• The ‘Islamo-gauchiste threat’ as political nudge

    What is ‘islamo-gauchisme’? The word sparked heated debates in French academia and in public conversations in 2020–2021. This article endeavors to shed light on the origin of the notion, to look at its uses within and outside academia, and to reflect on the political ramifications of the controversy. Islamo-gauchisme is an unsubstantial notion which operates as political nudge in the public debate: it sounds sufficiently threatening and self-explanatory to be taken seriously. This study shows that the controversy on islamo-gauchisme has helped mainstream illiberal and right-wing policies, to make them plainly acceptable to the public.

    https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/09571558231152992
    #islamo-gauchisme #france #académique #ESR #origine #enseignement_supérieur #recherche #contreverse #débat_public

  • Les « Frankenvirus » au cœur des débats, après l’émergence du Covid-19
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2022/11/07/le-covid-19-ravive-le-debat-autour-de-la-manipulation-des-virus_6148855_1650

    Les expériences visant à rendre plus dangereux des pathogènes au prétexte d’anticiper leur émergence se multiplient, alors que les experts sont divisés sur les bénéfices et les risques liés à ces manipulations. La discussion est d’autant plus vive que de telles expérimentations avaient cours à Wuhan, épicentre de la pandémie de Covid-19, dont on ignore toujours l’origine.

    Jeu dangereux du « gain de fonction »
    Certes, en apparence, le débat n’est pas vraiment nouveau – d’autant que l’histoire de la virologie est émaillée d’accidents et de fuites de laboratoires, même parmi les plus sécurisés –, mais il a désormais changé d’échelle. Les expériences de recombinaison, de mutation et de « réécriture » de virus (sans même parler des infections de cultures de cellules humaines ou de souris « humanisées ») sont devenues en quelques années extrêmement banales ; et parmi elles, celles qui augmentent la dangerosité des pathogènes sont nombreuses. Les spécialistes qualifient pudiquement ces dernières d’expériences de « gain de fonction » pour indiquer que le pathogène modifié acquiert ou développe une propriété problématique : contagiosité, virulence, évasion immunitaire ou médicamenteuse. Lorsque ces virus aggravés ont un potentiel pandémique, ils sont souvent désignés par le terme moins euphémisé de « Frankenvirus ».
    L’une des premières conséquences du Covid-19 sur la recherche en virologie est qu’elle menace, paradoxalement, de générer encore plus d’expériences dangereuses. La « préparation pandémique » est en effet devenue un thème de recherche vendeur, sans forcément générer de réflexion suffisante sur ce que l’expression recouvre.

    Multiplication des laboratoires de haute sécurité
    On constate en parallèle la brusque accélération d’un vaste mouvement mondial d’équipement en laboratoires de haute sécurité, entamé avant le Covid. Gregory Koblentz, spécialiste américain de biosécurité à George-Mason University (Virginie), indique que la construction de vingt-sept nouveaux laboratoires de niveau BSL-4 (le plus haut niveau de protection, destiné aux pathogènes les plus dangereux, où les chercheurs opèrent en tenue de cosmonaute) a été annoncée depuis le début de la pandémie – alors qu’il en existe aujourd’hui une quarantaine. L’Inde, qui possède un seul laboratoire de ce type, veut en construire quatre autres. La Chine annonce un chiffre analogue. Singapour, le Kazakhstan et les Philippines, entre autres, ont décidé de s’équiper.
    « Il n’y a pas de mécanisme international pour imposer le respect de standards » – Gregory Koblentz, spécialiste de biosécurité à George-Mason University (Virginie)
    Beaucoup de chercheurs se réjouissent de la possibilité de travailler avec les virus localement, et dans de bonnes conditions de sécurité. Mais Gregory Koblentz note aussi que « plus de labos constitue un risque d’accident accru », ajoutant que « les standards internationaux pour gérer de telles structures ne sont pas largement adoptés, et il n’y a pas de mécanisme international pour imposer le respect de ces standards ».

    Epidémie « accidentelle »
    Mais, surtout, le débat sur la virologie dangereuse a été électrisé par le Covid-19, qui a confirmé spectaculairement que le risque d’épidémie déclenchée par la recherche est bien réel. Au fil du temps, l’hypothèse qu’un accident de laboratoire soit à l’origine de la pandémie a discrètement fait son chemin dans les milieux scientifiques. Pourfendue comme complotiste dans une tribune indignée du Lancet publiée en février 2020, vilipendée durant les premiers mois de la pandémie par toutes les sommités de la virologie, cette hypothèse n’a fait que progresser depuis lors. Au point qu’un grand nombre de chercheurs la tiennent désormais, généralement en privé, pour la plus probable.
    Certes, la communauté est divisée, et il est toujours possible que le SARS-CoV-2 soit passé aux humains par l’intermédiaire d’animaux sauvages ou d’élevage infectés, comme cela avait été le cas pour les deux émergences précédentes de coronavirus, le SRAS en 2003 et le MERS en 2012.
    Lire aussi Article réservé à nos abonnés Origines du Covid-19 : l’hypothèse d’un accident à l’Institut de virologie de Wuhan relancée après la divulgation de travaux inédits
    Mais tout de même. Selon les deux principales autorités scientifiques qui ont enquêté sur la question, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) d’une part, et la commission de haut niveau formée par la revue médicale The Lancet, qui a livré ses conclusions en septembre 2022, de l’autre, en l’absence de la moindre trace d’animal infecté, l’hypothèse de l’accident de laboratoire reste entièrement plausible, bientôt trois ans après le début de la pandémie. Dès juillet 2021, Tedros Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, déclarait à la presse, en réaction à l’opacité des autorités chinoises : « Les accidents de laboratoire arrivent. J’en ai vu et j’ai moi-même fait des erreurs. Donc (…) vérifier ce qu’il s’est passé (…) est important et nous avons besoin d’informations. »

    Dans ce climat délétère, y a-t-il une chance qu’émerge une vision commune sur la façon de réguler ces expériences dangereuses ? Le problème est que l’étendue des désaccords entre chercheurs est considérable. Pour l’illustrer, revenons aux coronavirus chimériques de Boston. D’un côté, leur fabrication a été sévèrement critiquée par de nombreux biologistes, qui ont parlé sur Twitter de « folie » ou d’« irresponsabilité totale ». Plus mesuré, Marc Eloit, de l’Institut Pasteur, n’en considère pas moins qu’une telle expérience est risquée, « puisqu’on sait qu’elle peut changer de manière imprévisible le phénotype [les caractéristiques] du virus résultant ». Et il ajoute qu’à son avis elle n’aurait jamais été autorisée à Pasteur, ni d’ailleurs dans aucune institution de recherche française. « Il ne serait même venu à l’idée de personne de la proposer », assure-t-il, pointant qu’il y a en France une culture de la biosécurité et une aversion au risque différentes de ce que l’on rencontre aux Etats-Unis.
    Désaccords profonds
    Mais Marc Eloit indique également que l’expérience avait une utilité scientifique indiscutable pour comprendre les propriétés des différentes parties du génome du virus. Et à la question de savoir si, au sein d’une institution américaine qui l’autoriserait, il l’aurait lui-même tentée, il a l’honnêteté de répondre qu’il l’ignore. Du reste de nombreux virologues de haut niveau ont énergiquement pris la défense de leurs collègues bostoniens, témoignant d’une profonde division au sein de la communauté.

    #Covid #Origine #Gain_de_fonction #Biosécurité

  • The Origin of Student Debt: Reagan Adviser Warned Free College Would Create a Dangerous “Educated Proletariat”

    In 1970, #Roger_Freeman, who also worked for Nixon, revealed the right’s motivation for coming decades of attacks on higher education.

    With the vociferous debate over President Joe Biden’s announcement that the federal government will cancel a portion of outstanding student debt, it’s important to understand how Americans came to owe the current cumulative total of more than $1.6 trillion for higher education.

    In 1970, Ronald Reagan was running for reelection as governor of California. He had first won in 1966 with confrontational rhetoric toward the University of California public college system and executed confrontational policies when in office. In May 1970, Reagan had shut down all 28 UC and Cal State campuses in the midst of student protests against the Vietnam War and the U.S. bombing of Cambodia. On October 29, less than a week before the election, his education adviser Roger A. Freeman spoke at a press conference to defend him.

    reeman’s remarks were reported the next day in the San Francisco Chronicle under the headline “Professor Sees Peril in Education.” According to the Chronicle article, Freeman said, “We are in danger of producing an educated proletariat. … That’s dynamite! We have to be selective on who we allow [to go to college].”

    “If not,” Freeman continued, “we will have a large number of highly trained and unemployed people.” Freeman also said — taking a highly idiosyncratic perspective on the cause of fascism —“that’s what happened in Germany. I saw it happen.”

    Freeman was born in 1904 in Vienna, Austria, and emigrated to the United States after the rise of Hitler. An economist who became a longtime fixture in conservative politics, he served on the White House staff during both the Dwight Eisenhower and Richard Nixon administrations. In 1970 he was seconded from the Nixon administration to work on Reagan’s campaign. He was also a senior fellow at Stanford’s conservative Hoover Institution. In one of his books, he asked “can Western Civilization survive” what he believed to be excessive government spending on education, Social Security, etc.

    A core theme of Reagan’s first gubernatorial campaign in 1966 was resentment toward California’s public colleges, in particular UC Berkeley, with Reagan repeatedly vowing “to clean up the mess” there. Berkeley, then nearly free to attend for California residents, had become a national center of organizing against the Vietnam War. Deep anxiety about this reached the highest levels of the U.S. government. John McCone, the head of the CIA, requested a meeting with J. Edgar Hoover, head of the FBI, to discuss “communist influence” at Berkeley, a situation that “definitely required some corrective action.”

    During the 1966 campaign, Reagan regularly communicated with the FBI about its concerns about Clark Kerr, the president of the entire University of California system. Despite requests from Hoover, Kerr had not cracked down on Berkeley protesters. Within weeks of Reagan taking office, Kerr was fired. A subsequent FBI memo stated that Reagan was “dedicated to the destruction of disruptive elements on California campuses.”

    Reagan pushed to cut state funding for California’s public colleges but did not reveal his ideological motivation. Rather, he said, the state simply needed to save money. To cover the funding shortfall, Reagan suggested that California public colleges could charge residents tuition for the first time. This, he complained, “resulted in the almost hysterical charge that this would deny educational opportunities to those of the most moderate means. This is obviously untrue. … We made it plain that tuition must be accompanied by adequate loans to be paid back after graduation.”

    The success of Reagan’s attacks on California public colleges inspired conservative politicians across the U.S. Nixon decried “campus revolt.” Spiro Agnew, his vice president, proclaimed that thanks to open admissions policies, “unqualified students are being swept into college on the wave of the new socialism.”

    Prominent conservative intellectuals also took up the charge. Privately one worried that free education “may be producing a positively dangerous class situation” by raising the expectations of working-class students. Another referred to college students as “a parasite feeding on the rest of society” who exhibited a “failure to understand and to appreciate the crucial role played [by] the reward-punishment structure of the market.” The answer was “to close off the parasitic option.”

    In practice, this meant to the National Review, a “system of full tuition charges supplemented by loans which students must pay out of their future income.”

    In retrospect, this period was the clear turning point in America’s policies toward higher education. For decades, there had been enthusiastic bipartisan agreement that states should fund high-quality public colleges so that their youth could receive higher education for free or nearly so. That has now vanished. In 1968, California residents paid a $300 yearly fee to attend Berkeley, the equivalent of about $2,000 now. Now tuition at Berkeley is $15,000, with total yearly student costs reaching almost $40,000.

    Student debt, which had played a minor role in American life through the 1960s, increased during the Reagan administration and then shot up after the 2007-2009 Great Recession as states made huge cuts to funding for their college systems.

    That brings us to today. Biden’s actions, while positive, are merely a Band-Aid on a crisis 50 years in the making. In 1822, founding father James Madison wrote to a friend that “the liberal appropriations made by the Legislature of Kentucky for a general system of Education cannot be too much applauded. … Enlightened patriotism … is now providing for the State a Plan of Education embracing every class of Citizens.”

    “Knowledge will forever govern ignorance,” Madison explained, “and a people who mean to be their own governors must arm themselves with the power which knowledge gives.” Freeman and Reagan and their compatriots agreed with Madison’s perspective but wanted to prevent Americans from gaining this power. If we want to take another path, the U.S. will have to recover a vision of a well-educated populace not as a terrible threat, but as a positive force that makes the nation better for everyone — and so should largely be paid for by all of us.

    https://theintercept.com/2022/08/25/student-loans-debt-reagan
    #Roland_Reagan #Reagan #USA #Etats-Unis #histoire #origine #université #étudiants #endettement #dette_étudiante #how_it_begun #ESR #prolétariat #prolétariat_éduqué #educated_proletariat #classes_sociales #ascension_sociale #éducation #péril #sélection

  • Prédire les flux migratoires grâce à l’intelligence artificielle, le pari risqué de l’Union européenne
    https://disclose.ngo/fr/article/union-europeenne-veut-predire-les-flux-migratoires-grace-a-lintelligence-a

    Depuis plusieurs mois, l’Union européenne développe une intelligence artificielle censée prédire les flux migratoires afin d’améliorer l’accueil des migrants sur son sol. Or, selon plusieurs documents obtenus par Disclose, l’outil baptisé Itflows pourrait vite se transformer en une arme redoutable pour contrôler, discriminer et harceler les personnes cherchant refuge en Europe. Lire l’article

    • C’est un logiciel qui pourrait sa place dans une dystopie. Une intelligence artificielle capable de compiler des milliers de données afin de prédire des flux migratoires et identifier les risques de tensions liées à l’arrivée de réfugiés aux frontières de l’Europe. Son nom : Itflows, pour « outils et méthodes informatiques de gestion des flux migratoires ». Financé à hauteur de 5 millions d’euros par l’Union européenne et développé par un consortium composé d’instituts de recherche, d’une société privée (Terracom) et d’organisations caritatives, Itflows qui est en phase de test devrait rentrer en service à partir d’août 2023. Et ce, malgré des alertes répétées quant aux risques de détournement de ses capacités prédictives à des fins de contrôle et de restrictions des droits des réfugiés sur le sol européen.

      Encore méconnu, ce programme doit venir compléter un dispositif technologique destiné à la surveillance des frontières, notamment espagnoles, italiennes et grecques. Financé sur le budget d’« Horizon 2020 », le programme de recherche et d’innovation de l’Union européenne, Itflows s’ajoutera alors aux drones de surveillance autonome, aux détecteurs de mensonges dans les zones de passages ou à l’utilisation de logiciels d’extraction de données cellulaires.

