person:emmanuel kant

  • Emmanuel Kant : « Il ne faut jamais mentir, quoi qu’il arrive ». Vraiment ?

    https://www.franceculture.fr/conferences/college-des-bernardins/emmanuel-kant-Il-ne-faut-jamais-mentir-quoi-quil-arrive-vraiment

    Comment tracer la frontière entre mensonge et manipulation ? Peut-il être acceptable, au nom de l’intérêt commun ou de la protection de l’autre ? Bref, Le mensonge est-il permis ?
    Le mensonge
    Le mensonge• Crédits : Seamind Panadda / EyeEm - Getty

    Le mensonge est-il un acte volontaire énonçant le contraire d’une vérité ou la dissimulation de la vérité ? Dans quelle mesure cet acte est-il acceptable ? Le mensonge est-il synonyme de manipulation ? Les religions monothéistes le considèrent comme un péché et invitent tout homme à le fuir et à ne chercher en toutes choses que la vérité, « Attachez-vous à la véracité », « La vérité vous rendra libre ». Néanmoins, le mensonge n’est-il pas nécessaire dans certains cas afin de préserver la dignité humaine, de protéger un pays et son histoire des erreurs de ses dirigeants, d’éviter la révélation afin de préserver de la souffrance ? D’essayer de réparer ou d’ignorer le réel qui humilie et qui blesse ?

    #mensonge #manipulation

  • Abolir les #frontières

    https://www.scienceshumaines.com/abolir-les-frontieres_fr_37457.html

    Dans Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen (1942), Stefan Zweig parle d’un monde antérieur à la Première Guerre mondiale où les frontières n’existaient pas pour les voyageurs et où la prise de conscience de l’immensité du monde à découvrir s’ouvrait aux Européens. La question d’un monde ouvert pour tous les habitants du monde n’est pas nouvelle, car elle a été déjà abordée par Emmanuel Kant dans son Projet de paix perpétuelle (1795) : il y distinguait le droit de visite du droit d’installation, reprise par Zigmunt Baumann dans ses travaux sur la mondialisation et la fluidité des échanges (une modernité liquide, selon ses termes). Cette question est néanmoins controversée. Dans son ouvrage L’Obsession des frontières (2007), Michel Foucher décrit un monde où il n’y a jamais eu autant de kilomètres de frontières depuis la chute du rideau de fer, tandis que Régis Debray dans Éloge des frontières (2010) montre qu’elles permettent de définir des communautés politiques et culturelles en leur sein.

  • Désobéir pour dire non à la soumission

    https://sites.arte.tv/28minutes/fr/frederic-gros-emmanuel-macron-au-vatican-le-retour-en-grace-des-catholiqu
    https://sites.arte.tv/sites/default/files/styles/foundation_seo_social_image/public/atoms/image/20180626/bandeau_site_00000.jpg?itok=eUKxvTiX

    Pour Frédéric Gros, trois raisons devraient pousser l’homme à ne plus accepter l’état actuel du monde : le creusement des inégalités, la détérioration environnementale et l’enrichissement qui se fait au détriment des générations futures. Pourtant, face à cette situation, l’homme ne désobéit pas. Est-ce par conformisme social ? Par soumission économique ? Par une volonté de respect des autorités ?

    Armé des réflexions d’Emmanuel Kant, de Michel Foucault ou encore de La Boétie, ce philosophe et enseignant à Sciences Po a souhaité dresser dans son essai Désobéir une « stylistique de l’obéissance ».

    #obéissance #désobéissance

  • En mathématiques, les filles restent des inconnues - Libération
    http://www.liberation.fr/debats/2018/06/21/en-mathematiques-les-filles-restent-des-inconnues_1660876

    Article déjà mis en lien ici : https://seenthis.net/messages/703974 mais j’ai fait un copier coller pour les personnes qui ne savent pas désactiver javascript vu le paywall de Liberation à partir d’un certain nombre d’articles lus.

