organization:université de pennsylvanie

  • Dissuasion nucléaire : de la bombe A à la bombe IA
    https://www.france24.com/fr/20190509-ia-intelligence-artificielle-nucleaire-menace-atomique-sipri-russ

    Le 3 juin 1980 à 2 h 26 du matin, Zbigniew Brzezinski, conseiller à la Sécurité nationale du président américain Jimmy Carter reçoit un appel alarmiste : 220 missiles nucléaires soviétiques se dirigent vers les États-Unis. Quelques minutes plus tard, un nouveau coup de fil du centre de commandement militaire l’informe qu’en réalité ce sont 2 200 bombes qui menacent le sol américain. Finalement, alors que le conseiller s’apprêtait à prévenir le chef du “monde libre” de l’imminence d’un bombardement nucléaire russe, les responsables militaires réalisent que le système d’alerte automatisé s’est emmêlé les pinceaux. La guerre froide a failli devenir très chaude à cause… d’un composant informatique bon marché qui n’a pas fonctionné correctement.

    L’intelligence artificielle peut aussi menacer le fragile équilibre entre les puissances nucléaires. “Un État qui n’est pas sûr de sa dissuasion nucléaire sera davantage tenté d’automatiser sa force de frappe, ce qui augmente aussi le risque de son utilisation accidentelle”, craint Michael Horowitz, politologue et spécialiste des problématiques de défense à l’Université de Pennsylvanie qui a participé à l’élaboration du rapport du Sipri. Ainsi, les États-Unis, sûrs de leur domination nucléaire, se montreront plus prudents dans l’adoption de l’IA qu’une puissance nucléaire mineure comme le Pakistan.

    L’intelligence artificielle est donc une arme à double tranchant dans le domaine nucléaire. Elle peut contribuer à rendre le monde plus sûr. Mais il “faut une adoption responsable, cela implique de prendre le temps d’identifier les risques associés à l’usage de l’IA, ainsi que de chercher des solutions pour les contrer à l’avance”, conclut Vincent Boulanin. Car les financiers ont utilisé les mêmes arguments - vitesse, fiabilité - pour pousser au plus vite à l’introduction des algorithmes dans les salles de marchés. Conséquence : le trading à haute fréquence a été à l’origine de plusieurs incidents très coûteux pour les investisseurs. Et, dans le domaine nucléaire, ce n’est pas qu’une question d’argent.

  • Le prix du premier enfant sur le salaire des femmes
    Par Ioana Marinescu, professeure d’économie à l’université de Pennsylvanie — 8 avril 2019 à 17:06
    https://www.liberation.fr/debats/2019/04/08/le-prix-du-premier-enfant-sur-le-salaire-des-femmes_1720101
    Une étude a mesuré les baisses de revenus après un premier accouchement chez les couples hétérosexuels comme lesbiens. Les conclusions sont édifiantes.

    Le prix du premier enfant sur le salaire des femmes

    Pourquoi les femmes gagnent-elles moins d’argent que les hommes ? Dans les pays riches, les femmes sans enfant gagnent à peu près la même chose que les hommes. La différence de salaire entre les hommes et les femmes ne peut donc pas s’expliquer par la biologie : les femmes ne sont pas intrinsèquement moins productives. Pourtant, lors de la naissance du premier enfant, un écart de salaire entre hommes et femmes se creuse puis persiste. Un nouveau document de travail par Andresen et Nix montre que cet écart de salaire s’explique largement par des raisons culturelles, et qu’il peut être réduit par un meilleur accès aux crèches.

    Que ce soit aux Etats-Unis, au Danemark ou en Norvège, la naissance du premier enfant s’accompagne d’une baisse de revenu pour les nouvelles mères. En Norvège, le revenu d’une mère baisse d’environ 20 % et, même lorsque l’enfant grandit, cet écart demeure. Quelles sont les raisons profondes pour lesquelles les mères choisissent de travailler moins ou dans des jobs moins rémunérateurs ?

    Pour tenter d’y répondre, les chercheurs comparent l’effet d’une première naissance sur le revenu dans les couples hétérosexuels et dans les couples lesbiens.

    Dans les couples hétérosexuels, le salaire du père n’est donc pas affecté par la naissance du premier enfant. La mère subit une perte de revenu d’environ 20 %, qui persiste au cours du temps. On pourrait penser que cela est simplement dû au congé maternité. Si c’était le cas, encourager le congé paternité pourrait contribuer à une plus grande égalité dans le couple. En fait, il n’en est rien. La Norvège a rendu le congé paternité de plus en plus attractif, et de plus en plus de pères en ont profité. Mais sans que le revenu des mères n’augmente.

    Que se passe-t-il dans les couples lesbiens ? La femme qui accouche pour la première fois subit également une perte de revenu, mais « seulement » d’environ 10 %. Contrairement aux pères qui ne subissent pas de perte de salaire, la compagne d’une nouvelle mère homosexuelle subit elle aussi une perte de revenu d’environ 5 %. Cela suggère que la compagne participe plus activement aux activités au foyer que ne le fait le père dans un couple hétérosexuel. Alors que dans les couples hétérosexuels la baisse de revenu demeure pendant plus de cinq ans, dans les couples lesbiens la baisse de revenu s’efface cinq ans après la naissance du premier enfant.

    Le fait que l’effet de la naissance du premier enfant n’est pas le même sur les deux femmes dans un couple lesbien suggère que la naissance elle-même - les soins du nouveau-né, y compris l’allaitement - joue bien un rôle dans la baisse de revenu. Mais dans ces couples, la mère qui a accouché perd moins de terrain professionnellement, sa compagne semble l’aider davantage et in fine la perte de revenu s’efface. Il est donc vraisemblable que des normes plus égalitaires règnent dans les couples lesbiens.

    En revanche, dans les couples hétérosexuels, les normes renforcent le handicap de la mère et créent une inégalité persistante, même au-delà de la toute petite enfance où la biologie peut jouer un rôle plus important. Cette norme prescrit encore souvent à la mère de mettre l’accent sur son foyer plus que sur son travail.

    Alors comment peut-on créer plus d’égalité salariale ? Encore une fois, l’expérience de la Norvège est édifiante. Avant 2002, moins de 50 % des enfants de 1 à 2 ans allaient à la crèche. En 2002, le gouvernement a décidé d’augmenter le nombre de places en crèche. Les chercheurs montrent que l’arrivée de places supplémentaires dans une ville réduit la perte de salaire des nouvelles mères d’environ 25 %. Il est donc possible de réduire les inégalités salariales entre les hommes et les femmes en augmentant l’accès aux crèches.

    Comme le montre l’expérience des couples lesbiens, la perte de salaire subie par les mères n’est pas une fatalité. Une culture plus égalitaire au sein du couple permet aux nouvelles mères de rattraper leur retard salarial plus vite.

    En attendant le changement - lent - de la culture et des mentalités, l’intervention du gouvernement pour fournir des places en crèche peut réduire les inégalités salariales entre hommes et femmes.

    Cette chronique est assurée en alternance par Pierre-Yves Geoffard, Anne-Laure Delatte, Bruno Amable et Ioana Marinescu.
    Ioana Marinescu professeure d’économie à l’université de Pennsylvanie

  • Sois heureux et travaille : quand le bonheur devient une injonction de tous les instants - Idées - Télérama.fr
    https://www.telerama.fr/idees/sois-heureux-et-travaille-quand-le-bonheur-devient-une-injonction-de-tous-l

    Selon la sociologue israélienne Eva Illouz, professeure à l’Université hébraïque de Jérusalem et directrice d’études à l’EHESS, auteure avec Edgar Cabanas d’Happycratie. Comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies, la psychologie positive, née aux Etats-Unis à la fin des années 1990, qui promeut à tout-va l’épanouissement personnel et le bien-être, a fait des ravages. Le bonheur n’est plus une émotion, idéale source de vertu durant des siècles de philosophie, il est devenu une injonction de tous les instants, une norme sociale qui dicte sa loi et enferme l’individu dans un moule. « Le portrait-robot de la personne heureuse correspond point par point au portrait idéal du ­citoyen néolibéral »…

    L’une des caractéristiques de cette « happycratie », c’est d’étouffer toute revendication sociale ou politique…
    L’happycratie est cette injonction permanente au bonheur, considéré comme l’horizon suprême du moi, l’expression la plus haute de l’accomplissement personnel. Qu’elle soit portée par des psys, des coachs, des conférenciers, des manuels, des blogs, des applications pour téléphone ou des émissions télévisuelles, la pseudo-science du bonheur promet d’enseigner à tous l’art d’être heureux, l’art de voir les choses de façon positive. Cette idéologie, centrée sur l’individu, le considère logiquement comme responsable de ses succès et de ses échecs, source de ses biens et de ses maux : il n’y aurait donc jamais de problème structurel, politique ou social, mais seulement des déficiences psychologiques individuelles, pouvant être traitées et améliorées. Nous ne sommes pas loin de la vision néolibérale d’une Margaret Thatcher qui disait que la société n’existait pas, et qu’il n’y avait que des individus… La tyrannie du bonheur fait en effet peser sur le seul individu tout le poids de son destin social.

    A partir du moment où Martin Seligman, l’inventeur de la psychologie positive, professeur à l’Université de Pennsylvanie, a été élu en 1998 à la tête de l’APA (American Psychological ­Association), des multinationales comme Coca-Cola et des institutions comme l’armée ont commencé à financer ce nouveau champ de recher­che, qui optimisait à leurs yeux les chances d’avoir des salariés ou des soldats performants et obéissants. Car ce qu’exalte Martin Seligman, ce sont très étrangement les qualités psychiques nécessaires à l’organisation économique et au mode de travail des gran­des entreprises ; la capacité à être flexible, à passer d’un emploi à un autre ; l’aptitude à gérer cette incertitude sans anxiété et à voir toujours le bon côté des choses ; le fait de pouvoir non seulement accepter un probable licenciement mais de s’en réjouir.

    Comment cette science du bonheur est-elle devenue une industrie ?
    Appliquée à tous les domaines de la vie quotidienne, le travail, la sexualité, le couple, l’alimentation, le sommeil, etc., elle est gouvernée par une pure logique de marché. Avec elle, le marché des consommateurs potentiels de la psychologie n’a cessé de s’élargir. Au départ, la psychologie s’occupait des fous et des névrosés ; elle s’intéresse aujourd’hui à tous ceux qui se sentent bien, ou pas trop mal, et leur vend l’idée qu’ils pourraient maximiser leur bien-être, dans la lignée de la pensée libérale et utilitariste du philosophe anglais Jeremy Bentham (1748-1832). C’est le grand tournant opéré par Martin Seligman : changer le paradigme d’une psychologie centrée sur la pathologie par une psychologie centrée sur le bonheur. C’est comme si on allait chez le médecin pour qu’il nous parle exclusivement des organes qui fonctionnent bien dans notre corps… La psychologie ne cherche plus à remédier à la souffrance — elle la nie au contraire, comme on l’a vu. Elle cherche à maximiser les potentialités de l’individu.

    #Psychologie #Néolibéralisme #Happycratie #Eva_Illouz

  • Les ambassades américaines à Cuba et en Chine visées par des armes à micro-ondes
    https://www.lemonde.fr/international/article/2018/09/03/les-ambassades-americaines-a-cuba-et-en-chine-visees-par-des-armes-a-micro-o

    Les Etats-Unis, la Russie, la Chine et de nombreux pays d’Europe sont considérés comme ayant le savoir-faire nécessaire pour développer une arme à micro-ondes.