      D’après notre enquête, les deux ONG contribuent à nourrir l’intelligence artificielle de Itflows en lui fournissant des informations précieuses. Des données directement issues d’entretiens réalisés dans des camps de réfugiés, auprès de Nigérians, de Maliens, d’Érythréens ou encore de Soudanais. Il pourra s’agir d’éléments liés à l’origine ethnique, l’orientation sexuelle ou encore la religion des personnes interrogées. Pour leur contribution, les branches italiennes de la Croix-Rouge et d’Oxfam ont respectivement reçu 167 000 euros et 116 000 euros de fonds publics européens.

      « Nous avons contribué à réaliser trente entretiens de migrants arrivés en Italie au cours des six dernières années », confirme la Croix rouge Italie, sollicitée par Disclose. Une fois analysées, puis rendues accessibles via une application baptisée EUMigraTool, ces informations serviront aux autorités italiennes dans leur analyse « des routes migratoires et des raisons qui poussent les gens à faire le voyage », ajoute l’association. Même son de cloche du côté de Oxfam Italie, qui salue l’intérêt pour « les responsables politiques des pays les plus exposés aux flux migratoires. » Les dirigeants pourront également s’appuyer sur l’analyse des risques politiques liés à l’arrivée de migrants sur leur sol. Le projet inclut en effet la possibilité d’étudier l’opinion publique dans certains pays européens vis-à-vis des migrants à travers une veille sur le réseau social Twitter.
      Des rapports internes alarmants

      En réalité, les risques de détournement du programme existent bel et bien. C’est ce que révèlent des rapports internes (https://www.documentcloud.org/projects/logiciel-itflows-208987) au consortium que Disclose a obtenu à la suite d’une demande d’accès à des documents administratifs. Lesdits rapports, datés de janvier et juin 2021, ont été rédigés par les membres du comité éthique du projet Itflows. Leurs conclusions sont alarmantes. Le premier document, une somme de 225 pages, révèle que « le consortium Itflows est pleinement conscient des risques et des impacts potentiels en matière de droits de l’homme, que les activités de recherche empirique sur les migrations (…) et les développements technologiques prévus dans le projet peuvent poser ». Plus loin, les auteurs enfoncent le clou. Selon eux, les informations fournies par l’algorithme pourraient servir, si elles devaient être utilisées « à mauvais escient », à « stigmatiser, discriminer, harceler ou intimider des personnes, en particulier celles qui sont vulnérables comme les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile ».

      Cinq mois plus tard, le comité éthique rend un second rapport. Il détaille un peu plus le danger : « Les États membres pourraient utiliser les données fournies pour créer des ghettos de migrants » ; « risque d’identification physique des migrants » ; « discrimination sur la base de la race, du genre, de la religion, de l’orientation sexuelle, d’un handicap ou de l’âge » ; « risque que les migrants puissent être identifiés et sanctionnés pour irrégularités ». Et le régulateur d’alerter sur un autre péril : la poussée des « discours de haine » que pourrait induire une éventuelle diffusion des prédictions du logiciel dans « les zones où les habitants sont informés de déplacements » de populations.
      L’Europe fait la sourde oreille

      Des alertes qui ne semblent pas avoir été entendues. Comme en atteste un bilan dressé lors d’une réunion (https://www.documentcloud.org/documents/22120596-emt-symposium-agenda-16-sep-2021?responsive=1&title=1) en ligne le 16 septembre 2021 par la coordinatrice du comité éthique de Itflows, #Alexandra_Xanthaki, devant des responsables européens, dont #Zsuzsanna_Felkai_Janssen, rattachée à la direction générale des affaires intérieures de la Commission. « Nous avons passé six mois à travailler jour et nuit pour rédiger un rapport instaurant un cadre qui intègre les droits de l’homme », débute la responsable du comité éthique, selon un enregistrement que Disclose s’est procuré. Elle poursuit : « Il me semble pourtant que ce que disent les techniciens de l’équipe aujourd’hui c’est : nous n’en tenons pas compte ». Un manque de précaution qui inquiète jusqu’au sein du conseil d’administration d’Itflows. Joint par Disclose, Alexander Kjærum, analyste pour le conseil danois pour les réfugiés et membre du conseil de surveillance estime en effet qu’il existe « un risque important que des informations se retrouvent entre les mains d’États ou de gouvernements qui les utiliseront pour implanter davantage de barbelés le long des frontières. »

      Sollicitée, la coordinatrice du programme, #Cristina_Blasi_Casagran, assure que le logiciel « ne sera pas utilisé à mauvais escient ». Selon elle, Itflows « devrait même faciliter l’entrée des migrants [dans l’Union européenne] en permettant une meilleure affectation des ressources engagées dans l’#accueil ».

      #Frontex inquiète

      Un dernier point vient renforcer le risque d’un détournement du logiciel : l’intérêt de Frontex pour Iflows. D’après des documents internes, l’agence en charge de la surveillance des frontières de l’UE suit étroitement les avancées du programme. Jusqu’à y contribuer activement via la fourniture de données récoltées dans le cadre de ses missions. Or, depuis plusieurs années, l’agence européenne est régulièrement accusée d’expulsions illégales et de violations des droits de l’homme. Interrogée sur ce point, l’ONG Oxfam considère qu’il n’y a pas de risque de détournement du logiciel au profit de l’agence. La branche italienne de la Croix rouge déclare quant à elle que « la convention de subvention régissant la mise en œuvre du projet Itflows ne désigne pas Frontex comme utilisateur de l’outil, mais simplement comme source de données ouvertes ». En 2021, Frontex a élu l’interface Itflows parmi les projets d’Horizon 2020 au « potentiel opérationnel et innovant » le plus élevé.

      #AI #IA #intelligence_artificielle #complexe_militaro-industriel #asile #migrations #frontières #EU #UE #Union_européenne #prédiction #Itflows #contrôle #logiciel #risques #Terracom #surveillance #Espagne #Italie #Grèce #horizon_2020 #camps_de_réfugiés #Croix-Rouge #Oxfam #religion #origine_ethnique #ethnie #orientation_sexuelle #données #EUMigraTool #risques #risques_politiques #twitter #réseaux_sociaux #opinion_publique #technologie #algorithme #discrimination #identification #Croix_Rouge

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  • La naissance du racisme

    Pour LSD, Stéphane Bonnefoi questionne les #origines du racisme et la notion de #race, depuis l’antiquité jusqu’au XIXe siècle, au gré de quatre épisodes historiques.

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-la-naissance-du-racisme

    –—

    Les 4 épisodes :

    Épisode 1/4 : L’héritage grec en question

    #Aristote et l’esclave « par nature », #Hippocrate et sa #théorie_climatique… Les penseurs grecs ont souvent été convoqués pour justifier l’esclavage et l’infériorité de certains peuples, à l’époque moderne mais aussi plus tôt, au cours de la #traite_arabo-musulmane

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/l-heritage-grec-en-question-5278625

    Épisode 2/4 : L’#exclusion par la pureté de #sang

    Après avoir converti juifs et musulmans, les rois catholiques de la péninsule ibérique vont imposer aux « conversos » de nouveaux statuts, discriminatoires : La #pureté_de_sang (Limpieza de sangre).

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/l-exclusion-par-la-purete-de-sang-8270617

    Épisode 3/4 : Dans l’ombre des Lumières, la construction de la race

    En pleine expansion de la #traite transatlantique au XVIIIe siècle, la #racialisation de l’esclavage se met en place dans les colonies européennes aux Amériques. Une frontière se forme entre le « nègre » et le blanc...

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/dans-l-ombre-des-lumieres-la-construction-de-la-race-3173051

    Épisode 4/4 : La république des #zoos_humains

    Au XIXe et jusqu’au milieu du XXe siècle, les zoos humains vont mettre en scène l’infériorité des peuples colonisés, tant en Europe qu’au Japon ou aux Etats-Unis. Et permettre ainsi une large diffusion de ce que nous nommons, depuis le début du XXe siècle, le racisme.

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/la-republique-des-zoos-humains-2354253

    #podcast #racisme #esclavage #Antiquité #histoire #Lumières #colonisation #colonialisme #domination #taxonomie #préjugés #système_de_domination #égalité #esclavage_colonial #couleur_de_peau #statut_social #esclavage_moderne #héritage #mythe

    ping @_kg_ @cede

  • Origine du Covid-19 : « Sans informations précises sur ce qui se passait dans le laboratoire de Wuhan, on n’avancera pas ! » | Pour la Science
    https://www.pourlascience.fr/sd/epidemiologie/origine-du-covid-19-sans-informations-precises-sur-ce-qui-se-passait-d


    Le SARS-CoV-2, responsable de la pandémie de Covid-19.
    © NIAID

    Depuis fin 2019, le monde est confronté à la pandémie de #Covid-19. On la doit à un coronavirus, le #SARS-CoV-2, dont l’origine reste mal connue malgré les efforts déployés. Plusieurs hypothèses sont en lice, et toutes sont, à ce jour, plausibles, nous explique le virologue Étienne Decroly.

    très intéressante synthèse sur ce que l’on sait et ce que l’on ne sait pas sur l’origine du SARS-CoV-2

    en accès libre
    en version papier dans le numéro de juin de Pour la Science (où il manque la dernière question et sa réponse, ainsi que les deux dernières phrases de la réponse précédente… peut-être d’autres choses ailleurs, mais c’est moins facile à repérer)

    #must_read !

  • #COVID-19 : Remonter aux #origines du #SARS-CoV-2 | santé log
    https://www.santelog.com/actualites/covid-19-remonter-aux-origines-du-sars-cov-2

    Ce travail d’analyse aboutit à une arborescence qui résume l’évolution des hôtes du SARS-CoV, MERS-CoV et SARS-CoV-2. L’analyse conclut ainsi que les chauves-souris sont les hôtes fondamentaux communs de ces coronavirus humains :
     
    – les #chauves-souris ont été les premiers hôtes des coronavirus humains SRAS-CoV (SRAS) et SRAS-CoV-2 et les hôtes ancestraux des infections à MERS-CoV chez les dromadaires avant leur propagation à l’Homme ;
    – le MERS-CoV a évolué chez les dromadaires (et leurs éleveurs) après la transmission du virus par chauves-souris. De même, le SRAS-CoV a été transmis à l’Homme par la chauve-souris avant sa transmission interhumaine ainsi que de l’Homme aux civettes. Une transmission similaire est constatée pour le SRAS-CoV-2, des éleveurs à leurs visons. L’analyse montre ainsi que certaines des transmissions de l’Homme à l’animal se sont produites après l’infection humaine d’origine par des lignées de coronavirus hébergées au départ chez des chauves-souris ;
    – ces transmissions secondaires à la civette ou au vison n’ont donc pas joué de rôle majeur dans l’émergence des coronavirus humains ;
    – les hôtes d’origine d’autres coronavirus humains sont également identifiés (HCoV-NL63 : chauves-souris, HCoV-229E : dromadaires, HCoV-HKU1 : rongeurs et HCoV-OC43 et HECV-4408 : vaches).
     
    La transmission des coronavirus, des animaux aux humains reste épisodique : de 1966 à 2020, la communauté scientifique a décrit 8 lignées de coronavirus hébergées par l’Homme. Il reste impossible de prédire avec précision quand un nouveau coronavirus hébergé par l’Homme pourrait émerger, cependant l’équipe suggère que
    nous devons nous préparer à cette éventualité.

     « La transmission d’un #coronavirus d’un animal à un hôte humain se produisant de manière épisodique à des intervalles totalement imprévisibles, nous sommes dans l’incapacité de prévoir l’émergence du prochain coronavirus humain. Cependant, les recherches sur les virus transférés des animaux aux humains devraient être poursuivies en continu plutôt qu’en cas de crise pandémique et sanitaire ».

    #cladistique

    Source:
    Fundamental evolution of all Orthocoronavirinae including three deadly lineages descendent from Chiroptera‐hosted coronaviruses: SARS‐CoV, MERS‐CoV and SARS‐CoV‐2 - Jacob Machado - - Cladistics - Wiley Online Library
    https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/cla.12454

  • Le miel de montagne de la famille Vacher : Jura ? Pyrénées ? Non… Brésil. L’obligation de l’affichage de l’origine a du bon. Au moins pour le client (curieux) qui retourne le pot. Il y apprendra qu’il n’y a pas que des plages au Brésil.

    #miel #montagne #brésil #origine #grande_distribution
    Source : https://www.olivierdauvers.fr/2021/04/24/samedi-conso-mon-carnet-retail-mais-pas-que-de-la-semaine-160

  • Projet de #loi sur les #principes_républicains : le niveau des eaux continue de monter

    Il se passe quelque chose d’assez étrange en ce moment : si de nombreux·ses collègues et de nombreuses institutions se sont résolument élevé·es contre les attaques en « #islamo-gauchisme » et autres « #militantismes » lancées de toutes parts dans le sillage de #Frédérique_Vidal, les dispositions concernant les #universités qui ont été introduites dans le projet de loi confortant le respect des principes de la République ne semblent, en revanche, pas émouvoir grand monde.

    Pourtant, nous avons désormais dépassé le seul stade des paroles odieuses sur les plateaux de télévision : le parlement travaille en ce moment à les transformer en #obligations et #interdictions concrètes.

    Peut-être cet intérêt tout relatif de la communauté universitaire s’explique-t-il par le fait que ce sont les étudiant·es qui se trouvent le plus frontalement visé·es. Peut-être est-ce aussi l’effet d’une grande fatigue : le caractère ininterrompu des #attaques contre l’ESR fait qu’il est de moins en moins pertinent de parler de « vagues » réactionnaires, alors qu’il s’agit, en réalité, d’une implacable et continue montée des eaux aux émanations pestilentielles.

    Double discours de la #CPU

    Rien, pas une réaction de la #conférence_des_présidents_d’université (CPU), par exemple, à la suite des deux nouveaux articles introduits le 18 mars 2021 dans le projet de loi confortant le respect des principes de la République, alors que c’est le versant étudiant des #franchises_universitaires qui se trouve remis en question par le parlement, comme nous l’avons déjà expliqué.