    Normale Sup, Polytechnique… Les grandes écoles scientifiques peinent à faire de la place aux filles. Une discrimination insidieuse que certaines vont jusqu’à intégrer. « Libération » a rencontré de jeunes mathématiciennes qui racontent les stéréotypes auxquels elles font face et leur combat pour s’en affranchir.

    Zéro. Aucune fille n’a intégré le département de mathé­­ma­tiques de l’Ecole normale ­supérieure (ENS) de la rue d’Ulm (Paris) l’an dernier. Voilà, un problème réglé. Après la disparition, en 1985, de l’ENS jeunes filles de Sèvres la prédominance des « mâles » n’a cessé de se confirmer.

    Elles s’appellent Edwige, Lola, ­Sonia, Camille, elles ont réalisé un parcours sans faute, mais pas sans douleurs, pour s’imposer parmi les meilleurs élèves de la filière des mathématiques. Elles ont intégré l’une des ENS ou l’Ecole polytechnique, et racontent les petites vexations et les grands préjugés, les révoltes et les victoires remportées contre le mécanisme qui voudrait qu’elles n’aient rien à faire dans le domaine des mathématiques, qu’elles soient appliquées ou fondamentales.

    Il y a d’abord Camille (2), une trajectoire rectiligne à « Stan », Stanislas un établissement privé situé dans le VIe arrondissement de Paris, du collège à la prépa. Brillante, elle a le choix des meilleurs  : l’ENS et Polytechnique, l’X. Elle choisit la seconde. Neuf filles sur 30 élèves en terminale S, neuf sur 50 en math sup, et quatre sur 42 en math spé, sans que cela suscite d’interrogation  : « Je n’ai jamais senti de différence de traitement entre filles et garçons. »

    Pourtant Edwige, Sonia et Lola ont une autre vision des choses. A des degrés différents, elles racontent une discrimination palpable ou impalpable qui leur donne des envies de combattre pour l’égalité des filles et des garçons en maths.

    Egaux devant Pythagore

    A la veille de l’été 2017, Lola était aussi admise à l’ENS, rue d’Ulm d’où sont sorties toutes les médailles Fields de France à l’exception d’Alexandre Grothendieck. Elle préférera elle aussi le campus de l’X à Palaiseau. Au collège à Vanves, celui que les contourneurs de carte scolaire évitent et où elle a voulu rester, Lola est dans les meilleures élèves. Les 17, succèdent aux 19, sans efforts particuliers. Filles ou garçons, il n’y a pas de différence. Tous égaux devant Pythagore.

    Bonne élève, elle intègre le lycée Louis-le-Grand en seconde. Les notes chutent, mais elle bosse et intègre « la » 1ère S1, et la TS1, « la » terminale S qui donne accès à « la » classe prépa qui permettra d’accéder à l’une des quatre ENS (Ulm, Rennes, Lyon, Paris-Saclay, l’ex-Cachan) ou à l’X. En TS1, la parité est respectée 50 % de filles 50 % de garçons.

    C’est ensuite que tout se complique. Lola se voit reléguée tout au fond la classe  : 35e, 35e, 36e aux trois premiers contrôles. En janvier, elle doit choisir entre faire autre chose ou s’accrocher. A la maison, son père ne cesse de lui répéter que les filles sont meilleures que les garçons. Le stéréotype qui veut que les mathématiques ne sont pas faites pour les filles tourne dans l’autre sens. « J’ai repris les bases, repassé les programmes de 1ère et de TS, quand le professeur était déjà passé au programme de math sup. » C’est à ce moment qu’elle découvre le sexisme très ordinaire qui traîne dans les couloirs d’un grand lycée parisien. « On pardonne très facilement aux garçons de ne faire que des maths. Ils peuvent s’enfermer dans le travail, ne faire que bosser, passer de l’internat aux salles de cours en peignoir, en survêtement ou même en pyjama. C’est presque normal. On dira  : “C’est un bosseur”. Des filles, on attend autre chose. Il faut qu’elles soient sympathiques, qu’elles préparent le buffet pour les fêtes, qu’elles s’investissent dans la vie de la classe. Elles doivent “jouer les princesses” et passer du temps à se préparer. On perd un temps fou, et pendant ce temps, les garçons bossent et passent devant. Moi, je descendais comme j’étais, et tant pis si ça provoquait des remarques », s’agace Lola qui refuse la division surhommes et princesses, nouvelle version du « Sois belle et tais toi  ! ». Elle remonte à la 17e place et intègre finalement « la » bonne prépa.

