : sièges de bâtiments institutionnels, opérations de péages gratuits…
    « Inciter les jeunes des quartiers à se joindre aux manifestations est une grave erreur, tempête un associatif. On sait très bien que certains ne viendront pas pour marcher ni bloquer, et personne ne pourra rien maîtriser. » « Parce que des “gilets jaunes” ont été violents, alors les quartiers n’auraient plus le droit d’y aller, sous prétexte qu’ils le seront forcément ? Et encore une fois on serait mis de côté ! Non », s’insurge Assa Traoré.
    Lire aussi Face à la crise du mouvement des « gilets jaunes », les préfets sonnent l’alerte politique
    La contestation actuelle, « déstructurée », leur permet de se joindre au mouvement « sans avoir à demander l’autorisation ni à attendre une invitation ». Estimant que les quartiers populaires urbains sont confrontés aux mêmes problématiques que les territoires ruraux et périurbains – vie chère, fins de mois difficiles, injustice sociale… –, le comité Adama – associé au collectif des cheminots de l’Intergare, à l’Action antifasciste Paris-banlieue et au site Plate-forme d’enquêtes militantes –, veut également « faire remonter » certaines revendications propres aux habitants des banlieues, qui ne figurent, à l’heure actuelle, dans aucun des cahiers de doléances de « gilets jaunes », telle que la lutte contre le racisme, les discriminations et les violences policières.
    « L’enjeu pour les habitants des banlieues, c’est avant tout d’avoir un boulot, souligne Anasse Kazib, du collectif des cheminots de l’Intergare et militant à SUD-Rail. Il y a une rage dans les quartiers, mais ils ne se mobilisent pas facilement. » « Pour l’instant, ça n’a pas l’air de prendre, mais personne ne sait comment la situation peut évoluer, conclut Stéphane Peu. Les phénomènes déclencheurs sont toujours imprévisibles. »
    Louise Couvelaire

    « Les “gilets jaunes”, la mèche qui allume l’incendie », Bertrand Bissuel et Raphaëlle Besse Desmoulières
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/05/les-gilets-jaunes-la-meche-qui-allume-l-incendie_5392928_823448.html

    Alors que les lycéens et les routiers se mobilisent, historiens et observateurs analysent le risque de coagulation.

    Le mouvement des « gilets jaunes » va-t-il s’éteindre ou donner des idées à d’autres composantes du corps social ? La question reste totalement ouverte, en dépit des annonces faites, mardi 4 décembre, par Edouard Philippe pour répondre aux attentes de milliers de personnes, engagées dans la bataille depuis près d’un mois. « Je suis très inquiète », confie au Monde Danielle Tartakowsky, historienne et auteure de plusieurs ouvrages sur les manifestations de rue en France. Pour elle, les mesures dévoilées mardi ne sont pas de nature à faire retomber la tension : « Ça vient beaucoup trop tard, il aurait fallu faire ça au début. » Dominique Andolfatto, professeur de science politique à l’université de Bourgogne, n’est guère plus optimiste, et considère que « le gouvernement joue la montre en escomptant que la mobilisation pourrisse sur pied ».

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    Si le blocage des dépôts pétroliers de Lorient et de Brest a été levé après le discours de M. Philippe, les lycéens ont continué, mardi, à s’opposer à la réforme du lycée et à Parcoursup, avec plusieurs incidents à la clé. Deux sites d’universités parisiennes ont également été gagnés par le vent de fronde. Et l’UNEF appelle à défiler, le 13 décembre, contre l’augmentation des frais d’inscription infligée aux étudiants venus de pays extérieurs à l’Europe. La FNSEA, de son côté, brandit la menace de manifestations d’agriculteurs, la semaine prochaine.