    Pire même, le président de la CPU, #Manuel_Tunon_de_Lara a fait le choix de mettre encore un peu d’huile sur le feu : le 16 mars dernier, il a écrit à tou·tes les membres de la commission des lois et membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat – dans une lettre qu’Academia s’est procurée, mais que la CPU s’est bien gardée de rendre publique – pour alimenter la grande peur panique en cours :

    « La vraie #menace [écrit Manuel Tunon de Lara] réside dans le risque d’#intrusion des #religions et d’#idéologies diverses dans la #science, le contenu des #enseignements ou des champs de #recherche, au mépris de la #liberté de chaque enseignant d’exprimer sa pensée et de la #liberté des étudiantes et étudiants inscrits d’assister aux enseignements dispensés, et en violation des franchises universitaires ».

    Il apparaît que c’est un véritable double discours que tient la CPU, quand on sait que deux jours plus tard, elle twittait publiquement toute autre chose de sa rencontre avec le président du Sénat, #Gérard_Larcher :

    https://twitter.com/CPUniversite/status/1372593687000125440

    https://twitter.com/mtunondelara/status/1374734620533608452

    Très introduit, le président Tunon de Lara n’hésite jamais à utiliser ses rencontres parlementaires pour sa communication personnelle1. Au vu des éléments dont nous disposons et du ciblage dont les étudiant·es font l’objet, tant d’un point de vue social que politique, on peu s’intérroger sur ce que prépare réellement la CPU à leur endroit.

    Que le nouvel #article_24 sexies du projet de loi confortant le respect des principes de la République subordonne la mise à disposition de locaux aux étudiant·es à la signature d’un « #contrat_d’engagement_républicain » – dont, pourtant, la Commission nationale consultative des droits de l’homme vient solennellement de demander l’abandon – cela ne pose aucun problème à la CPU. Faire des communiqués grandiloquents contre la ministre, elle sait faire. Défendre concrètement les libertés étudiantes – l’un des grands acquis de la #loi_Faure de 1968 – en revanche, elle s’en garde bien. Peut-être même est-elle directement à l’origine de l’autre article du projet de loi qui concerne les étudiant·es, l’#article_24_septies qui, lui, élargit de manière considérable les possibilités, pour les présidences d’établissement, de limiter la #liberté_de_réunion et la #liberté_d’expression des étudiant·es chaque fois qu’elles estiment être en présence d’ « actions de #propagande » et de « #troubles » au « bon fonctionnement du #service_public », comme Academia l’a déjà expliqué.

    Nouvelle vague d’#amendements au Sénat

    Il est désormais presque certain que ces deux articles seront adoptés lors de l’examen en hémicycle du projet de loi par le Sénat, qui commence demain, mardi 30 mars 2021, à 14h30 au Sénat et durera jusqu’au 8 avril.

    Pour cet examen en hémicycle, d’autres amendements ont en outre été déposés ces tout derniers jours. Ces amendements ont une chance moindre d’être adoptés, mais il nous paraît important de les signaler pour rappeler à quel point, au Parlement, les universités sont désormais visées de manière quasi ininterrompue.

    1° Bien sûr, comme plusieurs fois déjà ces trois derniers mois, des élus Républicains sont remontés au front pour faire interdire le port du #voile dans les établissements d’enseignement supérieur. C’est le cas de l’amendement n° 379 du sénateur #Henri_Leroy ou de l’amendement n° 35 du sénateur #Bascher – qui entend d’ailleurs interdire tous

    signes, tenues ou actes qui constitueraient des actes de pression, de provocation, de #prosélytisme ou de propagande, perturberaient le déroulement des activités d’enseignement de recherche ou troubleraient le fonctionnement normal du service public ».

    On signalera tout particulièrement l’amendement n° 487 du sénateur des Bouches-du-Rhône #Stéphane_Ravier, qui recourt allègrement au vocabulaire de l’#extrême_droite pour parler des « #racistes_anti-blancs de l’UNEF«  :

    À l’Université, des professeurs sont empêchés de citer des auteurs ou d’aborder certains thèmes sous la pression de groupes d’élèves. Le rôle des syndicats d’étudiants, les racistes anti-blancs de l’UNEF en tête, qui organisent ou participent à des évènements de ségrégation et de division, n’y est pas pour rien. Il convient donc de rétablir l’enseignement public dans sa vocation de #neutralité, de #laïcité et d’#universalité en interdisant les avancées communautaires, via le port de tenues ou de #signes_religieux ostensibles, au premier rang desquels le #voile_islamique est le plus conquérant.

    2° À côté de ces amendements sur les signes religieux, on trouve plusieurs offensives directement dirigées contre les associations étudiantes que le code de l’éducation désignent comme représentatives et qui, à ce titre, siègent au CNESER. Par un amendement n° 81, vingt-cinq sénateurs et sénatrices de droite se sont en particulier allié·s pour proposer que l’on inscrive dans la loi que ces associations « sont soumises au respect strict de l’ensemble des #valeurs de la République et de la laïcité ». Le retour, donc, des fameuses « valeurs de la République« , dans lesquelles on pourra tout mettre à l’avenir et qui avaient tant agité les #facs en novembre dernier lorsqu’elles avaient surgi dans la loi de programmation de la recherche…

    Le sénateur #Max_Brisson, par ailleurs inspecteur général de l’éducation nationale et plutôt mesuré jusqu’ici dès qu’il s’agissait d’ESR, fait mieux encore : dans un amendement n° 235, il propose rien moins que :

    « Ne peuvent participer aux élections d’associations représentatives d’étudiants les listes dont un ou plusieurs candidats ont tenu dans des lieux publics, par quelque moyen que ce soit, y compris écrit, des propos contraires aux principes de la #souveraineté_nationale, de la #démocratie ou de la laïcité afin de soutenir les revendications d’une section du peuple fondées sur l’#origine_ethnique ou l’#appartenance_religieuse. »

    3° Quant aux sénateurs et sénatrices socialistes, ils et elles ne veulent visiblement pas être en reste, proposant de subordonner le droit à la mise à disposition de locaux dont disposent les étudiant·es au titre des franchises universitaires depuis 1968 à la signature non d’un « #contrat_d’engagement_républicain » comme le prévoit le nouveau #article_24_sexies, mais, grande différence, à une « #charte_d’engagements_réciproques » par laquelle ces étudiant·es s’engageraient à « promouvoir et à faire respecter toutes les valeurs de la République » (amendement n° 109). « Contrat d’engagement républicain » ou « charte d’engagements réciproques », il existe sans doute des différences, mais le problème de principe demeure : voilà donc que l’exercice même d’une liberté – la liberté de réunion des étudiant·es qui est particulièrement protégée sur les campus grâce au versant étudiant des franchises universitaires – se trouvera subordonné à la signature d’un contrat imposant des obligations dont le contenu est, n’en doutons pas, appelé à augmenter tendanciellement.

    C’est bien le niveau des eaux pestilentielles qui monte.

    Encore et encore.

    https://academia.hypotheses.org/32007

  • Je cherchais la première accusation, prononcée par #Macron, du monde universitaire français de séparer/casser la République...

    La voilà, c’était juin 2020 :

    « Le monde universitaire a été #coupable. Il a encouragé l’#ethnicisation de la #question_sociale en pensant que c’était un bon filon. Or, le débouché ne peut être que sécessionniste. Cela revient à #casser_la_République_en_deux », estime en privé le chef de l’Etat, qui souligne notamment les ambivalences des discours racisés ou sur l’#intersectionnalité.

    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/10/il-ne-faut-pas-perdre-la-jeunesse-l-elysee-craint-un-vent-de-revolte_6042430

    L’article complet :

    Après le déconfinement, l’Elysée craint un vent de révolte : « Il ne faut pas perdre la jeunesse »

    Pour Emmanuel Macron, le confinement a été pénalisant avant tout pour les jeunes et pourrait, si l’on n’y prend garde, déboucher sur un « conflit de générations ».

    Jusqu’ici silencieux sur le mouvement de protestation contre les violences policières et le racisme, Emmanuel Macron devrait pour la première fois s’exprimer sur le sujet dimanche 14 juin, lors de son allocution depuis l’Elysée. L’occasion pour le chef de l’Etat d’apparaître en père de la nation, alors que les manifestations se multiplient et que certains craignent des débordements lors du rassemblement qui doit se tenir samedi 13 juin, à Paris, à l’appel de la famille d’Adama Traoré. « Le président va montrer qu’il est le président de tous les Français, qu’il considère et protège tous les enfants de la République », estime un proche soutien.

    Au sein de l’exécutif, on ne cache plus la crainte de voir se lever un vent de révolte au sein de la jeunesse. Si les Etats-Unis ne sont pas la France, l’affaire George Floyd sert de vecteur au mal-être de la partie la plus jeune de la population, estime-t-on à l’Elysée.

    « On a fait vivre à la jeunesse quelque chose de terrible à travers le confinement : on a interrompu leurs études, ils ont des angoisses sur leurs examens, leurs diplômes et leur entrée dans l’emploi. Il est normal qu’ils trouvent dans la lutte contre le racisme un idéal, un universalisme », répète M. Macron à ses interlocuteurs.

    La maxime du dentifrice

    Pour le chef de l’Etat, le confinement a été pénalisant avant tout pour les jeunes, alors qu’il a d’abord été décidé pour protéger les plus âgés, davantage exposés au coronavirus. Un paradoxe qui, si l’on n’y prend garde, pourrait déboucher sur un « conflit de générations », craint Emmanuel Macron.

    Le président partage les analyses de ceux qui estiment que la génération de Mai 68 est responsable d’un certain nombre de maux du pays mais aussi du monde, notamment en matière d’écologie. « Il ne faut pas perdre la jeunesse », résume-t-on au sommet de l’Etat, où l’on répète à l’envi la maxime du dentifrice, qui veut qu’une fois les lycéens ou les étudiants sortis dans la rue, il est difficile de les faire rentrer chez eux.

    Le risque est d’autant plus grand pour la République que la menace sécessionniste est réelle au sein du pays, affirme-t-on au sein de l’exécutif. Pour le chef de l’Etat, l’affaire George Floyd entre en résonance avec un passé colonial non encore digéré. « La guerre d’Algérie reste un impensé », aime répéter le locataire de l’Elysée, qui a tenté à plusieurs reprises de faire évoluer les mentalités sur ce sujet depuis le début de son quinquennat mais dit se heurter à l’absence d’interlocuteurs. « Il y a tout un travail à faire avec les historiens, mais cela prend du temps », explique-t-on au cabinet présidentiel.

    « Effacer les traces ne traite pas le traumatisme »

    De la même façon, le chef de l’Etat tient des propos très durs contre une partie des élites qui se trompe de combat en raisonnant sur le plan des communautés. « Le monde universitaire a été coupable. Il a encouragé l’ethnicisation de la question sociale en pensant que c’était un bon filon. Or, le débouché ne peut être que sécessionniste. Cela revient à casser la République en deux », estime en privé le chef de l’Etat, qui souligne notamment les ambivalences des discours racisés ou sur l’intersectionnalité.

    Pas question pour M. Macron de déboulonner les statues au nom de la lutte contre le racisme, comme certains le réclament pour celle de Colbert à l’Assemblée nationale. « Effacer les traces ne traite pas le traumatisme », rappelle-t-il à son entourage. En revanche, il faut amplifier la lutte contre les discriminations, notamment à l’embauche.

    Quelle réponse le chef de l’Etat peut-il apporter sur les violences policières ? Emmanuel Macron dit ne pas craindre une « FNisation » de la police. « Ce sont des citoyens comme les autres », répète-t-il. Mais il se dit prêt à faire évoluer les techniques d’interpellation en milieu urbain, comme le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, a commencé à le faire en interdisant l’étranglement. De même, il milite pour la multiplication des caméras-piétons portées par les policiers. « Il faut aller vers davantage de transparence, on n’est pas encore allés au bout », dit-on au sommet de l’Etat.

    https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/10/il-ne-faut-pas-perdre-la-jeunesse-l-elysee-craint-un-vent-de-revolte_6042430

    #séparatisme #Emmanuel_Macron #islamo-gauchisme (même si il n’était pas encore prononcé en tant que tel dans les paroles de Macron ici) #sécession #secessionnisme #origine #culpabilité #université #facs #France #monde_universitaire

    –—

    La suite, dans la bouche de #Vidal, à partir de février 2021 :
    https://seenthis.net/messages/902062
    #Frédérique_Vidal

    Fil de discussion sur ce fameux "séparatisme" :
    https://seenthis.net/messages/884291

    ping @cede @karine4 @isskein

    • Mais qui souffle aux oreilles de MM. Macron et Blanquer ?

      « On ne compte plus au quotidien le militantisme, le sectarisme, l’uniformité idéologique qui sévit dans de trop nombreuses écoles ou universités. Encore récemment, en septembre, un jeune étudiant en science politique de l’université Lyon 2 a eu le courage de témoigner publiquement de l’idéologie qui gangrenait l’ensemble de ses cours de licence. On y retrouvait toute l’obsession pour la race et le genre, toutes les théories les plus incroyables venues des campus américains, comme les théories décoloniales, l’indigénisme, l’immigrationnisme, les théories du genre, le néo-féminisme, l’intersectionnalité, bref tout ce qui aujourd’hui contribue à malheureusement désunir notre peuple, dresser les communautés les unes contre les autres, et surtout laver le cerveau de toute une génération au détriment des savoirs bien sûr, des connaissances et de l’acquisition des compétences ».

      Mais qui a tenu ces propos il y a presque un an ? Qui donc a soufflé les idées d’Emmanuel Macron (https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/10/il-ne-faut-pas-perdre-la-jeunesse-l-elysee-craint-un-vent-de-revolte_6042430) et de Jean-Michel Blanquer (https://twitter.com/mart1oeil/status/1320281485631459330) ?

      Réponse :

      https://www.youtube.com/watch?v=_jPtwjaSTa0&feature=emb_logo


      #Marion_Maréchal, directrice de l’Institut des sciences sociales, économiques et politiques, 2 janvier 2020.