    « Travailler dur »

    Sonia raconte un parcours similaire. Elle aussi se dit « ni bonne ni mauvaise » élève, quand les garçons souligneraient la puissance de leur machine cérébrale. Elle aussi échappe aux stéréotypes familiaux, avec une mère anglaise féministe virulente, un père mexicain, l’un et l’autre artistes plasticiens. Après la seconde à Louis-le-Grand, elle voit les garçons lui passer devant sans qu’elle comprenne bien pourquoi. Pas de 1ère S1, pas de TS1, pas de prépa « étoilée ». « On proposait à des garçons moins bien notés que moi d’aller dans les bonnes math sup, et je me suis retrouvée en MP5 [la classe préparatoire qui ne prépare pas aux meilleures écoles, ndlr]. Ça m’a révoltée, et, du coup, je me suis mise à travailler dur. » Elle raconte les perles du sexisme ordinaire en classe prépa  : « Pour une matheuse t’es bonne », sous entendu « t’es mignonne  ! ». « Une fille, enfin elle compte pour une demie. »« Un jour, un garçon fait le décompte des filles en prépa et il ajoute  : “Elle, elle compte pour une demie.” Il fallait la disqualifier parce qu’elle ne faisait pas assez ­attention à son look  ! » L’un des meilleurs élèves de la prépa lancera en cours de philo que la place de la femme est à la maison pour s’occuper des enfants. Plus tard, une fois intégrée l’X, Lola entendra dire en stage qu’elle n’allait pas toute sa vie faire des maths, qu’il fallait songer à se marier et à faire des enfants.

    Le syndrome de la vieille fille allume des clignotants dans tous les sens  : « Le garçon est prêt à s’enfermer dans les études, quand la fille n’a pas de temps à perdre pour trouver un mec. » En dépit des obstacles, elle intégrera l’ENS-Lyon où le sexisme s’atténue peut-être parce que les femmes ont disparu, elles sont quatre sur 40 élèves. Pour décrire un monde où les mâles dominants s’agrègent, elle évoque la salle du concours où se retrouvent les postulants à Polytechnique  : « Un océan de mecs. Là, j’ai senti la différence, ça n’était pas la place pour une fille. »

    Conscience collective

    Edwige partage le constat de Lola et Sonia sur la mise à l’écart ­insidieuse des filles, mais elle veut transformer le discours individuel en une arme collective dans un domaine où la solidarité féminine est presque inexistante. « Les filles ne se voient pas comme les victimes d’un système, la solidarité féminine est inexistante. Chacune pense qu’il s’agit d’un problème individuel. A chacune de trouver la solution, il n’y a pas de sororité, vraiment il n’y a aucune solidarité », estime Edwige qui a choisi l’ENS-Lyon.

    Pour susciter une prise de conscience collective, Edwige organise dans le cadre d’Animath (1) des week-ends « Filles et Maths » avec des rencontres avec des mathéma­ticiennes de métier et des ateliers d’algèbres, de géométrie ou d’arithmétique. Faut-il faire des quotas dans les préparations aux grandes écoles pour les filles  ? « Pourquoi pas  ? La loi ORE (3) a fixé des quotas pour les boursiers, pourquoi pas pour les filles  ? »

    L’idée a été évoquée à l’ENS-Lyon tant le désarroi est grand face à la raréfaction des filles dans le département de mathématiques, admet Emmanuelle Picard, sociologue impliquée dans un groupe d’études mis en place par les ENS pour comprendre l’incompréhensible. Pourquoi les filles représentent 20 % des élèves en prépa, 16 % des candidats au concours MP des ENS, celui qui privilégie les maths, 8 % des admissibles et 5 % des intégrées par concours  ? Et question subsidiaire  : comment remédier à cette situation  ? « La pression sociale, les stéréotypes qui classent, rangent les garçons du côté des chiffres et les filles du côté des lettres tout cela est vrai, mais il faut comprendre ces phénomènes pour comprendre à quel moment les filles s’éliminent », explique la sociologue.

