person:christophe ayad

  • La dangereuse alliance entre les Etats-Unis, Israël et l’Arabie saoudite
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/11/09/la-dangereuse-alliance-entre-les-etats-unis-israel-et-l-arabie-saoudite_5212

    A peine le califat de l’organisation Etat islamique (EI) réduit à néant, les conflits, mis en sommeil – ou plutôt passés au second plan – le temps de l’apogée et de la chute du projet djihadiste, se réveillent au Proche-Orient.

    La revendication nationale des Kurdes d’Irak d’abord, qui a été rapidement anéantie, en attendant qu’on connaisse le sort réservé à leurs cousins de Syrie. Et, surtout, le conflit latent entre l’Arabie saoudite et l’Iran, les deux principales puissances régionales, qui a fini par incarner ce que l’on range communément sous l’appellation vague et trompeuse de « guerre entre les sunnites et les chiites ».

    Ce feu-là vient de se rallumer à toute allure, attisé par les Etats-Unis, dont le président, Donald Trump, a sonné la curée en « décertifiant », mi-octobre, l’accord nucléaire conclu en juillet 2015 entre les grandes puissances (Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Russie, Chine et Allemagne) et la République islamique d’Iran sur son programme nucléaire controversé.

    L’Arabie saoudite vient subitement de faire monter la tension ambiante en contraignant (selon plusieurs récits non recoupés parus dans la presse) le premier ministre (sunnite) libanais, Saad Hariri, à démissionner et à dénoncer, dans un discours préparé qu’il a dû lire d’une voix blanche, les ingérences du Hezbollah (le grand parti-milice chiite libanais) et de son parrain iranien dans les affaires du pays du Cèdre.

    Le lendemain, un ministre saoudien déclarait que l’Arabie saoudite se considérait comme « en état de guerre » au Liban et attribuait directement à Téhéran le tir d’un missile intercepté au-dessus de Riyad, la capitale saoudienne, par les rebelles houthistes yéménites accusés d’être à la solde de l’Iran chiite.

    Ce qui se dessine dans la recomposition actuelle du Proche-Orient est un axe inédit entre l’Arabie saoudite, Israël et les Etats-Unis,...

    #paywall

    • Dans sa chronique, Christophe Ayad, responsable du service International du « Monde », rappelle que les trois pays, qui ont en commun leur détestation du régime iranien, cherchent à réduire son emprise sur la région.

      A peine le califat de l’organisation Etat islamique (EI) réduit à néant, les conflits, mis en sommeil – ou plutôt passés au second plan – le temps de l’apogée et de la chute du projet djihadiste, se réveillent au Proche-Orient.

      La revendication nationale des Kurdes d’Irak d’abord, qui a été rapidement anéantie, en attendant qu’on connaisse le sort réservé à leurs cousins de Syrie. Et, surtout, le conflit latent entre l’Arabie saoudite et l’Iran, les deux principales puissances régionales, qui a fini par incarner ce que l’on range communément sous l’appellation vague et trompeuse de « guerre entre les sunnites et les chiites ».

      Ce feu-là vient de se rallumer à toute allure, attisé par les Etats-Unis, dont le président, Donald Trump, a sonné la curée en « décertifiant », mi-octobre, l’accord nucléaire conclu en juillet 2015 entre les grandes puissances (Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Russie, Chine et Allemagne) et la République islamique d’Iran sur son programme nucléaire controversé.

      L’Arabie saoudite vient subitement de faire monter la tension ambiante en contraignant (selon plusieurs récits non recoupés parus dans la presse) le premier ministre (sunnite) libanais, Saad Hariri, à démissionner et à dénoncer, dans un discours préparé qu’il a dû lire d’une voix blanche, les ingérences du Hezbollah (le grand parti-milice chiite libanais) et de son parrain iranien dans les affaires du pays du Cèdre.

      Le lendemain, un ministre saoudien déclarait que l’Arabie saoudite se considérait comme « en état de guerre » au Liban et attribuait directement à Téhéran le tir d’un missile intercepté au-dessus de Riyad, la capitale saoudienne, par les rebelles houthistes yéménites accusés d’être à la solde de l’Iran chiite.

      La détestation commune de l’Iran

      Ce qui se dessine dans la recomposition actuelle du Proche-Orient est un axe inédit entre l’Arabie saoudite, Israël et les Etats-Unis, rassemblés par leur commune détestation du régime iranien et leur volonté de réduire son emprise sur la région.

      L’Iran, par alliés interposés, tire en effet les ficelles en Syrie, au Liban, en Irak (un peu moins) et au Yémen (encore moins). Sa quête permanente d’armes de destruction massive (le nucléaire, actuellement gelé, et le balistique, en plein développement) vise à lui assurer une supériorité stratégique – Téhéran parle plutôt de parité – qu’Israël et l’Arabie saoudite ne peuvent accepter.

      Longtemps, Barack Obama a cherché à raisonner ses alliés saoudien et israélien, voire ignoré leurs inquiétudes. L’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump, et l’ascension éclair d’un jeune prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salman, ont tout bouleversé.

      Depuis janvier, Jared Kushner, le gendre du président américain, ne cesse de faire la navette entre Jérusalem et Riyad (ainsi qu’Abou Dhabi, capitale des Emirats arabes unis) sans que grand-chose ne fuite de ses tournées. Il travaille en fait à un vieux rêve israélien : rapprocher les Arabes – du moins les monarchies du Golfe – d’Israël.

