person:carl von clausewitz

  • Black Blocs : de Macron au capitalisme, les raisons de la colère
    Christian Losson , Willy Le Devin et Laure Bretton, Libération, le 2 mai 2018
    http://www.liberation.fr/france/2018/05/02/black-blocs-de-macron-au-capitalisme-les-raisons-de-la-colere_1647382

    « Qui nous sommes est moins important que ce que nous voulons. Et nous voulons tout, pour tout le monde » : c’est l’un des slogans les plus connus des actions Black Bloc. Apparues dans les années 80 en Allemagne, ces opérations ont connu leur apogée médiatique lors des grands sommets internationaux des années 2000. En France, ce sont les manifestations contre la loi travail en 2016 qui leur ont offert une nouvelle vitrine.

    Quel mot d’ordre a été passé avant la manifestation de mardi ?

    C’est essentiellement sur les réseaux sociaux ou des forums identifiés que les consignes de formation du Black Bloc de mardi ont été diffusées. Cinquante ans après Mai 68, à l’heure où les mouvements sociaux se multiplient en France, certains collectifs comme Génération ingouvernable, né début 2017 pour contester la présidentielle, entendaient faire de cette fête des travailleurs un « 1er Mai révolutionnaire », voire une « journée en enfer ». L’appel relayé sur Facebook expliquait que « manifester entre Bastille et République a[vait] largement montré ses limites ». Par conséquent, « nous devons nous attaquer directement à ceux qui sont responsables de notre situation. Ils sont au nombre de trois : les partis politiques, les banques, les multinationales. […] Vous devez réaliser des opérations coup-de-poing par petits groupes de 3 ou 4 personnes maximum », pouvait-on lire dans le texte.

    Début avril, un autre texte publié sur Lespaves.net et traduit en huit langues incitait les militants, français ou étrangers, à « converger » vers Paris à l’approche de ce mai anniversaire. Le texte dénonçait « un monde plus malade qu’il ne l’a jamais été », rongé par l’ubérisation, le capitalisme vert, les migrants fuyant les guerres ou les destructions climatiques, les écosystèmes détruits. « Ils commémorent, on recommence » résonnait comme le mot d’ordre général.

    Citant tour à tour l’expulsion de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, les opérations policières contre les facs occupées depuis le début du printemps, les comités de soutien aux migrants, la grève à la SNCF, un communiqué appelait à « transformer ces différents foyers de révolte en une seule vague insurrectionnelle pour faire chuter ce régime détestable ». « C’est un mélange de colère contre Emmanuel Macron et la crise de la politique, et une logique de longue durée contre le capitalisme et le néolibéralisme », analyse le chercheur en science politique canadien Francis Dupuis-Déri, auteur du livre les Black Blocs : quand la liberté et l’égalité se manifestent.

    A quand remonte la première action Black Bloc ?

    Probablement à des actions d’autonomes allemands au début des années 80, quand Berlin-Ouest lance une offensive contre les squats et que s’y oppose un Schwarzer Block. On retrouve ces Autonomen un an plus tard, quand ils se mobilisent contre les néonazis ou le nucléaire. Un tribunal de Francfort veut alors faire condamner des manifestants « membres de l’organisation terroriste Black Bloc ». C’est encore eux qui prennent la rue en 1986 à Hambourg pour lutter contre la traque des squats. Ou leurs camarades qui dénoncent la guerre du Golfe en 1991 à Washington ou ailleurs.

    Ils explosent médiatiquement lors du sommet de l’OMC à Seattle, en 1999, où se multiplient les zones autonomes temporaires. Au sommet du FMI à Prague en 2000, ils seront près de 3 000 activistes, et à Gênes, l’année suivante, la répression policière fait un mort, un jeune altermondialiste, Carlo Giuliani, abattu d’une balle dans la tête. Tous les sommets internationaux des années 2000 sont marqués par une montée en puissance de la violence. On les retrouve ensuite lors du « printemps érable » à Montréal en 2012, lors du printemps arabe en Egypte en 2013, et même au Brésil contre la corruption. Si les actions se concentrent toujours contre les sommets diplomatiques, la focale s’est rapprochée ces dernières années des mouvements sociaux. En France, les Black Blocs ont pris leurs marques dans les ZAD, à Sivens ou à Notre-Dame-Des-Landes, et noyauté les manifestations de soutien à Nantes et à Rennes en 2014. Et la loi travail en 2016 a fait naître une nouvelle génération de Black Blocs français.