    Lire aussi La FNSEA menace le gouvernement de mettre des agriculteurs dans la rue

    Fronts ouverts
    A ce stade, la jonction n’a pas été établie entre ces nouveaux foyers de contestation. Mais ils représentent autant de fronts ouverts pour l’exécutif. D’autres pourraient surgir, à un échelon plus local. « Dans les entreprises, ça crée un appel d’air, avec une montée des revendications salariales, comme l’illustre le conflit en cours chez BNP Paribas », observe Jean-Dominique Simonpoli, directeur général de l’association Dialogues. Les « gilets jaunes » sont « la mèche qui allume l’incendie », déclare Yves Veyrier, numéro un de FO : « S’agrège dessus des mécontentements rentrés qui voient une opportunité de se faire entendre. » Espéré par la gauche de la gauche, dès le lendemain de la victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle, « le troisième tour social est là », considère un haut fonctionnaire, familier de ces problématiques. Et « la révolte vient de loin », ajoute-t-il, en faisant référence au titre d’un ouvrage de Charles Tillon, une figure du PCF au XXe siècle.

    Si la comparaison avec Mai-68 a pu être faite, Mme Tartakowsky ne la juge pas forcément pertinente. « A l’époque, il s’agissait de violences de la part d’étudiants qui défendaient leurs universités qu’ils considéraient comme leur territoire, dit-elle. Ça n’a rien à voir avec la violence de certains “gilets jaunes” qui est offensive et qui intervient sur le #territoire de l’autre – Paris et dans les quartiers riches. »

    L’issue du bras de fer est tributaire d’un élément : le soutien de l’opinion publique, resté élevé même après les violences de samedi. Un sondage BVA, réalisé lundi et mardi, révèle cependant que, pour près de sept personnes sur dix, un report de la hausse des prix des carburants justifierait l’arrêt de la confrontation.

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    « Ovni social »
    Mais personne ne peut prédire ce qui va se passer. « La forme du mouvement ne se prête pas à une sortie de crise classique car il n’y a pas d’interlocuteur, ce qui est désarmant », souligne un ex-conseiller de l’exécutif, qui a servi sous une précédente législature. « Les “gilets jaunes” représentent un phénomène que l’on n’a jamais connu, une sorte d’ovni social et politique qui a vu le jour à la faveur d’une #cyber-contestation, lancée sur les réseaux sociaux par des inconnus », complète Raymond Soubie, président de la société de conseil Alixio.

    Pour le moment, les organisations de salariés sont en dehors ou à côté des « gilets jaunes », mais elles peuvent difficilement rester spectatrices. Quelques-unes se mettent d’ailleurs en mouvement. Ainsi, les fédérations CGT et FO, dans le monde du transport, exhortent les salariés à cesser le travail, à partir du 9 décembre, estimant que les dispositions prises mardi en faveur du pouvoir d’achat sont trop faibles. La section cégétiste de l’entreprise Lafarge a de son côté annoncé qu’elle allait rejoindre les « gilets jaunes » samedi. A l’échelon confédéral, la CGT appelle à une « grande journée d’action », le 14 décembre « pour les salaires, les pensions et la protection sociale ». Mais les autres centrales, qui critiquent une façon de faire « unilatérale », ne semblent pas emballées.

    « L’ensemble des organisations syndicales ont un coup à jouer, il y a un espace à prendre face à un mouvement qui n’est pas parvenu à s’organiser, commente Jean-Marie Pernot, de l’Institut de recherches économiques et sociales. Mais chacun y allant de son couplet, elles sont inaudibles. » « La conjoncture devrait justifier un front commun et de s’entendre sur quelques propositions-clés », appuie M. Andolfatto, qui rappelle que la désunion ne date d’hier. C’est d’autant plus regrettable pour elles que le mouvement social actuel constitue « un moment unique », décrypte M. Pernot. Toutefois, les numéros uns des confédérations syndicales doivent se retrouver jeudi pour une réunion informelle au siège de la CFDT.

