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  • Prix Nobel de l’hypocrisie - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2016/12/prix-nobel-de-l-hypocrisie.html

    Lorsque le prix Nobel de la Paix fut décerné en 1906 à Theodore Roosevelt (président des États-Unis de 1901 à 1909), le New York Times commenta ainsi la nouvelle :
    « Un large sourire illumina le visage du globe quand le prix a été attribué … au citoyen le plus belliqueux des États-Unis » [1].

    Theodore Roosevelt et la diplomatie du « gros bâton » « Parle doucement et porte un gros bâton » (2 septembre 1901)
    Environ un siècle plus tard, un journaliste du même New York Times se questionnait :
    « Alors, que pensez-vous du président Obama remportant le prix Nobel de la paix ? Je suis perplexe […]. Qu’a-t-il fait ? […] il me semble que cela aurait été logique d’attendre et de donner à Obama le prix Nobel de la paix dans sa huitième année en poste, après qu’il ait effectivement fait la paix quelque part » [2].
    Il s’agissait bien sûr du prix Nobel de la Paix attribué au président Barack Obama en 2009 « pour ses efforts extraordinaires pour renforcer la diplomatie et la coopération internationale entre les peuples ».
    Tout ça, neuf mois à peine après son élection ? Comment était-ce possible ?
    Du haut des huit ans années écoulées – et à des années-lumière du ronflant « Yes, we can ! » -, on peut effectivement contempler l’étendue de la paix qu’il a contribué à créer et à disséminer dans le monde arabe.
    Un monde arabe ruiné par une saison funeste qu’il a contribué à créer et qu’on a fallacieusement baptisée « printemps » [3].
    Un monde arabe saigné, éventré, étripé et dont le sang de ses citoyens graffitent les décombres et arrose les champs.
    Un monde arabe hanté par des créatures barbues coupeuses de têtes, friandes de chair humaine et annihilatrices d’espoir.
    Un monde arabe devenu le théâtre de la plus grande transhumance humaine depuis la seconde guerre mondiale [4].
    Un monde arabe où les tensions religieuses ont été nourries, attisées et exacerbées : musulmans contre chrétiens, sunnites contre chiites et sunnites contre sunnites.
    Un monde arabe dont les citoyens vivant en Occident endurent les affres d’une islamophobie nauséabonde, la pire de l’histoire contemporaine.
    Au fait, ce n’est pas Obama qui avait fait ces déclarations pompeuses dans son « fameux » discours du Caire ?
    « Je suis venu chercher un nouveau commencement entre les États-Unis et les musulmans du monde entier ».
    Et aussi :
    « Les peuples du monde peuvent vivre ensemble en paix […] cela doit être notre travail, ici sur Terre » [5].

    Barack Obama : le discours du Caire (4 juin 2009)
    Mais qui est donc censé être récompensé par le prix Nobel de la Paix ? Le testament d’Alfred Nobel est pourtant clair :
    « Une personne qui aura accompli le plus grand et le meilleur travail pour la fraternité entre nations, pour l’abolition ou la réduction des forces armées et pour la tenue et la promotion de congrès pour la paix » [6].
    Comment le comité Nobel peut prétendre qu’Obama a œuvré dans la promotion de la paix alors qu’il venait d’être élu ? Était-ce un prix pour des actions futures que ce comité aurait vues dans une boule de cristal norvégienne ? Si c’est le cas, ce comité doit impérativement relire le testament d’Alfred Nobel ou, du moins, changer de boule.
    En effet, la cristallomancie ne leur a-t-elle pas révélé que, chaque mardi, Obama décide personnellement quelles personnes doivent être liquidées à l’aide de drones [7] ? Et que la majorité des victimes de ces « mardis de la mort » sont des cibles civiles [8] ?
    Certes Obama a détendu l’atmosphère avec l’Iran et a réchauffé les relations diplomatiques avec Cuba.
    Par contre, il a fortement contribué à recréer un climat de néo-Guerre froide avec la Russie avec tout ce que cela peut comporter comme dangers à l’échelle planétaire. En effet, le rôle actif de son administration dans l’aide aux néonazis ukrainiens lors des évènements dramatiques de l’Euromaïdan a permis la réussite d’un coup d’état en règle en Ukraine [9].
    Cet épisode de flagrante ingérence étasunienne n’est, au demeurant, que le remake sanglant d’une certaine « révolution orange » de l’époque d’un célèbre « pacifiste » américain nommé G.W. Bush. Un président malchanceux qui n’a « malheureusement » pas été honoré par le comité Nobel bien qu’il ait assidûment œuvré dans la destruction de quelques pays musulmans sans oublier ses remarquables efforts dans la popularisation du lancer de chaussures.
    À chacun sa « révolution ».
    Il va sans dire que la déstabilisation de l’Ukraine, pays limitrophe de la Russie – et avec laquelle elle partage des liens historiques, culturels et économiques -, a eu pour effet de perturber sérieusement toute la géopolitique de la région et de créer des tensions entre l’Europe et Moscou.
    À ce sujet, le journaliste australien John Pilger mentionne que :
    « L’administration Obama a fabriqué plus d’armes nucléaires, plus de têtes nucléaires, plus de systèmes de vecteurs nucléaires, plus de centrales nucléaires. Les dépenses en têtes nucléaires à elles seules ont plus augmenté sous Obama que sous n’importe quel autre président américain » [10].
    Avant d’ajouter :
    « Au cours des dix‐huit derniers mois, la plus grande concentration de forces militaires depuis la seconde Guerre Mondiale — opérée par les USA — a lieu le long de la frontière occidentale de la Russie. Il faut remonter à l’invasion de l’Union Soviétique par Hitler pour trouver une telle menace envers la Russie par des troupes étrangères » [11].
    Dans le conflit palestinien, les promesses et les attentes étaient immenses. Le premier président noir des États-Unis, affublé de l’auréole des saints et drapé d’un incommensurable charisme médiatique, ne pouvait rester indifférent au sort des Palestiniens dont on a spolié la Terre et bafoué les droits les plus élémentaires. Il se devait d’agir, surtout après son « célèbre » discours du Caire :
    « Pendant des dizaines années, il y a eu une impasse […]. […] la seule solution pour répondre aux aspirations des deux côtés passe par deux États […]. C’est pourquoi j’ai l’intention de rechercher personnellement cette solution, avec toute la patience que la tâche requiert. Les obligations que les parties ont contractées dans le cadre de la feuille de route sont claires. Pour que la paix advienne, il est temps pour elles – et pour nous tous – de prendre nos responsabilités » [12].
    Obama a tellement pris ses responsabilités au sérieux qu’il est probablement le président américain qui a fait le moins d’efforts pour résoudre le problème palestinien. Pendant ses deux mandats successifs, la colonisation des terres palestiniennes a continué de plus belle et pas moins de deux massacres ont été perpétrés par Israël dans la bande de Gaza. Des milliers de morts et un désastre humanitaire en direct dans tous les médias « mainstream » sans que cela ne fasse sourciller le locataire de la Maison Blanche.
    Écoutons ce que dit Alain Franchon sur ce chapitre :
    « Dans ce conflit, les États-Unis disaient assurer, depuis vingt-six ans, le rôle d’« honnête intermédiaire ». C’en est fini de cette ambition. La présidence de Barack Obama aura entériné un mouvement amorcé depuis les années 1990 : Washington abandonne, de facto ». […] La position de départ de l’Amérique a changé. Elle se refuse a priori à la moindre contrainte sur Israël » [13].
    Pis encore. Juste avant la fin de son deuxième et dernier mandat, il vient de faire un splendide cadeau à Israël en guise de félicitations pour leur excellent travail de nettoyage ethnique et de colonisation efficace et continue de la Palestine : une aide militaire sans précédent de 38 milliards de dollars sur 10 ans [14] !
    Plus de morts, plus de colonisation, plus de haine…
    Mais pouvait-on s’attendre à mieux de la part de ce président ? Que nenni. Dans un article publié le 20 janvier 2009, jour de sa première investiture, j’écrivais, à propos de son programme :
    « Dans le chapitre de la politique étrangère du président Obama consacré à l’État Hébreu, le titre est éloquent, voire racoleur : « Barack Obama et Joe Biden : un solide dossier de support à la sécurité, la paix et la prospérité d’Israël « . Parmi les actions de la nouvelle présidence, on peut lire : assurer un solide partenariat USA-Israël, soutenir le droit à l’autodéfense d’Israël et soutenir une assistance étrangère à Israël. Dans les détails du dernier point, on peut lire que le président Obama et son adjoint s’engagent à toujours fournir l’aide annuelle dans le domaine militaire et l’assistance économique à Israël. Ils recommandent fortement l’augmentation des budgets et appellent à poursuivre la coopération avec Israël dans le développement des missiles de défense »[15]
    Promesses tenues, n’est-ce pas ?
    Dans le dossier libyen, alors qu’une solution pacifique était à portée de main, Obama a opté, de concert avec sa secrétaire d’État Hillary Clinton, pour l’élimination de Kadhafi et la dévastation totale de la Libye [16].
    « We came, we saw, he died ! »
    C’est ainsi qu’elle s’était esclaffée à l’annonce du sordide lynchage du chef libyen, avec un gloussement de bonheur et des yeux pétillants de joie [17].