      A partir de la minute 0’38 :

      "Des succès [de l’ISSEP] que je crois indispensables au regard d’un certain nombre de dérives que nous constatons aujourd’hui dans notre système universitaire ou éducatif au sens large. On ne compte plus au quotidien et bien le #militantisme, le #sectarisme, l’#uniformité_idéologique qui sévit dans de trop nombreuses écoles ou universités. Encore récemment, en septembre, un jeune étudiant en sciences politiques de l’Université Lyon 2 a eu le courage de témoigner publiquement de l’#idéologie qui gangrenait l’ensemble de ses cours de licence. On y retrouvait toute l’obsession pour la #race et le #genre, toutes les théories les plus incroyables venues des #campus_américains, comme les théories décoloniales, l’#indigénisme, l’#immigrationnisme, les théories du genre, le #néo-féminisme, l’#intersectionnalité, bref tout ce qu’aujourd’hui contribue malheureusement désunir notre peuple, dresser les communautés les unes contre les autres et surtout laver le cerveau de toute une génération au détriment des #savoirs bien sûr, des #connaissances et de l’acquisition des #compétences. Ça va évidemment beaucoup plus loin puisque même des établissements comme la #Sorbonne ont intégré au sein du conseil d’administration certaines de leurs unités de formation des profils comme #Daniel_Obono dont on sait qu’elle est députée proche des #théories_indigénistes, députée de la #LFI. On voit aussi régulièrement des conférences empêchées, annulées sous la pression d’un certain nombre de #syndicats d’#extrême_gauche : je pense notamment à la conférence à Lille, l’université de Lille, qui a été empêchée pour la venue de François Hollande. Je pense aux insultes qu’a subi #Alain_Finkielkraut lorsqu’il a souhaité intervenir à Sciences Po. (...) Je pense aussi à tous ces enseignants qui sont vilipendés, harcelés, mis au ban, privés de cours voire littéralement virés parce qu’à un moment donné ils ont ont tenté de se dresser face précisément à cette uniformité idéologique ou face à ce rouleau compresseur militant.

      #2019 #gangrène #féminisme #désunion #lavage_de_cerveau

      https://academia.hypotheses.org/27305

  • #Intersectionnalité : une #introduction (par #Eric_Fassin)

    Aujourd’hui, dans l’espace médiatico-politique, on attaque beaucoup l’intersectionnalité. Une fiche de poste a même été dépubliée sur le site du Ministère pour purger toute référence intersectionnelle. Dans le Manuel Indocile de Sciences Sociales (Copernic / La Découverte, 2019), avec Mara Viveros, nous avons publié une introduction à ce champ d’études. Pour ne pas laisser raconter n’importe quoi.

    « Les féministes intersectionnelles, en rupture avec l’universalisme, revendiquent de ne pas se limiter à la lutte contre le sexisme. »

    Marianne, « L’offensive des obsédés de la race, du sexe, du genre, de l’identité », 12 au 18 avril 2019

    Une médiatisation ambiguë

    En France, l’intersectionnalité vient d’entrer dans les magazines. Dans Le Point, L’Obs ou Marianne, on rencontre non seulement l’idée, mais aussi le mot, et même des références savantes. Les lesbiennes noires auraient-elles pris le pouvoir, jusque dans les rédactions ? En réalité si les médias en parlent, c’est surtout pour dénoncer la montée en puissance, dans l’université et plus largement dans la société, d’un féminisme dit « intersectionnel », accusé d’importer le « communautarisme à l’américaine ». On assiste en effet au recyclage des articles du début des années 1990 contre le « politiquement correct » : « On ne peut plus rien dire ! » C’est le monde à l’envers, paraît-il : l’homme blanc hétérosexuel subirait désormais la « tyrannie des minorités ».

    Faut-il le préciser ? Ce fantasme victimaire est démenti par l’expérience quotidienne. Pour se « rassurer », il n’y a qu’à regarder qui détient le pouvoir dans les médias et l’université, mais aussi dans l’économie ou la politique : les dominants d’hier ne sont pas les dominés d’aujourd’hui, et l’ordre ancien a encore de beaux jours devant lui. On fera plutôt l’hypothèse que cette réaction parfois virulente est le symptôme d’une inquiétude après la prise de conscience féministe de #MeToo, et les révélations sur le harcèlement sexiste, homophobe et raciste de la « Ligue du Lol » dans le petit monde des médias, et alors que les minorités raciales commencent (enfin) à se faire entendre dans l’espace public.

    Il en va des attaques actuelles contre l’intersectionnalité comme des campagnes contre la (supposée) « théorie du genre » au début des années 2010. La médiatisation assure une forme de publicité à un lexique qui, dès lors, n’est plus confiné à l’univers de la recherche. La polémique a ainsi fait entrevoir les analyses intersectionnelles à un public plus large, qu’articles et émissions se bousculent désormais pour informer… ou le plus souvent mettre en garde. Il n’empêche : même les tribunes indignées qui livrent des noms ou les dossiers scandalisés qui dressent des listes contribuent, à rebours de leurs intentions, à établir des bibliographies et à populariser des programmes universitaires. En retour, le milieu des sciences sociales lui-même, en France après beaucoup d’autres pays, a fini par s’intéresser à l’intersectionnalité – et pas seulement pour s’en inquiéter : ce concept voyageur est une invitation à reconnaître, avec la pluralité des logiques de domination, la complexité du monde social.

    Circulations internationales

    On parle d’intersectionnalité un peu partout dans le monde – non seulement en Amérique du Nord et en Europe, mais aussi en Amérique latine, en Afrique du Sud ou en Inde. Il est vrai que le mot vient des États-Unis : c’est #Kimberlé_Crenshaw qui l’utilise d’abord dans deux articles publiés dans des revues de droit au tournant des années 1990. Toutefois, la chose, c’est-à-dire la prise en compte des dominations multiples, n’a pas attendu le mot. Et il est vrai aussi que cette juriste afro-américaine s’inscrit dans la lignée d’un « #féminisme_noir » états-unien, qui dans les années 1980 met l’accent sur les aveuglements croisés du mouvement des droits civiques (au #genre) et du mouvement des femmes (à la #race).

    Cependant, ces questions sont parallèlement soulevées, à la frontière entre l’anglais et l’espagnol, par des féministes « #chicanas » (comme #Cherríe_Moraga et #Gloria_Anzaldúa), dans une subculture que nourrit l’immigration mexicaine aux États-Unis ou même, dès les années 1960, au Brésil, au sein du Parti communiste ; des féministes brésiliennes (telles #Thereza_Santos, #Lélia_Gonzalez et #Sueli_Carneiro) développent aussi leurs analyses sur la triade « race-classe-genre ». Bref, la démarche intersectionnelle n’a pas attendu le mot intersectionnalité ; elle n’a pas une origine exclusivement états-unienne ; et nulle n’en a le monopole : ce n’est pas une « marque déposée ». Il faut donc toujours comprendre l’intersectionnalité en fonction des lieux et des moments où elle résonne.

    En #France, c’est au milieu des années 2000 qu’on commence à parler d’intersectionnalité ; et c’est d’abord au sein des #études_de_genre. Pourquoi ? Un premier contexte, c’est la visibilité nouvelle de la « #question_raciale » au sein même de la « #question_sociale », avec les émeutes ou révoltes urbaines de 2005 : l’analyse en termes de classe n’était manifestement plus suffisante ; on commence alors à le comprendre, pour les sciences sociales, se vouloir aveugle à la couleur dans une société qu’elle obsède revient à s’aveugler au #racisme. Un second contexte a joué un rôle plus immédiat encore : 2004, c’est la loi sur les signes religieux à l’école. La question du « #voile_islamique » divise les féministes : la frontière entre « eux » et « nous » passe désormais, en priorité, par « elles ». Autrement dit, la différence de culture (en l’occurrence religieuse) devient une question de genre. L’intersectionnalité permet de parler de ces logiques multiples. Importer le concept revient à le traduire dans un contexte différent : en France, ce n’est plus, comme aux États-Unis, l’invisibilité des #femmes_noires à l’intersection entre féminisme et droits civiques ; c’est plutôt l’hypervisibilité des #femmes_voilées, au croisement entre #antisexisme et #antiracisme.

    Circulations interdisciplinaires

    La traduction d’une langue à une autre, et d’un contexte états-unien au français, fait apparaître une deuxième différence. Kimberlé Crenshaw est juriste ; sa réflexion porte sur les outils du #droit qu’elle utilise pour lutter contre la #discrimination. Or aux États-Unis, le droit identifie des catégories « suspectes » : le sexe et la race. Dans les pratiques sociales, leur utilisation, implicite ou explicite, est soumise à un examen « strict » pour lutter contre la discrimination. Cependant, on passe inévitablement de la catégorie conceptuelle au groupe social. En effet, l’intersectionnalité s’emploie à montrer que, non seulement une femme peut être discriminée en tant que femme, et un Noir en tant que Noir, mais aussi une femme noire en tant que telle. C’est donc seulement pour autant qu’elle est supposée relever d’un groupe sexuel ou racial que le droit peut reconnaître une personne victime d’un traitement discriminatoire en raison de son sexe ou de sa race. Toutefois, dans son principe, cette démarche juridique n’a rien d’identitaire : comme toujours pour les discriminations, le point de départ, c’est le traitement subi. Il serait donc absurde de reprendre ici les clichés français sur le « communautarisme américain » : l’intersectionnalité vise au contraire à lutter contre l’#assignation discriminatoire à un groupe (femmes, Noirs, ou autre).

    En France, la logique est toute différente, dès lors que l’intersectionnalité est d’abord arrivée, via les études de genre, dans le champ des sciences sociales. La conséquence de cette translation disciplinaire, c’est qu’on n’a généralement pas affaire à des groupes. La sociologie s’intéresse davantage à des propriétés, qui peuvent fonctionner comme des variables. Bien sûr, on n’oublie pas la logique antidiscriminatoire pour autant : toutes choses égales par ailleurs (en l’occurrence dans une même classe sociale), on n’a pas le même salaire selon qu’on est blanc ou pas, ou la même retraite si l’on est homme ou femme. Il n’est donc pas ou plus possible de renvoyer toutes les explications à une détermination en dernière instance : toutes les #inégalités ne sont pas solubles dans la classe. C’est évident pour les femmes, qui appartiennent à toutes les classes ; mais on l’oublie parfois pour les personnes dites « non blanches », tant elles sont surreprésentées dans les classes populaires – mais n’est-ce pas justement, pour une part, l’effet de leur origine supposée ? Bien entendu, cela ne veut pas dire, à l’inverse, que la classe serait soluble dans une autre forme de #domination. En réalité, cela signifie simplement que les logiques peuvent se combiner.

    L’intérêt scientifique (et politique) pour l’intersectionnalité est donc le signe d’une exigence de #complexité : il ne suffit pas d’analyser la classe pour en avoir fini avec les logiques de domination. C’est bien pourquoi les féministes n’ont pas attendu le concept d’intersectionnalité, ni sa traduction française, pour critiquer les explications monocausales. En France, par exemple, face au #marxisme, le #féminisme_matérialiste rejette de longue date cette logique, plus politique que scientifique, de l’« ennemi principal » (de classe), qui amène à occulter les autres formes de domination. En 1978, #Danièle_Kergoat interrogeait ainsi la neutralisation qui, effaçant l’inégalité entre les sexes, pose implicitement un signe d’égalité entre « ouvrières » et « ouvriers » : « La #sociologie_du_travail parle toujours des “#ouvriers” ou de la “#classe_ouvrière” sans faire aucune référence au #sexe des acteurs sociaux. Tout se passe comme si la place dans la production était un élément unificateur tel que faire partie de la classe ouvrière renvoyait à une série de comportements et d’attitudes relativement univoques (et cela, il faut le noter, est tout aussi vrai pour les sociologues se réclamant du #marxisme que pour les autres. »

    Or, ce n’est évidemment pas le cas. Contre cette simplification, qui a pour effet d’invisibiliser les ouvrières, la sociologue féministe ne se contente pas d’ajouter une propriété sociale, le sexe, à la classe ; elle montre plus profondément ce qu’elle appelle leur #consubstantialité. On n’est pas d’un côté « ouvrier » et de l’autre « femme » ; être une #ouvrière, ce n’est pas la même chose qu’ouvrier – et c’est aussi différent d’être une bourgeoise. On pourrait dire de même : être une femme blanche ou noire, un garçon arabe ou pas, mais encore un gay de banlieue ou de centre-ville, ce n’est vraiment pas pareil !

    Classe et race

    Dans un essai sur le poids de l’#assignation_raciale dans l’expérience sociale, le philosophe #Cornel_West a raconté combien les taxis à New York refusaient de s’arrêter pour lui : il est noir. Son costume trois-pièces n’y fait rien (ni la couleur du chauffeur, d’ailleurs) : la classe n’efface pas la race – ou pour le dire plus précisément, le #privilège_de_classe ne suffit pas à abolir le stigmate de race. Au Brésil, comme l’a montré #Lélia_Gonzalez, pour une femme noire de classe moyenne, il ne suffit pas d’être « bien habillée » et « bien élevée » : les concierges continuent de leur imposer l’entrée de service, conformément aux consignes de patrons blancs, qui n’ont d’yeux que pour elles lors du carnaval… En France, un documentaire intitulé #Trop_noire_pour_être_française part d’une même prise de conscience : la réalisatrice #Isabelle_Boni-Claverie appartient à la grande bourgeoisie ; pourtant, exposée aux discriminations, elle aussi a fini par être rattrapée par sa couleur.

    C’est tout l’intérêt d’étudier les classes moyennes (ou supérieures) de couleur. Premièrement, on voit mieux la logique propre de #racialisation, sans la rabattre aussitôt sur la classe. C’est justement parce que l’expérience de la bourgeoisie ne renvoie pas aux clichés habituels qui dissolvent les minorités dans les classes populaires. Deuxièmement, on est ainsi amené à repenser la classe : trop souvent, on réduit en effet ce concept à la réalité empirique des classes populaires – alors qu’il s’agit d’une logique théorique de #classement qui opère à tous les niveaux de la société. Troisièmement, ce sont souvent ces couches éduquées qui jouent un rôle important dans la constitution d’identités politiques minoritaires : les porte-parole ne proviennent que rarement des classes populaires, ou du moins sont plus favorisés culturellement.

    L’articulation entre classe et race se joue par exemple autour du concept de #blanchité. Le terme est récent en français : c’est la traduction de l’anglais #whiteness, soit un champ d’études constitué non pas tant autour d’un groupe social empirique (les Blancs) que d’un questionnement théorique sur une #identification (la blanchité). Il ne s’agit donc pas de réifier les catégories majoritaires (non plus, évidemment, que minoritaires) ; au contraire, les études sur la blanchité montrent bien, pour reprendre un titre célèbre, « comment les Irlandais sont devenus blancs » : c’est le rappel que la « race » ne doit rien à la #biologie, mais tout aux #rapports_de_pouvoir qu’elle cristallise dans des contextes historiques. À nouveau se pose toutefois la question : la blanchité est-elle réservée aux Blancs pauvres, condamnés à s’identifier en tant que tels faute d’autres ressources ? On parle ainsi de « #salaire_de_la_blanchité » : le #privilège de ceux qui n’en ont pas… Ou bien ne convient-il pas de l’appréhender, non seulement comme une compensation, mais aussi et surtout comme un langage de pouvoir – y compris, bien sûr, chez les dominants ?