    Les « incidents de santé » subis pas des diplomates américains à Cuba et en Chine au cours des deux dernières années pourraient avoir été causés par des faisceaux de micro-ondes, a écrit le New York Times, samedi 1er septembre, citant des experts et des scientifiques.

    Depuis la fin 2016, 25 diplomates américains et les membres de leur famille à Cuba ont été victimes de mystérieuses « attaques » décrites comme des sons aigus très intenses –provoquant des blessures ressemblant à des traumatismes cérébraux. Au moins un autre employé du gouvernement américain en Chine a aussi été frappé par les mêmes symptômes.

    Ces attaques ont parfois été qualifiées d’« acoustiques » même si leur cause n’a pas été élucidée et que leurs éventuels auteurs sont toujours inconnus. Les symptômes signalés comprenaient des étourdissements, des maux de tête, des acouphènes, de la fatigue, des problèmes cognitifs, des problèmes visuels ou encore des troubles de l’oreille et du sommeil, selon le département d’Etat américain.

    Une étude détaillée sur les incidents à Cuba, publiée par la revue JAMA en mars, faisait seulement mention d’une « source d’énergie inconnue » mais son auteur principal, Douglas Smith, de l’université de Pennsylvanie, avait affirmé au quotidien que la piste des micro-ondes était désormais envisagée.

    En janvier, James Lin, de l’université de l’Illinois, avait également estimé plausible que les maux endurés par le personnel diplomatique aient été causés par des faisceaux de micro-ondes. Dans la revue Bio Electro Magnetics, il avait déclaré que des faisceaux de haute intensité pouvaient avoir été dirigés « seulement sur la cible visée » depuis un endroit dissimulé.

    Les Etats-Unis, la Russie, la Chine et de nombreux pays d’Europe sont considérés comme ayant le savoir-faire nécessaire pour développer une arme à micro-ondes, capable d’affaiblir ou même de tuer une cible, selon le New York Times. Cette arme pourrait ressembler à une antenne satellite, portée à bout de bras ou cachée dans un véhicule, un bateau ou un hélicoptère, qui fonctionnerait sur quelques centaines de mètres.

    Bref, on ne sait toujours rien…

    De plus, je vois mal quel serait l’intérêt pour qui que ce soit «  d’attaquer  » une ambassade par de tels moyens. Ah, c’est vrai, les Russes (ou les Chinois) sont méchants. Pas (ou pas encore…) les «  nombreux pays d’Europe  ».

  • Quel est le mal mystérieux dont souffrent les diplomates américains à Cuba ?

    http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2018/02/15/quel-est-le-mal-mysterieux-dont-souffrent-les-diplomates-americains-a-cuba_5

    Un rapport médical précise les troubles neurologiques persistant depuis plus de trois mois chez 21 ex-employés de l’ambassade de La Havane, sans en expliquer la cause.

    A la fin de l’année 2016, des fonctionnaires affectés à l’ambassade des Etats-Unis à La Havane ont commencé à se plaindre de divers symptômes neurologiques, incluant des anomalies de l’audition, de l’équilibre et de la sensibilité. Ces signes se manifestaient soit dans les locaux diplomatiques, soit dans leur chambre d’hôtel. L’accumulation de cas – vingt-quatre employés de l’ambassade ont fait état de ces maux –, a fait naître à Washington des soupçons d’attaques coordonnées, ce dont se sont vigoureusement défendues les autorités cubaines. En septembre 2017, plus de la moitié des diplomates américains en poste à La Havane ont été rappelés par le département d’Etat américain. De son côté, Cuba a accusé les Etats-Unis d’entraver son enquête en refusant aux enquêteurs cubains l’accès aux victimes ou à leurs dossiers médicaux.

    Aucune explication plausible n’a été apportée à ce jour à ces troubles. Le suivi médical des fonctionnaires concernés s’est poursuivi, sous la coordination des chercheurs du Centre pour les lésions cérébrales et leur réparation de l’université de Pennsylvanie, à Philadelphie. Jeudi 15 février, ces derniers ont publié en libre accès sur le site du Journal of the American Medical Association un rapport préliminaire de leurs constatations. Il ne s’agit toutefois que d’une description des troubles persistants présentés par les employés de l’ambassade, qui ne propose pas d’hypothèse sur leurs mécanismes déclencheurs.

    Le département d’Etat américain a recensé des témoignages faisant état de phénomènes sonores ou sensoriels émanant d’une direction précise mais sans qu’une source puisse être identifiée. Sur les vingt-quatre fonctionnaires susceptibles d’avoir été exposés, vingt et un ont passé un bilan médical pluridisciplinaire complet, en moyenne sept mois après l’apparition des troubles. Cette évaluation incluait divers tests d’équilibre, de motricité oculaire, de cognition (mémoire, jugement, compréhension, raisonnement) et d’audiométrie, ainsi que des examens d’imagerie médicale.

    Anomalies cognitives

    Dans une forte proportion des cas, des symptômes persistant plus de trois mois à compter de l’exposition ont été signalés chez ces vingt et une personnes. Par ordre de fréquence, les fonctionnaires se plaignaient de troubles visuels et de difficultés à dormir (86 % des cas), de troubles cognitifs (81 %), de céphalées (76 %), de problèmes d’équilibre (71 %) et d’audition (68 %). Les tests pratiqués ont mis en évidence des troubles de l’équilibre (81 %), ainsi que des anomalies cognitives (76 %) et des troubles de la mobilité des yeux (71 %). De plus, trois individus présentaient une baisse de l’audition.

    Les troubles du sommeil et les maux de tête dont se plaignaient les diplomates ont nécessité un traitement médicamenteux pour respectivement quinze et douze d’entre eux. Quatorze ex-employés de l’ambassade étaient en arrêt de travail lorsque le bilan a été pratiqué. La moitié d’entre eux ont par la suite repris une activité, mais de manière restreinte et en suivant un programme de rééducation.

    Les médecins de l’université de Pennsylvanie estiment que ces manifestations « pourraient représenter une nouvelle entité clinique, qui semble avoir résulté d’un dysfonctionnement étendu du réseau cérébral (cognitif, oculo-moteur et vestibulaire) tel qu’on l’observe dans les lésions traumatiques peu sévères du cerveau ou les commotions cérébrales ».

    A cette différence près que, dans le cas des employés de l’ambassade à Cuba, il n’y a aucune notion de traumatisme crânien. Les chercheurs écartent comme peu plausibles un phénomène d’hallucination collective, une infection virale ou l’action d’un agent chimique.

  • Les MOOC font pschitt
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/10/22/les-mooc-font-pschitt_5204379_3232.html

    Des vidéos en ligne de cours avec des quiz pour vérifier que les apprenants ne décrochent pas : une disruption, vraiment ?

    (...)

    En revanche, un débat fertile a (re)surgi à la ­faveur de l’éclatement de la bulle MOOC. Puisque le savoir est « partout sur la Toile, dis­ponible, objectivé, accessible à tous », comme ­l’écrivait, en 2011, Michel Serres, pourrait-on recentrer le rôle de l’enseignant sur le débat, la pensée critique, et les questions que se posent les étudiants ? Ce qui pourrait prendre la forme d’un dispositif bien connu avant l’arrivée des MOOC : la classe inversée.

    #mooc #grognons_du_numérique

    • Une étude de l’université de Pennsylvanie, publiée en décembre 2013, montrait que la moitié des inscrits consultait une seule séance du cours et seuls 4 % d’entre eux allaient jusqu’au bout.

      Je suis bien dans la moyenne : j’ai testé, j’ai aussi vite décroché et oublié.

    • La première manifestation de cette « bataille » se cristallisa rapidement autour de la pauvreté de cette innovation. Des vidéos en ligne de cours avec des quiz pour vérifier que les apprenants ne décrochent pas : une disruption, vraiment ? […] A y regarder de plus près, les MOOC constituent en effet une version ­virtuelle mais littérale d’un cours magistral ­accompagné d’un questionnaire qui ressemble à un simple contrôle de connaissances basé sur la mémoire immédiate.
      […]
      Mais au moment où le ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur se lançait, fin 2013, dans la création d’une plate-forme de MOOC francophones, étrangement résumée à son acronyme FUN (France université numérique), les premières études vinrent donner ­raison aux sceptiques.
      Aux Etats-Unis, les taux d’abandon étaient vertigineux.
      […]

      #éducation #classe_inversé #NTIC #pédagogie

  • #Doreen_Massey

    Doreen Massey (1944 – 2016) est une géographe britannique qui participa aux transformations que connut la discipline au tournant des XXe et XXIe siècles. Marquée par un rapport très tôt critique à l’institution universitaire (Freytag et Hoyler 1999), #Massey connaît la carrière d’une intellectuelle engagée, jouant sur les tableaux idéologique et académique. Elle s’éloigne ainsi, pour des raisons biographiques liées à sa trajectoire sociale ascendante, d’un modèle de la recherche en sciences sociales tendu vers l’impératif de neutralité axiologique (Freytag et Hoyler 1999).
    Munie d’un Bachelor de géographie économique de l’université d’Oxford, puis d’un un master en Regional Sciences de l’Université de Pennsylvanie en 1972, elle rejoint en 1968 le Centre of Environmental Studies, une institution fondée par le gouvernement travailliste d’Harold Wilson avec pour mission de traiter des enjeux sociaux de l’aménagement urbain. Suite à la fermeture du CES par le gouvernement de Margaret Thatcher en 1979, Massey occupa des emplois temporaires à la London School of Economics, puis à l’université de Berkeley, avant d’être embauchée au statut de Professeure de Géographie par l’Open University en 1982, jusqu’à sa retraite en 2009 et, suite à l’obtention du statut de Professeure Emerite de Géographie en cette même année, jusqu’à son décès. Entre autres reconnaissances, elle se voit attribuer le prix Vautrin Lud en 1998.

    http://www.hypergeo.eu/spip.php?article702

  • #Novartis to Charge $475,000 for Cancer Treatment US Taxpayers Paid $200 Million to Discover
    http://thefreethoughtproject.com/novartis-charge-475000-cancer-treatment-us-taxpayers-paid-200
    http://thefreethoughtproject.com/wp-content/uploads/2017/09/novartis

    Novartis announced the price this week of $475,000 per treatment. This was sold to the public as an ostensible win since the drug was predicted to be priced at $600,000 to $750,000 per treatment. If Novartis had solely financed and conducted their own research, of course, they could certainly charge whatever they wanted to charge. But this is not the case, according to the advocacy group Patients for Affordable Drugs.

    According to David Mitchell, the founder of the group, $475,000 per treatment is excessive because the federal government threw more than $200 million of your tax dollars into researching CAR-T therapy. According to Mitchell, Novartis simply purchased the rights to the treatment and failed to disclose what amount, if any, they invested in the research.

    On Thursday, Mitchell released the following statement praising the FDA’s decision to approve the drug, but decrying the monopoly granted to Novartis.

