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  • Prix Nobel de l’hypocrisie - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2016/12/prix-nobel-de-l-hypocrisie.html

    Lorsque le prix Nobel de la Paix fut décerné en 1906 à Theodore Roosevelt (président des États-Unis de 1901 à 1909), le New York Times commenta ainsi la nouvelle :
    « Un large sourire illumina le visage du globe quand le prix a été attribué … au citoyen le plus belliqueux des États-Unis » [1].

    Theodore Roosevelt et la diplomatie du « gros bâton » « Parle doucement et porte un gros bâton » (2 septembre 1901)
    Environ un siècle plus tard, un journaliste du même New York Times se questionnait :
    « Alors, que pensez-vous du président Obama remportant le prix Nobel de la paix ? Je suis perplexe […]. Qu’a-t-il fait ? […] il me semble que cela aurait été logique d’attendre et de donner à Obama le prix Nobel de la paix dans sa huitième année en poste, après qu’il ait effectivement fait la paix quelque part » [2].
    Il s’agissait bien sûr du prix Nobel de la Paix attribué au président Barack Obama en 2009 « pour ses efforts extraordinaires pour renforcer la diplomatie et la coopération internationale entre les peuples ».
    Tout ça, neuf mois à peine après son élection ? Comment était-ce possible ?
    Du haut des huit ans années écoulées – et à des années-lumière du ronflant « Yes, we can ! » -, on peut effectivement contempler l’étendue de la paix qu’il a contribué à créer et à disséminer dans le monde arabe.
    Un monde arabe ruiné par une saison funeste qu’il a contribué à créer et qu’on a fallacieusement baptisée « printemps » [3].
    Un monde arabe saigné, éventré, étripé et dont le sang de ses citoyens graffitent les décombres et arrose les champs.
    Un monde arabe hanté par des créatures barbues coupeuses de têtes, friandes de chair humaine et annihilatrices d’espoir.
    Un monde arabe devenu le théâtre de la plus grande transhumance humaine depuis la seconde guerre mondiale [4].
    Un monde arabe où les tensions religieuses ont été nourries, attisées et exacerbées : musulmans contre chrétiens, sunnites contre chiites et sunnites contre sunnites.
    Un monde arabe dont les citoyens vivant en Occident endurent les affres d’une islamophobie nauséabonde, la pire de l’histoire contemporaine.
    Au fait, ce n’est pas Obama qui avait fait ces déclarations pompeuses dans son « fameux » discours du Caire ?
    « Je suis venu chercher un nouveau commencement entre les États-Unis et les musulmans du monde entier ».
    Et aussi :
    « Les peuples du monde peuvent vivre ensemble en paix […] cela doit être notre travail, ici sur Terre » [5].