    En particulier, si le regard « orientaliste » exotise l’autre et l’érotise en même temps, la #sexualisation n’est pas réservée aux populations noires ou arabes (en France), ou afro-américaines et hispaniques (comme aux États-Unis), bref racisées. En miroir, la #blanchité_sexuelle est une manière, pour les classes moyennes ou supérieures blanches, de s’affirmer « normales », donc de fixer la #norme, en particulier dans les projets d’#identité_nationale. Certes, depuis le monde colonial au moins, les minorités raciales sont toujours (indifféremment ou alternativement) hypo- – ou hyper- –sexualisées : pas assez ou bien trop, mais jamais comme il faut. Mais qu’en est-il des majoritaires ? Ils se contentent d’incarner la norme – soit d’ériger leurs pratiques et leurs représentations en normes ou pratiques légitimes. C’est bien pourquoi la blanchité peut être mobilisée dans des discours politiques, par exemple des chefs d’État (de la Colombie d’Álvaro Uribe aux États-Unis de Donald Trump), le plus souvent pour rappeler à l’ordre les minorités indociles. La « question sociale » n’a donc pas cédé la place à la « question raciale » ; mais la première ne peut plus servir à masquer la seconde. Au contraire, une « question » aide à repenser l’autre.

    Les #contrôles_au_faciès

    Regardons maintenant les contrôles policiers « au faciès », c’est-à-dire fondés sur l’#apparence. Une enquête quantitative du défenseur des droits, institution républicaine qui est chargée de défendre les citoyens face aux abus de l’État, a récemment démontré qu’il touche inégalement, non seulement selon les quartiers (les classes populaires), mais aussi en fonction de l’âge (les jeunes) et de l’apparence (les Arabes et les Noirs), et enfin du sexe (les garçons plus que les filles). Le résultat, c’est bien ce qu’on peut appeler « intersectionnalité ». Cependant, on voit ici que le croisement des logiques discriminatoires ne se résume pas à un cumul des handicaps : le sexe masculin fonctionne ici comme un #stigmate plutôt qu’un privilège. L’intersectionnalité est bien synonyme de complexité.

    « Les jeunes de dix-huit-vingt-cinq ans déclarent ainsi sept fois plus de contrôles que l’ensemble de la population, et les hommes perçus comme noirs ou arabes apparaissent cinq fois plus concernés par des contrôles fréquents (c’est-à-dire plus de cinq fois dans les cinq dernières années). Si l’on combine ces deux critères, 80 % des personnes correspondant au profil de “jeune homme perçu comme noir ou arabe” déclarent avoir été contrôlées dans les cinq dernières années (contre 16 % pour le reste des enquêté.e.s). Par rapport à l’ensemble de la population, et toutes choses égales par ailleurs, ces profils ont ainsi une probabilité vingt fois plus élevée que les autres d’être contrôlés. »

    Répétons-le : il n’y a rien d’identitaire dans cette démarche. D’ailleurs, la formulation du défenseur des droits dissipe toute ambiguïté : « perçus comme noirs ou arabes ». Autrement dit, c’est l’origine réelle ou supposée qui est en jeu. On peut être victime d’antisémitisme sans être juif – en raison d’un trait physique, d’un patronyme, ou même d’opinions politiques. Pour peu qu’on porte un prénom lié à l’islam, ou même qu’on ait l’air « d’origine maghrébine », musulman ou pas, on risque de subir l’#islamophobie. L’#homophobie frappe surtout les homosexuels, et plus largement les minorités sexuelles ; toutefois, un garçon réputé efféminé pourra y être confronté, quelle que soit sa sexualité.

    Et c’est d’ailleurs selon la même logique qu’en France l’État a pu justifier les contrôles au faciès. Condamné en 2015 pour « faute lourde », il a fait appel ; sans remettre en cause les faits établis, l’État explique que la législation sur les étrangers suppose de contrôler « les personnes d’#apparence_étrangère », voire « la seule population dont il apparaît qu’elle peut être étrangère ». Traiter des individus en raison de leur apparence, supposée renvoyer à une origine, à une nationalité, voire à l’irrégularité du séjour, c’est alimenter la confusion en racialisant la nationalité. On le comprend ainsi : être, c’est être perçu ; l’#identité n’existe pas indépendamment du regard des autres.

    L’exemple des contrôles au faciès est important, non seulement pour celles et ceux qui les subissent, bien sûr, mais aussi pour la société tout entière : ils contribuent à la constitution d’identités fondées sur l’expérience commune de la discrimination. Les personnes racisées sont celles dont la #subjectivité se constitue dans ces incidents à répétition, qui finissent par tracer des frontières entre les #expériences minoritaires et majoritaires. Mais l’enjeu est aussi théorique : on voit ici que l’identité n’est pas première ; elle est la conséquence de #pratiques_sociales de #racialisation – y compris de pratiques d’État. Le racisme ne se réduit pas à l’#intention : le racisme en effet est défini par ses résultats – et d’abord sur les personnes concernées, assignées à la différence par la discrimination.

    Le mot race

    Les logiques de domination sont plurielles : il y a non seulement la classe, mais aussi le sexe et la race, ainsi que l’#âge ou le #handicap. Dans leur enchevêtrement, il est à chaque fois question, non pas seulement d’#inégalités, mais aussi de la #naturalisation de ces hiérarchies marquées dans les corps. Reste que c’est surtout l’articulation du sexe ou de la classe avec la race qui est au cœur des débats actuels sur l’intersectionnalité. Et l’on retrouve ici une singularité nationale : d’après l’ONU, les deux tiers des pays incluent dans leur recensement des questions sur la race, l’#ethnicité ou l’#origine_nationale. En France, il n’en est pas question – ce qui complique l’établissement de #statistiques « ethno-raciales » utilisées dans d’autre pays pour analyser les discriminations.

    Mais il y a plus : c’est seulement en France que, pour lutter contre le racisme, on se mobilise régulièrement en vue de supprimer le mot race de la Constitution ; il n’y apparaît pourtant, depuis son préambule de 1946 rédigé en réaction au nazisme, que pour énoncer un principe antiraciste : « sans distinction de race ». C’est aujourd’hui une bataille qui divise selon qu’on se réclame d’un antiracisme dit « universaliste » ou « politique » : alors que le premier rejette le mot race, jugé indissociable du racisme, le second s’en empare comme d’une arme contre la #racialisation de la société. Ce qui se joue là, c’est la définition du racisme, selon qu’on met l’accent sur sa version idéologique (qui suppose l’intention, et passe par le mot), ou au contraire structurelle (que l’on mesure à ses effets, et qui impose de nommer la chose).

    La bataille n’est pas cantonnée au champ politique ; elle s’étend au champ scientifique. Le racisme savant parlait naguère des races (au pluriel), soit une manière de mettre la science au service d’un #ordre_racial, comme dans le monde colonial. Dans la recherche antiraciste, il est aujourd’hui question de la race (au singulier) : non pas l’inventaire des populations, sur un critère biologique ou même culturel, mais l’analyse critique d’un mécanisme social qui assigne des individus à des groupes, et ces groupes à des positions hiérarchisées en raison de leur origine, de leur apparence, de leur religion, etc. Il n’est donc pas question de revenir aux élucubrations racistes sur les Aryens ou les Sémites ; en revanche, parler de la race, c’est se donner un vocabulaire pour voir ce qu’on ne veut pas voir : la #discrimination_raciste est aussi une #assignation_raciale. S’aveugler à la race ne revient-il pas à s’aveugler au racisme ?

    Il ne faut donc pas s’y tromper : pour les sciences sociales actuelles, la race n’est pas un fait empirique ; c’est un concept qui permet de nommer le traitement inégal réservé à des individus et des groupes ainsi constitués comme différents. La réalité de la race n’est donc ni biologique ni culturelle ; elle est sociale, en ce qu’elle est définie par les effets de ces traitements, soit la racialisation de la société tout entière traversée par la logique raciale. On revient ici aux analyses classiques d’une féministe matérialiste, #Colette_Guillaumin : « C’est très exactement la réalité de la “race”. Cela n’existe pas. Cela pourtant produit des morts. [...] Non, la race n’existe pas. Si, la race existe. Non, certes, elle n’est pas ce qu’on dit qu’elle est, mais elle est néanmoins la plus tangible, réelle, brutale, des réalités. »

    Morale de l’histoire

    A-t-on raison de s’inquiéter d’un recul de l’#universalisme en France ? Les logiques identitaires sont-elles en train de gagner du terrain ? Sans nul doute : c’est bien ce qu’entraîne la racialisation de notre société. Encore ne faut-il pas confondre les causes et les effets, ni d’ailleurs le poison et l’antidote. En premier lieu, c’est l’#extrême_droite qui revendique explicitement le label identitaire : des États-Unis de Donald Trump au Brésil de Jair Bolsonaro, on assiste à la revanche de la #masculinité_blanche contre les #minorités_raciales et sexuelles. Ne nous y trompons pas : celles-ci sont donc les victimes, et non pas les coupables, de ce retour de bâton (ou backlash) qui vise à les remettre à leur place (dominée).

    Deuxièmement, la #ségrégation_raciale que l’on peut aisément constater dans l’espace en prenant les transports en commun entre Paris et ses banlieues n’est pas le résultat d’un #communautarisme minoritaire. Pour le comprendre, il convient au contraire de prendre en compte un double phénomène : d’une part, la logique sociale que décrit l’expression #White_flight (les Blancs qui désertent les quartiers où sont reléguées les minorités raciales, anticipant sur la ségrégation que leurs choix individuels accélèrent…) ; d’autre part, les #politiques_publiques de la ville dont le terme #apartheid résume le résultat. Le #multiculturalisme_d’Etat, en Colombie, dessinerait une tout autre logique : les politiques publiques visent explicitement des identités culturelles au nom de la « #diversité », dont les mouvements sociaux peuvent s’emparer.

    Troisièmement, se battre pour l’#égalité, et donc contre les discriminations, ce n’est pas renoncer à l’universalisme ; bien au contraire, c’est rejeter le #communautarisme_majoritaire. L’intersectionnalité n’est donc pas responsable au premier chef d’une #fragmentation_identitaire – pas davantage qu’une sociologie qui analyse les inégalités socio-économiques n’est la cause première de la lutte des classes. Pour les #sciences_sociales, c’est simplement se donner les outils nécessaires pour comprendre un monde traversé d’#inégalités multiples.

    Quatrièmement, ce sont les #discours_publics qui opposent d’ordinaire la classe à la race (ou les ouvriers, présumés blancs, aux minorités raciales, comme si celles-ci n’appartenaient pas le plus souvent aux classes populaires), ou encore, comme l’avait bien montré #Christine_Delphy, l’#antisexisme à l’antiracisme (comme si les femmes de couleur n’étaient pas concernées par les deux). L’expérience de l’intersectionnalité, c’est au contraire, pour chaque personne, quels que soient son sexe, sa classe et sa couleur de peau, l’imbrication de propriétés qui finissent par définir, en effet, des #identités_complexes (plutôt que fragmentées) ; et c’est cela que les sciences sociales s’emploient aujourd’hui à appréhender.

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    Ce texte écrit avec #Mara_Viveros_Vigoya, et publié en 2019 dans le Manuel indocile de sciences sociales (Fondation Copernic / La Découverte), peut être téléchargé ici : https://static.mediapart.fr/files/2021/03/07/manuel-indocile-intersectionnalite.pdf

    À lire :

    Kimberlé Crenshaw, « Cartographies des marges : intersectionnalité, politique de l’identité et violences contre les femmes de couleur » Cahiers du Genre, n° 39, février 2005, p. 51-82

    Défenseur des droits, Enquête sur l’accès aux droits, Relations police – population : le cas des contrôles d’identité, vol. 1, janvier 2017

    Christine Delphy, « Antisexisme ou antiracisme ? Un faux dilemme », Nouvelles Questions Féministes, vol. 25, janvier 2006, p. 59-83

    Elsa Dorlin, La Matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la nation française, La Découverte, Paris, 2006

    Elsa Dorlin, Sexe, race, classe. Pour une épistémologie de la domination, Presses universitaires de France, Paris, 2009

    Didier Fassin et Éric Fassin (dir.), De la question sociale à la question raciale ? Représenter la société française, La Découverte, Paris, 2009 [première édition : 2006]

    Éric Fassin (dir.), « Les langages de l’intersectionnalité », Raisons politiques, n° 58, mai 2015

    Éric Fassin, « Le mot race – 1. Cela existe. 2. Le mot et la chose », AOC, 10 au 11 avril 2019

    Nacira Guénif-Souilamas et Éric Macé, Les féministes et le garçon arabe, L’Aube, Paris, 2004

    Colette Guillaumin, « “Je sais bien mais quand même” ou les avatars de la notion de race », Le Genre humain, 1981, n° 1, p. 55-64

    Danièle Kergoat, « Ouvriers = ouvrières ? », Se battre, disent-elles…, La Dispute, Paris, 2012, p. 9-62

    Abdellali Hajjat et Silyane Larcher (dir.), « Intersectionnalité », Mouvements, 12 février 2019

    Mara Viveros Vigoya, Les Couleurs de la masculinité. Expériences intersectionnelles et pratiques de pouvoir en Amérique latine, La Découverte, Paris, 2018

    https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/050321/intersectionnalite-une-introduction#at_medium=custom7&at_campaign=10

    #définition #invisibilisation #antiracisme_universaliste #antiracisme_politique #racisme_structurel

    voir aussi ce fil de discussion sur l’intersectionnalité, avec pas mal de #ressources_pédagogiques :
    https://seenthis.net/messages/796554

  • China blocks WHO while Covid conspiracy theories fly - Asia Times
    https://asiatimes.com/2021/01/china-blocks-who-while-covid-conspiracy-theories-fly

    China has yet to explain why it delayed approval for a World Health Organization (WHO) team of experts to visit the country, significantly at a time when state media publish claims that the coronavirus pandemic started elsewhere.The WHO team’s members were supposed to arrive in Beijing this week and possibly make a field visit to Wuhan, where Covid-19 cases apparently first emerged a little more than a year ago and before the disease began its lethal global spread. The unexpected delays triggered today rare criticism from WHO Director-General Tedros Adhanom Ghebreyesus, who said he was “deeply disappointed” by the delay in issuing visas for the team.Ghebreyesus said that the 10-member group could not enter China for an epidemiological survey of the novel coronavirus, a key part of the WHO’s endeavor to ascertain the likely origins of the respiratory disease.
    He said the infectious disease experts, led by food safety and zoonotic diseases scientist Peter Ben Embarek, were still waiting for their visas to travel to China.
    Reports indicate Embarek made a sortie to the country in July and convinced Beijing to open its doors to WHO personnel to conduct a prognosis probe.
    At the beginning of last year Chinese authorities closed Wuhan after a ‘viral pneumonia of unknown origin’ was reported. This year, the city has recovered and people crowded together for a New Year’s countdown. Chinese Foreign Ministry spokeswoman Hua Chunying said on Tuesday in response to a media question that she had “no new information” on the WHO team’s trip and itinerary. Instead, Hua reiterated Beijing’s latest line, first purveyed by Foreign Minister Wang Yi, that “more signs and studies worldwide” had suggested Covid-19 could have “multiple sources” and that the pandemic had erupted globally across “multiple locations” since the second half of 2019.Hua said related surveys have indicated a much earlier emergence of the pathogen in many more places than previously thought. She also hoped other countries could make “joint efforts” with the WHO to trace Covid-19 to its source. “We hope scientists can uphold professionalism and truth to find [Covid-19] origins worldwide, and that other countries can cooperate with and assist [the WHO] like what we have been doing since day one,” claimed Hua.
    While several WHO officials and experts like Embarek were indeed allowed into China in 2020, Wuhan was glaringly and constantly missing on their Beijing-approved itineraries.It’s not clear yet that the delay in the WHO expert team’s arrival reflects a change in policy by Beijing. In December, the state-run nationalistic Global Times revealed a WHO “advance team” could go to Wuhan in January to inspect a wet market trading in exotic wildlife in the city that is believed to be a possible origin of the virus.
    The paper also cited WHO officials as saying that all team members from Japan, Qatar, Denmark, Russia and others would first be put in quarantine in Beijing for 14 days. It added that an “open, fair” WHO investigation would help debunk the “mudslinging, fake news and conspiracy theories about the ‘China virus’” being spread by some American politicians, not least outgoing US President Donald Trump.

