person:bois de vincennes

  • Ghédalia Tazartès - interview et live
    http://www.radiopanik.org/emissions/moacrealsloa/ghedalia-tazartes-interview-et-live

    Ghédalia Tazartès est né à Paris en 1947 de parents juifs espagnols de Salonique.

    Photo @ Laurent Orseau

    Après la mort de sa grand-mère il commence à chanter, seul, pour lui, dans le Bois de Vincennes.

    Sa mère était elle-même chanteuse, connue sous le nom de Betty Riche. Il pratique des instruments en autodidacte, joue de l’accordéon, du bol tibétain, des percussions, des flutes. C’est un orchestre à lui seul.

    Ses disques solo ont tous été enregistrés dans la même pièce depuis 1974. Son utilisation des bandes magnétiques rappelle la musique électroacoustique et la musique concrète. La voix est son instrument de prédilection. On pourrait dire ses voix.

    Il chante, parle, dans différentes langues, réelles ou inventées. Il incante, hypnotise, comme un chamane et génère des musiques qui pourraient être (...)

    http://www.radiopanik.org/media/sounds/moacrealsloa/ghedalia-tazartes-interview-et-live_05730__1.mp3

  • « Peintures des Lointains », des images à « montrer sans honte ni tabou » - Afrique - RFI
    http://www.rfi.fr/culture/20180312-peintures-lointains-quai-branly-images-honte-tabou

    C’est une partie méconnue de la collection du #musée du #Quai_Branly. Quelque 200 œuvres d’artistes européens qui ont représenté d’autres continents et populations à l’époque de la #colonisation. Beaucoup ont été acquises pour l’#exposition_coloniale de 1931, à une époque où l’on montrait aussi des humains en cage au Bois de Vincennes. Et la plupart de ces tableaux n’étaient plus sortis des réserves depuis longtemps.

    #orientalisme #ethnographie #peinture #art #propagande

  • Je vais de ruelles en venelles
    Dans le Bas-Montreuil
    Passant même chez des voisins

    Bloqué je suis contraint
    De demander secours
    Fort gêné

    Mais en fait pas du tout
    J’appartiens, sans le savoir
    À un réseau d’enfants de la lune

    Sortant après échange d’une belle hospitalité
    Je croise une fanfare fantasque
    Et ses deux retardataires qui font de l’écho

    Sur le chemin du Tracé provisoire
    Je croise Jean-Luc Guionnet qui sort de répèt
    Et me propose de me joindre à leur trio

    Papa on va être en retard
    Attends il faut que je note mon rêve
    Soupir de lassitude de Zoé

    Ton de la nana qu’on interviewe
    Des années plus tard : « on arrivait en retard
    Au collège tous les matins à cause de ses rêves »

    Chemin inhabituel
    Pour éviter pentes verglacées
    Bois de Vincennes enneigé, merveille

    Autoradio
    Le gamin-président en chef de guerre
    Envie de coller ces chroniqueurs contre un mur

    J’imprime en hâte (et en cachette)
    La dernière version de Frôlé par un V1
    Dans le bac de réception je vois des corrections !

    Je relis le début
    De Je ne me souviens plus
    Avant de le confier à Mathieu. Ça va

    Je bois café
    Sur café
    Sur café

    Je progresse avec lenteur
    Viel homme, jusqu’au BDP
    Sur des trottoirs verglacés

    Je reprends Frôlé par un V1
    Depuis le début
    L’idée d’un index des morts et des vivants

    Jour de marché
    Le BDP est bruyant
    Mon voisin nuit à ma concentration

    Je passe par des petites rues
    Pour le retour en open space
    Erreur de débutant, verglas. Ça va

    Je dois retourner à l’étude de mon conseil
    Signer des papiers
    Quelle torture que celle du papier

    C’est jeudi
    Dal
    D’Adèle

    On file au Keaton
    Gaspard va au mariage
    D’Antony Cordier

    De bons moments c’est sûr
    Une gentille folie
    Mais que de stéréotypes aussi

    Une sorte de film immature
    Un film qui a l’allant de la jeunesse
    Et qui ne voit pas plus loin que le bout de son nez

    En sortant Zoé
    Qui a bien aimé, elle
    Allez, dis-moi ce qui déconne

    On rentre finalement de bonne heure
    Un peu de guitare, au casque
    Et de la lecture, Olivier Cadiot

    #mon_oiseau_bleu

  • La tour
    Eiffel
    S’effondre

    En allant faire mon marché
    Je suis surpris
    Que nul n’a l’air au courant

    Et je suis sur le point d’échanger
    Avec la maraichère
    Vous avez vu la tour Eiffel s’est effondrée

    Avant de me souvenir
    In extremis
    Que c’était en rêve

    Déjà qu’elle me trouve
    Etrange
    Si elle savait

    Après avoir rangé
    Mes courses je vérifie
    Sur internet

    Promenade dans le Bois de Vincennes
    J’emmène Daniel voir la maison de mes rêves
    La maison tunisienne dans l’ancien jardin des colonies

    Il voit très bien ce que je veux dire
    Il y a une nouvelle installation
    De Johan Le Guillem

    Je m’aperçois dans notre conversation
    Que je suis devenu incapable de parler du bois
    Sans mentionner Le bois dont sont faits les rêves

    Filets de tacaud (il en restait)
    Papillotes au curry
    Nouilles sautées au basilic

    On file au Keaton
    Teheran tabou
    d’Ali Soozandeh

    L’astuce suprême pour contourner
    La censure iranienne
    Le film d’animation

    Là ou Asghar Farhadi suggère
    Ali Soozandeh
    Défonce tout sur son passage

    J’enseigne l’art
    Modeste
    Du crumble à Daniel

    J’enseigne l’art
    À peine moins modeste
    Des lasagnes à Daniel

    Nous réparons (enfin !)
    Le tiroir de la cuisine
    Vieilles blagues de chantier

    Nous rions
    À cinq
    Autour de la table

    Sarah a des soucis
    Avec son ordinateur
    Son papa est informaticien

    Trois parties d’échecs
    Silencieuses avec Émile
    Daniel lit Jerusalem

    #mon_oiseau_bleu

  • Dans mes rêves
    Je pars aux sports d’hiver
    En voiture de sport !

    Dans mes rêves
    Mes amis et moi avons affaire
    Avec un propriétaire retors

    Dans les rêves
    Même quand je suis diplomate
    Mes amis me donnent tort

    Dans mes rêves
    Je roule en voiture de sport
    Mais je ne roule pas sur l’or

    Dans mes rêves
    Je sais tout faire
    Je suis très fort

    Catastrophe
    C’est dimanche matin
    Et plus de café !

    Sur le marché
    Une pluie d’automne vient salir
    Les courgettes de fin d’été

    Dimanche matin
    Matinée d’écriture
    Je chasse les Fantômes

    Travaillant désormais
    Sur quatre textes à la fois, immodestement
    Je me fais penser au peintre Arnulf Rainer

    Ich male
    Zehn oder zwanzig
    Bilder zur gleichen Zeit

    Un peu de flottement en fin de matinée
    Je cuisine des rates et je prépare
    Une grande salade de chicons, ça va

    Un peu de flottement en fin de matinée
    Je reçois le mail de Daniel
    En réponse au récit de mon rêve, ça va

    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/wayne_shorter.mp3

    Un peu de flottement en fin de matinée
    J’écoute un vieux disque
    De Wayne Shorter (elle détesterait), ça va

    Brigitte Macron
    Entreprend de dépoussiérer
    L’Elysée

    Une artiste dissidente chinoise
    Se sert du Désordre pour organiser
    La fuite d’autres artistes dissidents

    La Sécurité Sociale
    M’écrit pour me dire que j’ai épuisé
    Mon crédit d’arrêts-maladie, je ne suis plus couvert

    L’artiste chinoise dissidente
    Et la Sécurité Sociale disparaissent
    Dans la bonde de la douche, après la sieste

    Pour ce qui est
    De la Sécurité Sociale
    Ce n’est pas dommage

    Promenade au Bois de Vincennes
    Quasi désert juste après une ondée
    Tour du lac des Minimes, le petit tour

    Zoé prend Emile et moi par les bras
    Elle ironise : « là, entre vous deux
    Je ne devrais pas me faire agresser ! »

    Je vais chercher
    Du pain frais
    Pour le goûter !