    Barack Obama : le discours du Caire (4 juin 2009)
    Mais qui est donc censé être récompensé par le prix Nobel de la Paix ? Le testament d’Alfred Nobel est pourtant clair :
    « Une personne qui aura accompli le plus grand et le meilleur travail pour la fraternité entre nations, pour l’abolition ou la réduction des forces armées et pour la tenue et la promotion de congrès pour la paix » [6].
    Comment le comité Nobel peut prétendre qu’Obama a œuvré dans la promotion de la paix alors qu’il venait d’être élu ? Était-ce un prix pour des actions futures que ce comité aurait vues dans une boule de cristal norvégienne ? Si c’est le cas, ce comité doit impérativement relire le testament d’Alfred Nobel ou, du moins, changer de boule.
    En effet, la cristallomancie ne leur a-t-elle pas révélé que, chaque mardi, Obama décide personnellement quelles personnes doivent être liquidées à l’aide de drones [7] ? Et que la majorité des victimes de ces « mardis de la mort » sont des cibles civiles [8] ?
    Certes Obama a détendu l’atmosphère avec l’Iran et a réchauffé les relations diplomatiques avec Cuba.
    Par contre, il a fortement contribué à recréer un climat de néo-Guerre froide avec la Russie avec tout ce que cela peut comporter comme dangers à l’échelle planétaire. En effet, le rôle actif de son administration dans l’aide aux néonazis ukrainiens lors des évènements dramatiques de l’Euromaïdan a permis la réussite d’un coup d’état en règle en Ukraine [9].
    Cet épisode de flagrante ingérence étasunienne n’est, au demeurant, que le remake sanglant d’une certaine « révolution orange » de l’époque d’un célèbre « pacifiste » américain nommé G.W. Bush. Un président malchanceux qui n’a « malheureusement » pas été honoré par le comité Nobel bien qu’il ait assidûment œuvré dans la destruction de quelques pays musulmans sans oublier ses remarquables efforts dans la popularisation du lancer de chaussures.
    À chacun sa « révolution ».
    Il va sans dire que la déstabilisation de l’Ukraine, pays limitrophe de la Russie – et avec laquelle elle partage des liens historiques, culturels et économiques -, a eu pour effet de perturber sérieusement toute la géopolitique de la région et de créer des tensions entre l’Europe et Moscou.
    À ce sujet, le journaliste australien John Pilger mentionne que :
    « L’administration Obama a fabriqué plus d’armes nucléaires, plus de têtes nucléaires, plus de systèmes de vecteurs nucléaires, plus de centrales nucléaires. Les dépenses en têtes nucléaires à elles seules ont plus augmenté sous Obama que sous n’importe quel autre président américain » [10].
    Avant d’ajouter :
    « Au cours des dix‐huit derniers mois, la plus grande concentration de forces militaires depuis la seconde Guerre Mondiale — opérée par les USA — a lieu le long de la frontière occidentale de la Russie. Il faut remonter à l’invasion de l’Union Soviétique par Hitler pour trouver une telle menace envers la Russie par des troupes étrangères » [11].
    Dans le conflit palestinien, les promesses et les attentes étaient immenses. Le premier président noir des États-Unis, affublé de l’auréole des saints et drapé d’un incommensurable charisme médiatique, ne pouvait rester indifférent au sort des Palestiniens dont on a spolié la Terre et bafoué les droits les plus élémentaires. Il se devait d’agir, surtout après son « célèbre » discours du Caire :
    « Pendant des dizaines années, il y a eu une impasse […]. […] la seule solution pour répondre aux aspirations des deux côtés passe par deux États […]. C’est pourquoi j’ai l’intention de rechercher personnellement cette solution, avec toute la patience que la tâche requiert. Les obligations que les parties ont contractées dans le cadre de la feuille de route sont claires. Pour que la paix advienne, il est temps pour elles – et pour nous tous – de prendre nos responsabilités » [12].
    Obama a tellement pris ses responsabilités au sérieux qu’il est probablement le président américain qui a fait le moins d’efforts pour résoudre le problème palestinien. Pendant ses deux mandats successifs, la colonisation des terres palestiniennes a continué de plus belle et pas moins de deux massacres ont été perpétrés par Israël dans la bande de Gaza. Des milliers de morts et un désastre humanitaire en direct dans tous les médias « mainstream » sans que cela ne fasse sourciller le locataire de la Maison Blanche.
    Écoutons ce que dit Alain Franchon sur ce chapitre :
    « Dans ce conflit, les États-Unis disaient assurer, depuis vingt-six ans, le rôle d’« honnête intermédiaire ». C’en est fini de cette ambition. La présidence de Barack Obama aura entériné un mouvement amorcé depuis les années 1990 : Washington abandonne, de facto ». […] La position de départ de l’Amérique a changé. Elle se refuse a priori à la moindre contrainte sur Israël » [13].
    Pis encore. Juste avant la fin de son deuxième et dernier mandat, il vient de faire un splendide cadeau à Israël en guise de félicitations pour leur excellent travail de nettoyage ethnique et de colonisation efficace et continue de la Palestine : une aide militaire sans précédent de 38 milliards de dollars sur 10 ans [14] !
    Plus de morts, plus de colonisation, plus de haine…
    Mais pouvait-on s’attendre à mieux de la part de ce président ? Que nenni. Dans un article publié le 20 janvier 2009, jour de sa première investiture, j’écrivais, à propos de son programme :
    « Dans le chapitre de la politique étrangère du président Obama consacré à l’État Hébreu, le titre est éloquent, voire racoleur : « Barack Obama et Joe Biden : un solide dossier de support à la sécurité, la paix et la prospérité d’Israël « . Parmi les actions de la nouvelle présidence, on peut lire : assurer un solide partenariat USA-Israël, soutenir le droit à l’autodéfense d’Israël et soutenir une assistance étrangère à Israël. Dans les détails du dernier point, on peut lire que le président Obama et son adjoint s’engagent à toujours fournir l’aide annuelle dans le domaine militaire et l’assistance économique à Israël. Ils recommandent fortement l’augmentation des budgets et appellent à poursuivre la coopération avec Israël dans le développement des missiles de défense »[15]
    Promesses tenues, n’est-ce pas ?
    Dans le dossier libyen, alors qu’une solution pacifique était à portée de main, Obama a opté, de concert avec sa secrétaire d’État Hillary Clinton, pour l’élimination de Kadhafi et la dévastation totale de la Libye [16].
    « We came, we saw, he died ! »
    C’est ainsi qu’elle s’était esclaffée à l’annonce du sordide lynchage du chef libyen, avec un gloussement de bonheur et des yeux pétillants de joie [17].