    Réaction de Hillary Clinton à l’annonce de la mort de Kadhafi
    En sous-traitant la destruction de la Libye avec ses alliés européens et arabes du Golfe, l’administration américaine a non seulement provoqué la mort de milliers de Libyens, mais a réussi à transformer ce pays naguère prospère en une contrée où règne le chaos et où sévissent des hordes de djihadistes islamistes. Et comme dans le cas de l’Ukraine, l’instabilité générée en Libye a métastasé dans toute la région, affectant durablement de nombreux pays africains voisins [18].
     

    (Libye) sous les décombres
    La « printanisation » de la Syrie représente sans aucun doute le summum de la politique « pacifiste » du président Obama. Initiée par de manifestations non-violentes d’apparence spontanée, la révolte populaire de la rue syrienne a été méticuleusement concoctée par des organismes américains d’« exportation » de la démocratie [19]. Elle s’est rapidement métamorphosée en guerre civile, la plus effroyable de ce début de siècle.
    Et les chiffres de ce pays ruiné sont éloquents : près d’un demi-million de morts [18], plus de 50 % de la population déplacée dont presque 5 millions ont fui à l’étranger [21].
    Selon de récentes données de la Commission européenne :
    « Les réfugiés syriens constituent désormais la plus importante population de réfugiés au monde issue d’un même pays sur une même génération » [22].
    D’après le Washington Post, la CIA dépense pas moins d’un milliard de dollars par an pour armer et entraîner les rebelles syriens [21]. De nombreux témoignages et enquêtes montrent que l’administration américaine aide les « coupeurs de gorges » et « dévoreurs de cœurs » djihadistes dans le but de renverser le gouvernement syrien [24, 25].

    Des djihadistes syriens dans une tente fournie par l’USAID
    Pour les rendre plus « sympathiques » aux yeux de l’opinion publique, des spécialistes de relations publiques ont été chargés de leur donner un look « respectable ». Ainsi, par exemple, les médias du monde entier nous ont inondés d’images de sauveteurs héroïques, risquant leurs vies pour sauver celles de leurs concitoyens bombardés par l’aviation syrienne. Ces « héros », reconnaissables à leurs casques blancs – les « White Helmets » – sont devenus les vedettes d’un film documentaire produit en leur honneur par Netflix [26]. Ils ont même été proposés au prix Nobel de la Paix par des stars américaines comme George Clooney, Ben Affleck, Daniel Craig ou Justin Timberlake [27]. Rien que ça.

    Les « White Helmets » : les dessous de l’histoire
    Dans deux remarquables articles, le journaliste Max Blumenthal démonte toute la machine de propagande qui se cache derrière les « White Helmets » [28, 29]. Ces « téméraires » sauveteurs ne sont en réalité que des djihadistes casqués, financés par l’« United States Agency for International Development » (USAID), le plus important des organismes américains d’« exportation » de la démocratie [30]. Un document du département d’État datant du 27 avril 2016 révèle que cet organisme a financé les « White Helmets » à hauteur de 23 millions de dollars [31]. Une petite partie du magot d’environ 340 millions de dollars prévu par USAID pour « soutenir les activités qui poursuivent une transition pacifique vers une Syrie démocratique et stable » [32].
    Un des plus grands succès des spécialistes de relations publiques travaillant avec les rebelles syriens est l’affaire du « petit garçon sur le siège orange ». Il s’agit de la photographie esthétiquement émouvante d’un petit garçon syrien de cinq ans nommé « Omran Daqneesh ». La photo, qui a fait le buzz sur Internet, a été aussi largement diffusée dans les médias « mainstream ». Elle montre un enfant assis sur le siège orange d’une ambulance, couvert de poussière, le visage ensanglanté et le regard hagard. L’enfant aurait été extrait des décombres d’un quartier de la ville d’Alep par les « White Helmets ».

    Omran Daqneesh à la une du New York Times (19 août 2016)
    La photographie est si poignante qu’elle a fait réagir un enfant américain de six ans, Alex, qui a écrit au président Obama en personne. Il lui demanda de faire le nécessaire pour ramener le petit Omran aux États-Unis afin de l’accueillir dans sa maison et partager avec lui ses jouets et ceux de sa sœur.
    Ah ! Les beaux sentiments des jeunes enfants ! Aussi beaux que la photo du petit Omran ! Si beaux que la lettre a été publiée in extensosur le site de la Maison Blanche accompagnée d’une vidéo du petit Alex [33]. L’écriture hésitante du jeune américain, puérile et appliquée, a fait craquer la blogosphère, autant que la photo du « petit garçon sur le siège orange ».