    « Avoir une barbe »  ?

    Rozzen Texier-Picard, mathématicienne et vice-présidente chargée des questions liées à la diversité à l’ENS-Rennes, avoue ne pas avoir trouvé la solution à un problème qu’elle examine depuis plusieurs années  : « Nous avons intégré les matières littéraires, le français et les langues dès l’admissibilité pour le concours 2018, et nous allons voir ce que cela donne », dit-elle sans attendre un bond spectaculaire.

    Elyès Jouini, mathématicien, vice-président de l’université Paris-Dauphine et coauteur de plusieurs études, n’a pas beaucoup plus de certitudes pour expliquer la sexuation des maths. « Beaucoup d’efforts ont été réalisés pour réduire l’écart entre le niveau moyen des filles et des garçons. Mais, quand on regarde le haut du panier, les 5 % qui se trouvent tout en haut de la pyramide, les garçons s’imposent à chaque fois qu’il y a une sélection. Là, les archétypes et les stéréotypes fonctionnent, et quand il s’agit de se présenter à un concours réputé difficile, les garçons iront quand ils ont 12 ou 13, les filles attendront d’avoir 15 ou 16. Prenez un pays comme la Norvège qui a sans doute le plus fait pour effacer les écarts entre femmes et hommes, le biais mathématiques demeure. »

    La situation est-elle désespérée  ? Pas tout à fait. Elyès Jouini rappelle qu’au XVIIIe siècle, l’un des cerveaux les plus brillants de l’Europe s’éclairant à la raison, Emmanuel Kant, estimait que les filles n’étaient pas faites pour les lettres classiques  : « Une femme qui sait le grec est si peu une femme qu’elle pourrait aussi bien avoir une barbe. » Faudra-t-il attendre un siècle ou deux pour que les choses s’arrangent  ? « Si nous voulons maintenir le niveau de l’école française de mathématiques, on ne peut pas se passer de la moitié de la population », constate un mathématicien pressé de voir les choses bouger, sans savoir comment faire. Inutile de porter attention aux explications mettant en cause des différences fondamentales entre les deux sexes, sinon en donnant la parole à un enfant de 5 ans rentrant de l’école  : « Le cerveau des filles ne tourne pas dans le même sens que celui des garçons. »

    Une autre scène vaut la peine d’être racontée. Un matin de juin, les enfants de l’école maternelle de la rue Clauzel à Paris sont déguisés pour fêter la fin de l’année. Toutes les filles sont en princesses, sauf une, habillée en catwoman. Les garçons sont tous en super-héros, sauf un pirate. Et un tigre pas du tout méchant.
    (1) Animath est une association qui cherche à promouvoir les mathématiques auprès des jeunes.
    (2) Nous ne parlerons à aucun moment du physique des jeunes femmes que nous avons rencontrées, pour ne pas avoir à aborder cette question qui voudrait qu’une fille qui fait des maths sacrifie sa féminité.
    (3) Loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants.

    Philippe Douroux , Magalie Danican

    Par contre je ne suis pas d’accord avec l’argument qui cite Kant et les lettres classiques. Tout le monde le sait, le problème ce ne sont pas les maths en eux mêmes mais le fait que c’est la matière qui est considérée comme un marqueur d’excellence et de sélection. Donc si les maths cessent d’être cet outil de sélection, il n’y aura aucun souci et les filles deviendront aussi bonnes en maths que les garçons pendant que la matière qui sera devenue matière marqueur d’excellence, la géographie par exemple, sera squattée par les garçons. Ça ne voudra absolument pas dire que l’éducation mettre filles et garçons sur le même pied d’égalité. C’est ce qui s’est passé avec les humanités qui jouaient ce rôle avant les maths, raison pour laquelle Kant évoque les lettres classiques.