    Réaction de Hillary Clinton à l’annonce de la mort de Kadhafi
    En sous-traitant la destruction de la Libye avec ses alliés européens et arabes du Golfe, l’administration américaine a non seulement provoqué la mort de milliers de Libyens, mais a réussi à transformer ce pays naguère prospère en une contrée où règne le chaos et où sévissent des hordes de djihadistes islamistes. Et comme dans le cas de l’Ukraine, l’instabilité générée en Libye a métastasé dans toute la région, affectant durablement de nombreux pays africains voisins [18].
     

    (Libye) sous les décombres
    La « printanisation » de la Syrie représente sans aucun doute le summum de la politique « pacifiste » du président Obama. Initiée par de manifestations non-violentes d’apparence spontanée, la révolte populaire de la rue syrienne a été méticuleusement concoctée par des organismes américains d’« exportation » de la démocratie [19]. Elle s’est rapidement métamorphosée en guerre civile, la plus effroyable de ce début de siècle.
    Et les chiffres de ce pays ruiné sont éloquents : près d’un demi-million de morts [18], plus de 50 % de la population déplacée dont presque 5 millions ont fui à l’étranger [21].
    Selon de récentes données de la Commission européenne :
    « Les réfugiés syriens constituent désormais la plus importante population de réfugiés au monde issue d’un même pays sur une même génération » [22].
    D’après le Washington Post, la CIA dépense pas moins d’un milliard de dollars par an pour armer et entraîner les rebelles syriens [21]. De nombreux témoignages et enquêtes montrent que l’administration américaine aide les « coupeurs de gorges » et « dévoreurs de cœurs » djihadistes dans le but de renverser le gouvernement syrien [24, 25].

    Des djihadistes syriens dans une tente fournie par l’USAID
    Pour les rendre plus « sympathiques » aux yeux de l’opinion publique, des spécialistes de relations publiques ont été chargés de leur donner un look « respectable ». Ainsi, par exemple, les médias du monde entier nous ont inondés d’images de sauveteurs héroïques, risquant leurs vies pour sauver celles de leurs concitoyens bombardés par l’aviation syrienne. Ces « héros », reconnaissables à leurs casques blancs – les « White Helmets » – sont devenus les vedettes d’un film documentaire produit en leur honneur par Netflix [26]. Ils ont même été proposés au prix Nobel de la Paix par des stars américaines comme George Clooney, Ben Affleck, Daniel Craig ou Justin Timberlake [27]. Rien que ça.

    Les « White Helmets » : les dessous de l’histoire
    Dans deux remarquables articles, le journaliste Max Blumenthal démonte toute la machine de propagande qui se cache derrière les « White Helmets » [28, 29]. Ces « téméraires » sauveteurs ne sont en réalité que des djihadistes casqués, financés par l’« United States Agency for International Development » (USAID), le plus important des organismes américains d’« exportation » de la démocratie [30]. Un document du département d’État datant du 27 avril 2016 révèle que cet organisme a financé les « White Helmets » à hauteur de 23 millions de dollars [31]. Une petite partie du magot d’environ 340 millions de dollars prévu par USAID pour « soutenir les activités qui poursuivent une transition pacifique vers une Syrie démocratique et stable » [32].
    Un des plus grands succès des spécialistes de relations publiques travaillant avec les rebelles syriens est l’affaire du « petit garçon sur le siège orange ». Il s’agit de la photographie esthétiquement émouvante d’un petit garçon syrien de cinq ans nommé « Omran Daqneesh ». La photo, qui a fait le buzz sur Internet, a été aussi largement diffusée dans les médias « mainstream ». Elle montre un enfant assis sur le siège orange d’une ambulance, couvert de poussière, le visage ensanglanté et le regard hagard. L’enfant aurait été extrait des décombres d’un quartier de la ville d’Alep par les « White Helmets ».

