person:david guetta

  • En Israël, la culture est prise entre deux feux
    Pierre Sorgue, Le Monde, le 16 novembre 2018
    https://www.lemonde.fr/m-actu/article/2018/11/16/en-israel-la-culture-est-prise-entre-deux-feux_5384505_4497186.html

    Lana Del Rey, Brian Eno, Peter Gabriel ou Arcade Fire… L’appel au boycott d’Israël pour dénoncer le sort des Palestiniens rencontre de plus en plus d’écho chez les artistes. Un dilemme pour le monde de la culture israélien.

    A trois heures du matin, The Block est à bloc. Le plus célèbre club électro de Tel-Aviv, enfoui sous le béton de la gare routière centrale, reçoit Carl Craig, ponte de la techno de Detroit (Michigan) aux Etats-Unis.

    La foule ondule, saute, tressaute au rythme des basses, dans le brouillard bleu que découpent les faisceaux de projecteurs épileptiques.

    BDS pour Boycott, désinvestissement, sanctions

    Yaron Trax, le maître des lieux, s’est glissé entre les danseurs pour s’assurer des bons réglages de sa sono analogique, réputée l’une des meilleures du monde. Le quadragénaire aux airs adolescents est aux anges parmi ces jeunes gens dont beaucoup sont venus au club comme ils étaient à la plage, en short et tee-shirt. Celui que porte Yaron ce soir-là reproduit les briques et la typographie reconnaissable entre toutes : Pink Floyd, The Wall. Lorsqu’on lui fait remarquer, il sourit comme un enfant contrit : « C’est un tee-shirt formidable et l’album l’est aussi. Quel dommage que Roger Waters soit devenu aussi décevant… »

    Car le musicien britannique, ex-membre de Pink Floyd, est le spectre qui hante la scène israélienne et dérange l’intelligentsia de gauche, celui qui empêche la bulle libérale et hédoniste qu’est Tel-Aviv de flotter innocemment à cinquante kilomètres du mouroir à ciel ouvert qu’est la bande de Gaza.

    Depuis des années, Roger Waters offre sa voix aux militants internationaux du BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions), mouvement né en 2005 de la société civile palestinienne, un an après que la Cour internationale de justice a jugé illégal le mur de séparation construit entre Israël et les territoires occupés.

    Il prône les pressions sur l’État d’Israël pour parvenir à ce que n’ont jamais obtenu des décennies de guerre, de résolutions de l’ONU et de vains processus de paix pendant lesquels le nombre des colons n’a cessé de croître (500 000 aujourd’hui) : la fin de l’occupation des territoires, la pleine égalité pour les citoyens palestiniens d’Israël, le droit au retour des réfugiés chassés de leurs terres.

    La scène musicale comme estrade politique

    Il suffit de voir les gratte-ciel bleutés qui poussent à Tel-Aviv pour s’en convaincre : le boycott économique n’a que peu d’effets. La « start-up nation » se porte bien, ses relations commerciales et diplomatiques n’ont cessé de se développer avec l’Afrique, l’Inde, la Chine, voire certains pays arabes. En ce mois d’octobre encore estival, les plages sont noires de monde, les ruelles de la vieille ville de Jérusalem, pleines de visiteurs : le pays aura accueilli plus de 4 millions de touristes à la fin de l’année, soit 46 % de plus qu’en 2016.

    Au-delà du portefeuille, le BDS s’attaque aussi aux cœurs et aux têtes. Il appelle au boycott culturel et académique, comme celui qui s’exerçait sur l’Afrique du Sud au temps de l’apartheid. Et celui-là trouve, ces derniers mois, un écho bien supérieur. Depuis longtemps, la scène musicale sert d’estrade politique. D’un côté, Roger Waters, Peter Gabriel, Brian Eno, Elvis Costello, Lauryn Hill (The Fugees), Arcade Fire et d’autres ont annoncé qu’ils ne joueront plus en Israël tant qu’ils ne pourront en accepter la politique.

    De l’autre, Nick Cave, Radiohead, Paul McCartney, Alicia Keys, parmi beaucoup, sont venus au nom du dialogue et du refus de se voir dicter leur conduite. Mais, récemment, deux chanteuses moins politisées et plus populaires parmi les adolescents ont suivi le mouvement : en décembre, Lorde, la jeune rockeuse néo-zélandaise, annulait son concert après avoir été « alertée » par une lettre ouverte signée de deux fans – l’une Juive, l’autre Palestinienne –, puis en septembre, après de nombreux appels dont celui de Roger Waters, Lana Del Rey faisait faux bond. Parce qu’elle ne pourrait pas se produire également dans les territoires palestiniens, dit-elle, elle renonçait à jouer au festival Meteor qui devait être une sorte de Coachella version kibboutznik, dans le nord d’Israël.