    #vol #argent_public #big_pharma #cancer #santé

    • Une #thérapie_génique commercialisée aux Etats-Unis, une première dans le monde
      https://www.letemps.ch/sciences/2017/08/31/une-therapie-genique-commercialisee-aux-etatsunis-une-premiere-monde

      Ce traitement, le Kymriah (tisagenlecleucel), a été développé par un chercheur de l’université de Pennsylvanie et breveté par les laboratoires helvétiques Novartis pour traiter la #leucémie lymphoblastique aiguë.

      [...] Le Kymriah est destiné aux enfants et jeunes adultes jusqu’à 25 ans ayant résisté aux autres thérapies contre cette leucémie ou ayant fait une rechute, ce qui se produit dans 15 à 20% des cas. Selon Novartis, 600 malades seraient éligibles tous les ans aux Etats-Unis pour ce traitement.

      [...] L’innocuité et l’efficacité du Kymriah ont été démontrées par un essai clinique mené avec 63 malades pédiatriques et de jeunes adultes qui n’avaient pas répondu aux autres traitements ou avaient rechuté. Selon cette technique, un traitement est créé pour chaque patient dont des cellules immunitaires sont prélevées et congelées avant d’être acheminées dans un laboratoire où elles sont modifiées génétiquement pour attaquer la leucémie. Le taux de rémission a atteint 83% dans les trois premiers mois du traitement qui a consisté en une seule dose de cellules immunitaires modifiées, précise la FDA.

  • Luttes féministes, luttes anti-coloniales, anti-racistes | Les Nouvelles vagues
    https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-vagues/la-france-vue-de-letranger-25-luttes-feministes-luttes-anti

    Avec Jennifer Boittin, historienne franco-américaine, professeure associée d’études françaises et francophones à l’Université de Pennsylvanie (USA), actuellement en résidence à l’Institut d’études avancées de Paris, elle travaille sur la condition des femmes au vingtième siècle notamment sous l’empire colonial français ; avec Laura Nsafou alias Mrs Roots, bloggeuse et militante afroféministe dont le deuxième roman A mains nues sera publié ce 20 mars aux Editions S(y)napse. Nous discutons de l’enjeu des représentations sociales, historiques et culturelles de la femme noire, et plus généralement de la façon dont les femmes sont envisagées dans et au-delà de l’hexagone. Durée : 58 min. Source : France (...)

    http://rf.proxycast.org/1273663890202304513/13954-07.03.2017-ITEMA_21251394-1.mp3

  • #CRISPR Cas9 : la dernière #folie de la #génétique
    https://www.franceinter.fr/sciences/crispr-cas9-la-grande-menace

    Autre secteur prometteur pour CRISPR Cas9 : l’#agro-industrie. L’université de Pennsylvanie a mis au point un champignon de Paris qui ne brunit plus quand on le coupe. [...]

    Aux #Etats-Unis, les autorités sanitaires ont décidé que ce champignon ne serait pas considéré comme un #OGM, car aucun gène n’a été « ajouté ». Ils ont donc autorisé sa mise sur le marché. Mais en #Europe, le débat fait rage et la question devrait être tranchée dans les mois qui viennent par la Cour de justice de l’Union Européenne. Plusieurs membres du Haut-Comité pour les #biotechnologies en France ont claqué la porte à la suite de la publication par le HCB d’un rapport soutenant que ces nouvelles plantes n’étaient pas des OGM. Pour l’un des démissionnaires, Yves Bertheau, directeur de recherches à l’INRA, ces végétaux modifiés en sont clairement.

    Jean-Claude Ameisen, l’ancien président du Comité consultatif national d’éthique, souligne un autre problème : "Contrairement aux OGM actuels, on ne peut pas déceler la trace de la modification génétique avec ces nouvelles méthodes. Et donc comment rend-on identifiable ce qui n’est pas traçable ?"

    #traçabilité

  • Piccolissimo, le plus petit #drone aérien autonome contrôlable et auto-propulsé | VMF 214 - le blog
    https://vmf214.net/2017/01/06/piccolissimo-le-plus-petit-drone-aerien-autonome-controlable-et-auto-propuls

    Voici donc Piccolissimo (du nom de son inventeur, Matt Piccoli, étudiant en thèse au sein du laboratoire ModLab de l’Université de Pennsylvanie. C’est aujourd’hui le plus petit robot volant auto-propulsé, contrôlable, ne nécessitant pas de connexion permanente filaire. Et il porte bien son nom : le robot pèse 4,5 g et mesure environ 3,5cm. Il est composé de deux parties : un corps généré par impression 3D et un propulseur (en gros une hélice). On peut le voir comme une hélice carénée par le corps du robot.

    Le principe de propulsion est lui-même innovant : les deux composants tournent en sens opposé, à des vitesses différentes : 800 rps (rotations par seconde) pour l’hélice, 40rps pour le corps. Avec une petite subtilité : le propulseur n’est pas situé au centre de gravité du robot. Le résultat est que le centre de la poussée subit également une rotation de 40rps. En modulant cette rotation, on peut faire tourner le robot comme on le souhaite.

  • Le Conseil de Paris a effectué un nouveau vote concernant la dénomination des rues autour de la Halle Freyssinet, et le couperet est tombé : il n’y aura pas de rue Steve Jobs autour du futur incubateur de start-up. Comme l’explique à l’AFP Bruno Julliard, premier adjoint de la maire de Paris Anne Hidalgo, le nom « ne fait pas l’unanimité » et n’a donc pas été proposé « au nom d’une tradition de compromis ».

    À la place, trois nouveaux noms ont été choisi : Ada Lovelace, la programmeuse Betty Holberton, et la chercheuse en informatique Karen Sparck Jones. La demande de parité dans les noms de rues de la capitale aura donc été entendue.
    http://mashable.france24.com/monde/20161202-rue-steve-jobs-paris-halle-freyssinet-ada-lovelace?ref=t
    #parité #womenintech

  • Les experts du climat dans le collimateur de Trump

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/12/14/les-experts-du-climat-dans-le-collimateur-de-trump_5048729_3244.html

    Les scientifiques redoutent une chasse aux sorcières et dénoncent des tentatives d’intimidation de la part de l’équipe de transition du président élu.

    C’est un symposium au sujet surprenant qui devait se tenir mercredi 14 décembre à San Francisco, à l’occasion du congrès d’automne de l’American Geophysical Union (AGU), la société savante des chercheurs en géosciences. La thématique – « Le détournement de la loi américaine à des fins de harcèlement, d’intimidation et de discrédit des chercheurs » – illustre l’inquiétude de la communauté des sciences du climat devant les récentes déclarations du président élu Donald Trump.
    Une inquiétude avivée par la révélation, par la presse américaine, d’un questionnaire transmis par l’équipe de transition de M. Trump à l’ensemble des services du ministère de l’énergie américain, leur demandant notamment de dresser la liste des personnels ayant travaillé, de près ou de loin, sur la question climatique ou sur les énergies renouvelables.

    L’équipe de Donald Trump a demandé la liste des employés du ministère de l’énergie ayant travaillé sur le climat

    La crainte d’une chasse aux sorcières gagne du terrain. « En temps normal, je réserverais mon jugement en supposant a priori qu’il s’agit simplement d’une collecte d’information légitime, observe Michael Mann, le directeur du Earth System Science Center de l’université de Pennsylvanie. Cependant, cette dernière révélation ne vient pas hors de tout contexte. Cela soulève une réelle préoccupation, celle que l’équipe de transition [de M. Trump] puisse prendre des gens pour cible, en particulier des scientifiques. »

    « C’est fréquent de voir les équipes de transition interroger les structures gouvernementales sur leurs politiques, ajoute Michael Halpern, de l’Union of Concerned Scientists (UCS), une organisation de promotion de la science. Ce qui ne l’est pas, c’est de demander des listes d’employés de ces structures et de cibler des fonctionnaires qui font simplement leur travail. »

    « Inquiétude »

    Le ministère de l’énergie se refuse pour le moment à transmettre les noms de ses collaborateurs, mais cette tentative d’intimidation ne laisse pas indifférents les ONG et les think tanks investis dans la thématique climat, qui craignent eux aussi d’être la cible de l’administration entrante. « Il n’y a pas un membre du cabinet de Donald Trump qui ne soit climatosceptique », note Jesse Bragg, de Corporate Accountability International, une organisation de défense de l’environnement et des droits de l’homme.

    Mardi 13 décembre, le 45e président américain a en effet désigné Rex Tillerson, le patron du groupe pétrolier ExxonMobil, au poste de secrétaire d’Etat. « C’est cet homme lié au secteur des énergies fossiles, sans aucune expérience diplomatique, qui va représenter les Etats-Unis dans les négociations internationales sur le changement climatique », se désole Jesse Bragg.

    M. Trump a confié le ministère de l’énergie à Rick Perry, ancien gouverneur du Texas et partisan de la suppression de cette administration… Il a promis la direction de l’Agence de protection de l’environnement à Scott Pruitt, le ministre de la justice de l’Oklahoma, très hostile aux mesures prises par l’équipe Obama pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. « Il y a à l’évidence dans la communauté des chercheurs en sciences du climat une inquiétude d’être harcelé, intimidé, d’être empêché de parler de ce que nous savons, c’est-à-dire de l’accumulation de faits sur le changement climatique et la manière dont les activités humaines y contribuent », explique Christine McEntee, la directrice exécutive de l’AGU.

    Un vade-mecum circule dans la communauté des chercheurs sur le climat pour les préparer au harcèlement

    Aux Etats-Unis, depuis le début des années 2000 et en vertu des lois de transparence, des think tanks néoconservateurs ou libertariens, ainsi que des ministres de la justice de certains Etats requièrent de manière systématique l’accès aux courriels ou aux documents de recherche de climatologues. Une pratique considérée par les chercheurs comme un détournement de la loi et une forme de harcèlement. Au point que, en 2011, des universitaires et des juristes ont créé le Climate Science Legal Defense Fund, qui offre une assistance juridique aux scientifiques confrontés à ces situations.
    Depuis début décembre, un petit vade-mecum rédigé par l’organisation circule dans la communauté des chercheurs sur le climat pour préparer ceux-ci « au harcèlement politique et à l’intimidation juridique » : « En cas de doute, appeler un avocat », « séparer les e-mails professionnels et personnels », « ne pas répondre aux messages de harcèlement, mais ne pas les effacer », etc.

    Parades

    Les chercheurs redoutent également que l’activité scientifique elle-même soit entravée. L’équipe de transition de M. Trump a déclaré que la NASA devrait cesser ses activités d’observation de la Terre. Une telle décision aurait un impact considérable, au-delà de la recherche américaine. Car, rappelle Stefan Rahmstorf, directeur du Potsdam Institute for Climate Impact (Allemagne), « comprendre notre planète implique une coopération mondiale des systèmes d’observation ». « Nous pensons qu’il y a un risque que les financements de la recherche et des infrastructures scientifiques soient remis en cause, dit Mme McEntee. Mais ce sont des risques que le Congrès a déjà fait peser sur nous l’an passé et nous avons réussi à les éviter. »

    La situation est toutefois jugée suffisamment inquiétante par les chercheurs eux-mêmes pour que des listes de bases de données (températures, couverture des glaces, etc.) s’échangent sur les réseaux sociaux, afin que des sites miroirs soient créés hors des Etats-Unis ou sur des sites non administrés par des agences fédérales. « Sous l’administration Bush, des chercheurs avaient remarqué que des sites Web d’agences fédérales avaient été modifiés, voire supprimés, témoigne Michael Halpern. Il y a donc une volonté de se prémunir contre ce genre de menace. D’autant plus que dans le questionnaire [adressé par l’équipe de M. Trump au ministère de l’énergie], il y avait une question spécifique sur les sites Web relatifs au climat, créés ou modifiés par ces services au cours des trois dernières années. »

    Le vent de panique ne concerne pas seulement les sciences du climat. « Des scientifiques des universités commencent à regarder les bases de données relatives à d’autres disciplines et maintenues par des laboratoires fédéraux qui pourraient être menacées et qui doivent être sauvegardées », raconte M. Halpern. Début décembre, une centaine d’ONG américaines ont par ailleurs adressé une lettre ouverte à Donald Trump et au Congrès, leur demandant de prendre conscience de la crise climatique et d’y répondre sans tarder.