    Alex écrit à Obama (21 septembre 2016)
    Mais c’est en s’intéressant à la personne qui a photographié le jeune syrien blessé que l’histoire devient croustillante. Le photographe est un certain Mahmoud Raslan qui travaille avec l’AMC (Aleppo Media Center). Selon certains observateurs de la scène syrienne, l’AMC est financé par le gouvernement des États-Unis, mais aussi par celui de la France et de la Grande-Bretagne [34].
    Le plus dramatique, c’est que Mahmoud Raslan ne cache pas sa sympathie pour des djihadistes barbares, en particulier ceux du groupe d’Al Zinki [35].
    Ce groupe de rebelles qui a été accusé par Amnesty International d’enlèvements, de tortures et d’exécutions sommaires [36].
    Ces mêmes rebelles qui ont égorgé, quelques semaines plus tôt, un enfant de douze ans et qui ont poussé l’horreur jusqu’à se filmer en train de commettre leur abominable forfait [37], crime horrible qui n’a pas connu le même battage médiatique que celui du petit Omran sauvé par les « White Helmets ».
     

    Omran Daqneesh : les dessous de l’histoire
    Ces mêmes rebelles que les États-Unis financent, arment et dont ils payent les salaires par l’intermédiaire du MOM (Centre d’opérations commun) [38, 39].
    Y a-t-il eu des lettres écrites au président Obama pour dénoncer le comportement bestial de ces rebelles ? Des missives pour pleurer le jeune garçon décapité ? La réponse est, bien sûr, négative.
    La Maison Blanche a largement médiatisé la lettre du petit Alex. Obama l’a lue dans son discours devant les dirigeants du monde entier lors du sommet sur les réfugiés qui s’est tenu à l’ONU, le 20 septembre dernier. Il a ensuite posté le message suivant sur sa page Facebook :
    « Ce sont les paroles d’un garçon de 6 ans : un jeune enfant qui n’a pas appris à être cynique, suspicieux, ou à avoir peur des autres en raison de là d’où ils viennent, de quoi ils ont l’air ou de comment ils prient. […] Imaginez à quoi le monde ressemblerait si nous étions tous comme Alex » [40].
     

    Obama parle d’Alex à l’ONU (20 septembre 2016)
    Ce fut « un très joli coup de com’ » selon certains [39]. C’est le moins qu’on puisse dire car s’il est vrai que la vérité sort de la bouche des enfants, elle sort rarement de celle des adultes.
    Surtout de celle d’un adulte qui est à la tête du pays le plus puissant du monde et qui a le pouvoir de mettre fin au malheur des « Omran » ou au drame des « Aylan » [42].
    Mais au lieu de cela, il continue à financer, soutenir et provoquer les malheurs et les drames.
    Le petit Alex devrait savoir que pendant les deux mandats du président Obama, des centaines d’« Aylan » et des milliers d’« Omran » palestiniens ont été victimes des bombes israéliennes sans que cela puisse soulever la moindre indignation de l’administration américaine.
    Que des centaines d’« Aylan » et d’ « Omran » yéménites souffrent tous les jours le martyre sous des bombes fournies par les États-Unis à l’Arabie Saoudite, son fidèle allié, pays belliciste et moyenâgeux [43]. Avec des milliers de morts, dont le tiers est des enfants, « l’horreur au Yémen révèle l’hypocrisie meurtrière des exportateurs d’armes tels que la Grande-Bretagne et les États-Unis » [44]. Malgré tout cela, l’administration Obama n’a jamais cessé d’aider l’industrie de la mort saoudienne :
    « L’administration Obama a réalisé plus de 110 milliards $ de transactions d’armes avec la monarchie saoudienne. L’armée américaine continue de ravitailler les avions de la coalition et de fournir des renseignements et les responsables américains et britanniques ont physiquement rencontré les Saoudiens qui bombardent [le Yémen] » [45].
    Dans un éditorial du New York Times intitulé « Les États-Unis sont complices dans le carnage au Yémen », on peut lire :
    « Les experts [américains] disent que la coalition [dirigée par l’Arabie Saoudite] serait clouée au sol sans le soutien de Washington » [46].

    Scène du Yémen actuel
    On devrait aussi présenter à Alex l’illustre Madeleine Albright, l’ancienne secrétaire d’État américaine qui avait déclaré que la mort des 500 000 enfants irakiens à cause de l’embargo américain était un prix « qui en valait la peine » [47].

    Madeleine Albright et les 500 000 enfants irakiens (12 mai 1996)
    Et pourquoi ne pas lui mentionner aussi, en passant, que le président à qui il a écrit sa belle lettre a récompensé Mme Albright en lui décernant, en 2012, la « Médaille présidentielle de la Liberté » [48], la plus haute distinction civile des États-Unis ?
     
    On ne peut qu’être d’accord avec le Washington Post sur le point suivant :
    « En tant que président, les plus grands moments d’Obama ont souvent été des allocutions » [49]
    Du discours du Caire (juin 2009) à celui de l’ONU (septembre 2016), la présidence d’Obama n’a été qu’un vulgaire déplacement d’air qui cache des drones tueurs, des guerres froides, des printemps véreux et des barbus sanguinaires.
    C’est probablement pour cette raison que l’ancien directeur de l’Institut Nobel norvégien a déclaré que :
    « Barack Obama s’est montré indigne de son prix depuis qu’il l’a reçu » [50].
    Il est évident que l’échec cuisant de sa protégée, Hillary Clinton, aux récentes élections présidentielles américaines est un flagrant désaveu de sa politique belliqueuse et destructive qu’il a soigneusement cultivée huit années durant.
    Mais en mêlant l’innocence des petits Omran et Alex à sa gestion calamiteuse des affaires du monde, le seul prix Nobel qui devrait être officiellement décerné à Obama après ses deux mandats est celui, bien mérité, de l’hypocrisie professionnelle.
    Par Ahmed Bensaada | 18 Novembre 2016

  • Première fois que je retourne à la piscine depuis des lustres, non pas des lustres, mais des mois, oui. La piscine ne me punit pas trop sévèrement de cette désertion, je parviens à faire mon aquatique kilomètre, un peu sans force à la fin, mais jusqu’au bout malgré tout.

    Du coup, les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs de piscine, l’idée de reprendre toutes les mentions de ces choses auxquelles je pense en faisant mes longueurs de piscine, ce qui finissait par devenir une catégorie en soi dans la rubrique Contre . http://www.desordre.net/bloc/contre/index.htm

    #40.