    #mathématiques #sexisme #orientation #éducation #discriminations #école #filles #genre

    • Je sais plus ou j’avaiis lu ca et je vais chercher ou c’étais, mais le pbl des choix d’orientations n’est pas lié au fait que les filles ne vont pas en sciences, maths, mais ce déséquillibre serait lié au fait que les garcons desertent les secteurs féminisés. Les filles font des maths, mais les garçons evitent totalement les branches féminisées pour ne pas passer pour féminins. Il ne manque pas de programmes pour inciter les filles a faire des etudes de math, mais des programmes pour inciter les garçons à choisir les fillières féminisées (qui sont méprisées e dévalorisées parceque féminisées, avec tres faibles salaires et progressions de carrières) c’est ca dont on aurais besoin.

      edit c’est ici : https://seenthis.net/messages/704072

      [Les garçons] se retrouvent de manière très concentrée en S (69 %) alors que les filles se répartissent dans les 3 séries de manière plus équilibrée et choisissent préférentiellement la section S, à l’opposé de ce que l’on pense généralement (…). Contrairement aux injonctions qui leur sont faites, les filles n’ont pas, du moins au niveau de l’enseignement secondaire général, un problème de diversification des choix d’#orientation.

      […] C’est l’observation de la répartition des filles et des garçons, pas seulement la proportion des filles dans les filières, qui révèle le jeu du #genre, c’est-à-dire l’impact du système féminin/masculin sur les orientations des deux sexes. C’est cela qui doit nous poser question et non pas seulement le constat de la moindre orientation des filles vers les sciences et techniques. On devrait effectivement se demander d’une part, pourquoi les filles sont attirées par les secteurs du soin, de l’éducation, du social et, d’autre part, pourquoi l’absence des garçons dans ces filières et métiers ne fait pas problème.

      […] Le survol rapide que l’on vient d’en faire [des politiques de promotion de l’égalité] pour les quarante dernières années révèle qu’il est quasi exclusivement question de l’orientation des filles vers les sciences et techniques. On ne se préoccupe pas réellement du fait que la division sexuée de l’orientation touche aussi les choix des garçons, comme nous l’avons souligné plus haut. L’absence des garçons des filières littéraires et sociales, du soin et de l’éducation, ne fait pas question, elle n’est pas une préoccupation sociale et politique. Par ailleurs, ces politiques concentrent beaucoup d’énergie sur l’information, comme si l’absence des filles dans les filières visées provenait essentiellement de leur manque d’informations objectives sur ces secteurs. Enfin, on semble croire que la diversification des choix d’orientation des filles produira de facto l’égalité des sexes en matière de formation et d’emploi. Il suffirait que les filles soient présentes pour que disparaissent les inégalités entre sexes… L’aveuglement, aux rapports sociaux de sexes qui régissent la société, donc l’école et le travail, laisse perplexe.

      Comme d’habitude on rend les filles et les femmes responsables des discriminations qu’elles subissent et jamais on ne dit ni ne fait rien qui puisse vaguement incommodé le moindre garçon ou homme.

  • A Londres, Bernard-Henri Lévy seul sur scène pour stopper le Brexit
    https://www.lemonde.fr/referendum-sur-le-brexit/article/2018/06/05/a-londres-bernard-henri-levy-seul-sur-scene-pour-stopper-le-brexit_5309623_4

    Y aurait-il un début de ras-le-bol parmi les correspondants du Monde ? Un test pour voir jusqu’où il est possible de remettre en cause les fondamentaux du Monde (contester l’assimilation de la critique d’Israël à de l’antisémitisme, quand même !) ? Ou une candidature à un poste dans un placard ou prémices d’un contentieux sur la liberté du choix de «  l’angle  ».