    Omran Daqneesh à la une du New York Times (19 août 2016)
    La photographie est si poignante qu’elle a fait réagir un enfant américain de six ans, Alex, qui a écrit au président Obama en personne. Il lui demanda de faire le nécessaire pour ramener le petit Omran aux États-Unis afin de l’accueillir dans sa maison et partager avec lui ses jouets et ceux de sa sœur.
    Ah ! Les beaux sentiments des jeunes enfants ! Aussi beaux que la photo du petit Omran ! Si beaux que la lettre a été publiée in extensosur le site de la Maison Blanche accompagnée d’une vidéo du petit Alex [33]. L’écriture hésitante du jeune américain, puérile et appliquée, a fait craquer la blogosphère, autant que la photo du « petit garçon sur le siège orange ».

    Alex écrit à Obama (21 septembre 2016)
    Mais c’est en s’intéressant à la personne qui a photographié le jeune syrien blessé que l’histoire devient croustillante. Le photographe est un certain Mahmoud Raslan qui travaille avec l’AMC (Aleppo Media Center). Selon certains observateurs de la scène syrienne, l’AMC est financé par le gouvernement des États-Unis, mais aussi par celui de la France et de la Grande-Bretagne [34].
    Le plus dramatique, c’est que Mahmoud Raslan ne cache pas sa sympathie pour des djihadistes barbares, en particulier ceux du groupe d’Al Zinki [35].
    Ce groupe de rebelles qui a été accusé par Amnesty International d’enlèvements, de tortures et d’exécutions sommaires [36].
    Ces mêmes rebelles qui ont égorgé, quelques semaines plus tôt, un enfant de douze ans et qui ont poussé l’horreur jusqu’à se filmer en train de commettre leur abominable forfait [37], crime horrible qui n’a pas connu le même battage médiatique que celui du petit Omran sauvé par les « White Helmets ».
     

    Omran Daqneesh : les dessous de l’histoire
    Ces mêmes rebelles que les États-Unis financent, arment et dont ils payent les salaires par l’intermédiaire du MOM (Centre d’opérations commun) [38, 39].
    Y a-t-il eu des lettres écrites au président Obama pour dénoncer le comportement bestial de ces rebelles ? Des missives pour pleurer le jeune garçon décapité ? La réponse est, bien sûr, négative.
    La Maison Blanche a largement médiatisé la lettre du petit Alex. Obama l’a lue dans son discours devant les dirigeants du monde entier lors du sommet sur les réfugiés qui s’est tenu à l’ONU, le 20 septembre dernier. Il a ensuite posté le message suivant sur sa page Facebook :
    « Ce sont les paroles d’un garçon de 6 ans : un jeune enfant qui n’a pas appris à être cynique, suspicieux, ou à avoir peur des autres en raison de là d’où ils viennent, de quoi ils ont l’air ou de comment ils prient. […] Imaginez à quoi le monde ressemblerait si nous étions tous comme Alex » [40].
     

    Obama parle d’Alex à l’ONU (20 septembre 2016)
    Ce fut « un très joli coup de com’ » selon certains [39]. C’est le moins qu’on puisse dire car s’il est vrai que la vérité sort de la bouche des enfants, elle sort rarement de celle des adultes.
    Surtout de celle d’un adulte qui est à la tête du pays le plus puissant du monde et qui a le pouvoir de mettre fin au malheur des « Omran » ou au drame des « Aylan » [42].
    Mais au lieu de cela, il continue à financer, soutenir et provoquer les malheurs et les drames.
    Le petit Alex devrait savoir que pendant les deux mandats du président Obama, des centaines d’« Aylan » et des milliers d’« Omran » palestiniens ont été victimes des bombes israéliennes sans que cela puisse soulever la moindre indignation de l’administration américaine.
    Que des centaines d’« Aylan » et d’ « Omran » yéménites souffrent tous les jours le martyre sous des bombes fournies par les États-Unis à l’Arabie Saoudite, son fidèle allié, pays belliciste et moyenâgeux [43]. Avec des milliers de morts, dont le tiers est des enfants, « l’horreur au Yémen révèle l’hypocrisie meurtrière des exportateurs d’armes tels que la Grande-Bretagne et les États-Unis » [44]. Malgré tout cela, l’administration Obama n’a jamais cessé d’aider l’industrie de la mort saoudienne :
    « L’administration Obama a réalisé plus de 110 milliards $ de transactions d’armes avec la monarchie saoudienne. L’armée américaine continue de ravitailler les avions de la coalition et de fournir des renseignements et les responsables américains et britanniques ont physiquement rencontré les Saoudiens qui bombardent [le Yémen] » [45].
    Dans un éditorial du New York Times intitulé « Les États-Unis sont complices dans le carnage au Yémen », on peut lire :
    « Les experts [américains] disent que la coalition [dirigée par l’Arabie Saoudite] serait clouée au sol sans le soutien de Washington » [46].