    Ma mauvaise humeur ne doit pas être si soluble que cela dans l’eau, ce qui est heureux, sinon tous les autres nageurs de la piscine finiraient par brasser de l’encre de Chine.

    #47.

    M’élançant seul, premier arrivé, dans le grand bassin olympique de la piscine de Montreuil, je ne peux m’empêcher d’être pris d’un frisson grandiloquent, toute cette eau pour moi seul, et ce faisant je me livre à un rapide calcul 50 x 20 x 3 = 3000 mètres cubes d’eau, soit trois millions de litres d’eau tout de même. C’est souvent que je fais du calcul en nageant, ainsi le nombre de carreaux au fond de la piscine doit équivaloir au nombre de pixels du premier envoi d’images auquel j’ai assisté en 1987. Si je savais remettre la main sur ce fichier, on pourrait proposer à la piscine de Montreuil, lors de leur prochaine vidange des trois millions de litres d’eau, de repeindre chaque carreau tel un pixel. La mairie de Montreuil pourrait organiser un concours, envoyez votre image de 10 kilo-octets pour le fond de la piscine Colette Besson. Pour ma part je leur enverrais bien une photo aérienne du bassin en question, mais c’est moi bien sûr. D’ailleurs la saison prochaine, après la vidange annuelle, chacun pourra constater que j’ai gagné le concours. Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs de piscine.

    Vers la fin de mon kilomètre, l’affluence est nettement plus forte et certains dépassements occasionnent bien des tourbillons et alors, je me dis que nous sommes peut-être une petite cinquantaine de nageurs à faire des longueurs, cela fait quand même quelques remous, il devrait y avoir un moyen de récupérer un peu de cette énergie non ? Une mini centrale hydro-motrice. Sans compter l’inénarrable barbotage des mamies dans le petit bain au son d’un disco d’un autre âge. Est-ce que les remous des mamies ne pourraient pas alimenter une petite batterie laquelle prendrait en charge la dépense électrique de la sono et du disco ? Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine.

    N’empêche dans ce groupe de femmes, majoritairement, âgées je croise le regard d’une amie de longue date, nous nous sommes rencontrés aux Arts Déco, je sais son combat récent et je la trouve bien courageuse dans sa régularité, le soir j’ironise, son sens de l’humour est intact, en lui envoyant un mail pour lui dire que depuis le temps que je rêvais de la voir en maillot de bain. N’empêche, c’est vrai, j’ai un peu de mal à me dire qu’il s’agit de la même personne que j’ai connue tellement jeune et qui désormais barbote avec les mamies du mardi midi, je crois qu’il n’y a pas de mot pour décrire mon vertige tandis que je sors de la piscine de Montreuil, entré dans l’eau en conquérant d’un bassin olympique, et sortant écrasé par la perspective fuyante du temps : je suis donc rentré aux Arts Déco il y a vingt sept ans. Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine.

    #59.

    Pensée profonde du jour : après une matinée à faire de la feuille de calcul, le spectacle, en nageant, du carrelage de la piscine n’est pas la meilleure récréation qui soit.

    Corollaire à cette pensée, est-ce qu’avec un bon vidéo projecteur, on ne pourrait pas nous passer des films (muets, forcément muets) au fond de la piscine.

    Lot de consolation : le soleil en entrant par les larges baies vitrées crée de très beaux dessins lumineux difractés par l’agitation de la surface de l’eau, je les mémorise et l’après-midi, de retour au travail, je m’évertue de les superposer mentalement à mes feuilles de calcul.

    #201.

    Chaque année, prendre la résolution de tout écrire dans son agenda, les kilomètres parcourus à la piscine, les livres lus, les films et les spectacles vus, les concerts et les disques écoutés et les expositions visitées. Et à la fin de l’année faire le bilan comptable de cette activité contre. Oui, se dit-il, et il le note dans son agenda, dans la colonne des choses à faire.

    #203.

    Les choses auxquelles on pense à la piscine.

    Je fais vingt longueurs de cinquante mètres, mille mètres, un kilomètre. C’est une progression lente, il y a peu je faisais encore du deux à l’heure. Je suis tout juste descendu en dessous de la barre des vingt cinq minutes pour ce kilomètre. Progression lente, coûteuse aussi et il est à peine exagéré de dire que chaque mètre compte, que chaque mètre coûte. Et je compte. Et cela me coûte. Ce n’est pas seulement à chaque virage que je compte. Je compte les demies longueurs, parfois même les quarts de longueurs. Le fond de la piscine est carrelé, je suis souvent tenté d’en compter les carreaux qui défilent lentement sous moi. Ou je les identifie à des pixels. D’ailleurs en comptant longueurs et mètres je me donne des repères en pixels, 400 mètres c’est une image de 400 pixels de large, 700, 725 ce sont les pixels de large pour de nombreuses images du Désordre, 600, 800 aussi et 1000 la nouvelle largeur des images de la Vie, 1000 c’est l’objectif, si lentement atteint à l’image de ces barres de téléchargement qui progressent avec lenteur, kilo-octet à kilo-octet. Et c’est à une barre de téléchargement que je pense quand je nage et que je compte les longueurs que je fais.

    Les choses auxquelles on pense en nageant. Vraiment.

    #223.

    En faisant ses longueurs à la piscine, depuis quelques temps, cela ne lui suffisait plus de boucler la distance impartie, il se battait désormais aussi contre la pendule, l’objectif avait d’abord été de boucler le kilomètre en moins d’une demi-heure, ce samedi après-midi, il tentait de descendre en dessous de 24 minutes, ce qu’il ne parvint pas à faire en dépit d’efforts coûteux qui le laissèrent absolument haletant, peut-être pas au point de se sentir mal, mais asphyxié épuisé cela oui. Tandis qu’il tirait sur ses bras dans les deux dernières longueurs, se faisant violence, il pensa, c’est bien lui, qu’à défaut d’écrire comme Robert Musil, il allait bientôt mourir comme ce dernier d’une crise cardiaque, dans la salle de gymnastique (fin assez décevante et médiocre tout de même pour un auteur comme Musil, mais passons). Et il nageait, la dernière longueur en sprint, pensant à toutes ces figures admirées qu’il pourrait imiter à bon compte, à défaut d’en imiter, même imaprfaitement, le talent, les rides sur le front, comme celles de Samuel Beckett, la carrure de René Char, les angoisses et les crises de désespoir chaque matin comme Pablo Picasso, les bourrades dans les côtes comme Georges Perec, on laisserait de côté, assez vivement, la robe de chambre de Louis-Ferdinand Céline et les collections de papillons de Pierre Bergougnioux, se tenir au garde à vous au téléphone, comme Marcel Proust, régresser au point d’en devenir terriblement réactionnaire comme Keith Jarrett. Et mal vieillir, de façon tellement sénile et stérile, comme Woody Allen. Aller un peu trop loin dans la mise en scène de soi-même comme Edouard Levé. Tout un programme. Les choses auxquelles on pense, bien immodestement, en faisant ses longueurs à la piscine.