    Article réservé à nos abonnés Lire aussi Gérard Collomb : « La situation appelle à se rassembler plus qu’à se fractionner »

    Mais la séquence d’aujourd’hui montre qu’une partie des actifs ne compte pas sur les corps intermédiaires pour exprimer leurs doléances. Un tel phénomène « commence à émerger dans certaines entreprises où il y a pourtant une présence syndicale », rapporte M. Simonpoli, en évoquant « des salariés qui s’organisent entre eux », sans passer par les canaux traditionnels. « C’est inquiétant pour les syndicats et les directeurs de ressources humaines, poursuit-il. Avec qui va s’organiser la négociation, en interne ? »
    Au fond, tout se passe comme si les « gilets jaunes » révélaient la fragile légitimité des #partenaires_sociaux « établis ». « La question se pose mais elle n’a pas été mise au jour par la mobilisation en cours, objecte Philippe Louis, le président de la CFTC. Nos organisations doivent faire leur mue, inventer de nouvelles méthodes pour aller au-devant des salariés et leur proposer d’autres services. »
    En attendant, des milliers de personnes crient leur colère et le rejet de nos institutions. Toutes sont jetées dans un même sac, aux yeux de M. Soubie : les partis politiques, les corps intermédiaires… « C’est très préoccupant pour le fonctionnement de notre démocratie », conclut-il

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  • À quoi servent encore les manifs en 2018 ? | Radio Parleur
    https://www.radiocampusparis.org/radio-parleur-a-quoi-servent-encore-les-manifs-en-2018

    Après les mouvements sociaux du printemps 2018, le sentiment d’échec était fort pour certains corps de métier en lutte, comme les cheminot.es, les postier.es, les étudiant.es, les soignant.es. Qu’est-ce qui les pousse aujourd’hui à redescendre dans la rue, alors que de leur propre aveu, face à eux, le gouvernement se montre inflexible ? Pour en discuter, nous recevons Xavier Piemont, syndicaliste de SUD Rail, et Dominique Andolffato, professeur de sciences politiques à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté, chercheur au Credespo et spécialiste du syndicalisme. Durée : 1h. Source : Radio Campus Paris

    https://www.radiocampusparis.org/podcasts/radioparleur/Mensuelle%209%20oct%202018.wav

  • Classer les choses, penser les hommes (3/4)
    Tous fichés ?

    LSD, La série documentaire par Perrine Kervran – 17/01/2018
    https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/classer-les-choses-penser-les-hommes-34-tous-fiches

    http://rf.proxycast.org/1390971409584365568/10177-17.01.2018-ITEMA_21558541-0.mp3

    Des vies dans des serveurs et des noms sur des fiches

    Aujourd’hui nos vies ont des reproductions sous forme de données ou de traces dans des serveurs et sont répliquées partout dans le monde. De quoi sont faites ces données, comment sont-elles utilisées, qu’est-ce qu’elles racontent de notre identité ?

    2,5 millions de fiches et 600 000 dossiers constituent le fichier central de la sureté nationale, un incroyable « fossil archivistique » conservé aux archives nationales datant du 19ème siècle et qui raconte de manière administrative le destin de millions de personnes.

    Classer les signes visibles, marquer les gens, le fichage des êtres humains que ce soit économique ou politique suscite toujours des inquiétudes légitimes. Des serveurs de Pantin aux fichiers administratifs, réflexion autour du fichage et de l’identification.

    "Qu’est ce qui fait mon identité, la vôtre, qu’est ce qui fait que je suis différent de vous, qu’est ce qui fait que vous êtes unique et que personne ne vous ressemble ?

    Nous sommes à la fois là et dans le serveur.

    On a été des catégories maintenant nous sommes des comportements.

    Imaginons une situation où vous observez que chaque nuit la lumière chez telle personne s’allume et s’éteint 4 ou 5 fois, qu’est-ce que ça peut vouloir dire ?

    J’ai besoin de vivre dans une société dans laquelle des gens cachent des choses.

    Ces fichiers sont la seule trace de l’existence de millions de gens."