      Israël doit trouver de nouveaux « amis »

      Dans une région qui lui est hostile depuis sa naissance, en raison de l’absence d’un Etat palestinien, Israël est obligé de trouver des alliés ou du moins des puissances « amicales ». Longtemps, ce furent l’Iran du chah et la Turquie kémaliste, alliés des Etats-Unis et même pilier de l’OTAN pour ce qui est de la Turquie.

      Les Arabes, a fortiori les Palestiniens, étaient les grands perdants de cette entente tacite. La révolution islamique de 1979 en Iran a tout changé : l’Iran de l’ayatollah Khomeyni s’est autoproclamé champion de la cause palestinienne – sans demander leur avis aux Palestiniens, bien sûr – ou plutôt du « front du refus » à Israël.

      Puis la Turquie est devenue hostile sous la houlette de l’islamiste Recep Tayyip Erdogan, les deux pays rompant même leurs relations diplomatiques de 2010 à 2016. Les relations ont été restaurées, pas la confiance. Il faut donc, pour Israël, trouver de nouveaux « amis », l’Egypte et la Jordanie, qui ont signé des traités de paix, en restant au stade de la « paix froide » du fait de leurs opinions publiques très hostiles. En revanche, les puissances du Golfe se sont lentement rapprochées d’Israël, depuis la découverte, en 2002, de l’existence d’un programme nucléaire iranien avancé.

      En face, l’axe russo-irano-turc

      Ce mouvement tectonique, longtemps lent et souterrain, s’est accéléré avec l’arrivée au pouvoir dans le Golfe d’une nouvelle génération pas embarrassée par les tabous de ses aînés. Mohammed Ben Salman, l’homme fort du royaume saoudien, et Mohammed Ben Zayed, celui des Emirats, ne s’encombrent pas de la « cause sacrée » palestinienne. C’est l’Iran qui les obsède, tout comme Israël, qui a bien compris que les Arabes étaient faciles à diviser – quand ils ne le font pas tout seuls comme dans l’actuelle crise du Qatar.

      Aujourd’hui, il ne manque plus grand-chose pour que cette nouvelle alliance s’affiche au grand jour. L’alliance des Etats-Unis, d’Israël et du Golfe serait une combinaison sans précédent de puissance militaire et technologique, de capitaux financiers et de ressources énergétiques. En face, l’axe russo-irano-turc qui se dessine fait pâle figure : armées nombreuses mais technologies obsolètes, économies exsangues, intérêts stratégiques divergents. Mais cette comparaison vaut surtout sur le papier car, pour le moment, c’est bien cette coalition improbable – dans laquelle Ankara a un pied dedans et l’autre dehors – qui contrôle le terrain et ne cesse d’avancer.

      De fait, ce qui manque le plus à l’alliance Etat-Unis - Israël - Arabie saoudite en gestation, c’est un minimum de flair politique et d’intelligence par rapport aux situations de terrain. Ces trois pays se sont chacun lancé dans des conflits ingagnables ces dernières années : les Etats-Unis en Irak (en 2003), l’Arabie saoudite au Yémen (depuis 2015), et Israël au Liban (en 1982 et en 2006) puis dans la bande de Gaza (2008, 2012 et 2014). Lancer des guerres est facile, mais, passé les premières victoires, il faut savoir durer. Et c’est la principale qualité de l’Iran : savoir patienter et ne jamais dévier de son but.

  • La propagande et la guerre de l’information ont tenu une place essentielle dans la bataille d’Alep – par Christophe Ayad – Souria Houria – Syrie Liberté – سوريا حرية
    https://souriahouria.com/la-propagande-et-la-guerre-de-linformation-ont-tenu-une-place-essentie

    une stratégie de « dés­information permanente » a été mise en œuvre pour briser le réduit rebelle alépin, en plus « du siège, des bombardements aveugles, de l’usage d’armes chimiques et de bombes incendiaires ». A Alep, l’information a été élevée au rang d’arme de guerre. Plus encore que sa barbarie sanguinaire, là est la spécificité du régime de Bachar Al-Assad.

  • L’israélisation du monde (occidental)
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/12/01/l-israelisation-du-monde-occidental_5041187_3232.html
    LE MONDE | 01.12.2016 | Par Christophe Ayad

    Chronique. Tombant dans le piège tendu par Al-Qaida et l’EI, l’Occident s’est mis à ressembler à Israël : une forteresse assiégée, cherchant des réponses sécuritaires à ses problèmes politiques.