    Dans la sphère des négociations sur le climat, on réfléchit à des parades. « Il ne s’agit pas pour le moment de résistance, mais plutôt de réflexion autour du repli américain ou de l’idée d’intenter des procès contre les abus du pouvoir exécutif », confie l’ex-négociatrice de la France, Laurence Tubiana.

    Pour leur part, les climatologues gardent vif le souvenir de l’administration Bush. En février 2007, l’Union of Concerned Scientists avait mené une enquête auprès de 300 scientifiques issus de sept agences fédérales (NASA, NOAA, EPA, etc.). Quelque 46 % des répondants avaient déclaré avoir « été témoin ou fait personnellement l’expérience de pressions pour éliminer les expressions “changement climatique” ou “réchauffement global”, ou d’autres termes similaires, de toute une variété de communications ». Environ 40 % avaient constaté, sur les sites Internet de leur agence, « la publication anormalement retardée ou la disparition de rapports ou de documents scientifiques sur le climat ». Et près de la moitié avait remarqué « des exigences administratives nouvelles ou inhabituelles ayant entravé des travaux liés au climat ».

  • Le bateau du pharaon et les 120 dessins | Dans les pas des archéologues
    http://archeo.blog.lemonde.fr/2016/11/26/le-bateau-du-pharaon-et-les-120-dessins


    Dégagement des dessins (fond de la cavité)
    avec l’aimable autorisation de Josef Wegner − Musée de l’université de Pennsylvanie

    C’est à une soixantaine de mètres de l’enceinte de ce tombeau qu’au début du XXe siècle, un archéologue britannique avait découvert un édifice enterré. Mais l’effondrement de la voûte de celui-ci avait stoppé net ses recherches, lui laissant tout de même le loisir d’apercevoir quelques graffitis de bateaux sur ses murs. Une simple tombe, pense-t-il alors. Il ne revient pas sur les lieux, qui disparaissent pendant plus d’un siècle sous le sable du désert.

    Ce n’est qu’en 2014 que les fouilles reprennent. Une équipe d’archéologues menée par Josef Wegner, de l’université de Pennsylvanie, finit par retrouver l’endroit. Ils commencent alors à dégager l’édifice. Ils mettent alors au jour une grande salle souterraine voûtée, large d’environ quatre mètres et longue de vingt. À l’évidence, elle n’a rien d’une tombe. La construction, en briques crues enduites, est très soignée. Les briques ont la même taille et la même composition que celle de l’enceinte du tombeau de Sésostris III. Ses constructeurs l’avaient visiblement conçu pour qu’il soit totalement dissimulé sous le sable.

    En mettant au jour la salle, ils constatent qu’elle est littéralement constellée de graffitis de bateaux. Il y en a 120, et encore, de grands pans de l’enduit des murs sur lequel les dessins sont gravés ont disparu. « C’est très probablement le plus grand ensemble de graffitis de bateaux de l’ancienne Égypte » indique Pierre Tallet, de l’université Paris-Sorbonne. De son propre aveu « très impressionné » en découvrant l’article, l’archéologue naval Patrice Pomey renchérit : « Cela n’a pas d’équivalent. C’est à l’évidence, un ensemble tout à fait exceptionnel de dessins, à la fois par leur nombre et leur qualité. »

  • Des nombres truqués pour mieux espionner

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2016/10/10/des-nombres-truques-pour-mieux-espionner_5011320_1650684.html

    Tricher n’est pas jouer. Mais jouer à tricher peut être stimulant, surtout si cela met en doute la sécurité d’Internet… C’est à ce petit jeu que vient de se livrer une équipe de l’université de Pennsylvanie, du CNRS et d’Inria au sein du Laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications (Loria) de Nancy.

    Ces chercheurs ont, en quelque sorte, fabriqué une porte qui a toutes les apparences de la solidité, mais qui en réalité est facile à crocheter. En outre, ils sont inquiets du fait que certaines de ces portes prétendument blindées des ­réseaux informatiques, et qui ­assurent la sécurité des messages, des signatures, des paiements, des connexions chiffrées… pourraient ne valoir guère mieux !

    Une clé secrète

    Internet est un réseau sur lequel des machines se « parlent » en permanence pour autoriser des ­connexions : canal chiffré entre deux ordinateurs, transmission de messages cryptés, signature électronique… La première étape est d’échanger une clé secrète, c’est-à-dire une série de chiffres qui servira ensuite à chiffrer et ­déchiffrer des messages ou authentifier des transactions. La solidité de ce maillon est donc cruciale. Et elle est en fait assurée par des fonctions mathématiques.

    Certaines opérations sont en ­effet faciles à calculer mais difficiles à inverser. Voire impossibles. Par exemple, multiplier deux nombres premiers entre eux est rapide, mais étant donné le résultat, retrouver ces deux entiers est d’autant plus ardu que des très grands nombres à plusieurs centaines de chiffres ont été utilisés. Et quand les puissances des ordinateurs progressent, il suffit d’augmenter la difficulté du calcul en accroissant la taille des nombres pour les préserver.

    Un p de 768 bits

    Le protocole Diffie-Hellman, du nom de ses inventeurs en 1976, premier maillon de la chaîne de confiance d’Internet, utilise une autre opération mathématique, plus compliquée à exposer, le ­logarithme discret. Le terme « discret » n’a rien à voir avec la confidentialité, mais indique que des entiers sont utilisés. Le terme ­« logarithme » suggère un lien avec des nombres élevés à une certaine puissance. Toujours est-il qu’étant donné un grand nombre premier p, il est possible de choisir un nombre entier secret x et de publier le résultat combinant ­mathématiquementp et x. En ­revanche, connaissant ce résultat et p, il est très long de trouver x ; le secret est protégé. C’est lui qui servira à chiffrer des messages.

    En pratique, les nombres utilisés sont de 1 024 bits, soit environ 300 chiffres. En juin, une équipe de l’université de Leipzig (Allemagne) et de l’Ecole polytechnique ­fédérale de Lausanne (Suisse) a établi un nouveau record, en réussissant à inverser l’opération à partir d’un p de 768 bits, montrant qu’il est dangereux d’utiliser des clés de cette taille.
    Mais l’équipe américano-française est venue à bout d’un p plus grand, de 1 024 bits, en recourant à dix fois moins de puissance de ­calcul que ses confrères. Deux mois de calculs, avec de 2 000 à 3 000 processeurs, ont été nécessaires, soit dix mille fois moins de temps que ce qu’on pensait. Comment est-ce possible ? En ­trichant. Les chercheurs ont ­fabriqué un nombre p ad hoc, de manière à ­faciliter leurs calculs, tout en faisant en sorte que ça ne se voie pas. Rien dans leur nombre ne laisse penser qu’il puisse être « truqué ».

    Questions dérangeantes

    L’exploit pourrait sembler anecdotique, s’il ne posait des questions dérangeantes. Quelle garantie que les entiers p utilisés soient moins robustes et aussi « truqués » que celui ainsi inventé ? Pour « causer » entre eux, les ordinateurs ne choisissent pas n’importe quel p, ils le piochent dans des listes de référence. Ces standards ne précisent pas comment ont été engendrés ces nombres. Et tout le monde utilise les mêmes…

    « Pour ajouter à la parano, il faut dire que la recette pour construire notre entier a été proposée, en 1992, par Daniel Gordon, qui a ensuite été embauché par l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA). De plus, l’un des protocoles qui liste des nombres premiers a été écrit par un sous-traitant de cette même agence », note Emmanuel Thomé, chercheur à l’Inria de Nancy. Ce dernier évoque aussi les documents du lanceur d’alerte Edward Snowden qui ont notamment révélé que la NSA essayait d’« influencer les politiques, les standards et les spécifications pour les technologies commerciales de clés publiques ».

    Autrement dit, d’autres auraient très bien pu avoir la même idée que les chercheurs, mais sans la publier, afin de bénéficier d’avantages pour l’espionnage. Car une fois la clé secrète connue, il est facile de déchiffrer les messages ou d’intercepter les informations circulant sur un canal chiffré, par exemple entre une entreprise et le domicile d’un de ses employés.

    « Il faut éliminer tous les nombres premiers “inconnus”, c’est-à-dire ceux dont on ne sait pas comment et pourquoi ils ont été choisis », estime Emmanuel Thomé. Et d’appeler avec ses coauteurs à piocher des entiers dans des ensembles plus sûrs, à doubler la taille de ces nombres, voire à changer d’opérations mathématiques « difficiles ».

  • Climat : les mauvaises nouvelles s’accumulent

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2016/09/27/les-mauvaises-nouvelles-s-accumulent-sur-le-front-climatique_5003829_3244.ht

    Que l’on regarde l’élévation du mercure ou les revues scientifiques, les nouvelles du climat ne sont franchement pas bonnes. Côté thermomètre, la National Oceanic and Atmospheric Administration américaine vient d’annoncer que le mois d’août avait été, en moyenne mondiale, le plus chaud jamais observé depuis le début des relevés en 1880. Pour ne rien arranger, il est aussi le seizième mois consécutif à battre son record de température – une telle séquence n’a jamais été enregistrée en 137 ans de mesures.

    Les derniers travaux de recherche publiés dans les revues savantes – sur l’élévation future des températures, sur la capacité des sols à éponger les émissions humaines de gaz à effet de serre ou sur la stabilité des glaciers polaires – ne sont pas plus réjouissants.

    Comme souvent en matière climatique, les mauvaises nouvelles viennent aussi de l’étude des climats du passé. Mardi 27 septembre, la revue Nature Climate Change devait publier la première reconstruction continue des températures terrestres au cours des deux derniers millions d’années, suggérant une sensibilité du climat au dioxyde de carbone (CO2) bien plus forte qu’estimée généralement.

    Selon l’auteure de ces travaux, Carolyn Snyder, chercheuse à l’Environmental Protection Agency de Washington, le corollaire de cette reconstruction est que les niveaux atmosphériques actuels de CO2 – environ 400 parties par million (ppm) – pourraient mettre la planète sur la voie d’un réchauffement à long terme de quelque 5 °C par rapport aux niveaux préindustriels.