    Dans la même journée, tu fais un kilomètre à la piscine, tu vas écouter le concert d’Ervan Parker, et tu finis d’écrire ton article contre les photographies d’Issouf Sanogo. Dans la même journée.

    #236.

    Chaque année ta banque t’envoie deux agendas, deux exemplaires du même agenda, cadeaux commerciaux de pas grand chose. Cette année tu as pris le parti de toute noter dans cet agenda, les lectures, les films, les disques, les concerts, les spectacles, les kilomètres parcourus à la piscine, tout.

    Que tu aies besoin de tenir une comptabilité de tout ceci me dépasse un peu, qu’elle soit rigoureuse, après tout, pourquoi pas ?, mais qu’est-ce qui t’empêche d’utiliser le deuxième agenda, le deuxième exemplaire, pour y noter n’importe quoi, ce qui me passe par la tête ?, oui, pourquoi pas, que le deuxième exemplaire de l’agenda soit l’occasion de tous les débordements possibles de la fiction, tu peux t’y prêter des lectures que tu n’as pas eues, pas encore, des concerts auxquels tu as peu de chance de te rendre, trop chers ou trop loin, des spectacles auxquels tu ne peux que rêver de te rendre et des films que tu as manqués au moment de leur sortie en salle, mens, invente, fais ce que tu veux.

    Et n’oublie pas, de temps en temps, de partir de chez toi en prenant le mauvais agenda, et alors, oblige-toi à vivre ce qui est noté dans l’agenda de la fiction.

    #286.

    Régulièrement quand tu passes par la Croix de Chavaux, par exemple pour aller à la piscine, tu regardes le haut immeuble où tu sais que ton ancienne analyste continue de recevoir ses patients. Tu regardes les fenêtres du dernier étage en repensant à toutes ces photographies que tu as prises de cette fenêtre, de l’agitation de la place, dont tu fais finalement partie, d’en bas, regardant vers les hautes fenêtres.

    Et puis une fois tous les ans, tous les deux ans, tu ressens dans l’étau toujours plus serré de tes propres doutes, le besoin de reprendre rendez-vous auprès de ton analyste. Tu vas la voir pour faire fonctionner devant ses yeux les rouages que tu as découverts dans son cabinet, tu veux t’assurer que tes compréhensions contemporaines sont compatibles avec tes fonctionnements anciens.

    A la fin de cette séance, tu remontes au dernier étage de cet immeuble de sept étages et tu photographies la place de la Croix de Chavaux. Tu détailles du regard les mouvements des véhicules et des passant, le clignotement des éclairages publicitaires, les nuages qui passent, depuis ce point de vue de créateur presque.

    Parfois tu te demandes si d’avoir accès à cet escalier, de temps en temps, pour y monter au dernier étage, ne serait pas suffisant. Tu te sentirais un peu cerné par tes doutes. Tu monterais en haut de la place, photographierait l’agitation et la circulation autour de cette place, et tu te sentirais à nouveau en phase, tu pourrais reprendre ta place dans le manège.

    Et pareillement quand tu reprends contact avec ton ancienne analyste tu retrouves, avec le même plaisir, le catalogue de je ne sais plus quelle rétrospective de Jean-Michel Basquiat. Dont tu dois être, à en juger par le manque d’usure du livre, le seul lecteur. Un lecteur très épisodique.

    #307.

    Et tout d’un coup, le corps plongé dans l’eau de la piscine, c’est comme si je replongeais dans la musique de Stephen O’Malley, plus sûrement les acouphènes d’hier soir se réveillent dès que l’eau vient faire pression sur mes tympans. Dommage c’était une bonne idée, un peu de musique pendant que je nage, tellement mécaniquement, aux confins de l’ennui.

    #308.

    De retour de la piscine, je croise mon amie Daphna, et je peine à croire que cinq minutes plus tard je serais de nouveau prisonnier de l’open space. Daphna que je connais depuis 1986. Tous les deux étudiants aux Arts Décos. Je ne sais pas très bien ce que penserait le jeune homme que j’étais alors de cette situation.

    En tout cas je sais ce que l’homme d’aujourd’hui pense du jeune homme d’alors. Et le simple fait de croiser Daphna me le rappelle instantanément. Ce jeune homme n’était pas brillant. Pas tous les jours.

    Ou dit différemment, de quoi ai-je le plus honte, aux yeux du jeune homme d’alors d’être devenu un employé de banque, un Bartleby, ou à mes yeux d’aujourd’hui, du jeune homme suffisant que j’étais alors ?

    #309.

    Le virage s’est fait l’été dernier. Pendant tout le mois de juillet je suis allé à la piscine tous les jours en sortant du travail et tous les jours j’ai nagé un petit kilomètre. Et pour tout dire, j’avais le sentiment que cet exercice et cette astreinte quotidiens produisaient un affinement du corps, et même réveillaient des muscles ayant insuffisamment travaillé ces dernières années. Je me surprenais à retrouver une force dans les bras que je n’avais plus depuis tellement longtemps. Un peu plus et je contemplais dans le miroir les vaisseaux saillants de mes avant-bras et je me prenais sans doute à rêver qu’encore quelques dizaines de kilomètres et j’aurais de nouveau un corps de jeune homme.

    Et puis, naturellement, ce qui devait arriver arriva, un jour, fin juillet, je me suis fait un claquage. Finie la phase 2 de l’opération Corps de rêve.

    Et pourtant j’ai besoin d’aller à la piscine faire des longueurs, j’en ai besoin pour rester maître de mes difficultés respiratoires. Et c’est déjà nettement moins glorieux. Quand je sors de l’eau, on ne dirait pas Sean Connery dans James Bond contre le Docteur No ou Daniel Craig dans le même appareil, dans Casino Royal, non c’est plutôt au personnage secondaire de l’Autofictif d’Eric Chevillard qui est l’occasion d’haikus mordants que je pense, le Gros Célibataire.

    Le Gros Célibataire sort de l’eau
    à bout de souffle
    avec une échelle.

    Sur l’arrête du nez, la marque rouge des caoutchoucs de mon respirateur.

    Donc ne plus s’illusionner sur l’opération Corps de rêve, et comprendre que la phase 2 a effectivement commencé, c’est la phase dans laquelle il faut faire de l’exercice pour retarder l’arrivée de la grande faucheuse et d’ailleurs il faut que j’arrête de m’illusionner, les baigneuses quand elles me regardent admiratives, ce n’est pas pour la largeur de mes épaules qu’elles ont ont des regards aimables, mais, au contraire elles sont pleines de commisération pour un ce qu’elles prennent, à juste titre, pour un vieil homme (encore) bien conservé.

    Ainsi va la vie à bord du Redoutable.