    Je prépare
    Un crumble
    Aux poires

    Pendant la cuisson
    Attendant que le sèche-linge
    Ait fait son office, j’écris, un peu

    Zoé retourne à ses devoirs
    Emile retourne à sa promenade
    Je retourne à la pile de linge

    Je suis surpris moi-même
    Par l’étrange portée
    De Fantômes . L’ai-je vraiment écrit ?

    Aberanne Salisburry
    Est très ponctuelle, c’est toujours
    À 21H23 qu’elle voudrait fµck me

    Patates douces
    Coriandre
    Fromage de feta

    Et soudain Émile
    Me révèle un incident
    Survenu il y a cinq ans !

    La portée de tout ceci
    La solidarité indéfectible de Zoé
    L’intelligence claire de mes enfants

    La profondeur
    Avec laquelle
    Cela s’insinue en moi

    Un petit quart d’heure
    De Comment je me suis disputé
    N’a pas le pouvoir de me dérider

    J’éteins
    Mais
    Je ne dors pas

    #mon_oiseau_bleu

  • Un policier du Val-de-Marne dénonce les dérives de la lutte contre l’immigration illégale
    http://m.leparisien.fr/amp/ablon-sur-seine-94480/val-de-marne-un-policier-denonce-les-derives-de-la-lutte-contre-l-immig

    Des objectifs chiffrés. Ces contrôles d’identité doivent aboutir à de plus en plus de conduites au poste, assure le policier. Selon lui, elles étaient de 5 « initialement », avant « de passer à 7 puis à 10 actuellement ». Le fonctionnaire assure avoir « dû justifier à plusieurs reprises du nombre insuffisant d’étrangers en séjour irrégulier conduits au poste ». « Aucun objectif chiffré n’est fixé aux policiers en matière de lutte contre l’immigration irrégulière », assure de son côté la Préfecture de police.

    « Remplir le Centre jusqu’à ce qu’il déborde ». L’OPJ garde en travers de la gorge la demande formulée en juin par le sous-directeur de la lutte contre l’immigration irrégulière de « remplir le centre de rétention [de femmes] jusqu’à ce qu’il déborde ». La raison ? Peu remplie à l’époque, la partie réservée aux femmes du Centre de rétention administrative de Paris, situé dans le Bois de Vincennes, risquait de fermer si bien qu’il aurait fallu « aller les coucher au Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne) », d’où « une perte de temps ». « Le CRA femme va fermer ses portes dans quelques semaines. Son taux d’occupation inférieur à 30 % est très faible. Ceci démontre qu’aucune instruction n’est donnée pour augmenter le nombre de femmes conduites au CRA », assure la Préfecture de police malgré le document que nous reproduisons.

  • Dans tes rêves
    Tu refais
    Tes longueurs de piscine

    Gérald de chez Spam & co
    T’écrit, il t’informe qu’il a trouvé
    Le remède contre l’obésité : le vinaigre de cidre

    Marché, fruits et légumes d’été
    J’ai envie
    De tout acheter

    Sarah, Jérôme, Julien, Clémence, Henriette, Marco
    Anna, Madeleine, Nathan, Adèle, Emilio
    Sara et moi, Pépé, buffet d’été

    Bois de Vincennes,
    Emile et moi
    Sommes des guides

    Les curiosités du Bois de Vincennes
    Le jardin botanique en ruine, la maison de mes rêves en ruine
    La forêt de bambous défrichée. Et le totem !

    Un dimanche
    En familles
    Mêlées

    Chaleur accablante
    Air immobile
    À quand l’orage, la libération ?

    Dans le Bois de Vincennes
    Corps ivres de fatigue
    Jetés en travers de couvertures

    Deux jeunes femmes allongées
    Dans de hautes herbes lisent
    Ne dépassent que leurs genoux

    Pas une note
    De guitare dans la tête
    De toute la journée !

    La guitare
    C’est l’instrument
    Du diable

    Rentrés du bois
    Pas de message
    Qu’est-ce que je m’en fous !

    Soir dans le garage
    Tentatives en html
    Comment fait-on déjà ?

    Pourtant
    Je dois retrouver
    De tels chemins, il le faut, pour Isa

    La cassonade, Loos
    Du bois blanc, rentrée scolaire
    Les odeurs, fameuses catapultes !

    La ville assommée de chaleur
    Attend son orage
    Un dimanche soir d’été

    On ne vit pas
    Des étés
    Par centaines !

    On ne vit pas des étés
    Par centaines
    Profite de celui-là

    On ne vit pas des étés
    Par centaines
    Profite des fruits rouges

    On ne vit pas des étés par centaines
    Aujourd’hui, tu as offert les Saisons
    À une jeune femme !

    http://www.desordre.net/musique/peacock_vignette.mp3

    Solo
    De contrebasse
    De Gary Peacock

    Tel solo de contrebasse, écouté cent fois,
    Chaque fois tu te souviens
    De sa première écoute, tu étais jeune alors !

    Envie de vieil homme
    Tu voudrais passer une soirée
    Avec toutes les femmes de ta vie

    Non
    Pas
    Toutes !

    Pêche
    Abricot
    Cerises

    Tu aides ta fille Sarah
    Avec un devoir d’arts plastiques
    Elle est surprise par ta compétence !

    Marché d’été
    Deux familles réunies par amitié
    Il fait chaud au bois, c’est l’été !

    #mon_oiseau_bleu

  • salve d’interdictions de séjour avant les élections

    via Jef Klak sur FB :

    Aujourd’hui salve d’interdiction de séjour pour la ville de St Mandé distribuées aux domiciles de camarades habitant le Val de Marne pour la soirée de demain soir.
    Pourquoi ? Car le FN a prévu de se rassembler au Bois de Vincennes, sur la commune de St Mandé, en cas de victoire...
    En utilisant l’état d’urgence, l’Etat interdit la contestation antifasciste, en mettant tout en oeuvre pour que le rassemblement post-éventuelle victoire du #FN se passe le mieux possible...
    Au secours.

    http://paris-luttes.info/une-interdiction-de-manif-qui-8084

    commentaire sur FB de Victor B. (qui a reçu hier une interdiction pour aujourd’hui sur Saint-Mandé et de nouveau, ce matin, une interdiction pour lundi toute la journée à Charles de Gaulle - Étoile et ses alentours) :

    Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent chez toi des policiers en uniforme avec des arrêtés préfectoraux.

  • http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/haden-blackwell-cherry.mp3

    (ouh la comment je sens que je vais me faire engueuler par @intempestive et @reka sur ce coup-là)

    (Il est possible de lire cette chronique depuis cette adresse http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/index_194.htm laquelle donne accès aux nombreux liens hypertextes qui l’émaillent)

    J – 8 : Fin.

    Oui, je sais il y a rupture, je ne vais pas jusqu’au bout. Je n’irai pas jusqu’au bout. Et je reconnais mon échec. A vrai dire cet échec, si c’en est un, est le cadet de mes soucis.

    Il y a une chose que je veux faire désormais, apprendre à boucler, à écrire le mot Fin quand c’est effectivement la fin. Ne pas laisser les projets ouverts, non finis.