  • Que peut encore l’humanitaire ?
    http://www.franceculture.fr/emissions/linvite-des-matins/que-peut-encore-lhumanitaire

    Hallucinant, Fabius vient de quitter le MAE et on entend (enfin) sur Francde-Cult des choses qui sonnent d’une manière étrangement différente ! Morceaux choisis de l’entretien avec Jean-Christophe Rufin (et Luc Mathieu de Libé), qui a tout de même une lourde expérience diplomatique (https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Christophe_Rufin#Carri.C3.A8re_dans_les_minist.C3.A8res_et_la_dip)

    On nous parle des « rodomontades de M. Fabius »... qui a dû « capituler sur tout ». Un homme qui avait peut-être « surestimé un tout petit peu les capacités de la France », « qui prenait des attitudes martiales qui n’ont pas été suivi d’effet »’... « Sur l’Iran, une position extrêmement en pointe qui n’a pas empêché les Américains de faire ce qu’ils voulaient »... Les déclarations sur Bachar qui ne méritait pas d’être sur terre, « très très dangereux »... Questionné s’il fallait intervenir ou non, Rufin commence par critiquer sévèrement l’intervention en Libye avant de déclarer que « si l’on regarde bien,on est intervenu en Syrie, verbalement, en laissant croire aux populations concernées qu’on allait intervenir »... « On les a un petit peu envoyées (les populations) à la mort »... Rufin se déclare effondré en voyant les ruines de ce pays, sachant qu’on a « d’une certaine façon nourri cette guerre civile ».

    Intervention de Mathieu, sortant le discours classique sur la non-interv ention notamment après « l’attaque chimique de la Goutha ». Rufin répond que, dès qu’il y a eu militarisation (c’est-à-dire bien avant) c’était autre chose et revient sur la responsabilité qu’il y a à dire à des gens qu’on va intervenir alors qu’on savait qu’on n’allait pas le faire.

    Rufin, suite à des crétineries de Mathieu, enfonce le clou : « en Iran, ils savaient qu’on n’interviendrait pas » et suggère qu’on réfléchisse un peu à ce type de situation dans lesquelles on sait qu’on ne peut pas intervenir. Si personne ne se réjouit de ce qui se passe, comme il insiste, il rappelle qu’il faudra tout de même dresser le bilan. (En d’autres termes, le bilan du fiasco total de la période Fabius décrite par les lèche-bottes comme le triomphe de la diplomatie française !)

    #syrie

    • Le Monde selon Hubert Védrine : Vendredi 12 février 2016
      http://www.franceculture.fr/emissions/le-monde-selon-hubert-vedrine/le-monde-selon-hubert-vedrine-vendredi-12-fevrier-2016

      Dans un style nettement plus feutré et avec toute l’onction nécessaire à cet exercice, Védrine souligne le « bilan important » de Fabius à la COB 21 sur le plan technique, ainsi que, sur le même plan, l’intégration au MAE des données économiques, avant de conclure, en douce, sur le bilan « plus discuté » (ce qui en langage diplomatique peut se traduire par fiasco) des dossiers iranien et syrien...

    • Christophe Ayad dans Le Monde sur le bilan en demi-teinte de Laurent Fabius

      Passé ce fatal 31 août 2013, la France n’a cessé de s’isoler de son principal allié occidental, tenant une position qui, aussi morale et digne fût-elle, a échoué à faire bouger les lignes sur le terrain. S’il est un reproche que l’on ne peut pas faire à M. Fabius, c’est celui de la versatilité et de l’opportunisme. Mais son intransigeance en Syrie, qui a aligné la France sur des puissances sunnites comme l’Arabie saoudite, le Qatar ou la Turquie, s’apparente aujourd’hui à une impasse. Sans doute, M. Fabius a-t-il surestimé le poids de la France, puissance moyenne dans un monde « zéropolaire », comme il aime à le décrire, pour pouvoir changer le cours du drame syrien.

      Un échec, deux succès

      A l’heure de rejoindre la présidence du Conseil constitutionnel, le bilan de l’ex-« plus jeune premier ministre de France » – le record tient toujours – au Quai d’Orsay se résume ainsi : un échec (la Syrie), deux succès (la COP21 et le nucléaire iranien) et deux trous noirs (l’Afrique et l’Europe). A l’inverse de la Syrie, M. Fabius a joué un rôle décisif dans l’accord mondial, obtenu en décembre 2015, sur la limitation des émissions de gaz à effet de serre. Peu convaincu au départ, il s’est emparé du sujet à bras-le-corps, forçant son administration à se mettre au service du sommet de Paris, dont le succès était loin d’être acquis d’avance. Le sens de la méthode et la capacité de travail de M. Fabius ont fait merveille et, au moment d’annoncer l’accord, cet animal à sang froid a eu du mal à masquer son émotion. Il entend d’ailleurs garder la présidence de la COP jusqu’à la fin de l’année, malgré ses futures fonctions au Conseil constitutionnel.

      Lire aussi : Laurent Fabius entend rester président de la COP même s’il entre au Conseil constitutionnel

      Sur le dossier nucléaire iranien, M. Fabius, qui partageait la ligne « intransigeante » des faucons du Quai d’Orsay, se félicite d’avoir obtenu un accord « robuste », au prix d’un coup de gueule, le 8 novembre 2013 à Genève, alors que les Américains, pressés d’avancer, s’apprêtaient à signer un accord intérimaire « au rabais » :

      « Que n’ai-je entendu à l’époque ! Combien de sottises ont été dites, comme quoi la France paierait son intransigeance, expliquait-il récemment au Monde. Eh bien, la preuve que j’ai eu raison est que la France a été l’un des tout premiers pays visités par le président iranien Rohani. »

      En revanche, en Afrique, là où la France peut encore faire la différence militairement, M. Fabius s’est montré d’une discrétion proche de l’effacement.

      http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/02/11/le-bilan-en-demi-teinte-de-laurent-fabius_4863060_823448.html#e2rmp2kr8L5Kua

  • Ronit Matalon, écrivaine israélienne : « Nous vivons sous un régime d’apartheid »
    Le Monde | 09.01.2016 | Propos recueillis par Christophe Ayad
    http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2016/01/09/ronit-matalon-ecrivaine-israelienne-nous-vivons-sous-un-regime-d-apartheid_4

    Depuis l’automne 2015, Israël est frappé par une vague d’attaques au couteau. Des actes de violence imprévisibles, menés par des individus isolés. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

    Ces attaques au couteau, ce n’est qu’un début. Il y aura autre chose. Je ne sais pas exactement pourquoi ces individus font cela, mais je suis sûre que ce serait une question pertinente à poser à nos services de renseignement. En tant qu’intellectuelle, je me pose des questions. Des questions que se posent des services de renseignement.