    Très impressionnants, ces chiffres doivent être pris avec grande précaution. D’abord, ils représentent un réchauffement attendu sur des échelles de temps de l’ordre du millénaire – le temps nécessaire à certains grands processus (redistribution de la végétation, fonte des glaces, etc.) de s’accomplir et se stabiliser. Ensuite, ils sont très supérieurs aux chiffres généralement acceptés par les scientifiques. Selon l’analyse de Carolyn Snyder, atteindre 550 ppm, soit un doublement du CO2 atmosphérique par rapport au XIXe siècle, conduirait ainsi sur le très long terme à un réchauffement de… 9 °C !

    Grande prudence

    « Cette estimation est tellement au-dessus de celles qui prévalent actuellement, autour de 5 °C à 6 °C, qu’elle doit être considérée comme une singularité et doit être traitée avec un niveau de scepticisme approprié », estime le paléoclimatologue Michael Mann, professeur à l’université de Pennsylvanie. Une grande prudence partagée par plusieurs chercheurs cités par la revue Nature. M. Mann s’interroge notamment sur le caractère représentatif de la soixantaine d’échantillons de sédiments marins analysés pour reconstruire les températures passées.

    « Je vois cette étude comme provocante et intéressante, ajoute-t-il, mais ces estimations chiffrées doivent être prises avec des pincettes jusqu’à ce qu’elles soient examinées soigneusement par la communauté scientifique. »

    Toutefois, ajoute en substance le chercheur, si ces chiffres étaient confirmés, ils signifieraient que la sensibilité climatique à court terme – celle qui se joue à l’échelle du siècle et qui intéresse plus particulièrement les humains – serait plus élevée que les estimations actuelles.

    Celles-ci reposent en partie sur des modèles de simulation du climat, qui situent aujourd’hui l’augmentation de la température moyenne entre 1,5°C et 4,5 °C pour un doublement de la concentration atmosphérique de CO2. Fourchette qu’il faudra donc, peut-être, revoir à la hausse. De quoi rendre plus compliqué encore le respect des engagements des Etats à maintenir le thermomètre terrestre « nettement en dessous de 2 °C » de réchauffement.

    Rôle tampon de l’agriculture

    D’autres mauvaises nouvelles pourraient conduire à une telle révision. Dans l’édition de la revue Science du 23 septembre, la biogéochimiste Yujie He (université de Californie à Irvine) et ses coauteurs publient une série de mesures montrant que le carbone présent dans le premier mètre de sol est bien plus vieux que ce que simulent les modèles numériques.

    En clair, écrivent les chercheurs, « les modèles surestiment le potentiel de séquestration du carbone par les sols de près d’un facteur deux ». Lorsqu’ils simulent le climat futur, les modèles attribuent donc aux sols une capacité à éponger le CO2 – en stockant plus ou moins durablement les débris végétaux, par exemple – beaucoup plus importante qu’elle ne l’est en réalité… « En conséquence, une plus grande fraction des émissions humaines de CO2 pourrait demeurer dans l’atmosphère et contribuer au réchauffement », concluent les auteurs.

    Une conclusion que tempère toutefois Jean-François Soussana, directeur scientifique chargé de l’environnement à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Selon le chercheur, qui n’a pas participé à ces travaux, une grande part de l’erreur des modèles concerne surtout les couches les plus profondes du sol, c’est-à-dire le vaste stock de carbone enfoui « entre 20 cm à 40 cm, et un mètre de profondeur », explique-t-il.

    Or l’objectif de ralentir le changement climatique en adaptant les usages des sols (agriculture, foresterie, etc.) pour y accumuler du carbone, précise M. Soussana, « porte uniquement sur l’horizon de surface, c’est-à-dire jusqu’à 40 cm de profondeur ». Rendre l’agriculture « climatiquement vertueuse » et lui faire jouer un rôle tampon reste donc possible.

    Ralentir la dislocation des calottes de glace polaires sera en revanche beaucoup plus compliqué. Or, dernière mauvaise nouvelle, l’inlandsis du Groenland perd ses glaces plus rapidement que les mesures satellites ne l’ont jusqu’ici suggéré. Dans la dernière édition de la revue Science Advances, une équipe de chercheurs européens et américains revoit à la hausse la masse glaciaire perdue par la grande île. En tenant compte des mouvements du manteau terrestre, il faudrait, selon les auteurs, ajouter environ 8 % aux décharges de glace mesurées jusqu’à présent. Soit l’équivalent de 20 milliards de tonnes par an.

    La correction peut sembler mineure. Mais le Groenland est un contributeur important à la hausse du niveau marin. Surtout, les spécialistes n’ont cessé d’aggraver, au cours des dernières années, leur diagnostic sur la stabilité de ses glaces. C’est le cas dans la majorité des compartiments de la science climatique : la réalité excède bien souvent les prévisions des chercheurs.

  • Génétique : le mirage du bébé parfait

    http://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2016/08/22/le-mirage-du-bebe-parfait_4986291_3451060.html

    J’étais terrorisée, mais je suis rentrée dans cette pièce où Hitler se trouvait. Il avait un visage de cochon. (…) Il a dit : “Je veux comprendre les utilisations et les implications de cette formidable technologie.” Je me suis réveillée, couverte d’une sueur froide. » Jennifer Doudna a raconté, en novembre 2015, ce cauchemar au New Yorker, qui enquêtait sur Crispr-Cas9, un puissant outil d’édition du génome que la chercheuse à l’université Berkeley a contribué à mettre au point. Un dictateur pourrait-il aujourd’hui ressusciter les délires eugénistes des nazis, produire des lignées de « bébés parfaits » grâce à ces nouveaux outils ? Le « meilleur des mondes » est-il à notre porte ?

    Cette perspective est suffisamment inquiétante pour que Jennifer Doudna et ses pairs, mais aussi de nombreuses sociétés savantes – et même la CIA –, se soient emparés du brûlant sujet Crispr-Cas9, sur son versant éthique. Jamais l’humanité n’a semblé aussi proche de modifier sa propre lignée, son génome et celui des générations à venir.
    Il ne s’agirait plus de science-fiction, d’un scénario dystopique, mais d’une possibilité qui a émergé avec force en avril 2015 : une équipe chinoise publie alors les résultats d’une expérience sur des embryons humains visant à modifier le gène responsable de la bêta-thalassémie, une forme d’anémie d’origine génétique. L’étude fait grand bruit. Certains jugent qu’une barrière éthique a été transgressée. Les chercheurs chinois pensent avoir pris les précautions idoines : ils n’ont utilisé que des cellules dites triploïdes, incapables de se développer pour donner un être viable – ils ont stoppé leurs observations lorsque les embryons ne comptaient que huit cellules.

    De plus, leur étude suggère que Crispr-Cas9 n’est pas l’outil à la précision chirurgicale tant vantée : seul un faible nombre d’embryons ­modifiés porte les mutations souhaitées, et des modifications « hors cibles » ont été mises en évidence. Même constat un an plus tard, lors de la parution d’une nouvelle étude chinoise où Crispr-Cas9 est cette fois utilisé pour offrir une protection contre le VIH : le succès n’a été que partiel, avec de nombreuses mutations non voulues et des ratés dans l’édition des ­embryons, détruits après quelques divisions cellulaires. Les chercheurs chinois voulaient voir si l’on pourrait créer des humains naturellement immunisés contre le sida. Ils ont prouvé qu’on était loin du compte. Le bébé « sur mesure » n’est finalement pas pour demain.

    « Evaluer les aspects éthiques »

    Dans l’intervalle, une équipe de l’Institut Francis-Crick, à Londres, a reçu l’autorisation de procéder, elle aussi, à des manipulations sur des embryons humains. Il s’agit de désactiver de façon sélective certains gènes considérés comme cruciaux dans la différenciation des premières cellules en divers tissus. A Stockholm aussi, une équipe pourra procéder à de tels essais. Comme en Chine, pas question d’implanter ces embryons dans un utérus. Le but est de mieux comprendre certaines formes d’infertilité.

    Ces expérimentations sur l’embryon sont conformes au consensus qui a émergé au fil des réunions internationales et des réflexions conduites par les sociétés savantes nationales, de l’usage sur l’homme des nouvelles techniques d’édition du génome. « Crispr fonctionne si bien et rencontre un tel succès qu’il serait important d’évaluer les aspects éthiques de son utilisation », avait prévenu, dès juin 2014, la Française Emmanuelle Charpentier, co-inventrice de l’outil.

    Au printemps 2015, Nature et Science publient des mises en garde contre la modification des cellules germinales (sexuelles) qui passerait d’une génération à l’autre. Une de ces tribunes est cosignée par le Nobel de chimie, en 1980, Paul Berg. Ce dernier avait organisé, en 1975, la conférence d’Asilomar (Californie), qui avait abouti à la mise en place de protections contre les fuites dans l’environnement des premières bactéries génétiquement modifiées.

    Mais, cette fois, il s’agit de changer le patrimoine héréditaire de la lignée humaine elle-même. Jusqu’où peut-on aller ? Une réunion internationale est organisée, début décembre 2015, à Washington. Après des débats ­enflammés, la déclaration finale juge que la ­recherche fondamentale et préclinique sur l’édition des gènes est nécessaire et doit être poursuivie, ainsi que sur les bénéfices et risques potentiels de leur usage clinique. Mais, « si, dans ce processus de recherche, des ­embryons humains et des cellules germinales subissent des éditions de gènes, les cellules ­modifiées ne devront pas être utilisées pour lancer une grossesse », préviennent les organisateurs. L’usage clinique de ces techniques sur les cellules somatiques (non transmises d’une génération à l’autre) doit s’inscrire dans les dispositifs « existants et évolutifs » qui encadrent les thérapies géniques.

    Convention d’Oviedo

    Cette position est rejointe peu ou prou par diverses sociétés savantes et organismes de recherche, avec des nuances selon les législations nationales. La France, comme la plupart des pays d’Europe, est signataire de la convention d’Oviedo (1997), dont l’article 13 stipule qu’« une intervention ayant pour objet de ­modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques, et seulement si elle n’a pas pour but d’introduire une modification dans le génome de la descendance ». Une interprétation maximaliste du texte pourrait interdire toute utilisation de Crispr sur les cellules germinales.

    Si les tycoons de la Silicon Valley et l’empire du Milieu s’en mêlent, qui sait jusqu’où ira Crispr ?

    Mais le neurobiologiste Hervé Chneiweiss, président du comité d’éthique de l’Inserm, n’en fait pas la même lecture : « Il faut établir une distinction entre la recherche fondamentale autorisée et le transfert vers les applications humaines. » Au-delà, quand la technologie sera éprouvée, s’interroge-t-il, « en quoi cela serait-il une atteinte à l’humanité d’éradiquer des maladies d’une particulière gravité, comme celle de Huntington, en modifiant les embryons ? »
    George Church (Harvard) ne se satisfait pas du consensus actuel. Pour lui, la focalisation sur l’embryon a fait passer au second plan l’édition des cellules sexuelles masculines : « En partant de cellules souches, vous pouvez les modifier ex vivo, en faire des clones, et vérifier celles qui ont les bonnes modifications. On peut s’assurer qu’elles sont parfaites. » Et les utiliser pour éviter d’éliminer des embryons.