    Ca a l’air de me prendre comme ça. En fait pas du tout. Celles et ceux qui lisent entre les lignes, se sont sans doute rendus compte qu’en filigrane de Qui ça ? grandissait une histoire d’amour, j’ai tenté d’être le plus pudique et allusif possible (en gardant notamment des tas de pages secrètes, et les garder pour plus tard, peut-être, si Qui ça ? un jour devenait, par exemple, un livre en papier, au train où vont les choses dans le milieu de l’édition, il y aurait prescription quand cela sortirait), mais j’ai, malgré tout, produit quelques allusions pour la justesse de l’éclairage qu’elles apportaient — je n’aurais pas voulu que l’on me trouve anormalement bienveillant dans une chronique sans raison, il faut croire. Cette histoire d’amour vient de connaître une fin cassante qui me laisse sans force. Sans force comme on l’est au terme d’une nuit sans sommeil, nuit pendant laquelle j’ai eu peur et froid, nuit pendant laquelle il m’est arrivé de sangloter comme un enfant, une nuit de faille

    Il importe désormais que je me retranche.

    Le but plus ou moins avoué et plus ou moins annoncé de Qui ça ? était de tenir le journal d’une indifférence militante à la mascarade électorale en cours, je m’étais donné comme but d’en ignorer le plus possible, de systématiquement regarder ailleurs, un peu comme on se coupe par exemple de la télévision et tout d’un coup on se rend compte que l’on pense différemment sans le bruit de fond de la télévision justement, qui est tout sauf anodin — personnellement des décennies que je suis coupé de ce bruit de fond au point de de me demander si j’y ai vraiment été exposé. Ce but est atteint, mon indifférence est complète, pour le coup cette indifférence non feinte et complète est une victoire. Une victoire éclatante mais une victoire à la Pyrrhus. J’y laisse des plumes, c’est certain.

    Entre autres choses je réalise qu’en mettant un point final à Qui ça ? je mets également une manière de point final au cycle des Ursula . Et, est-que ce cycle des Ursula n’est pas aussi le dernier chapitre de Désordre . Entendons-nous bien. Désordre est un projet ouvert et sans bords et il apparaît donc assez vain d’y chercher ou d’y trouver une fin. Il y a bien une première page, et elle n’est pas jojo, il faut bien le dire, mais c’est la première, il y a une fausse dernière page aussi (voulue ironique), dont je sais où elle se trouve dans l’arborescence du Désordre , mais je n’ai plus aucune idée du chemin initial qui y mène, mais on comprend bien que ni cette première page, désormais uniquement accessible depuis la page historique du Désordre , ni cette fausse dernière page peuvent constituer des bords, des fins, ou même un début.

    En 2009, lorsque j’animais un stage de construction de sites Internet à l’école du Documentaire à Lussas, un stagiaire, Frédéric Rumeau pour ne pas le nommer, a eu cette question, le jour où je présentais le site et, comme me l’avait demandé Pierre Hanau, d’en donner à voir les ressorts de narration, Frédéric donc, m’avait posé cette question, mais pourquoi est que ce projet est sans fin, est-ce que vous ne pourriez pas, comme on fait avec un film, le terminer et en commencer un autre ? C’était une putain de question et elle ne m’a plus quitté depuis. Parfois cette question se rapprochait de moi avec beaucoup de prégnance, d’insistance même. Par exemple, début 2014, quand j’ai décidé de tenter une première grande expérience d’Ursula (un autre projet issu des stages de Lussas), certes je l’ai développée à l’intérieur du Désordre, pour commencer, mais dans mon idée, une fois que cette dernière aurait une forme satisfaisante, aboutie, je la déplacerai, et c’est pour cette raison d’ailleurs que ce soit le seul endroit du Désordre où il y a de nombreux fichiers doublons, notamment sonores, parce que je voulais pouvoir exporter Ursula hors du Désordre en un www.ursula.net qui n’a jamais vu le jour en tant que tel. Après six mois de développement en secret de ce projet, je me suis rendu compte que cela n’avait pas de sens qu’ Ursula était bien la fille du Désordre et que cela permettait même de donner une épaisseur supplémentaire au Désordre , d’autant qu’ Ursula commençait elle-même à produire des petits, notamment Le Jour des Innocents , le journal de Février , Arthrose , et donc Qui ça ? il était donc temps de réintégrer la fille prodigue du Désordre dans le désordre.

    Il existe plusieurs formes Ursula , l’initiale qui est assez roots , mais dont le principe est sain et bon, développé à la demande de Pierre Hanau pour Lussas. Puis il y a la première vraie Ursula , celle alimentée pendant toute l’année 2014, ses bouquets, son premier vrai enfant, Le Jour des Innocents qui est sans doute l’une des réalisations du Désordre dont je suis le plus fier et qui m’aura permis de passer le cap des 50 ans dans une manière de joie solaire, je sais on ne dirait pas sur la photographie.

    Février est la suite quasi naturelle, inscrite dans une logique de flux notamment d’images qu’il était presque inhumain, sans exagération de ma part, de tenir pour un seul homme, d’ailleurs le matériel a cédé un peu avant moi, l’appareil-photo, épuisé, au bout de presque 300.000 vues, chez le vétérinaire, ils n’en revenaient pas, ils n’avaient jamais vu un D300 usé jusqu’à la corde de cette manière, puis l’enregistreur, personne ne m’ayant prévenu qu’un tel appareil — pourtant vendu avec sa coque protectrice, j’aurais du me douter —, n’avait pas la robustesse d’un appareil-photo et ne devait en aucun cas être trimballé dans ma besace avec aussi peu de soin. Puis ce fut l’appareil-photo qui faisait office de caméra, lui n’a pas résisté à mon empressement lors de la réalisation d’une séquence de time lapse truquée, l’eau dont j’avais les mains pleines dans cette réalisation a pénétré le boitier, c’est désormais un ex-appareil-photo. Guy, mon ordinateur s’appelle Guy, a lui aussi manqué de lâcher, trop souvent soumis à des traitements en masse d’images et à des calculs de séquence vidéo qui n’étaient plus de son âge, il a manqué d’y passer, désormais il est à la retraite comme les vieux chevaux, je ne monte plus dessus mais on se promène encore ensemble.

    Bien sûr j’ai fini par racheter un appareil-photo tant il m’apparaissait inconcevable de n’en pas disposer d’un, ne serait-ce que pour photographier l’enfance autour de moi, leur laisser ce témoignage, mais il est étonnant de constater comment la frénésie dans laquelle j’avais été conduit avec la tenue du journal de Février a laissé le pas à un recul sans doute sain. Le seul petit flux que j’ai laissé ouvert est finalement celui de l’arbre du Bois de Vincennes, et sans doute que je continuerai avec l’entrée du hameau dans les Cévennes. Mais cette espèce de sauvegarde du réel, du quotidien, c’est comme si j’avais, enfin, compris, d’une part, sa vacuité, son impossibilité et même l’épuisement de soi qui se tramait derrière. Quand je pense qu’il m’arrive désormais de faire des photographies avec mon téléphone de poche !

    Ces deux dernières années, j’ai surtout passé beaucoup de temps à écrire. J’ai fini par reprendre Raffut qui était en jachère, sa première partie presque entièrement écrite, que j’ai achevée en un rien de temps et, dans la foulée, j’ai écrit la seconde partie. Quasiment au moment même où je mettais un point final à Raffut , sont survenus les attentats du 13 novembre 2015 dont j’ai réchappé miraculeusement en n’allant finalement pas dîner au Petit Cambodge . Le vertige que cela m’a donné, je l’ai soigné en écrivant Arthrose en un peu moins d’un mois et demi, j’y étais attelé tous les soirs jusque tard, j’avais commencé par en écrire le début de chaque partie ou presque et je faisais mon possible pour rédiger ces parties ouvertes en faisant appel à des souvenirs et des sensations encore tout frais. Ces deux rédactions coup sur coup ont lancé une dynamique, ont creusé un sillon, et je me suis lancé dans la réécriture d’ Une Fuite en Egypte avec l’aide précieuse de Sarah, puis de J. , puis de Je ne me souviens plus , puis, la première page de Punaises ! , les cinquante premières pages des Salauds , et au printemps j’entamais Elever des chèvres en Ardèche , sur lequel je continue de travailler encore un peu mais l’essentiel est là. Et il faudrait sans doute que je reprenne Portsmouth , et j’ai seulement brouilloné le début de La Passagère — je me lance courageusement dans la science fiction féministe.

