person:céline guichard

  • @philippe_de_jonckheere me conduisant à refoutre le nez dans le bordel qui règne dans mes disques de stockage, je sui parvenu à arracher au quasi néant (ça vieillit très mal, les DVDs, et ce que je cherchais datait de 2003 et 2007) le deuxième numéro de Chutes que je croyais paumé définitivement.
    Un fichier qu’avait pas le bon nom, dans un tiroir qu’avait pas le bon nom, dormait dans un DVD avec rien d’écrit dessus.
    Bref, afin que ça n’arrive plus, je me suis dit que le meilleur moyen de le sauvegarder vraiment était de le foutre sur tous vos disques durs. Comme ça, si je le reperds, je pourrai vous le demander.

    C’est là : http://www.le-terrier.net/chutes

    avec Céline Guichard, Philippe De Jonckheere, Antoine Ronco, Dr. C., Jean-Luc Guionnet, Mardi Noir, Bertoyas, Stéphane Batsal, Alain Hurtig

  • artsfactory - riot girls
    http://www.artsfactory.net/index.php/riot-girls

    RIOT GIRLS : les filles cachées de Clovis Trouille
    une exposition de Maya McCallum, Anne van der Linden, Céline Guichard & Nadia Valentine

    Âmes sensibles s’abstenir ! Avec son exposition RIOT GIRLS la galerie Arts Factory convoque quatre pétroleuses aux caractères et aux pinceaux bien trempés. Sexualité, religion, féminisme et politique ; les sujets sont abordés sans aucun tabou, appuyés par une jouissive liberté graphique et picturale. Ce détonnant group show est organisé grâce au mécénat de l’association Clovis Trouille (1889-1975), gardienne du temple de l’oeuvre laissée par le subversif peintre, proche des Surréalistes.

    Au-delà de leur disparité formelle, les artistes invitées dans le cadre de cette exposition ne craignent pas la mauvaise réputation. À l’image de leur ancêtre putatif, elles jouent ironiquement des codes établis pour mieux les renverser. Affirmant la crudité violente du sexe, les travaux de Maya McCallum, Céline Guichard, Anne van der Linden et Nadia Valentine interrogent la vie intérieure, le plaisir à venir, l’angoisse de l’interdit, celle du désir menant à la transgression. Ils fustigent par ailleurs toutes les formes de terrorisme avec un jubilatoire sens de la provocation.

    J’y suis passé hier soir et vraiment les peintures de Nadia Valentine valent le détour. Les autres artistes sont excellentes aussi mais la charge politique des toiles de Nadia Valentine m’a particulièrement touché.


    nadia valentine - république, 2013 - huile sur toile - 146 x 114 cm

    #racisme #peinture #femmes #expo

  • récolte du festival d’Angoulême 2016

    1) Comme chaque année, je passe prendre la dernière production du frère Thierry de Bethune ; pas grand-chose cette année - un simple jeu perpétuel sur une carte postale, entre le recto et le verso - en attendant avec impatience le grand oeuvre de l’année prochaine dont notre bénédictin de génie, moins congelé que l’année dernière (on lui a fait une place à St Martial, nettement moins jolie mais mieux chauffée que la cathédrale), m’a montré le prototype : un plateau de jeu narratif, avec des dés verbeckiens proposant une double lecture des figures dessinées. (vhttp://www.du9.org/chronique/frere-thierry-de-bethune-oeuvres-completes)

    2) et 2b) Ami de Musturi auquel par bien des aspects il renvoie (violence des masses de couleurs arbitraires, confuses, destructrices d’espaces, obscénité des corps traités commes des poches ventrues en voie de crevaison), Benjamin Bergman présente dans cette série de livrets - ici « Trolls » III et IV - publiés par Kutikuti des récits de genre (des histoires de trolls, donc) terriblement malades, « hideusement beaux », qui hantent l’esprit dès qu’on les as refermés, comme une valse de phosphènes entêtants derrière des paupières. La raison chancèle à suivre ces histoires dont le déroulement est un paradoxe, visiblement linéaire et pourtant incompréhensible, aux objets fuyants, aux enjeux insaisissables. Il me faut vite les deux premiers volumes ! https://kutikutisf.wordpress.com/category/news

    3), 3b) et 3c) Un festival spécial Léo Quiévreux :
    – un beau livre sérigraphié du Dernier Cri , « Cocaïne 14 », dont les pliages savants en panoramas imbriqués donnent l’impression d’une lecture infinie nichée dans les plis d’un carnaval d’hybridations. Une retenue bienvenue des gammes chromatiques ( une bichromie rose et bleue et une trichro plus froide) et un très riche éventail graphique étendu entre le mécanique des trames et les filets nerveux de la plume.
    – « Anyone 40 », chez Arbitraire ; sous une couverture sérigraphiée, un grand cahier bleu layette saturé de cut-ups, de samplings, tissu troué, déchiqueté, rapiécé d’histoires cousues ensemble par un frankenstein scopique particulièrement dégénéré. Tout argument narratif n’est convoqué que pour être illico refoutu à la porte.
    – Et enfin, le gros « Programme immersion » très impressionnant sorti chez Matière, dont je ne vous dis rien de plus que ceci : lisez Leo en parler dans le septième numéro de Pré Carré ! Amen. http://precarre.rezo.net/?p=1699
    http://www.lederniercri.org
    http://www.arbitraire.fr
    http://www.matiere.org

    4) et 4b) Jeff Goarnisson , « le flip de Paris », publié par Ab Irato , la maison d’édition de Barthelemy Schwarz et Eve Mairot qui produisent depuis le début des années 90 toutes sortes d’objets éditoriaux qui s’indéfinissent en diaprant les nuances supposées tranchées des espaces poétiques et politiques (dont la très chouette revue « L’échaudée »). Ce « Flip de Paris » est une de ces zones de transit éditorial sur fond d’autobiographie. Les questions que s’y pose l’auteur me sont complètement étrangères (un rapport historicisé à la modernité et à l’art et la constitution de soi devant leurs figures principales), mais le mode narratif et les procédés plastiques qui le composent établissent un lien charnel évident avec les références qui en sont le fond (surréalisme, lettrisme, situationnisme).

    « L’échaudée » (4b) mérite le détour ; cette revue accomplit sans collure apparente cette hybridation nécessaire entre les champs du politique et du poétique en les tenant pour un seul et même problème, celui de l’utopie en marche, comme ils furent autrefois unis dans l’extraordinaire magazine « Le fou parle ». Une réponse à l’écueil des revues militantes et de leur manque d’imagination. N’attendez pas de la trouver dans un kiosque, la revue est hélas trop discrète, commandez-la sur le site : https://abiratoeditions.wordpress.com/category/lechaudee-revue

    5) Dernière publication de la riche collection Ion que Benoit Préteseille a ouvert au dessin depuis six ans, ce « Renaissance » de Claude Cadi désarticule, dans une bichromie bleue et dorée comme un maphorion, quelques tableaux flamands et italiens emblématiques des XVe et XVIe, allant de fragments de la bataille de San Romano à la Babel de Brueghel en passant par Fra Angelico ou Bosch. Je ne sais pas encore ce que j’en pense, je réserve mon avis pour une prochaine fois, mais disons au moins que ça me laisse perplexe, ce qui n’est pas tout-à fait rien.
    http://ionedition.net

    6) « Flugblatt #1 » La bande dessinée n’a été inventée un jour par Töpffer que pour venir s’échouer un jour chez Bertoyas et s’y autodétruire en beauté ; presque tous les livres sont inutiles à côté de ceux-là.
    Dans ce dernier opus Kobé (ses propres comics autopubliés), Bertoyas revient aux déréglements graphiques violents de ses premiers récits, après une série de livres plus homogènes plastiquement, et plus linéaires (« Nicy », « Parzan », « Norak ») ; ici, les fuites graphiques, bavochures, patouillages dégueulasses, caviardages de tout poil ont repris leurs droits pour accompagner un récit bousculé qui s’offre le plaisir des digressions à la Sterne dans un espace pourtant extrèmement court. On oublie souvent, par paresse, par désir de ranger son travail dans les cordes rock’n’roll de cette connerie d’underground, de souligner combien le travail de Bertoyas est soutenu par des enjeux politiques et esthétiques puissants. Ce dernier Bertoyas est un doux rappel.
    http://kobeblog-bertoyas.blogspot.fr