    Pour Alain Fischer (Imagine-Necker), « père » des bébés-bulles soignés par thérapie génique, cette vision relève de la « science-fiction délirante ». Crispr constitue un outil de recherche « incontournable » et prometteur pour les cellules somatiques (adultes), mais modifier les cellules germinales revient in fine « à toucher au patrimoine de l’humanité, ce qui n’est pas raisonnable et doit rester interdit ». Le biologiste de la reproduction Pierre Jouannet, qui a corédigé plusieurs rapports de sociétés savantes françaises sur Crispr, estime que George Church a raison d’insister sur le ­potentiel des cellules germinales, même s’« il ne faut pas être naïf » et que les défis à relever sont immenses.

    Obstacles parfois sous-estimés

    Ils le sont aussi pour les thérapies géniques imaginées sur les cellules adultes, moins problématiques d’un point de vue éthique. Là ­encore, la « magie Crispr » se heurte à des obstacles parfois sous-estimés, comme les mutations hors cibles. Keith Joung, du Massachusetts General Hospital, a mis les pieds dans le plat, début juillet, devant la Société américaine d’hématologie, en projetant une diapositive montrant un individu la tête dans le sable. Comme le raconte la revue en ligne Stat, il a souligné les carences des logiciels utilisés pour déterminer les zones du génome susceptibles d’être modifiées par inadvertance par Crispr – ce qui a douché l’enthousiasme général.
    L’autre grand défi, c’est la faculté de faire s’exprimer les cellules mutées par Crispr dans les bons tissus.

    La société Editas cible par exemple des maladies de l’œil, un organe qui se prête à l’injection de virus vecteurs de Crispr. Crispr Therapeutics mise sur une stratégie assez ­similaire. Intellia Therapeutics parie sur des nanoparticules lipidiques pour transporter Crispr jusqu’au foie, où il permettrait de lutter contre diverses maladies comme l’hémophilie. D’autres, comme David Bikard à l’Institut Pasteur, espèrent retourner Crispr contre les bactéries qui l’ont inventé, pour lutter contre les souches résistantes aux antibiotiques – là encore la question du vecteur sera essentielle.
    La pédiatre Marina Cavazzana (Imagine - Necker), qui a vécu les hauts et les bas de la thérapie génique des bébés-bulles, est très enthousiaste sur le potentiel de Crispr. « Je suis amenée à relire les résultats précliniques d’autres groupes dans le monde, encore non ­publiés, qui sont très impressionnants », dit-elle. Mais, de l’animal à l’homme, les embûches peuvent être nombreuses, prévient-elle : « Les chercheurs ne perçoivent pas toujours que l’application clinique est un très long chemin. »

    Conflit d’intérêts

    Les start-up pionnières, basées à Boston, ­espéraient être les premières à passer à ces ­essais cliniques. Elles viennent de se faire ­dépasser par une équipe de l’université de Pennsylvanie, qui a reçu, fin juin, un feu vert des Instituts nationaux de la santé (NIH) américains pour tester une thérapie ex vivo qui ­viserait simultanément trois gènes. L’idée ­reprend avec Crispr la stratégie dite des cellules CAR-T déjà mise en œuvre avec succès avec des outils plus anciens d’édition des gènes. L’un d’eux, développé par la société française Cellectis, a permis de sauver une petite Londonienne d’une leucémie, fin 2015. Cette thérapie consistera à prélever des lymphocytes T, des cellules immunitaires, et de les modifier pour qu’elles s’attaquent à des cellules tumorales une fois réinjectées à des patients souffrant de mélanome, sarcome ou myélome résistants aux traitements classiques.

    Certains se sont émus que la Penn State se ­retrouve aux avant-postes. En 1999, Jesse Gelsinger, un jeune homme de 18 ans, était mort lors d’un essai clinique de thérapie génique conduit dans cette université. On avait ensuite découvert que le directeur de l’étude, James Wilson, possédait des parts dans Genovo, une compagnie qui avait un intérêt direct à hâter sa réussite. Et que le patient, qui n’avait pas été correctement informé des risques, avait reçu des doses plus fortes que prévu. Carl June, le conseiller scientifique de la nouvelle étude, possède des brevets sur la technologie testée, mais il assure que des mesures seront prises pour surmonter ce conflit d’intérêts.

    « Hacker le cancer »

    L’essai sera financé par un institut créé, en avril, par le milliardaire Sean Parker, cofondateur de Napster et associé de Facebook, qui a injecté 250 millions de dollars (223 millions d’euros) dans un vaste programme d’immunothérapie. Cet ancien petit génie de l’informatique, âgé de 36 ans, s’est mis en tête de « hacker le cancer ».
    Mais, encore une fois, la Chine double tout le monde : le 6 juillet, une équipe de l’université du Sichuan a reçu l’autorisation de procéder à un essai clinique du même type, ciblant le cancer du poumon. Il pourrait débuter dès ce mois d’août.

    Si les tycoons de la Silicon Valley et l’empire du Milieu s’en mêlent, qui sait jusqu’où ira Crispr ? Inventé par les bactéries il y a des milliards d’années pour se défendre contre des ­virus, transformé en outil révolutionnaire d’édition des gènes par des chercheurs venus d’horizons aussi divers que l’étude du yaourt, de la peste ou des structures cellulaires, souvent mus par la pure curiosité, mais prêts à en découdre sur les brevets et le Nobel, il est aussi un formidable révélateur : son histoire est celle de la science d’aujourd’hui.

  • Voyage au cœur des cellules

    http://www.lemonde.fr/medecine/article/2016/06/13/voyage-au-c-ur-des-cellules_4949567_1650718.html

    Les scènes qui vont suivre sont spectaculaires et à peine croyables. Pourtant elles sont bien réelles. Elles se déroulent chaque seconde, chaque minute dans la moindre des milliards de cellules de notre organisme, sur notre peau, dans notre cerveau, notre foie, nos reins… Et si, par malheur, elles tournent mal, c’est souvent la catastrophe.

    Pour les découvrir, traversons la membrane qui constitue l’enveloppe de ces cellules, petits sacs souples de quelques dizaines de micromètres de large. A l’intérieur flotte un compartiment capital, le noyau, renfermant les précieux chromosomes. Mais, autour, on trouve d’autres molécules tout aussi vitales : des centaines de filaments creux de quelques micromètres de long et 25 nanomètres de diamètre, appelés microtubules. Ils forment un ensemble à peine moins informe qu’un plat de spaghettis, au premier regard, mais tellement plus riche et complexe.

    A l’un des bouts de chacun de ces tubes papillonnent des petits morceaux de molécules trois fois plus petits que le trou du filament. Régulièrement, comme des Lego, ils s’accrochent aux extrémités de la paroi du tube, augmentant peu à peu sa taille, brique par brique, à raison de quelques micromètres par minute. L’assemblage consomme de l’énergie, mais se fait tout seul. Tels des tentacules explorant les abysses, ces protubérances poussent au cœur du cytoplasme cellulaire.

    Soudain, le bel édifice se disloque par la tête, tel un plumeau. Tout le tube peut se défaire, mais le processus peut aussi s’arrêter pour reprendre la construction.

    Ces polymères au comportement si étrange font partie du « squelette » des cellules. Sans lui, ces dernières ne pourraient bouger, trouver leur place au sein des tissus, grandir comme le font les neurones pour se ramifier… Elles mourraient. D’ailleurs, un anticancéreux puissant de l’arsenal chimiothérapique, le Taxol et ses dérivés, agit sur les microtubules en rigidifiant en quelque sorte ce squelette, l’empêchant de se disloquer et de remplir sa fonction. Les cellules, cancéreuses ou non, sont tuées. C’est l’une des premières fonctions des microtubules : construire un squelette rigide, mais pas trop, présent et changeant sans cesse de conformation. Ce n’est pas la seule.

    Approchons non plus de la tête du tube, mais de son corps. Littéralement, on y voit marcher d’autres molécules accrochées à sa surface. Ces dernières sont en fait des moteurs, baptisés ­kinésines ou dynéines, qui après absorption de « pilules » énergétiques, changent la forme de leurs « pattes » et avancent. Sur leur dos, elles transportent des vésicules, des sortes de petits sacs, pleins de protéines utiles au fonctionnement de la cellule. Les unes vont vers la tête du filament ; les autres vers le pied, mais sans anarchie. Dans les neurones, le ballet est encore plus extraordinaire, car ces moteurs peuvent sauter d’un microtubule à un autre, faisant plus d’une dizaine de « sauts » pour parcourir plusieurs centimètres le long des axones, l’une des ramifications les plus importantes des neurones.
    En fait, le réseau de microtubules semble orienter parfaitement ces marcheurs vers la bonne destination. Comme le ferait un réseau ferroviaire ou routier. Sauf qu’il pourrait se faire et se défaire en quelques minutes.

    Du nouveau tous les six mois

    Ce n’est pas tout. Observons maintenant l’un des processus les plus importants de la vie, la division cellulaire ou mitose. C’est-à-dire, à partir d’une cellule mère, la création de deux cellules filles, possédant exactement le même jeu de chromosomes. La membrane s’étire, l’enveloppe du noyau se défait et les chromosomes libérés se voient soudain attrapés par des nuées de microtubules qui s’y accrochent. De part et d’autre de leurs proies, les tubes se rejoignent en deux fuseaux vers deux centrosomes, microscopique point d’ancrage. Puis, des moteurs tirent sur les chromosomes via les « câbles » en microtubules, afin de les séparer en deux lots identiques dans ce qui deviendra deux cellules. Un peu comme si un plat de spaghettis bolognaise rassemblait spontanément au milieu de l’assiette seulement la viande, avant d’en faire deux parts égales… La vie ne tient qu’à ces fils creux.

    Historiquement, c’est en fait avec la mitose que cette histoire de fils a commencé, il y a tout juste cinquante ans. En 1966, Gary Borisy, alors en thèse à l’université de Chicago, trouve enfin la protéine sur laquelle s’accroche la colchicine, un poison connu depuis l’Antiquité égyptienne et qui tue les cellules en empêchant la mitose. Il s’agit de la tubuline, un long polymère formé de deux « perles » de composition très proche qui alternent, baptisées alpha et bêta. Treize filaments à base de ces blocs s’assemblent ensuite en tube pour former les microtubules.

    Cette découverte a été le point de départ d’une série de surprises autour de cette molécule bien moins anodine qu’il n’y paraît, comme l’ont rappelé les quatre cents participants d’un colloque qui s’est tenu à Heidelberg, en Allemagne, du 29 mai au 1er juin. « On croit tout savoir sur les microtubules, et, tous les six mois, il y a du nouveau », constate Michel Bornens, l’un des orateurs de ce congrès et directeur de recherche CNRS à l’Institut Curie.

    Le premier choc a été celui des images. Même si le fuseau mitotique avait été vu au microscope dès le XIXe siècle, il a fallu attendre les années 1970 et des techniques de fluorescence qui repèrent des cibles en y attachant des molécules lumineuses pour découvrir enfin le cytosquelette. « Avec ces outils, on est passé d’une cellule vue comme un sac à quelque chose de plus organisé avec ces filaments en réseau occupant tout l’espace. On a vu la cellule d’un tout autre œil », rappelle Michel Bornens.

    « Ingrédients magiques »

    Une seconde surprise est vite arrivée : le cyto­squelette est en fait très dynamique. Les réseaux se renouvellent complètement en moins d’une heure dans des cellules en ­culture. Les microtubules croissent spontanément par assemblage de plusieurs blocs et se défont tout aussi rapidement, avant de se reformer. « Ce mécanisme ­consomme de l’énergie, et sa compréhension a ­occupé de nombreux laboratoires pendant une quinzaine d’années », raconte Michel Bornens.

