Frédéric Chatillon n’est-il qu’un conseiller en musicologie de Marine Le Pen ? - L’Express
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Frédéric Chatillon est toujours présent dans la campagne de 2017 de Marine Le Pen.
Facebook/Frédéric Chatillon
Mis en examen le 15 février dans l’affaire des comptes de campagne du FN, l’ancien dirigeant du GUD et prestataire de services du Front national semble toujours jouer un rôle important, qu’il n’entend pas détailler, dans la campagne du parti.
« Animateur d’atelier mixologie et conseiller en musicologie, spécialité Pino d’Angio », un chanteur populaire italien. Quand on lui demande quel rôle il joue dans la campagne présidentielle de Marine Le Pen pour la présidentielle, Frédéric Chatillon esquive. « Je suis également titulaire d’un doctorat sur Eros Ramazzotti », ajoute-t-il, quand on insiste. L’ami des années fac de Marine Le Pen, ancien pilier du très radical GUD et prestataire de services du FN depuis le milieu des années 90 ne semble pas enclin à en dire vraiment davantage.
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Il faut dire que les juges ne semblent pas partager son humour. Et en matière de mixologie, c’est plutôt le cocktail détonnant d’amitiés politiques et de business juteux qui semble être sa spécialité. Soupçonné d’avoir surfacturé, à la tête de la société Riwal, des « kits de campagne » obligatoires aux candidats aux législatives, il a été renvoyé en correctionnelle pour faux, escroqueries, abus de biens sociaux.
Bien visible aux meetings de Marine Le Pen
Il a aussi été mis en examen le 15 février, pour abus de biens sociaux dans le cadre d’une information judiciaire ouverte le 9 novembre 2016 par le parquet de Paris pour « escroqueries » et « abus de bien sociaux » lors des élections de 2014 (municipales, européennes et sénatoriales) et de 2015 (départementales). Les juges d’instruction soupçonnent Riwal, longtemps prestataire principal de la communication électorale frontiste, d’avoir accordé un crédit au FN via Jeanne, un micro-parti, soupçonné par la justice d’être une coquille vide abritant une société commerciale. Or, les personnes morales n’ont pas le droit de contribuer au financement des partis politiques. Une autre enquête, encore au stade préliminaire, a été ouverte début novembre concernant les régionales de 2015.
Bref, à chaque scrutin, le nom sulfureux de Frédéric Chatillon apparaît dans le radar de la justice. Pas de quoi faire de l’intéressé un pestiféré au parti. Lors des « Estivales » de Fréjus en septembre 2016, il s’était laissé voir publiquement jusqu’à aller en salle de presse. Rebelote aux « Assises présidentielles » de Lyon les 4 et 5 février où Frédéric Chatillon était encore présent, ainsi que son acolyte Nicolas Crochet, un expert-comptable lui aussi mis en examen dans le volet 2012 de l’affaire Jeanne.
Un contrôle judiciaire qui s’impose à lui
A Lyon au début du mois, Frédéric Chatillon assumait encore auprès de L’Express « vérifier des choses purement techniques » dans la campagne. Sans plus de précisions. A Fréjus, en septembre, se livrant à quelques journalistes, il indiquait qu’il pourrait être « salarié » en son « nom propre » par Marine Le Pen et donner des « conseils sur la forme, sur la technique, sur la cohérence web/print, sur l’adaptation des supports, sur les livraisons dans les temps ».
Frédéric Chatillon, à l’antenne de BFMTV (Capture d’écran).
Frédéric Chatillon, à l’antenne de BFMTV (Capture d’écran).
Dailymotion/BFMTV
C’est que Frédéric Chatillon n’est pas libre de faire ce qu’il veut. Un contrôle judiciaire lui interdit « de poursuivre, en tant que dirigeant de la société Riwal ou Erer [la société-mère de Riwal, détenue par Frédéric Chatillon], quelque relation commerciale que ce soit, directe ou indirecte, avec le FN dans le cadre des élections ». « Personne n’est dupe. Il détourne les obligations du contrôle judiciaire mais reste formellement dans les clous » en n’agissant pas officiellement au nom de Riwal, estimait en septembre une source proche de l’enquête. « Il joue avec le feu mais sait très bien être borderline. »
« Ce sont toujours les mêmes qui sont en piste »
Un jeu avec le feu qui commence à donner quelques sueurs froides en interne. « On ne nous les montre pas mais nous savons que ce sont toujours les mêmes qui sont en piste sur le matériel », glisse à L’Express un membre du comité stratégique de Marine Le Pen au sujet de Frédéric Chatillon et de son proche, Axel Loustau, trésorier de Jeanne. Ulcéré par le rôle présumé que l’ancien « gudard » joue toujours dans la mécanique FN, ce cadre dit avoir « engueulé » Marine Le Pen à ce sujet. « Elle m’a répondu : ’c’est un fournisseur’ », raconte-t-il. Si la candidate du FN n’entend pas se passer de lui, « c’est parce qu’elle ne veut pas donner l’air de reculer ». « Il a prouvé un certain nombre de compétences, ça veut dire qu’on a besoin de lui », justifie un autre cadre frontiste, proche, lui, de Frédéric Chatillon.