    Scène du Yémen actuel
    On devrait aussi présenter à Alex l’illustre Madeleine Albright, l’ancienne secrétaire d’État américaine qui avait déclaré que la mort des 500 000 enfants irakiens à cause de l’embargo américain était un prix « qui en valait la peine » [47].

    Madeleine Albright et les 500 000 enfants irakiens (12 mai 1996)
    Et pourquoi ne pas lui mentionner aussi, en passant, que le président à qui il a écrit sa belle lettre a récompensé Mme Albright en lui décernant, en 2012, la « Médaille présidentielle de la Liberté » [48], la plus haute distinction civile des États-Unis ?
     
    On ne peut qu’être d’accord avec le Washington Post sur le point suivant :
    « En tant que président, les plus grands moments d’Obama ont souvent été des allocutions » [49]
    Du discours du Caire (juin 2009) à celui de l’ONU (septembre 2016), la présidence d’Obama n’a été qu’un vulgaire déplacement d’air qui cache des drones tueurs, des guerres froides, des printemps véreux et des barbus sanguinaires.
    C’est probablement pour cette raison que l’ancien directeur de l’Institut Nobel norvégien a déclaré que :
    « Barack Obama s’est montré indigne de son prix depuis qu’il l’a reçu » [50].
    Il est évident que l’échec cuisant de sa protégée, Hillary Clinton, aux récentes élections présidentielles américaines est un flagrant désaveu de sa politique belliqueuse et destructive qu’il a soigneusement cultivée huit années durant.
    Mais en mêlant l’innocence des petits Omran et Alex à sa gestion calamiteuse des affaires du monde, le seul prix Nobel qui devrait être officiellement décerné à Obama après ses deux mandats est celui, bien mérité, de l’hypocrisie professionnelle.
    Par Ahmed Bensaada | 18 Novembre 2016

  • Est-ce que par hasard, « opération de changement de régime », ce n’est pas l’euphémisme à la mode pour désigner ce qu’on appelait auparavant « coup d’État » ?

  • Petite publicité désintéréssée.
    Ahmed Bensaada vient de publier la version revue et augmentée d’"arabesques américaines", qui s’intitule « Arabesque$ » :
    http://www.michelcollon.info/boutique/fr/livres/29-arabesque-.html

    « En politique, rien n’arrive par accident », disait Franklin Roosevelt, président des Etats-Unis. Pourtant, les médias ont présenté les révoltes arabes comme des mouvements entièrement spontanés. Oui, les peuples arabes avaient toutes les raisons d’être en colère. Mais le chercheur Ahmed Bensaada révèle aujourd’hui l’implication du gouvernement US qui a travaillé dans l’ombre pour que le changement politique soit à l’avantage des Etats-Unis. S’appuyant sur de nombreuses sources et une analyse minutieuse des câbles Wikileaks, Bensaada montre que, dans chaque pays, des militants prometteurs ont été discrètement financés et encadrés par des organismes US « d’exportation » de la démocratie, aidés des géants du Net Facebook, Google, YouTube et Twitter. Comme lors des révolutions colorées en Europe de l’Est et au Caucase, ces activistes ont été formés sur base des théories du politologue Gene Sharp, et cela bien avant que les manifestations n’éclatent.

  • Boualem Sansal et l’enfumage du monde

    Se glisser dans les habits d’un devancier prestigieux est une tendance récurrente en littérature. C’est le cas de Boualem Sansal dont le dernier roman (1) fait écho au célèbre « 1984 » de George Orwell. Il ne s’agit pas ici de proposer une critique classique de cette fiction dont il se dit qu’elle a de fortes chances de décrocher le très prestigieux prix Goncourt (lequel sera décerné à Tunis au musée du Bardo…). Notons juste, mais ce n’est guère une surprise, que l’ouvrage est soutenu en France par l’habituelle campagne médiatique à propos de la « solitude » de l’auteur dans son pays d’origine, des « menaces » dont il fait l’objet de la part des islamistes ou de la « censure » que lui inflige le pouvoir algérien. Sous le ciel d’Alger-en-Saint-Germain, le quadriptyque « solitude – menace – fatwa - censure » est un excellent argument marketing pour attirer le chaland. Un bla-bla bienveillant, pour ne pas dire paternaliste, qui empêche de se pencher sérieusement sur la valeur littéraire du texte et, plus encore, sur sa pertinence politique.