    AVEC

    Arnaud Laroche, directeur associé de la société EY
    Mokrane Lamari, directeur des opérations clients chez Equinix France
    Dominique Cardon, sociologue et directeur du laboratoire de recherche MédiaLab de Science Po
    Jean-Marc Berlière, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Bourgogne et chercheur au CNRS
    Marion Veyssière, conservateur du patrimoine aux Archives Nationales et responsable du département de la justice et de l’intérieur
    Violaine Challeat-Fonck, conservateur aux Archives Nationales en charge des fonds du ministère de l’intérieur

    Une série documentaire de Laëtitia Druart, réalisée par Doria Zénine

    BIBLIOGRAPHIE

    A quoi rêvent les algorithmes ? Nos vies à l’heure des big data - Dominique Cardon, éditions du Seuil

    Histoire de l’identification des personnes - Ilsen About et Vincent Denis, éditions de La Découverte

    Fichés ? Photographie et identification du second empire aux années 60 - Catalogue de l’exposition sous la direction de Jean-Marc Berlière et Pierre Fournié

    EXTRAITS DES FILMS

    « Le prisonnier » de George Markstein et Patrick McGoohan (1967)

    « Alphaville » de Jean Luc Godard (1965)

    « Brazil » de Terry Gilliam (1985)

    EN PARTENARIAT

    Cette semaine, LSD, La série documentaire est en partenariat avec Tënk, la plateforme du documentaire d’auteur, qui vous permet de visionner le film de Philippe Ayme, intitulé Brigitte Senut, la dame aux fossiles.

  • En 1840, Etienne Cabet rêvait un paradis rouge

    http://www.lemonde.fr/festival/article/2017/08/25/en-1840-etienne-cabet-revait-un-paradis-rouge_5176317_4415198.html

    COMME SUR L’ÎLE D’UTOPIE DE THOMAS MORE OU DANS LA CITÉ DU SOLEIL DE CAMPANELLA, RIEN NE SE VEND, RIEN NE S’ACHÈTE : L’USAGE DE LA MONNAIE EST INTERDIT AUX PARTICULIERS

    Il fallait oser. Ecrire un récit de voyage au XIXe siècle, une époque où le genre semble avoir fait long feu, n’a rien d’évident. En ce temps-là, plus personne ne s’assume utopiste – sauf Etienne Cabet, l’auteur de Voyage en Icarie, d’abord paru en 1840 sous le titre de Voyage et aventures de lord William Carisdall en Icarie. Contrairement à la plupart de ses contemporains, cet ancien militant républicain qui a lutté contre la monarchie de Juillet ne craint pas de revendiquer l’héritage du premier utopiste, Thomas More, pour expliquer sa conversion au communisme.

    Alors que Thomas More s’adressait, au XVIe siècle, aux humanistes, le livre d’Etienne Cabet est, lui, à destination des ouvriers. « Il a dans l’idée qu’il faut d’abord remodeler les imaginaires afin de pouvoir transformer le réel », affirme François Jarrige, maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Bourgogne. Pour faciliter la lecture de son livre, il choisit de recourir à la forme éprouvée du récit de voyage et il adopte un style simple, sans se perdre dans des analyses austères. A rebours d’un Charles Fourier dont l’écriture est empreinte d’une sécheresse mathématique, il met en œuvre une « stratégie publicitaire », estime encore l’historien.

    Langage des masses

    A la fin de son utopie, Etienne Cabet s’en explique : « Il y a deux manières d’écrire pour le Peuple ; l’une, (…) d’embrouiller et d’obscurcir les choses simples et claires, souvent pour avoir l’air d’être savant ; l’autre, d’éclaircir les choses les plus embrouillées, de faire de la science sans le dire et de tout faire comprendre en employant la langue vulgaire. » Il choisit la deuxième option : parler le langage des masses exige, selon lui, des compromis. « Cabet n’est pas anticlérical mais, dans une société encore très chrétienne, tenir un discours religieux en expliquant que le vrai christianisme est en Icarie vise à gagner le peuple à sa cause sans l’effrayer », poursuit l’historien François Jarrige.