    En 1984, Tim Mitchison et Marc Kirschner, à l’université de Californie de San Francisco, baptisent « instabilité dynamique » ce phénomène de fluctuation des polymères, complètement nouveau pour les physico-chimistes. « J’avais proposé “saccade de microtubules”, ce qui en argot signifie “satanés microtubules”, mais nous avons préféré être plus sérieux », explique Tim Mitchison, aujourd’hui à la Harvard Medical School. « C’est une sorte de flou stable. Des assemblages et désassemblages garantissent paradoxalement la stabilité », évoque Carsten Janke (CNRS), organisateur principal du congrès d’Heidelberg, chercheur à l’Institut Curie. « C’est à cause de cette instabilité que nous sommes vivants, en somme ! », complète Marie-France Carlier (CNRS) à l’Institut de Biologie intégrative de la cellule de Gif-sur-Yvette (Essonne), qui a contribué, dans les années 1980, à élucider le mécanisme chimico-physique précis de l’assemblage des microtubules.

    « L’amusant est que le concept d’instabilité dynamique a eu beaucoup de succès, mais qu’il n’est pas si présent in vivo », indique Manuel Théry (CEA), de l’hôpital Saint-Louis, qui a notamment montré que les microtubules se réparent également tout seuls. In vitro, les filaments sont plus courts et droits, alors qu’ils sont plus longs et courbes in vivo. Ces différences témoignent d’une richesse d’acteurs chimiques insoupçonnés. « Plus on regarde, plus on trouve des ingrédients magiques », indique Manuel Théry. En fait, des dizaines de protéines différentes peuvent s’accrocher à ces fils et réguler la machinerie cellulaire.

    Ces travaux ont aussi permis aux chercheurs de comprendre comment les microtubules semblent orienter la cellule. Ils ne sont tout simplement pas des voies de transport à double sens. Leurs deux bouts ont des propriétés chimiques différentes (on dit que la molécule est polarisée), ce qui impose des directions préférentielles pour les moteurs circulant sur ces voies. L’une des conséquences macroscopique majeure est, évidemment, la migration cellulaire : la polarité des microtubules fait que la cellule possède une « tête » et une « queue » et qu’elle peut avancer dans la bonne direction en fonction des stimuli de l’environnement et pas au hasard.

    Pour cette progression, la cellule recourt à un autre membre du cytosquelette, l’actine, un autre réseau de fibres, plus fines. Cette protéine est ­connue aussi comme constituant de nos muscles dont elle permet la contraction, en association avec la myosine. « Les microtubules organisés de manière centralisée sont comme les nerfs, et le réseau d’actine, associé à la membrane de la cellule, les muscles périphériques. Mais avec la dynamique d’assemblage propre à l’échelle cellulaire ! », note Michel Bornens. Tout récemment, des chercheurs de l’université Brandeis ont même montré que ces deux réseaux se parlent : une protéine connue pour s’accrocher au bout d’un microtubule accélère près de vingt fois la croissance de l’active…

    Le « code tubuline » reste à « cracker »

    Auparavant, les chercheurs avaient eu une autre surprise. Il existerait un code tubuline, comme il y a un code génétique, qu’il suffirait de comprendre pour prédire le fonctionnement de cette machinerie des plus complexes. Autrement dit, de l’information serait encodée sur ces tubes, comprise par les différentes protéines qui s’y attachent, et cela guiderait leur action. « Reste à cracker ce code ! », souligne Carsten Janke, l’un des pionniers de cette recherche. « Tous les microtubules sont identiques et, pourtant, ils ont plusieurs fonctions. Les moteurs ne s’accrochent pas partout, comme s’ils savaient lire ce code. C’est magnifique, mais on ne sait pas encore comment ça marche », ajoute Manuel Théry. Plus précisément, chacune des deux perles, alpha et bêta, constituant la tubuline possède une petite queue formée de quelques acides aminés. Cette chaîne, un peu comme la succession des bases A, C, G, T dans l’ADN des chromosomes, peut être modifiée : une « lettre », voire un accent, en moins ou en plus.

    Mais avec de grands effets. Cela peut suffire à modifier le destin des microtubules, comme l’ont montré les travaux pionniers de l’équipe de Carsten Janke depuis 2010. Il soupçonne que ce genre de perturbations pourrait expliquer certaines maladies comme la neurodégénérescence. De même, en avril dernier, une équipe de l’université de Pennsylvanie montrait comment des changements de lettres induisent une contraction du muscle cardiaque différente. « Tout se passe comme si le système avait une sorte de mémoire qui lui permet de fonctionner. C’est un code, mais un code “flou”, agissant par des signaux graduels, comme un rhéostat et non comme des signaux binaires comme en informatique, imagine Carsten Janke. C’est incroyable de voir que cette complexité est gérée par de si petits détails. »

    Cette machinerie laisse rêveur n’importe quel ingénieur. « Quel équivalent se construirait tout seul ? Se réparerait tout seul ? Grandirait d’un coup pour s’évanouir tout aussi rapidement et réapparaître à un autre endroit ? », s’interrogeait dans la revue Nature, le 26 avril, Gary Borisy. « Cela me rappelle un temple japonais vieux de plusieurs siècles et qui semble en parfait état, pour la bonne raison qu’il est démonté et reconstruit tous les vingt ans ! », ajoutait-il, de passage à Paris avant le congrès d’Heidelberg.

    De quoi faire rêver à des matériaux inspirés par ces propriétés qu’aucun ingénieur n’aurait pu imaginer. « C’est l’un des composants les plus jolis de la biologie avec des propriétés d’autoassemblage, d’autoréparation incroyables. Imaginez ce que pourraient faire un matelas ou une chaise ou un circuit électronique qui auraient des états différents entre le repos et l’action. Qui seraient dynamiques, mais pas trop », rêve Manuel Théry. « Evidemment, un problème est que tout cela se passe en milieu liquide. »

    Pour des anticancéreux moins toxiques

    Cette merveille physico-chimique n’intéresse pas seulement pour les questions fondamentales qu’elle pose, tant les pathologies associées aux microtubules sont nombreuses : cancer, microcéphalie, stérilité, neurodégénérescence, maladies cardiaques…

    « Nous devons comprendre pourquoi certaines cellules développent des résistances au Taxol, par exemple », indique Susan Horwitz, professeur au Collège Albert-Einstein de Médecine (New York), qui a découvert l’action du Taxol et qui, avec des chimistes, essaie de modifier légèrement des molécules actives déjà connues pour répondre à cette question ainsi qu’à celle des effets secondaires. Outre le Taxol, l’ixabepilone évite lui aussi la dépolymérisation de la tubuline et fige le cytosquelette, ce qui conduit à la mort cellulaire. A l’inverse, la colchicine, le nocodazol ou la vincristine bloquent la polymérisation et détruisent donc également la cellule. Pour éviter les effets secondaires liés à ces molécules qui affectent aussi bien les cellules cancéreuses que celles normales, l’équipe de l’Institute for Advanced Biosciences, à Grenoble, cible non pas directement les microtubules, mais des régulateurs de leur croissance. Dans la revue Cancer Research du 23 mai, elle a déjà démontré, chez la souris, des effets comparables au Taxol, mais avec une moindre toxicité.

    Ces dernières années, une nouvelle classe de pathologies a émergé : les ciliopathies. Comme leur nom l’indique, elles ont pour point commun des dysfonctionnements des « cils », minces filaments omniprésents dans bon nombre d’organismes : le flagelle des spermatozoïdes bien sûr, mais aussi ceux piquetés en surface de cellules du cerveau, des poumons ou des reins, où ils agitent les fluides présents et servent de capteurs… En cas de dysfonctionnement, c’est la stérilité, des problèmes de mémoire, des maladies rénales (comme la polykystose rénale), ou le syndrome de Bardet-Biedl, qui associe dégénérescence de la rétine et obésité… Et de quoi sont constitués ces cils ? De microtubules ! Ces derniers assurent le rôle mécanique en battant ou en tournant comme une hélice de bateau. Ils servent aussi de support pour le transport de signaux aux deux extrémités des cils. « Jusqu’aux années 2000, les grands pontes de la biologie cellulaire avaient décrété que le cil était un appendice de la cellule sans aucune fonction. Avant de changer d’avis avec la découverte de son lien avec les polykystoses rénales », indique Maxence Nachury, à l’université Stanford, qui a contribué à mettre en évidence le rôle des cils dans la transmission de signaux entre cellules. Juste retour des choses car, dans l’évolution, le système ciliaire est très primitif, ce qui fait des microtubules l’une des plus anciennes molécules du vivant.

    Responsables de défauts cérébraux

    La forte présence de tubuline dans le cerveau et l’importance des microtubules dans la migration cellulaire les rend responsables de bien des défauts cérébraux lorsque la belle mécanique s’enraye. Au congrès d’Heidelberg, Richard ­Vallee (université Columbia) a ainsi pointé un lien entre microtubules et microcéphalies. A l’inverse, les lissencéphalies, caractérisées par l’absence de plis du cortex cérébral, sont connues pour être associées à des mutations génétiques de la tubulaire.

    « Ce congrès était génial », se félicite Carsten Janke, devant tant de résultats et de perspectives. Ces spécialistes n’en font-ils pas trop avec leur molécule phare ? « Chaque biologiste a bien sûr sa protéine favorite et pense qu’elle est au centre du vivant, sourit Michel Bornens, mais les microtubules sont vraiment des polymères magiques. »
    « On parle sans cesse du génome, mais on oublie que c’est grâce aux produits du génome et en particulier aux propriétés d’auto-organisation du cytosquelette que nous fonctionnons », estime Eric Karsenti, Médaille d’or 2015 du CNRS, pionnier des recherches sur les microtubules, qui souligne également l’apport des physiciens et de leurs approches statistiques pour comprendre cette biochimie complexe. L’interdisciplinarité n’est sans doute pas de trop pour démêler tous ces fils…

  • Des spermatozoïdes sous influence

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2016/01/04/des-spermatozoides-sous-influence_4841467_1650684.html

    Comment un traumatisme psychique ou un déséquilibre alimentaire d’un futur parent, avant même la conception, peut-il engendrer des effets sur plusieurs générations  ? Fin décembre, une série d’avancées a été accomplie sur cette voie explorant un mode d’hérédité « buissonnier   »  : l’épigénétique.

    L’épigénétique, ou comment chahuter les lois de l’hérédité classique   : ce mode de transmission, en effet, n’est plus exclusivement fondé sur la sacro-sainte séquence de l’ADN. Avec l’épigénétique, c’est un héritage plus subtil – plus fragile aussi – qui est transmis au fil des générations   : ce sont des «   marques   » qui jalonnent le génome, en des sites précis. Sensibles à des facteurs de l’environnement, ces marques «   allument   » ou «   éteignent  » nos gènes dans nos cellules. C’est ainsi qu’une cellule de notre cerveau est très différente d’une cellule de notre foie, de nos muscles, de nos os…

    Publiées le 31 décembre dans Science, deux études ont examiné l’impact d’une alimentation perturbée chez la souris. Dans la première, l’équipe de Qi Zhou (Institut de zoologie, Pékin) a soumis des souris mâles à un régime très gras. Avec le sperme de ces rongeurs, les chercheurs ont fécondé des femelles nourries normalement. Les souris issues de cette manipulation ont développé une intolérance au glucose et une résistance à l’insuline, deux signes de prédiabète. Elles présentaient aussi une moindre expression de gènes impliqués dans le métabolisme des sucres.