    Ce 1er Mai français était-il différent des autres mobilisations des Black Blocs ?

    Les modes opératoires - une apparition massive et instantanée, des tenues noires, des foulards, des bombes incendiaires - et les cibles de ces militants - les symboles de la « pourriture capitaliste » - n’ont pas changé. Les chercheurs s’accordent cependant sur une nouveauté bien française avec la pratique du « cortège de tête » dans les manifestations depuis la mobilisation contre la loi travail. Au prix d’altercations musclées avec les services d’ordre des syndicats, certains manifestants radicaux ont en effet réussi à se placer à l’avant des manifestations sociales depuis deux ans.

    Mardi à Paris, selon la préfecture de police, il y avait trois mouvements : le cortège des partis et syndicats traditionnels (20 000 personnes), un « cortège de tête » (14 500 militants) et 1 200 militants radicaux. « Réussir à se positionner en tête et avec une telle densité, c’est du jamais vu », estime Francis Dupuis-Déri. Selon le professeur à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), « cette pratique du cortège de tête où se mêlent des militants radicaux non cagoulés avec des Black Blocs offre à ces derniers des marges de manœuvre tactique face aux forces de l’ordre ». Plus que de la tolérance, c’est donc un appui qui s’exprime désormais physiquement. « Ce mode opératoire rend les Black Blocs encore plus visibles, abonde Hugo Melchior, doctorant en histoire contemporaine à Rennes-II et spécialiste des mouvements de jeunesse révolutionnaires. Mardi, les Black Blocs étaient enchâssés dans le cortège de tête, qui leur fournissait une protection, une clôture face aux forces de l’ordre. »

    Existe-t-il une idéologie Black Bloc ?

    Renvoyer les Black Blocs à des casseurs sans vergogne ou des voyous sans idéaux est systématique. Ils sont condamnés par les responsables politiques, la plupart des syndicalistes et des médias, et bien des intellectuels de droite comme de gauche. S’ils rejettent toute forme de catégorisation, les participants à ces actions instantanées sont au contraire très politisés. Libertaires, anars, autonomes… le mouvement est loin d’être homogène mais recrute uniquement dans les rangs de l’extrême gauche. « Ils sont tous radicalement antifascistes », précise Francis Dupuis-Déri. Ainsi, certains militants écologistes, queer ou LGBT ont parfois recours à ce type d’action, par envie de dénoncer l’ineptie et la brutalité du système. L’idée est de s’opposer au monopole de la violence « légitime » de l’Etat. « Leur dénominateur commun, c’est la critique radicale de l’ordre établi, de la société capitaliste et consumériste et leur volonté de la subvertir, explique le chercheur Hugo Melchior, ancien militant de la LCR. Parmi les Black Blocs présents mardi, nombreux sont ceux qui défendent le principe de créer une, deux, trois nouvelles ZAD, c’est-à-dire autant de zones libérées du règne de la marchandise. Ils ne croient plus au mythe de la grève générale, qui leur semble hors de portée avec la fragmentation accélérée du salariat. »

    Ce qui les rassemble aussi, c’est d’être hors système, hors partis, hors conformisme, mais agoraphiles, égalitaristes, horizontaux, utopistes. Il y a l’idée de mener une « guérilla imprévisible », une « contre-attaque aux oppressions » contre l’Etat et ses relais, contre la guerre économique qui « fabrique de l’hyperpauvreté », contre les « autoritarismes ».

    Il n’y a évidemment pas de théoricien ou de gourou qui ait inspiré le Black Bloc, mais des influences multiples, piochées ici ou là. Comme Hakim Bey, auteur de TAZ : zone autonome temporaire, anarchie ontologique, terrorisme poétique, paru en 1991. Ou encore le Communiqué au sujet des tactiques et de l’organisation, un manuel de combat publié quelque part dans le Midwest américain en 2001. Selon le chercheur canadien Francis Dupuis-Déri, cet ouvrage est au Black Bloc ce que sont l’Art de la guerre de Sun Tzu et De la guerre de Carl von Clausewitz à toute armée conventionnelle.