    Un « tsunami d’annulations »

    Après le refus, en avril, de l’actrice Natalie Portman de recevoir le Genesis Prize (considéré comme un « Nobel » israélien) pour exprimer son désaccord avec le gouvernement Nétanyahou et les violences commises à Gaza, après la défection de l’équipe d’Argentine de Lionel Messi qui, en juin, a annulé une rencontre amicale avec celle d’Israël à la suite de pressions internationales (de menaces, dit-on du côté israélien), le retrait de Lana Del Rey fut une autre secousse médiatique.

    « Une belle surprise qui aidera peut-être les jeunes à se poser des questions sur une politique insoutenable dans les territoires occupés, mais aussi en Israël, où les Palestiniens, qui représentent 20 % de la population, sont victimes d’une cinquantaine de lois discriminatoires, à commencer par le logement et la terre », explique Kobi Snitz, chercheur en neurobiologie au Weizmann Institute et cofondateur de Boycott from Within (« boycott de l’intérieur »), qui rassemble une poignée de militants suffisamment téméraires pour affronter les torrents de haine qu’ils suscitent au sein du pouvoir, des médias et sur les réseaux sociaux.

    Dans la foulée de Lana Del Rey, quatorze artistes, dont plusieurs DJ, ont décliné l’invitation du festival. Des dizaines d’autres ont exprimé leur soutien au boycott sur les réseaux sociaux. Yaron Trax commence à se faire du souci pour « la capitale du clubbing » qu’est Tel-Aviv. Idit Frenkel, qui officie souvent derrière les platines de The Block, a signé un long article dans le quotidien israélien Haaretz, pour évoquer le « tsunami d’annulations ». Le titre de la tribune était emprunté aux paroles d’une chanson de Don McLean, American Pie (1971) : « The day the music died » [« le jour où la musique est morte »].

    Le boycott la laisse amère : « On peut comprendre ceux qui veulent lutter de manière non violente contre les morts de Gaza, le développement des colonies ou la décision de Trump d’installer l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem. Mais ne pas venir, c’est punir ceux qui essaient de changer les choses, y compris dans la minuscule scène underground qu’abhorrent les nationalistes et les religieux du gouvernement. »

    Si certaines figures de l’électro, comme l’Américano-Chilien Nicolas Jaar ou les Français d’Acid Arab, viennent encore en Israël, ils ne jouent plus à Tel-Aviv mais à Haïfa, au Kabareet, tenu et animé par Jazar Crew, un collectif d’artistes palestiniens. Haïfa, la cité portuaire qui soigne sa réputation de tolérance et de coexistence entre Juifs et Arabes…

    Une forme d’apartheid ?

    Attablé dans un café du centre-ville, Ayez Fadel, 31 ans, l’un des fondateurs et DJ de Jazar Crew, connaît l’antienne par cœur : « Mais même ici, grandir en étant palestinien, c’est éprouver la discrimination. Les écoles publiques arabes moins dotées que les établissements juifs, les boîtes de nuit où l’on te demande ton “Hoger”, le livret militaire que tu n’as pas [la majorité des Arabes citoyens d’Israël n’effectuent pas leur service militaire], la langue… Une nouvelle loi fait de l’hébreu la seule langue officielle, elle dit aussi que le pays est “l’Etat-nation du peuple juif”, alors que je suis un Palestinien vivant ici par la force de l’histoire, que mes impôts servent à protéger les colonies juives et à financer une armée qui a tué 44 enfants palestiniens ces trois derniers mois… Parler d’apartheid ne me paraît pas exagéré. »

    Ayez Fadel comprend le boycott et revendique la dimension politique de Jazar Crew : « Une manière de sensibiliser les jeunes. Nous n’avons plus honte d’être palestiniens, nous sommes éduqués et confiants. Et nous ne cessons de répéter que nos positions ne sont pas contre les Juifs mais contre ce régime. » Le jeune homme se dit prêt à collaborer avec Yaron Trax, qui l’a appelé pour que The Block et Kabareet « organisent quelque chose ensemble ». Mais, précise-t-il, « à condition qu’il fasse une déclaration claire sur l’occupation des territoires et les droits des Palestiniens ».