    Ce qui sûr, c’est que je serais partisan du maintien du Royaume-Uni dans l’Union, je serais inquiet au vu des brillants résultats des engagements précédents du héros : Yougoslavie, Libye, Ukraine, Kurdistan, …

    Dans un monologue de près de deux heures, le Français a crié son amour à l’Angleterre et à l’Europe, au Cadogan Hall. Un hymne miné par les outrances habituelles de BHL.
    […]
    Entre deux photos rappelant complaisamment ses engagements passés, Bernard-Henri Lévy (membre du conseil de surveillance du Monde) pontifie sur les fondamentaux du continent : Zeus enlevant Europe, Emmanuel Kant, un très long baiser sur une piazza italienne, mais aussi Primo Lévi et Lampedusa. Il n’est pas sûr que son accent anglais à la Maurice Chevalier serve le grand sérieux de son propos. D’autant que le message, échevelé, entrecoupé d’appels téléphoniques et de textos censément comiques, n’est pas limpide.
    […]
    Il pousse la conviction jusqu’à plonger tout habillé dans une baignoire pleine, par désespoir sans doute, avant une ultime envolée lyrique pour l’élection au suffrage universel d’un président de l’Europe et le remplacement des ponts sans âme figurant sur les coupures d’euros, par les visages d’Edmund Husserl, Anne Frank et Zinédine Zidane.

    Seul en scène, le comédien d’un soir se démène, mais son égocentrisme, ses outrances et ses raccourcis affaiblissent son hymne à l’Europe. Réduire Jeremy Corbyn, le chef du Parti travailliste, à son supposé « antisémitisme » ne brille pas par subtilité sur la réalité sociale du Royaume-Uni actuel. Clouer au même pilori les « islamo-fascistes » et les « brexiters » (partisans du Brexit) non plus. Et la supplique pour stopper le Brexit lancée tranquillement au cœur de Chelsea fait penser à ce que pourrait être un meeting antiraciste en plein Saint-Germain-des-Prés. Dommage, car la dénonciation de l’inquiétante éruption de nationalisme anglais que représente le Brexit, du piège qu’il tend à toute l’Europe, vaut mieux que cet étalage autocentré et brouillon.

  • Noam Chomsky et la stupidité institutionnelle
    http://www.les-crises.fr/noam-chomsky-et-la-stupidite-institutionnelle

    Emmanuel Kant a dit que notre expérience dépend non seulement de la nature du monde extérieur mais aussi de notre appareil perceptif et de nos catégories mentales. Il y a le monde phénoménal, le monde tel qu’on en a l’expérience, et il y a le monde nouménal, le monde extérieur tel qu’il est en réalité, et que l’on ne peut jamais pleinement connaître.

    Le projet de Chomsky, sous certains rapports fait penser à celui de Kant. Il étudie de quelle façon on obtient notre connaissance du monde #social et du monde #politique. Le monde étant très vaste, il n’est pas possible d’être témoin direct de la plupart des événements qui s’y déroulent, et à la place on doit les découvrir par des intermédiaires, sous une forme condensée. C’est parce qu’ils sont des intermédiaires qu’on les appelle des #médias. Mais avant de diffuser des informations, ils doivent décider de ce qui mérite d’être diffusé, et de quelle façon. Dans les régimes autoritaires ce processus est soumis à une #censure qui est souvent flagrante et parfois brutale.

    • La stupidité se présente sous plusieurs formes. Je voudrais dire quelques mots d’une forme particulière que je crois être la plus inquiétante de toutes. On peut l’appeler la « stupidité institutionnelle ». C’est une sorte de stupidité entièrement rationnelle dans le cadre où elle s’exerce, mais le cadre lui-même s’étend du grotesque au virtuellement dément.