  • Lutte contre le terrorisme : les dangers d’une « justice de précaution »

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/09/22/lutte-contre-le-terrorisme-les-dangers-d-une-justice-de-precaution_5002045_3

    L’idée, à première vue, pouvait sembler de bon sens. « Il y a, dans la Constitution, un principe de précaution, a expliqué Nicolas Sarkozy le 11 septembre au Journal du dimanche. Pourquoi la lutte contre le terrorisme, donc la sécurité des Français, serait le seul sujet sur lequel on ne l’appliquerait pas ? » Au nom de ce raisonnement, l’ancien chef de l’Etat suggère que « tout Français suspecté d’être lié au terrorisme [fasse] l’objet d’un placement préventif dans un centre de rétention fermé ». C’est, au fond, et pour la première fois, le principe même de l’Etat de droit qui est remis en cause : suppression de la présomption d’innocence, du droit à un procès équitable, et de la règle d’or qui veut que l’on ne puisse être condamné que pour un crime ou un délit explicitement prévu par la loi.

    Une justice de précaution, comme il existe pour l’environnement un principe de précaution, est-elle envisageable ? Le procureur de Paris – qui est aussi le chef du parquet antiterroriste – assure qu’il n’est pas question d’enfermer les personnes fichées « S » (pour « sûreté de l’Etat ») dans des camps. « Il ne peut y avoir de détention préventive en dehors d’une procédure pénale, a rappelé François Molins dans Le Monde. C’est le socle de l’Etat de droit. On ne peut pas détenir quelqu’un avant qu’il ait commis une infraction. » Nicolas Sarkozy, nullement convaincu, est revenu à la charge le 15 septembre sur France 2. « A quoi sert-il de faire des fichiers “S” si ces fichiers “S” qui portent atteinte à la sûreté de l’Etat on n’en fait rien, on ne les examine pas, on ne les met pas en rétention ? »

    Intellectuellement, l’idée de ces centres de détention pose évidemment problème. « Appliquer le principe de précaution à la justice, c’est une déshumanisation, souligne la professeure de droit Mireille Delmas-Marty. Cela consiste à transposer le principe appliqué aux produits dangereux aux personnes, et donc à traiter les individus comme des produits. Le principe de précaution permet de retirer des produits du marché, faut-il retirer des individus de l’humanité ? »

    Techniquement, ces camps seraient sans doute impossibles à gérer. Vingt mille personnes, des Français pour l’essentiel, font l’objet d’une fiche « S », a indiqué Manuel Valls, dont 10 500 pour leurs liens avec la mouvance islamique. « Certaines peuvent être créées sur la base d’un simple renseignement non recoupé, d’une première suspicion, a expliqué le premier ministre. C’est un élément, un outil de travail. » Ces camps immenses seraient en outre difficilement maîtrisables – et permettraient à de jeunes radicalisés, qui ne se connaissent que par Internet, de se rencontrer, de se former et de s’entraîner en créant une hiérarchie interne qui serait décidée, non à Paris, mais en Syrie.

    La stratégie de la rupture

    « Ce serait une manière de créer des brigades de Daech, considère Antoine Garapon, le secrétaire général de l’Institut des hautes études sur la justice (IHEJ). Quand on parle de guerre, il faut trouver ce que le théoricien militaire Carl von Clausewitz appelait au début du XIXe siècle le centre de gravité, ce qui fait la force de l’ennemi. Ce qui fait la force des djihadistes, c’est qu’ils ont plus envie de se battre que nous, et que protéger leur vie n’est pas un élément régulateur, alors qu’il l’est dans un combat traditionnel où chacun cherche à limiter ses pertes. » On risquerait, dans ces camps, de créer de solides commandos, qui n’auraient rien à perdre et auraient eu le temps de nourrir une véritable haine de la France. « Plus on les gardera longtemps, plus ils seront organisés et moins on pourra les relâcher, résume Antoine Garapon. Aucun homme politique ne prendra ce risque. »