    Les turbulences qui agitent le microcosme underground reflètent assez bien le désarroi du monde de la culture devant ces appels au boycott. « En ce moment, pas un dîner sans qu’on en parle », reconnaît la responsable d’une galerie d’art installée aux franges de Florentine, ancien quartier d’entrepôts et d’ateliers de Tel-Aviv devenu le préféré des artistes et des bobos. Comme beaucoup d’opposants à l’occupation, elle refuse d’acheter les produits des colonies – certaines se sont spécialisées dans l’agriculture et l’élevage bio – ou le vin venu du Golan. « Mais le BDS culturel, dit-elle, frappe ce qui reste de l’élite de gauche, celle que Nétanyahou et son gouvernement détestent. Si on la muselle, on n’entendra plus que les voix des plus réactionnaires… »

    C’est aussi ce que pense Avi Pitchon, écrivain, critique et commissaire d’expositions : « Le boycott culturel réduit le débat à une polarisation extrême entre les activistes et le gouvernement, il déshumanise et nourrit la paranoïa, ce “nous” contre “eux” dont joue un régime de moins en moins démocratique. Ce tout ou rien est un piège, quoi que disent les créateurs ils seront perdants. Alors, ils préfèrent laisser parler leur art… »

    C’est peut-être pour cela que chercher à les rencontrer pour évoquer la question relève de la chasse au dahu. Groupe pop connu pour ses textes radicaux, écrivain loué comme l’une des « grandes voix morales » du pays, cinéastes, producteurs de concerts, responsables de théâtre, de centre d’art contemporain… tous se disent trop occupés. D’autres se ravisent après avoir parlé et demandent à n’être plus cités.

    Pnina Blayer, la directrice artistique du Festival international du film de Haïfa qui s’est déroulé fin septembre sans les « grands noms » invités, exige les questions par courriel et adresse des réponses aussi sèches que le fleuve Jourdain surexploité : selon elle, la situation dans la bande Gaza et la guerre en Syrie sont les motifs des absences, dont aucune n’a été motivée par le BDS, qui n’aura découragé qu’un film marocain, et si Agnès Varda, à qui le festival rendait hommage, n’est pas venue, ce n’est pas pour des raisons politiques.

    Il faut comprendre sa prudence : pendant que le festival est soumis aux pressions de l’étranger, sa propre ministre de la culture, la très droitière Miri Regev, demande à celui des finances de lui couper les vivres pour avoir accueilli deux films israéliens qui « sapent les valeurs et symboles » de l’Etat (l’un d’eux raconte l’histoire d’un metteur en scène palestinien qui monte une pièce narrant un amour entre une Juive et un Arabe…).

    Le projet de loi « Loyauté dans la culture »

    La même ministre se démène pour l’adoption d’un projet de loi « Loyauté dans la culture » qui veut supprimer les fonds à toute organisation déniant « Israël comme un Etat juif et démocratique » ou qui ferait du jour de l’indépendance celui de la Nakba, la « catastrophe » que vécurent 700 000 Palestiniens expulsés en 1948.

    Le monde de la culture a manifesté le 27 octobre contre ce texte, de nombreux cinéastes israéliens, comme Amos Gitaï ou Ari Folman, sont parmi les signataires d’une tribune parue lundi 12 novembre dans Le Monde pour demander le retrait du texte. En attendant, des députés ont également proposé de punir de sept ans de prison tout appel au boycott et l’entrée du pays est déjà interdite à tout étranger qui soutient activement le BDS.

    Car, pour le gouvernement, c’est la guerre. Au vingt-neuvième étage d’une tour de Bnei Brak, dans la banlieue de Tel-Aviv, une trentaine de personnes travaillent au sein de la National Task Force for Countering Delegitimization (« force d’intervention contre la délégitimisation »), qui dépend du ministère des affaires étrangères.

    « Nous révélons les relations entre le BDS et des organisations terroristes comme le Hamas ou le Front populaire de libération de la Palestine ; comment, sous couvert de droits de l’homme, il s’attaque à la légitimité d’Israël ; comment il bombarde les artistes par des cyberattaques menées par des robots. Nous travaillons avec des centaines d’organisations pro-israéliennes en leur offrant articles, vidéos et autres outils pour affronter les arguments du BDS », résume Tzahi Gavrieli, le directeur.

    Le bureau a lancé la plate-forme 4il sur Internet, Facebook et Twitter : des images de jolies filles montrent la diversité du pays, des vidéos soulignent la réussite de certains « Arabes israéliens ». Des posts saluent la criminalisation du boycott en France (en 2015, la justice a confirmé la condamnation de militants ayant appelé au boycott des produits israéliens) ou en Allemagne (le BDS a été jugé antisémite par l’Office fédéral de la protection de la constitution de Berlin).