    7) Clément Vuiller , « Canicule » : qui ne s’agace pas du chichi des livres et de la course aux effets de luxe, de pliages savants, de matériaux divers, purement décoratifs et tape à l’oeil ? Le livre de Clément Vuiller, modestement, arrache le pliage en accordéon à ses effets de mode pour en faire le mouvement le plus hypnotique et multiplement signifiant qui puisse accompagner un incendie dont la croissance et la dévoration sont tout le récit de ce livre.
    http://www.3foisparjour.com

    8) Dernier volume de l’énorme revue annuelle de Hoochie Coochie avec, comme toujours, plein de très belles choses à son menu, et bien peu de déchets. « Turkey Comix » reste la plus chouette revue française de bandes dessinées (je n’ai pas encore pu lire le dernier numéro de « Nicole », dont le premier volume m’avait vraiment beaucoup plu l’année dernière, et qui pourrait être la seule concurrente sérieuse - et donc stimulante - à T.C.) Un envoutant petit Vanoli sur St Jérôme, une très jolie fable cruelle de Yoann Constantin , un brouillard absorbant de Thomas Gosselin , une brillante série de pages de Mazen Kerbaj , et parmi les petits nouveaux qui apparaissent régulièrement dans Turkey magazine , des pages étourdissantes de Largier , un récit de Loïc Gaume entre cartographie et plan, des planches arides, tranchantes, de Noémie Lothe . Je finirai en soulignant les pages de Odo Barrio et Barbara Meuli dont je découvre le travail et celles (enfin imprimées ailleurs que dans sa cave) de Lucas Taïeb .

    9) Idir Davaine , « Cavale » : quand on voit les efforts développés par certains pour produire des formes de narration qui se vendent pour minimalistes quand elles ne sont que paresseuses ou pauvres, on est émerveillé par la capacité de ce petit livre à atteindre aux fondamentaux du récit en affirmant, pourtant, s’y soustraire : Idir Davaine dit que, depuis quelques temps, il ne fait que des peintures et plus des bandes dessinées. Pourtant ce ne sont pas les murs qu’il choisit pour elle, des formats hétérogènes, des espaces distendus, mais un livre, qui les rassemble dans une échelle commune pour le regard, les lie linéairement par la collure des pages. Et apparait le récit, richement, visiblement, sans aucun doute.
    http://www.3foisparjour.com

    10) Copieuse, belle, toujours suprenante, en couleurs, c’est encore un magnifique numéro de « Mekanik Copulaire », la revue incroyable de Bill Noir, qui n’en finit pas de démontrer par les rencontres qu’il nous offre que le collage est tout sauf une discipline du passé.
    http://www.mekanikcopulaire.tumblr.com

    11) Pionir : épaisse revue croate anglophone visiblement destinée à présenter les auteurs de ce collectif (mais est-ce vraiment un collectif ?) ; j’en retiens pour l’instant surtout le travail de Bernharda Xilko ( http://www.krekhaus.com ), faute de pouvoir m’enquiller autant de pages en anglais et d’en avoir compris clairement la nature et les enjeux.

    12) Si « Quoi de plus normal qu’infliger la vie ? », de Oriane Lassus , traite d’un sujet d’une banalité épuisante - le désir d’enfant - c’est en revanche d’un point de vue libérateur et rare qu’il l’aborde, taillant une route transversale dans le paysage obsessionnel qui crispe une société entière sur le sacre de l’enfant et la procréation. L’enfantement comme horizon de toute vie accomplie et le pédophile comme croquemitaine occupant tout l’espace de la hantise sociale, sont les deux facettes d’une même idée fixe infantile généralisée. Se soustraire au petit cirque généalogique coûte cher, tous ceux qui ne veulent pas d’enfant en connaissent le prix ; il n’y a pas un péquenaud qui ne se sente légitime de donner une leçon de morale et de vie à qui ne veut pas, comme lui, sanctifier le jeu grotesque de papamaman. Oriane Lassus parvient à écrire un livre déclaratif, positionné, sans produire un système surplombant, sans bousiller le travail du récit et de sa diversité. Exercice périlleux que celui de dire quelque chose de précis sans étouffer la narration sous la ligne droite du discours énonciatif, auquel elle parvient à trouver pas à pas une voix intéressante, par une sorte de pointillisme des situations, des voix, agencées dans une belle polyphonie. Un excitant livre Arbitraire sous une jolie couverture de carton gris sérigraphiée.

    13), 13b) et 13c) Je ramène trois merveilles de Loïc Largier cette année, un travail de longue haleine que je défend partout où je le peux depuis la découverte de « Des combats » à la fin de 2012 (mis en ligne dans le Terrier à cette période ici http://www.le-terrier.net/largier/index.htm, et dont nous attendons avec impatience désormais la publication sur papier qu’il mérite par les jeunes éditions Adverse ).
    À partir d’un processus très rudimentaire de citations morcelées, en couches, en juxtapositions, imbrications, Largier compose pas à pas, en se renouvelant continuellement (ce qui n’est pas la moindre des surprises que réserve son travail) une sorte d’archéologie vivante de la bande dessinée, équivalent, dans notre discipline, des « Histoire(s) du cinéma » de Godard.
    Parmi ces trois livres de mes emplettes, une tentative étrange, très différentes des autres livres de L. Largier , un drame amoureux par le dessin, au cours duquel la question du changement formel est soumise à des déréglements minimaux (redessin quotidien, altération de la reproduction d’un même dessin, croissance graduelle d’un autre).
    https://www.flickr.com/photos/loiclargier

    Flickr

    http://www.revue1-25.com

    14) Mythique revue de la fine fleur des auteurs finlandais, « Kutikuti » a déjà atteint son 35ème numéro. Allelujah ! Je ne vous fais pas l’affront de vous la décrire, mais je peux vous évoquer le deuxième étrange journal distribué cette année par l’équipe de « Kutikuti » :

    14b) Avec des traductions en finnois et en anglais, ce grand format présente quelques planches du « Fabulas Panica » de Jodorowski qu’il dessinait dans les années 60 ( http://fabulaspanicas.blogspot.fr). Ses planches personnelles, pour le peu que je comprends des textes (posés sur la pages en espagnol, langue que je ne parle pas), sont sensiblement de la même farine que ses films, souffrant des mêmes défauts et présentant à peu près les mêmes qualités. Qu’il s’agisse des textes paniques coincés quelque part dans un post surréalisme juvénile embarrassant (« Les araignées sans mémoire »), des grands films (« El topo »), des films péniblement hystéros (« Santa Sangre ») ou des scénarios de bande dessinée, Jodorowski se tient toujours tendu dans un mouvement contradictoire : entre la nullité philosophique et les intuitions géniales, la bouillie syncrétique et les raccourcis conceptuels féconds, la bêtise expressionniste et les fulgurances poétiques, le travail de Jodorowski me navre plus souvent par ses clichés psychologisants, sa quincaillerie ésotérique, qu’il ne m’emporte par ses indéniables inventions, notamment dans le domaine de la SF. C’est souvent très con, parfois très beau, toujours fumeux et confus, mais les lecteurs de bandes dessinées, je crois, lui doivent tous quelques précieuses illuminations.

