L’« incursion » de la Turquie en Irak est une manœuvre froide et calculée. Et, une fois encore, le nom de ce jeu est — quoi d’autre ? — Diviser pour Régner.
La Turquie a envoyé au Kurdistan irakien — qui fait partie de l’Etat irakien — un bataillon constitué de pas moins de 400 soldats, soutenu par 25 chars d’assaut M-60A3. A présent, le nombre de bottes turques sur le sol au camp de Bachika, au nord-est de Mossoul, atteindraient désormais un total d’environ 600. Pour faire court, ce n’est pas un « camp d’entraînement » — comme Ankara le débite. C’est une véritable base militaire, peut-être permanente.
Cet accord louche a été passé le mois dernier, à Erbil, entre le Gouvernement Régional du Kurdistan (KRG) ultra-corrompu et le ministre turc des affaires étrangères d’alors, Feridun Sinirlioglu.
Des torrents de propagande turque jurent qu’il ne s’agit que « d’entraîner » les Peshmergas pour combattre L’Etat Islamique/Daech. Foutaises ! Le fait crucial est qu’Ankara est terrifié par l’alliance « 4+1 » qui combat l’Etat Islamique, alliance qui unit l’Iran, les Chiites irakiens et l’Armée arabe syrienne (AAS), de même que le Hezbollah, à la Russie.
En Syrie, Ankara est quasiment paralysé, après le « coup de poignard dans le dos » en abattant le Su-24 : révélations russes de complicité entre la première famille turque et le pétrole syrien volé (Bilal Erdogan, alias « Mini Me », nie tout en bloc) ; forces aériennes russes qui pilonnent sans relâche la cinquième colonne turkmène de la Turquie. Sans mentionner le déploiement des S-400 et même d’un sous-marin de troisième génération équipé de missiles de croisière Kalibr.
Ankara détourne donc l’attention vers l’Irak avec une « contre-alliance », faite de la Turquie, du KRG (qui vend — illégalement — du pétrole à la Turquie) et de Sunnites au nord de l’Irak, sous le prétendu leadership de la tribu tentaculaire Nuceyfi à Mossoul.
C’est le néo-ottomanisme dans toute sa grandeur en action. Nous ne devrions jamais oublier que pour l’AKP, au pouvoir à Ankara, le nord de la Syrie et le nord de l’Irak ne sont rien d’autre que des provinces de l’ancien empire ottoman, une extension orientale de la province turque du Hatay. Le phantasme (inavoué) du « Sultan » Erdogan est d’annexer tout cet ensemble.
Pendant ce temps, Daech contrôle toujours Mossoul. Mais les Sunnites irakiens — de même que l’Armée irakienne — préparent lentement une offensive. Donc, ce qu’Ankara veut avec sa base militaire à proximité de Mossoul, est d’être de la partie, et venant s’ajouter à cela deux programmes « invisibles » : protéger leur cinquième colonne turkmène, où qu’elle se trouve, et avoir plus de bottes sur le terrain pour combattre — qui d’autre ? — les Kurdes du PKK qui ont pris refuge dans le Kurdistan irakien.
Toute la logique du Sultan Erdogan est que Bagdad ne gouverne plus le nord de l’Irak (là, il a raison). Mais le problème, pour Ankara, est que les puissances réelles dans cette région pourraient s’avérer être les Chiites et le PKK (c’est tiré par le cheveux, mais c’est le raisonnement d’Erdogan).