    La perspective d’une « justice de précaution » constitue ainsi un nouveau glissement, et sans doute le plus inquiétant, hors du droit commun. Depuis 1986, la lutte antiterroriste s’est construite en France sur un régime d’exception : les faits sont désormais jugés par une cour d’assises sans jurés et instruits par des magistrats spécialisés, appuyés par un parquet à compétence nationale et par des policiers qui sont à la fois spécialistes du renseignement et officiers de police judiciaire. Les procédures sont tout aussi spécifiques : la garde à vue commune, qui est en France de vingt-quatre heures renouvelables une fois, peut atteindre six jours en matière terroriste. Et, durant ces trente années – seize lois antiterroristes ont été adoptées entre 1986 et 2015 –, les mesures limitant les libertés publiques n’ont cessé de se durcir. En passant peu à peu d’une logique de répression à une logique de prévention.

    Une étape décisive est franchie en 1996 avec la création de l’« association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». La participation « à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation » d’un acte de terrorisme devient en soi un acte de terrorisme, puni de dix ans de prison – et ce avant même que des actes aient été commis. C’est la doctrine de la « neutralisation judiciaire préventive », selon le mot de Pierre de Bousquet de Florian, à l’époque patron de la Direction de la surveillance du territoire (DST).

    L’année 2008 est un tournant, avec l’adoption de la loi sur la rétention de sûreté – directement inspirée d’une loi nazie de 1933 . Elle permet de garder enfermés des condamnés considérés comme dangereux, même après l’exécution de leur peine, et pour une période indéfiniment renouvelable. Alors que l’association de malfaiteurs définie en 1996 devait être caractérisée par « des éléments matériels » et connaître un « commencement d’exécution » (parfois mince), la notion de dangerosité instaurée par la loi de 2008 va plus loin. « Au nom de la prévention, la réforme marque une rupture avec la vision légaliste et humaniste du droit pénal, au profit d’une conception qui légitime une extension de la surveillance à vocation illimitée dans le temps », indique Mireille Delmas-Marty, auteure d’Aux quatre vents du monde, (Seuil, 150 p., 17 €).

    Les incertitudes de la « préemption »

    Avec cette loi, la justice de précaution pointe déjà son nez, qui veut maintenant interner les personnes seulement susceptibles, un jour, de passer à l’acte. Si la rétention de sûreté garde un mince lien avec le droit pénal – l’existence antérieure d’un crime –, ce ne serait même plus le cas avec la création de centres de rétention des fichés « S », qui serait une manière de contourner l’Etat de droit. Or, ce dernier reste ce qui définit les démocraties, c’est-à-dire un attachement aux libertés fondamentales gravées dans le marbre de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), et partagées avec les quelque 800 millions de personnes de la zone de compétence du Conseil de l’Europe.

    Pourtant, pour Nicolas Sarkozy, l’Etat de droit est lui-même devenu un concept élastique. « Il n’a rien à voir avec les Tables de la Loi de Moïse », a déclaré l’ancien chef de l’Etat, qui ne cache pas qu’il entend « demander la réécriture » de certains articles de la CEDH. Guillaume Larrivé, député Les Républicains de l’Yonne et membre du Conseil d’Etat, assure lui aussi que l’Etat de droit « n’est pas une norme absolue et transcendante, détachée de l’Histoire. C’est une notion relative et vivante, qui peut être adaptée aux nécessités de l’époque, telles qu’elles sont comprises par le peuple souverain. Autrement dit, c’est à nous, Français de 2016, de dire quelles sont les normes de l’Etat de droit adaptées au temps présent ».

    Ces discours font frémir nombre de juristes. « Le vrai débat, qui est proprement stupéfiant et qui était encore inimaginable il y a quelques mois, c’est que, derrière ce principe de précaution, certains remettent en cause l’existence même de l’Etat de droit, s’alarme l’avocat Patrick Baudouin, président d’honneur de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme. Le simple fait qu’on puisse penser qu’il faut s’en affranchir pour lutter contre le terrorisme prouve que le ver est dans le fruit. Et ce discours, au nom de la peur du terrorisme ou de la compassion avec les victimes, passe très bien dans l’opinion publique. On glisse peu à peu vers le règne de l’arbitraire. C’est effrayant. »