    En septembre j’ai eu l’idée de Qui ça ?

    Arthrose j’avais décidé dès le début que ce serait un récit hypertexte ce que j’ai finalement réussi à faire, cela aura été du travail, mais un travail dont je me suis toujours demandé si quiconque en avait pensé quoi que ce soit, en tout on ne m’en a rien dit.

    Avec Qui ça ? , j’ai eu l’idée de faire vivre le texte en cours d’écriture sur seenthis , en même temps que j’expérimentais avec une nouvelle forme Ursula . Mais même pour les parties de Qui ça ? qui demandaient un peu de travail avec les images ou encore les mini sites qui le composaient de l’intérieur, j’ai senti que mon enthousiasme était moindre. J’ai eu un regain d’intérêt quand j’ai eu l’idée de faire en sorte que les différentes Ursula soient imbriquées les unes dans les autres, mais une fois réalisé (et cela n’a pas pris plus d’une heure), le plaisir était comme envolé, une fois que mon idée a été entièrement testée.

    Finalement elle est là la question, c’est celle du plaisir, de mon bon plaisir (et de mon propre étonnement parfois) quand je travaille dans le garage. Et le plaisir ces derniers temps était ailleurs, plus du tout dans le brassage de milliers de fichiers, surtout des images, au point qu’à force d’être laborieux et de peu jouir finalement, j’ai fini par me tarir. Pour le moment, je ne vois plus comment je pourrais encore secouer le Désordre , lui faire faire je ne sais quelle mue, je ne sais quelle danse, il faut dire aussi qu’à l’image du taulier, l’objet est un danseur lourd, 300.000 fichiers tout de même. Et puis je vois bien aussi que mes manières de faire ont vécu, qu’elles ne sont plus du tout comprises de la plupart des visiteurs qui doivent rapidement se décourager à l’idée de devoir manier ascenseurs, chercher les parties cliquables des images, naviguer, bref tout un ensemble de gestes qui ne sont plus attendus, qui sont entièrement passés de mode et avec eux ce qui relevait du récit interactif, peut-être pas, disons du récit hypertexte.

    Il faut que je me régénère, que je trouve de nouvelles idées. Si possibles compatibles avec les nouveaux usages. Ce n’est pas gagné.

    Paradoxalement avec la sortie d’ Une Fuite en Egypte en livre papier, le format du livre m’est apparu comme un havre, une retraite bien méritée en somme. En écrivant des livres, je n’ai plus besoin d’un ou deux ordinateurs connectés à un scanner, à une imprimante, avec une carte-son digne de ce nom, un lecteur de CD et DVD pour extraire des morceaux de musique et des bouts de films, des disques durs et des disques durs dans lesquels déverser des milliers d’images, des centaines de milliers d’images en fait, des logiciels pour traiter en nombre ces images, les animer éventuellement, les monter et, in fine, un programme également pour écrire le récit hypertexte qui reprend en compte toute cette matière première et la mettre en ligne. Une montagne, en comparaison d’un petit ordinateur de genou, simplement muni d’un sommaire traitement de texte et des fichiers, un par texte en cours, que je m’envoie par mail de telle sorte de pouvoir les travailler d’un peu partout, y compris depuis le bureau.

    Or je me demande si après dix-sept années de Désordre , je n’aspire pas un peu à la simplicité. Me recentrer, me retrancher. Par exemple, j’ai l’intuition que cela pourrait me faire du bien à la tête de ne pas avoir à mémoriser, et faute de pouvoir le faire, de devoir chercher mes petits dans cet amas de fichiers, de répertoires, de sous-répertoires et d’arborescences foisonnantes. En revanche je sais aussi très bien que si je retire mes doigts de la prise, il n’est pas garanti que je sois de nouveau en capacité dans quelques mois, dans quelques années de m’y remettre, le Désordre c’est un vaisseau pas facile à manier dans une rade, faut toujours avoir en tête ses dimensions et ses proportions et se rappeler des endroits où sont stockés objets et commandes — et je ne peux plus compter sur l’hypermnésie qui était la mienne il y a encore une dizaine d’années, ma mémoire du court terme a été sérieusement érodée par des années d’apnées nocturnes.

    Les prochains temps, je vais continuer le chantier en cours qui consiste surtout à reprendre toutes les pages qui contiennent un fichier sonore ou vidéo (et elles sont assez nombreuses, bordel de merde) pour les mettre dans un standard universel et qui le restera j’espère plus de six mois. Il y a aussi quelques chantiers de peinture ici ou là que j’ai pu laisser en l’état pendant ces dernières années en me promettant d’y revenir, j’ai gardé une liste de trucs à revoir. Je pourrais, j’imagine, de temps à autre penser à une petite série d’images, mais il ne sera plus question de remuer le site de fond en comble comme j’ai pu le faire les trois dernières années. De même je me garde le canal ouvert sur le Bloc-notes du Désordre et son fil RSS pour ce qui est de divers signalements — comme par exemple de vous dire que je vais présenter, lire et signer Une Fuite en Egypte , le mardi 16 mai à 19H30 à la librarie Mille Pages de Vincennes (174 Rue de Fontenay, 94300 Vincennes, métro Château de Vincennes) — mais qui pourrait dire que ce n’est pas la fin ? Ce que les joueurs de rugby appellent la petite mort , le jour où vous décidez que ce n’est plus de votre âge de mettre la tête où d’autres n’oseraient pas mettre les mains, le jour où l’on raccroche les crampons, le dernier match, le dernier placage, le dernier soutien, un sourire, des poignées de main et c’est fini.

    Il y aura au moins une chose que je regrette de n’avoir pas faite et que je ferai peut-être un jour, c’est le projet que j’avais intitulé Tuesday’s gone . Mais cela suppose un équipement dont je n’ai pas les moyens pour le moment — un scanner de négatifs haute définition —, et de partir à la recherche de mes archives américaines. Ne serait-ce que pour faire la sauvegarde de cette étrange partie de moi, la partie américaine, ses images, ses souvenirs, ses notes. Plus tard. Si j’en ai la force, l’envie. Je devrais sans doute déjà réserver le nom de domaine www.tuesdaysgone.net !

    Et au fait, à toutes celles et ceux auxquels j’ai demandé de s’arranger pour ne pas me faire partager les contours de la mascarade électorale en cours et de faire attention de me maintenir dans l’ignorance même du résultat final, vous êtes relevés de votre devoir, vous pouvez bien me le dire, ou pas, désormais je m’en fous royalement. Mais d’une force.

    Adieu A. C’était merveilleux de vous aimer et d’être aimé par vous, au point d’être à ce point douloureux ce matin, après cette nuit.

    Back to the trees.

    Merci à mes amis, tellement chers, qui m’ont soutenu pendant cette semaine de précipice, J., Sarah, Martin et Isa, Jacky, Valérie, Clémence, Daniel, Laurence, ça va, je vais remonter la pente, je remonte toutes les pentes jusqu’à la dernière chute.

    FIN (possible) du Désordre .

    Le Désordre reste en ligne, je rétablis même sa page d’accueil avec le pêle-mêle qui est finalement sa page index naturelle.

    #qui_ca

    • Merci @intempestive je pensais que tu me gronderais, mais je vois que les raisons qui m’amènent à ça sont compréhensibles, ce qui est une forme de soulagement. Oui, je ne suis pas mourru, je vais réfléchir à autre chose, continuer d’écrire, je reprendrai la photographie quand j’en aurais envie. Le moment est bien choisi pour une pause, pour la petite mort des rugbymen .