    15) « L’avis des bulles », revue de chroniques consacrée aux bandes dessinées et à destination des médiathèques. Cette année, des exemplaires ont été mis à la disposition des éditeurs sur les stands. Pas mal fichue du tout (difficile d’en dire plus, sa destination même exige d’elle une ouverture à laquelle je n’aspire évidemment pas pour mes propres lectures, mais les textes sont mieux étoffés que ceux de la plupart des revues critiques qu’on trouve en kiosque ou en ligne).
    http://avisdesbulles.com

    16) Un bon numéro de « Gorgonzola », la revue de l’Égouttoir , avec Léo Quiévreux, Baladi, Turunen, Mancini, une belle lecture du Week-End de Godard par Pascal Tessier et un dossier consacré à Malher. Ayant mis très longtemps à trouver sa forme, « Gorgonzola » devient depuis quelques numéros un fanzine qui se tient vraiment, autant par la régularité de certaines participations qui lui donnent sa couleur personnelle que par la volonté de s’ouvrir à des dossiers thématiques (Imagex, Poirier, Malher). Ça me fait mal au cul de dire du bien de ce casse-burnes de Maël, mais son insistance est porteuse et son fanzine réussi. On attend le 22 avec impatience.
    http://legouttoir.free.fr

    17) Il nous est toujours trop rarement donné de voir l’étendue et la richesse du travail plastique et narratif de Matti Hagelberg , encore trop peu connu et publié en France ; ce gros volume publié à l’Association (le sixième qu’il publie chez eux après ses publications françaises au Dernier cri ) rend la justice qui s’impose à cette merveilleuse machine de mélancolie ravageuse, la terrible machine Hagelberg, et à la diversité de ses modalités graphiques et compositionnelles. « Silvia Regina » est le genre de livre qui déjoue à chaque lecture l’impression qu’il vous avait laissée à la précédente et qui justifie pleinement l’abattage massif d’arbres centenaires, l’usage de colle toxique, de film plastique imputrescible et d’encre cancérigène pour encombrer votre bibliothèque du compagnon à vie de votre dépression.

    18) (et dessous, 18b) Deux petits fascicules de Antoine Marchalot dont l’humour branque déjoue complètement les frontières entre raffinement et lourdeur, entre poème et blague, et également entre bouffonnerie et tragédie. « La chambre 14025 » est assez exemplaire de son aptitude à foutre en l’air jusqu’a notre rapport au dessin, par un usage incongru des effets informatiques. Il conduit cette incongruité jusqu’à la beauté aussi certainement qu’il conduit le nonsense dans des franges inattendues du drame. Encore une publication Arbitraire , dont les lignes de force éditoriales ne cessent décidément de s’accentuer par leur exigence.

    19) C’est peu dire que d’évoquer la variété et la singularité des publications de Hécatombe ( http://hecatombe.ch/blog.php ) ; du récent collectif consacré au film « Undergronde » qui rassemblait positions et expériences personnelles en bandes dessinées jusqu’aux merveilleux livres uniques sérigraphiés à la racle de Thomas Perrodin, en passant par ce volume D du fanzine carré, consacré à la bande dessinée abstraite, le travail éditorial de Yannis la Macchia et de ses collaborateurs est une source de surprises et de joies. C’est à l’explosion des sillages de lectures à la surface d’une page que se livrent Thomas Perrodin , Ibn Al Rabin et Yannis la Macchia lui-même. Un très beau volume dont l’expérience de lecture enivre vite.
    http://unfanzine.com/un-fanzine-carre-numero-d

    20) et 20b) Le travail de Paul Creus , publié par les jeunes éditions Proche , est ma plus jolie découverte de ce festival. Il y a quelque chose de profondément déréglé et de beau aux mondes de ce « Trucs & Tricks » qui emprutent à la physique des particules leurs notions et leurs catégories, jusqu’au mode de dessin aigrelet des schémas : c’est à leur prétention à résoudre toute ambiguïté que Paul Creus doit, parce qu’il ne cesse de s’y soustraire dans des dégagements poétiques et burlesques, la force de son magnifique petit livre.
    Le second volume, consacré au caillou, confronte l’amateur de dessin au vertige métaphysique quotidien du dessinateur que hante la représentation de l’amorphe, de l’indécidable, de l’indéfini. Damisch nous avait donnée une théorie du nuage, P aul Creus nous offre une éthologie du caillou. Je regrette seulement le prix légèrement exagéré des publications Proche qui me prive du plaisir de vous parler du troisième livre de Paul Creus.
    https://www.facebook.com/editionsproche

    21) Scalp : voici la dernière production de Thierry Bourgallé ( Factotum ) qui propose, en regard du travail maniaque d’ingénierie éditoriale auquel il s’adonne expérimentalement pour « Prurit » (trois numéros à ce jour, graduellement de plus en plus invraisemblables), ce fanzine rudimentaire, petit A5 agrafé et photocopié. La seule coquetterie qu’il s’autorise est le travail de ronéo de la couverture, derrière laquelle s’enchaînent quatre récits, quatre feuilletons qui s’ouvrent ( Aurélien Leif, Noémie Lothe, C. de Trogoff, L.L. de Mars ). Prix libre, site en rade (http://www.terricole.fr), pas de distribution ni de salons, on peut dire que ce garçon est aimanté par la réussite sociale.

    22) Le festival est aussi l’occasion de découvrir deux de mes propres bouquins que je n’avais pas encore eus entre les mains : « Le secret », publié à la cinquième couche , qui aura comme à peu près tous mes livres connu de si longs déboires avant de devenir un objet de papier que je ne sais même plus quoi en penser, et le travail commencé en 2012 lors de la session Kibboutz filmée ici : https://vimeo.com/74977262

    , sur les planches de Jack Kirby (23).
    « Le secret » aborde d’une autre façon que « Docilités », plus carnavalesque, la vision politique qui se dessine entre mon affection historique pour le communisme familial et mon mépris sans nuance d’une de ses valeurs centrales, le travail. C’est une fable très littéralement hallucinogène, brodée autour d’une substance puissante sur les effets de laquelle repose une hypnose politique généralisée.
    http://www.5c.be
    Quand au « Jack Kirby walked through broken porticoes », il s’agit d’un exercice de métastase, dont chaque planche prend pour objet un des multiples aspects de l’étrange monde plastique de Kirby, ouvre ses vannes, y greffe des cellules monstrueuses, laisse libre court à la pousse d’excroissances erratiques, malades, sur le papier.
    http://adverse.livre-avenir.org/#jack-kirby-ll-de-mars

    23), 23b) 23c) et 23d) Naissance des éditions _ Adverse _ , qui publient ce « Jack Kirby walked through broken porticoes » . Alexandre Balcaen — dont les lecteurs des éditions Hoochie Coochie savent ce qu’elles lui doivent d’ouverture à des mondes insoupçonnés de la bande dessinée ( Danko, Bicéphale, Hagelberg, Muzotroimil, Bertoyas, Varlez etc.) — lance sa propre maison d’édition ; l’assurance de voir son entreprise marquer le même goût pour la singularité et les expériences limites est appuyée par la formulation très claire dans un « Manifeste » ( http://adverse.livre-avenir.org/#manifeste-des-editions-adverse ) de l’horizon éditorial visé ainsi que le désaveu d’une grande partie des pratiques actuelles de l’édition. Je ne connais encore de ce manifeste que sa première courte moûture, publié dans Pré Carré 5, mais j’aurai sûrement l’occasion de vous en recauser dès que j’aurai lu cette version nettement enrichie. Cette première salve de livres Adverse élargit l’horizon de lecture du travail de Guillaume Chailleux : à la série des petits gaufriers carrés de « Tricoter » (Pré Carré), ce « Fils » ajoute des compositions dépliées étonnantes, tryptiques de planches savantes qui exposent comme rarement toute la richesse qu’offre la bande dessinée par la croisée de lectures tabulaires et linéaires dans le même espace.

    24) Ma première leçon de norvégien. Déclinaison narrative suprenante du principe de l’imagier, « Omrokering » est fait de telle façon qu’il est à peu près compréhensible par n’importe quel lecteur du monde ; c’est le principe même d’association d’une forme, d’un objet, à un mot, qui produit un comique à la fois subtil et lumineux ouvrant à une douce mélancolie domestique. L’univers graphique est homogène à ce jeu pédagogique et emprunte aux perspectives cavalières et aux plans de montages son univers de formes simples articulées.
    http://www.jippicomics.com

    25) Le O de « Obi » fait le trou noir de ce livre, publié à la cinquième couche , dans lequel s’engouffrent toutes les tentatives de parler : Sophie Telen met en pages cet étrange mouvement par lequel, autour d’une expérience personnelle, toute tentative de description, d’élucidation, est vaine, ridiculement impuissante à rendre compte de la complexité d’un monde, d’un couple, d’une histoire. Les pages sont tiquetées de perforations noires qui sont autant de points sur lesquels vient bégayer un récit qui n’en finit par de se retenter, de partir d’ailleurs, d’un autre moment, d’un autre point de vue, depuis toutes les origines possibles pour aborder son objet, sans qu’aucun mouvement ne puisse s’achever. Récit d’une précieuse déception.