    #Covid-19#migration#migrant#chine#oms#pandemie#expert#circulation#visas#epidemiologie#originevirus

  • Les origines répressives du capitalisme

    François Jarrige

    https://lavoiedujaguar.net/Les-origines-repressives-du-capitalisme

    Peter Linebaugh
    Les Pendus de Londres

    L’ouvrage classique de Peter Linebaugh sur les pendus de Londres est enfin traduit en français. Il montre comment au XVIIIe siècle le capitalisme industriel s’est adossé à la justice répressive pour criminaliser un prolétariat attaché à des coutumes jugées dangereuses pour le nouvel ordre social.

    Historien états-unien et marxiste engagé, Peter Linebaugh n’a cessé de militer contre la peine de mort et les ravages du capitalisme, tout en défendant les biens communs comme alternatives au néolibéralisme. Sa trajectoire et son œuvre restent pourtant assez mal connues en France. Traduit une première fois via son travail avec Marcus Rediker sur l’histoire de l’Atlantique révolutionnaire, la publication en français de son premier livre constitue un événement éditorial.

    Fruit d’une collaboration entre deux éditeurs indépendants, Lux, éditeur basé au Canada, et le CMDE (Collectif des métiers de l’édition) à Toulouse, l’ouvrage éclaire trois questions majeures de l’historiographie du XVIIIe siècle : l’histoire sociale et populaire de Londres, devenue une grande métropole commerciale qui atteint le million d’habitants à la fin du XVIIIe siècle ; l’histoire du crime et de la justice et de ses reconfigurations à l’heure de la répression des communs ; mais aussi celle de l’avènement du capitalisme industriel au moyen d’un arsenal normatif qui remodèle en profondeur les rapports sociaux au travail. (...)

    #Peter_Linebaugh #Philippe_Minard #E.P._Thompson #capitalisme #origines #Grande-Bretagne #Londres #prolétariat #rébellions #Mandrin #normalisation #libéralisme_autoritaire

  • Une procédure ouverte contre Ikea pour fausse déclaration de bois

    Le Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) a ouvert une procédure contre Ikea pour #fausse_déclaration de #bois. Le marchand de meubles suédois rejette les accusations.

    L’affaire a été déclenchée par une #plainte déposée le 31 août dernier par le Bruno Manser Fonds (BMF) auprès du DEFR et du Bureau fédéral de la consommation (BFC). La porte-parole du DEFR Evelyn Kobelt a confirmé jeudi à Keystone-ATS une information de la radio SRF.

    Après des contrôles effectués dans les cinq succursales Ikea concernées, le DEFR a ouvert des #procédures_pénales_administratives dans deux cas de suspicion de #fausses_déclarations répétées. Selon Evelyn Kobelt, c’est la première fois que l’entreprise fait l’objet d’une procédure pénale pour fausse déclaration. La présomption d’innocence s’applique jusqu’à la fin de la procédure.

    Le BFC avait indiqué avoir constaté des lacunes de déclaration dans les succursales d’Aubonne (VD), Lyssach (BE), Pratteln (BL) Spreitenbach (AG) et Vernier (GE).

    En Suisse, le bois et les produits à base de bois doivent être déclarés conformément à l’ordonnance fédérale correspondante. Le type de bois et son #origine doivent être signalés. Le BFC contrôle le respect de ces règles dans les entreprises.

    Informations ajoutées manuellement

    Ikea Suisse rejette les accusations. Le membre de la direction Aurel Hosennen a déclaré sur les ondes de la SRF qu’il arrive régulièrement que les #étiquettes manquent dans les magasins de meubles. Celles-ci sont en effet apposées à la main chez Ikea. Dans chaque succursale, 80 à 100 étiquettes sont remplacées chaque jour après avoir été perdues.

    Evelyn Kobelt a confirmé le « cas spécial » qu’est Ikea. Le risque d’une déclaration incorrecte y est plus élevé, car les informations doivent être ajoutées manuellement, ce qui est source d’erreurs. D’autres sociétés étrangères ont automatisé les informations concernant la déclaration dans leur système.

    Aurel Hosennen précise qu’Ikea Suisse dispose de ces informations. « Nous connaissons chaque produit, chaque fournisseur, le bois qu’ils utilisent et sa #provenance ». Les déclarations sont disponibles sur le site internet depuis des années. Ikea n’a aucune raison de cacher quelque chose ou de ne rien montrer, souligne-t-il.

    Bois roumain et ukrainien en cause

    Le groupe a été accusé en mai par une ONG britannique d’intégrer du bois abattu illégalement en #Roumanie et en #Ukraine dans sa chaîne de fournisseurs. Dans un communiqué diffusé début octobre, le géant suédois de l’ameublement assurait que le bois utilisé est issu uniquement d’arbres abattus légalement. L’entreprise se basait pour cela sur deux enquêtes, l’une interne, l’autre externe.

    https://www.rts.ch/info/economie/11680455-une-procedure-ouverte-contre-ikea-pour-fausse-declaration-de-bois.html

    #IKEA #Suisse #justice #multinationales

    • Le Bruno Manser Fonds dénonce IKEA

      Le plus grand groupe d’ameublement Suisse enfreint systématiquement l’obligation légale de déclarer le bois.

      Le Bruno Manser Fonds a dénoncé IKEA AG, Spreitenbach (« IKEA »), auprès du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR). Il se base pour cela sur l’infraction systématique d’IKEA à l’obligation légale de déclarer le bois, en vigueur depuis 2012. IKEA est une filiale suisse de la multinationale IKEA sise à Delft, aux Pays-Bas.

      Dans un courrier adressé mardi au Conseiller fédéral Guy Parmelin, chef du DEFR, le Bruno Manser Fonds demande qu’une amende soit prononcée contre IKEA et ses responsables pour infraction à la loi sur l’information des consommatrices et des consommateurs de même qu’à l’ordonnance sur la déclaration du bois et des produits en bois.

      Le Bruno Manser Fonds s’est intéressé de près à l’assortiment IKEA de tables en bois massif et de chaises dans cinq de ses filiales (Aubonne, Lyssach, Pratteln, Spreitenbach et Vernier). Il en est ressorti que l’entreprise, dans plus de 80 cas, ne déclarait pas l’essence ou l’origine du bois, ou sinon le fait de manière abusive :

      – Dans 40 cas, IKEA ne fait aucune indication du type de bois ou de sa provenance, alors qu’il s’agit de tables et de chaises soumises à l’obligation de déclarer.

      – Dans 22 cas, IKEA déclare l’origine du bois pour des tables et des chaises en pin avec l’indication abusive « Amérique du Nord et du Sud, Europe, Inde, Océanie ».

      – Dans 10 cas, IKEA déclare l’origine du bois pour des tables et des chaises en bouleau avec l’indication abusive collective « Chine, Europe, Turquie ».

      – Dans 11 cas, IKEA déclare l’origine du bois pour des tables et des chaises en hêtre avec l’indication abusive collective « Europe, Turquie ».

      « Par cette manière de faire, IKEA dissimule de manière illicite la provenance de sa matière première principale », explique Lukas Straumann, directeur du Bruno Manser Fonds. « Nous attendons de la part d’un groupe de la taille et de l’importance d’IKEA qu’il déclare systématiquement l’origine du bois de ses produits, en conformité à la loi et de manière conviviale. »

      Aux termes de l’ordonnance sur la déclaration du bois, « toute personne qui remet du bois ou des produits en bois aux consommateurs doit indiquer la provenance du bois » et son essence. Les désignations collectives sont certes exceptionnellement admises, mais elles doivent se limiter à « la zone géographique la plus précise possible (Scandinavie, Europe orientale, Afrique occidentale, Amérique centrale, p. ex.) ». La peine pécuniaire maximale encourue en cas d’infraction est de 10’000 CHF.

      Le groupe IKEA a récemment fait les gros titres en raison de la participation présumée de ses fournisseurs à des coupes de bois illégales et des coupes rases en Roumanie et en Ukraine. Environ 60 % du bois d’IKEA provient d’Europe de l’Est et de Russie.

      https://www.bmf.ch/fr/nouveautes/le-bruno-manser-fonds-denonce-ikea-144

  • Library - Black Music History Library
    https://blackmusiclibrary.com/Library

    This is a living collection of books, articles, documentaries, series, podcasts and more about the Black origins of traditional and popular music dating from the 18th century to present day. Resources are organized chronologically and by genre for ease of browsing. For more information about that decision and the curation process, please visit the about page.

  • Comment l’enquête Trajectoires et Origines a changé la donne sur les #statistiques ethniques en #France

    Alors que la polémique a repris en juin 2020 autour de statistiques « ethniques » qu’il faudrait interdire ou permettre, un retour sur la mise en place de l’enquête TeO dans les années 2000 permet d’illustrer toute la complexité de ce « débat » trop souvent polarisé. Dans ce numéro d’été de De facto, Catherine Guilyardi, journaliste, nous éclaire sur la genèse et la réception de cette enquête qui a donné lieu à de vifs débats non seulement entre chercheurs mais aussi entre les chercheurs et certaines associations anti-racistes.

    Alors que l’épidémie de Covid 19 continue à sévir, Le Monde s’interroge, dès le 29 mai 2020, sur la surmortalité observée en Grande-Bretagne parmi les « minorités ethniques ». Si cette « troublante surmortalité » a pu être détectée si tôt par les chercheurs britanniques, c’est notamment parce que « la tenue de registres par ethnies [a] permis de mettre en lumière des facteurs de risque difficilement détectables en France, où ces identifications sont interdites ». Au même moment, dans De facto, les chercheurs Solène Brun et Patrick Simon confirment « l’invisibilité des minorités dans les chiffres du coronavirus » en France. En Seine-Saint-Denis où la surmortalité est avérée, la pauvreté est un facteur identifiable, mais « les discriminations ethnoraciales », elles, ne sont responsables « qu’en toute vraisemblance ».

    Le manque de données ethnoraciales pour mesurer les discriminations est également relevé à l’occasion des manifestations contre les violences policières en juin 2020. Sibeth Ndiaye, alors porte-parole du gouvernement, met en avant ses origines sénégalaises dans une tribune où elle propose de « poser de manière apaisée et constructive le débat autour des statistiques ethniques ». Le « débat » est en effet relancé, mais peu apaisé. Le président de la République se positionne contre et affirme en off que les statistiques ethniques sont un « bon filon » pour les chercheurs, sans préciser en quoi.

    S’il est interdit en France de poser la question de l’origine et de la couleur dans des fichiers de gestion (fichiers de salariés, d’élèves, de locataires, des patients, des électeurs), comme cela se fait en Grande Bretagne, des enquêtes de chercheurs posent ces questions. La plus importante d’entre elles en nombre de sondés est l’enquête « Trajectoires et Origines » menée en 2008-2009 par l’Insee et l’Ined. Depuis juillet 2019, une nouvelle édition de l’enquête est sur le terrain : près de 600 enquêteurs de l’Insee interrogent 24 000 personnes sur « la diversité des populations, notamment en fonction de l’origine ». Cet échantillon représentatif de toutes les origines en France doit répondre à des questions telles que « Au-delà de votre expérience personnelle, pensez-vous appartenir à un groupe qui subit des traitements inégalitaires en raison de l’origine ou la couleur de peau en France aujourd’hui ? » ou « Au cours de votre vie avez-vous été victime d’insultes, de propos ou d’attitudes ouvertement racistes ? ».

    On y évoque donc ouvertement l’origine et la couleur de peau, mais peut-on parler de statistiques ethniques ou ethnoraciales ? Les débats enflammés qui ont accompagné la mise en place de cette enquête sur les discriminations et le racisme dans les années 2000 montrent comment la recherche se construit sur des sujets encore sensibles – ici, les immigrés et leurs descendants - dans la société.
    L’origine en soi, un facteur d’inégalités ?

    L’enquête, souvent appelée par son acronyme TeO, est imaginée dès 2005 par les chercheurs de l’Institut national d’études démographiques (Ined) et les administrateurs de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour mesurer le processus d’intégration, les discriminations et le racisme subis dans toutes les situations de la vie sociale : à l’école, dans les administrations, sur le marché du travail ou du logement, à l’hôpital, etc. Son but est d’« appréhender dans quelle mesure l’origine est en soi un facteur d’inégalités ou simplement de spécificité dans l’accès aux différentes ressources de la vie sociale ». Son ambition : fournir des statistiques pour « analyser les processus d’intégration, de discrimination et de construction identitaire au sein de la société française dans son ensemble ». L’originalité de TeO est d’articuler l’origine avec d’autres « catégories de distinction » telle que le genre, la religion, la classe, la couleur de peau, l’âge, le quartier, etc.