    Pour Antoine Garapon, le but désormais assigné à la justice n’est plus de condamner des coupables, mais d’écarter les suspects avant même qu’ils passent à l’acte. « Dans cette étrange guerre sans combattants, le pouvoir a bien conscience que si un attentat se produit, il aura déjà perdu la bataille, estime le magistrat. Le procès qui interviendra quelques mois, voire quelques années plus tard, n’y changera rien. » La justice doit donc intégrer une dimension plus incertaine, celle de la « préemption » : la prévention entendait agir sur les causes, la préemption, véritable utopie moderne, vise, par une interprétation du comportement, à supprimer l’événement. Faire des campagnes contre l’alcool au volant, c’est de la prévention ; interdire automatiquement à une voiture de démarrer quand le conducteur a une haleine chargée, c’est de la préemption.

    Dans cette conception, la figure de l’islamiste radicalisé, pour Antoine Garapon, se distingue de celle du suspect. « On est suspecté d’un fait qui a été commis, alors que le radicalisé est suspecté, non pas d’avoir accompli un acte terroriste, mais de pouvoir le commettre. On ne s’appuie plus sur le passé récent, on veut prévoir le futur proche. » Et l’on substitue à la notion d’activité celle de comportement : être terroriste, c’est désormais être un criminel en puissance. Finalement, le radicalisé « réactive et laïcise une théorie de la prédestination, amputée de la grâce qui sauve ».

    « Où va-t-on s’arrêter ? »

    Il s’agit ainsi pour l’Etat de mettre en place « une boucle automatique de rétroaction », à laquelle nous habitue le monde numérique, indique le magistrat, et ce sans passer par la justice – d’où l’idée de créer des camps pour les fichés « S ». « Cela veut dire qu’on va condamner des gens, parfois à des peines lourdes, sans trop savoir ce qu’ils ont fait, en Syrie ou ailleurs, poursuit Antoine Garapon. La garantie élémentaire de notre droit, c’est pourtant que le comportement répréhensible soit caractérisé par une loi préalable et qu’il y ait un fait délictuel. Or nous avons aujourd’hui des qualifications très floues qui n’exigent même plus qu’il y ait un fait. » Etre allé en Syrie ou avoir voulu y aller suffit. « Il y a une confusion entre la matérialité du fait et l’immatérialité du virtuel – il n’a rien fait, mais il aurait pu. » Même chose pour l’apologie du terrorisme. « On poursuit quelqu’un parce qu’il a regardé des vidéos de Daech. On confond le faire et le voir. Parce qu’il a vu, il a fait. La peur d’un fait et la réalité de ce fait se confondent. »

    Y a-t-il encore besoin de magistrats dans ce type de riposte ? « Nous sommes dans un temps nouveau qui consiste à conjurer ce qui pourrait se passer, mais qui ne s’est pas encore passé. Il n’y a plus de place pour la justice dans ce temps », estime Antoine Garapon, qui publie, le 5 octobre, Démocraties sous stress (avec Michel Rosenfeld, PUF, 217 p., 17 €). Il s’agit désormais de prévenir les risques et de montrer qu’on a tout fait, y compris ce qui n’est pas légal, pour empêcher les attentats. « Cette lutte exclut le contrôle de la justice, car il est impossible de condamner les gens avant qu’ils aient agi, conclut le secrétaire général de l’IHEJ. Son rapport au temps, sa distance, son souci de procédure sont autant de facteurs d’inefficacité qui sont qualifiés d’“arguties juridiques”. »

    Les lois sur le renseignement du 24 juin 2015, qui ont légalisé les pratiques clandestines des services, puis celle du 3 juin 2016, qui a écarté le juge judiciaire de nombre de procédures antiterroristes, sont cohérentes avec cette évolution : elles marginalisent le tribunal et concentrent davantage de pouvoirs dans les mains des procureurs. Et de leurs nouveaux rivaux, les préfets, par essence aux ordres du gouvernement. « S’il y a d’autres attentats, où va-t-on s’arrêter ? s’inquiète l’avocat Patrick Baudouin. On voit bien que l’accumulation des mesures répressives n’empêche pas le terrorisme, dont l’objectif reste la destruction de nos valeurs. Et on tombe à pieds joints dans le piège qui nous est tendu. » C’est aussi l’analyse d’Antoine Garapon : « L’Etat s’empoisonne lui-même par une réaction désordonnée et exagérée de ses défenses. »