    26) L’année dernière, je vous parlais de ma joie à découvrir le « Belvédère » de Luca Retraite et Fabio Viscogliosi ; hé bien les éditions Gargarismes ont la bonne idée de publier cette année un deuxième volume de ce travail envoûtant.
    https://gargarismes.com

    27) « Biscoto » : un exemplaire opportunément oublié sur leur stand de ce très chouette journal pour les lardons de Suzanne Arhex et Julie Staebler me le fait découvrir dans les détails. Mensuel, thématique, c’est joli, c’est drôle, c’est pas con loin s’en faut, c’est pas nunuche, c’est varié, on s’étonne qu’une entreprise aussi peu calibrée et réussie arrive à son trente-cinquième numéro sans que son existence ne fasse plus de bruit. Enfin, on s’étonne... Pas vraiment en fait... Si les bonnes choses soulevaient l’enthousiasme des foules, ça se saurait.
    biscotojournal.com/
    Un second magazine destiné aux adultes et consacré à la poésie est publié par la même équipe, mais je n’arrive pas à foutre la main sur l’exemplaire qui m’a été gentiment donné et, du coup, je ne pourrai rien vous dire pour l’instant sur « Jelly Rodger »...

    28) « MLQ » (Mon Lapin Quotidien). Ce journal, ici présenté sous la forme d’un appel aux rédacteurs, pourrait bien être la prochain forme de Lapin, la revue changeante (formellement) de l’Association . Il s’agirait d’un trimestriel de 32 pages, en noir et blanc, dans lequel des auteurs réguliers viendraient occuper des espaces précis sous la forme d’une rubrique personnelle, textuelle, dessinée, bandessinée.

    29) « Bathroom » : un très joli livre de Maï Li Bernard , dans ses propres micro éditions (où elle publie également les dessins de Céline Guichard ), mettant en scène le dégré 1 de toute narration, la croissance d’un état A à un état B ; doubles pages dont le récit formel est celui d’un collage de papiers découpés en cours, dont la page de gauche est à la fois le squelette (la première découpe de papier, visible dans le résultat) et l’origine (le premier état). Indéniablement de la bande dessinée.
    http://sempiternellesritournelles.blogspot.fr/2014/01/blog-post_27.html
    http://mai-li-bernard.tumblr.com

  • Il est pas mal question depuis deux, trois jours, de la recomposition du prix du festival d’Angoulême, après la départ de Sattouf de la liste des nominés. Vous êtes, je suppose, déjà au courant de tout ça.

    Bon. Jusqu’ici je me suis toujours foutu royalement de ces prix à la con, je ne suis pas concerné par leur existence, qu’il s’agisse de BD ou de mérite agricole.
    Mais là, un truc me parait bizarre :
    Bon, comme tout le monde, j’imagine, j’ai du coup jeté un oeil à la liste des grands prix précédents. On ne peut pas dire que les femmes s’y bousculent non plus pendant 40 ans. Et tant que j’y suis, je serai assez curieux de voir les fameuses listes des nominés pendant ces 43 dernières années, pour voir si, par hasard, ce désert ne serait pas, au fond, la coutume.
    Où je veux en venir ? Là : cette année, il appert que ce truc dont tout le monde se fout depuis 43 ans - le sexisme de ce prix, celui du monde éditorial et institutionnel de la bande dessinée - hé bé là tout le monde est drôlement soucieux de son éthique. Partout en ligne, dis-donc. Dingue.

    Le monde entier de la bédée se serait-il enfin mis à lire Butler et Preciado ? Sans déconner ?.. Si ça pouvait être vrai...
    Ma question n’est donc pas « Pourquoi que y’a pas de femmes dans la liste ? », parce que la seule chose vraiment nouvelle sous le soleil, c’est « Pourquoi que d’un coup tout le monde est féministe ? » (alors que toute l’année, j’entends dire exclusivement des saloperies sur les féministes, sur le ton patelin du « Oui oui c’est important, bien sûr, les femmes, tout ça, mais y’a les manières quand même et les féministes, hein, ils les ont pas » et du « Quand même, faut pas pousser, c’est pas l’Iran ici » etc. J’apprends que dalle aux seenthisiens)
    Sattouf est-il le premier à avoir amorcé ce mouvement en se retranchant de la liste ? J’en sais rien et je m’en fous (* les commentaires qui ont suivi cet article me révélèrent une chronologie de la prise de position publique et de son relai médiatique également lourde de sens, en vérité, par des saloperies de journalistes toujours en mal d’incarnation et, au passage, d’incarnation virile ) ; mais y’en a un, donc, qui a dit un truc.
    Hop. C’est public.
    Après, que reste-t-il à faire aux autres, pris dans le cadre de cet énoncé, pour ne pas avoir l’air de petites merdes quand ils sont :

    a) Des auteurs concernés par le prix et mis en lumière comme éventuels complices silencieux

    b) Des femmes auteurs qui s’en branlent toute l’année mais qui d’un coup sont toutes très très Tanxx dans leur tête

    c) Des journalistes de mes deux qui sont juste des journalistes de mes deux ?

    d) Des pangolins

    On peut y ajouter les féministes légitimement agacés d’un coup de voir que leur lutte, dont tout le monde se fout, d’un coup tout le monde s’en fout plus pour au moins, oula !, une bonne quinzaine de jours, hein, avant que ça reparte de plus belle dans le rien.

    Que tous les pignoufs du coin trouvent l’occasion à peu de frais de se donner l’air concerné par des trucs, histoire de gagner des points d’éthique publique, voilà qui ne m’étonne pas. Faux-derches.
    Maintenant que ça c’est posé, c’est pas ça qui va résoudre le problème épineux du choix pour raccommoder le manteau du roi nu... De quel tiroir sortiront les auteures de la liste du futur, vu les endroits glauques où les éditeurs s’obstinent à les ranger depuis toujours ces publications féminines, à savoir le tiroir femme qui cloisonne et recloisonne un ordre du monde masculin et remasculinisé ? (je parle bien du problème auquel nous renvoie ce prix et son cadre particulier, qu’il a consolidé depuis 43 ans).
    Ceci invitera plutôt à un constat général, montrant assez vite que si les femmes qui font des bandes dessinées sont nombreuses, et de plus en plus, elles ont peu de chance de rentrer dans les critères d’eligibilité de ce prix.
    Qui sont-elles, et que sont-elles devant ces critères ?
    Bon, il y a évidemment nos chères vivantes disparues (vous me direz, on a bien élu Watterson, hein) du genre Claveloux (qui ne fait plus que de l’illustration à ma connaissance depuis belle lurette) ou Rita Mercedes, idole de mon adolescence (belle réapparition à l’Asso après tant d’années de disparition de notre champ disciplinaire).
    Je ne suis pas chez moi pour mettre le nez dans ma bibliothèque, mais on peut se rappeler que pas mal de trucs ont été tués dans l’œuf depuis les années 70, rejet, épuisement etc. personnels ou collectifs ( je pense à l’expérience géniale de « Ah ! Nana ! » https://clio.revues.org/4562 ), chemin désertifié duquel ressort invariablement la toute petite famille sans cesse nommée pour masquer le vide angoissant : Cestac, Brétécher, Montellier, Puchol, Goetzinger.

    restent :

    -- les saloperies à la pelle dont la merdicité girly est coresponsable de la situation désastreuse dans laquelle se tient la bande dessinée féminine. Je ne veux nommer personne, je refuse toute distinction hiérarchique dans un tel tas de caca, mais quand Bagieu monte au créneau, franchement, je luis suggèrerais plutôt de s’acheter un miroir (à l’époque de "Ah Nana ! , on lui aurait caillassé la gueule, si vous voulez mon avis). Elles sont à la bd faite par des femmes ce qu’un Van Hamme est à celle faite par des hommes, une taule. En lauréer une seule serait une contreperformance désastreuse, un effet rigoureusement opposé à celui désiré, un entérinement dans une partition du monde déjà bien écrasante.