    Je me contente de constater plusieurs choses. D’abord, l’occupation [des territoires palestiniens] est comme un malade en phase terminale et je m’étonne presque que tout cela ne soit pas arrivé plus tôt. Ensuite, je constate que la caractéristique fondamentale de la société israélienne est le déni. Elle est prisonnière de sa rhétorique sur la sécurité et la victimisation....

    #abonnés

    la suite : http://www.france-palestine.org/Ronit-Matalon-ecrivaine-israelienne-Nous-vivons-sous-un-regime-d-a

  • Une pique de Christophe Ayad contre « François d’Arabie »
    http://abonnes.lemonde.fr/idees/article/2015/04/30/francois-d-arabie_4625576_3232.html

    il y a quelque ironie à faire du royaume saoudien, qui interdit l’existence de partis politiques et refuse aux femmes le droit de conduire, son partenaire privilégié dans le monde arabe. L’Arabie saoudite est un pays, certes, en lutte contre Al-Qaida et l’Etat islamique, mais son idéologie officielle reste le wahhabisme, la version la plus rigoriste de l’islam sunnite. La peine de mort, au sabre et sur la place publique, y reste pratiquée à haute dose et le blasphème y est passible de 1 000 coups de fouet, comme ce fut le cas du jeune blogueur libéral Raef Badawi. Tout cela n’est « pas très Charlie »…

    #Arabie_saoudite

  • épouvantable carte du Monde sur la déchirure du Proche-Orient entre chiites et sunnites
    http://abonnes.lemonde.fr/proche-orient/infographie/2015/03/27/le-proche-orient-dechire-entre-chiites-et-sunnites_4602729_3218.html
    épouvantable carte des cartographes du Monde qui unifie le monde chiite, donnant consistance au fantasme géopolitique des monarchies sunnites et passant complètement par dessus la diversité religieuse (alévis et alaouites ne sont pas des duodécimains ; zaydites et chiites duodécimains du Liban, d’Irak et d’Iran ont aussi peu en commun sur le plan religieux). Voilà comment on simplifie par la carte un raisonnement qui par ailleurs s’efforçait de ne pas l’être :

    Après le Liban, l’Irak, la bande de Gaza et la Syrie, le Yémen entre donc à son tour dans la tourmente de la grande guerre régionale entre puissances chiites et sunnites, pas tant motivée par des raisons religieuses que de suprématie géopolitique.

    écrivent Gilles Paris et Christophe Ayad : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2015/03/27/au-yemen-le-pari-risque-de-l-arabie-saoudite_4602744_3218.html#6bXrBfI5zUWI7


    Comment faire autrement : cartographier les mouvements politiques tels que les Houthis, le Hezbollah libanais, les milices irakiennes ainsi que les forces iraniennes déployées dans ces pays (cela reste à vérifier au Yémen), éventuellement dans les même ton, ou la même famille de symboles, mais ne pas unifier arbitrairement des sociétés (réduite à leur appartenance religieuse) et des mouvements politiques (même s’ils sont dominants). On verra déjà que les mouvements politiques alévis ne sont pas paramilitaires et n’ont guère de liens avec l’Iran et les autres groupes arabes.
    #cartographie #Yémen #chiisme

    • @rumor et @gonzo et @alaingresh (j’en oublie, n’hésitez pas à transmettre aux autres spécialistes de la région) : J’ai une espèce d’idée. Depuis quelques années, on se fracasse le crâne sur une possible représentation cartographique de la diversité politico-religieuse de la région, et même en discutant collectivement à l’époque où j’étais encore au Diplo, on a jamais réussi à aboutir à une solution (cartographique) vraiment acceptable.

      Dans mes archives, je trouve la dernière version d’une carte que nous avons créée - je crois me souvenir - en 2005, c’est à dire bien avant le début des révoltes arabes, mais juste après la deuxième guerre du Golfe.

      Il y a deux versions, et comme j’ai une dizaine de fichiers dans mes dossiers, je ne suis pas tout à fait sur que ce soit les versions « corrigées », mais en tout cas elles sont en place.

      Le thème de la carte était « Représentation de la diversité de l’Islam Chiite », raison pour laquelle on ne trouve pas les sunnites ni les kurdes (en tant que tels). Mais on peut concevoir de compléter la carte et créer un document plus exhaustif.

      J’ai envie de les remettre « au pot ». Je suis bien conscient que ces documents sont imparfait, d’où mon idée : partir de cette base, et élaborer une nouvelle esquisse qui prendrait en considération les quelques suggestions qu’Éric fait un peu plus haut.