  • China vs US - Empires at War
    https://www.youtube.com/watch?v=alHK5tLlJwg

    Ce documentaire donne des informations sur sur le développememt militaire et stratégiqe de la Chine. Il prétend que qu’une phrase de Mao serait l’idée principale derrière la stratégie chinoises actuelle : La diplomatie c’est la guerre sans effusion de sang, la guerre c’est la diplomatie avec effusion de sang. Rien de nouveau depuis Clausewitz.

    Reste à savoir si les points de vue des personnes interviewées représentent vraiment les idées des groupes au pouvoir.

    Carl von Clausewitz
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Carl_von_Clausewitz

    La thèse de la guerre en tant que duel étant posée, il analyse son antithèse selon la méthode dialectique, en écrivant :
    « La guerre n’est que le prolongement de la politique par d’autres moyens. »

    #Chine #USA #guerre #armement #economie

  • The secret US army study that targets Moscow – POLITICO
    http://www.politico.eu/article/the-secret-us-army-study-that-targets-moscow

    Lieutenant General H.R. McMaster has a shaven head and gung-ho manner that only add to his reputation as the U.S. Army’s leading warrior-intellectual, one who often quotes famed Prussian general and military theorist Carl Von Clausewitz. A decade ago, McMaster fought a pitched battle inside the Pentagon for a new concept of warfare to address the threat from Islamist terrorists and insurgents in Afghanistan, Iraq and other trouble spots. Now, his new mission is more focused.

    Target: Moscow.

    POLITICO has learned that, following the stunning success of Russia’s quasi-secret incursion into Ukraine, McMaster is quietly overseeing a high-level government panel intended to figure out how the Army should adapt to this Russian wake-up call. Partly, it is a tacit admission of failure on the part of the Army — and the U.S. government more broadly.

    It is clear that while our Army was engaged in Afghanistan and Iraq, Russia studied U.S. capabilities and vulnerabilities and embarked on an ambitious and largely successful modernization effort,” McMaster told the Senate Armed Services Committee last week. “In Ukraine, for example, the combination of unmanned aerial systems and offensive cyber and advanced electronic warfare capabilities depict a high degree of technological sophistication.

    In Ukraine, a rapidly mobilized Russian-supplied rebel army with surprisingly lethal tanks, artillery and anti-tank weapons has unleashed swarms of unmanned aerial vehicles and cyberattacks that shut down battlefield communications and even GPS.
    […]
    McMaster’s response is the Russia New Generation Warfare Study, whose government participants have already made several unpublicized trips to the front lines in Ukraine. The high-level but low-profile effort is intended to ignite a wholesale rethinking — and possibly even a redesign — of the Army in the event it has to confront the Russians in Eastern Europe.

    It is expected to have profound impact on what the U.S. Army will look like in the coming years, the types of equipment it buys and how its units train. Some of the early lessons will be road tested in a major war game planned for June in Poland. Says retired Army Chief of Staff General Gordon Sullivan: “That is all designed to demonstrate that we are in the game.

    Et donc, contraints de démontrer que si, si, #still_in_the_game

  • #Musique et #conflits_armés après 1945

    Dans son ouvrage De la guerre, paru pour la première fois en 1832, Carl von Clausewitz affirme que la #guerre se situe à l’intérieur des rapports politiques : elle serait un véritable « instrument politique, une continuation des rapports politiques, la réalisation des rapports politiques par d’autres moyens1 ». Ainsi, l’un des apports les plus importants de la pensée de Clausewitz à la compréhension de la guerre, résultant de ce postulat, serait que celle-ci ne constitue pas la rupture d’un processus, un moment liminaire en dehors des rapports sociaux et politiques, mais leur continuation – « la politique existe avant la guerre, elle se poursuit à travers la guerre dans la décision d’engagement des forces armées et continue après la guerre ; à aucun moment son cours n’est interrompu2 ».


    http://transposition.revues.org/407
    #revue