    Un post du 23 octobre relaie le rapport de Human Rights Watch sur la torture pratiquée par le Hamas et l’Autorité palestinienne en demandant si la communauté internationale va exercer sur eux les mêmes pressions que sur Israël… Des messages vantent le concours Eurovision de la chanson de mai prochain : avec ses 186 millions de téléspectateurs, la manifestation est une vitrine que le gouvernement ne veut pas voir entachée, malgré l’appel au boycott lancé par 140 artistes internationaux.

    L’« instrumentalisation » du monde de la culture ?

    La lutte contre le BDS est aussi l’affaire d’Adam Shay au sein du Jerusalem Center for Public Affairs, un think tank niché dans un quartier tranquille de la ville sainte. Il « scrute » les militants locaux, conseille les promoteurs de spectacles, essaie de convaincre des artistes ciblés que ce qu’on leur raconte est un tissu de mensonges et qu’ils ne regretteront pas de venir.

    « David Guetta était là la semaine dernière », se réjouit le jeune homme avant de confier qu’il cherchait à faire venir Rachid Taha, peu avant sa mort, en septembre : « Cela aurait été un gros truc » (vu les relations qui liaient le rockeur français à Brian Eno, très impliqué dans le BDS, on imagine mal une réponse positive).

    C’est cette « instrumentalisation » du monde de la culture qui, aux yeux des militants du BDS, justifie les appels au boycott de ceux dont les travaux ou les voyages sont financés par le gouvernement. Ils aident, disent-ils, le pays à soigner son image de démocratie favorable à la liberté d’expression. Les artistes se retrouvent coincés entre le marteau du gouvernement, qui tient (et serre) les cordons de la bourse, et l’enclume des pressions internationales.

    « À l’étranger, nous sommes considérés par certains comme des collaborateurs ; ici, comme des traîtres. Mais l’argent du ministère est aussi celui de mes impôts. Si la solution est de dire non, où va-t-il aller et qui va dire ce que l’on dit ? », demande Hillel Kogan, danseur et chorégraphe de la célèbre compagnie Batsheva, qui dut affronter cet été quelques militants pro-BDS à Montpellier et à Toulouse alors que, invité de la très diplomatique saison « France-Israël », il s’apprêtait, avec le Palestinien d’Israël Adi Boutros, à interpréter sa pièce We Love Arabs.

    Certains dans le pays ont regretté que l’écrivain David Grossman, considéré comme une « conscience » par le camp de la paix, se laisse « enrôler » par le pouvoir en acceptant le prix Israël de littérature 2018 des mains du ministre de l’éducation ou, en 2017, lorsqu’il accompagne à New York une pièce tirée de l’un de ses romans et adaptée par deux troupes israéliennes qui s’étaient produites dans les colonies (ce que l’auteur désapprouve). Ce, sous les yeux de la ministre de la culture qui avait fait le voyage. « Une manière de résister au BDS qui est une nouvelle forme d’antisémitisme », avait dit Miri Regev ce jour-là.

    Car c’est l’argument massue des contempteurs du BDS. Le mouvement a beau condamner racisme et antisémitisme, le public hétéroclite qu’il mobilise laisse parfois suinter des attaques haineuses, voire négationnistes. Dans le petit théâtre de Jérusalem où il travaille avec de jeunes comédiens juifs et arabes, Arik Eshet se souvient du festival de théâtre d’Édimbourg de 2014, lorsque des militants « agressifs » avaient fait annuler son spectacle : « Tu entends des gens crier qu’Israël ne devrait pas exister. C’est traumatisant… »

    La nécessaire mobilisation de la société civile

    Roger Waters est systématiquement accusé d’infamie. Du coup, Gideon Levy, le journaliste de Haaretz qui se démène inlassablement pour évoquer le sort des Palestiniens, ne cesse de défendre le chanteur. « J’ai passé de longues nuits à discuter avec lui, rien ne lui est plus étranger que les sentiments antisémites, ces accusations sont intolérables », assène-t-il dans le salon de sa maison, dont un mur est orné d’une vieille publicité ensoleillée où est inscrit : « Visit Palestine ».

    Un BDS efficace, ajoute-t-il, serait le seul moyen d’en finir avec les bains de sang : « Le changement ne viendra pas de l’intérieur d’Israël, la vie est trop bonne ici. Or les Etats-Unis soutiennent le pays et l’Europe est une plaisanterie : le seul espoir est la mobilisation de la société civile. La gauche sioniste appelle depuis des lustres à deux Etats mais n’a rien fait pour ça, nous devons en payer le prix. La criminalisation du BDS est un scandale : pourquoi serait-il légitime de boycotter l’Iran et pas Israël ? »

    En les réduisant au rang de producteurs de « biens culturels » ou d’instruments du soft power d’un Etat dont ils n’approuvent pas la politique, le BDS interroge les artistes de manière inconfortable sur leurs responsabilités de créateurs et de citoyens au cœur d’une opinion publique au mieux indifférente, au pis de plus en plus xénophobe. Et dans les conversations un nom revient souvent, comme s’ils étaient orphelins d’une figure capable d’indignation, de « courage », disent certains.