    • Je note, en revanche, c’est encourageant, que, désormais, je constate, de plus en plus souvent, que déchiffrant rapidement les gros titres de la presse à scandales, chez le kiosquier, je ne connaisse presque plus jamais les noms propres des personnes dont il est question dans l’équivalent français de la presse populaire anglaise, que les noms et les visages de toutes ces personnes, apparemment célèbres, célèbres pour quels talents, je préfère ne pas le savoir ni l’apprendre, ne me disent rien, n’évoquent rien. Pourtant je vais souvent au cinéma, je pourrais de la sorte reconnaître ici ou là le visage de tel acteur ou telle actrice, mais en fait non, quant aux vedettes de la variété et de la télévision, là je suis absolument sans repère. Pas de manchots non plus dans mon panthéon. Et même, même, je dois avoir déjà commencé il y a quelques années ce travail de désintérêt de la chose publique, parce que nombres de personnalités politiques commencent à me devenir inconnues, ou interchangeables, ce qui est un excellent signe, ainsi je crois que je ne serai pas nécessairement capable, même si ma vie en dépendait, de différencier des types de droite comme Laurent Wauquiez, Luc Chatel, François Baroin, David Martinon, Benoît Apparu, Éric Ciotti, leurs visages sont interchangeables quand à me souvenir des faits saillants de leur parcours, je me félicite de n’en rien savoir, ils sont à mes yeux insignifiants, est-ce à dire qu’ils n’ont sur moi aucun pouvoir ? Or c’est vraiment dans cette direction émancipatrice que je voudrais aller, celle qui retire, à tous ces très sales types de droite, la dernière once de pouvoir dont ils pensent sans doute se prévaloir, et, en vrai situationniste, les faire rejoindre les rangs des personnalités du spectacle, les pousseurs de citrouille, les brailleuses, les musiciens sans oreille, les starlettes et les belles gueules du cinéma, toutes ces légions d’insignifiants. Les ranger enfin à leur place, l’insignifiance. L’insignifiance de celles et ceux qui passent à la télévision. Qu’on ne regarde plus.

      Ignorer.

      Ignorer jusqu’au nom du prochain, ou de la prochaine, président, ou présidente, de cette république, agonisante.

      Voilà. Fin de parcours pour cette raie-publique qui se vautre dans la fange de l’industrie du spectacle. Ite missa est ... ainsi seront renvoyés à leurs vacuités les derniers fidèles du culte électoral.

  • Comme promis à @intempestive et @reka

    J – 100 : Pour faire une chouette tarte tatin aux poires. Installez sur la platine le disque de Paul Bley (piano) avec John Surman (anches), Gary Peacock (contrebasse) et Toni Oxley (batterie préparée), versez un monticule approximatif de farine, creusez-y un petit puis dans lequel il faut ajouter une quantité approximative de beurre, un peu de seul et un filet d’huile. Mélangez jusqu’à obtenir quelque chose d’à peu près homogène, puis ajoutez un peu d’eau, pétrissez, rajoutez un peu d’eau, pétrissez, répétez l’opération jusqu’à ce que la boule formée transpire, roulez la alors dans la farine, puis la réservez dans un bol au réfrigérateur. Sortez avec votre fils faire le tour du lac des Minimes dans le Bois de Vincennes, prendre une petite centaine de photographies notamment du petit lac gelé, d’abord à contrejour, puis au contraire dans un éclairage très favorable à la fois chaud et rasant de fin de journée. Partagez une boisson chaude avec vos enfants, eux chocolats chauds, vous un thé. Mettez un disque de Bill Evans au Village Vanguard (Scott La Faro à la contrebasse juste avant de mourir dans un accident de moto, Paul Motian, unique rescapé à l’heure actuelle de ce trio, à la batterie), sortez la pâte du réfrigérateur et laissez-la pas très loin de vos prochaines activités près du réchaud, pour qu’elle se réchauffe gentiment. Préparez un caramel dans lequel vous faites fondre un bon morceau de beurre, ce que votre amie Isa appelle un caramel (un peu) cochon, tout est dans le un peu. Beurrez très légèrement les bords du moule à tarte et faites couler le caramel dans le fond du moule, répartissez le uniformément à l’aide d’une maryse, ou, plus difficile et qui demande un peu de sang-froid étant donné la température du caramel, en agitant élégamment le moule dans des mouvements elliptiques et déliés. Pelez les poires entières à l’économe, répartissez les en quartiers, retirez les trognons puis débitez en quatre ou cinq tranches les quartiers et rangez les harmonieusement dans le caramel qui entretemps a figé (nulle crainte dans la chaleur du four, il va refondre). Mettre un autre disque, Axel Dörner (trompette) avec Phil Minton (voix et autres effets produits avec la gorge), farinez votre plan de travail et un rouleau à pâtisserie, et roulez votre pâte avec lenteur. Décollez-la lentement, pliez-la en deux puis en quatre et posez-la sur les poires et dépliez-la, bordez-la en enfonçant bien la pâte contre les bords beurrés du moule, faites un trou au centre qui servira de cheminée d’évacuation, mettez au four à 200 degrés Celsius pendant une quarantaine de minutes, démoulez dans un plat plus grand (foncez chez vos voisins en emprunter un si vous n’aviez pas bien prévu le truc) juste à la sortie du four. Photographiez votre tarte, ratez votre photographie, pas votre tarte.

    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/bley_surman_peacock_oxley.mp3

    http://www.desordre.net/musique/evans_vanguard.mp3

    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/axel_dorner.mp3

    Et la promenade au bois de Vincennes avec Nathan : http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/images/winter_leaves/index_masque.htm

    #qui_ca

  • J – 172 : Entendu, je ne suis plus où, cette phrase : plus rien n’est comme avant nulle part.

    Exercice #31 de Henry Carroll : Liste d’occasions manquées en photographie

    Tel carrefour des beaux quartiers de Madrid le 31 décembre, nous allons écouter les douze coups de minuit à la puerte del Sol avec nos douze grains de raisin, j’ai déjà fait plus de sept cents photographies dans la journée, notamment du demi marathon déguisé, mais aussi à la fondation Thyssen, je décide de laisser mon appareil photo à l’hôtel, au carrefour, une femme élégamment habillée, façon années 30 presque fume sous l’auvent de son hôtel et son éclairage, le reste de la rue est désert. On dirait un tableau d’Edward Hopper.

    Telle rue de New York en septembre 1987, un nain discute avec un homme qui est en pleins travaux de voirie et partiellement descendu dans une bouche d’égout, les deux hommes ont le visage à la même hauteur. Le nain me voit il est furieux, je n’ai pas eu le temps de prendre la photo, je baisse mon appareil en m’excusant.

    Telle petite rue de Cady, juin 1987, avec Daphna, nous sommes descendus en train et nous cheminons ver sla maison de son père, je prends des photos de toutes sortes de choses, soudain le corps nu d’une femme apparait à une fenêtre pour fermer les volets, cela sent l’envie pressante de faire l’amour, je suis subjugué par la poitrine de la femme et oublie de prendre en photo son bras qui dépasse de la fenêtre.

    Telle rue de Fontenay, un matin en allant au travail, c’est l’été, 2016, grand beau temps, lumière du matin sur toute une façade d’immeuble, toutes les fenêtres renvoient un reflet noir à l’exceptiuon d’une seule de laquelle est penchée une femme qui téléphone, c’est comme si elle parlait à tout le monde.

    Lac des Minimes, Bois de Vincennes, hiver 2007 soudain un cygne prend son envol, la lumière est sombre, je pense que cela ira trop vite et qu’il n’y a pas assez de lumière, je regrette de n’avoir pas au moins tenté un filé.

    Telle photographie érotique, je n’étais pas à ce que je faisais.

    Toutes, ou presque, mes photographies des Etats-Unis, parties avec l’inondation du garage.