    Entendons-nous bien. Un roman n’est absolument pas obligé de délivrer un message militant. C’est ce qu’a d’ailleurs trop longtemps ignoré la littérature algérienne d’expression française. Mais quand on a le culot de prétendre reprendre le flambeau d’Orwell, il est nécessaire de bien choisir son sujet car il s’agit tout de même de se projeter dans le futur. L’auteur de « La Ferme des Animaux » ( Animal Farm ) ou de « Hommage à la Catalogne » ( Homage to Catalonia ) a été autant un écrivain engagé qu’un visionnaire. Homme de son temps, combattant les armes à la main contre le franquisme en Espagne, il a su « voir loin » et anticiper la persistance et la mutation des systèmes totalitaires. Ainsi, « 1984 » et son fameux « Big Brother » ne sont pas uniquement la critique du nazisme ou du communisme. Cette inégalable mise en garde vaut encore pour notre époque où la propagande et la mise sous coupe réglée des individus n’est pas l’apanage des seules dictatures.

    Dans la marche de notre monde, il y a, d’un côté, le bruit et la fumée tandis que, de l’autre, on trouve les forces telluriques d’une puissance insoupçonnée qui préparent l’avenir de l’humanité. Dès lors, le choix est simple. On peut enfoncer des portes ouvertes et écrire une énième dénonciation de l’islamisme ce qui, entre autre, confortera les idées reçues à propos de la supériorité morale et politique de l’Occident face à un monde arabe en pleine déroute. Ce faisant, on participera à cette vaste supercherie qui tend à faire croire que le problème principal de la planète est le djihadisme et notamment les agissements du groupe Etat islamique (EI, communément appelée Daech).

    Bien sûr, il faut être clair dans son propos. Il est évident que l’EI est un danger et personne de censé ne peut nier le caractère sanguinaire et totalitaire de cette secte millénariste. Mais l’histoire regorge de multiples devanciers de « Daech », de ces forces du mal – si l’on veut s’en tenir à une approche binaire – qui finissent toujours pas être vaincues avant que n’en apparaissent de nouvelles. Le fond du problème c’est que la focalisation sur ce thème occulte ceux dont Orwell se serait certainement emparé s’il était encore vivant. Où va notre monde ? Qu’est-ce qui le menace, sérieusement ? L’intégrisme religieux ? Ah, que ce thème est bien utile… Débats, livres, dépenses militaires en hausse, lois liberticides, obsessions sécuritaires : pour faire oublier les courbes du chômage qui montent au ciel, l’explosion des inégalités, la mise au pas et la concentration des médias, le pouvoir croissant des multinationales au détriment des Etats et la persistance d’un déséquilibre mondial en matière de répartition des richesses, il n’y a rien de mieux que d’occuper le citoyen en aggravant sa peur.

    Une littérature se revendiquant d’Orwell devrait plutôt évoquer cette révolution technologique en cours qui menace à terme de priver des millions de personnes de travail. Elle devrait s’emparer de cette « uberisation » croissante de l’économie où la convergence entre internet et l’exigence d’une hausse sans fin de la productivité nous mène à une catastrophe sociale d’envergure. Nous vivons déjà dans un monde où de belles expressions comme « économie collaborative » signifient la destruction de milliers d’emplois, la disparition de la protection sociale et le retour du travail payé à la tâche. Bienvenue au dix-neuvième siècle ! Une littérature orwellienne devrait anticiper ces lendemains inquiétants que nous préparent, faute de vigilance politique et citoyenne, les progrès foudroyants de l’intelligence artificielle couplés à ceux de la robotique. Aujourd’hui, déjà, une vie privée et des données personnelles traçables en permanence et transformées en marchandises. Demain, des systèmes intelligents capables de s’auto-dupliquer et de supplanter l’homme ? De le mettre sous tutelle ? De le détruire ? L’auteur de cette chronique est ingénieur de formation et a toujours cru aux vertus du progrès technologique. Mais ce n’est pas une raison pour en éluder les menaces. L’emprise de la machine et « la fin de l’homme » après celle « du travail » est une possibilité que les œuvres d’anticipation du vingtième-siècle ont vu venir mais que la littérature récente persiste à ignorer. Il est peut-être temps de revoir « Le cerveau d’acier » (Colossus : The Forbin Project, 1970), film adapté d’un roman de Dennis Feltham Jones où deux supercalculateurs, l’un américain, l’autre soviétique, prennent « conscience » d’eux-mêmes et décident de détruire l’humanité. Science-fiction ? Pas si sûr…