    « Il nous manque un penseur comme Leibowitz », glisse le photographe Miki Kratsman, l’un des fondateurs de l’ONG Breaking the Silence qui recueille les témoignages des soldats sur les exactions auxquelles les contraint l’occupation. C’est aussi ce que dit Zeev Tene, un vieux rockeur dont Ari Folman utilisa une chanson pour son film Valse avec Bachir et qui, depuis deux ans, part, le 6 juin, date anniversaire de la guerre des Six-Jours, le long du mur de séparation avec quelques musiciens et un camion en guise d’estrade pour jouer devant une banderole qui proclame « Make Israel small again ».

    Yeshayahu Leibowitz, mort en 1994, grand penseur et moraliste, religieux convaincu et sioniste affirmé, fut un critique féroce de l’occupation qui « détruit la moralité du conquérant ». Outré par la torture, il alla jusqu’à employer le terme de « judéo-nazis »… Or, constate l’historien « post-sioniste » Shlomo Sand, qui fait lui aussi référence à Leibowitz, « je n’ai pas vu l’Université se mettre en grève lorsqu’une succursale a été ouverte dans la colonie d’Ariel. Je n’ai entendu aucune de nos voix de la gauche sioniste prôner l’objection de conscience dans les territoires ou soutenir les refuzniks [qui refusent de servir dans l’armée]. Le BDS les met devant leurs contradictions… »

    Mais le malaise, explique-t-il, vient aussi du fait que, « en posant le droit au retour des réfugiés, le BDS questionne les conditions mêmes de la naissance d’Israël dans un pays encore hanté par la Shoah. Ce droit au retour ne peut être ignoré, mais il faut être honnête : on ne pourra pas accueillir 5 millions de réfugiés. Je soutiens le BDS à condition qu’il ne mette pas en danger l’existence d’Israël. »

    Une situation parfois absurde

    L’historien déplore aussi la « stupidité » de certains appels au boycott culturel. Les musiciens d’Apo and the Apostles, un Arménien de Jérusalem et trois Palestiniens de Bethléem, partagent sûrement son avis. Lorsque ces talentueux garçons qui mêlent leur folk-rock à des nuances orientales doivent se produire dans un festival de musique alternative arabe à Tel-Aviv, le BDS décrète que ce n’est pas acceptable parce qu’ils ne sont pas des « Palestiniens de 48 », ceux restés en Israël…

    Shady Srour aussi a quelques remarques à faire sur les censeurs du BDS : cinéaste palestinien de Nazareth, il a tourné un très joli film dans sa ville natale, Holy Air, où comment un homme essaie de s’en sortir en vendant de l’« air saint » aux touristes venus sur les traces de Jésus. C’est drôle, féministe, sexy, acide, « beckettien », plus grave lorsque les rêves sont empêchés par le seul fait de n’être pas un citoyen comme les autres.

    Mais le BDS ne rit pas : il a demandé son retrait d’un festival du film israélien à Londres, puis du Festival des cinémas arabes de l’Institut du monde arabe, à Paris, qui a congédié le réalisateur d’un bref courrier. « Je suis palestinien, mon père fut l’un de ceux chassés vers le Liban. Me boycotter, c’est m’empêcher d’affirmer mon propre récit face à celui des Israéliens. Le BDS vient chez moi pour me couper la langue… Aucun financement arabe ne m’est accordé parce que j’ai un passeport israélien, où est-ce que je trouve l’argent ? » On comprend que son film soit teinté de tristesse et d’absurde.

    #Palestine #Culture #Apartheid #BDS #Boycott_culturel

  • David Guetta, prospectiviste du désert : il sentait bon le sable chaud, mon imaginaire
    http://www.pop-up-urbain.com/david-guetta-prospectiviste-du-desert

    Quel est donc ce vent chaud qui nous vient du désert (australien, namibien ou bien américain) et qui semble dicter un certain nombre de tendances du moment ? La réminiscence de certains imaginaires rattachés à un passé rebelle, ou bien la vision poétique d’un futur post-apocalyptique ?

    [...]

    Comme l’analysait notre consultante en mode Florence Abitbol, une certaine esthétique coincée entre Woodstock et le western est bel et bien présente depuis des années dans le prêt-à-porter bas de gamme comme dans le luxe

    [...]