    #qui_ca

  • J – 180

    Le lendemain, c’est Nathan qui exprime le désir de se promener au Bois, Adèle acquiesce et part en vélo en éclaireur comme elle dit, quant à Nathan selon son habitude et ses grandes jambes, plus grandes que les miennes, et surtout plus toniques et moins arthritiques, il marche loin devant moi, les mains enfoncées dans les poches de son pull, de temps en temps donnant un coup de pied dans un marron qui n’en demandait pas tant pour rouler le long de l’allée, et donc moi, ne refusant pas une part de rab sur le bon plaisir de la veille, l’appareil-photo en bandoulière, m’amusant de passer devant certains reflets et certaines ombres d’hier, cadrant, cette fois-ci, à la différence de la veille, en horizontal, ce qui est plus strictement mon habitude, quitte à faire des fonds d’écran, et du coup, considérant les images de la veille encore sur la carte, et celles d’aujourd’hui, depuis le petit écran de contrôle de l’appareil-photo, me vient cette idée un peu saugrenue, dont je ne suis pas sûr qu’elle donnera grand-chose, mais je vais essayer, de faire défiler, horizontalement les images verticales de la veille (http://desordre.net/bloc/ursula/2017/images/autumn_leaves/v/index.htm ) et verticalement celles horizontales d’aujourd’hui (http://desordre.net/bloc/ursula/2017/images/autumn_leaves/h/index.htm ), je ne sais pas si je me fais bien comprendre, en agissant sur le niveau d’opacité des images et en laissant le fond de la page html qui porte les images transparent, on doit pouvoir, ce serait marrant que cela fonctionne, faire en sorte que les opacités des images verticales et horizontales s’additionnent les unes aux autres pour produire des images tierces (http://desordre.net/bloc/ursula/2017/images/autumn_leaves/index.htm ), je ne sais pas si je me fais bien comprendre, et bien sûr paramétrer des vitesses de défilement des deux pages de telle sorte que l’image tierce ne soit jamais la même réunion, je ne sais pas si je me fais bien comprendre. Je dois même pouvoir ajouter une manière de masque de telle sorte que ne soit visible que l’intersection exacte des deux bandes d’images, je ne sais toujours pas si je me fais comprendre. ( http://desordre.net/bloc/ursula/2017/images/autumn_leaves/index_masque.htm )

    Et du coup, cela m’arrive de temps en temps, je suis en train de prendre des photographies dans la pleine conscience de la façon dont je vais les assembler ensuite en jouant sur leur opacité, c’est quand même un drôle de truc la photographie numérique, là où en argentique, il fallait anticiper les difficultés au tirage, déboucher les ombres, calmer les hautes lumières, en numérique, il faut anticiper les fruits du hasards et les caprices de la programmation (un bien grand mot cela la programmation pour ce que je produis) en html. Je ne sais pas si je me fais très bien comprendre.

    En cela je me fais, immodestement, penser au Bill Evans de Conversations with myself , sublime disque dans lequel Bill Evans s’est enregistré en piano solo par plages successives, se triplant, trois Bill Evans pour le prix d’un seul baril de Bill Evans, enregistrant la première plage en laissant quelques endroits disponibles pour la seconde et la troisième prise, enregistrant la seconde prise, laissant quelques interstices pour la troisième prise, enregistrant la troisième prise comblant les espaces laissés vacants lors de deux prises précédentes, je ne sais pas si je me fais très bien comprendre.

    Finalement c’est ma version html d’Autumn Leaves . Qui n’est quand même pas du même tonneau que celle de Bill Evans. Je n’y suis pas encore. Sans compter que j’ai hâte de voir ce que cela va donner une fois que je vais lancer le script. Peut-être pas grand-chose. On verra.

    (Autant l’avouer publiquement, la petite fulgurance du Bois de Vincennes a demandé deux heures de travail à mettre en place, et le chemin pour lui donner forme, fut tout sauf rectiligne, du coup ce serait à moitié étonnant que je ne me fasse pas bien comprendre, et vous imaginez sans mal comme il doit être agréable de se promener en forêt avec moi.)

    Exercice #27 de Henry Carroll : Créez une playlist, prenez une photo en l’écoutant.

    Ce qui est, peu ou prou, le principe de l’Image enregistrée. (http://desordre.net/bloc/image_enregistree/index_arthrose.htm)

    #qui_ca

  • J – 181

    C’est Adèle qui en a eu l’idée, comme je lui demandais ce qui lui ferait plaisir de faire cet après-midi où nous étions inhabituellement seuls, elle et moi. Et là où j’aurais volontiers accueilli qu’elle me demande d’aller se promener dans Paris, que sais-je, aller dans un musée, se taper une toile, elle m’a répondu, et si nous allions nous promener au bois de Vincennes ? Moi j’y vais en vélo et je t’attends à la porte jaune. D’accord.

    Et donc pendant qu’Adèle fait des tours du lac des Minimes à vélo, je prends nombre de photographies notamment des reflets automnaux sur les eaux calmes de ce petit étang, rien de bien important, rien de bien nouveau, juste des photographies sur lesquelles je m’applique un peu, limite des cartes postales — aujourd’hui, de façon plus contemporaine, on devrait qualifier de telles images de fonds d’écran —, et d’ailleurs je croise nombre de mes contemporains qui sont apparemment animés des mêmes intentions, eux aussi photographient, essentiellement à l’aide de leur téléphone de poche, une femme à l’aide de son ardoise numérique, rares sont les vrais appareil-photos, les reflets huileux aux teintes mordorées sur l’étang.

    De temps en temps, j’entends le timbre de la bicyclette d’Adèle dans mon dos, nous échangeons un peu, je lui montre mes dernières photos, t’es sûr qu’il y a quelque chose de net sur cette photo papa ? Non, en fait non. Et elle repart faire un tour du lac, en comptant ses tours, en tentant de déterminer combien de tours elle aura fait quand moi je n’en aurais fait qu’un seul à pied, je crois que j’ai fini par transmettre ce goût des mathématiques approximatives à ma fille Adèle — et donc un certain goût pour la littérature à Madeleine, la passion des échecs à Nathan et aux trois un amour immodéré pour les Cévennes et les films de James Bond, je ne me félicite pas pour ce dernier item. Moi, je retourne à mes petites recherches sans prétention, mais qui regardent tout de même du côté du dernier Monet.

    Et, en fait, je ne demande rien de plus à l’existence, et à la photographie, que de me procurer de temps à autre, la joie simple d’une promenade au Bois de Vincennes avec ma fille Adèle et le plaisir de faire quelques fonds d’écran automnaux pour l’hiver.

    http://desordre.net/bloc/ursula/2017/images/autumn_leaves/v/index.htm

    Exercice #26 de Henry Carroll : Prenez une photo qui ne fonctionne qu’en noir et blanc

    #qui_ca

  • PIALAT | BANLIEUE 1960
    L’amour existe,

    https://www.dailymotion.com/video/x3bmbyz_court-metrage-de-maurice-pialat_shortfilms

    Texte du documentaire.
    « Longtemps j’ai habité la banlieue. Mon premier souvenir est un souvenir de banlieue. Aux confins de ma mémoire, un train de banlieue passe, comme dans un film. La mémoire et les films se remplissent d’objets qu’on ne pourra plus jamais appréhender.

    Longuement j’ai habité ce quartier de Courbevoie. Les bombes démolirent les vieilles maisons, mais l’église épargnée fut ainsi dégagée. Je troque une victime contre ces pierres consacrées ; c’était un camarade d’école ; nous chantions dans la classe proche : « Mourir pour la patrie », « Un jour de gloire vaut cent ans de vie ».

    Les cartes de géographie Vidal de Lablache éveillaient le désir des voyages lointains, mais entretenaient surtout leur illusion au sein même de nos paysages pauvres.

    Un regard encore pur peut lire sans amertume ici où le mâchefer la poussière et la rouille sont comme un affleurement des couches géologiques profondes.