    Pour en revenir au djihadisme, rappelons simplement qu’Al Qaeda a effectivement détruit les tours jumelles de New York et tué des milliers d’êtres humains mais relevons aussi que cette organisation et ses avatars n’ont certainement pas empêché que des milliards de dollars se déversent dans la Silicon Valley où se bidouille un futur inquiétant. Comment qualifier les années 2000 ? Celles de l’émergence de l’hyper-terrorisme ou bien alors celles du boom des « quatre fantastiques », ces GAFA, autrement dit Google, Apple, Facebook et Amazon, qui dominent le web ? Google, dont les deux fondateurs dépensent des millions de dollars dans le développement de l’intelligence artificielle… Et ce n’est pas un hasard si l’on retrouve ces mêmes personnages, et d’autres « entrepreneurs », aux sources de la recherche sur « l’amélioration » de l’humanité. Oh, pas toute l’humanité mais juste celle qui aura les moyens de payer pour vivre jusqu’à cent ans ou être débarrassées des maladies. Il y a quelques semaines, The Economist consacrait un article sur la thérapie génique avec ce titre édifiant : « Editing humanity » autrement dit, réviser, corriger ou encore améliorer l’humanité. Glaçant…

    Un nouvel ordre mondial, respectivement façonné par le marché, par des principes néolibéraux et libertariens, par une technologie de plus en plus intelligente et par un néo-eugénisme qui ne dit pas encore son nom, voilà ce qui se dessine dans un contexte où les démocraties perdent de leur vigueur et où la presse, exsangue, ne joue plus son rôle de vigie. Cela rend la littérature indispensable encore faut-il qu’elle ne participe pas à cet enfumage dilatoire qui nous fait croire que Daech est bien plus dangereux que des nanotechnologies échappant à tout contrôle. L’islamisme politique et ce qu’il charrie de bigoterie et de comportements régressifs méritent d’être dénoncés. Cela est fait de manière régulière. Quotidienne. Fort de sa notoriété, et souhaitant marcher sur les traces d’Orwell, Boualem Sansal aurait mieux fait de choisir un vrai sujet pour échapper au cadre culturel convenu dans lequel il est lui-même maintenu. Tout aussi important, il aurait pu mettre sa notoriété au service d’un objectif important, celui de permettre à ses propres concitoyens d’échapper aux débats éculés et de sortir de leur isolement intellectuel en prenant la mesure du monde tel qu’il menace d’évoluer.

    [ Akram Belkaïd, Le Quotidien d’Oran ]

    (1) 2084, Gallimard, 288 pages, 19,50 euros

  • « Arabesque américaine » : Printemps Arabe ou révolutions colorées fomentées par les USA ? — Ahmed BENSAADA
    http://www.legrandsoir.info/arabesque-americaine-printemps-arabe-ou-revolutions-colorees-fomentees

    Souvent évoqué, parfois décrié, mais rarement analysé, le rôle des États Unis dans les révoltes de la rue arabe fait enfin l’objet d’un travail sérieux, rigoureux et fort bien documenté. Arabesque américaine* est l’ouvrage d’Ahmed Bensâada, un chercheur algérien établi à Montréal.

    Dès les premières lignes, l’auteur annonce la couleur « une chose est évidente : le mode opératoire de ces révoltes a toutes les caractéristiques des révolutions colorées qui ont secoué les pays de l’Est dans les années 2000. Comme il est de notoriété publique que ces révolutions ont été structurées, formées et financées par des organismes américains, il serait logique de conclure qu’il y a présence d’une main américaine derrière ces révoltes de la rue arabe ». Tous les faits et les arguments présentés sont vérifiables, selon l’auteur, par simple consultation des références mentionnées.