    -- la palanquée d’auteures brillantes qui ont contre elles leur trop petite biblio pour un festival qui mesure le talent à la tonne de papier imprimé ( et également un autre petit gros handicap, qu’elles ont de commun avec la liste suivante, vous verrez) : Joanna Hellgren, Aurélie William-Levaux, Debbie Dreschler, Juhyun Choi, Delphine Duprat, Dominique Goblet, Isabelle Pralong, etc. il me faudrait une page entière de ce forum pour les évoquer ; ce sont elles, les femmes qui agrandissent chaque jour la compréhension et les formes de la bande dessinée. Avec ou pas un travail marqué par la féminité comme question, comme objet de leurs récits - aucune raison, sinon sexiste, de l’attendre systématiquement, ce qui pourtant est le cœur battant des critiques de livres féminins - , mais jamais incarnant ces polarités de genres qui nous tuent à petit feu et qu’il va bien falloir liquider un jour ou l’autre (Haraway, viens à notre aide !). Comment un quarteron de vieux schnocks pourrait-il simplement les VOIR ?

    -- les auteures historiques géniales, comme Aline Kominsky, Phoebe Gloeckner, Trina Robbins, Julie Doucet etc. : copieuses, pourrait-on dire, hein, mais toujours trop invisibles et pas assez populaires (entendez : aimables et lisibles par des singes) pour un festival aveugle depuis la fin des années 80 à toute modernité (à quelques très rares exceptions près, et à la condition que les auteurs aient arraché péniblement un peu d’intérêt du grand public ou qu’on leur doive également quelques œuvres dites "populaires" : Crumb - en 1999, bon sang ! - Blutch, Spiegelman - en 2011, ah ah ah ah - Willem - et on se souvient du scandale qui en découla chez les vrais-amateurs-de-bédé...).

    Ce qui veut dire que ce pauvre festival, prix au piège de ses propres catégories débiles (grosse biblio, succès populaire) va devoir aller chercher Montellier ou Goetzinger pour donner du sens à cette soudaine, belle, profonde, prise de conscience générale. Ce retour de conscience artificiel des zozos du festival va produire de façon éblouissante, visible comme un furoncle sur un nez de menteur, un agrandissement du problème qu’il prétendra résoudre. Y’a pas de quoi se réjouir.

    Bon, c’est un prix, un foutu prix de mes deux, avec son cadre, ses références, ce n’est pas un indice sociologique d’une activité. En gros : il y a zéro raison pour que ce club soit une référence spéculaire d’un état réel de la création. On lui reproche de ne pas être un juste outil d’optique, alors que ce n’est pas un outil d’optique du tout. Malheur à qui mérite un prix ! Soyez fières, mes soeurs, d’être invisibles à ces vieux connards !

    Évidemment, c’est plus simple pour moi d’affirmer que ce prix est une merde dont je ne voudrais pour rien au monde, parce que mon sexe me range d’emblée du bon côté des nominables. Mais un prix, justement, couronne un certain état du monde établi dans son hégémonie (monde que je réprouve, notamment dans ses catégories de genres et sa normativité sexiste) ; il faut être le dernier des cons pour croire qu’un prix distingue quelque chose. Un prix ne traverse rien, un prix patine en surface. Un prix bégaye une société. Ceux qui en reçoivent feraient bien de garder toujours ça dans un coin de leur petite tête creuse et se demander ce qu’ils ont fait pour mériter ça.

    Pour dire ça plus rapidement : les femmes qui font des bandes dessinées, depuis un bon paquet d’années maintenant, font, au quotidien, sa modernité (raison pour laquelle une célébration de Goetzinger ou de Montellier n’aurait été représentative de RIEN). Ce festival et son prix célèbrent une vision archaïque de la bande dessinée. Il se trouve qu’à archaïsme, archaïsme et demi : la momification phallique fait partie du paquetage. Ce qui nous préoccupe aujourd’hui est pris dans cette équation.

    –--------------

    j’apprends à la dernière minute, le temps de rédiger ce texte, la décision du festival qui a trouvé l’ultime pirouette pour ne rien rendre visible du problème le plus profond, celui qu’il porte en lui par ses propres catégories, en renvoyant à d’autres le choix d’une position à prendre ( http://www.bdangouleme.com/934,la-parole-aux-auteur-e-s ). Sauvés par le joker démocratie !
    Que dire d’autre que « Ah ah ah ah ah » ?

    #féminisme #bande_dessinée #modernité

    • M’est avis que la pitoyable pirouette démocratique vient d’une tardive prise de conscience de l’impasse : allonger la liste avec quelques noms de femmes, ou même refaire une liste paritaire, ne pouvait plus légitimement apparaître aux concernées que comme une insulte.
      D’ailleurs Montellier leur a préventivement renvoyé le prix à la gueule :

      Le festival a-t-il redouté que certaines sélectionnées refusent à leur tour de faire partie de cette liste, comme l’ont fait une dizaine d’auteurs hommes au cours des quarante-huit dernières heures ? C’est fort possible. Contactée alors que son nom commençait à circuler sur Internet, Chantal Montellier nous disait ceci ce matin : « Il n’est pas question que j’accepte ce truc ! Cela ressemble à une aumône. Le festival décide de rajouter six femmes ; pourquoi pas douze tant qu’on y est, comme pour les huîtres ? En plus, il n’y a pas le moindre mot de repentance face à ce qui reste et restera une goujaterie. »

      http://www.lemonde.fr/bande-dessinee/article/2016/01/07/le-festival-de-bande-dessinee-d-angouleme-invite-finalement-les-auteurs-a-vo

    • Dans ma chronologie personnelle, le monsieur qui a déclaré en premier qu’il se retirait n’a fait que réagir à la réaction initiale du collectif d’autrices à ce sujet. Je n’ai pas les liens sous la main, je ne fais qu’ajouter ma petite pierre au sujet. J’ai vu en direct, sur mon fil Facebook, le post de l’auteur apparaître avec le compteur de « J’aime » de quelques dizaines, et augmenter chaque seconde jusqu’à beaucoup, et à ce moment là, j’avais déjà pris connaissance du communiqué du fameux collectif.

    • Sattouf qui a été le premier à se retirer de la liste avait déjà été primé l’an passé et ça m’a bien fait marré ce geste « grand seigneur » de mes deux ovaires. http://seenthis.net/messages/446157
      J’ai regardé tout ça mollement, ce festival n’est qu’une piètre foire commerciale parmi d’autres. J’espère que les femmes « pressenties » renverront à leur juste condition ce ramassis de vieux schnocks décrépis : aux oubliettes. Ils me font penser à ses indécrottables sénateurs qui s’accrochent à leur siège et à leurs privilèges mais que personne ne prend plus au sérieux.

    • Puisque tu parles de la qualité de ce festival, j’ajoute que j’ai toujours été surpris par les choix réalisés années après années... sachant que je ne dois pas posséder plus de 1 ou 2 albums « grand prix »... sur les quelques centaines de BD présentes sur mes étagères... Par exemple, y-a un Zep qu’on m’a offert un jour...

      Je digresse. L’autre jour, je cherchais de la BD érotique... avec dans l’idée de trouver de la BD érotique écrite par une femme... Rien trouvé dans les catalogues en ligne... Que des mecs, vulgaires et craignos...