      Sur la question des alliances et des soutiens, je serai plus prudent vu les supperpositions qui sont en train de se constituer : les alliances entre groupes djihadistes, les soutiens aux groupes djihadistes, les soutiens aux rebellions, les soutiens extérieurs (Russie, Etats-Unis, Europe, Iran, Arabie saoudite) et je me demande s’il faut intégrer cet aspect à une carte globale complète, ou s’il faudrait faire deux cartes : une de la diversité, et une plus centrées sur les conflits et les nouvelles « organisations politiques » ou groupes djihadistes qui commencent à s’imposer territorialement.

      Je ne suis pas spécialsite de la région, comme vous, mais je pense qu’il est plus que nécessaire de réfléchir collectivement à une représentation carto - qui ne sera jamais la réflexion de la réalité (ha ha !) - mais qui pourrait donner une autre image que celle toujours très simplificatrice et « misleading » qui nous sont servies dans la panique de l’actualité.

      Carte élaborée en 2005

      Même carte reprise en 2006

      #cartographie #proche-orient #moyen-orient #visualisation
      #diversité_politico_religieuse

    • OK @reka on peut faire un brain storming.
      Je me demande déjà si l’utilisation de « chiisme » comme catégorie générique n’est pas déjà problématique, sur les deux cartes que tu présentes. Pourquoi pas plutôt « hétérodoxies musulmanes » qui ne préjugerait pas d’une commune appartenance. Quitte à inclure des minorités classées habituellement du côté sunnite (ça existe ? là je ne vois pas, je vais vite).
      Deuxième idée, comme le proposait Bénédicte Tratnjek dans sa cartographie de la Syrie en guerre, prendre en charge la question de la densité : ne pas représenter les zones d’habitat continu et a fortiori les villes avec la même intensité que les zones plus ou moins désertiques.
      Troisièmement, mieux distinguer ce qui relève du politique (partis, institutions tenues par des partis revendiquant une dimension confessionnelle tels que le Hezbollah) et ce qui relève du démographique. Par exemple, distinguer le mouvement houtiste dans son implantation politique actuelle des zones zaydites au Yémen. Mais cela bien sûr c’est une éthique du cartographe.

  • Achille Mbembe : « Venez en Afrique, venez chez nous ! »

    http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/01/26/achille-mbembe-venez-en-afrique-venez-chez-nous_4563211_3212.html#GURl6oBAKH

    Mbembe, toujours trop rare...

    Entretien Achille Mbembe : « Venez en Afrique, venez chez nous ! »

    Propos recueillis par Serge Michel, Christophe Châtelot, Christophe Ayad et Cyril Bensimon

    Le Monde.fr Le 26.01.2015 à 08h27
    Achille Mbembe.

    Le Camerounais Achille Mbembe, 57 ans, est l’un des principaux théoriciens du postcolonialisme. Il vit aujourd’hui entre les États-Unis et l’Afrique du Sud. S’il n’a épargné personne dans sa critique des pouvoirs postcoloniaux, dénonçant leur exercice de la violence comme « obscène et grotesque », il fait aussi partie de ceux qui refusent de ne voir l’Afrique que dans la perspective du manque, du déficit, de ce qu’elle devrait être, en référence à de prétendus modèles occidentaux prônés par les institutions internationales. Il se passionne au contraire pour ce qu’elle est réellement.

  • J’ai raté l’anniversaire de la poignante déclaration de Gilbert Achcar, interviewé par Christophe Ayad en février 2013 :
    http://www.lemonde.fr/culture/article/2013/02/21/il-faut-en-passer-par-l-experience-de-l-islamisme-au-pouvoir_1836577_3246.ht

    Comme Locke, je préfère le chaos au despotisme, parce que dans le chaos j’ai le choix.

    Les millions de déplacés et réfugiés syriens – dont on se préoccupe tant désormais – ont peut-être du mal à prendre conscience de la belle liberté de choix dont ils bénéficient désormais. Mais s’ils vivaient d’une activité dématérialisée, parlaient parfaitement 3 langues et obtenaient sans difficulté des passeports et des billets d’avions pour n’importe quel endroit de la planète, sans doute apprécieraient-ils un peu plus la référence à Locke.

  • « Avec les Frères musulmans, l’armée a aussi écrasé la démocratie naissante », édito Christophe Ayad

    http://www.lemonde.fr/afrique/article/2013/08/14/avec-les-freres-musulmans-l-armee-a-aussi-ecrase-la-democratie-naissante-en-

    Les islamistes ne sont pas les seules victimes de l’assaut donné mercredi par les forces de sécurité contre les deux « sit-in » de militants pro-Morsi (...). Les libéraux ont été politiquement laminés par le choix du tout-sécuritaire qui a prévalu.

    #analyse #Egypte #Rabaa

  • En France, ce genre de chose passe pour du journalisme sérieux : un véritable cri du cœur, « Il ne faut pas alléger la pression sur l’Iran », signé Christophe Ayad, qui n’est qu’une interview de Youval Steinitz, « ministre des affaires stratégiques et du renseignement israélien ».
    http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2013/08/06/hassan-rohani-est-un-maitre-de-la-rhetorique_3457848_3218.html

    M’enfin vraiment…

    • le lecteur de questions Christophe Ayad parvient tout de même à faire dire au « ministre des affaires stratégiques et du renseignement israélien » :

      Ce que nous demandons n’est rien d’autre que l’application des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU

      Top-là ya plus de problème !