    La mise en scène de Voyage en Icarie sera on ne peut plus classique : parti le 22 décembre 1835, Lord William Carisdall arrive au port de Camiris, sur la côte orientale du pays imaginaire des Marvols. Icarie, dont le nom évoque une île grecque de la mer Egée, en est séparé par un bras de mer qui se traverse en six heures. Dans cette contrée passionnée d’égalité qui ne figure sur aucune carte, seuls sont admis les étrangers parlant la langue icarienne. Très facile à apprendre, elle est destinée à devenir « la langue de toute la terre » : « parfaitement rationnelle, régulière et simple », elle « s’écrit comme elle se parle et se prononce comme elle s’écrit ». Les règles y « sont en très petit nombre, et sans aucune exception » et « tous les mots (…) ont une signification parfaitement définie ».

    Le navigateur débarque dans la ville « neuve et régulière » de Tyrama, avec ses rues « droites, larges et parfaitement propres » qui rappellent au narrateur la rue de Rivoli, à Paris. Tout y est « charmant » – les maisons, les jardins, les fermes, les villages, les coteaux, les enfants… « C’était la plus jolie de toutes les villes que je connaissais », écrit Etienne Cabet, non sans une pointe de naïveté. A l’arrivée de Lord William Carisdall, les autorités du pays lui demandent de s’acquitter de la somme de deux cents guinées : la nation se chargera ensuite de lui fournir ce dont il a besoin pendant ses quatre mois de séjour. Car en Icarie, comme sur l’île d’Utopie de Thomas More ou dans la Cité du soleil de Campanella, rien ne se vend, rien ne s’achète : l’usage de la monnaie est interdit aux particuliers.

    A la pointe de la technologie

    Voyage en Icarie ne fantasme pas un mode de vie simple et champêtre, comme c’est souvent le cas dans le genre utopique. « C’est l’une des premières utopies communistes fondée sur la technique et sur le déploiement de machines », relève François Jarrige. Cabet raconte l’émerveillement de son voyageur. « Nous atteignîmes un grand chemin de fer sur lequel la vapeur nous transporta avec la rapidité du vent ou de l’éclair. » Plus surprenant pour l’époque, les Icariens ont des sous-marins et voyagent en ballon. « Le voyage aérien est non seulement le plus rapide et le plus agréable, mais encore celui qui présente le moins d’accidents et de dangers », pressent l’auteur. Autant dire qu’il préfigure l’avion, inventé à la toute fin du XIXe siècle.

    Ce pays à la pointe de la technologie vit sous le régime d’une démocratie absolue. En Icarie, les deux mille députés qui sont élus pour deux ans sont choisis parmi les citoyens les plus habiles. Le peuple souverain donne mandat à cette représentation nationale. Chargé d’exécuter les décisions du pouvoir législatif, le pouvoir exécutif est quant à lui « comptable, responsable et destituable ». On ne le confie pas à un seul homme mais à un corps qui inclut le président.

    Les citoyens forgent leur sens politique et débattent des affaires publiques dans mille assemblées populaires. On y traite d’importantes questions : « pour jouir plus souvent de la campagne », faut-il travailler sept heures et trente minutes par jour au lieu de sept afin d’avoir un jour de repos tous les cinq jours, et non tous les dix jours ? Dans ce débat, Cabet est en avance sur son temps : en France, les premières réglementations sur la durée du travail des enfants sont adoptées un an après la publication de son livre, en 1841 – la journée de dix heures à Paris et onze heures en province sera, elle, actée en 1848 par le gouvernement provisoire de la République.

    Réseau de disciples

    Davantage propagandiste que philosophe, Etienne Cabet maîtrise à la perfection les outils de la communication politique. Il possède un réseau de disciples dévoués qui compte beaucoup de femmes et d’ouvriers. Organisés autour de son journal, Le Populaire, ils sont présents dès 1846 dans tous les départements français. Cabet désigne en outre des « correspondants » qui récoltent des signatures pour des pétitions et collectent des fonds. Surtout, « ils veillent au respect des principes icariens : la réprobation des sociétés secrètes, le refus absolu de participer aux actes de violence », rappelle François Fourn, docteur en histoire, contributeur du Dictionnaire des utopies (Larousse, 2002).