    #329.

    Chaque fois que je reprends latéralement ma respiration en nageant, je déchiffre, je ne peux m’en empêcher, tout ce qui est écrit sur les murs, les défense de, les ville de Montreuil, les numéros de couloir, tout ce qui est écrit, je finis par le lire, comme d’ailleurs je peux le faire de tout ce qui est écrit sur une boîte de céréales au petit déjeuner, sans doute pour rompre avec l’ennui des longueurs de piscine.

    Ils attendent quoi exactement à la piscine de Montreuil pour couvrir les murs de Haïkus ?

    #332.

    Ca y est, ils m’ont enfin entendu à la piscine de Montreuil, ils ont tendu un immense écran de toile. En revanche je doute beaucoup que ce sera pour projeter des haïkus ou encore Film de Samuel Beckett, en tout état de cause, la prochaine fois que j’irai à la piscine le projecteur sera en état de marche et on devrait, en toute logique, m’entendre pester sur le fait que le programme projeté n’est pas à mon goût.

    Comment est-ce que je peux encore tomber dans de tels panneaux.

    #345.

    Tandis que les portes de la piscine ouvrent pour son public du midi, salariés qui vont faire quelques longueurs sur le temps de pause du midi et mamies du disco aquatique, reflue une petite foule de jeunes adultes handicapés, tous ou presque un immense sourire aux lèvres, on sent que cela leur fait plaisir la piscine, l’un d’eux s’égare dans les douches sa démarche chaloupée et mal habile parfaitement en rythme de la musak diffusée par la radio de la piscine.

    #347.

    A la piscine tu es dépassé dans ta ligne par un groupe de torpilles humaines, tu en prendrais presque ombrage d’être pareillement doublé, es-tu si lent ?, puis tu remarques l’étonnant équipement de ces nageurs plus rapides, des palmes et des prothèses aux mains pour augmenter la force de brassage sans doute. Et dire que tu pensais que le seul équipement nécessaire à la nage était un maillot de bain (facultatif dans les rivières des Cévennes quand on est entre soi et quel plaisir).

    Tu repenses, à ces types qui descendaient les pentes du Puy de Sancy sur leur vélo tout terrain, leur équipement était celui que tu aurais prêté à des motards tout terrain, certains d’entre eux portaient au dessus de leur casques de petites caméras et filmaient leur descente depuis ce point de vue privilégié. Nul doute que les vidéos réalisées étaient le soir-même sur les plates-formes de partage de vidéos.

    Et tu avais ri à cette idée que ces petites vidéos étaient littéralement des surmoi.

    #357.

    A la piscine, ma volonté commande à mes bras de tirer plus fort dans l’eau, pour éprouver mes poumons, lesquels tentent de se faire entendre auprès de ma volonté qui s’émousse un peu, mais tient bon, tant que le kilomètre ne sera as parcouru pas de répit pour les bras et les épaules qui à leur tout mettent les poumons à l’épreuve.

    Tenir, disais-je.

    #432.

    Je ne sais ce à quoi pensent les autres nageurs dans la piscine de Montreuil, mais s’ils sont tous occupés, comme je le suis en faisant mes longueurs, à des projets chimériques que les miens en ce moment, j’ose espérer que les Maître-nageurs sauveteurs de notre piscine ont reçu une formation spéciale pour traiter non seulement les noyés mais aussi les aliénés.

    #452.

    Je commence mes longueurs à la piscine dans l’agréable sensation de glisser sur une eau limpide et déserte, un kilomètre plus loin, je rampe dans une mer de mercure, trouble et surpeuplée.

    #453.

    C’est fréquent que nageant dans la piscine je trouve en pensée la solution pour tel projet laissé en plan la veille au soir dans le garage. Il arrive aussi, et je ne peux m’empêcher d’éprouver un léger sentiment d’injustice, que je trouve la solution d’un problème resté en plan au travail, c’est comme si j’avais gâché la récréation.

    Mais le choix de la dérive de mes pensées en nageant m’appartient aussi peu que celui des images de mes rêves.

    Et d’ailleurs est-ce que si nous avions le choix du programme de nos rêves, est-ce que ce seraient encore des rêves ?

    Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine, en repoussant de toutes ses forces les choses auxquelles on ne veut pas penser. Comme par exemple de repenser au rêve de cette nuit.

    #456.

    Le rêve d’une installation du futur, les pensées des nageurs d’un bassin olympique sont projetées au fond de la piscine par je ne sais quel procédé et dessinent une toile immense d’images se chevauchant avec de très beaux effets d’opacités diverses, et nager serait alors aussi beau que de se tenir fermement au bastingage de l’installation de Georges Didi-Huberman, au Fresnoy à Toucoing, ce qui tend à penser qu’on n’est sans doute pas obligé d’attendre l’avènement de la technologie qui permettrait la mise en images des pensées des nageurs, et sans attendre cette dimension interactive, d’ores et déjà, transformer les fonds des piscines en écrans géants. Je serai le premier à m’abonner à un tel service.

    Pareillement, je rêve de nager dans une piscine labyrinthique.

    Et pour les lecteurs des Idées noires de Franquin, on pourrait de temps en temps corser un peu l’affaire en introduisant un requin dans le labyrinthe. Surtout ne pas péter.

    Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine. Et dans la dernière longueur de me dire, je devrais créer une manière de tag pour ces choses auxquelles je pense en faisant mes longueurs à la piscine.

    #12.

    La surprise en plongeant dans la piscine, l’eau est chaude, collante, et tous les jeux d’ombres et de lumières flous qui étaient ceux de la rivière ont été remplacés par le quadrillage net des carreaux au fond de la piscine, netteté due aux lunettes dites de piscine. Et les retirer serait s’exposer à la morsure du chlore. Tandis que dans la Cèze ce sont les yeux nus que je me jette à l’eau, souvent accompagné par des myriades de vairons.

    Mais soyons juste, dans la piscine municipale je ne redoute pas la potentielle présence de couleuvres au fond de l’eau.

    #20.

    Naïvement j’ai cru ce matin, avant de partir à la piscine, que de comptabiliser les kilomètres parcourus à la piscine depuis de début de l’année allait me rendre les choses plus faciles, ainsi j’ai parcouru 32 kilomètres à la nage depuis le premier octobre 2013, soit un peu en deça de la distance qui sépare Paris de Pontoise. Bref, je ne suis rendu qu’à Saint-Ouen l’Aumône, encore un kilmomètre et j’arrive à Maubuisson, encore un autre et je suis chez B. et encore un autre et je franchis l’Oise (à la nage sans doute) et je pourrais prendre mon café dans la si bonne brûlerie sur le haut de Pontoise.