  • Pour Christophe Ayad du Monde, Al Qaeda en Syrie « est encensé par les Syriens pour sa bravoure au combat, sa discipline et sa probité » (« les Syriens »… !). Ce qui serait la raison du fait qu’il « s’impose » comme le principal groupe armé (et non parce qu’il est constitué de miliciens professionnels très bien entraînés et très bien financés, qui ont déjà participé à plusieurs guerres). Et si « certains observateurs » (dont le Département d’État américain) prétendent qu’il s’agit de combattants étrangers liés à Al Qaeda, c’est pas vrai : « plusieurs témoignages » « laissent penser » qu’il est « très majoritairement syrien » et pas du tout lié à Al-Qaida. L’Armée syrienne libre, à l’inverse, c’est rien qu’une milice mal structurée et malhonnête…
    http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2013/03/16/en-syrie-l-irresistible-ascension-du-front-al-nosra_1849409_3218.html

    Inscrit par le Département d’Etat américain sur la liste des organisations terroristes, le Front Al-Nosra est encensé par les Syriens pour sa bravoure au combat, sa discipline et sa probité. Au point que ce groupe armé est en train de s’imposer comme le principal groupe armé en Syrie. Les origines et la composition de cette organisation très secrète restent mal connues. Certains observateurs en font une filiale de l’Etat islamique en Irak, lui-même affilié à Al-Qaida. Plusieurs témoignages recueillis dans le nord de la Syrie laissent penser que Jabhat Al-Nosra est un groupe très majoritairement syrien – autour de 80 % – sans lien organique avec Al-Qaida, mais proche sur le plan idéologique.

    A la différence de leurs homologues irakiens, les djihadistes syriens ont veillé à ne pas se mettre à dos la population. Par contraste, l’Armée syrienne libre (ASL), un regroupement hétéroclite de brigades fondées et commandées par des chefs locaux, a mauvaise réputation à cause des exactions commises par certains commandants : pillages de biens de l’Etat ou privés, racket, enlèvements, détournements de l’aide humanitaire ou d’armes destinées à être revendues sur le marché noir se multiplient à mesure que la Syrie s’installe dans une économie de guerre.

    • Sur l’affirmation « sans lien organique avec Al-Qaida », on se moque évidemment du monde. Comme le résume la fiche Wikipédia :
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Al-Qa%C3%AFda

      Tantôt dépeinte comme une organisation terroriste structurée dont Oussama ben Laden serait le chef, tantôt comme une nébuleuse de mouvements djihadistes ou encore comme un réseau de cellules terroristes indépendantes, nul n’est en mesure de définir clairement la structure d’Al-Qaida.

      De fait, quand on veut mettre un groupe dans le sac d’Al-Qaida sans trop s’user le neurone, on se contente d’évoquer la proximité idéologique avec une informelle « nébuleuse » ; mais quand on veut, comme ici, continuer à trouver brave, discipliné et honnête un groupe qui a pourtant tous les traits d’Al-Qaida, on dit qu’on n’a pas trouvé de document écrit prouvant un « lien organique » avec un bunker de commandement centralisé ultra-moderne creusé dans une grotte de la montagne afghane. Ce qui est bien pratique.

    • http://angryarab.blogspot.com/2013/03/angry-arab-interviews-aron-lund-on.html

      Jabhat An-Nusrah: how many variants of it exist among the armed groups?

      Only one Jabhat el-Nosra, if by that you refer to a large al-Qaida franchise. You also have some radical groups of Syrians and foreign fighters who seem to share the same basic salafi-jihadi ideology (like Kataeb el-Muhajerin or the Mujahedin Shoura Council), but they’re tiny by comparison.
      Then you have other Islamist groups who are also ultraconservative and Sunni-sectarian, but more connected to mainstream salafi thinking in the Gulf etc, and not specifically to the salafi-jihadi criminal undergound. They don’t seem to be linked to al-Qaida in the same fashion either, and try to distance themselves a little from the most radical jihadi stuff. These factions include Ahrar el-Sham and the other factions within the Syrian Islamic Front."

  • A l’encontre » « Il faut en passer par l’expérience de l’islamisme au pouvoir »
    http://alencontre.org/moyenorient/il-faut-en-passer-par-lexperience-de-lislamisme-au-pouvoir.html

    Entretien avec Gilbert Achcar conduit par Christophe Ayad

    Professeur à la School of Oriental and African Studies (SOAS) de Londres, Gilbert Achcar est l’un des meilleurs analystes du monde arabe contemporain. Né en 1951, il a quitté le Liban en 1983. Il a successivement enseigné à l’université de Paris-VIII, puis au Centre Marc-Bloch, à Berlin. Son engagement à gauche et pro-palestinien ne l’a jamais empêché de porter un regard sévère sur les dictatures nationalistes arabes [1].

    Comment qualifier ce qui se passe dans le monde arabe depuis 2011 ?

    J’ai choisi comme titre, pour mon livre, le mot neutre de « soulèvement ». Mais, dès l’introduction, je parle de processus révolutionnaires de long terme. Il était clair, dès le commencement, que nous étions au tout début d’une explosion. La seule chose que l’on peut prévoir avec certitude, c’est que ce sera long.

    Emmanuel Todd [2] a donné une explication démographique du phénomène. Vous penchez plus pour une explication marxiste.