    A en juger par les références qui composent le clip, qu’elles soient assumées ou non, il est intéressant de constater que celui-ci oscille autant du côté « cyberpunk » que de de l’univers post-apocalyptique plus standard, c’est-à-dire mad maxien. Et c’est sûrement pour cela que le spot fonctionne, et entre en résonance avec l’imaginaire collectif occidental. A l’heure où les futurs possibles de la nos sociétés s’entrechoquent à travers divers modèles et sources d’inspiration relativement distinctes, le clip du DJ superstar semble brasser les uns et les autres pour un résultat franchement esthétique. Ainsi le numérique, agent privilégié de la smart city, s’accouple ici avec l’art de la récup’, du bricolage et de l’éphémère – canaux essentiels de la « ville agile » et du mouvement Do it Yourself – , brouillant les pistes déjà bien embrouillées des utopies urbaines contemporaines.

    #Afrojack #Bebe_Rexha #Burning_Man #Culture #David_Guetta #Désert #Mad_Max #Nicki_Minaj #Numérique #Post-apocalyptique

  • Universal Music & SoundCloud Copyright The Entire Spectrum Of Sound
    http://wundergroundmusic.com/universal-music-soundcloud-set-to-copyright-the-entire-audio-spec

    “Music giants Universal Music have today announce a team up with online streaming service SoundCloud to make the stunning purchase of the entire spectrum of sound by copyrighting everything that the human ear can detect.

    The move comes after recent criticism of the companies for their stance on DJs using licensed music in their sets without permission and is viewed by those within each company as a way to quell any criticism that might be voiced against them.

    Some of the things that now fall under the copyright include human speech patterns like a man gently weeping or fat cat music executives laughing, any music ever made including even things that barely qualify as music like noise core or David Guetta.

    “Under the new copyright anything the human ear can sense will be owned by Universal-SoundCloud and people will need to subscribe annually to be able to hear anything at all,” explained a statement released by the companies which was forbidden to be read aloud else the person reading it had to pay a small fine. “All everyone alive who wants to make music, speak or hear anything at all like their name being called or the sound of oncoming traffic has to do is pay the yearly subscription charge of $500 and they can listen to anything to their ears’ content.”

    #copyright_insane #majors # soundcloud

  • Confessions d’un puriste de la tek :

    « Laurent Garnier : "La musique est devenue un produit jetable" » (entretien, L’Express, 15-04-14)

    http://www.lexpress.fr/culture/musique/laurent-garnier-la-musique-est-devenue-un-produit-jetable_1507100.html?xtmc

    Comment la techno est-elle perçue aujourd’hui ?

    Même si elle est devenue une institution comme le rock ou le hip-hop, les a priori et les méconnaissances sont encore nombreux. Une partie de la population considère toujours la techno comme une musique de drogués et d’idiots. Le terme « musique électronique » est plus employé. Il fait moins peur. Il est moins radical, politiquement correct. La scène techno a un problème : elle ne compte pas beaucoup d’acteurs connus du grand public. David Guetta représente-t-il le monde de la techno ? Non, il produit de l’electronic dance music, un style pop et commercial pour les enfants. Mon fils de 10 ans en écoute avec ses copains. Pour eux, le plus grand DJ du monde, c’est Martin Garrix. Le garçon a 17 ans, et ce sont ses parents qui l’emmènent à ses concerts.

    Pour sortir la techno des préjugés que vous évoquez, pouvez-vous nous en donner une définition ?

    Il est très compliqué de donner une définition. Le mot « techno » est un sac qui englobe trop de sonorités. Il faut rester prudent pour ne pas être réducteur. A ses origines, à Detroit, dans les années 1980, la techno était une musique synthétique créée avec des machines dans le but de faire danser. Le concept est plutôt basique et hédoniste. Instrumentale, elle n’a pas vocation comme le rap, par exemple, à traiter des problèmes des quartiers. Si les machines sont privilégiées, elles ne sont pas exclusives. Par exemple, le saxophone est au coeur de mon tube The Man with the Red Face.

    La techno est une suite logique du jazz. Comme lui, elle est une forme de liberté, d’expression et d’expérimentation, éloignée des formatages radiophoniques. Quant aux amalgames sur les drogues, j’ai renoncé à m’énerver contre ces raccourcis ridicules. La drogue a toujours été liée au monde de la nuit et de la fête. Pourquoi stigmatiser la techno ? Est-ce que, pendant le Festival de Cannes, on parle de la consommation de cocaïne ? Non, on parle de cinéma.

    (...)