    Invités à intervenir en juin 2020 dans les médias, Patrick Simon, l’un des concepteurs de TeO, et François Héran, directeur de l’Ined à l’époque et aujourd’hui directeur de l’ICM, rappellent l’avancée considérable qui ont été réalisées dans ce domaine depuis une douzaine d’années. La statistique publique sur les immigrés et leurs descendants a évolué depuis que les chercheurs tentent de mesurer les inégalités en fonction de l’origine en France.

    « Ce fut une conquête », se souvient aujourd’hui François Héran. Patrick Simon, Christelle Hamel et Cris Beauchemin, les trois coordinateurs de la première édition de TeO, s’attendaient, en conclusion de l’ouvrage présentant les travaux issus de l’enquête en 2016, que « le débat qui [avait] entouré le démarrage de l’enquête TeO [soit] inéluctablement reposé ». Certaines données qui aident à « penser l’égalité » manquent toujours, notamment la couleur de peau des enquêtés.
    Faut-il proposer une liste de catégories ethnoraciales ?

    Cette question est âprement discutée en 2006-2007 dans l’unité de recherche Migrations Internationales et Minorités (MIM) de l’Ined lors de l’élaboration du premier questionnaire de l’enquête. Faut-il proposer une liste de catégories ethnoraciales (noir, asiatique, arabe, blanc…), comme cela se pratique aux États-Unis ou en Grande-Bretagne, ou laisser la question ouverte pour que la personne se définisse elle-même ? Patrick Simon, qui participe déjà en 1993 à l’exploitation de la première grande enquête sur l’immigration, Mobilité géographique et insertion sociale (MGIS), conduite par Michèle Tribalat, sait qu’« une révision des catégories implique nécessairement une modification du regard que la nation porte sur elle-même ». Dans cette enquête pionnière, la catégorie de « Français de souche » est choisie pour définir les personnes non immigrées. Au milieu des années 1980, la grande enquête de l’Ined sur l’origine des Parisiens demandait aux personnes interrogées : « Êtes-vous Parisiens de souche ? », sans que personne n’y voit à mal. Hervé Le Bras proposait d’étendre cette interrogation à l’ensemble de la population française. Mais la vive controverse sur l’enquête MGIS change la donne et « Français de souche » devient idéologiquement marquée et sera abandonnée par la recherche.

    Certains chercheurs contestent l’utilisation de catégories qu’ils jugent subjectives, car construites socialement. Le démographe Alain Blum, spécialiste de la Russie stalinienne et de l’histoire de la statistique, critique appuyé de l’enquête TeO (et de MGIS à la fin des années 1990), constate aujourd’hui « qu’il y a beaucoup de groupes de pression qui revendiquent clairement l’usage de ce type de catégories ethnoraciales pour lutter contre les discriminations. Si le chercheur doit analyser les discours et les pratiques de ces personnes qui se reconnaissent et utilisent ces catégories, cela ne veut pas dire qu’il doit les prendre à son propre compte. » Il ne participe pas à l’élaboration de TeO, pas plus que le démographe Hervé le Bras qui reste opposé à toute statistique « ethnique » jusqu’à aujourd’hui.

    Patrick Simon assume la complexité de ce type d’approche : « Au sein de l’équipe, on sait qu’il est compliqué de définir le contenu des catégories parce qu’il faut qu’elles correspondent à la façon dont les personnes s’identifient. Elles réduisent la complexité des identités, notamment parce qu’il y a du métissage. Cela ne veut pas dire que c’est impossible à faire pour le chercheur. Les débats portent en permanence sur la légitimité même de faire des catégories, alors qu’il faudrait plutôt s’intéresser au contenu des catégories, c’est une question épistémologique et méthodologique. »
    La complexité disparaît souvent au profit d’un « débat » polarisé

    Lorsqu’il s’agit de statistiques sur l’immigration, la complexité disparaît souvent au profit d’un « débat » polarisé, où il faut se prononcer pour ou contre ce qui n’est pas toujours très bien défini. La polémique n’est pas circonscrite aux couloirs de l’Ined. À l’Insee, les statistiques sur l’immigration provoquent toujours des tensions. En 2007, l’identification de la couleur, de la religion et l’origine des enquêtés prévue dans TeO émeut les syndicats de l’institut de la statistique qui craignent que leur travail ne donne des outils « à celles et ceux qui rêvent de construire une représentation "ethnoraciale" de la France ». Ils évoquent le fichier juif que la statistique publique aurait aidé construire pendant la Seconde Guerre mondiale.

    La polémique atteint son apogée lorsque SOS Racisme, visant expressément le projet d’enquête TeO, lance une pétition en octobre 2007 invitant chacun à refuser que son « identité soit réduite à des critères d’un autre temps, celui de la France coloniale, ou de Vichy ». Alors que des chercheurs émettent des réserves à l’égard de la pétition, elle réunit 100 000 signatures en quelques jours. Il est vrai que le contexte politique est tendu. Nicolas Sarkozy, élu président 5 mois plus tôt, se présente comme le chantre des statistiques ethniques, mais il mélange les registres entre sécurité et lutte contre les discriminations. La loi « relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile » propose de faciliter la collecte des statistiques ethniques dans son article 63. Fourre-tout, elle veut autoriser le recours aux tests ADN pour prouver la filiation des candidats au regroupement familial. Un mélange des genres qui provoque l’annulation de l’article 63 devant le Conseil constitutionnel.

    Au moment de tester le questionnaire de TeO sur le terrain fin 2007, François Héran, alors directeur de l’Ined, les coordinateurs de TeO et l’Insee décident de maintenir les questions sur la religion mais retirent celles sur la couleur de peau. Dans le questionnaire, il n’y a pourtant pas de catégories « figées » qui favoriserait l’établissement d’un « référentiel ethnoracial », comme le craignaient les détracteurs de l’enquête. Les personnes étaient invitées à exprimer leur ressenti d’appartenance en répondant aux deux questions suivantes : « De quelle couleur de peau vous diriez vous ? » et « De quelle couleur de peau les autres vous voient-ils ? ». Elles disparaissent définitivement de l’enquête. Elles ne sont toujours pas présentes dans la seconde enquête TeO (TeO2), dix ans plus tard.

    En posant directement la question de la couleur, l’équipe de recherche voulait éviter d’utiliser une catégorie indirecte, que l’on appelle « proxy » en science statistique. « Catégoriser les personnes en fonction de leurs prénoms ou de leur lieu de naissance ou de ceux de leurs parents permet de produire des statistiques sur les discriminations racistes, explique Cris Beauchemin, mais cela demeure une approximation. On ne peut pas utiliser ces méthodes pour les personnes racisées dans la vie quotidienne, c’est-à-dire identifiées par leur couleur de peau, par exemple les petits-enfants d’immigrés. » Ces personnes « disparaissent » donc des statistiques qui tentent pourtant de mesurer les discriminations et le racisme en France.
    L’enjeu de la statistique sur l’immigration pour les chercheurs

    La collecte de données ethnoraciales pour mesurer les discriminations répond pourtant à une demande politique et sociétale forte depuis les années 1990. Le Haut conseil à l’Intégration (HCI), première institution du genre, propose en vain d’introduire l’origine nationale dans le recensement de la population. De nos jours encore, le recensement permet seulement de distinguer les étrangers des Français et les immigrés des natifs (car on peut être à la fois immigré et français).

    Le manque de statistiques ethnoraciales n’empêche pas des chercheurs de démontrer, dès les années 1980, l’existence de discriminations subies par les Français issus de l’immigration, notamment maghrébine. C’est le cas de l’étude pionnière du sociologue René Lévy en 1987 sur la police judiciaire, Du suspect au coupable, qui montre l’association faite par la police entre traits identitaires et présomption de culpabilité des suspects. Les statistiques ainsi recueillies, grâce à des entretiens individuels menés par un chercheur, ne concernent cependant qu’un faible échantillon (méthode qualitative). Quand la recherche collabore avec la statistique publique, comme c’est le cas pour MGIS ou TeO, des milliers de personnes sont interrogées. Un questionnaire fermé est construit par les scientifiques mais ils ne mènent pas eux-mêmes les entretiens. Le but est de créer de la statistique (méthode quantitative) pour les chercheurs — et aussi pour les administrations. Les résultats produits sont représentatifs à l’échelle du pays et permettent donc de tirer des conclusions à la fois plus larges et plus solides sur l’ensemble de la France.

    « Pour moi, le gros livre (https://www.ined.fr/fichier/s_rubrique/24668/grande.enquetes_teo_fascicule.fr.pdf) qui présente les travaux de l’équipe de TeO1 en 2016 est une sorte de bible multi-thématique, qu’on voit apparaître dans des réunions de recherche, mais aussi avec des acteurs plus institutionnels, témoigne Mathieu Ichou, coordinateur de TeO2 avec Patrick Simon et Cris Beauchemin. C’est un objet central dans la recherche quantitative sur l’immigration. » Élodie Druez, qui a soutenu sa thèse en juin 2020 sur la racisation et la politisation des diplômé.e.s d’origine subsaharienne à Paris et à Londres, aurait pu se passer de TeO, dit-elle, mais « cela m’a permis de voir que les rapprochements que je faisais n’étaient pas seulement le fruit de l’analyse des 80 entretiens individuels que j’avais réalisés, ni propres au groupe que j’avais interrogé. Par exemple dans ces entretiens, je vois qu’il y a un lien entre le fait de s’intéresser à la politique et le fait de déclarer des discriminations en France comme au Royaume-Uni. Les résultats quantitatifs me le confirment de façon très nette dans les deux pays pour des descendants d’immigrés de différentes origines. »
    La force politique de la statistique

    Le chiffre a un pouvoir important dans notre société. Christelle Hamel, coordinatrice sur TeO1, entre à l’Ined en 2005 pour « la force politique de la statistique ». « Le qualitatif ne suffit pas pour des sujets sensibles comme le racisme ou les violences faites aux femmes. Quand on regarde les choses à l’échelle de l’individu, on peut toujours trouver des particularismes, propres à une histoire ou à un comportement, et remettre en cause la parole de la victime. Avec les statistiques et la méthode quantitative, on est obligés de reconnaître qu’il y a un problème du côté des agresseurs. Les statistiques peuvent donc aider à résoudre un problème de régulation des comportements sociaux. » « En démocratie, obliger l’État à compter, c’est l’obliger à rendre des comptes », note François Héran dans son livre Avec l’immigration, consacré en partie aux statistiques ethniques en 2017. Être issu de deux mondes différents, la recherche et la statistique publique, est à la fois la force et la fragilité de l’enquête TeO.

    L’Insee, avec ses 5 600 salariés dans toute la France, est une direction générale du ministère de l’Économie et des Finances qui recrute ses « administrateurs » à la sortie d’une grande école : l’École nationale de la statistique et des études économiques (Ensae). « Ce sont des ingénieurs de très haut niveau, d’extraordinaires organisateurs », affirme François Héran, qui a également occupé des responsabilités à l’Insee. Les chercheurs, chargés de répondre à des questions de société sensibles, sont davantage dans l’imagination et plus provocateurs. Les statisticiens, plus prudents ». Mathieu Ichou, coordinateur depuis 2016 de la nouvelle enquête TeO avec Patrick Simon et Cris Beauchemin, reconnaît qu’il y a « à la fois un côté pratique pour les chercheurs à s’associer à l’Insee et une question de légitimité des résultats : produits par la statistique publique, ils engagent plus les autorités que si c’était l’enquête d’un chercheur isolé. C’est de la statistique publique, avec cette image de rigueur qui va avec. »

    En s’associant à l’Insee, les démographes de l’Ined passent sous le contrôle des organismes chargés de défendre les intérêts des usagers de la statistique, qui interviennent sur les activités du Système de la statistique publique (SNS) regroupant l’Insee et les services statistiques ministériels. Alors que l’Ined, en tant qu’institut de recherche, dépend du ministère de la Recherche qui garantit son indépendance, il ne peut pas travailler avec la même liberté en s’associant à la statistique publique. Le grand public confond d’ailleurs souvent l’Ined avec l’Insee. Nicolas Sarkozy essayera même de placer ses chercheurs sous la tutelle de son ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire, lors de l’élaboration de TeO, sans succès.

    « C’est un enjeu important pour nous de savoir si la 3e génération est discriminée »,
    Mathieu Ichou, coordinateur de TeO2

    Si les enquêtes MGIS et TeO provoquent autant de controverses par rapport aux enquêtes de chercheurs, qui peuvent pourtant aborder les discriminations et le racisme de façon plus frontale, c’est que les catégories et questionnements mis en place dans le cadre de la statistique publique peuvent devenir une référence utilisable dans les grandes enquêtes de l’Insee, sur l’emploi ou la famille par exemple, voire dans le recensement. C’est ce que craignent ceux qui veulent « débattre » des mal-nommées statistiques « ethniques ».

    Pourtant, chaque enquête de la statistique publique est visée par la Cnil, la Commission nationale informatique et liberté. Il lui incombe de veiller à l’application de la loi de 1978, qui interdit le traitement « des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques, les options philosophiques, politiques ou religieuses, (...) ou qui sont relatives à la santé ». C’est elle qui accorde les dérogations nécessaires aux grandes enquêtes nationales sur ces sujets sensibles. Des exceptions sont en effet prévues si l’enquête est d’intérêt général, si les personnes personnes interrogées ont donné leur consentement et si les données, dûment anonymisées, sont correctement protégées, ce à quoi s’astreignent les enquêtes de la recherche et de la statistique publiques.

    Au préalable, les projets d’enquête sont examinés par le Conseil national de l’information statistique (Cnis). Moins connu du grand public, le Cnis est ouvert à tous ceux qui représentent les usagers et producteurs de la statistique publique. Son label est indispensable. Il évalue sa pertinence par rapport aux enquêtes existantes et examine en détail la méthodologie et le contenu du questionnaire. C’est lors des réunions du Cnis que les associations sont invitées à donner leur point de vue sur l’enquête.