    Est-ce la perspective de nager sur un plan d’eau aussi incliné que la montée depuis les rives de l’Oise vers l’église Saint-Maclou de Pontoise ou tout simplement parce que j’avais sans doute imaginé que je devais déjà être rendu du côté de Senlis et que d’ici à la fin de l’année nul doute je parviendrais, à la nage donc, jusqu’à Bapaume, et que la comptabilité dans mon agenda de toutes les mentions de kilomètres aquatiques a révélé un chiffre très en dessous de ce que j’espérais, il n’empêche, je finis le kilomètre d’aujourd’hui, épuisé et découragé.

    En nage serais-je tenté de dire.

    #31.

    Retour des vacanciers. Cette fois-ci à la piscine, tu reconnais les corps halés dans l’eau et anticipe leur vigueur éphémère, ceux-là vont entamer leurs longueurs au quart de tour, mais vont vite s’essouffler, en novembre ils auront oublié du tout au tout le chemin de la piscine. En attendant éviter leurs mouvements vifs dans les lignes comme les croiseurs font des torpilles fourbes des sous-marins.

    Nageant tu repenses à certaines scènes de Das Boot de Wolfgang Petersen. Et dans tes rêves d’installations à la piscine de Montreuil, tu penses à ce que cela serait de nager dans une piscine aussi vaste, dans l’obscurité, poursuivi par le bruit d’un sonar.

    Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine.

    #32.

    Tu voudrais, comme cela, toute l’après-midi peut-être pas, mais davantage que ce que tu ne fais, cela sûrement, pouvoir continuer d’ouvrir une nouvelle fenêtre de mail pour t’envoyer un nouveau paragraphe de Contre. Mais cela ne fonctionne pas comme cela, ce serait trop facile. Te levant de ton petit banc abrité des regards à quelques encablures seulement de ton travail, ou, tout aussi bien, en revenant de faire ton kilomètre à la piscine, tu peux en écrire deux ou trois, parfois quatre, cinq c’est arrivé une fois, le petit banc et la piscine te donnent cet élan, mais davantage, non, ce n’est vraiment pas possible. Non que tu n’aies pas déjà essayé, ne serait-ce que par désoeuvrement, ou, plus sûrement pour distraire ton ennui, mais la source, c’est dire si elle est modeste, est vite tarie.

    Et tu sais, depuis toujours, qu’il ne faut jamais trop tirer sur les sources modestes. Sans courir le risque de les assécher définitivement.

    Va donc prendre un café dans un gobelet de plastique brun ou croque dans une pomme mais ne commets pas l’imprudence de trop essayer.

    Contre c’est ne pas trop tirer d’eau chaque jour.

    #89.

    Pour la première fois depuis tellement longtemps, le rêve d’une apnée qui n’est pas angoissante, pas synonyme d’asphyxie ; mais bien au contraire plaisante, ivresse même, je viens de plonger à la piscine et je remonte très lentement à la surface, en fait j’ai atteint une telle profondeur que c’est une vraie nage que de revenir à la surface, une nage verticale, je trouve que le cyclone de bulles que j’ai créé dans mon plongeon est admirable au regard, je mets très longtemps à remonter à la surface, mais je prends mon temps, je fais durer le plaisir. Je fais durer l’apnée. C’est une apnée de rêve à la façon de celles interminables de Johny Wesmüller dans le Tarzan de Van Dyke.

    Et si c’était dans ce rêve qu’était contenu l’espoir de ma guérison ?

    En rêve, on peut faire tellement de choses, y compris de guérir d’un mal incurable (mais pas dangereux).

    #120.

    Faisant tes longueurs à la piscine le midi sur ton temps de déjeuner, tu réalises une fois de plus à quel point tu tiens un compte serré des longueurs déjà parcourues et de celles qui restent à faire et tu voudrais que cela aille plus vite, être bientôt sorti de l’eau, arrêter d’étouffer volontairement pendant trois passages de bras, que cesse la douleur légère mais continue dans les bras, les avant-bras surtout, et les épaules, et pour te représenter tout cela, tu ne cesses de calculer le ratio des longueurs faites versus les longueurs restant à faire en des pourcentages, tout en te faisant la réflexion que la représentation graphique de tout ceci dans ton esprit est celle d’une barre de défilement sur un ordinateur, représentation que tu généralises à d’autres moments de l’existence, comme la progression des jours de la semaine.

    Tu remarques que ta progression, comme cela l’est sur un ordinateur vieillissant, voire en fin de parcours, est de plus en plus laborieuse au fur et à mesure que la barre de défilement fonce.

    Et, faisant tes longueurs à la piscine le midi sur ton temps de déjeuner, tu fais l’application de cette longueur, de cette difficulté accrue et du pourcentage accompli contre le pourcentage restant à réaliser, l’application de tout ceci donc, à ton existence toute entière.

    Et d’après toi, tu en es où sur ta barre de défilement ?

    #133.

    A la piscine, en pleine forme, tu nages vite et longtemps, plus vite et plus longtemps que d’habitude et tu remarques alors que la lutte que tu mènes contre toi-même n’a plus son siège dans ton souffle mais dans les bras. Ce que tu regrettes, si tu vas à la piscine pour faire des longueurs, ce n’est pas pour accentuer le côté armoire à glace, pitié !, c’est bien davantage pour travailler ton souffle, augmenter cette capacité pulmonaire qui te fait défaut, surtout la nuit, mais voilà, tu le réalises en nageant, cela fait deux ans que tu fais des longueurs à la piscine, tu t’es endurci dans cet exercice, tu as plus de souffle et aussi plus de force dans les bras, et donc, réalisation amère, si tu veux travailler son souffle, il va falloir désormais faire davantage de longueurs, tirer davantage sur les bras, au point de te faire manquer de souffle.

    Les choses auxquelles on pense quand on fait des longueurs !

    Et sans doute aussi, nageant aujourd’hui avec de pareilles pensées en tête, as-tu le sentiment de nager avec la mort aux trousses, tu nages d’autant plus vite aujourd’hui.

    Exercice #7 de Henry Carroll : comment vous sentez-vous, exprimez-le avec la lumière

    Souvenir d’une grippe carabinée, avec de remarquables pics de fièvre.

    #qui_ca

  • Landmines don’t know when war is over. They continue to kill | Daniel Craig | Global development | The Guardian

    http://www.theguardian.com/global-development/2015/oct/28/daniel-craig-spectre-global-landmine-threat-james-bond-un-global-advoca

    A few years ago, I was fortunate enough to work in Cambodia. I’d been told how beautiful the countryside was, and of the country’s rich culture and welcoming people, and I wasn’t disappointed.

    But I also knew there had been conflict there; years of devastating war and a horrendous dictatorship. And I’d read about the minefields.