    Dans le livret qui accompagnait son dernier album, I’m New Here, le chanteur américain Gil Scott-Heron donnait quelques instructions pour en profiter pleinement : couper son téléphone portable, passer le disque d’une traite... Est-ce qu’on écoute bien la musique aujourd’hui ?

    La façon de consommer la musique a été bouleversée. Sur les plateformes de streaming comme Spotify et Deezer, les gens se branchent sur des radios thématiques ou des playlists. Ils n’écoutent plus d’albums. Les jeunes téléchargent la piste 10 et la piste 12 d’un disque. Comme si, dans un film, on disait : « J’aime uniquement la scène où le héros plonge dans la Seine et celle quand il court tout nu dans les rues de Paris. Le reste ne m’intéresse pas. » Un album raconte une histoire. Il est le fruit d’un travail personnel, d’une réflexion. Malheureusement, la musique est devenue un produit jetable. Un consommable.

    Les DJ stars de l’electronic dance music, comme Calvin Harris, Tiësto, Guetta, Swedish House Mafia, Avicii, génèrent des dizaines de millions d’euros de recettes. A Las Vegas, par exemple, les casinos commencent à réaliser plus de bénéfices avec des soirées dans leurs clubs qu’avec leurs salles de jeu.

    Le fait de ne plus générer d’argent avec la vente des disques a poussé certains DJ à devenir de véritables businessmans. Ils font appel à des agents peu scrupuleux qui demandent des sommes indécentes. Dans le monde de l’electronic dance music, mais aussi dans celui de la techno, des DJ prennent 50000 à 60000 euros pour jouer lors d’un festival, au prétexte qu’ils revendiquent 2 millions de fans sur Facebook. C’est de la folie. Comme dans le rock ou dans le hip-hop, on assiste à des dérives.

    Vous a-t-on déjà proposé d’assurer certaines dates dans le genre de celles de Las Vegas ?

    J’ai fait certaines dates importantes, mais ce ne sont pas les concerts les plus intéressants. On demande aux artistes de mixer seulement une heure. Je refuse généralement. J’aime jouer longtemps. Je suis toujours le vilain petit canard. L’argent ne m’a jamais excité. Je n’ai pas besoin de m’acheter un yacht. Je préfère collaborer avec des petites structures qui placent la musique au centre des discussions. C’est ma façon de faire depuis vingt-cinq ans.

    #Laurent_Garnier #tek #zique

  • No free lunch - un concert gratuit exclusivement pour les utilisateurs du service peu sûr DE-Mail.de

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    David Guetta
    Die fantastischen Vier
    Frida Gold + Christina Stürmer

    De-Mail präsentiert das Mega Live Musik-Event:
    Sonntag, der 08.09.2013/14.00 Uhr / Berlin, Flughafen Tempelhof

    Ausfüllen, Abschicken, Ticket sichern. Fülle das Formular aus, um dir dein Ticket zu sichern. Du bekommst dein Ticket
    bis zum 07.09.2013 per E-Mail von TixforGigs zugeschickt. Wenn du Fragen hast, melde dich auf unserer kostenfreien Hotline unter 0800 3309415.

    Raté ! Le concert aura lieu sans nous. Pourtant c’était trop tentant d’assister gratuitement aux présentations de David Guetta (juste pour voir), Die Fantastischen Vier (ok, ils sont assez marrants) et Christina Stürmer (parfois les autrichiens sont étonnant/e/s). Manque de bol pour avoir droit au billet d’entrée il faut souscrire au service mail le plus dangereux pour ta santé.

    L’opposition au Bundestag l’a critiqué parce qu’il permet aux services de renseignements allemands d’accéder aux courriels grâce au manque de chiffrement de bout-en-bout. Il introduit aussi un vecteur d’attaque unique pour accéder à tous les mais présents sur les serveurs de DE-Mail. Une fois généralisé DE-Mail fixera la totalité de la comunication entre les administrations et les citoyens allemands sur un niveau de sécurité mons élevé qu’actuellemment.
    https://ebs01.telekom.de/demailevent/start.do?wt_mc=alias_1007_click2concert
    https://ebs01.telekom.de/demailevent/img/bgneu.jpg
    C’est mal. Pourtant il y a un aspect de DE-Mail qui me chagrine beaucoup plus : Une fois enrégistré tu ne partira plus jamais en vacances tranquillement. Ta boîte postale électronique fournira un accusé de réception à tout message officiel, alors il faudra y répondre sans exception dans les délais fixés. Actuellement les particuliers profitent encore de la possibilité d’une restitutio in integrum - si je suis dans l’impossibilité de consulter ma boîte à lettre en métal, le compte à rebours d’un délai ne commence qu’à partir de mon retour de vacances. Avec DE-Mail c’est fini puisque je peux consulter mes mails même du pôle nord par mon téléphone satellite.