    La diffusion des idées d’Etienne Cabet est telle qu’avant 1848 la plupart des communistes français sont icariens, constate François Fourn. « Jusqu’à la caricature, [Cabet] donne à son Icarie toutes les apparences d’un incroyable pays de cocagne, d’un paradis terrestre pour les ouvriers », résume-t-il. Cabet souhaite cependant que ce rêve devienne réalité : le 9 mai 1847, il lance un cri enthousiaste dans les colonnes de son journal : « Allons en Icarie ! » Depuis un an, la France est en proie à une crise économique, le communisme fait peur et cet utopiste revendiqué est en mauvaise posture – le pouvoir l’accuse d’être la cause de la moindre émeute et il est lâché par les réformateurs.

    Son appel s’adresse aux Icariens. « Persécutés comme Jésus et ses disciples par de nouveaux Pharisiens, retirons-nous comme eux dans le désert, dans une terre vierge, pure de toute souillure, qui nous offrira tous les trésors de sa fécondité. » Des terres sont achetées aux Etats-Unis et soixante-neuf hommes partent du Havre le 3 février 1848 pour rejoindre le nord du Texas. Trois semaines plus tard, la révolution éclate en France : Cabet y participe mais finit par rejoindre ceux qui ont émigré de l’autre côté de l’Atlantique.

    Là-bas, c’est le fiasco. Mal préparés, les ouvriers qui rêvent d’une république idéale se retrouvent plongés dans des marais. Après avoir marché pendant des semaines et contracté des maladies, ils finissent par battre en retraite et se replier sur La Nouvelle-Orléans (Louisiane). D’autres les rejoignent, sans savoir ce qui les attend. Et, quand Cabet arrive à son tour, il fonde avec les disciples qui n’ont pas baissé les bras la communauté de Nauvoo, une ville située dans l’Illinois. Considéré comme un petit dictateur, il est cependant mis en minorité en 1856. Son rêve américain tourne court puisqu’il meurt la même année.

    Très célèbre de son vivant, plus connu que Proudhon et même que Marx, Etienne Cabet est oublié aussitôt après sa disparition. Au XXe siècle, seuls les communistes de Russie, où son livre est traduit, continuent de s’intéresser à son modèle centralisé et étatiste. Sans doute l’expérience de l’URSS a-t-elle joué en sa défaveur. Mais, par-delà les réinterprétations anachroniques, Etienne Cabet soulève une question toujours d’actualité : il prétend que les machines vont permettre, en remplaçant les ouvriers, de réduire la durée journalière du travail. Près de deux siècles plus tard, le débat sur l’automatisation de l’emploi agite plus que jamais le débat politique.

  • Machine arrière : histoire et machines agricoles | Les paysans et paysannes dans la lutte des classes
    https://blogs.radiocanut.org/luttespaysannes/2017/02/26/machine-arriere-histoire-et-machines-agricoles

    Conférence de François Jarrige, historien à l’université de Bourgogne. Il revient sur une partie de l’histoire contemporaine de la mécanisation agricole avec l’arrivée de la batteuse dans les campagnes, décortique les mécanismes sociaux et politiques qui en ont découlés et évoque les contestations paysannes de l’époque. Durée : 1h. Source : Radio Canut

    https://blogs.radiocanut.org/luttespaysannes/files/2017/02/lpdlc9f%C3%A9v2017.mp3

  • Intelligentes et autonomes : des caméras de surveillance d’un nouveau genre
    http://www.sciencesetavenir.fr/high-tech/20160112.OBS2684/intelligentes-et-autonomes-des-cameras-de-surveillance-d-un-nouveau

    Un laboratoire de l’université de Bourgogne va tester un réseau de caméras capable de repérer des anomalies à l’image et d’y réagir en temps réel, sans assistance humaine. ÉCRANS. Alerte incendie au bureau ! Vous bondissez de votre siège pour vous précipiter comme tout le monde vers les issues de secours… et puis vous avisez un écran au mur qui pointe une autre direction. Respectant cette consigne, vous voilà au bout d’un couloir où un autre écran donne la suite de l’itinéraire. D’autres se succèdent (...) #vidéo-surveillance #CCTV #reconnaissance_du_comportement