    Mathieu Ichou est chargé en mai 2016 de présenter la deuxième enquête TeO au Cnis. Il raconte : « On voulait innover sur les questions posées, notamment pour identifier les minorités visibles ou racisées qui sont les premières victimes des discriminations. Comme le Cnis nous a finalement interdit de parler de « minorités visibles et qu’on souhaitait faire cette enquête avec la statistique publique, on a demandé l’inclusion et l’identification de la 3e génération. » Le Cnis ayant donné sont aval, cette méthode devrait permettre de comprendre pourquoi 15 % de la « population majoritaire », catégorie utilisée depuis Teo1 pour les personnes sans ascendance immigrée sur deux générations, s’est déclarée victime de racisme et de discriminations lors de la première vague de l’enquête. « C’est un enjeu important pour nous de savoir si la 3e génération est discriminée, explique le chercheur. Cela voudrait dire que si un petit-enfant de Sénégalais ou d’Algériens subit des discriminations, ce n’est pas parce que son grand-père est venu travailler en France, mais bien parce qu’il est perçu comme noir ou arabe. Il deviendra donc nécessaire de les identifier autrement que par l’immigration de leurs ascendants. »
    Une nouvelle approche dans l’étude des populations immigrées et de leurs descendants

    Le tour de table financier que l’équipe de TeO a réussi à organiser permet de disposer d’un échantillon de plus de 20 000 personnes représentatif de la diversité de la population. Les chercheurs peuvent donc travailler sur un nombre suffisant de personnes, même pour les minorités les moins nombreuses, comme les Africains subsahariens ou les Chinois, par exemple. Le plus coûteux a été d’identifier les enfants d’immigrés (et les petits-enfants dans TeO2). Il faut donc repérer ces descendants d’immigrés par leurs bulletins de naissance, avec l’autorisation des tribunaux administratifs, ce qui nécessite d’envoyer des agents de l’Insee dans toute la France pour examiner les registres en mairie. Ce fut « un véritable tour de force », écriront les concepteurs de TeO1 en 2016.

    « Il n’y a pas de précédent à TeO, s’enthousiasme Cris Beauchemin, notamment dans cette richesse d’échantillonnage et le fait que ce soit absolument représentatif de la société française. C’est une exception internationale. Des chercheurs américains, qui travaillent en ce moment sur TeO, sont émerveillés car il n’y pas d’enquêtes statistiques aux États-Unis qui soient nationalement représentative, avec ce luxe de détails dans les questions, qui touchent à tous les domaines de la vie sociale. »

    TeO a permis de changer de prisme dans l’étude des populations immigrées et – surtout — de leurs descendants. Il ne s’agit plus seulement de mesurer leur capacité d’intégration dans la société française, mais plutôt la capacité de la société française à « faire égalité ». La question des discriminations « systémiques » est devenue centrale. Introduite dans le droit français sous la forme des « discriminations indirectes » par deux directives européennes en 2000, cette approche permet d’aller au-delà de la mesure des discriminations intentionnelles et individuelles, plus facilement identifiables. « Rien n’est moins accessible à l’attention que les discriminations », écrivait Patrick Simon avec son collègue Joan Stavo-Debauge en 2004. Si les discriminations « directes » sont facilement identifiables, comme un refus fondé explicitement sur un préjugé ou une « préférence discriminatoire » en raison de son appartenance à un groupe stigmatisé, « la mise en évidence des discriminations "indirectes" est bien plus complexe, expliquent les chercheurs, et nécessite la mise en place d’une ingénierie spécifique où les statistiques, comme raisonnement et comme dispositif, occupent une place prépondérante. »

    « Je trouve qu’il y a une sorte d’hypocrisie dans le système français à ne pas parler de race », remarque Élodie Druez, qui a pu montrer dans sa thèse en quoi les statistiques ethnoraciales sont un outil pour dénoncer le racisme dans le contexte britannique. « Je n’observe pas au Royaume-Uni que les statistiques sont utilisées pour stigmatiser plus ces populations. D’ailleurs, ces statistiques sont toujours couplées à une analyse en termes de racisme institutionnel. On est très mal à l’aise en France avec l’idée que les institutions, par leur fonctionnement, puissent entraîner des discriminations de façon intentionnelle ou non. Pourtant les statistiques ethnoraciales sont nécessaires, car on nie les injustices que vivent les personnes racisées, et la colère monte. »
    Une enquête qui peut servir de levier aux associations antiracistes

    Christelle Hamel, coordinatrice de la première édition de TeO, pense qu’il faut aller plus loin aujourd’hui et « parler des rapports de domination qui existent entre la population immigrante exposée au racisme et celle qui n’est pas issue de l’immigration qui soit commet des actes racistes, soit en bénéficie. Si quelqu’un est discriminé dans l’embauche, par exemple, une autre personne sera — de fait — favorisée dans son accès à cet emploi. Pourtant elle n’est, elle-même, responsable en rien de cette discrimination ; elle bénéficie seulement d’un traitement discriminant. » Cette analyse fait écho au concept de « privilège blanc », évoqué dans le débat public en France depuis les manifestations contre les violences policières qui ont éclaté à la mort de l’Africain-Américain Georges Floyd.

    « Le rejet des statistiques raciales renvoie au refus de se penser en tant que Blanc », ajoute le sociologue Éric Fassin. Acteur et observateur de la controverse de 2007 autour de TeO, il qualifie aujourd’hui l’épisode de « très violent ». « Pourtant, on était d’accord sur beaucoup de choses, puisque la bataille avait lieu au sein des sciences sociales entre antiracistes de gauche. Mais il y avait autre chose ; personne ne l’a fait remarquer à l’époque, mais nous étions presque tous blancs. La question raciale n’est pas extérieure au monde savant : ce n’est pas parce qu’on est entre Blancs qu’il n’y a pas de question raciale — bien au contraire ! Nommer la blanchité, c’est donc cela l’enjeu. »

    Dans la société française, « TeO a permis de lever beaucoup de stéréotypes et d’idées reçues grâce aux éléments de connaissance que l’enquête a apportés », constate Patrick Simon aujourd’hui. « Même si cela n’a rien changé du point de vue des politiques de lutte contre les discriminations, le débat sur les discriminations et la participation à la société des immigrés et de leurs descendants a évolué. L’enquête peut servir de levier à des associations de lutte contre le racisme et les discriminations. »

    Les questions sur la perception de la couleur de peau seront-elles posées dans une prochaine édition de TeO ? L’enquête s’installera-t-elle dans une périodicité de dix ans, évoluant avec le questionnement de la société sur les statistiques ethnoraciales ? En tout cas, conclue François Héran, « TeO a prouvé le mouvement en marchant : les polémiques des années 1990 sont désormais obsolètes. ». À ce jour, 220 travaux de recherche, dont plusieurs thèses, ont utilisé ses données sécurisées et anonymisées. TeO a ouvert la voie à d’autres enquêtes qui mobilisent des catégories ethniques et/ou raciales. Les dernières en date ont été menées en 2016 par le Défenseur des droits sous le titre général « Accès aux droits1 ».

    Contrairement à une idée encore largement reçue, les statistiques ethniques sont autorisées en France, à condition d’être dûment pensées et contrôlées. Elles restent exclues des fichiers administratifs mais peuvent être mobilisées dans les grandes enquêtes menées par les chercheurs et les statisticiens. Beaucoup de chercheurs pensent que des progrès restent à faire vers une interrogation plus précise sur la discrimination proprement raciale, en relation avec d’autres critères comme le sexe, le milieu social et la religion. Un défi pour la jeune génération.

    http://icmigrations.fr/2020/08/28/defacto-021-01
    #statistiques_ethniques #inégalités #données #origine #couleur_de_peau #TeO #enquête_TeO #racisme #xénophobie #discriminations

    ping @karine4 @isskein @cede

  • La Grande Transformation (II)

    Georges Lapierre

    https://lavoiedujaguar.net/La-Grande-Transformation-II

    Aperçus critiques sur le livre de Karl Polanyi
    La Grande Transformation
    (à suivre)

    De l’eau a coulé sous les ponts de Paris et le sanglier et la marguerite restent désormais figés par quelques maléfices dans leur extériorité, nous ne saisissons plus le sanglier ou la marguerite comme des êtres poursuivant leur idée, comme des êtres animés par une pensée. Nous ne saisissons plus l’idée qui se cache sous sa représentation, derrière le sanglier ou derrière la marguerite. Sans doute parce que la pensée qui nous anime n’est plus véritablement la nôtre, qu’elle nous est devenue extérieure et pour ainsi dire, étrangère. Avec l’argent, elle n’est plus, pour nous, qu’une apparence, du moins c’est bien ainsi qu’elle se manifeste : elle se trouve réduite à son apparence, figée dans son apparence, dans sa représentation qui est à la fois matérielle et mentale.

    L’idée de l’échange et sa représentation sous une forme matérielle (ou capital) se trouve à l’origine de l’échange et par suite de la vie sociale. La représentation de l’idée se trouve à l’origine de la pensée. La représentation de l’idée ou l’idée dans une tête (ce que j’ai appelé le capital), le capital, se trouve à l’origine de la vie sociale. Sur ce plan, Karl Polanyi réduit la notion de capital à ce qu’elle représente aujourd’hui, le capital financier, et l’échange à ce que nous connaissons comme échange, à l’échange marchand. Cela revient à critiquer l’idée, l’idée de l’échange, qui se trouve au commencement de la vie sociale en fonction de l’idée de l’échange telle qu’elle s’impose de nos jours. (...)

    #Karl_Polanyi #échanges #capital #marché #État #origine #Luc_de_Heusch #aliénation #économie #argent #apparence

  • Les symboles ne naissent pas, ils se construisent

    Tomás Ibáñez

    https://lavoiedujaguar.net/Les-symboles-ne-naissent-pas-ils-se-construisent

    Pendant de nombreuses années l’origine du A cerclé fut enveloppée d’un épais mystère. Au début, personne ne se souciait d’où avait surgi ce signe particulier qui accompagnait parfois certains graffitis anarchistes. Cependant, au fur et à mesure que cette icône se consolidait jusqu’à devenir un symbole incontesté de l’anarchisme, l’intérêt pour ses origines se mit à croître et la totale ignorance de ses sources fit surgir de multiples spéculations et légendes sur son origine. C’est ainsi que prit corps la croyance selon laquelle le A cerclé avait accompagné l’anarchisme depuis toujours, tandis que fleurissaient des histoires qui étaient parfois aussi détaillées qu’elles étaient immanquablement fausses.

    Certaines assuraient que l’on pouvait deviner un A cerclé peint sur le casque d’un milicien pendant la révolution espagnole, alors qu’il ne s’agissait que de la représentation d’une cible ; d’autres prirent pour un A cerclé ce qui n’était qu’une équerre et un fil à plomb qui figuraient vers 1870 sur le sceau du conseil fédéral de l’Association internationale des travailleurs d’Espagne ; d’autres encore le firent remonter à Proudhon et à son idée de l’anarchie (A) comme expression de l’ordre (O) ; certains crurent même voir un A cerclé dans ce qui n’était qu’un double « A » inscrit dans la lettre « O » pour représenter les initiales de l’Alliance ouvrière anarchiste. Peu importe, quand bien même ces pistes n’auraient pas fait fausse route tout cela n’avait rien à voir avec l’idée de proposer un A cerclé comme symbole de l’anarchisme. (...)

    #anarchie #symbole #origine #Jeunes_Libertaires #Deleuze #génération

  • Qui sont les journalistes ? Un questionnement pour mieux comprendre le journalisme et sa crise actuelle #journalisme #medias #école #origines

    https://sms.hypotheses.org/24146

    La précarité du métier de journaliste est un fait social dorénavant bien étudié et documenté. La crise économique et les transformations assez brutales que connaît le secteur depuis presque vingt ans – et qui sont à l’origine de cette précarité – sont aussi des phénomènes connus. En revanche, les travaux se penchant sur les caractéristiques sociales des journalistes sont plus rares et surtout moins visibles. Leur intérêt n’est pourtant pas secondaire et théorique : il permet de répondre à une série de questions et de paradoxes que laissent en suspens les réflexions habituelles sur le journalisme et sa crise.

    Ainsi, alors que les mises en garde sont nombreuses pour qui veut s’engager dans cette voie professionnelle incertaine et précaire, comment expliquer que les vocations et les formations professionnelles se sont multipliées ? Quels sont les déterminants sociaux de la sélection des journalistes et leurs effets sur leurs trajectoires et leur pratique professionnelles ? (...)

  • Mesurer les discriminations par origine en France grâce aux noms de famille
    https://medium.com/@mazieres/mesurer-les-discriminations-par-origine-en-france-gr%C3%A2ce-aux-noms-de-fam


    Plus une origine a un ratio supérieur à 1 (la référence), plus elle est “sur-représentée”, c’est à dire qu’elle est plus présente dans le groupe que dans la population globale. Et inversement, plus il est inférieur à 1, plus elle est “sous-représentée”.

    Origines et noms de famille
    Imaginez vous un instant dans un petit village français, en plein moyen-âge. Il y a 5 personnes qui s’appelle Antoine dans le coin et, pour une raison quelconque, vous devez les distinguer les uns des autres, par exemple :
    - « Salut ! Je crois que j’ai vu Antoine voler ton scooter hier ? »
    – « Quoi !? Quel Antoine ? »
    – « Celui avec la maison toute pourrie. »

    Voilà ! C’est une origine possible — quoique apocryphe — de mon nom de famille : Mazières. Une des nombreuses versions, en latin vulgaire, du mot Masure, qui signifie vaguement maison toute pourrie. Il en va de même pour de nombreux noms de famille, qui font référence à des lieux (Dupont, celui près du pont), des traits physiques (Petit, le petit, Morel, celui à la peau mat), des occupations (Fournier, le boulanger, Ferrand, le maréchal-ferrant), des surnoms (Martin, le guerrier fertile, Bernard, l’ours fort), etc.

    tout le billet est passionnant…

  • L’origine sociale et scolaire des journalistes : un questionnement pour mieux comprendre le journalisme et sa crise actuelle #médias #journalisme #école #origines

    https://sms.hypotheses.org/24146

    La précarité du métier de journaliste est un fait social dorénavant bien étudié et documenté. La crise économique et les transformations assez brutales que connaît le secteur depuis presque vingt ans – et qui sont à l’origine de cette précarité – sont aussi des phénomènes connus. En revanche, les travaux se penchant sur les caractéristiques sociales des journalistes sont plus rares et surtout moins visibles. Leur intérêt n’est pourtant pas secondaire et théorique : il permet de répondre à une série de questions et de paradoxes que laissent en suspens les réflexions habituelles sur le journalisme et sa crise.

    Ainsi, alors que les mises en garde sont nombreuses pour qui veut s’engager dans cette voie professionnelle incertaine et précaire, comment expliquer que les vocations et les formations professionnelles se sont multipliées ? Quels sont les déterminants sociaux de la sélection des journalistes et leurs effets sur leurs trajectoires et leur pratique professionnelles ? (...)