    • tout ça s’est finit comme d’hab : culpabilisation de la part de l’éditeur pour mézigue, renvoi aux féministes de la responsabilité de la merde. ce sont les féministes qui font chier à ouvrir leurs gueules quand quelque chose craint, mais l’objet de notre colère n’est jamais plus qu’un « texte philosophique » ou « une simple erreur d’un camarade pas si méchant tu sais bien », et j’en passe. Et aussi ce qui m’a frappée c’est le silence de nos chers camarades par ailleurs : regardons ailleurs. Le désengagement par le silence. La désapprobation de notre parole en nous ignorant tout simplement, même quand on s’adresse à eux directement. On veut bien être proféministes, mais attention, tant qu’on vise ailleurs, pas les potos. Le sens du texte « le prix à payer » sur A contrario ainsi que le mien, c’était ça, aussi. L’ineffable joie de voir des copains (lol) te tourner le dos quand le vent féministe souffle dans le mauvais sens. Le bonheur inégalable d’avoir le choix entre travailler pour des connards ou ne pas avoir de travail, donc pas de sous (tu vois ce que je voulais dire par « erreur de travailler sur la bas des convictions », hin).

      https://soupherbe.wordpress.com/2015/06/02/652

      mais aussi, pour répondre directement à ce fil de discussion : http://tanx.free-h.fr/bloug/archives/8518

      Tu sais LL de Mars, j’ai fait ma tanx aussi avec CQFD pour qui tu travailles. Je me suis barrée parce qu’une personne s’est montré très paternaliste à mon égard sur une question pour le moins dérangeante dans les colonnes de ce journal. J’ai appris après coup que beaucoup dans l’équipe était d’accord avec moi, mais personne ne me l’a fait savoir, et j’ai claqué la porte en me croyant encore seule. Prendre tout le monde de haut quand le féminisme devient un sujet parce que le vent change de sens, mais ne pas voir la misogynie sous son propre nez, ça n’est pas spécialement avant-gardiste non plus. Peut être que tu l’ignorais. Peut être pas. Peut-être que tu n’en avais après tout rien à foutre, vu l’estime que tu sembles me porter.
      Y’a une chose que j’ai apprise avec le féminisme : c’est que les femmes disparaissent dans le silence, et que les hommes font beaucoup de bruit dès qu’ils se pètent un ongle ou qu’il s’agit de montrer à quel point ils brillent sur tous les sujets, même ceux qu’ils ne maitrisent pas.

      Voilà. j’ai encore fait ma tanx.

    • @monolecte Mais où est-il écrit « faire sa tanx » dans ce texte de L.L. de Mars ? La seule occurrence que je trouve c’est : « b) Des femmes auteurs qui s’en branlent toute l’année mais qui d’un coup sont toutes très très Tanxx dans leur tête ». Alors je ne dis pas qu’il n’y a rien à dire, mais entre être "très très Tanxx dans leur tête" et "faire sa tanx", je crois qu’il y a une marge et une interprétation qui s’emballe, ce débat part mal.

    • @odilon @soupherbe
      je ne sais pas si Tanx laissera ce commentaire que je viens de laisser sur son liste, mais je tiens à faire entendre ce que je pense de ces lectures empressées et falsifiantes de mes positions. Il serait bon de lire les textes au lieu de les fantasmer.

      « Mauvaise interprétation, hâtive, aveuglée par des certitudes aprioriques : nulle part je ne parle de "faire sa Tanx", mais bien de l’étrange mouvement public de zozos qui se foutent absolument de tout problème sexiste toute l’année et qui d’un seul coup se sentent "tanxx". Ce qu’ils ne sont pas. Tu lis trop vite, mal, et tu conclues à côté.
      Je n’aime pas ton travail, effectivement, qui est à mille kilomètres de ce que j’attends d’un dessin politique : je le trouve sage, décoratif, collé au pire de la camelote rock avec un zeste d’école américaine. Trop joli pour être honnête, pas assez offensif, désespérément monosémique - donc terriblement condescendant puisque tu prends tes lecteurs pour des cons à qui il faut tout dire d’un coup sans ambiguïté. Je sais pas, peut-être par crainte qu’ils s’imaginent une dissonance politique ? Sinon pourquoi ? Voilà pour ton dessin qui, contrairement à toi, n’a rien à dire.
      C’est dommage parce que je suis quasi systématiquement de ton côté sur tes positions politiques quand je te lis. Nous partageons infiniment plus d’idées que tu ne peux l’imaginer.
      Quand à CQFD, j’ignorais absolument cette histoire, ce n’est pas la peine de fantasmer autre chose. Je vis dans un trou, à 1000 kilomètres de Marseille, je ne connais rien de la cuisine interne du canard. J’ai moi-même cessé de bosser pour le canard pendant trois ans, agacé par les positions antisémites que véhiculait la lecture de Shlomo Sand ou encore certains strips abjects de Berth. Je suis revenu pour des raisons charnelles, car j’aime ces gens même quand ils déconnent, se trompent, me blessent sans l’imaginer.
      Te trompe pas d’ennemi. »

    • @soupherbe N’en étant pas certain, j’ai fait comme ça.

      Mes positions devant ton dessin ne changent rien à ce que je pense de tes textes et des positions, des choix, qu’ils soutiennent. C’est de mon point de vue un problème politique qui nous sépare, sans aucun doute, le rapport au dessin, mais c’est probablement un des seuls.
      Je ne doute pas que nous ayons un jour l’occasion d’en causer, dans un festival ou ailleurs. Il n’y a aucune espèce d’animosité personnelle, de truc affectif à la con dans ce que je te dis (ceci pour ton « Peut-être que tu n’en avais après tout rien à foutre, vu l’estime que tu sembles me porter. » qui est particulièrement mal vu. Et je n’en ai pas rien à foutre, du tout, de la façon dont on traite les femmes dans ce pays, dans mon corps de métier comme dans tous les autres cadres sociaux).

    • @intempestive non, ça n’a rien d’impeccable, c’est de la cécité totale. Son dessin est parfaitement dissociable, hélas, de ce qu’elle dit, et c’est bien là le foutu problème : son dessin est parfait sur un t-shirt de gland ou sur un poster d’ado avec la conscience politique d’un coucou. Il est cool. Sympa. Rock. Propre et lisible tout joli drôlement bien fait. Il n’offense rien, ne fait rien bouger, est invisible dans la galerie des fétiches habituels de la quincaillerie punkouillarde mort-née, en plus élégant toutefois. Il n’en est pas de même pour ses choix politiques, ses positions, la façon de tenir ces positions fermement, de refuser les catégories soigneuses où se disposent discours et corps, qui en irritent plus d’un, prennent la tête de l’ado avec la conscience politique d’un coucou, embarrassent le cool, le sympa, et même le rock (cette vieille merde muséale à la con).
      Je réponds à ça également sur le site de Tanx. Si on part sur cette voie - à savoir la schize entre le dessin politique et ce qu’il veut soutenir - on pourrait causer longtemps. J’ai déjà donné (trop), me suis assez fritté contre ça dans les cadres, précisément, politiques et éditoriaux où je me bats et me débats. Je préfère renvoyer dans ce cas à l’entretien avec le monde libertaire*, qui ne parlait pratiquement que de ça, ou l’article sur la caricature dans CQFD (qui a précisément été bien mal reçu par certains camarades empêtrés dans cette schize)

      *http://www.le-terrier.net/lestextes/lldm/entretienmonde_libertaire.html vers la fin, à partir de la question "— ... Oh et puis si, une question tout de même : ça renvoie à quoi pour toi quand on parle « d’engagement » ? "

    • @biggrizzly si tu cherches des bds érotiques faites par des femmes, ça ne manque ni de monde, ni de qualité. Céline Guichard, Nicole Claveloux, jusqu’à Aude Picaut, pourtant pas du tout ma tasse de thé dans ses autres productions, qui a dû faire le seule album digne d’être lu (j’ai pas encore vu le Anouk Ricard, ceci dit) de la collection plutôt bourrine BDcul des Requins Marteaux. Chez la géniale Alice Lorenzi (trop rare), la dimension érotique des planches est éblouissante, également chez Anke Feuchtenberger ; récemment, j’ai vu passer la dernière publication de Tomoko, un collectif féminin épatant tenu par Eglantine Ruault, et il y a un merveilleux récit érotique de Amandine Meyer ( https://tomokoeditions.wordpress.com).

    • @lxs_amigxs

      Et ce lait-fraise, on se le boit quand, tou-te-s autour d’une table, pour discuter de nos désaccords, s’excuser de nos maladresses par mails interposés, et rigoler un bon coup ? Ce soir, c’est apéro pour la sortie du numéro 139. C’est con, ç’aurait été une belle occasion. Une prochaine ? En attendant, nous, on vous kiffe ! Waouf. Waouf.

    • @intempestive

      le premier en détournant des codes graphiques connus

      Là j’ai comme un doute. Tant justement le peu que je connaisse de son univers graphique ressemble au contraire à des choses que je vois ça et là depuis plus de trente ans, même si je ne suis pas un très grand connaisseur en matière de bande dessinée, mais aux Arts Déco dans les années 80 je suis à peu sûr d’avoir vu les mêmes choses en sérigraphie, en graffitti, en illus et en bandes dessinées. Pour moi il n’y a pas détournement, mais adhésion et reconduction au contraire des codes graphiques en question.