    Palais, Palace, Eden, Magic, Lux, Kursaal… La plus belle nuit de la semaine naissait le jeudi après-midi. Entassés au premier rang, les meilleures places, les garçons et les filles acquittent pour quelques sous un règne de deux heures.

    Parce que les donjons des Grands Moulins de Pantin sont un « Burg » dessiné par Hugo, le verre commun entassé au bord du canal de l’Ourcq scintille mieux que les pierreries.

    A quinze ans, ce n’est rien de dépasser à vélo un trotteur à l’entraînement. Le vent d’hiver coupait le polygone du Bois de Vincennes ; moins sévère que le vent de l’hiver à venir qui verrait les Panzers répéter sur le terrain.

    Promenades, premiers flirts au bord de la Marne, ombres sombres et bals muets, pas de danse pour les filles, les guinguettes fermeraient leurs volets. Les baignades de la Marne, Eldorado d’hier, vieillies, muettes et rares dorment devant la boue.

    Soudain les rues sont lentes et silencieuses. Où seront les guinguettes, les fritures de Suresnes ? Paris ne s’accordera plus aux airs d’accordéon.

    La banlieue entière s’est figée dans le décor préféré du film français. A Montreuil, le studio de Méliès est démoli. Ainsi merveilles et plaisirs s’en vont, sans bruit

    « La banlieue triste qui s’ennuie, défile grise sous la pluie » chantait Piaf. La banlieue triste qui s’ennuie, défile grise sous la pluie. L’ennui est le principal agent d’érosion des paysages pauvres.

    Les châteaux de l’enfance s’éloignent, des adultes reviennent dans la cour de leur école, comme à la récréation, puis des trains les emportent.

    La banlieue grandit pour se morceler en petits terrains. La grande banlieue est la terre élue du P’tit pavillon. C’est la folie des p’titesses. Ma p’tite maison, mon p’tit jardin, mon p’tit boulot, une bonne p’tite vie bien tranquille.

    Vie passée à attendre la paye. Vie pesée en heures de travail. Vie riche en heures supplémentaires. Vie pensée en termes d’assistance, de sécurité, de retraite, d’assurance. Vivants qui achètent tout au prix de détail et qui se vendent, eux, au prix de gros.

    On vit dans la cuisine, c’est la plus petite pièce. En dehors des festivités, la salle à manger n’ouvre ses portes qu’aux heures du ménage. C’est la plus grande pièce : on y garde précieusement les choses précieuses.

    Vies dont le futur a déjà un passé et le présent un éternel goût d’attente.

    Le pavillon de banlieue peut être une expression mineure du manque d’hospitalité et de générosité du Français. Menacé il disparaîtra.

    Pour être sourde la lutte n’en est pas pour autant silencieuse. Les téméraires construisent jusqu’aux avants-postes.

    L’agglomération parisienne est la plus pauvre du mon-de en espaces verts. Cependant la destruction systémati-que des parcs an-ciens n’est pas achevée. Massacre au gré des spéculations qui sert la mode de la ré-sidence de faux luxe, cautionnée par des arbres centenaires.

    Voici venu le temps des casernes civiles. Univers concentrationnaire payable à tempérament. Urbanisme pensé en termes de voirie. Matériaux pauvres dégradés avant la fin des travaux.

    Le paysage étant généralement ingrat. On va jusqu’à supprimer les fenêtres puisqu’il n’y a rien à voir.

    Les entrepreneurs entretiennent la nostalgie des travaux effectués pour le compte de l’organisation Todt.

    Parachèvement de la ségrégation des classes. Introduc-tion de la ségrégation des âges : parents de même âge ayant le même nombre d’enfants du même âge. On ne choisit pas, on est choisi.

    Enfants sages comme des images que les éducateurs désirent. Jeux troubles dans les caves démesurées. Contraintes des jeux préfabriqués ou évasion ? Quels seront leurs souvenirs ?

    Le bonheur sera décidé dans les bureaux d’études. La ceinture rouge sera peinte en rose. Qui répète aujourd’hui du peuple français qu’il est indiscipliné. Toute une classe conditionnée de copropriétaires est prête à la relève. Classe qui fait les bonnes élections. Culture en toc dans construction en toc. De plus en plus la publicité prévaut contre la réalité.

    Ils existent à trois kilomètres des Champs-Élysées. Constructions légères de planches et de cartons goudronnés qui s’enflamment très facilement. Des ustensiles à pétrole servent à la cuisine et à l’éclairage.

    Nombre de microbes respirés dans un mètre cube d’air par une vendeuse de grands magasins : 4 millions

    Nombre de frappes tapées dans une année par une dactylo : 15 millions

    Déficit en terrain de jeux, en terrain de sport :75%

    Déficit en jardin d’enfant : 99%

    Nombre de lycées dans les communes de la Seine : 9. Dans Paris : 29

    Fils d’ouvriers à l’Université : 3%. A l’Université de Paris : 1,5%

    Fils d’ouvriers à l’école de médecine : 0,9%.

    A la Faculté de lettres : 0,2%

    Théâtre en-dehors de Paris : 0. Salle de concert : 0

    La moitié de l’année, les heures de liberté sont dans la nuit. Mais tous les matins, c’est la hantise du retard.

    Départ à la nuit noire. Course jusqu’à la station. Trajet aveugle et chaotique au sein d’une foule serrée et moite. Plongée dans le métro tiède. Interminable couloir de correspondance. Portillon automatique. Entassement dans les wagons surchargés. Second trajet en autobus. Le travail est une délivrance. Le soir, on remet ça : deux heures, trois heures, quatre heures de trajet chaque jour.

    Cette eau grise ne remue que les matins et les soirs. Le gros de la troupe au front du travail, l’arrière tient. Le pays à ses heures de marée basse.

    L’autobus, millionnaire en kilomètres, et le travailleur, millionnaire en geste de travail, se sont séparés une dernière fois, un soir, si discrètement qu’ils n’y ont pas pris garde.

    D’un côté les vieux autobus à plate-forme n’ont pas le droit à la retraite, l’administration les revend, ils doivent recommencer une carrière.

    De l’autre, les vieux travailleurs. Vieillesse qui doit, dans l’esprit de chaque salarié, indubitablement survenir. Vieillesse comme récompense, comme marché que chacun considère avoir passé. Ils ont payé pour ça. Payé pour être vieux. Le seul âge où l’on vous fout la paix. Mais quelle paix ? Le repos à neuf mille francs par mois. L’isolement dans les vieux quartiers. L’asile. Ils attendent l’heure lointaine qui revient du pays de leur enfance, l’heure où les bêtes rentrent. Collines gagnées par l’ombre. Aboiement des chiens. Odeur du bétail. Une voix connue très lointaine… Non. Ils pourraient tendre la main et palper la page du livre, le livre de leur première lecture.

    Les squares n’ont pas remplacé les paysages de L’Ile de France qui venaient, hier encore, jusqu’à Paris, à la rencontre des peintres.

    Le voyageur pressé ignore les banlieues. Ces rues plus offertes aux barricades qu’aux défilés gardent au plus secret des beautés impénétrables. Seul celui qui eût pu les dire se tait. Personne ne lui a appris à les lire. Enfant doué que l’adolescence trouve cloué et morne, définitivement. Il n’a pas fait bon de rester là, emprisonné, après y être né. Quelques kilomètres de trop à l’écart.

    Des années et des années d’hôtels, de « garnis ». Des entassements à dix dans la même chambre. Des coups donnés, des coups reçus. Des oreilles fermées aux cris. Et la fin du travail à l’heure où ferment les musées. Aucune promotion, aucun plan, aucune dépense ne permettra la cautérisation. Il ne doit rien rester pour perpétrer la misère. La leçon des ténèbres n’est jamais inscrite au flanc des monuments.

    La main de la gloire qui ordonne et dirige, elle aussi peut implorer. Un simple changement d’angle y suffit.

  • j-226 : Les deux rêves de cette nuit. Je ne sais plus lequel est le premier.