      Au lieu d’essayer de l’expliquer, il est probablement plus utile d’évoquer deux ou trois exemples pour illustrer ce que je veux dire. Il y a trente ans, au début des années 80 – les premières années de Reagan – j’ai écrit un article intitulé « la rationalité du suicide collectif ». C’était au sujet de la stratégie nucléaire, et de comment des gens parfaitement intelligents étaient en train de définir un projet de #suicide collectif d’une façon qui était raisonnable dans leur cadre d’analyse géostratégique.

      J’ignorais à l’époque à quel point la situation était mauvaise. Nous avons depuis beaucoup appris. Par exemple, un numéro récent du Bulletin of Atomic Scientists présente une étude des fausses alarmes lancées par les systèmes de détection automatique que les États-Unis et d’autres utilisaient pour détecter les attaques de missiles et d’autres menaces pouvant être perçues comme une attaque nucléaire. L’étude porte sur les années 1977 à 1983 et on estime que durant cette période il y eut un minimum d’environ 50 fausses alarmes, et au plus d’environ 255. Il s’agit d’alarmes auxquelles une intervention humaine a mis fin, prévenant le désastre à quelques minutes de l’irréparable.

      Il est plausible de supposer que rien de fondamental n’a changé depuis. Mais en réalité, la situation a empiré – ce que je n’avais pas non plus compris à l’époque de la rédaction du livre.

      En 1983, à peu près au moment où je l’écrivais, il y avait une très grande peur de la guerre. C’était dû en partie à ce que l’éminent diplomate George Kennan appelait à l’époque « les caractéristiques indubitables de la marche vers la guerre – et rien d’autre ». Elle a été initiée par des programmes que l’administration Reagan a entrepris dès l’entrée en fonctions de Reagan. Tester les défenses russes les intéressait, ils ont donc simulé des attaques aériennes et navales sur la Russie.

      C’était une période de grande tension. Des missiles Pershing américains avaient été installés en Europe occidentale, ce qui leur donnait un temps de vol jusqu’à Moscou de cinq à dix minutes. Reagan a aussi annoncé son programme de « guerre des étoiles », compris par les stratèges des deux camps comme une arme de première frappe. En 1983, l’Opération Able Archer a inclus un entraînement qui « a amené les forces de L’OTAN à une simulation grandeur nature de lancement d’armes nucléaires ». Le KGB, nous l’avons appris d’archives récemment publiées, a conclu que les forces américaines avaient été placées en état d’alerte, et auraient même commencé le compte à rebours.

      Le monde n’a pas tout à fait atteint le bord de l’abîme nucléaire ; mais en 1983, sans en être conscient, il en a été terriblement près – certainement plus près qu’à tout autre moment depuis la Crise cubaine des Missiles de 1962. Les dirigeants russes ont cru que les États-Unis préparaient une première attaque, et qu’ils auraient bien pu avoir lancé une frappe préventive. Je cite en fait une analyse récente faite à un haut niveau des services secrets américains, qui conclut que la peur bleue de la #guerre a été réelle. L’analyse indique qu’au fond d’eux-mêmes, les russes gardaient l’ineffaçable mémoire de l’Opération Barberousse, le nom de code allemand pour l’attaque de 1941 d’Hitler sur l’Union soviétique, qui a été le pire désastre militaire de l’histoire russe et a été bien près de détruire le pays. L’analyse américaine dit que c’était exactement ce que la situation évoquait pour les russes.

      C’est déjà assez grave, mais il y a encore pire. Il y a un an, nous avons appris que en plein milieu de ces événements menaçant le monde, le système de première alerte de la Russie – semblable à celui de l’Ouest, mais beaucoup plus inefficace – avait détecté l’entrée d’un missile lancé des États-Unis et avait lancé l’alerte de plus haut niveau. Le protocole pour les militaires soviétiques consistait à riposter par une frappe nucléaire. Mais l’ordre doit passer par un être humain. L’officier de service, Stanislav Petrov, décida de désobéir aux ordres et de ne pas transmettre l’avertissement à ses supérieurs. Il a reçu une réprimande officielle. Mais grâce à son manquement au devoir, nous sommes maintenant en vie pour en parler.