      Récemment j’ai vu passer un signalement de @soupherbe dans lequel Tanxxx exprimait ses doutes quant à sa maîtrise technique qui l’avait coupée de ponts anciens, je me demande si je ne suis pas d’accord avec ça. Et du coup, Tanxxx (si j’ai bien compris que tu suivais ce fil), il me semble que tu pourrais être sur la voie d’un vrai renouveau. Moins de technique, plus de laché et cela pourrait faire des vraies étincelles.

      En revanche, je suis d’accord avec @l_l_de_mars sur le fait que le courage intellectuel de Tanxxx est juste extraordinaire, j’ai souvenir de sa joute contre cet abruti de Siné, j’étais admirateur ! Et dune manière plus générale les signalements et les positions de @soupherbe sont très souvent très judicieux. Par exemple ils m’instruisent régulièrement de copies conformes en matière de sexisme entre le milieu de la bande dessinée (que je trouve fort adolescent en plus, comme s’il devait y avoir un postulat de congruence entre le lecteur présumé et l’auteur ) et celui de la photographie (qui là est carrément illéttré).

      Et enfin

      le second en allant en terre inconnue

      . Tu peux même dire d’une façon tellement systématique que c’en est un peu fatigant.

    • @intempestive

      je suis (honnêtement) désolé, à ceci :
      "Et prendre le dessin pour un medium, c’est précisément ce que je ne fais pas
      -- peux-tu développer ? ça m’intéresse"

      de devoir répondre non, ou plus exactement, non, pas ici, pas court, pas dans le cadre d’un forum etc. Pourquoi ? Parce que c’est l’objet principal de mon travail d’écriture depuis plus d’un an - « Qu’est-ce que dessiner ? » , notamment dans ma discipline, la bande dessinée - que je suis encore en plein dedans (aujourd’hui-même, par exemple) que le troisième volet va être publié dans le prochain Pré Carré après les deux premiers (dans les n°5 et 6), que je dois encore bosser un an pour les deux derniers et que je ne veux pas saloper le travail.
      Mais sur cet aspect de la question (le dessin comme médium) je peux te renvoyer vers un texte déjà fait - un peu long, sans doute, mais il parle finalement de plein d’autres problèmes de ce genre, liés à des conceptions instrumentales du dessin et de la bande dessinée - qui a été mis en ligne ici : http://precarre.rezo.net/?attachment_id=1667 (c’est le pdf nommé "mccloud")
      C’est un peu chien comme méthode, mais j’ai déjà tellement de mal à écrire ce gros machin que je ne prends aucun risque de m’en dégoûter pour l’instant par trop de dérives.

      Aussi, ceci : quand tu dis "Tanxxx, telle que je comprends ses dessins jusqu’ici, envoie des tirs de bazooka dans tout ce qu’il y a à détruire (les inégalités de genre, de classe, d’origine supposée ou réelle), empruntant pour cela aux codes des comics , du punk, des fanzines et autres formes d’expression populaire.", je pense c’est une erreur de prendre tout ça pour des formes d’expression populaire ; ce sont les formes muséographiées, desséchées, momifiées, de vieilles expressions populaires, qui sont devenues un académisme, un pompiérisme évitant, justement, d’avoir à se poser toute question sur ce qu’est qu’un dessin politique.

    • @jef_klak

      Cette évolution de démocratie directe semble aujourd’hui satisfaire tout le monde.

      Exercice oulipien : tenter, en modifiant le moins de choses possible dans cette phrase, de rétablir la vérité.

      Je propose par exemple

      Cette parodie de démocratie directe semble aujourd’hui ne tromper personne

      ou

      Cet exercice de communication semble aujourd’hui amuser beaucoup de monde

      ou encore

      Cette évolution de démocratie directe semble aujourd’hui faire rire tout le monde. (plus petite correction)

    • Le lien du meo culpo n’était là qu’à titre informatif ;-)

      Et puis, comme dit l’autre « l’émotion est passée », l’hystérie a pris fin, on peut reparler entre hommes sérieux à présent, et vous verrez bien ah ah ah ah en laissant libres les gens, ils feront le pire et n’éliront que des hommes (sérieux).

    • « Publier des collections « féminines » est misogyne. Cela crée une différenciation et une hiérarchisation avec le reste de la littérature, avec l’universalité des lectures qui s’adresseraient donc – par opposition – au sexe masculin. Pourquoi le féminin devrait-il être hors de l’universel ? »

      voilà ce que je lis, et à quoi je souscris complètement, dans la Charte des créatrices de bande dessinée contre le sexisme , et ce que m’inspire, a priori, la création d’une collection qui s’appelle « Traits féminins ». Je me sens mal d’entendre le créateur d’une telle collection soliloquer sur Femmes et bande dessinée .

    • @l_l_de_mars Oui, il y a cette limite, entre autres, chez Thierry Groensteen. Il y a aussi celle de l’approche académique, historiciste et soit-disant neutre, qu’il choisit d’adopter lors de sa conférence. J’ai néanmoins proposé le lien, dans cette discussion sur seenthis, parce qu’il présente de nombreuses auteures de BD, dont beaucoup sont peu connues. Je me disais que ça pouvait permettre des découvertes.

    • C’est indiscutablement clair.
      « NB de dernière minute : non, LL de Mars je ne publierai pas ton énième message, trouve toi quelqu’un d’autre à aller faire chier avec ta prose qui tombe à côté. Tu ne sais pas lire, regarde bien il y a une phrase très importante au tout début de ce texte. Pour te faciliter la tâche je viens de la mettre en gras. EN GRAS. voilà, tu as lu ? bien. Maintenant ouvre ton blog et va y raconter tes salades et épargne moi ta suffisance, ça me fera des vacances. Et aussi : non j’ai pas particulièrement envie d’en discuter à angoulême ou ailleurs. Bon vent. »

      @soupherbe Le « Tu ne sais pas lire, regarde bien il y a une phrase très importante au tout début de ce texte. » est malhonnête, la phrase n’était pas là avant ma réponse, ni en gras, ni en maigre.
      Je n’ai pas de blog, pas de FB, pas de compte Twitter, donc pour la diffusion de salades, hé bien te voilà mieux armée que moi pour la caricature.
      Ok pour le silence, si c’est ce que tu veux. Tant pis.

    • Je ne suis personne et mon avis est insignifiant, mais peut-être fera-t-il plaisir à Tanxx dont j’aime le dessin autant que les idées.

      Les critiques de LL de Mars, outre leur ton extrêmement violent, sont subjectives. Il peut ne pas trouver les dessins de Tanxx à son goût, mais je trouve étrange qu’il affirme qu’il est « évident » (objectivement) que les dessins DOIVENT être offensifs et polysémiques.

      Outre que je trouve que c’est, en partie, le cas de ceux de Tanxx, on peut aussi rebondir sur un autre des commentaires de LL de Mars : selon lui, son dessin est « cool » alors que ses choix politiques sont « offensifs ».

      Peut-être justement que c’est le contraste entre les deux qui en fait la force ou l’une des forces ? Peut-être qu’un dessin offensif défendant une idée offensive devient illisible ou moins lisible ?

      C’est juste une hypothèse de néophyte. Je vous laisse entre spécialistes...

    • Merci @sinehebdo. Je les aime bien, moi,aussi, les dessins de Tanx.

      Pour suivre ce que disais @intempestive, on peut apprécier des boulots différents, les Bérus et Peter Brötzman. Un peu de punk, ça révolutionne peut-être pas la musique (et c’est peut-être aussi encore à voir) mais ça fait plaisir. (et sans convoquer Saint Gattaleuze)

      Si tu prends les premiers The Ex, c’est du Crass, et pourtant, ils ont fait des choses incroyables, avec le temps, avec Tom Cora, avec d’autres, avec des musiciens de partout.

      On peut peut-être lui lâcher la grappe à Tanx avec les exigences de révolution graphique et la laisser bosser. Sur ce, je vais voir comment me procurer des croutes au coin des yeux vol.1. , tiens.