    Des groupes apposés sur l’ADN

    (...)

    Les chercheurs chinois ont isolé les ARN des spermatozoïdes de souris soumises à ce régime gras. Puis ils ont injecté ces ARN à des ovocytes de souris juste fécondés. Les rongeurs nés de cette intervention ont développé une intolérance au glucose. Les ARN assurant cette transmission sont des fragments « d’ARN de transfert ». Leur principale fonction est de transporter les acides aminés lors de la fabrication des protéines. Mais, ici, leurs fragments semblent avoir été « recyclés » à des fins épigénétiques.

    Dans la seconde étude de Science, l’équipe d’Oliver Rando (université de médecine du Massachusetts) a analysé les effets, chez la souris, d’un régime pauvre en protéines. Ses résultats confortent l’idée d’un rôle de ces petits ARN en épigénétique. Un régime pauvre en protéines entraîne, chez la génération suivante, la dérégulation de tout un jeu de gènes, avait montré cette équipe en 2010.

    Des troubles sur deux générations

    Et chez l’homme ? « Dans les spermatozoïdes de personnes obèses, nous trouvons une signature spécifique, constituée de petits ARN et de méthylations de l’ADN. Cette signature marque des gènes qui gouvernent l’appétit », résume Romain Barrès, de l’université de Copenhague, principal auteur d’une étude publiée en décembre dans Cell Metabolism. Mieux : « Cette signature change drastiquement après une perte de poids massive induite par une chirurgie de l’obésité. » Dans une autre étude à paraître dans Molecular Metabolism, cette équipe montre qu’un régime gras, suivi par un rat mâle, provoque des troubles métaboliques sur deux générations. Ces troubles seraient en partie transmis par de petits ARN du sperme.

    Est-ce à dire que seuls les mâles transmettent à leur descendance les effets de leurs modes de vie altérés ? Non. « Les femelles aussi peuvent transmettre des changements épigénétiques. Mais les spermatozoïdes sont plus faciles à étudier que les ovocytes », dit Isabelle Mansuy, de l’Ecole polytechnique fédérale et de l’université de Zurich.

    Retrait social et désordes métaboliques

    D’autres études ont révélé, chez l’animal, comment le traumatisme psychique d’un géniteur peut retentir sur les générations suivantes. En 2010, Isabelle Mansuy montrait les effets d’une séparation chronique et imprévisible de jeunes souris mâles d’avec leur mère. Leurs « enfants » et « petits- enfants » souffraient de troubles dépressifs et cognitifs, d’un retrait social et de désordres métaboliques. En 2014, l’équipe de Zurich découvrait de petits ARN spécifiques altérés dans le sperme de ces souris traumatisées. En injectant l’ARN du sperme de ces animaux dans des ovocytes juste fécondés, elle reproduisait ces troubles sur deux générations. En octobre 2015, une étude publiée dans les PNAS confortait ces résultats. L’équipe de Tracy Bale, de l’université de Pennsylvanie, retrouvait de petits ARN spécifiques dans les spermatozoïdes de souris ayant subi un stress chronique précoce.

    Quelle est la portée de cette hérédité épigénétique chez les mammifères ? C’est un chantier qui s’ouvre. Car l’existence de ces processus reste à prouver chez l’homme, et leurs mécanismes à préciser. Reste aussi cette troublante question : peut-on voir, dans cette transmission épigénétique, une forme d’hérédité des caractères acquis ? « Je ne pense pas que les caractères “obèse” ou “stressé”, en tant que tels, soient transmis, estime Romain Barrès. Ce qui se transmet est une adaptation, induite par l’environnement de nos ancêtres. » Emiliano Ricci ajoute que « les caractères transmis par épigénétique peuvent être labiles ». Si de nouvelles marques épigénétiques sont facilement créées par des changements environnementaux, elles sont tout aussi aisément effacées par de nouveaux changements. L’épigénome offrirait aux individus un moyen d’explorer rapidement une adaptation à une variation de l’environnement, sans pour autant la graver dans le génome...

    L’épigénétique façonne les fourmis

    Et si l’épigénétique déterminait le statut social ? C’est ce qu’une équipe américaine vient de proposer dans la revue Science. Son sujet d’étude n’est pas l’humain, mais la fourmi, insecte social par excellence. Mais le résultat de ses recherches apporte des pistes prometteuses. Les fourmis charpentières de Floride sont composées de deux castes : les soldates et les ouvrières. Les deux disposent du même patrimoine génétique. Les secondes ont pourtant des têtes plus petites, des mandibules moins puissantes... et une surexpression des gènes impliqués dans le développement cérébral.

    A ce constat, les chercheurs en ont ajouté un autre, plus spectaculaire : en modifiant la composition chimique des histones – ces protéines autour desquelles s’enroule l’ADN –, ils sont parvenus à modifier le comportement des fourmis. Un simple changement d’alimentation a dopé l’activité des ouvrières fourrageuses. Pour les soldates, il a fallu en passer par l’injection directe de ces mêmes produits dans le cerveau de jeunes spécimens. Les combattantes ont alors aligné leur activité sur celle des ouvrières. Les auteurs parlent de
    « fenêtre épigénétique de vulnérabilité » et rêvent déjà d’application thérapeutique chez l’homme.

    #épigénétique

  • L’aversion aux algorithmes - Knowledge@Wharton
    http://alireailleurs.tumblr.com/post/111360073624

    Les spécialistes de l’étude de la prise de décision, Cade Massey (@bcmassey) et Berkeley Dietvorst de la Wharton School de l’université de Pennsylvanie revenaient dans un récent Podcast pour Knowledge@Wharton sur l’aversion aux algorithmes. Dans une de leur recherche sur ce sujet, ils montraient que bien que les algorithmes prédictifs (qui portaient sur l’évolution du trafic aérien ou des résultats scolaires d’élèves…) s’avèrent meilleurs que les humains à prédir l’avenir, les responsables ont plutôt tendance à préférer choisir un prévisionniste humain. Et ce même quand ils constatent que la prévision algorithmique est meilleure que les prévisionnistes humains. En fait, nos biais cognitifs nous font perdre plus rapidement confiance dans les algorithmes que dans les humains quand ils font une erreur et ce même (...)

    #alogorithmes #contrôle #IHM

  • Grèce : les suicides ont augmenté fortement avec l’austérité
    http://www.latribune.fr/actualites/economie/union-europeenne/20150203trib4aeb2b0cc/grece-les-suicides-ont-augmente-fortement-avec-l-austerite.html

    L’annonce en juin 2011 par le gouvernement grec d’un second paquet de mesures d’austérité comprenant baisses des salaires des fonctionnaires et réduction des dépenses de protection sociale, semble avoir eu l’impact le plus fort sur la courbe des suicides.

    Le nombre des suicides (hommes et femmes) a progressé en moyenne de 35,7% « sur les mois qui ont suivi cette date, par rapport à la moyenne des mois précédents », selon l’auteur principal de l’étude, le Professeur d’épidémiologie à l’Université de Pennsylvanie Charles Branas.

    Oh, finalement, cette information devient intéressante.

  • L’analyse du stress vocal marche-t-elle ? - Language Log
    http://alireailleurs.tumblr.com/post/108064807006

    Sur Language Log, le blog de l’Institut de recherche en science cognitive de l’université de Pennsylvanie, Mark Liberman, directeur du Linguistic Data Consortium, fait le point sur l’analyse du stress vocal (Voice stress analysis, VSA), la méthode qui, depuis quelques années, remplace le polygraphe ou détecteur de mensonge dans la plupart des agences et des départements de police des Etats-Unis. Or, le VSA ne semble pas être bien plus fiable que le polygraphe, estime Liberman en faisant le tour des études sur le sujet. La mesure du changement d’intonation assistée par les ordinateurs ne semble pas plus efficace que celle de la conductance cutanée. Ce type d’appareil semble surtout efficace pour effrayer les gens et les inciter à ne pas mentir. Pas plus (...)

    #quantified_self #analyse_vocale #bodyware

  • Quand les biais se retournent contre nous - New York Times
    http://alireailleurs.tumblr.com/post/105590715866

    Adam Grant (@adammgrant), professeur à la Wharton School de l’université de Pennsylvanie et auteur de Give & Take, et Sheryl Sandberg (@sherylsandberg), directrice des opérations de Facebook et fondatrice de LeanIn, un réseau pour promouvoir la réussite des femmes, viennent d’entamer une passionnante série sur la discrimination à l’encontre des femmes au travail pour le New York Times. Le premier volet de leur enquête revient sur les biais de #genre et commence par évoquer une petite histoire assez connue. 

    "Un père et son fils ont un accident de voiture. Le père est tué et le fils gravement blessé. Le fils est transporté à l’hôpital où le chirurgien déclare : « je ne peux pas opérer, parce que ce garçon est mon fils ». 

    40 à 75% des gens ont du mal à comprendre cette histoire. Et ceux qui la résolvent ont (...)

    #cognition #psychologie #économie_comportementale

    • Joli plaidoyer pour la communication lucide et explicite, avec cette séquence à 3 temps dont on devrait tous s’inspirer quand on milite pour peser sur les comportements

      1 -

      Pour résoudre ce problème, l’enjeu est de sensibiliser les gens à leur partialité. L’hypothèse étant que lorsque les gens se rendent compte de leurs préjugés, ils sont plus susceptibles de les surmonter

      2 -

      “Nous avons la même réaction quand nous comprenons l’omniprésence des stéréotypes. Si tout le monde a un biais, alors nous n’avons plus besoin de nous en inquiéter et de nous censurer !”

      Si la sensibilisation ne fait qu’empirer les choses, comment faire mieux ? La solution est de ne pas s’arrêter à pointer l’existence de stéréotypes, mais de pointer qu’ils sont indésirables et inacceptables !

      (..)

      3-

      Dire que tous nos comportements ont des biais ne doit pas les légitimer. La plupart des gens ne souhaitent pas la discrimination et vous ne devriez pas l’accepter non plus.

  • « Perdre son temps sur internet », le nouveau cours de fac
    http://www.presse-citron.net/il-y-a-un-an-il-voulait-imprimer-le-web-aujourdhui-il-lance-un-cours-

    "Et si vous pensez qu’il ne s’agit que du petit délire d’un être farfelu, détrompez-vous. Ce cours sera dispensé à des étudiants de la prestigieuse université de Pennsylvanie, où Kenneth Goldsmith enseigne. Une fois par semaine et durant trois heures, les étudiants vont « perdre leurs temps sur internet », c’est-à-dire surfer sans but précis. Mais, tout cela fait partie d’une démarche précise. Dans une interview accordée au site Vice, Goldsmith a expliqué qu’alors que les écrivains et les artistes du 20ème siècle ont passé une quantité incroyable de temps à essayer de puiser dans le subconscient, à la recherche de nouvelles façons de créer des œuvres surréalistes, nous avons trouvé une façon de le faire assez facilement, grâce à notre utilisation (...)

    #public