Pourquoi l’état d’urgence et les mesures de haute sécurité ne réussiront pas à arrêter ISIS
Patrick Cockburn | 16 novembre 2015 - CounterPunch | Traduction : Info-Palestine.eu - Dominique Muselet
►http://www.info-palestine.eu/spip.php?article15728
(...) Une autre erreur que font les dirigeants du G20 est de persister à sous-estimer ISIS.
David Cameron a déclaré que le groupe n’était pas digne d’être appelé « État islamique », mais malheureusement, c’est bien un État et, de surcroît, plus puissant que la moitié des membres de l’ONU, avec son armée expérimentée, sa conscription, ses impôts et son contrôle sur tous les aspects de la vie dans la vaste région qu’il gouverne.
Tant qu’il existera, il projettera sa puissance à travers des opérations-suicides comme celles que nous venons de voir à Paris. Parce que les cibles potentielles sont les populations civiles dans leur ensemble, on aura beau augmenter les contrôles de sécurité, cela ne changera pas grand-chose. Les kamikazes réussiront toujours à passer au travers.
La seule vraie solution est la destruction d’ISISn : seule une campagne aérienne américaine et russe, coordonnée avec ceux qui combattent vraiment sur le terrain, peut y parvenir.
L’US Air Force l’a fait très efficacement avec les UPP, ce qui a permis à ces derniers de vaincre ISIS à Kobani, et avec les Peshmergas kurdes irakiens, qui ont réussi à prendre la ville de Sinjar, la semaine dernière. Mais les États-Unis répugnent à attaquer ISIS quand le groupe se bat contre l’armée syrienne ou les milices chiites en Irak. Étant donné que ce sont les deux plus fortes formations militaires combattant ISIS, la force militaire étasunienne est bridée là où elle serait la plus utile.
Compte tenu de la sympathie internationale pour les Français après le massacre à Paris, il est inévitable qu’il n’y ait presque pas de critiques de la politique brouillonne de la France dans le conflit syrien.
Plus tôt dans l’année, lors d’une interview avec Aron Lund de la Fondation Carnegie pour la paix internationale, un des principaux experts français sur la Syrie, Fabrice Balanche, qui est actuellement à l’Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, a déclaré : « Nous avons en 2011-12 été victimes d’une sorte de maccarthysme intellectuel sur la question syrienne : si vous disiez qu’Assad n’était pas sur le point de tomber dans les trois mois, vous pouviez être soupçonné d’être à la solde du régime syrien ».
Il a fait remarquer que le ministère français des Affaires étrangères avait pris fait et cause pour l’opposition syrienne, tandis que les médias refusaient de voir la révolte syrienne autrement que comme la poursuite des révolutions tunisienne et égyptienne. Ils refusaient de voir les divisions sectaires, politiques et sociales qui montraient que la guerre civile syrienne n’était pas aussi simple que cela.
Du fait que l’administration, l’état-major de l’armée, et les services de sécurité de l’État regorgent d’Alaouites, il est presque impossible de se débarrasser de M. Assad et de son régime dont les dirigeants sont issus de la communauté alaouite, sans que l’État ne s’effondre, laissant un vide qui sera comblé par ISIS et ses homologues d’Al-Qaïda.
Malgré les récentes attaques terroristes, il n’existe toujours pas de politique à long terme pour empêcher que cela ne se reproduise.