    • @bob_ardkor Ok, merci pour le lien. J’ai pas lu le livre de Guillon, en qui sur pas mal de point j’ai une certaine confiance intellectuelle, je me réserve pour l’instant le droit de ne rien trancher à cet égard.
      Pourquoi ? Parce que si les déclarations d’un Matzneff du genre « Les petits garçons de onze ou douze ans que je mets ici dans mon lit sont un piment rare » sont d’une violence assez rare et me font frissonner (la toute-puissance des adultes m’a toujours pétrifié d’angoisse, notamment sur leurs propres enfants), je me rappelle tout de même certains points important :
      – d’une part, je souscris pleinement aux analyses de Serge André en la matière ( http://www.oedipe.org/fr/actualites/pedophilie ), qui sont aussi fines et complexement abordées que le sujet le mérite.
      – Je me souviens aussi qu’à 13 ans, je ne pensais qu’à baiser du matin au soir comme une otarie. J’aurais sauté sur n’importe quel oui. Évidemment, je suis bien conscient qu’on peut désirer un truc inconnu sans comprendre ce qu’implique l’expression et la satisfaction de son désir. Mais il n’existe rien d’universel qui s’appellerait "l’enfant de 13 ans". J’ai l’orgueil de croire en ma singularité à 13 ans comme à 50.
      – Ma première partenaire sexuelle avait plus de 30 ans, j’en avais 15. Légalement, comment l’aurait-on jugée, elle que j’ai outrageusement draguée derrière son comptoir ?
      – Je note également qu’à 18 ans j’ai eu une amante qui en avait 14 (et vu qui je suis, ça aurait tout aussi bien pu être un garçon ; je précise parce que l’article veut en venir - avec raison - à la pratique des corps, aux contraintes physiques que ça implique). Légalement, j’étais un adulte. Nous nous aimions, nous baisons évidemment dès qu’une opportunité se présentait.
      – Et j’ajoute pour finir que quand on généralise à fond les baluches la pédophilie, ça peut devenir également ça :
      http://www.le-terrier.net/polis/aufil/degenere .
      On voit bien tout ce que la question peut instrumentaliser comme désir de société.
      C’est donc une question que je ne peux pas, que je ne sais pas aborder d’une façon générale, mais bien au cas par cas. Je ne sais pas à quel moment j’étais ou je n’étais plus un enfant. Je ne sais pas où est le curseur. Je sais ce qu’est un viol, une violence, une contrainte, un abus, je ne peux pas imaginer, a priori, que le consentement d’une personne de 10 ans à une personne de 10 ans son aînée soit autre chose que de la soumission, mais après cette chaîne de certitudes, où poser le foutu curseur ? Moi, franchement, je ne sais pas. Bon. J’aurai sûrement l’occasion de lire le bouquin, je verrai.

    • @supergeante @intempestive

      Pour suivre ce que disais @intempestive, on peut apprécier des boulots différents, les Bérus et Peter Brötzman. Un peu de punk, ça révolutionne peut-être pas la musique (et c’est peut-être aussi encore à voir) mais ça fait plaisir. (et sans convoquer Saint Gattaleuze)

      Si tu prends les premiers The Ex, c’est du Crass, et pourtant, ils ont fait des choses incroyables, avec le temps, avec Tom Cora, avec d’autres, avec des musiciens de partout.

      Hmm... Comme nous abordons une question complexe, l’air de rien... J’entends ce que tu dis, Supergeante, mais cette façon d’aborder la question laisse imaginer qu’on pourrait la contourner en douceur par une sorte de gradation quantitative, quand j’essaie d’évoquer un écart radical et qualitatif. Bon. C’est sans doute difficile de faire entendre que ce qui est sans grande importance pour certains est crucial pour d’autres (notamment parce que nous n’avons pas tous les mêmes usages , et tout particulièrement de la musique) ; évidemment, nous ne plaçons pas non plus l’urgence au même endroit, ne mobilisons pas toutes nos forces pour les mêmes objectifs. De mon point de vue, cette question de l’invention de formes est inconditionnelle, et ce n’est pas une question d’objet (de finalité ) mais de trajet (de vie ) ; il y va d’ailleurs pour moi de la musique comme du dessin, ça me pose devant le même type de conditions d’apparitions sociales, de sillages, de trajectoires, pour faire court : de devenirs. Rien de ce que je peux faire politiquement - et surtout ce qui n’a aucun rapport immédiat avec l’art, tout ce que je fais en dehors de mon atelier, avec mes camarades - n’aurait plus le moindre sens pour moi désarticulé de ces enjeux-là (et surtout parce que ces questions sont bâclées par mes camarades eux-mêmes, renvoyées à des pratiques instrumentales, militantes, de l’image comme de la musique, ce qui est en parfaite contradiction avec l’urgence affirmée ailleurs d’inventer un monde anti-autoritaire, joyeux, ivre). Comme ce n’est pas vraiment l’endroit pour vous tartiner sur la musique ce que j’ai pu lier plus haut de textes sur le dessin, je vous ai mis en ligne un autre travail, en bandes dessinées, qui évoque ces questions tout en produisant discrètement, loin des énoncés bavards du dialogue affirmés, une forme. Ce livre aurait pu s’intituler « Crâne comme critique de la tête de mort ». C’est là : https://www.academia.edu/20202122/dialogue_de_morts_%C3%A0_propos_de_musique

    • @intempestive

      J’en reviens à ma conviction que nous ne nous situons pas tou·te·s au même endroit (je ne dis pas au même niveau , ce qui impliquerait une hiérarchie, mais au même endroit) des luttes et de la création (ce qui va de paire), et que c’est une bonne chose. Et également qu’il y a de l’invention non seulement dans les nouvelles formes, mais aussi dans le mash-up, le cut-up, le détournement.

      attention, il y a un malentendu, je pense : il ne s’agit pas d’un problème technique (dessiner excède le dessin ), ce qui veut dire que la formule « il y a de l’invention non seulement dans les nouvelles formes, mais aussi (c’est moi qui souligne) dans le mash-up, le cut-up, le détournement. » sous-entend que ces pratiques de montage ne sont pas des pratiques impliquées dans la question de la forme nouvelle, qu’elles en sont exemptées par un mode de composition qui serait plus neutre que, par exemple, ses matériaux ; mais c’est faux. Il y va du montage comme du reste, il y a de l’invention et de l’académie dans le collage, le mash up, etc. (de la même manière que la question de la contemporanéité de la musique n’est pas liée à son instrumentarium, que ce n’est pas un problème de lutherie. Une musique pompière est réalisée chaque jour avec les plus sophistiqués des synthés pour la plupart des films. La musique révolutionnaire de Jean-Luc Guionnet est faite avec un saxophone)

    • Oui, précisément, et cela ouvre bien des questions éthiques et politiques (desquelles il va être difficile de discuter sur le fil d’un forum...), par exemple : en quoi peut-on l’exiger d’autrui ? En quoi l’invention est-elle universalisable ? A quelle aune l’invention se définit-elle ? Une société de philosophes (ou d’artistes, ou d’autrices/teurs) est-elle souhaitable ?

      @intempestive Oui, excuse-moi, je n’ai pas répondu à ça, alors que c’est important. Entends bien que quand je dis « de mon point de vue », il s’agit de réexprimer les enjeux d’un rapport à l’art, à ses différentes manifestations, et que c’est bien dans le cadre du dessin, notamment du dessin politique qui n’a pas plus de raison pour moi de se retrancher derrière les énoncés qu’il est censé soutenir que tout autre dessin (sinon il n’est que l’alibi publicitaire de ces énoncés). Je ne dis rien de général sur un mode social, ce n’est pas une déclaration systémique. C’est sur le terrain de ces enjeux que j’invoque l’inconditionnalité de l’abandon à l’inconnu du dessin . Pour le reste... Non, je ne vois aps en quoi une société de philosophes ou d’artistes est souhaitable, je ne vois pas ce qu’il y aurait de souhaitable à une société « souhaitée » (homogène, congruente, harmonique etc.). Je veux une société ou le paresseux, l’idiot, l’ennemi, ait sa place, circule sans qu’on lui assigne une forme adéquate. Je ne veux pas, par exemple, d’une société où pour tenir debout politiquement, chacun ait le devoir d’être politique (même si je pense que le silence est une composante majeure du discours !). Bon, évidemment, comme tu le dis toi-même, un forum n’est pas l’endroit possible pour être justes, précis, attentifs aux détails etc.
      Restent les cafés !