    La phase pendant laquelle le monde arabe se distinguait par une démographie galopante est terminée depuis une vingtaine d’années. Je suis parti de l’état des lieux à la veille de l’explosion, en 2010. On constate un blocage du développement, qui contraste avec le reste du monde. Même dans l’Afrique subsaharienne. La traduction la plus spectaculaire de ce blocage est un taux de chômage record, notamment chez les jeunes. Ensuite, il y a une modalité spécifique du capitalisme dans la région : tous les Etats sont rentiers à des degrés divers. L’autre caractéristique, c’est un patrimonialisme où le clan dominant possède l’Etat et va jusqu’à le transmettre de manière héréditaire.

    Les révolutions arabes se sont traduites par des libéralisations politiques, mais pas des bouleversements sociaux. Pourquoi ?

    En Egypte et en Tunisie, seul le sommet de l’iceberg a été cassé, c’est-à-dire les despotes et leur entourage immédiat. D’ailleurs, dans ces deux pays, l’« Etat profond » – l’administration, les appareils de sécurité – n’a pas bougé. Pour l’instant, seule la révolution libyenne a abouti à un changement radical : aujourd’hui, il n’y a plus d’Etat, plus d’armée. Le chambardement social y a été le plus prononcé, parce que l’espace privé, déjà étroit, était dominé par la famille Kadhafi.

    On s’est étonné en Occident que les islamistes remportent les élections alors qu’ils n’avaient pas lancé ces révolutions…

    Les attentes de l’Occident, ce romantisme du « printemps » et du « jasmin », tout ce vocabulaire orientaliste, se fondaient sur une méconnaissance de la situation. Il était évident que les intégristes allaient tirer les marrons du feu parce qu’ils se sont imposés, depuis la fin des années 1970, comme une force hégémonique dans la protestation populaire. Ils ont rempli le terrain laissé vacant par la faillite du nationalisme arabe. La crainte des intégristes est d’ailleurs la principale raison pour laquelle les gouvernements occidentaux soutenaient les despotismes arabes. Croire que tout cela allait être balayé revenait à prendre ses désirs pour des réalités. Avec le soutien financier du Golfe et l’appui télévisuel d’Al-Jazira, on ne pouvait pas s’attendre à autre chose qu’à des victoires électorales des intégristes. Ce qui est étonnant, c’est que ces victoires n’aient pas été écrasantes. En Egypte, on voit à quelle vitesse le vote intégriste s’effrite, des législatives au référendum sur la Constitution, en passant par la présidentielle. En Tunisie, Ennahda fait 40 % de la moitié des inscrits. Et, en Libye, les Frères musulmans locaux ont été battus.

    Les difficultés actuelles des islamistes au pouvoir vous surprennent-elles ?

    D’abord, il faut dire que le retour aux despotismes n’est pas envisageable. Il faut en passer par l’expérience de l’islamisme au pouvoir. Les courants intégristes se sont construits comme forces d’opposition avec un slogan simpliste : l’islam est la solution. C’est complètement creux, mais cela fonctionnait dans un contexte de misère et d’injustice où l’on pouvait vendre cette illusion. Les islamistes sont des trafiquants d’opium du peuple. Du moment qu’ils sont au pouvoir, ce n’est plus possible. Ils sont incapables de résoudre les problèmes des gens. Ils sont arrivés aux commandes dans des conditions que personne n’envie et ils n’ont aucun programme économique.

    Peut-on leur faire confiance pour organiser des scrutins qui pourraient les chasser du pouvoir ?

    C’est l’argument classique : une personne, une voix, mais une seule fois. Sauf qu’ils n’arrivent pas au pouvoir en position de force. Le peuple a appris à « vouloir », à descendre dans la rue. Jamais un dirigeant, dans l’histoire de l’Egypte, n’a été traité avec autant de mépris par son peuple que Morsi aujourd’hui…

    Le modèle turc peut-il se transposer au monde arabe ?

    Non, ce ne sont pas des Frères musulmans qui dirigent la Turquie, c’est une scission moderniste qui s’est réconciliée avec le principe de laïcité. L’AKP turc, c’est la version islamique de la démocratie chrétienne européenne. Les Frères musulmans, ce n’est pas ça. C’est une organisation intégriste qui milite pour la charia et pour qui le mot laïcité est une injure. Sur le plan économique aussi, ils n’ont rien à voir : l’AKP incarne un capitalisme de petits industriels, tandis que les Frères musulmans participent d’une économie de rente, fondée sur le profit à court terme.

    Pouvez-vous décrire l’influence du Qatar sur ces révolutions ?

    C’est une énigme. Certains dirigeants collectionnent les voitures ou les armes, l’émir du Qatar, lui, joue à la politique extérieure. Il s’est porté acquéreur des Frères musulmans comme on achèterait une équipe de football. Un homme a joué un rôle fondamental dans cette nouvelle alliance qui rappelle celle entre Mohamed ben Abdel Wahab [prédicateur, 1703-1792] et la dynastie des Saoud, au XVIIIe siècle : c’est le cheikh Qaradhawi, chef spirituel des Frères musulmans, installé de longue date au Qatar, où il a antenne ouverte sur Al-Jazira. Tout cela se passe dans un pays où l’émir ne tolère aucune opposition.

