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  • Le corps ruptile de Bruce Lee
    http://www.laviedesidees.fr/Le-corps-ruptile-de-Bruce-Lee.html

    A propos du #livre de Bernard Benoliel, Opération Dragon de Robert Clouse. Bruce Lee, l’homme cinéma, (Yellow Now, Côté films, N° 17. 2011, 128 p.)


    Une monographie rend justice à Bruce Lee, créateur de son propre mythe, et dont la courte vie se confond avec une lutte anticoloniale menée par les images, en parallèle avec une investigation organique et psychique de haute lignée.

    #décolonisation par le kung fu ? #arts_martiaux via @la_vie_des_idees merci @prac_6.

    Or, Bruce Lee, dont on ne s’est pas selon Bernard Benoliel jusqu’à présent suffisamment avisé qu’il était un vrai cinéaste et le véritable auteur de la poignée de films, réputés futiles, qu’il a tournés avant sa disparition énigmatique à 32 ans, précédant sa gloire posthume, a poussé ce principe jusqu’à ses dernières conséquences : cherchant à exister dans un plan qui travaille à l’annuler, dans un univers cinématographique dominé par le racisme hollywoodien qui ne concevait pas de placer un Chinois en tête d’affiche, il répliqua au refoulement par un défoulement tel qu’il va jusqu’à y faire exploser en images son corps – un corps « ruptile », dit Benoliel, empruntant le terme à la botanique. Il désigne un organisme qui éclate tout seul par le gonflement et le déchirement de ses parties internes. Ce phénomène a pour particularité d’être irréversible : la ruptilité de Bruce Lee se distingue en cela de l’élasticité chaplinienne et passe du côté du tragique.

    • Le #corps de Bruce Lee est avant tout mouvement, mais ce #mouvement peut se décomposer en trois temps. Mouvement retenu, qui se charge de toute la colère du refoulement et de l’injustice qui est littéralement projetée sur lui ; puis, une fois chargé, c’est l’#action, mouvement si rapide que la caméra ne peut le saisir – il faut alors le filmer avec un léger ralenti (trente images secondes) pour que le spectateur puisse en croire ses yeux, tandis que les adversaires, sur l’écran, n’en reviennent pas – et nous jouissons de leur ahurissement car nous avons vu ce qu’ils ne peuvent voir, grâce à la décomposition visuelle du mouvement que permet le cinéma. Bruce Lee prend la pensée de vitesse : il anticipe l’intention ou le geste, de sorte que la réaction précède l’action, et déjoue le schéma trop simpliste sur lequel se fonde la morale hollywoodienne. Nous sommes loin de la dialectique occidentale qui veut absolument que l’action soit réaction à un mal enduré. Notamment parce qu’ici, subtile, la réaction précède l’action en l’anticipant, de sorte que « la défense précède l’attaque et que le coup part dans le temps intentionnel de celui de l’autre » : technique qui « ne passe plus par la préméditation et la décision, qui prend en somme la pensée de vitesse, rend le corps imprévisible et indéchiffrable et le fait accéder à l’autonomie de ses parties agissantes » (p. 52).