    Pas grave, comme ca on sera libres pour participer à la manif Freiheit statt Angst 2013 .
    http://www.heise.de/tp/blogs/8/154914

    #allemagne #securite #email

  • Il paraît que David Guetta était le prochain sur la liste du tueur de (faux) DJs (je blague) :

    « ’Vinyl Purist’ Identified As Primary Suspect In Slaying Of 22-year-old Traktor DJ »

    Popular DJ software has been know to induce rage in older DJs who fear things are becoming “too easy”

    Police have identified 36-year-old Johannes Van der Burgh as the primary suspect in Friday night’s gruesome nightclub slaying of 22-year-old Polish DJ Mark Borowski.

    Van der Burgh — who was apprehended after police received several key leads from eyewitness testimony — confessed to the murder. He added to the confession by telling police that he was simply doing what “any vinyl purist would have done.” (...)

    Borowski had just finished performing a set of big-room techno on the popular computer DJ software Traktor, a set that according to many other concert-goers left the audience frustrated.

    “[Borowski’s] simplistic dynamics and preset loops would drag for 16, 32, or even 64 bars at a time,” says clubber Daniel Hirsch. (...)

    Upon entry, police discovered a lifeless Borowski laying among two Technics SL1200 turntables. One turntable was covered in Borowski’s own blood, the other plugged in and still playing a copy of Kraftwerk’s “Man Machine.”

    #tek #zique #DJ #Berlin

  • La minute économique de Clarence Boddicker : La K-pop (Gangnam Edition) « Drink Cold
    http://drinkcold.wordpress.com/2013/01/17/la-minute-economique-de-clarence-boddicker-la-k-pop-gangnam-edi

    Pourtant, si le baromètre est au beau fixe, il semblerait que les nuages ne sont jamais très loin.

    Déjà plus forcément au top de son firmament créatif, la K-pop ressasse toujours les mêmes vieux poncifs colorés : De la biatch ou des minets bridés sur du David Guetta aromatisé au kimchi. Loin du dynamisme récurrent des débuts et la fraicheur des premiers groupes, le modèle aux oeufs d’or fermement cloisonné par les producteurs semble accuser le coup, et la créativité et l’originalité se sont évaporé dans une recette désormais plus proche des standards de la Star Ac’ et Endemol production, la rigidité martiale et la chirurgie esthétique en plus.

    Et ce ne sont pas les différents procès entre ex-stars et producteurs qui devraient permettre d’y voir plus clair.

    En attendant, le Japon, son principal marché à l’export et concurrent honni, commence à montrer une sincère saturation vis-à-vis des productions de la péninsule, d’autant qu’on observe une véritable érosion des ventes depuis bientôt un an. Pour ne rien arranger dans des relations bi-latérales déjà complexes, les nippons sont restés totalement cois du phénomène PSY, snobant l’ensemble avec hauteur. Une apathie moquée et vilipendée par les coréens, pleins de certitude sur leur modèle, et prétexte à moquer des japonais jaloux de leur éclatante réussite à l’international.

    #KPop #PSY #gangnam_style #Japon #économie #Corée

  • Des gens plein d’enthousiasme - Cause toujours !
    http://grosse.fatigue.free.fr/causetoujours/spip.php?article53

    Je l’avoue : je ne me suis jamais guéri des années soixante-dix. J’y baigne encore parfois et si l’on me disait tiens, on y retourne, je n’hésiterais pas une seconde. Je pourrais alors échafauder un plan pour que David Guetta, ma bête noire, soit privé de ses deux bras encore bébé, afin que l’avenir ressemble à autre chose, du moins à l’oreille. (Un accident en allant chercher du jambon chez un charcutier maladroit ?).

    Et, plus loin :

    Et puis j’ai vu Jack Lang. J’ai compris que c’était sans espoir. Je l’ai d’ailleurs revu depuis, un soir, dans un cocktail ou je voulais lui rire au nez. Il avait déblatéré pendant deux heures sur la jeunesse. Et puis il était seul, là, en province, au buffet, avec ses cacahuètes. J’avais devant moi la mitterrandie ratatinée, celle qui aurait bien aimé avoir l’air, mais qu’avait plus l’air du tout. Il m’a dit : « C’est toi GF ? » J’ai répondu oui. Il m’a dit : « Pas terrible ton petit site. T’es vraiment minuscule. »

    L’heure est aux bilans : finalement, je lis bien davantage de textes de #Grosse_Fatigue que de Jack Lang. Et pan dans ta postérité.