    #armements #mines_anti_personnelles #land_mines

  • Antonov toujours en crise…

    Antonov CEO clings to job as crisis deepens at aircraft firm
    http://www.kyivpost.com/content/business/antonov-ceo-clings-to-job-as-crisis-deepens-at-aircraft-firm-362444.html

    On Aug. 4, employees of Antonov, a state-run aircraft engineering firm, staged a protest near its headquarters on Kyiv’s Tupoleva Street after the government dismissed company president Dmytro Kiva on May 26.

    Kiva was replaced with Sergiy Merenkov, a former Antonov employee and principal expert on the An-140 cargo and passenger model.The decision came from the Industrial Policy Ministry, a unit within the Cabinet of Ministers that is currently being merged with the Economy Ministry.

    On Aug. 1, Merenkov tried entering the company’s corner office, but security guards didn’t let him in.

    Kiva a bien verrouillé son affaire…

    Kiva has muddled three (executive) positions at Antonov – general director, president and chief constructing engineer – occupying all of them so it would be impossible to dismiss him. He made the management system extremely complicated,” a Cabinet member told the Kyiv Post, requesting anonymity because he is not authorized to speak publicly on the issue.

    Kiva, whose son Oleksandr Kiva is his deputy, retained Roman Marchenko, a senior partner at Ilyashev & Partners law firm, to help him stay in office.

    Il a le soutien du collectif de travail.

    Et certaines des critiques des libéraux modernisateurs sont carabinées…

    Ilia Kenigshtein, senior partner at Hybrid Capital, a venture fund, has often criticized the generation of Soviet-era managers who still run companies today, referring to them as “red directors.

    I’m glad that epoch of inarticulate collective farm managers is coming an end in the big-money sector. They’ve never changed their Soviet attitude, they’ve always been wearing rural-style Brioni suits and black patent leather shoes with white socks and clap (their hands) during private concerts of Russian pop-music star Philip Kirkorov,” he says.

    Rendez-vous compte !


    Pierce Brosnan wearing a Brioni suit
    photo © Brioni

    Brioni Suits | Bond Lifestyle
    http://www.jamesbondlifestyle.com/product/brioni-suits

    Brioni suits are worn by Pierce Brosnan in all of his Bond movies and by Daniel Craig in Casino Royale. Brioni, a famous Italian bespoke house, was introduced to Bond by costume designer Lindy Hemming in the movie GoldenEye. In the book Dressed to Kill - James Bond The Suited Hero, Lindy Hemming explains that she wanted a company capable of tailoring in the Savile Row manner, and - because of GoldenEye’s tight shooting schedule - could produce a lot of suits very quickly. She also wanted something that that was sheer luxury, unmistakably synonymous with expensiveness. In GoldenEye, Tomorrow Never Dies, The World is Not Enough and Die Another Day, Bond wears Brioni suits, often combined with a Turnbull & Asser or Sulka tie and Church’s shoes.

    After the Brosnan Bond era, Daniel Craig continued the new Brioni tradition in Casino Royale. Craig wore a charcoal gray Brioni suit, at the London press conference announcing his role of Bond in Casino Royale, and in the movie he wears Brioni as well.

    Voici donc Kiva (à g.) en costume de directeur de kolkhoze.


    President of Tatarstan Republic is viewing the modern ANTONOV aircraft
    (sur le site d’Antonov)

  • Skyfall fails (Le blog d’un odieux connard)
    http://odieuxconnard.wordpress.com/2012/11/10/skyfall-fails

    Le #film s’ouvre alors que James Bond est en train d’avancer, l’arme au poing, dans un petit hôtel d’Istanbul. Incarné par Daniel Craig (James Bond, pas l’hôtel), il a donc comme toujours – à l’exception de quelques sourires – ce curieux petit air à base d’yeux plissés et de lèvres pincées qui donne l’impression, tout le long du film, qu’il est mi-grognon mi-pensif. Mesdemoiselles, si vous avez quelque fantasme concernant Daniel Craig et que vous souhaitez que votre compagnon lui ressemble, n’hésitez pas à lui demander « Dis-donc, tu as bien fermé à clé en partant ? » et paf, les yeux se plissent, les lèvres se pincent, et hop : Daniel Craig. C’est terrible, on dirait que ce mec a toujours oublié un truc et essaie de s’en rappeler.

    #cinéma #spoiler

  • Bond, la perfection au masculin
    http://www.marianne.net/Bond-la-perfection-au-masculin_a223728.html

    Car Daniel Craig, avatar n° 8 de l’agent 007, last but not least, porte le costume plus près du corps. Un corps dur comme de l’acier, dont on pourrait faire des clous, mais qui nous rappelle, tant il est malmené et marqué, qu’un muscle, c’est aussi une cicatrice. Tout son univers se délite : le MI6 subit une cyberattaque terroriste en plein cœur de Londres, M est priée de prendre sa retraite, Q a été remplacé par un geek juvénile et arrogant... Que peut encore un homme d’action, autant dire un dinosaure, dans un monde où l’information le prend de vitesse ? Que peut un ouvrier du film d’action dans un monde dématérialisé qui périme le physique ? Pas grand-chose.

    [...]

    Le scénario a la finesse de satisfaire les attentes de la franchise Bond tout en les détournant. Comme si un pilote de film d’art et d’essai avait pris les commandes d’un film long-courrier pour le faire se poser dans le champ de son propre passé. Ou comment transformer un blockbuster, dans un acte d’autocinéphilie unique, en film nourri de son patrimoine. Après cinquante ans de bons et loyaux services secrets, James Bond peut enfin entrer au service public de sa propre majesté.

    Je suis #Bond... pour la casse ? Voilà qui me donne envie d’aller le voir, marre justement, de ces James Bond invulnérables.
    #cinéma

    • M’ouif, enfin c’est ce qu’on lit systématiquement à chaque nouvel épisode de Bond. Depuis la fin des Roger Moore, il y aurait à chaque épisode une remise en question de la franchise, un jeu avec les codes de la série, maintenant il prend des coups, ses amis meurent, ça devient de plus en plus réaliste (Brosnan), Bond devient badass (Craig), etc. Mais Roger Moore jouait déjà largement sur le second degré, et même Sean Connery cabotinait déjà beaucoup avec sa mâle assurance ; la série a toujours été un jeu avec les codes du film d’espionnage, largement décalée et second degré, ce qui l’a toujours rendue bien plus acceptable, à mon avis, que les films calqués dessus dans les années 60/70. Et les parodies Austin Powers et OSS 117 ne sont finalement pas si éloignées que cela de leurs modèles.

      Ça doit faire au moins 20 ans que la critique s’extasie à chaque nouveau Bond parce que, dans cet épisode-là, Bond saigne du nez quand il se bat. Mais bon, même le côté badass de Daniel Craig, ça renvoit à OSS 117 expliquant « J’aime me battre ».

      Pour l’invulnérabilité, sa femme meurt tout de même dès 1969 (Au service secret de Sa Majesté), ce qui n’est pas rien. :-)