person:daniele roccato

  • J – 47 : Ce dimanche j’ai décidé une mauvaise fois pour toutes de venir à bout d’un certain nombre de pensums dont il deviendrait dangereux de les remettre plus longtemps à une date ultérieure. Conscient qu’un dimanche matin je risque surtout de me laisser aller à mes instincts premiers, descendre dans le garage avec un café dès que je suis levé pour aller augmenter le Désordre , qui n’en a sans doute pas tant besoin que cela, mais n’est-ce pas là justement une activité qui justement se satisfait très bien d’un travail, voire d’un acharnement, qui n’a pas d’urgence et qui, de ce fait, attise, le désir, j’imaginais bien que de temps à autre il devient impératif qu’un toit et des murs garantissent le lieu même du désir et que ces derniers réclament un entretien que l’on en peut sans cesse reporter à des périodes de moindre désir, aussi pour barrer le chemin du désir et canaliser celui de la raison, j’ai échafaudé un plan, une liste des items dont je devais absolument m’acquitter lors de cette belle journée de dimanche, une dizaine de pensums en regard de laquelle j’ai construit une petit pile de disques, dix disques aussi, m’enjoignant de faire correspondre à chaque disque une des tâches en retard.

    La liste des disques en question. Tous écoutés.
    Spiral inputs , Sophie Agnel, Andrea Nauman et Bertrand Gauguet
    The clearing et Three Days In Fucking Paradise de Fred Frith
    Duke Ellington, Piano In The Foreground , trio avec Sam Woodward et Aaron Bell
    Canopée de Dans les arbres.
    Le château de Barbe bleue de Béla Bartók
    In Nomine de Ciro Longobardi, Michele Rabbia et Daniele Roccato
    The last train de Otomo Yoshihide et Roger Turner
    Sheik yerbouti de Frank Zappa
    Les partitas pour violon de Jean-Sébastien Bach

    La liste des tâches dont je me suis effectivement acquitté
    Réparation du tiroir de la cuisine (Sophie Agnel et consorts)
    Plier et ranger le linge (Duke Ellington et Dans les arbres)
    Faire le ménage (Otomo Yoshihide et Roger Turner)

    Ben oui, il en manque, je voudrais vous y voir à ma place.

    #qui_ca

  • http://www.desordre.net…/bloc/ursula/2017/sons/in_nomine.mp3

    Le tre figure , album In nomine de Ciro Longobardi, Daniele Roccato et Michele Rabbia

    J-82 : Michele me l’a remis hier, ce CD magnifique, Michele en trio avec Ciro Longobardi (piano et samples ) et Daniele Roccato (contrebasse), In Nomine, disque hommage à l’immense compositeur italien qu’était Giacinto Scelsi.

    Je ne sais pas quelle est la part d’amitié qui est à l’œuvre dans cette écoute éblouie de ce disque et ce n’est pas une question d’objectivité ou quoi que ce soit de ce tabac, non, simplement une connaissance désormais intime des manières de Michele, cette percussion à la fois étendue et à la fois des moindres gestes, et, dans ce disque donc, la manière extrêmement subtile par laquelle elle s’allie au jeu également riche et subtil de Ciro Longobardi et Daniele Roccato au point, en bien des endroits, de n’être qu’une seule voix.

    S’attaquant à un tel monstre de la musique classique contemporaine, ces trois musiciens risquaient de rencontrer de nombreux écueils parmi lesquels des citations trop longues et trop fidèles, une admiration trop benoîte, une fidélité contraignante, si ce n’est paralysante et bien d’autres défauts. Il n’en est rien. Ces trois musiciens partent à l’assaut de cet Everest personnel pour chacun d’eux avec la ferme intention d’en découdre, de faire l’inventaire de ce qu’ils doivent chacun à Giacinto Scelsi, de remonter aux sources mêmes de ce qui les a probablement amenés à la musique et à jouer comme ils jouent désormais musiciens accomplis, cultivés et curieux.

    Sans compter qu’ils ont la bonne idée de se rencontrer vraiment, de faire de Giacinto Scelsi le théâtre même de leur rencontre, de s’appuyer beaucoup sur les apprentissages qu’ils ont nécessairement faits à l’écoute des quatuors à cordes fameux de leur maître, mais aussi sur des œuvres moins saillantes, moins envoutantes en somme, c’est un peu comme si Ciro Longobardi, Daniele Roccato et Michele Rabbia picoraient librement dans les partitions de Scelsi, je crois que l’on dit sampler aujourd’hui, et ce faisant ils remontent un peu aux sources d’eux-mêmes ce qui concoure grandement à l’épaisseur hors du commun de ce disque.

    Le disque recèle de morceaux de bravoure : des envolées très denses de contrebasse, des explorations très sonores du piano, il y a le travail minutieux de Michele dans les timbres, il y a cet enregistrement très musical d’une voix de vieille femme italienne qui prend par surprise, qui paraît même prendre les musiciens par surprise, les assemblages patients des instruments deux à deux avant d’accueillir le troisième en fin de morceau.

    De la musique belle, intelligente et cultivée. La marche du monde ne peut que s’en trouver mieux. Même si. Et même si peu.

    #qui_ca