    Comment expliquer la complaisance des Etats-Unis envers les Frères musulmans ?

    Cela a commencé sous l’administration Bush. Pour les néoconservateurs, le despotisme nationaliste a produit le terrorisme, il fallait donc renverser les despotes comme Saddam Hussein afin de diffuser la démocratie. Condoleezza Rice a voulu renouer l’alliance en vigueur dans les années 1950-1960 avec les Frères musulmans. Mais la victoire du Hamas aux élections palestiniennes a bloqué le processus. L’administration Obama, qui a hérité d’une situation catastrophique au Proche-Orient, a eu une attitude indécise et prudente. Quand tout a explosé, elle a choisi de faire semblant d’accompagner le mouvement. L’obsession de Washington dans la région, c’est la stabilité et le pétrole. Et la traduction de cette obsession, c’est la recherche d’alliés disposant d’une assise populaire.

    Pourquoi l’intervention de l’OTAN a été possible en Libye et pas en Syrie ?

    En Syrie, on se trouve face à un risque de chaos à la libyenne, mais dans un environnement régional bien plus dangereux. Il y a aussi le soutien de la Russie et de l’Iran. Dès le début, l’OTAN a dit qu’elle ne voulait pas intervenir. La question n’est pas : « Pourquoi l’Occident n’intervient pas en Syrie », mais : « Pourquoi empêche-t-il les livraisons d’armes à la rébellion ? ». La raison profonde est la peur du mouvement populaire en Syrie. Et le résultat, c’est le pourrissement de la situation. Le régime syrien finira par tomber, mais à quel prix ? La myopie des gouvernements occidentaux est hallucinante : sous prétexte de ne pas reproduire les erreurs commises en Irak, à savoir le démantèlement de l’Etat baasiste, ils font pire. Aujourd’hui, les Syriens sont persuadés que l’Occident laisse leur pays s’autodétruire à dessein afin de protéger Israël.

    La gauche anti-impérialiste voit un complot américain dans ces révolutions…

    Ce n’est pas parce que des insurrections populaires sont soutenues, par opportunisme, par des puissances impérialistes que cela justifie le soutien à des dictatures. La théorie du complot américain est grotesque. Il suffit de constater l’embarras de Washington. Evidemment qu’après quarante ans de totalitarisme c’est le chaos. Comme Locke, je préfère le chaos au despotisme, parce que dans le chaos j’ai le choix.

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    Références bibliographiques
    Gilbert Achcar, Le Peuple veut. Une exploration radicale du soulèvement arabe, Actes Sud, Sindbad, 448 p.
    Jean-Pierre Filiu, Le Nouveau Moyen-Orient.Les Peuples à l’heure de la révolution syrienne, Fayard, 408 p.

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    [1] Entretien publié dans Le Monde. Culture et Idées, 21 février 2013.
    [2] Voir Allah n’y est pour rien ! Sur les révolutions arabes et quelques autres, Ed. Le Publieur, juin 2011.

  • Les partis islamistes éprouvés par le pouvoir, par Christophe Ayad

    http://www.lemonde.fr/tunisie/article/2013/02/09/les-partis-islamistes-eprouves-par-le-pouvoir_1829534_1466522.html

    Les islamistes n’ont pas su partager le pouvoir. Ils l’ont, au contraire, épuré. La peur d’un retour de l’ancien système a été la plus forte. Poussés par un appareil militant revanchard, les islamistes, une fois au pouvoir, se sont hâtés de chercher à mettre au pas la police, la justice et l’administration locale ou de les gagner à sa cause. Ainsi en Egypte, le président Mohamed Morsi a fait remplacer le procureur général, vu comme un tenant de l’ancien régime. Plus inquiétante est l’apparition de milices auxiliaires du pouvoir.
    (...)
    Néophytes dans l’exercice du pouvoir, ces derniers ont le plus grand mal à passer d’une culture d’opposants persécutés à une culture de gouvernement. Leurs partis, soumis à de forts tiraillements, pourraient ainsi être les premières victimes de ces contradictions.

  • Premier massacre perpétré par les français en #Libye sur des troupes en pleine fuite ?

    L’intervention française en Libye qualifiée de "jeu de massacre", actualité Défense ouverte : Le Point
    http://www.lepoint.fr/chroniqueurs-du-point/jean-guisnel/l-intervention-francaise-en-libye-qualifiee-de-jeu-de-massacre-21-03-2011-13

    Dans l’édition du quotidien Libération datée de lundi, l’envoyé spécial du journal, Christophe Ayad, ne décrit pas une opération militaire mais « un vrai jeu de massacre. » Il poursuit : « Des dizaines et des dizaines de corps de soldats gisent là, morts dans l’instant, certains presque des enfants dans leur treillis trop grand. » [...]

    Un autre reporter, Kareem Fahim de l’International Herald Tribune, évoque un « carnage » [...]

    L’envoyé spécial du Herald Tribune cite un officier rebelle, le colonel Abdullah al-Shafi : "Ils battaient en retraite. Les soldats [loyaux à Kadhafi, ndlr] avaient volé des véhicules civils et fuyaient. Ils étaient en train d’enlever leurs treillis. [...]

    "Alors que les troupes [loyales à Kadhafi, ndlr] commençaient à faire retraite, frappées par les Français et harcelées par les rebelles, le pire les attendait à Tika, à 30 km de Benghazi.