      Nous avons connaissance d’un nombre énorme de fausses alertes du côté des États-Unis. Les systèmes soviétiques étaient encore bien pires. Mais maintenant les systèmes nucléaires ont été modernisés.

      Le Bulletin des Scientifiques atomistes possède une célèbre Horloge de la fin du monde et ils l’ont récemment avancée de deux minutes. Ils expliquent que l’horloge « affiche maintenant trois minutes avant minuit parce que les dirigeants internationaux ne remplissent pas le plus important de leurs devoirs, assurer et préserver la santé et la vitalité de la civilisation humaine. »

      Individuellement, ces dirigeants internationaux ne sont certainement pas stupides. Cependant, dans leur fonction institutionnelle, leur stupidité a des implications mortelles. Si l’on regarde rétrospectivement depuis la première – et unique jusqu’ici – attaque atomique, cela semble un miracle que nous en ayons réchappé.

      La destruction #nucléaire est une des deux menaces majeures et très réelles de notre survie. La deuxième, bien sûr, est la catastrophe #environnementale.

      Il existe au sein de PricewaterhouseCoopers une équipe reconnue de services professionnels qui vient tout juste de publier son étude annuelle sur les priorités des PDG. Au sommet de la liste se trouve la sur-réglementation. Le rapport indique que le #changement_climatique n’apparaît pas dans les dix-neuf premières. Encore une fois, sans aucun doute, les chefs d’entreprise ne sont pas des individus stupides. On peut supposer qu’ils gèrent leurs entreprises intelligemment. Mais la #stupidité_institutionnelle est colossale, littéralement c’est une menace pour la survie des espèces.

      On peut remédier à la stupidité individuelle, mais la stupidité institutionnelle est beaucoup plus résistante au changement. A ce stade de la société humaine, elle met réellement en danger notre survie. C’est pourquoi je pense que la stupidité institutionnelle doit être une préoccupation de première importance.

      #climat #psychologie_sociale #pouvoir

    • plus les relations interindividuelles sont rigides, plus le comportement de la totalité apparaîtra, à ses éléments individuels, comme doté d’une dynamique propre, qui échappe à leur contrôle. [...]

      On fait, donc, face à une situation paradoxale. Lorsque les individus sont sous une influence mutuelle, l’avenir du système est prévisible pour les observateurs extérieurs, alors que les individus se sentent impuissants à en infléchir l’orientation. Le comportement d’ensemble ne résulte que de l’intégration des réactions individuelles, mais le tout semble s’autonomiser et son évolution se figer en destin.

      http://seenthis.net/messages/255287

  • La civilisation des mœurs selon Norbert Elias par Alain Bihr

    http://www.revue-interrogations.org/La-civilisation-des-moeurs-selon

    Au début de la seconde partie de La dynamique de l’Occident (Élias, 1975) dans laquelle il développe son « Esquisse d’une théorie de la civilisation », il rapporte ainsi la civilisation et les transformations de l’économie psychique qu’elle implique au processus général de développement des rapports capitalistes de production.

    [...]

    Mais le constat s’arrête là et Élias n’identifie pas la nature et l’origine de cette voix intérieure, de ce sentiment du devoir à accomplir inconditionnellement, comme un « impératif catégorique » selon Emmanuel Kant : c’est tout simplement l’expression de ce fétichisme de la subjectivité juridique et morale qui se trouve au cœur des rapports contractuels qui constituent la trame même des ’affaires’ bourgeoises.

    En deçà des « rapports contractuels » propres aux « affaires bourgeoises », il y a la forme de vie constituée par la nécessité objective - et pourtant socialement et historiquement située - de reproduire le capital (la valorisation tautologique de la valeur) et donc de s’activer sous la contrainte d’une norme de productivité que personne n’édicte mais que tout le monde participe à faire émerger. Le sujet kantien (ou moderne) n’est une forme à portée universelle que dans un contexte historique et social particulier...