    #1 Je rêve que j’accompagne un groupe d’enfants le long d’un petit cours d’eau, comme ceux du bois de Vincennes. Les enfants jouent dans les cours d’eau qui ne sont pas aussi vaseux que ceux du Bois de Vincennes. Une des petites filles joue à retenir sa respiration le plus longtemps possible ― de cette façon idiote que je mentionne dans le spectacle Apnées ― jusqu’à ce que je réalise qu’en fait, elle est bloquée au fond de l’eau, retenue au cou par une racine ou un élément végétal, je me jette à l’eau, comme il m’est arrivé, une fois, de le faire, au Bois de Vincennes, quand Nathan, en crise, avait jeté Adèle, qui devait avoir trois ans, dans un de ces petites canaux d’irrigation du bois, et je parviens sans mal à dégager le cou de cette petite fille, qui ne ressemble à aucune petite fille que je connaisse, avec le même sentiment de mollesse, de viscosité et la libération du cordon qui lui passe autour du cou, que dans la scène d’accouchement dans Rester vertical d’Alain Garaudie, les choses auxquelles on rêve parfois, mais je suis incapable de redonner vie à cette petite fille, même en lui faisant du bouche à bouche, en demandant à Adèle, qui m’accompagne, de souffler dans la bouche de cette petite fille, comme il est recommandé de procéder lorsqu’il faut faire du bouche à bouche à un enfant, demander à un autre enfant, à la moindre capacité pulmonaire, plus en rapport avec celle de la victime, de souffler. Les choses auxquelles on repense en rêve, comme des cours de secourisme tellement lointains, au lycée, pensez. Réveil, en suffocant, comme de remonter à la surface.

    #2 Je rêve de me rendre à la synagogue pour ma Bahr Mizdah , puisque, en effet, j’ai décidé d’épouser la religion juive. En entrant dans le temple, je suis désespéré de trouver sur les bancs, presque dans les premiers rangs, de cette ancienne synagogue de Prague ― la seule synagogue dans laquelle j’ai un jour pénétré ― la mère de mes enfants, à laquelle j’adresse un signe qui veut dire que même ici, dans une synagogue, elle tient à ce point à en être ― à se mêler de mes affaires, en somme, t’es juif maintenant toi ? ― et que, de toute manière, avant qu’elle ne pose la question, les enfants sont à l’école, c’est un samedi matin et je dois faire ma Bahr Mizdah pendant qu’ils sont à l’école, ainsi va l’organisation de mon existence, pas un moment de répit, pas un moment de blanc, et ainsi vont les rapports avec la mère de mes enfants. Entre le rabbin qui doit, en tout premier lieu vérifier que les cadeaux qui ont été envoyés pour les enfants ― dans mon cas il s’agit d’une Bahr Mizdah tardive, dite de reconversion ― qui font ce jour-là aussi leur Bahr Mizdah ― à la réflexion, je vois bien comme je transpose ce que je sais, intimement, du culte catholique à la religion juive, à savoir la première communion pour une vingtaine d’enfants à la fois, pas sûr que l’on fasse des Bahr Mizdah à la chaîne, les lecteurs juifs corrigeront d’eux-mêmes ― pour vérifier que ces cadeaux sont bien kasher, il tique beaucoup sur les deux livres de bandes dessinées que m’a envoyés mon ami L.L. de Mars (http://www.le-terrier.net), Quelques prières d’urgence à réciter en cas de fin des temps et les Vies de la mort , pourtant, à mon sens, les deux meilleurs cadeaux qu’il pouvait me faire pour ma Bahr Mizdah , et je suis contraint d’expliquer au rabbin que ce sont bien deux ouvrages strictement religieux, que ce n’est pas parce que c’est de la bande dessinée que ce n’est pas religieux, au contraire, les choses qu’on est parfois contraint, en rêve, d’expliquer à un rabbin, le jour de sa Bahr Mizdah , dite de conversion. La petite réception qui fait suite à ma Bahr Mizdah , dans une manière d’antichambre de la synagogue, est l’occasion pour L.L. de Mars de me donner ma première leçon d’exégèse religieuse où il est question, pour chaque juif, de retrouver, dans sa propre chevelure, le cheveu que l’on tient de son père, généralement dans la nuque, c’est d’ailleurs pour cela qu’un rite de tonte de la nuque est souvent proposé pour les plus fervents, et que c’est à cette seule condition, celle de retrouver le cheveu de son père, que l’on devient vraiment juif. Et encore je simplifie.

    Je dois modifier ma façon d’entrer le matin dans le café le Marceau pour notre café du matin avec mon collègue Julien, en effet, chaque fois que je m’approche du bar, je tombe nez-à-nez avec le téléviseur connecté, comme on l’est à une perfusion, aux informations en continu, comme le sont les perfusions, au goutte à goutte, en continu. Ce matin, l’image est quasi inoffensive, on y voit les premiers de notre république corrompue et malade, réunis autour de ce qui semble être une cérémonie commémorative ― un 19 septembre ? ―, ou un enterrement, ou je ne sais quoi de pas spécialement folichon auquel les hommes et les femmes politiques de la droite et de la droite dure se réunissent avec des mines d’occasion et des costumes sombres, la Maire de Paris fait la tête en arrière-plan du Président de la République, mine de circonstance oblige, la Maire, elle, n’a pas du tout aujourd’hui cette prestance courageuse, et même cette beauté, que je lui trouve d’ordinaire, l’ancien président des otaries de droite, semble piaffer dans des rangs seconds de cette assemblée, comme à son habitude, ravagé par autant de tics qui disent sans équivoque son impatience maladive. Je n’ai aucune idée des raisons d’un tel rassemblement, je présume que je pourrais m’en informer, sur le coup en m’approchant du téléviseur pour en recevoir le son en sourdine, soit en rentrant au bureau et en me connectant au site du Monde , je sens bien comment travaille en moi un désir de savoir et la lutte que je mène intérieurement pour barrer le chemin de cette curiosité, dont je sais que l’objet est empoisonné. J’y vois un enjeu de taille, une raison de lutter, de discipline intérieure, de se gendarmer. Comme dans les vignettes des albums de Tintin , il y a un Milou satanique qui m’encourage avec des arguments fielleux, je suis encore éloigné de la catastrophe dont je veux tout ignorer, un bref regard sur l’actualité intérieure, nationale, ne m’apprendra rien, ne me fera aucun mal, et un Milou angélique, habillé de bleu azur et auréolé, qui me signifie qu’entre cela et une drogue ou un alcool forts, il n’y pas de différence de danger. C’est le Milou angélique qui gagne ce matin.

    #qui_ca

  • Je vous recommande vivement le Bois dont sont faits les rêves de Claire Simon. Un film documentaire absolument envoûtant dans ce qu’il parvient à faire une peinture du Bois de Vincennes à la fois réaliste et à la fois mystérieuse, ce que peut-être le Bois de Vincennes, une véritable aventure humaine, terriblement humaine.

    Et pour bien connaître le Bois de vincennes, selon ses nombreuses facettes, je ne pensais pas que la chose soit possible, claire Simon l’a fait, et magistralement, jusqu’à faire renaître le fantôme de Deleuze à Vincennes, en quelques plans en surimpression magnifiques.

  • Sept étrangers s’évadent du centre de rétention du Bois de Vincennes
    http://www.lanouvellerepublique.fr/Toute-zone/Actualite/24-Heures/n/Contenus/Articles/2012/11/21/Sept-etrangers-s-evadent-du-centre-de-retention-du-Bois-de-Vinc

    Selon les premiers éléments de l’enquête, les sept hommes ont pris la fuite en direction de l’autoroute A4 qui passe à proximité du CRA, dans le 12e arrondissement de Paris.

    Des recherches ont été lancées pour les retrouver, mais elles n’avaient rien donné mercredi à la mi-journée, selon la préfecture de police.

    #sans_papiers